La responsabilité de l`Etat membre du fait du non respect du droit

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La responsabilité de l`Etat membre du fait du non respect du droit
Master II Droit International et Comparé Université Toulouse 1 -­‐ Capitole LA RESPONSABILITE DE L’ETAT MEMBRE DU FAIT DU NON RESPECT DU DROIT COMMUNAUTAIRE Mémoire – 2008/2009 Par Mlle NIOUTSIKOU Maria-­‐Dimitra Dirigé par Mme OLIVA Anne-­‐Marie Mots clés: Droit administratif, responsabilité, responsabilité sans faute politiques communautaires, Etats membres, application du droit communautaire, responsabilité de la Communauté Européenne, responsabilité du fait des traités , non-­‐respect du droit communautaire, renvoi préjudiciel, Cours suprêmes nationales, validité d’une norme communautaire, droits nationaux communautaires, violation du droit communautaire, responsabilité de l’Etat membre, l’Etat selon le droit international, droit international général et droit communautaire, impact du droit communautaire, compétence juridictionnelle, responsabilité étatique, interprétation des règles de droit, droit constitutionnel, droit commun européen, contrôle juridictionnel communautaire, responsabilité opposé aux Etats membres, Etats membres sous tutelle juridictionnelle communautaire. Résumé : C'est l'arrêt de principe rendu par la Cour dans l'affaire CJCE, 19 novembre 1991, Francovich qui a définitivement consacré le principe selon lequel « les Etats membres sont obligés de réparer les dommages causés aux particuliers par les violations du droit communautaire qui leur sont imputables ». Cet arrêt a permis à la Cour de préciser que le droit à réparation « trouve directement son fondement dans le droit communautaire qui est à l'origine du dommage causé » et que « c'est dans le cadre du droit national de la responsabilité qu'il incombe à l'Etat de réparer les conséquences du préjudice causé ». Ceci est la raison pour laquelle l'Etat membre a l'obligation d'indemniser le préjudice causé par la violation du droit communautaire. C'est la jurisprudence communautaire qui a instauré un régime prétorien de responsabilité des Etats membres pour violation du droit communautaire, cette responsabilité étant conditionnée par des exigences instaurées par le juge communautaire. Par principe, la juridiction communautaire est seule compétente pour connaître des litiges relatifs à la réparation des dommages causés par les institutions des Communautés. Cependant, l'attribution aux autorités nationales de compétences d'exécution du droit communautaire a pour conséquence l'immixtion des compétences nationales. Tout d'abord, l'imputabilité du dommage peut incomber aux autorités nationales dans l'application qu'elles ont faites des normes communautaires. Dès lors, seule la responsabilité des autorités nationales peut être mise en œuvre devant les juridictions nationales. Ensuite, lorsque le dommage est imputable au comportement d'une institution communautaire, les particuliers doivent porter au préalable leur action en responsabilité devant les juridictions nationales. Enfin, l'existence d'une décision individuelle devenue définitive ne fait pas obstacle à la recevabilité de l'action en réparation. Le droit originaire c'est à dire le droit directement issu des traités est d'effet direct dans le droit interne français, ce droit issu des traités est supérieur à la loi interne de la France en application de l'article 55 de la constitution de 1958 selon lequel « les traités et accords régulièrement ratifiés ou approuvés ont, dès leur publication, une 1 Master II Droit International et Comparé Université Toulouse 1 -­‐ Capitole autorité supérieure à celle des lois, sous réserve, pour chaque accord ou traité, de son application par l'autre partie ». Ce droit originaire se distingue du droit dérivé qui découle du droit originaire. Les actes dérivés sont les actes accomplis par les institutions créées par voie de traité et investies par eux du pouvoir de prendre des mesures applicables dans les Etats membres. Dans le cadre de l'Union Européenne, il s'agit des mesures prises par le conseil des ministres et la commission et qui sont, soit des règlements, soit des directives. Le règlement est l'instrument juridique communautaire le plus contraignant. Il a une portée générale et est directement obligatoire dans toutes ses dispositions. Il a un caractère communautaire en ce sens qu'il s'applique de la même manière et intégralement dans tous les Etats membres. Aucun d'entre eux ne peut se réserver le droit de ne l'appliquer que partiellement. La directive est plus particulière que le règlement. En effet, elle cherche à concilier une nécessaire unification communautaire avec les particularismes juridiques nationaux. Il s'agit par cet instrument de tendre à rapprocher les législations nationales et à les harmoniser. En effet, la directive ne lie les Etats membres que dans les objectifs à atteindre. Par contre elle leur laisse le choix de la forme et des moyens à utiliser pour y parvenir. Il ne s'agit pas en l'espèce de remplacer directement les règles nationales mais plutôt de les adapter. Le droit communautaire dérivé a pour sources les décisions des différentes institutions communautaires prises sur la base des traités. Il fallait, dans le contexte particulier de l'architecture européenne, bien définir la nature et la portée des actes communautaires pour construire un ensemble normatif tenant compte du principe selon lequel les réglementations nationales doivent être remplacées par un acte communautaire lorsqu'une réglementation précise et commune à tous les Etats membres est nécessaire. Dans le cas contraire, il faut tenir compte des ordres juridiques nationaux. C'est dans cet état d'esprit qu'a été conçue la hiérarchie de l'ordre juridique dérivé. Dans le cas supérieur les réglementations nationales sont directement remplacées par les normes communautaires : c'est le fait des règlements européens. Il existe ensuite un autre degré dans les dispositions communautaires qui permet aux institutions d'agir indirectement sur les ordres juridiques des Etats membres : c'est l'objet des directives européennes. D'autres mesures seront prises directement à l'égard d'un sujet désigné : ce sont les décisions individuelles. Enfin les recommandations et avis ne contiennent aucune disposition contraignante à l'égard des Etats membres ou des citoyens de la Communauté. Nous nous intéresserons ainsi plus particulièrement aux règlements et aux directives. Le droit originaire est d'effet direct tandis que le droit dérivé qui découle du droit originaire n'a pas toujours connu un effet direct dans le droit interne français. Longtemps hostile à l'entrée du droit communautaire dans le droit français, le juge national dans sa jurisprudence faisait illustration de sa position peu favorable à l'effet direct du droit communautaire. Le 15 mai 1986 est jugée l'affaire Johnston. A cette occasion, l'avocat général Darmon affirme que « constituée d'Etats de droit, la Communauté européenne est nécessairement une Communauté de droit. Sa création, comme son fonctionnement, autrement dit le pacte communautaire, reposent sur l'égal respect par les Etats membres de l'ordre juridique communautaire. » (CJCE, 15 mai 1986, Johnston, aff. 222/84, 1651). Si l'ordre juridique communautaire est autonome vis-­‐à-­‐vis des droits nationaux, il n'en demeure pas moins que son intégration dans les ordres juridiques internes est essentielle à son application. A l'occasion de l'arrêt Costa c/Enel, la Cour de Justice des Communautés Européennes (CJCE) a affirmé la primauté du droit 2 Master II Droit International et Comparé Université Toulouse 1 -­‐ Capitole communautaire sur les droits internes. Des garanties doivent assurer la bonne application du droit communautaire et de ses principes. A l'occasion d'un litige, le juge interne peut en effet observer des tensions entre le droit interne de son pays et le droit communautaire. De même, les institutions de l'Union Européenne dotées de capacités législatives opèrent sous contrôle de la CJCE. Enfin, les citoyens de l'Union Européenne eux-­‐mêmes peuvent faire valoir des règles de droit communautaire devant un juge national (principe d'effet direct). Des procédures spécifiques assurant le respect et l'application du droit communautaire s'appliquent donc aux Etats membres, aux institutions de l'Union Européenne et aux justiciables nationaux. Ces procédures sont essentiellement l'œuvre de la Cour de justice à laquelle est adjoint, depuis 1988, un Tribunal de première instance (TPI). La mise en œuvre du droit communautaire par les Etats membres revêt une importance capitale. En effet, la Communauté ne dispose pas de compétences nécessaires à la mise ne œuvre directement du droit communautaire au sein des Etats membres. Certes, sur le plan normatif, le Conseil, ou la Commission lorsque celui-­‐ci lui délègue des compétences d'exécution, peut se voir attribuer le pouvoir de fixer les modalités d'application de la législation communautaire. Mais la Communauté n'a pas de prise directe sur l'exécution matérielle des règles communautaires et doit compter sur le concours des Etats membres, ceci même dans les domaines entièrement couverts par la législation communautaire. Par exemple, la Communauté dispose d'une compétence exclusive en matière douanière, mais le contrôle des marchandises aux frontières extérieures et la perception des droits de douane sont matériellement effectuées par des fonctionnaires nationaux. De même, la mise en œuvre concrète de la politique agricole commune et la gestion des systèmes de complexes de primes ou de contrôle dépend des autorités nationales. C'est cette application matérielle par les autorités nationales du droit communautaire que l'on qualifie d'administration indirecte. Un système de droit s'apprécie à ses résultats, à son aptitude à régir effectivement le sort de ceux pour qui il a été conçu et s'est développé. A cet égard, le droit communautaire se trouve dans la situation particulière de viser les peuples, mais en passant par les Etats. Cela explique, sans nécessairement la justifier, la complexité des mécanismes de mise en œuvre et de sanction. Le plus souvent, le droit communautaire n'atteint la personne, physique ou morale, qui est sujet de droit communautaire, que par l'intervention médiatrice des Etats membres. L'étude de la mise en œuvre du droit communautaire nous conduira à examiner la diversité des sujets de droit communautaire, avant d'examiner le double niveau de mise en œuvre du droit communautaire. 3 Master II Droit International et Comparé Université Toulouse 1 -­‐ Capitole MEMBER STATES LIABILITY IN CASE OF NON COMPLIANCE WITH EEC LAW Masterthesis – 2008/2009 By Miss NIOUTSIKOU Maria-­‐Dimitra Steered by Miss OLIVA Anne-­‐Marie right for Summary: In establishing in its Francovich judgment the principle of the individuals to claim damages before their national courts for violation by Member States of their Treaty obligations, the Court of Justice has undoubtedly at least from the perspective of the Member States taken a bold decision, which will have numerous consequences for judicial protection both at Community level and that of national law. At the same time this time from the perspective of the Community, one must inevitably wonder why it took more than thirty years for the Court to come to a conclusion which seems to be inherent to the whole legal system of the Community, and in particular to the system of direct applicability and primacy of Community law, as expressed in judgments such as Van Gend & Loos and Costa/ENEL. Until Francovich, the Court had indeed always stressed that if an individual “has suffered damage as a result of the intervention of a Member State in violation of Community law, it will be for the State, as regards the injured party, to take the consequences upon itself in the context of the provisions of national applying the principle of cooperation laid down in Article 5 of the EEC Treaty, which are entrusted with ensuring the legal protection which subjects derive from the direct effect of the provisions of Community law. It has also stressed that in the context of such actions, national procedural rules may not deprive Community law of its effet utile. According to the Court, such a “requirement of judicial control ... reflects a general principle of law which underlines the constitutional traditions common to the Member States [and which] is also laid down in Articles 6 et 13 of the European Convention for the protection of Human Rights and Fundamental Freedoms of 4 November 1950. In order to guarantee the rights resulting from the Community legal order, it is not sufficient that Member States provide possibilities of action before their national courts, it is also necessary those such possibilities “be such as to guarantee real and effective judicial protection”. The Court indeed even went so far as to stress that any internal rule ‘which has the effect of making it virtually impossible or excessively difficult” to secure the obtainment of damages is contrary to Community law. The principle that States are liable for damages caused to third parties furthermore was also recognized in international law. Thus, it is clear that the principles of the Francovich judgment although never as clearly expressed before by the EC Court of Justice were in fact inherent to Community law even before that judgment. The fact that the Francovich judgment does not entail a fundamentally new rule is indeed implicitly accepted by the Court. In any event, it should be stressed that the principle of liability of private parties for violation of EC law should only be recognized in the case of infringements of directly applicable rules. Indeed, as stated above, it is difficult to imagine a system of obligations or sanctions being imposed on individuals as a result of non-­‐directly applicable law only. In the case 4 Master II Droit International et Comparé Université Toulouse 1 -­‐ Capitole of violation of non-­‐directly applicable rules, such as directives, only violations made by public enterprises may give rise to liability. In the same way as the principle of direct effect of directives has been extended to all “organizations or bodies which are subject to the authority or control of the State”, or to those which “have special powers beyond those which result from the normal rules applicable in relation between individuals”, whatever the legal form of the bodies, the Francovich case law should apply to all those public bodies in case of violation of directives. 5