Auditions à haut risque pour la France?
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Auditions à haut risque pour la France?
Auditions à haut risque pour la France? Les quatre prochaines auditions de la mission d'information parlementaire sur Srebrenica risquent bien de faire écrouler l'un des pans de la ligne de défense des autorités françaises sur la question des frappes aériennes. Jeudi 12 avril, ce sont tout d'abord les deux anciens ministres néerlandais de la défense et des affaires étrangères, Joris Voorhoeve et Hans Van Mierlo, qui viennent donner leur version des faits. Le jeudi suivant (19 avril), ce sera le tour du colonel Karremans, commandant du bataillon hollandais de Srebrenica et du général Nicolaï, chef d'état-major de la Forpronu à Sarajevo. Avant même son audition, Hans Van Mierlo a déjà expliqué que les dirigeants français «confondaient tout» sur la question des frappes aériennes. Il réagissait aux propos de l'ancien Premier ministre Alain Juppé qui avait déclaré, lors de son audition, que c'était à la demande expresse des autorités néerlandaises que l'hypothèse d'une intervention aérienne avait été écartée. Il faut dire que l'argumentation française qui consiste à faire reposer sur les Pays-Bas la responsabilité du non recours aux frappes aériennes n'est absolument pas conforme à la réalité des faits. Et les dirigeants français semblent avoir de curieux trous de mémoire pour la période du 6 au 11 juillet 1995. Car le bataillon néerlandais à Srebrenica a demandé des frappes aériennes dès le premier jour de l'attaque (le 6 juillet) et à cinq ou six reprises, selon le rapport de l'ONU sur la chute de Srebrenica, en assumant les risques physiques que ces demandes faisaient peser sur les Casques bleus et alors même qu'une trentaine de soldats avaient été pris en otage par les forces serbes. Et l'intervention du ministre néerlandais de la Défense pour demander l'arrêt de l'intervention aérienne n'a eu lieu que le 11 juillet, après la chute de Srebrenica, à un moment où l'imbrication entre les forces serbes, la population civile et les Casques bleus était telle qu'il était devenu impossible de bombarder. Cette imbrication était le résultat direct du caractère tardif de la réponse aux demandes de frappes aériennes effectuées par le contingent hollandais de Srebrenica. Quant aux arguments techniques avancés par les responsables politiques et militaires français pour expliquer la difficulté de lancer des frappes aériennes - notamment la complexité du système de décision des frappes aériennes et la nécessité de disposer d'un guidage au sol pour ces mêmes frappes - ils sont, là encore, balayés par la réalité des faits sur le terrain. D'abord parce qu'il y a bel et bien eu des frappes aériennes en 1994, avec le même mécanisme de décision, et à plusieurs reprises, pour défendre les zones de sécurité de Gorazde, Sarajevo et Bihac. Le Général de Lapresle, qui a commandé les Forces des Nations unies de mars 1994 à février 1995 a expliqué qu'il n'y avait jamais eu de problèmes techniques dans la chaîne de décision des frappes aériennes. Il a également reconnu que le recours à l'arme aérienne avait stoppé les forces bosnoserbes dans leurs attaques. Le général Quesnot, ancien chef d'état-major particulier des Présidents François Mitterrand et Jacques Chirac, a lui aussi estimé que les frappes aériennes avaient montré leur efficacité lors de leur utilisation en avril 1994 pour stopper l'offensive serbe contre Gorazde. Il a ajouté qu'elles auraient dû être utilisées à Srebrenica. Ensuite parce qu'il y avait bien des guideurs au sol à Srebrenica. Le rapport des Nations unies sur la chute de Srebrenica mentionne (pages 28, 56, 69 et 70) l'existence de deux équipes de contrôleurs aériens avancés et indique qu'ils sont parfaitement opérationnels, y compris plusieurs jours après le début de l'attaque. C'est parce que la zone de sécurité n'a pas été défendue par l'ONU et par l'OTAN et une fois que les Serbes ont pris Srebrenica que ces guideurs ont dû se retirer avec les Casques bleus néerlandais. Les deux membres de Médecins Sans Frontières présents dans l'enclave au moment de la tragédie ont également confirmé lors de leur audition la présence de ces guideurs au sol. Ils ont, en outre, précisé que certains d'entre eux étaient britanniques, information qui devrait alimenter le débat en Grande-Bretagne, où le ministère de la défense a toujours cherché à dissimuler la présence de militaires anglais à Srebrenica au moment de la tragédie... Fabien Dubuet