L`Europe au temps de la Renaissance – conférence d`introduction

Transcription

L`Europe au temps de la Renaissance – conférence d`introduction
L’Europe au temps de la Renaissance – conférence d’introduction par Sophie Martin
L’Europe s’affirme comme idée et puissance. Chrétienne, elle lutte à l’Est contre les Turcs (1453, chute de Constantinople)
et découvre à l’Ouest le Nouveau Monde.
Le terme Renaissance remonte à l’idée de Michelet, et il est à mettre en parallèle avec le Néo classicisme du XIXe. Mais déjà les
contemporains utilisaient le mot Rinascita, Renouveau. On l’oppose au mot Gothique (art médiéval) alors que les 2 mouvements
coexistent (Le tempietto de Bramante à Rome et La cathédrale de Vendôme - XV). La Renaissance serait alors un réveil après ce que l’on voulu considérer
comme un long assouplissement. Cette idée est fausse. La Renaissance est plus un mouvement qui coexiste tout au long des XV
et XVe s avec le Gothique et qui s’imposera finalement. L’esprit chevaleresque et les valeurs de courtisans sont vécus
concomitamment. C’est un mouvement qui se déroule selon des modalités différentes selon régions. On peut considérer que :
 Il émerge au début du Quattrocento à Florence et dans le second quart du XVème dans les cours italiennes et étrangères.
 L’âge d’or se situe autour de 1500 avec les grands maîtres (Léonard, Raphael, Michel-Ange et au nord avec Dürer…)
 Le maniérisme se développe vers 1530 jusqu’aux derniers moments fin XVI - début XVIIème pour certaines régions.
C’est un mouvement éclaté et polycentrique dans lequel l’artiste s’affirme Florence est le premier centre avec l’arrivée des
Humanistes et des artistes qui s’intéressent à l’Antiquité (Brunelleschi, Donatello et Masaccio). Rome est importante fin XVe et
début XVIe avec les pontificats de Jules II et Léon X, mais le sac de Rome(1527) y met un terme. Les artistes essaiment dans les
différentes cours italiennes et étrangères.
Il ya deux Renaissance : une en Italie et une en Flandres. Jan van Eyck, par la maîtrise de la peinture à l’huile, le goût du réalisme
et de la lumière égale les grands peintres italiens (Van Eyck - Les Epoux Arnolfini - La Haye Mauritshuis) On y trouve l’idée de perspective avec un
espace considéré comme une boîte, la problématique de la fenêtre et la lumière qui met en volume l’espace. L’œuvre est signée et
intellectuellement complexe avec la notion de miroir et de renvoi. Il n’y a pas de cloisonnement fermé entre Italie et Flandres. Les
tableaux sont recherchés pour être collectionnés et les peintres font le voyage nord sud pour découvrir les avancées de chacun.
I. Le contexte historique de l’Europe à la Renaissance. La première moitié du XVe est marqué par un contexte de troubles :
guerre de 100 ans, schisme que connaît la chrétienté (2 cours papales entre 1378 et 1477), Reconquista en Espagne. Le
retournement s’effectue vers 1450 : recul des grandes épidémies (peste), fin de la guerre de 100 ans, reprise démographique et
économique, particulièrement marquée au nord de l’Italie et dans les Flandres (développement du crédit bancaire – Médicis,
Fugger) Géographiquement : carte de 1574- BNF et carte atlas
La France est le pays le plus riche et le plus peuplé (15Millions d’habitants). Elle ne comprend pas la Bresse, la Franche Comté ni
la Savoie. L’autorité royale est renforcée par la mise en place d’une armée régulière et l’impôt, le pouvoir féodal est réduit.
L’Angleterre : ne comprend pas l’Ecosse ni une partie de l’Irlande, mais détient Calais…
L’Espagne avec Ferdinand d’Aragon et Isabelle de Castille est divisés en deux Etats distincts, Sicile, Sardaigne et Baléares sont
sous sa dépendance. L’unité sera réalisée par Charles Quint.
L’Italie est morcelée. Elle est coupée et isolée du reste par la chaine alpine et par ses côtes maritimes. Cet isolement lui a permis
un développement en vase clos. Au sud le royaume de Naples est convoité par la Maison d’Anjou puis par l’Espagne. Au centre
les Etats de l’Eglise se développeront réellement à partir des jubilés de Jules II. La Toscane et Florence sont très importantes
grâce à l’oligarchie des Médicis. Au Nord, c’est une multitude de principautés (cours) ou de république aristocratique (Venise…)
Le Saint Empire Romain et Germanique (SERG) englobe les territoires germaniques et est composé de plusieurs centaines
d’états laïcs ou ecclésiastiques gouvernés par des princes, et de républiques urbaines libres. La principale maison est celle des
Habsbourg (Maximilien a renforcé ses liens en épousant la fille de Charles le Téméraire, Marie de Bourgogne et récupéré ainsi les
territoires des Flandres et de la Bourgogne, leur fils Philippe le beau épousera Jeanne la Folle, fille d’Isabelle et de Ferdinand et
apporte l’Aragon, la Castille et Naples. Charles Quint qui règne de 1519 à 1556 détient le territoire le plus vaste, dont la fragilité
est inhérente. Ses fils hériteront de l’Espagne pour Philippe II et de l’Empire pour Ferdinand. A ceci il faut ajouter la question
religieuse qui affecte l’Allemagne : la réforme de Martin Luther. A cette situation de permanente concurrence, s’ajoutent les
guerres dans les principautés en Italie et entre Empire, Angleterre et France (Milan et Naples). Ce qui a pour effet un échange
d’artistes important (François 1er fait venir Léonard, mais aussi Rosso et Primatice) et donc une réelle émulation artistique. Ils
‘affronte à la guerre mais aussi par peintres, poètes et artistes interposés. (Rencontre du camp du Drap d’or le 7 février 1520 ente Henri VIII et François 1er)
La question Religieuse : au début XVIe, il existe différents catholiques qui refusent la souveraineté du primat romain. Trois
têtes de révoltes principales : Luther 1517 affiche ses propositions à Wittenberg, en Allemagne, Zwingli à Zürich et Calvin à
Genève. Portrait de Luther par Cranach l’ancien. Ce peintre fut attaché à la cours de Wittenberg durant 50 ans et le principal créateur de
l’iconographie de Luther, son ami (en règle générale on trouve chez Cranach, l’importance de la ligne, une image relativement
plate). Les doctrines réformées ne sont pas unifiées. Il existe deux grands courants : le luthéranisme et le calvinisme. A cette
situation, l’Eglise catholique va répondre après le concile de Trente (1545-1563), ce sera le point de départ d’une nouvelle
iconographie. Avec la paix d’Augsbourg, Charles Quint admet que chacun doit adopter la réligion de son prince. La France est
très touchée par cette question, il faut attendre l’Edit de Nantes (1598) pour voir reconnu la liberté de culte. C’est dans le Nord,
qu’elle va s’épanouir et va donner naissance à un nouveau pays : les Provinces unies, à la suite du traité d’Utrecht.
II. Un nouveau rapport au monde Une meilleure connaissance du monde entraine une nouvelle place de l’homme, centrale.
Les savants remettent en questions les thèses anciennes (Copernic). C’est l’époque des découvertes, permis par les progrès
techniques (Vasco de Gama, Christophe Colomb (représentation du monde en cœur d’orenzio Finlay) ; l’homme est au centre de l’univers, il a son
libre arbitre, mais est toujours inspiré par Dieu. Il bâtit en fonction de ses dimensions humaines (l’Homme de léonard de Vinci). Cette
nouvelle place se lit sans l’art. (Donatello, David – bronze), il s’inspire de l’Antiquité (contrapposto, anatomie, thèmes…)
Affirmation de la notion d’artiste : Artistes et écrivains repense l’homme. Ils sont des intellectuels qui signent leurs œuvres et
n’hésitent pas à se représenter avec quelque chose de divin (Dürer Autoportrait),. En 1453, Constantinople chute sous l’assaut des
Ottomans. Beaucoup de savants grecs affluent avec des manuscrits. On commente, on édite les anciens. Les premières
bibliothèques se mettent en place ; la diffusion des idées est en route.
C’est un humaniste, un intellectuel, il dénonce les abus de l’Eglise romaine,
mais se penche aussi sur l’Antiquité, commente l’Evangile selon st marc. Limage est fixée par Holbein : un homme à sa table de
travail, chapeauté et vêtu d’une cape noir.ces cabinets donnent naissance au studiolo, lieu de réflexion ( studiolo d’Urbino de
Frederico da Montefeltre & portrait de Platon) ; mais aussi lieu de monstration des collections et de décor réalisé par les plus
grands (ici Pedro Berruguete et Juste de Gand).
Intérêt nouveau pour l’Antiquité : d’abord pour des considérations pratiques, on cherche un modèle puis par volonté de
retrouver les sources. (Apollon du Belvédère et Apollon par l’Antico). Les collections se multiplient (Médicis, Isabelle d’Este, Rodolphe II à
Prague…). Il y a donc retour à l’antiquité et émulation par rapport à cette période.
La nouvelle représentation de l’Espace : la perspective. Brunelleschi réalise en public lace du Duomo une expérience qui sera
théorisée par Alberti. (Expérience de la Tavoletta). C’est la perspective linéaire, à point de vue unique, la perspective artificielle, et centrale
reprise dans Saint Jérôme d’Antonello da Messine, NG Londres. Le tableau est en fait une fenêtre sur la réalité, une illusion de l’espace avec des
points d’ouverture. Ce sentiment de profondeur se manifeste par le système de dallage. On utilise la perspective linéaire avec un
système de report simple d’une grille. La perspective est recherchée également dans les pays du nord. Le perspectographe de Dürer La
volonté de représenter l’image plan existe en sculpture avec la mise au point du relief écrasé (Donatello St Georges Orsanmichele, prédelle du
combat sur le dragon). Cette perspective est fondamentale, elle conditionne l’art jusqu’au XXe siècle.
Les innovations du Nord : la peinture à l’huile et l’imprimerie
La mise au point de la peinture à l’huile notamment par les frères van Eyck (La Vierge et le chancelier Rollin, Jan van Eyck) est
révolutionnaire. Elle amène le « réalisme » et un espace où la perspective et la lumière sont essentielles. L’illusion de l’espace, le
jeu de la lumière et des ombres, l’équilibre entre détail et le soigné, le détail menant au général… la possibilité de repentir, la mise
au point des glacis… la peinture du nord met en place une conception du monde qui passe par le détail, une conception
analytique. (Descente de croix de Rogier van des Weyden). La technique permet d’expliquer la possibilité du détail. Le tableau est conçu sur la
planche de bois préparée, l’ensemble est conçu en amont, par le détail. Il s’agit d’un microcosme où tout est important.
En Italie, la conception est plus analytique, on part du général pour aller vers le détail ; c’est plus monumental, plus conceptuel.
(Masaccio, Le tribut de Saint Pierre, chapelle Brancacci, Carmine Florence)
La naissance de l’imprimerie est capitale. Avec l’utilisation des caractères mobiles et de la presse à vis, Gutenberg ouvre tout
un nouveau monde intellectuel. En 30 ans l’Europe se couvre d’imprimeries. (Calendrier des Bergers)
Si la gravure sur bois existe depuis longtemps, une nouvelle technique associée à la presse à vis se let en place : la gravure à main
où le burin ou la pointe attaque la plaque de cuivre. Afin du XVIè, apparaît la gravure dite eau-forte, technique qui fait appel à
une plaque de cuivre, un vernis et un bain d’acide nitrique. (Martin Schongauer, gravure de rinceau d’ornement au hibou en taille douce).
Albrecht Dürer, fils d’orfèvre et grand voyageur (Italie et Pays bas), est un artiste humaniste, peintre, graveur, théoricien.
Dürer Adam et Eve cette gravure est inspirée de l’Antiquité : modèles issus de l’Apollon du Belvédère et Vénus Médicis), les
proportions (1/8), mais fait appel à la connaissance des symboles (arbre de la tentation, chat, souris, bouquetin…) Elle est signée
sur le cartel, il y souligne ses origine et sa fierté.
La naissance d’un métier : l’architecte La référence à l’architecture antique n’a jamais disparu (présence de ruines) et le traité de
Vitruve (r siècle) est fondamental. Brunelleschi s’inspire du panthéon pour couvrir le Duomo de Florence, non seulement pour la mise en
place mais aussi pour la technique du mortier. C’est un ingénieur qui imagine des échafaudages mobile s. Il est seul responsable de
la construction. Alberti et Brunelleschi définissent une architecture rigoureuse, en recherche d’harmonie et de régularité (san Spirito à
Florence). L’inspiration est antique (chapiteau, plafond à caisson). Le plan fait appel à la géométrisation avec une répétition des
modules et des proportions (le carré et le cube sont répétés en surface et en volume). Le langage est nouveau : les ordres de Serlio sont
respecté (Toscan, dorique, ionique, corinthien et composite). Comme au Moyen-âge, on construit des églises et des cathédrales,
des châteaux et des palais (Château de Chambord). Le plan est celui d’un château fort mais avec des éléments de pure virtuosité comme
l’escalier à double révolution. Mais on introduit à ce moment la Villa, au salon central, à portique et fronton (Villa Palladienne). De
même l’art des jardins va de paire avec l’architecture.
III. La diversité des sujets à l’époque de la Renaissance
Il y a énormément de commanditaires, privé, public, princier, profane, religieux... Les nouveautés introduites sont principalement
- L’intérêt pour le corps et la figure humaine (Etude anatomique de Léonard, figure de femme en mouvement de Dürer). C’est l’époque des dissections et
des célèbres médecins tels Ambroise Paré.
- Développement du portrait sur les grands décors ou tableaux de chevalet (l’Homme au turban rouge de van Eyck – Condottiere d’Antonello da Messine)
- La Naissance des genres, dans les Flandres du XVIe, les artistes posent les bases de la peinture du XVII Hollandais et Français.
Peinture d’histoire –religieuse ou mythologique), portrait, scène de genre, nature morte. Les peintres se spécialisent. (le préteur et sa
femme de G Metsys est une scène de genre se déroulant à l’intérieur d’une boutique, mais elle fait également référence à la vie spirituelle
qui peut se vivre au quotidien, les symboles y sont très importants.
- Le paysage se met en place (Joachim Patinir, saint Jérôme dans un paysage), mais les tableaux peuvent être réalisés à deux mains. Le sujet
religieux n’est que prétexte. La vision est cosmique, la figure humaine, petite. Il existe alors une autre façon d’évoquer le
lointain, en tons froids bleus et vert. C’est la perspective chromatique. Leur approche passionnée de la nature est vécue par tous
(Dürer touffe d’herbe, Léonard étoile de Bethléem et autre plante)
L’équilibre paisible fait place à une époque pessimiste vers 1525-1530, où l’art devient un lieu de refuge, d’évasion. Le
maniérisme se développe rapidement hors d’Italie. Le style est la règle générale et la primauté revient à la forme et non au
contenu. On recherche l’étrange, l’élégance et le dynamisme. (Galerie de Fontainebleau, décor à fresque et stuc de Rosso et Primatice). A la cour de
Rodolphe II, les artistes viennent de tous pays. Bartholomeus Sprangler Venus et Adonis.
La Renaissance est donc un mouvement enrichi par des échanges commerciaux Nord Sud, grâce aux voyages des artistes et des
œuvres, grâce à l’émulation guerrière et artistique des différentes cours. C’est un moment clé pour la connaissance des temps
modernes et pour l’histoire de l’art occidentale, un moment où la place est redonnée à l’homme.
Erasmus de Rotterdam, portrait gravé de Dürer et portrait de Holbein le jeune.