Entre prévention et auto-certification Entre

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Entre prévention et auto-certification Entre
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Industrie
Entre prévention
et auto-certification
Les deux sites GE Energy situés
sur le Territoire de Belfort sont certifiés
par leur groupe pour leur politique
en matière de santé et sécurité au travail.
Reportage sur les actions menées.
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Travail & Sécurité ­­– Novembre 2010 © Gaël Kerbaol/INRS
Travail & Sécurité ­­– Novembre 2010
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Entre prévention
et auto-certification
Les manutentions manuelles ont
fait l’objet de profondes réflexions
pour soulager les opérateurs.
À
Travail & Sécurité ­­– Novembre 2010 © Gaël Kerbaol/INRS
l’entrée du site de GE
Energy à Belfort, une
grande banderole
annonce aux visiteurs la certification interne au groupe
« Global Star » (cf. encadré
page 7), relative aux conditions d’hygiène et de sécurité,
dont bénéficie l’usine depuis
novembre 2008. Sur le site de
Bourogne, également titulaire
de la m"ême certification, à
quelques dizaines de kilomètres de là, des affiches « Viser
le 0 accident, c’est d’abord viser
le 0 incident » sont placardées
dans les ateliers. Les questions
de santé sont une préoccupation affichée de l’entreprise.
Ces deux usines du Territoire
de Belfort constituent l’entité
la plus importante du groupe
GE Energy en Europe, avec
plus de 2 000 salariés : 480 à
Bourogne, 450 à Belfort, plus
les personnels du siège et du
centre de recherche et développement, présents également sur ce deuxième site.
Anciennement Alstom, les
usines ont été rachetées par
le groupe américain en 1999.
Celle de Bourogne est dédiée
à l’usinage des composants
de turbines (aubes, segments
de protection, pièces de combustion, etc.) et de pièces de
rechange pour les opérations
de maintenance. L’usine de
Belfort est le site d’assemblage de rotors et de turbines.
C’est là aussi que se font les
essais des quatre modèles de
turbines à gaz de moyenne
et grande puissances (de 40 à
280 MW) construits sur le site.
Soudeurs, chaudronniers, tourneurs, fraiseurs, brocheurs,
ajusteurs, monteurs… sont
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GE s’est doté de son propre
système de management de la
sécurité, Global Star.
© Gaël Kerbaol/INRS
quelques-uns des métiers rencontrés sur les lignes.
Management
participatif
© Gaël Kerbaol/INRS
Les usines de Bourogne et de
Belfort présentent des problématiques différentes en santé
et sécurité au travail, du fait de
leurs activités respectives. Le
site de Bourogne exige beaucoup d’opérations unitaires
sur des pièces pesant de 3 à
25 kg avec des manipulations
manuelles répétitives, d’où des
risques de troubles musculo­
squelettiques. À Belfort, les
Des systèmes de préhension
pour les « petites » pièces (entre
3 et 25 kg) ont été développés
sur mesure.
Travail & Sécurité ­­– Novembre 2010
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Entre prévention
et auto-certification
opérations d’assemblage et
de montage des turbines
génèrent des manutentions
de pièces de plusieurs tonnes
à l’aide de ponts roulants. Les
principaux accidents recensés
sont des chocs, des coupures
ou des maux de dos. Sur les
deux sites, les maladies professionnelles déclarées – entre
été créé il y a environ dix ans.
Avec un responsable EHS présent sur chaque site.
Dans le cadre du programme
Global Star, de nombreuses
actions de prévention sont
menées dans l’entreprise. « La
manutention des pièces très
lourdes et le manque d’espace
impliquant des postures inconfortables au sein des turbines
sont problématiques, présente
Angélique Niebojewski, ergonome sur le site belfortain.
Nous réfléchissons ainsi à des
aménagements de postes,
en agissant sur la conception même des turbines. Nous
sommes en contact régulier
avec l’équipe engineering pour
agir en amont. Mais de telles
actions nécessitent des délais
longs, allant parfois jusqu’à
trois ans, d’où l’impression
pour certains que les choses
ne se font pas. » « On travaille
aussi sur l’ordre de montage
des pièces. Par exemple, on
a mis en place un prémontage de tuyaux, qui peuvent
ensuite être installés directement au sein de la turbine,
© Gaël Kerbaol/INRS
Chaque poste de travail
présente des spécificités propres.
Ici, la cabine de magnétoscopie
pour relever les éventuels défauts
sur les pièces.
une et trois selon les années –
touchent essentiellement les
membres supérieurs (mains,
coudes, épaules) et le dos.
La coactivité est également
une source de risques sur ces
lignes. « Ici, c’est du grand artisanat : certaines opérations ne
se font qu’une ou deux fois par
an », décrit Bruno Caubien,
responsable opérationnel
du site de Belfort. Un service
Environnement, Hygiène et
Sécurité (EHS) commun aux
deux usines et comprenant
une quinzaine de personnes a
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Travail & Sécurité ­­– Novembre 2010 L’entreprise réfléchit en amont
aux futures productions afin
de mieux appréhender
les contraintes de montage.
lobal Star est le nom
du programme interne
développé par le groupe
GE pour évaluer le niveau
de ses différents sites de
production à travers le
monde en matière d’hygiène
et de sécurité. Bourogne a
été certifié en novembre
2006 et Belfort deux ans
plus tard. « Ce programme
a un niveau d’exigence très
élevé, supérieur au OHSAS (1)
notamment », décrit Didier
Vallin, directeur hygiène et
sécurité. Il se compose de
21 thématiques (cf. encadré
page 8) et comporte
533 points de contrôle,
audités par du personnel GE
d’autres usines. Pour chaque
thématique, des groupes de
travail sont créés. « Si on est
bon en sécurité, on est bon
dans tous les autres secteurs.
Cela forme un tout, c’est une
véritable culture d’entreprise,
un état d’esprit. Chacun, de
l’opérateur au directeur, est
impliqué à son niveau dans
ces questions », résume
Bruno Caubien, responsable
opérationnel du site de
Belfort. Le budget pour la
mise en œuvre de Global Star
a été de six millions d’euros.
Les deux sites doivent
désormais maintenir
leur certification, revue
tous les cinq ans.
Les principales maladies
professionnelles recensées
dans l’entreprise sont des TMS
des membres supérieurs et du dos.
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G
poursuit Jérôme Boulanger,
responsable EHS pour le
même site. Cela facilite la
tâche des opérateurs. » Parmi
les actions en ergonomie
déjà réalisées, citons l’acquisition de tables élévatrices,
de retourneurs de paliers,
d’équilibreurs de charge, de
potences avec pinces spécifiques pour certaines pièces à
manutentionner, de supports
monte-et-baisse pour adapter la hauteur des pièces aux
besoins des opérateurs… « Il
nous faut aussi anticiper les
futures productions et réfléchir
le plus tôt possible à la “montabilité” des pièces ainsi qu’à la
© Gaël Kerbaol/INRS
Un système
de management
de la sécurité
interne
1. La spécification OHSAS 18001
est une référence internationale
précisant les exigences requises
pour permettre à un organisme
de maîtriser les risques et d’améliorer
ses performances.
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Entre prévention
et auto-certification
Le flux des pièces dans les usines
a été repensé pour fluidifier
les opérations.
© Gaël Kerbaol/INRS
Les
21 thématiques
du programme
Global Star
© Gaël Kerbaol/INRS
prévention à y associer »,
décrit Jérôme Boulanger.
Des fiches de risques aux
postes sont également
exposées. Des « quarts
d’heure sécurité » ont
lieu en moyenne une fois
par semaine pour chaque
équipe. Par ailleurs,
toutes les situations à
risques sont recensées
et font l’objet d’une analyse en groupe. « À la fin
du mois de juin 2010, on
avait 77 remontées de
situations dangereuses
(accident, presqu’accident
Le manque d’espace au
sein des turbines implique
des postures de travail
contraignantes pour les
opérateurs.
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Travail & Sécurité ­­– Novembre 2010 ou incident) », signale
Jérôme Boulanger. Une
réorganisation des flux
de pièces a permis de
gagner de l’espace dans
les ateliers et de supprimer conjointement
certains risques. Pour
les travaux en hauteur,
lors de l’assemblage vertical de grosses pièces
d’acier, des plates-formes
amovibles avec des éléments – coulisseaux ou
diaphragmes – qui épousent au plus près la forme
de la pièce, permettent
aux opérateurs de travailler à bonne hauteur
et sans risque de chute.
Des actions similaires
sont menées sur le site de
Bourogne. Par exemple,
E1 : Politique hygiène
et sécurité du site
E2 : Attentes et évaluations
hygiène et sécurité
du personnel
E3 : Analyse réglementaire
des risques
E4 : Mesure de l’implication
des employés
E5 : Spécialistes hygiène
et sécurité
E6 : Enquêtes et suivi
des accidents
E7 : Suivi des formations
hygiène et sécurité
E8 : Suivi des inspections
hygiène et sécurité
E9 : Équipements de
protection individuelle
E10 : Sécurité des entreprises
extérieures
E11 : Gestion des situations
d’urgence
E12 : Fiches de risques
aux postes
E13 : Opérations à haut risque
E14 : Gestion des
changements et
maintenance préventive
liée à l’hygiène
et à la sécurité
E15 : Hygiène industrielle
E16 : Gestion des produits
chimiques
E17 : Ergonomie
E18 : Sécurité des véhicules
et des utilisateurs
E19 : Suivi médical
du personnel
E20 : Évaluation et suivi
du programme hygiène
et sécurité
E21 : Consignations
des énergies
© Gaël Kerbaol/INRS
Le système de diaphragme permet
d’adapter l’espace de travail en
hauteur au plus près des pièces.
« des systèmes de ventouse
adaptés à des pièces de différentes tailles ont été élaborés
spécifiquement pour réduire
les manutentions », présente
Stéphane Binder, responsable
EHS sur le site. Des réflexions
sont par ailleurs menées
sur différentes questions : la
réduction de la consommation
des huiles de coupe, l’ergonomie aux postes de travail, les
fiches d’exposition aux produits chimiques, la gestion des
opérations à haut risque avec
les scénarios d’interventions
d’urgence associé
s, etc.
Une action « Faisons-le nousmêmes » est instaurée depuis
2004. L’idée est de permettre
aux opérateurs de proposer
des idées sur des améliorations qu’ils estiment nécessaires à leur poste de travail. « Ça
fonctionne très bien, nous
recevons plusieurs suggestions
par semaine », commente
Angélique Niebojewski. Pour
l’année 2009, 478 idées ont
été émises et 338 d’entre elles
validées et réalisées. « Le fait
L’avis du CHSCT
L
a politique hygiène et sécurité de l’entreprise est un
rouleau compresseur : le groupe a mis en place son propre
système de santé avec Global Star et impose des orientations
sans suffisamment de concertation, sans prendre en compte
dans ses approches des éléments ou des suggestions
complémentaires », explique un membre du CHSCT. Par ailleurs,
« le système Global Star n’a aucune valeur juridique en France,
tempère un autre membre du CHSCT. C’est un système américain
qui ne prend pas en compte les spécificités françaises. Les
moyens financiers sont là, mais on ne fait pas de la sécurité
qu’avec de l’argent. L’entreprise investit de gros moyens
sur les équipements, au détriment de réflexions collectives
d’organisation. C’est une politique de prévention individuelle
avant d’être collective. »
que le service EHS détienne son
propre budget et le gère librement en fonction des besoins
est une des clés de la réussite »,
résume Didier Vallin, directeur hygiène et sécurité. Le
montant de cette enveloppe ?
L’entreprise refuse de le communiquer, reconnaissant qu’il
est « énorme ». Néanmoins,
les efforts se poursuivent. « En
sécurité, on n’a jamais fini. Et il
va sans doute être encore plus
difficile de maintenir le niveau
exigé par Global Star que
d’avoir obtenir la certification »,
conclut Bruno Caubien.
Céline Ravallec
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