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Fiche révision
La cousine Bette : LA 4 (chap 49)
|Introduction
HonorédeBalzac,néen1799etdécédéen1850,estundesplusgrandsécrivainsduXIXème
siècle.Ceromancier,nouvellisteetessayistefrançaisestl'auteurde91œuvresréuniesdans
sonrecueilintituléLaComédieHumaine.Parmicelui-cifiguredegrandchef-d’œuvretelque
Le Père Goriot ou Le Colonel Chabert. Ce recueil est souvent comparé à une étude
sociologique car elle rassemble plus de 2 500 personnages, dont 500 reviennent dans
plusieursromans.Néanmoinslaviedel'écrivainauraétérude.Aprèsdesétudesjuridiques
désintéressées,ilvouluts'essayerdanslalittérature.Maissesparents,opposésàcetteidée,
firenttoutleurpossiblepourl'endissuaderjusqu'àdemanderàuncritiquedel'humilier.Il
réussiratoutdemêmeàpublieret,aprèsquelquesessaisratés,commençaàêtreconnut.
Aprèslors,ilmenaunevietravailleuseoùilpassesesjournéesàécrirepourrembourserses
dettes.Ilmourrad'épuisementà51ansetendettémaisdansunluxueuxhôtelparticulier.
De plus, son décès ne parvient que quelques mois après son mariage avec Mme Hanska,
avecquiilavaitentretenuuneimportantecorrespondanceépistolaire.
Parmicesouvrages,unromannomméeLaCousineBette,relatelavengeanced'unefemme
laideetrancunièresursaproprefamilleparisienne.LisbethFischerestnéed'unefamillede
paysan. Sa cousine, Adeline, est une très belle fille qui va être récupéré des champs et
emmenéàParisoùelleapprendralescodesdelanoblesseetseramariéauBaronHulot,un
homme riche mais volage. Adeline n'oublie pas sa cousine et lui offre un poste dans la
couture mais celle-ci anéantie tout et sa jalousie n'en diminue pas. Néanmoins Lisbeth
réussitàavoiruneviemodesteetdécouvreunjeunepolonais,Wenceslas,qu'elleprotègeet
aimejalousement.Maiscelui-cisemariàHortense,lafilled'Adeline.Lisbethnerêvealors
quedevengeancequ'ellevaréussiràdissimuler.Toutaulongduroman,ellelametenplace
méthodiquement et avec l'aide d'une amie, madame Marneffe, elle appauvrit le mari
d'Adelineetdivisesafamille.
Le passage étudié se situe vers le milieu du roman. Le baron brésilien Henri Montes de
Montejanos vient de revoir Valérie Marneffe, ce qui préoccupe fortement l’un de ses
amants;CélestinCrevel.Celui-ci,n’aprisValériepourmaîtresseuniquementpoursevenger
dubaronHulot,qui,lui-mêmeluiavaitprissonancienneamanteJosépha.Danscettescène,
CrevelvasevoirêtreculpabiliserparValériequiluireprochedenepasl’aimerassez,etde
nepasluioffrirassez.Crevel,audépartvenupours’expliquéausujetdubrésilien,déshérite
safilleetoffrefinalementl’intégralitédesafortuneàValérie.Ilobtientenéchange,ledroit
dedévoileràHulotlavéritéetdel’accablerdepreuves.
MELLETClémentetMINARDMattéo
|Texte
L.A.4.XLIX.Deuxièmescènedehautecomédieféminine
―Parlezbas!―quemevoulez-vous?ditValériesurdeuxtonsenregardantCrevelavecun
air où la hauteur se mêlait au mépris. En recevant ce regard hautain, Crevel, qui rendait
d’immensesservicesàValérieetquivoulaits’entarguer,redevinthumbleet
―CeBrésilien...Crevel,épouvantéparleregardfixeetméprisantdeValérie,s’arrêta.
―Après?...dit-elle.
―Cecousin...
―Cen’estpasmoncousin,reprit-elle.C’estmoncousinpourlemondeetpourmonsieur
Marneffe. Ce serait mon amant, que vous n’auriez pas un mot à dire. Un boutiquier qui
achèteunefemmepoursevengerd’unhommeestau-dessous,dansmonestime,decelui
quil’achèteparamour.Vousn’étiezpaséprisdemoi,vousavezvuenmoilamaîtressede
monsieur Hulot, et vous m’avez acquise comme on achète un pistolet pour tuer son
adversaire.J’avaisfaim,j’aiconsenti!
―Vousn’avezpasexécutélemarché,réponditCrevelredevenantcommerçant.
― Ah ! vous voulez que le baron Hulot sache bien que vous lui prenez sa maîtresse, pour
avoirvotrerevanchedel’enlèvementdeJosépha...Riennemeprouvemieuxvotrebassesse.
Vous dites aimer une femme, vous la traitez de duchesse, et vous voulez la déshonorer ?
Tenez,moncher,vousavezraison:cettefemmenevautpasJosépha.Cettedemoiselleale
courage de son infamie, tandis que moi je suis une hypocrite qui devrais être fouettée en
place publique. Hélas ! Josépha se protège par son talent et par sa fortune. Mon seul
rempart, à moi, c’est mon honnêteté ; je suis encore une digne et vertueuse bourgeoise ;
maissivousfaitesunéclat,quedeviendrai-je?Sij’avaislafortune,encorepasse!Maisj’ai
maintenanttoutauplusquinzemillefrancsderente,n’est-ce
― Beaucoup plus, dit Crevel ; je vous ai doublé depuis deux mois vos économies dans
l’Orléans.
― Eh ! bien, la considération à Paris commence à cinquante mille francs de rente, vous
n’avez pas à me donner la monnaie de la position que je perdrai. Que voulais-je ? faire
nommerMarneffeChefdebureau;ilauraitsixmillefrancsd’appointements;ilavingt-sept
ans de service, dans trois ans j’aurais droit à quinze cents francs de pension, s’il mourait.
Vous,comblédebontésparmoi,gorgédebonheur,vousnesavezpasattendre!Etceladit
aimer!s’écria-t-elle.
―Sij’aicommencéparuncalcul,ditCrevel,depuisjesuisdevenuvotretoutou.Vousme
mettezlespiedssurlecœur,vousm’écrasez,vousm’abasourdissez,etjevousaimecomme
jen’aijamaisaimé.Valérie,jevousaimeautantquej’aimeCélestine!
Pour vous, je suis capable de tout... Tenez ! au lieu de venir deux fois par semaine rue du
Dauphin,venez-ytrois.
―Rienquecela!Vousrajeunissez,moncher...
― Laissez-moi renvoyer Hulot, l’humilier, vous en débarrasser, dit Crevel sans répondre à
cetteinsolence,n’admettezplusceBrésilien,soyeztouteàmoi,vousnevousenrepentirez
MELLETClémentetMINARDMattéo
pas.D’abord,jevousdonneraiuneinscriptiondehuitmillefrancsderente,maisviagère;je
nevousenjoindrailanue-propriétéqu’aprèscinqansdeconstance...
―Toujoursdesmarchés!lesbourgeoisn’apprendrontjamaisàdonner!Vousvoulezvous
faire des relais d’amour dans la vie avec des inscriptions de rentes ?... Ah ! boutiquier,
marchanddepommade!tuétiquètestout!Hectormedisaitqueleducd’Hérouvilleavait
apportétrentemillelivresderenteàJoséphadansuncornetàdragéesd’épicier!jevauxsix
fois mieux que Josépha ! Ah ! être aimée ! dit-elle en refrisant ses anglaises et allant se
regarderdanslaglace.Henrim’aime,ilvoustueraitcommeunemoucheàunsignedemes
yeux ! Hulot m’aime, il met sa femme sur la paille. Allez, soyez bon père de famille, mon
cher. Oh ! vous avez, pour faire vos fredaines, trois cent mille francs en dehors de votre
fortune,unmagotenfin,etvousnepensezqu’àl’augmenter...
―Pourtoi,Valérie,carjet’enoffrelamoitié!dit-ilentombantàgenoux.
―Eh!bien,vousêtesencorelà!s’écrialehideuxMarneffeenrobedechambre.Quefaitesvous?
―Ilmedemandepardon,monami,d’unepropositioninsultantequ’ilvientdem’adresser.
Ne pouvant rien obtenir de moi, monsieur inventait de m’acheter... Crevel aurait voulu
descendredanslacaveparunetrappe,commecelasefaitauthéâtre.
―Relevez-vous,moncherCrevel,ditensouriantMarneffe,vousêtesridicule.Jevoisàl’air
deValériequ’iln’yapasdedangerpourmoi.
―Vatecoucheretdorstranquille,ditmadameMarneffe.
―Est-ellespirituelle?pensaitCrevel,elleestadorable!ellemesauve!QuandMarneffefut
rentré chez lui, le maire prit les mains de Valérie et les lui baisa en y laissant trace de
quelqueslarmes.
—Toutentonnom!dit-il.
— Voilà aimer, lui répondit-elle bas à l’oreille. Eh ! bien, amour pour amour. Hulot est en
bas,danslarue.Cepauvrevieuxattend,pourvenirici,quejeplaceunebougieàl’unedes
fenêtresdemachambreàcoucher;jevouspermetsdeluidirequevousêtesleseulaimé;
jamais il ne voudra vous croire, emmenez-le rue du Dauphin, donnez-lui des preuves,
accablez-le;jevouslepermets,jevousl’ordonne.Cephoquem’ennuie,ilm’excède.Tenez
bienvotrehommerueduDauphinpendanttoutelanuit,assassinez-leàpetitfeu,vengezvous de l’enlèvement de Josépha. Hulot en mourra peut-être ; mais nous sauverons sa
femmeetsesenfantsd’uneruineeffroyable.MadameHulottravaillepourvivre!...
— Oh ! la pauvre dame ! ma foi, c’est atroce ! s’écria Crevel chez qui les bons sentiments
naturelsrevinrent.
—Situm’aimes,Célestin,dit-elletoutbasàl’oreilledeCrevelqu’elleeffleuradeseslèvres,
retiens-le,oujesuisperdue.Marneffeadessoupçons,Hectoralaclefdelaportecochèreet
compte revenir ! Crevel serra madame Marneffe dans ses bras, et sortit au comble du
bonheur ; Valérie l’accompagna tendrement jusqu’au palier ; puis, comme une femme
magnétisée,elledescenditjusqu’aupremierétage,etelleallajusqu’aubasdelarampe.
— Ma Valérie ! remonte, ne te compromets pas aux yeux des portiers... Va, ma vie et ma
fortune,toutestàtoi...Rentre,maduchesse!
MELLETClémentetMINARDMattéo
|Analyse
Pendantcettescène,nouspouvonsreleverunedissymétrieauniveaududialogueentreles
deuxpersonnages.Eneffet,Crevelneditquequelquescourtesrépliques,ilest
systématiquementinterrompuparValérie,ouilsesoumetlui-mêmeàcettedernière,lui
laissantainsilalibertédes’exprimeretdel’accablerd’accusations.Letextecommencepar
ladominationdeValérie,fixantletonavecl’impératif,etsoumettantd’unseulregardson
amantCrevel.ValériereprocheàCrevellefaitdelaprendrepourunobjetdevengeance,le
brésilienestdoncprioritaire.Crevelrevientalorsàsoncôtécommerçant,enaccusant
ValériedenepasavoirtoutditàHulot.MaisValérieestintelligenteetselouecommeune
honnêtefemmequin’apasdefortune.Ici,elleestentièrementhypocriteetchercheàfaire
culpabiliserCrevel.Ensuite,Valérie,entantquefemmevénaleluidemandetoujoursplus
d’argent.Crevels’animaliseensedisantle«toutou»deValérie,parconséquent,ilest
nettementsoumisetdévalorisé.Ilavancequ’ilaimeValérieautantquesafilleCélestine,ce
quipourraitparaîtreincestueux.Ensuite,ils’efforcedesedonnerplus,endemandantà
ValériedevenirunefoisdeplusàlarueduDauphin.Ceciestunactedesoumissioncarilest
bientropvieuxpourpouvoirl’assurer.Valérieendemandealorsplus,etCélestins’exécute,
illuiprometunerenteviagèresupérieure.Elleluireprochealorssoncôtétropmarchandet
lemenacedelefairetuerparlebaronMontesdeMontejanos.Crevelsoumisàelleluioffre
alorslamoitiédesafortune.M.Marneffearrive,Crevelétantàgenou,Valériesecouvreen
réussissantàrabaisserCrevel.CrevelestsoulagéettrèsémudecequefaitValériepourlui.Il
sedévirilisealorsenpleurantdanslesmainsdeMmeMarneffe.Aprèscela,ildéshéritesa
filleetoffretoutesafortuneàValérie.Pourleremercier,Valérieluiaccordededirelavérité
àHulotetellesefaitpasserpourunesainteendélivrantunefamille,entuantlemari
volage.Crevelestalorsauxanges,illuiréitèresapromesseetlaconsidèremêmecomme
uneduchesse.
Pourrésumer,lascèneestdécoupéeendeuxpartiesmajeures:
-Creveldemandel’exclusivitédeValérie,maiselleluirefusefautedesonattachementàelle
commeunobjet.
-lanégociationdecetteexclusivité.ValériemèneCrevelàluioffrirlatotalitédesafortune
enl’échangedel’annoncedel’exclusivitédeValériepourCrevelàHulot.
Conclusiondecetexte:
Danscepassage,CrevelestnettementsoumisàValérie,ilestdéshumanisé,humilié,il
acceptetoutjusqu’àluioffrirsafortuneentière.Valérieestlesymbolemêmedela
domination,del’hypocrisie,delavénalitéetdelamanipulation.
Ouverturepossible:
Ilseraitintéressantd’étudierlamoraledelaréussitefrauduleusedeV.Marneffe,en
analysantlechapitre122delaCousineBettedanslequelellemeurtdansdesconditions
atrocesetparadoxalesàtoutcequefutsavie.
MELLETClémentetMINARDMattéo
|Textescomplémentaires
EncomparaisonaveclesHautsdeHurlevent,ValérieMarneffepeutêtrerapprochéavec
Heathcliff,carilsonttousdeuxundésirprofonddevengeanceetuneambitionéconomique
trèsimportante.
LecôtélibertindeValérieMarneffepeutêtrecomparéavecMmedeMerteuildansles
LiaisonsdangereusesdeChoderlosdeLaclos.
Enfin,ilestpossibledecomparercetexteavecdenombreuxautresextraitsdelaCousine
Bette,ilestpossibledesuivresondéveloppementdepuissapauvretéjusqu’àsonapogéeet
samort.
MELLETClémentetMINARDMattéo