Automédication et libre accès aux médicaments, enjeux de la

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Automédication et libre accès aux médicaments, enjeux de la
Automédication et libre accès aux médicaments, enjeux de la responsabilité
et de l’éducation des patients
------------------------------------------------------------------------------------------------RESUME :
Le déremboursement d’un certain nombre de traitements fait partie des solutions proposées
pour une meilleure maîtrise des dépenses de santé. Cette impulsion initiale donnée pour
permettre une réorganisation structurelle du système de Soin doit nous interroger en tant que
citoyen et en tant qu’élément de ce système que nous soyons soignants ou soignés.
L’ouverture d’un marché de l’automédication fait, entre autres, partie des outils choisis pour
organiser ce transfert de compétences. Il est important de réfléchir aux forces en présence afin
de permettre d’accompagner au mieux cette évolution.
----------------------------------------------------------------------------------------------------------------L’automédication : art de s’administrer soi-même un traitement…
Le sujet n’est pas récent en fait, car il n’est pas si éloigné le temps où le recours à
l’omnipraticien ne se faisait pas à la légère. Il en existe encore de ces patients souvent âgés,
qui attendent la sacro-sainte « dernière minute » pour appeler le praticien afin de faire part, à
des heures respectables, de leurs symptômes souvent devenus criants… ce qui rend du reste le
diagnostic plus facile ! C’était à cette époque d’ailleurs le mode de recours le plus fréquent à
cette Médecine actuellement traitée d’allopathique. Les médecins étaient peu nombreux,
souvent débordés, toujours respectés, considérés comme détenteurs d’un pouvoir particulier
qui était si ce n’est de guérir tout du moins de savoir soulager1.
Il faut dire que bien d’autres systèmes explicatifs existaient : Les rebouteux2 évoquaient la
lune, les crises de croissance, et autres fatigues avaient une existence sociale et, finalement,
on savait mourir de vieillesse...
…Oui mais voilà, si la relation de causalité n’y est pas forcément, les faits sont là ; les
médecins se sont fait plus nombreux, ils ont commencé à répondre à plus de demandes, avec
des plaintes de plus en plus fonctionnelles, puisque la population allait globalement mieux. A
en croire l’Institut National de Prévention et d’Education pour la Santé (INPES), cette
amélioration de la santé globale des habitants serait en fait due à l’amélioration du niveau de
vie3. La pathologie a ainsi commencé à devenir « fonctionnelle ». Elle s’est inscrite dans la
durée et a été perçue comme moins facile à traiter 4. Les consultations et les traitements
possibles se sont multipliés, auprès de patients de moins en moins convaincus, ou devrais-je
dire, de plus en plus septiques5…
1
Meslé F, Vallin J. Transitions sanitaires ; tendances et perspectives. Médecine/Sciences 2000 ; 16 : 1161-71
Guérisseurs en patois.
Michel JB. Termes régionaux désignant le pèlerinage. Termes désignant le rebouteux dans le Centre et le SudEst de la France. 981 ;5 :19-21.
3
Robine JM. Redéfinir les phases de la transition épidémiologique à travers l'étude de la dispersion des durées
de vie: le cas de la France. Population. 2001 ; 57 (1) :221.
4
http://www.ined.fr
5
Camhi B, Moumjid N, Brémond A. Connaissances et préférences des patients sur le droit à l’information
2
1
MaÏlys Michot-Casbas, décembre 2008 ©
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Les connaissances, en se surspécialisant, ont commencé probablement à s’éloigner du sujet.
Le dialogue a été plus difficile. Avec l’avancée de la science, le profane a attendu en vain le
procédé révolutionnaire qui résoudrait aisément et pour toujours son problème de santé…En
vain. La science ne saurait tout résoudre.
Le système de soin actuel a ainsi été débordé, aussi bien en termes de ressources qu’en termes
de savoir, comme en témoigne l’étude du Dr Siprouchis qui démontre que seulement 30% des
plaintes en gastroentérologie ont une solution reconnue selon les données acquises de la
science et à quel point la relation de soin est importante en prenant l’exemple syndrome du
colon irritable 6.
Entre temps, le numerus clausus7 a amené à la formation de moins en moins de praticiens,
avec en filigrane cette idée politique que l’offre créait la demande8. Ceci débouche sur la
situation actuelle : Peu de praticiens en formation9, pour une population qui avance en âge, de
plus en plus exigeante en terme de « sensation de santé » (nous développerons cet axe de la
réflexion tout à l’heure), et donc de plus en plus sujette à consulter. « Il s’agit donc de trouver
une structuration nouvelle dans la délivrance des soins, afin de pouvoir répondre à la demande
de la population, de manière la plus pertinente et la plus valide possible, à tout point de
vue »10 comme le rapporte le compte rendu du débat du 11 janvier dernier à l’assemblée
nationale.
L’automédication est une des voies actuellement en cours de développement pour répondre ne
serait-ce que partiellement à ces problématiques. Si le libre accès des patients aux
médicaments pose en soi des problèmes spécifiques sur lesquels nous reviendrons, les enjeux
de la responsabilisation et de l’éducation sont en soi encore plus lourds, car ils conditionnent
aussi à un temps donné les croyances profanes, et la transmission du savoir médical au sein de
la population générale. Ceci ne peut être qu’une tâche difficile car ces reconstructions, ces
« vulgarisations » pour reprendre ici une terminologie possédant une connotation péjorative
injustifiée, seront amenées à devenir les sous-bassements d’intérêts économiques voire
politiques lourds de conséquences et qu’il est à ce titre important de pouvoir connaître, pour
tenter de les maîtriser.
Automédication et libre accès
Le domaine du médicament a déjà sa place dans la sphère des compétences familiales. La
littérature rapporte que 97 % des foyers gardent les médicaments restants après la fin du
traitement prescrit par leur médecin 11. Ils sont le plus souvent conservés dans des conditions
inadéquates (67% des personnes interrogées conservent les médicaments dans la salle de bain
médicale : enquête auprès de 700 patients dans un centre régional de lutte contre le cancer. Bulletin du Cancer
2004.91(12) :977-84.
6
Siproudhis L, Delvaux M, Chaussade S, Charles F, Guyot P, Weber J, Fioramonti J, Ottignon Y, Zerbib F,
Dyard F. Relation médecin malade dans le syndrome de l’intestin irritable. Résultats d’une enquête prospective
française sur l’influence de la nature fonctionnelle de la plainte. GCB. 2002 ;26(12) :1125-33.
7
Nombre d’étudiants qui seront acceptés en deuxième année de médecine à la suite du concours de PCEM1.
Kopetsch T. La profession médicale: tendances passées, situation actuelle, et perspectives à venir.Cahiers de
sociologie et de démographie médicales.2004 ; 44(1) :43-70.
8
Duruz H. La maîtrise des dépenses de la santé : un problème d’offre ou de demande ? Bulletin des médecins
suisses.2000;81: 46. 2585-7.
9
http://www.anemf.org/Concours-PCEM1-trop-d-erreurs.html
10
http://www.assemblee-nationale.fr/12/mecss/06-07/c0607008.asp
11
http://actualité.aol.fr/conservations-des-médicaments-a-la-maison
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où le taux d’humidité est inadapté à leur conservation). Ils sont réutilisés le plus souvent en
cas de symptômes identiques, non seulement du patient pour lesquels ils avaient été prescrits
initialement, mais aussi en cas de symptomatologie « proche », ou encore de cas similaire
d’un autre membre de la famille.
Une autre étude rapportée par le CREDOC, d’après un travail de thèse réalisé en 1987 (c’est
dire si la problématique n’est pas récente) rapporte, dans le même sens, l’importance de la
consommation de produits de santé, en dehors du circuit pharmaceutique habituel12.
Ainsi l’automédication existe de toute façon. Ses principales motivations rapportées sont,
selon ces mêmes études : le manque de temps pour consulter, la sensation de non gravité des
symptômes ressentis, le manque de disponibilité du praticien référent.
Ces motivations principales sont en interrelation :
- Le manque de temps pour consulter est à mettre en parallèle avec un certain
sentiment de réassurance face à la symptomatologie. Lorsque l’on est inquiet, il est
possible de trouver du temps pour consulter, effort que l’on ne fait bien sûr que
lorsque l’on est motivé ! Cela signifie donc que les médecins ne sont pas l’unique
« réponse santé » de nos patients.
Il peut paraître paradoxal, au temps des « trente cinq heures », que le manque de
temps soit évoqué dans ces études françaises; pourtant plusieurs études sociologiques
concordent, la sensation de manque de temps est très fréquent en milieu du travail et
est décrit comme le principal élément à l’origine du « stress » moderne (pouvant aller
jusqu’au non rare syndrome de « burn out »)13. L’automédication peut alors
correspondre à la recherche du bien-être ou encore à la recherche d’une augmentation
de compétences : une sorte de dopage social pour reprendre la formulation de Hélène
Eysseric 14.
- La sensation de « non gravité » sous-entend que le patient est capable de se
reconnaître des compétences. Le savoir médical profane est construit d’après l’étude
de Jean François Barthe 15 en premier lieu, pour l’instant encore, sur les échanges avec
les proches, puis en second lieu sur les médias grand public (englobant la presse, mais
aussi les émissions télévisuelles ou radiophoniques) et ensuite seulement sur l’outil
informatique et Internet. Il est cependant certain que la source d’information
privilégiée dépend du niveau socioéconomique des patients comme le souligne le Dr
Burton Jeangros et alors l’outil informatique, par le biais d’Internet, peut représenter la
première source d’information auprès de certaines populations16.
Il est possible qu’à l’avenir, cette source d’information devienne la première utilisée
pour l’ensemble des patients. Quels contrôles et quelle validation 17? Pour l’instant
aucune n’est nécessaire. En théorie toute opinion peut s’écrire et se lire même si un
12
Centre de recherches et de documentation sur la consommation, Centre de recherche pour l'étude et
l'observation des conditions de vie (France), Centre de recherches pour l'étude et l'observation des conditions de
vie – 1984. L’automédication. Disponible en ligne. Numérisé le 24 jan 2008. Book.google.com.
13
Niezborala M. Travailler sans dérouiller :Le bien-être au travail est il encore possible ? Broché. 2007. 136p.
14
Eysseric H, Vincent F, Mallarent M, Barjhoux C, Villier C, Barret L. Conduite addictive en milieu
professionnel : problèmes posés par les médicaments psycho-actifs. Annales de toxicologie analytique.
2002 : 14(1) ;74-82.
15
Barthe JF. Connaissance profane des symptômes et recours thérapeutique. R franc sociol.1990 ;31 :283-96.
16
Représentation de santé et construction des normes.
http://www.b3e.jussieu.fr/sirs/Rencontre20novembre202004.pdf
17
Amonet I. Contrôler Internet. Le Monde diplomatique [en ligne], (novembre 2005). - http://www.mondediplomatique.fr/
3
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outil du Conseil Supérieur de l’Audiovisuel est en cours d’élaboration18. Sur les sites
référencés cependant, un système de contrôle des dérives existe ;c’est ce qu’on peut
notamment observer en ce qui concerne l’encyclopédie en ligne Wikipedia 19. Un
système de E-recours est possible en cas de non respect des principes fondamentaux
de la rédaction sur ce site et notamment des règles de courtoisie autour du partage
d’opinions lorsque les sujets traités sont possiblement ouverts à la discussion. En ce
qui concerne la santé, c’est le site de vulgarisation doctissimo qui est le plus visité. Il
est cautionné par deux praticiens et est devenu une vraie vitrine publicitaire pour de
nombreux médicaments disponibles sans ordonnance 20. Quels moyens pédagogiques
(et dirigés par quelles institutions) seront mis en œuvre pour encadrer l’ouverture de
l’automédication ? Quel « label » sera retenu pour pouvoir permettre au
« consommateur » de s’y retrouver ? Le passage dans le monde profane sous-entendrat-il l’arrêt du travail scientifique et l’arrêt des investissements de recherche au profit
d’une bascule de ces fonds vers l’équipe marketing, comme cela a déjà été le cas pour
les médicaments veinotoniques 21 ?
- La notion de manque de disponibilité des praticiens résonne à deux niveaux : Le
premier à un niveau temporel basique. Les praticiens, et notamment les généralistes
sont amenés à être de moins en moins nombreux. Depuis notamment la notion de
parcours coordonné, ils semblent de plus en plus sollicités 22. Un certain nombre de
plaintes devront donc se gérer autrement. L’automédication, dans le sens d’un
véritable transfert de compétences vers le patient, est une des pistes envisageables.
D’aucun de répondre qu’on ne peut résumer 10 années d’études de médecine en
quelques lignes sur une encyclopédie fusse-t-elle électronique. Certes, il ne pourrait
s’agir ici de résumer le programme des facultés en le traduisant pour le rendre
accessible. Le travail devrait, pour le coup, être vraiment éducatif, permettant au
patient de reconnaître ses symptômes mais aussi d’apprendre à mieux appréhender son
corps. Et là est probablement le deuxième niveau de manque de disponibilité du
praticien. Il n’a pas le temps ni les moyens de faire cette Education à la Santé qui
permettrait bien des économies : économies d’argent probablement mais surtout
économies de « stress », de « fatigue », de « pathologie fonctionnelle » qui
représentent pour certains auteurs le seul moyen qu’a le corps de matérialiser le malêtre de l’ensemble du sujet23.
Automédication : Quels produits ? Quels prix ?
Ainsi, si le développement du secteur d’une automédication bien encadrée et basée sur un
réel transfert de compétences, semble pouvoir être une voie d’avenir en accord avec les
principes fondamentaux d’une éthique clinique responsable et bienfaisante, quels seront
les produits accessibles ? Actuellement sont disponibles en pharmacie sans ordonnance :
les patchs à la nicotine, les antidouleurs, les médicaments contre les maux de gorge, les
18
http://www.foruminternet.org/institution/institution/missions
http://www.wikipedia.fr
20
http://www.doctissimo.fr
21
Michot-Casbas M. Quelle réponse médicale à la plainte fonctionnelle ? http://www.ethique.inserm.fr
19
22
Baromètre des connaissances réalisé par TNS Sofres en mars 2006 auprès de 1006 personnes
sélectionnées selon la méthode des quotas.
23
Cathebras P.Troubles fonctionnels et somatisation. Paris Masson. 2006. 240p.
4
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brûlures d'estomac ou la diarrhée. Depuis le 1er juillet, 248 médicaments peuvent être
proposés en libre-service dans les pharmacies 24. On remarque que dans cette liste,
figurent aussi 19 médicaments d'homéopathie et 12 produits à base de plantes.
La présence au sein des officines de produits d’automédication est pour l’instant
facultative et sa mise en oeuvre est pour l’instant soumise au volontariat de la part des
pharmaciens. La vente en « libre service » de ces médicaments s'accompagne d’un certain
nombre d’obligations : Les présentoirs doivent être bien séparés des autres articles et
placés à proximité du comptoir, afin de faciliter les échanges avec le pharmacien, mais
aussi l’information et l’éducation du patient. Les opérations de promotion ("trois boîtes
pour le prix d'une") sont interdites. Ces produits doivent être accompagnés de fiches
explicatives et de dépliants d'information sur les règles du bon usage de l'automédication.
Elles proviennent pour l’instant, pour la plupart, de l’industrie du médicament. Les
sociétés savantes des différentes disciplines ont aussi pour vocation de faire cette
information grand public, et il serait nécessaire qu’à l’avenir, elles puissent s’y impliquer
davantage. Il n’est pas pensable que l’industrie du médicament et a fortiori, celle de
l’automédication, se mette à répondre à cette demande dans une logique uniquement
commerciale, sans possibilité de régulation, de contrôle, voire d’une certaine forme de
labellisation de la part des sociétés savantes ou des institutions.
Parmi les obligations, le prix qui doit être clairement affiché sur des étiquettes bien
visibles.
Pour l’instant aucune obligation en termes de label de qualité explicite n’est prévue.
Curieusement le même médicament (c’est-à-dire la même molécule en Dénomination
Commun International ou DCI) peut être commercialisé à différents prix, moyennant un
changement de nom et d'emballage. Certaines de ces molécules peuvent même être encore
remboursées par la Sécurité Sociale ! C'est, par exemple, le cas du Gavisconell®,
médicament anti-acidité utilisé contre les reflux oesophagiens, vendu en libre-service au
prix de 4,16 euros la boîte de 16 comprimés (source : IMS Health - prix public TTC en
avril 2008). Son frère jumeau, le Gaviscon®, est remboursé par la Sécurité sociale (même
s’il peut aussi être délivré sans ordonnance). Son prix est de 2,26 euros la boîte de 20
comprimés, soit une différence de prix de 130% lorsque l'on ramène le prix à l'unité.
Autre exemple: l'ibuprofène, médicament contre la douleur. Sous le nom Advil®, il est un
médicament remboursé, mais il est aussi accessible sans ordonnance. Ainsi l'ibuprofène
est 57% moins cher que la boîte de Nurofen® disponible en libre service. Dans le cas de
l'anti-diarrhéique lopéramide, une boîte d'Immodium Lingual® est trois fois plus chère
que son équivalent Lopéramide Lyoc® (5,77 euros contre 1,82 euros)25. Il est légitime de
s’interroger sur le pourquoi de ces inégalités en terme de remboursement pour des
molécules identiques, et cela remet quelque peu en cause les motivations de l’ouverture du
marché (s’agit-il de favoriser certains laboratoires par rapport à d’autres, lorsque l’on sait
l’amalgame qui est fait entre niveau de remboursement et niveau d’efficacité 26)?
Ceci n’est bien sûr pas la volonté affichée et un déremboursement progressif de toutes les
spécialités a été assuré de nombreuses fois par le gouvernement 27.
24
http://www.mutualite.fr/actualites/toutes_les_infos/nos_articles/pres_de_250_medicaments_en_libre
_service_dans_les_pharmacies (liste_libre_service.pdf)
25
http://www.leem.org/medicament/evolution-des-prix-des-medicaments-en-france-408.htm
Médicaments et progrès thérapeutiques : propositions pour le 21ème siècle. Mars 2002.
http://www.lir.asso.fr/pdf/Prop-pour-21siecle.pdf
27
Intervention de Jean-François MATTEI, Ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées. La
26
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Quelles forces en présence vont amener la régulation du marché en terme de prix?
Certains auteurs comme le Pr Bergmann pensent que seule la vraie libération du marché
de l’automédication par le biais de la grande distribution amènera à une diminution des
coûts de manière raisonnable 28. Pour le coup, un effort pédagogique sera particulièrement
nécessaire pour permettre au « patient » de se repérer entre les différentes substances
disponibles, avec encore une fois l’importance de l’éducation. L’accompagnement de
l’automédication doit rester médical et les enjeux éthiques qui sont de mise pour tout
processus de soin, ne devraient pas être économisés sous le prétexte du déremboursement.
Enjeux de la responsabilité des patients
Jusque-là, la responsabilité du traitement reposait sur celui qui l’avait proposé que ce soit
le praticien par le biais de la délivrance d’une ordonnance ou qu’il s’agisse du
pharmacien. L’automédication risque vraisemblablement d’engager la responsabilité du
patient 29 et toute une partie de la réflexion repose sur les modalités de ce transfert de
responsabilité qui implique au préalable un transfert de compétences.
C’est par le biais de la notion d’éducation qui sera évoquée au chapitre suivant que ce
transfert aura lieu, mais encore faut-il en définir la visée. La logique est pour l’instant
économique, puisque ce transfert doit, avant tout, amener une régulation des dépenses de
santé. Son système de régulation tâchera de ne pas causer de iatrogénie dans une
perspective si ce n’est humaniste, tout du moins comptable ! Cependant redonner au sujet
des aptitudes autour d’un certain nombre de maux bénins équivaut à reconnaître et à
valoriser une démarche qui existe déjà de fait. Combien de nos patients ont déjà tenté tel
ou tel traitement avant de venir nous voir ? Seule la verbalisation de cette expérience
diffèrera à en croire l’article du Dr Bertrand 30. Ainsi plus le praticien fait preuve
d’ouverture d’esprit sur les traitements qui ont pu être mis en place en amont et plus les
patients les verbalisent. Cette différence de formulation est bien connue en pédagogie
médicale. L’interrogatoire du patient en ce qui concerne l’observance peut être optimisé et
une formulation positive. Par exemple la question : « Dans quelles circonstances avezvous tendance à oublier vos traitements ? », est bien plus informative, que l’habituelle
question : « Oubliez vous vos traitements ? » qui ne saurait appeler qu’un NON 31. Aussi
la perspective de l’automédication doit interroger à tout instant notre relation de soin. La
consultation d’éducation a donc une place nouvelle et nécessaire pour le bon
fonctionnement de l’ensemble du système.
Cela correspond du reste à l’actuel recensement national des structures d’éducation, en
vue d’une labellisation de celles-ci. Une enveloppe de dépenses serait d’ailleurs dores et
déjà prévue pour permettre, aux praticiens habilités, de bénéficier d’une reconnaissance
Politique du Médicament. Déremboursement des médicaments à SMR insuffisant. Jeudi 17 juillet 2003.
http://www.sante.gouv.fr/htm/actu/33_030717jfm.htm
28
Michot-Casbas M. Quelle réponse médicale à la plainte fonctionnelle. http://www.ethique.inserm.fr
29
http://www.web.ordre.medecin.fr/rapport/automedication.pdf
30
Bertrand M, Léger JM, Herrmann C, Malauzat D, Lombertie ER. La relation thérapeutique : place de
l’automédication dans les processus de guérison. Psychologie médicale. 1985 ;17(1) :45-50.
31
Winckler M. Le patient et le médecin nouveaux.
http://www.passeportsante.net/fr/Actualites/Dossiers/ArticleComplementaire.aspx?doc=transcription_winckler_
m_ent
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financière pour le temps et les efforts investis dans la démarche éducative. La promotion
de l’automédication fait partie de ce transfert de compétence et est, à ce titre, valorisée.
Par ailleurs la notion de « sensation de santé » qui était évoquée plus haut est au centre de
la réflexion. La santé, c’est acquis, est une notion sociétale 32. Ce qui est attendu en termes
de sensation de bien-être est sous-tendu par les référentiels de la Société, et est à ce titre
influencé par toutes les sources d’information grand public, et notamment les standards
véhiculés par la mode, ou la publicité. La définition de normativité et de pathologie, est
inscrite et influencée par des dogmes trouvant leur fondement bien au-delà de la notion de
maladie33. Ainsi il est important de ne pas faire de l’automédication, une espèce de
validation de la part des autorités d’une certaine forme de « Dopage social ». Le choix des
produits disponibles est important. La transparence de ces choix doit être totale, et doit
répondre à une logique plus large qu’un simple choix économique. Ces critères seront
établis non seulement sur une volonté sociale mais aussi après discussion avec les sociétés
savantes. Les intervenants autour de cette discussion doivent être nombreux pour pouvoir
échapper aux conflits d’intérêts auxquels peuvent parfois être soumis les experts, car avec
leur degré d’expertise, leur nombre diminue.
Le transfert de compétences signifierait alors aussi partage de pouvoir, mais concrètement
qui y est prêt ?
- Les patients ? : Probablement, mais encore va t’il falloir les guider dans cela. Il est
possible que les enjeux soient considérés comme de faible envergure, en ce qui
concerne la santé publique et la dangerosité de ces traitements. Il est aussi possible
qu’il s’agisse d’une certaine façon plutôt d’abandonner ce pan de la Santé 34. Dans
cette visée, les enjeux de la responsabilisation seraient faibles, puisqu’il s’agirait en
fait de laisser s’autoréguler le domaine du non vital. La nature ayant horreur du vide, il
est à penser que comme dans bon nombre des pays d’Europe, d’autres professionnels
répondraient à la demande35, et c’est alors leur articulation avec le reste du système
qui serait à réfléchir.
- Les praticiens sont-ils prêts à s’articuler avec d’autres professionnels afin de favoriser
l’automédication ? Il semblerait que les médecins accueilleraient en France les
possibilités de l’automédication avec circonspection36.
- Les paramédicaux sont attendus comme impliqués dans cette démarche 37
- Les autres professionnels du soin, comme les magasins « Bio » ou les sites spécialisés
autour de la santé et du sport, sont très investis dans cette nouvelle perspective.
Si les possibilités et perspectives sont nombreuses, c’est bien de la visée de la notion de
soin dont il s’agit. La notion d’accompagnement des sujets doit rester centrale, dans cette
visée éthique su soin, qui doit garder sa place, y compris dans la logique de la vente libre.
Le transfert de compétences ne doit pas être un simple transfert de responsabilité. Car
l’écueil de faire simplement et proprement sortir la pathologie « fonctionnelle » ou
« bénigne » du cadre des missions de la médecine, reviendrait à exclure le sujet des soins
32
http://www.bellerive.ch/index2.php?option=com_content&do_pdf=1&id=31
Canguilhem G. Le normal et le pathologique. Paris ; PUF : 240p.
34
http://lionel.suz.free.fr/index.php?id=aboutsub=blogentry=1127056138
35
Murphy KE, Spence ST, McIntosh CN, Connor Gorber SK. Descriptions des états de santé au Canada :
maladies musculo-squelettiques. http://www.statcan.ca/francais/research/82-619-MIF/82-619-MIF2006003.pdf
36
http://virus.rsr.ch/lautomedication-pire-que-le-mal
37
http://www.sante.gouv.fr/htm/actu/automedication/rapport.pdf
33
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pour n’en garder que la maladie. Automédication ne doit pas être abandon, mais au
contraire, supplément d’efforts pour faire passer des informations et des compétences,
autour de problèmes de santé de tous les jours, qui relèvent autant de compétences
thérapeutiques que d’un certain nombre de principes de bon sens.
Enjeux de l’éducation
Ainsi le premier travail à faire est une éducation affranchie et responsable autour de la
notion de sensation de santé. Une meilleure appropriation du corps est un pré-requis
indispensable pour envisager la perspective du travail ensemble. Ainsi il serait imaginable
que cette démarche d’automédication puisse être encadrée de campagnes d’éducation
ciblées 38.
Un véritable travail d’audit est à promouvoir afin de mieux connaître les besoins et les
attentes de la population, et d’engager ainsi en retour des campagnes pertinentes. En
ouvrant ainsi le marché du médicament, il est à espérer que la publicité qui sera à
développer permettra d’ouvrir le monde de l’éducation aux techniques de communication
et de marketing, qui sont tout de même plus séduisantes que les campagnes austères et
vieillottes promues jusqu’ici par le ministère de la Santé39.
Car, après tout, les bases de la promotion de l’automédication sont bien les mêmes qui
cherchent à aboutir à la promotion de la Santé. Le corollaire de ce libre accès au
médicament est la possibilité pour le sujet de disposer de son bien être, de le promouvoir
et de l’optimiser. L’automédication devient alors le symbole d’une compétence rendue au
citoyen en ce qui concerne son corps. Des outils pertinents doivent être mis en place 40.
-
Les moyens éducatifs pouvant être mis en œuvre pourraient être :
o L’éducation à la santé à l’école.
Comme l’éducation civique, il pourrait être intéressant de remettre en place des
leçons de « santé ». Elles pourraient reprendre les notions élémentaires
d’importance de l’hygiène, quelques connaissances basiques d’anatomie et de
physiologie. Ce pourrait être le lieu pour commencer à sensibiliser les plus jeunes
aux problèmes d’addictions. L’importance de l’alimentation comme première
médecine pourrait être promue. Les gestes de premiers secours pourraient être
enseignés, en s’appuyant sur des outils pédagogiques adaptés et pertinents. Ainsi
l’éducation à la Santé pourrait dépasser très largement le cadre de
l’automédication, rendant au médicament sa place d’intermédiaire du soin, et lui
retirant sa place actuelle incontournable, pour retrouver la Santé 41. Le travail
réalisé auprès des plus jeunes pourrait permettre d’amorcer ce changement de
paradigme.
38
Degos L, Binet JL, Begue P, Moneret-Vautrin DA. Automédication : le patient acteur de sa santé. Bulletin de
l'Académie nationale de médecine 2007 ;191(8) :1503-8.
39
http://www.sports-sante.com/tag/guide-automedication.htm
40
Automédication. Conférence de presse Santéclair Hôtel Ambassador, le 19 Septembre 2007 disponible en
ligne. http://www.santeclair.fr/web/pdf/espace_media/communiques_de_presse/DP_Automed_2007.pdf
41
Esman L, Oustric S, Michot M, Vidal M, Nicodème R, Arlet P. Rôle du patient dans la rédaction de
l’ordonnance en médecine générale. Rev Prat. 2006 ;732 :594-6.
Depuis une dizaine d’années, plusieurs praticiens, dont le Pr Arlet, défendent à travers des travaux de thèse, la
possibilité de la rédaction d’une ordonnance mode de vie
8
MaÏlys Michot-Casbas, décembre 2008 ©
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o L’éducation à la santé en PMI.
Dans les centres de protection maternelle et infantile, cette éducation des mères
pourra être un bien, sur de nombreux points. Tout d’abord, cela permettra de
rendre des compétences et à ce titre, de rassurer les mamans dans leur rôle de
Maman. Les travaux de Manni rapportent le rôle prépondérant de l’autre dans
cette construction de la relation mère/enfant 42. Toujours d’après cet auteur, la
déstructuration de la famille a aussi des effets néfastes en termes de santé. Cette
dissolution des compétences débouche sur une fragilisation de l’état de Santé
notamment des touts petits. Le marché de l’automédication pourrait être un starter
dans la réalisation de campagnes grand public sur des problèmes basiques comme
la fièvre ou la diarrhée permettant d’ouvrir le dialogue au prétexte du médicament.
o L’éducation à la santé à l’Université du troisième âge
L’ensemble des populations fragiles pourrait tirer un bénéfice particulier de la
campagne d’environnement qui pourrait entourer la libéralisation des traitements.
La iatrogénie, dont on sait qu’elle est une des premières causes d’hospitalisation
chez le sujet âgé 43 pourrait probablement être limitée grâce à l’automédication, du
fait de l’information et de l’éducation qui entourerait l’achat des produits. Les
notices dores et déjà insérées dans les boites de traitement pourrait y gagner en
lisibilité puisqu’elles deviendrait une vraie source d’information et plus seulement
une obligation réglementaire 44
-
Les femmes son depuis toujours porteuses du bien être familial 45. Des campagnes
d’information ciblant préférentiellement cette population pourraient être proposées.
En ce sens les médias grand public pourrait avoir un rôle à jouer. Pour faire un
corollaire il est possible d’envisager un autre pan de la médecine, qui a dores et déjà
en partie quitter le giron universitaire : la Médecine Esthétique. Celle-ci a appris à
s’entourer des moyens de communication les plus évolués pour promouvoir son
action46. La promotion de la Santé pourrait faire preuve d’autant d’ingéniosité. Car la
Santé se devra de retrouver une image positive ; le mot de régime a été abandonné du
langage des nutritionnistes et il est pensable que cela soit en partie dû à l’ouverture du
marché de la diététique à l’industrie47. Ainsi l’automédication pourra se positionner en
amont du dysfonctionnement de l’organe, dans une approche plus large que celle
définie par le symptôme et dans une véritable approche de protection du capital Santé.
Les enjeux économiques qui s’en suivront, s’il sont réglementés et surveillés, pourront
aussi amener toute l’expertise du commercial au service d’un mieux être réaliste.
Qui détiendra l’Education à la Santé ?
42
Manni G. Accueillir les touts-petits.Oser la qualité. Un référentiel psychopédagogique pour des milieux
d’accueil de qualité. Fonds Houtman ONE. Bruxelles. 2002.
43
Pasquier F, Lebert F, Petit H. Consultation de la mémoire sans prescription médicale. Press Med
1996 ; 25 : 22.
44
Taraba F. La réglementation européenne des dispositifs médicaux. Approche historique & technique. Broché.
2008.246p.
45
Rapport OMS. Les femmes, le vieillissement et la santé. Aide-mémoire N°252. Juin 2000
46
Shiffman MA. L'ethique dans le «marketing» de la chirurgie esthétique aux U.S.A. La Revue de chirurgie
esthétique de langue française. 2004 ;28(114) : 27-30.
47
http://blog.aujourdhui.com/davypajavant/219381/meeting-avec-florence-guerin-et-jean-michel-gurret.html
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Cette notion de partage obligé de pouvoir doit être pris en compte 48. L’automédication
amène l’entrée directe de l’industrie, dans la Santé des gens. A ce titre, les messages
véhiculés seront potentiellement lourds de conséquences économiques. C’est ce qui était
déjà probablement arrivé à l’époque du marché du veinotonique. L’information du patient
délivrée par l’industrie entretenait une confusion discutable entre symptomatologie
fonctionnelle veineuse et pathologie thrombo-embolique. Elle a débouché sur les
surconsommations connues et sur un final déremboursement pour inefficience de ces
traitements. La problématique aurait été probablement différente si un gros travail avait
été réalisé sur la plainte et sur un outil d’objectivation de celle-ci. Des études sont
actuellement en cours en médecine du travail, où cette pathologie n’est en rien prise à la
légère, du fait de ses conséquences en terme de perte d’efficacité. Malheureusement le
parti a été pris de travailler davantage sur l’aspect marketing, que sur l’aspect scientifique,
peut être aussi cela paraissait moins difficile voire moins hasardeux. Au final ; les
veinotoniques sortent du panier des biens et produits remboursables ; Peut être était-ce
défini depuis longtemps…Trop peu de travail a été fait à l’époque pour dissocier absence
de remboursement et absence de reconnaissance sociale du symptôme. Avec
l’élargissement de la gamme, il est à penser que ce contre sens intellectuel sera corrigé.
Ceci est aussi, en soi, une action d’Education à la Santé.
C’est une leçon d’Histoire que de rappeler que l’époque de la non assistance de l’Etat en
ce qui concerne le soin n’est pas si éloigné, et il est important de rappeler que la solidarité
nationale est une qualité de notre système politique et non pas un dû. S’éduquer à la santé
doit donc faire partie des devoirs du citoyen afin de coûter « le moins chez possible »49,
dans une visée démocratique de partage et de respect. Ce qui est regrettable est que face à
ces choix éminemment citoyens, aucune intégration des individus n’ait été prévue.
Pourtant les vrais détenteurs de l’Education à la Santé seront bien les citoyens. Que ce soit
par le biais de dialogues directs ou par le plus en plus utilisé outil de communication
informatique, ce savoir profane d’une richesse et d’une puissance indéniable est en train
de se restructurer après un temps de déstabilisation en partie dû à l’exode rural et à une
certaine forme de déstructuration de la famille50.
Ainsi l’éducation à la Santé est nécessaire pour que la visée portée par l’automédication
puisse s’accomplir, et que la place du citoyen puisse se reconstruire en dehors d’un
système de soin par trop paternaliste.
Quels codes pour l’ automédication ?
Pour une automédication sécuritaire et de qualité, l’application d’un code pourrait être
adopté afin de continuer à favoriser et à promouvoir le travail d’évaluation des différents
traitements disponibles.
Les produits inclus dans le circuit de l’automédication ne sont en aucun cas des produits
inefficaces ni dénués d’effets secondaires, et il est à ce titre nécessaire de poursuivre le
travail. L’aboutissement de ces recherches ne sera plus l’obtention d’un Tarif
48
http://www.unccas.org
El Chichini Popovic M, Pinhero PS. Pauvreté Droit de l’Homme et processus démocratique Droit et Société.
1996 ;34 :123-41.
50
Formulation empruntée au Dr Linda, utilisée non pas dans une vision culpabilisante, mais bien dans une
approche bienveillante de la solidarité.
Linda C , Caroline A.La démocratie locale à l’épreuve de la gouvernance. Presses de l’Université d’Ottawa,
2001, 237 p.
49
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Interministériel des Prestations Sanitaires (TIPS), mais pourrait être la nécessaire
évaluation de l’efficacité mais aussi de la balance bénéfice/risque des substances
proposées. Cela pourrait signifier une reconnaissance et un contrôle qui ne serait pas
seulement centré sur le concept de remboursement, mais bien de continuer le travail audelà de cette dimension, dans une prise en charge globale de la santé des sujets.
Il serait nécessaire de mettre en place une codification des produits accessibles en
automédication et qui permettrait au patient de se repérer 51.
Sur quels critères serait opérée cette reconnaissance ? Le travail de recherche pourrait
faire partie des critères pris en compte. En ce qui concerne les médications familiales
cependant, il serait nécessaire de construire de nouveaux outils d’évaluation qui seraient
construits sur des critères plus adaptés que ceux de morbi-mortalité actuellement retenus
pour les études cliniques. On pourrait imaginer des outils composites qui prendraient en
compte non seulement l’amélioration des symptômes mais aussi d’une manière plus
basique la satisfaction des patients, en utilisant des critères objectifs d’efficacité au travail
ou de bien-être dans les situations de la vie courante…
A partir de ces outils, il serait nécessaire de faire des barèmes lisibles pour le
consommateur, qui cautionnerait l’investissement du laboratoire et son travail, non
seulement en ce qui concerne l’aspect marketing, incluant son investissement en terme
d’information et d’éducation du patient autour de la pathologie, mais aussi les efforts
réalisés en matière de recherche. On pourrait imaginer une échelle colorielle rendant la
lisibilité de ces items plus facile pour le consommateur 52.
La délivrance de ces médications familiales est actuellement réservée aux pharmacies qui
ne sont, du reste, pas toutes obligées de participer 53. Il est envisageable qu’à l’avenir ces
traitements soient accessibles en parapharmacie, ou dans la grande distribution54. Des
fascicules expliquant la symptomatologie et les signes d’alerte pourraient accompagner la
délivrance de ces médicaments. L’utilisation de l’informatique via des sites qui pourraient
être homologués et reconnus par les autorités compétentes pourraient être un outil
intéressant dans une société en pleine mutation 55 avec de la même façon un code
permettant au patient de se repérer non seulement en terme d’efficacité mais aussi d’effort
de recherche de la part du laboratoire.
Quels outils d’évaluation ?
Un suivi est à anticiper pour permettre une évaluation à terme des mesures d’information
et d’éducation qui seront mises en œuvres, l’objet étant de promouvoir une
automédication responsable et non pas de faire sortir du cadre de l’évaluation la prise en
charge des pathologies considérées comme « bénignes », comme cela peut être le cas dans
les pays anglo-saxons.
51
Dossier pharmaceutique : au service des professionnels. Parrot J. 2007.
http://www.carnetsdesante.fr/spip.php?article40
52
http://forums.futura-sciences.com/sante-medecine-generale
53
M. le Ministre de la santé Xavier Bertrand a chargé Monsieur Alain Coulomb et le pr Alain Baumelou de
mener une réflexion sur les conditions de développement du secteur de l’automédication en France. Rapport
accessible sur http://www.lesechos.fr/medias/2007/0110//300130275.pdf
54
http://www.lunion.presse.fr
55
A noter la présence d’un site d’aide à l’automédication dirigé par les assurances privées :
www.lesechos.fr/patrimoine/famille/300203832.htm
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En Angleterre ou au Canada, la pathologie fonctionnelle et sa prise en charge sont sorties
du système. Ceci peut être considéré comme un désengagement de la part de l’Etat,
d’autant qu’aucun outil n’est aujourd’hui de ce fait disponible pour évaluer les pratiques
en matière de « soins » dans sons sens le plus large. Il semble ainsi à la lecture des
statistiques qu’une bonne partie de la plainte fonctionnelle ait disparue. Cela est-il
forcément négatif 56 ? Si l’état de santé global de la population ne s’en est pas ressenti, il
est important de rester attentif à ce que la relation globale des sujets à leur système de soin
n’en soit pas altéré 57.
Cela ne signifie pas pour autant que tout doit être pris en charge, mais bien qu’il est
important de rompre l’amalgame efficacité/remboursement. Il faut pour cela promouvoir
des outils de reconnaissance du travail accompli par tous les acteurs du système de Santé,
même si les choix politiques amènent à un non remboursement par l’Assurance Maladie
de ces méthodes. Ainsi l’automédication ne deviendra rien d’autre qu’un transfert de
compétence citoyen, responsable et bienveillant.
Ainsi depuis le savoir profane des plantes pour en arriver maintenant au pouvoir des
médications familiales « bientôt disponibles en supermarché », un long chemin a été parcouru
en très peu de temps. A ce tournant majeur de l’évolution des missions de tous les partenaires
du système de santé, il est tout particulièrement nécessaire de garder vivante la visée éthique
du soin. Le transfert de compétence ne doit pas se résumer à un simple transfert de
responsabilité et l’outil pédagogique à développer sera le seul garant du respect de la visée
hippocratique qui doit continuer à animer l’ensemble des soignants, amenés à travailler autour
de ces missions nouvelles.
En ouvrant le soin à d’autres logiques, il nous appartient aussi d’en tirer des bénéfices, en
termes de communication et de ce « marketing » qui a priori nous heurte, mais pourrait
toutefois nous permettre d’être plus pertinents dans nos rapports à l’autre autour de la notion
de prévention. Si la médecine apprend à ne plus être austère, elle doit aussi être attentive à
bien savoir rester inscrite dans ces valeurs Ethique du soin, sans lesquelles l’automédication
perdra toute dimension hippocratique.
56
Rouchet H, Lemoine N. Vivre, c'est s'exposer à ses limites. La sagesse est-elle un remède aux plaintes
fonctionnelles ?RevMed 2006 ;4 :14.
57
Pouchain D, Gay B, Budowski M, Huas D.Médecine générale:Bibliographie commentée. Ed Scientifique
CNGE 2003. 142p.
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