Gratuit - InterMédia

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Gratuit - InterMédia
14.12.2011 n° 1147
+ d’infos sur www.intermedia.fr
ISSN : 0249-1575
15€
Marketing / communication / médias en rhône-alpes m a g a z i n e
dossier Les stations de sports d’hiver : une clientèle ciblée sur un espace réduit
Un terrain de jeu mal
exploité par les marques
Montagne
spécial
grand témoin
« Les marques suivent les évolutions de l’image
de la montagne »
Jean-Marc Silva, directeur de France Montagnes
enquête Quand la montagne gagne
les annonceurs des plaines
Décryptage des marques qui ont choisi de s’incarner dans les sommets
édito
Par Michel Texier
Un univers plus
ou moins bien exploité
2, rue Commandant-Dubois BP 3130 - 69406 Lyon cedex 03
Tél. 04 72 84 45 55.
Fax : 04 72 84 45 50.
Mail : [email protected]
Éditeur : InterMédia Sarl au
capital de 37 579 euros. Siren :
325 694 909. Directeur de la
publication : Jacques Simonet.
Rédacteur en chef adjoint :
Michel Texier. Rédaction :
Thomas Nardone, Charlotte
Vincent, Camille Nagyos, Jérémy
Chauche. Service commercial :
Pascal Leby, Delphine HaméonTaton, Etienne Mayaux.
Maquette : ProEdito (Paris).
Mise en page : Frédéric Morel mfredpao ! (Villeurbanne).
Impression : Dugas Offset
(Villeurbanne).
Dépôt légal : à parution.
Abonnement : voir p. 29.
www.intermedia.fr
C’
est un voyage original dans l’univers de la montagne que vous
propose ce nouveau magazine, à
travers l’utilisation qu’en font les
marques dans leur publicité et
leur marketing. Nous nous sommes surtout intéressés à la communication des marques étrangères à son univers, beaucoup plus qu’à celle
des équipements de ski, trekking et compagnie
ou des stations de sports d’hiver devenues aussi
des marques à part entière pour les plus célèbres.
Un intérêt motivé par le fait que Rhône-Alpes est
plutôt incontournable pour
les marques en quête d’altitude, puisqu’elle concentre
80 % du tourisme hivernal
de l’Hexagone et les sommets les plus prestigieux.
Enfin, la montagne a beaucoup inspiré les publicitaires, de l’eau d’Évian à
la vache Milka en passant
par la barre Ovomaltine ou
les voitures de nombreux
constructeurs. Et attiré
quelques marques usurpatrices, vêtues de faux
habits montagnards (p. 16).
Marketing timide
Un marketing que les spécialistes trouvent cependant encore timide. « À
l’inverse des stations autrichiennes ou américaines
qui ont très vite adopté
un positionnement fort,
attirant ainsi une foule de
marques, les stations françaises ont négligé le marketing pendant longtemps.
Elles se contentaient de
leur réputation pour attirer
des skieurs, sans penser à
valoriser ce potentiel »,
déplore le patron de l’agence Dragonne, dans le
dossier consacré à l’événementiel des cimes (p.
18). Une terre de prédilection pour les opérations
de street ou plutôt snow-marketing.
En poursuivant ce voyage, vous découvrirez que
nombre d’agences et de prestataires prospèrent
dans ce secteur de la montagne (p. 6 et 8), que
février est le meilleur mois pour y faire sa pub
(p. 14) et bien d’autres choses. Bonne lecture. v
La montagne a beaucoup
inspiré les publicitaires
jusque dans les années 90.
Moins aujourd’hui :
le marketing opérationnel
a pris le pas sur le mythe.
Valeurs ajoutées
Ce numéro comporte :
• un encart Double Mixte entre
les pages 20 et 21
scène leurs produits sur fond d’images extrêmes.
Une exploitation publicitaire très en vogue jusque
dans les années 90. Depuis, la montagne s’est
convertie au tourisme de masse et revendique
une image plus apaisée, entre plaisir et bien-être.
Du coup, elle a un peu perdu de son attrait pour
les publicitaires, estime Georges Lewi, l’un des
grands spécialistes français du branding (p. 12)
en pointant que « le marketing opérationnel de la
montagne a pris le pas sur son mythe. »
Car la montagne véhicule de nombreuses valeurs,
comme le rappelle notre grand témoin, Jean-Marc
Silva, le patron de France Montagnes (p. 30). Des
valeurs traditionnelles de persévérance, de courage, de dépassement de soi, d’authenticité.... que
se sont appropriées des marques en mettant en
n° 1147 I 14 décembre 2011 I InterMédia Magazine I 3
sommaire
Spécial MONTAGNE
repères
06. ENTÊTES
Sylvie Burger réunit les afficheurs spécialisés
montagne.
08. entreprises
L’initiative de l’année. Ancienne
commerciale dans la télévision,
Sylvie Burger vient de fonder une régie
publicitaire qui réunit les plus grands
afficheurs de montagne en France.
Un concept qui lui permet de proposer
des offres packagées à ses clients.
Trois opérations de
communication réussies.
Pas facile pour une marque de
monter un événement en altitude
qui attire les foules. Il faut surtout
penser à bien choisir la station en
fonction de sa cible.
Somfy a visé juste avec le biathlon.
10. ANALYSE Michel Colin : « Les marques utilisent peu
la radio pour communiquer dans les stations ».
11. La galaxie du... groupe dovemed
dossier
12. en suite
ANALYSE Georges Lewi : « La montagne disparaît des
radars de la publicité ».
13. IL L’A DIT, IL L’ A FAIT Frédéric Cassoly : « Je vais faire de
l’Alpe d’Huez le premier festival de cinéma
en Rhône-Alpes ».
14. en chiffres
Publicité : les meilleures périodes pour
communiquer en montagne.
16. enquête
Quand la montagne
gagne les annonceurs
des plaines.
Elles n’ont rien à voir avec la montagne. Mais elles
ont compris que cet univers, avec ses valeurs et son
imaginaire, était vendeur. Focus sur quelques marques qui
s’approprient la montagne dans leur communication, de
manière plus ou moins honnête.
4 I InterMédia Magazine I n° 1147 I 14 décembre 2011
18. Événementiel en stations
Un territoire mal exploité par les marques
22 [ reportage ] 150 stations… Comment s’y retrouver ?
24 [ focus ] JO d’Albertville 92, un jackpot pour les marques.
26 [ analyse ] Les 7 erreurs à éviter pour rester au sommet.
28 [ Pour/contre ] La communication est montagne est-elle efficace ?
Des marques
qui ne reculent
devant aucun
artifice. La montagne
est un univers très
vendeur. Certaines
marques l’ont bien
compris et exploitent
son image pas
toujours de manière
très honnête.
Ces entreprises
qui s’incarnent à
travers les sommets.
Milka, Toblerone, Évian...
Des logos célèbres
qui utilisent l’image
de cimes plus ou moins
connues. Décryptage
par Jean-Jacques Urvoy.
horizons
30. grand témoin
Jean-Marc Silva « Les marques suivent les
évolutions de l’image de la montagne »
Depuis 50 ans l’image de la montagne ne cesse d’évoluer
dans l’imaginaire des Français. Aujourd’hui convertie au
tourisme de masse, elle veut être un espace de plaisir et
de bien-être.
34. DÉCRYPTAGE
Des logos au sommet
36. idées
Séminaires en montagne : retour à la simplicité
38. débloque-notes
Les mots
de la montagne
Boardercross Parcours
d’obstacles sur piste comportant des
bosses, des portes et des virages relevés.
Domaine skiable
Territoire d’une commune où il est possible
de s’adonner à la pratique du ski. Il peut être
exploité par une société privée, une société
d’économie mixte ou bien directement par
la commune.
Front de neige Territoire
à la frontière entre l’espace urbain
et le début des pistes.
Journée-skieur
Nombre
de premiers passages aux portillons de
contrôle sur une journée. C’est l’unité de
mesure la plus fiable pour apprécier la
fréquentation d’une station.
index
Les principales
marques citées
Actimel … 33
Adidas … 34
AGF … 24
Atomic … 12
Audi … 17, 32
Azimut Yachts … 23
Babybel … 23
Banque Rhône-Alpes … 28
Billabong … 23
BMW … 6, 17, 23, 32
Caisse d’Épargne … 6, 28
Candia … 24
Caprice des dieux … 32
Carlsberg … 17
Citroën … 17, 32
Club Med … 33
Coca-Cola … 8, 16, 33
Crédit Lyonnais … 24
Dodge … 32
Eider … 36
Évian … 12, 24, 31, 34
France Equipement … 25
France Telecom … 24
Hollywood Chewing Gum … 33
IBM … 24
Jambon Aoste … 16
King Jouet … 25
Manchon Support installé sur les
Lafuma … 8
Land Rover … 17
La Poste … 24
Logitoys … 25
Porte-skis
Mars … 33
McDonald’s … 16, 33
Menier … 22
Milka … 26, 31, 32, 33
Mont-Blanc … 34
barres de sécurité des télésièges, sous les
yeux des skieurs durant leur montée.
Il permet aux skieurs de
ranger facilement leur matériel de glisse et
peut aussi servir de support d’affichage.
Portillon Il permet de vérifier le
forfait au départ des remontées mécaniques et peut servir de support d’affichage.
Nescafé … 6
Nestlé … 8, 36
Nissan … 23
Opinel … 25
Orange … 8
Ovomaltine … 12, 33
Paramount … 34
Peugeot … 32
PlayStation … 22, 23
Powerade … 6, 26
Quiksilver … 8, 36
Renault … 13, 24
Rip Curl … 8
Rossignol … 8, 12, 17
Salomon … 8, 12, 23
Satoriz … 8
SFR … 8
Sherpa … 10 SNCF … 24
Somfy … 8
Sony … 6, 22
Swarovski … 23
Swatch … 23
Tefal … 25
Thonon … 31
Toblerone … 34
Vicat … 25
Volvic … 31
William Saurin … 26
n° 1147 I 14 décembre 2011 I InterMédia Magazine I 5
télévision
Laurent Surbeck
développe
Montagne TV.
Ancien DG de TV8
Mont-Blanc, il a créé
il y a un an la chaîne
Montagne TV, dédiée
à l’art de vivre en
montagne.
Aujourd’hui,
Montagne TV est
diffusée sur le
bouquet de CanalSat
et la Bbox et fait
appel à de grands
noms pour ses
émissions comme
Alexandre Debanne.
Le CA 2011 a atteint
1 M€ et la régie
publicitaire a été
confiée à France
Télévisions Publicité.
Montagne TV vise
l’équilibre budgétaire
d’ici à 2015.
Coup de projecteur sur quelques dirigeants
qui s’activent pour rapprocher les marques
et la montagne.
têtes
PREMIÈRE
Frédéric Giraud
donne de l’altitude
à Malls
L’INITIATIVE DE L’ANNÉE
ENVIRONNEMENT
Erwann Jegousse
Une femme
de TV
veut labelliser
les stations.
Le président de
l’association
Mountain Riders, qui
milite pour le
développement
durable en montagne,
veut développer un
label vert pour les
stations de ski. À
l’image de ce qui
existe pour les
stations familiales.
Ce label pourrait
devenir un critère de
choix pour les
vacanciers, mais
aussi pour les
marques engagées
dans une démarche
de RSE. En
attendant, Mountain
Riders vient de sortir
l’Eco-guide des
stations 2011-2012.
NOMINATION
Côme Vermersch
arrive à Savoie
Mont-Blanc
Tourisme.
Il prend le poste de
DG de l’organisme de
promotion, à la suite
du départ à la
retraite de Rémy
Charmettant. Côme
Vermersch, 53 ans,
connaît bien le
secteur touristique
puisqu’il était
directeur du CDT de
la Somme depuis
2002.
Sylvie Burger a fondé
SBC Ooh Montagne
en juillet 2010. Avant
de se spécialiser dans
l’affichage en montagne,
Sylvie Burger travaillait
dans la télévision. Pendant
huit ans, elle a été
directrice de publicité pour
Fashion TV internationale.
Elle a également participé
au lancement de MTV
en France et a collaboré
avec IP France, la régie
publicitaire de RTL.
Sylvie Burger réunit les afficheurs
spécialisés montagne
Idée lumineuse. Cette ancienne
commerciale dans la télévision
a fondé en juillet dernier Ooh
Montagne, une régie publicitaire
qui réunit huit grands afficheurs de
montagne en France. Le concept
est unique en région. « Le marché
de l’affichage en montagne est
très segmenté. Chacun possède un
petit bout. Résultat : les annonceurs
avaient une demande à laquelle je ne
pouvais pas répondre en commercialisant une seule société », explique
Sylvie Burger.
Clients prestigieux. Elle travaille ainsi
avec Carré 5, Lumiplan, Skignaletiks,
Media Mountain, Topeak’s, Espaces
Montagne... Elle propose des offres
packagées réunissant affichage
numérique, borne interactive, publi-
6 I InterMédia Magazine I n° 1147 I 14 décembre 2011
Avec son agence Malls, Frédéric Giraud
organise pour la seconde année consécutive l’Acticross avec la marque Actimel
(Danone). Il s’agit du premier événement
en montagne géré par Malls, qui était
jusque-là spécialisée dans le marketing
opérationnel dans les centres commerciaux.
« Nous avons imaginé un parcours de
boardercross ludique pour les 8-12 ans et
leurs parents », détaille Frédéric Giraud,
dirigeant de l’agence Malls. Le parcours,
ouvert toute la saison, s’étend sur quatre
stations gérées par la Compagnie des
Alpes et a attiré l’an dernier 800 000
participants. Un million de jeunes skieurs
sont attendus cette saison.
Un succès qui donne des idées à
Frédéric Giraud : « Nous travaillons sur
un concept d’animation en montagne
destiné au secteur de l’automobile »,
souffle le dirigeant. v
ENVOL
Armelle Solelhac rêve d’international pour Switch
cités sur les tickets de carte bleue
ou les reçus de parking, campagne
sur les porte-skis... Ses clients ?
Principalement des grandes marques
comme Sony, Nescafé, la Caisse
d’Épargne, Powerade, BMW...
Cible convoitée. Ces supports leur
permettent de toucher 7 millions
de skieurs en France. Il s’agit d’une
cible à fort pouvoir d’achat : des
CSP+ françaises et internationales
entre 25 et 54 ans. « Une clientèle
jeune, branchée et aventureuse,
très captive dans un contexte de
vacances », précise Sylvie Burger.
Elle veut aussi développer les études
sur l’efficacité de la communication
en montagne pour convaincre
toujours plus d’annonceurs. v
Après avoir créé son agence de
communication et marketing spécialisée dans la montagne en 2007, la jeune
Haut-Savoyarde compte développer
son modèle à l’étranger. L’objectif :
ouvrir des bureaux à Montréal et Los
Angeles en 2012 et s’allier avec une
autre agence en Suède. Car Armelle
Solelhac a déjà séduit des clients
internationaux puisqu’elle travaille
avec la station de ski Trysil (Norvège),
Mammoth Mountain et la National Ski
Areas Association (États-Unis). v
n° 1147 I 14 décembre 2011 I InterMédia Magazine I 7
ÉVÉNEMENTIEL
Dragonne veut
séduire les
annonceurs
parisiens.
MÉNAGE
Lafuma et le CAF
s’investissent
pour l’environnement.
La fondation du
groupe drômois et le
Club alpin français
ont participé en septembre 2011 au
nettoyage de la Mer
de Glace dans le
massif du MontBlanc. Une opération
soutenue par
Satoriz, qui a fourni
les repas, la mairie
de Chambéry
(logistique) et WWF.
treprises
En montagne, certaines sociétés se distinguent par leurs opérations
ou leurs innovations. En voici quelques exemples.
PUBLICITÉ
Cap Mer et Montagne résiste au mauvais temps
Créée en 1996, la société de
Saint-Ferréol (74) s’est imposée
comme un des spécialistes des
supports publicitaires capables
de résister aux conditions climatiques extrêmes : voiles, structures
gonflables, tentes pliantes... Après
s’être naturellement intéressée aux
stations de montagne, l’entreprise
s’est installée à la mer, à Hossegor,
où elle a ouvert une agence il y a
une dizaine d’années.
Dirigée par Jean-Pierre Chevallot,
Cap Mer et Montagne réalise aujourd’hui un CA de 3,9 M€ avec
25 salariés. Dont près de 20 % à
l’export en Suisse, en Autriche, en
Allemagne et en Scandinavie. Le
fabricant de voiles publicitaires
s’appuie sur près de 5 000 clients
actifs dans les secteurs de l’agroalimentaire (Nestlé, Coca-Cola…), de
l’industrie du ski et du surf (Salomon, Rossignol, Rip Curl, Quiksilver...), des télécommunications
(Orange, SFR…), des banques et
des assurances principalement.
Mais le marché, de plus en plus
concurrentiel, pousse aujourd’hui
Cap Mer et Montagne à trouver des
relais de croissance. Pour développer ses produits, la société a ainsi
créé en 2001 un département R&D.
Elle vient également de monter sa
propre régie publicitaire spécialisée dans l’affichage en station :
Cap Média. v
l’imaGE 2011
soda
Coca-Cola mise
sur le tri
sélectif.
Pour éviter que des
canettes soient
jetées sur les pistes,
Coca a installé
250 bornes de tri
sélectif dans
22 stations. La
maintenance est
assurée par l’agence
lyonnaise Front de
Neige.
L’Hélidrone On connaissait les drones de combat ou de renseignement
à usage militaire. Voici l’Hélidrone, un petit appareil électrique ultraléger,
doté de caméras ou d’appareils photo numériques. Radiocommandé par
un pilote au sol, il permet de réaliser des prises de vue aériennes pour des
visites virtuelles, des clichés techniques (suivi de chantier) et panoramiques… Ce concept, importé d’Allemagne et particulièrement adapté
aux zones montagneuses, est exploité depuis 2009 par un trio savoyard
composé d’un photographe, d’un informaticien et d’un commercial. Après
avoir notamment filmé la Grande Odyssée l’an dernier, les trois associés
planchent sur le développement d’un réseau de franchises en France. v
8 I InterMédia Magazine I n° 1147 I 14 décembre 2011
Martin Fourcade,
vice-champion
olympique,
porte haut
les couleurs
de Somfy
©Zoom
Maxime Bourbon a
fondé en avril 2011
cette agence
spécialisée en
communication
événementielle et
digitale. Il s’est
associé à Cyril Marie,
le dirigeant de
Future Création (74).
Leur concept ?
Proposer aux
marques des
événements
(tournées,
roadshow...) relayés
sur le web et les
médias sociaux, en
particulier dans
l’univers de la
montagne. À leur
actif, une opération
de street-marketing
dans 14 stations
alpines pour Nestlé
France et l’organisation du Snowbreak à
Valloire, un festival de
musique électronique
et de démos
sportives.
RÉUSSITE
Somfy a visé juste avec le biathlon
Installé au pied du Mont-Blanc, le leader mondial des automatismes d’ouverture s’offre une belle notoriété à
moindre coût grâce au biathlon.
Somfy est en effet le sponsor principal de l’équipe de France, après
avoir soutenu le champion tricolore
Raphaël Poirée. Un pari osé au vu du
nombre confidentiel de licenciés en
France : pas plus de 300.
Sauf que : « Ce partenariat est particulièrement stratégique dans les pays
scandinaves et outre-Rhin où le biathlon est quasiment un sport national »,
justifie Jean-Michel Jaud, directeur
de la communication corporate du
groupe qui a réalisé 15 % de son CA
l’an dernier en Allemagne, son deuxième marché après la France.
Ce partenariat permet également à
la marque d’affirmer, à travers cette
discipline, des valeurs d’humilité, de
simplicité, de performance, d’endurance et de précision. Tout cela pour
une dépense limitée puisque Somfy
consacre moins de 5 % de son budget
communication à l’opération.
Enfin, le fabricant a fait du biathlon
un outil de communication interne.
L’entreprise organise régulièrement
des rencontres entre les sportifs et son
personnel. Comme après les derniers
JO de Vancouver où les six médaillés
français ont rencontré en exclusivité
les familles des salariés. En nommant
l’an dernier le biathlète Vincent Defrasne à la tête de sa fondation, le
groupe haut-savoyard a réaffirmé encore un peu plus son engagement. v
n° 1147 I 14 décembre 2011 I InterMédia Magazine I 9
treprises
Michel Colin, président de Mediatic Conseils, accompagne les radios dans leur commercialisation. Il tient aussi un blog
professionnel réputé, radiopub.fr
”
Les faits
Les investissements publicitaires en radio
ont progressé de
6,7 % en France,
pour atteindre
près de 4 Md€
en 2010. Cela en
fait le troisième
média préféré
des annonceurs.
Mais les marques
investissent peu
sur les radios de
montagne malgré
d’indéniables
atouts.
Les marques utilisent peu la radio pour communiquer
dans les stations ”
intermédia. Quelle est la place de la radio
dans les stratégies de communication
en montagne ?
Pour l’instant, les marques n’ont
pas fait un usage intensif de la radio
pour communiquer en montagne.
Évidemment, les marques locales
utilisent davantage ce média, comme
l’enseigne Sherpa par exemple qui est
un important annonceur.
Mais les marques nationales qui ne
sont pas liées directement à l’univers
de la montagne sont absentes.
mc
intermédia. Pourquoi les marques ne
sont-elles pas plus présentes sur les
fréquences de montagne ?
Il y a plusieurs raisons. D’abord,
tous les réseaux ne sont pas égaux
dans leur couverture de la montagne.
Par exemple, NRJ n’est pas très
présente dans les stations. Virgin
Radio était mieux implantée, avec
mc
10 I InterMédia Magazine I n° 1147 I 14 décembre 2011
plus de 25 fréquences dans les Alpes.
Mais la nouvelle stratégie du réseau a
conduit à la fermeture de nombreuses
fréquences.
Quant aux Indés Radio, ils ont une
meilleure couverture des stations, mais
leur régie, TF1 Publicité, ne propose
pas un produit spécifique pour la
montagne. Certainement parce qu’il
n’existe pas une forte demande de la
part des annonceurs.
intermédia. Pourtant les consomma-
teurs sont nombreux en montagne !
mc Oui, et je pense qu’ils ont le réflexe
d’écouter les radios locales pour
connaître la météo, l’état des pistes,
la circulation... Le problème, c’est
qu’il manque des études précises sur
l’audience des radios en montagne.
En effet, l’audience reste modeste
donc elle est mal mesurée par Médiamétrie. Faute de données fiables,
les annonceurs nationaux ne se
bousculent pas pour communiquer
sur les radios locales de montagne. Et
donc les régies ne leur proposent pas
de produits spécifiques.
intermédia. Les radios de montagne
sont-elles condamnées à vivre des
annonceurs locaux ?
Oui, à moins de développer un
réseau puissant, à l’image d’Espace
Group de Christophe Mahé avec La
Radio Plus. Basée à Thonon-les-Bains,
elle est vraiment positionnée comme
le réseau montagnard de référence,
avec 17 fréquences en station et en
plaine.
Elle pourrait donc être capable de proposer un produit montagne intéressant
aux annonceurs nationaux. D’autant
plus qu’elle peut s’appuyer sur les
autres radios d’Espace Group situées
en montagne, ODS et Alpes 1. vTN
mc
la galaxie du… groupe DOVEMED
Rémi d’Ersu
Sébastien Mittelberger
Patrick Plaisance
Dominique
Verdiel
Françoise Gibiat
En trente ans, Dominique Verdiel a bâti à Grenoble
un des premiers groupes de médias et de communication
indépendants en Rhône-Alpes. Dovemed (pour Dominique
Verdiel Média) compte aujourd’hui 80 permanents
et annonce qu’il réalisera 12 M€ de CA en 2011.
D
ovemed est détenu en totalité par
Dominique Verdiel. Le groupe
compte deux activités : le pôle
« presse et services aux professionnels »
et le pôle « média publicité et communication en montagne ». Ces deux pôles
sont présidés par Dominique Verdiel.
Il est épaulé par Sébastien Mittelberger, directeur délégué commerce, qui
manage toutes les équipes commerciales,
et Françoise Gibiat, secrétaire générale,
Caroline Fouché
Thomas Dupont
qui s’occupe des services généraux et
des RH. Enfin, Rémi d’Ersu est le directeur administratif et financier du groupe.
• Le pôle presse (60 % du CA) regroupe
trois filiales. Les Affiches de Grenoble et
du Dauphiné SAS édite l’hebdomadaire
éponyme, des suppléments thématiques
et culturels et les trimestriels La Mairie
Magazine et City Juris. Caroline Fouché en assure la rédaction en chef.
L’entité propose aussi des services aux
professionnels autour du traitement des
annonces légales (publication, formation, outils...). La dématérialisation des
Légales Collectivités est confiée à Thomas Dupont.
La Vie Nouvelle (Chambéry), la seule so-
ciété du groupe qui n’est pas basée à Grenoble, édite l’hebdomadaire d’annonces
légales et ses suppléments. Patrick Plaisance en est le rédacteur en chef.
Enfin, la troisième filiale, Montagne Expansion, est dédiée aux professionnels
de la montagne. Avec Montagne Leaders, La Lettre économique de Montagne
Expansion et Andes Lideres, le dernier-né,
qui s’adresse aux hispanophones.
Le pôle média (40 % du CA) com•
prend deux filiales. Média Montagne est
spécialisée dans l’affichage en montagne
sur des supports comme les porte-skis,
les transats, les portillons des télésièges...
Alors qu’Affi Mobile est consacrée à l’affichage mobile dans toute la France. v
n° 1147 I 14 décembre 2011 I InterMédia Magazine I 11
suite
Georges Lewi est un spécialiste des marques. Il enseigne au Celsa et a écrit de nombreux livres.
Dernier opus : Mythologie des marques (Pearson/2010).
La montagne disparaît des radars de la publicité ”
les faits
L’image de la
montagne s’est
banalisée avec
la démocratisation du ski
et le tourisme
de masse. Le
marketing a
pris le pas sur le
mythe. Comme il
fait moins rêver,
cet univers est
devenu moins
attrayant pour les
marques.
intermédia . Quelle place occupe aujourd’hui la montagne dans la publicité ?
gl Plus grand-chose me semble-t-il,
à part pour quelques marques automobiles et naturellement les équipementiers de montagne et les stations
touristiques. On voit très peu de films.
Le marché s’est considérablement appauvri par rapport aux années 1970-80
où la montagne était très à la mode
chez les publicitaires.
Les marques venaient y chercher
des images extrêmes et des valeurs
de dépassement. On se souvient par
exemple du slogan culte de la barre
Ovomaltine proclamant que « c’est de
la dynamique » ou que « avec Ovomaltine, ça va pas mieux, mais ça
dure plus longtemps. » Chewing-gum,
shampoings, dentifrices... se prévalaient de fraîcheur, de blancheur et
de neige éternelle. Et les fabricants
de skis rivalisaient de scènes spectaculaires. 12 I InterMédia Magazine I n° 1147 I 14 décembre 2011
Ce n’est plus le cas. La montagne disparaît des radars publicitaires.
intermédia.
tion ?
Pourquoi cette désaffec-
gl Parce que son image s’est normalisée. Aujourd’hui, la montagne est
un lieu de vacances banales : rando,
vélo, dodo ! Cet affadissement vient du
lissage du marketing touristique, car il
faut remplir les stations été comme
hiver. D’où un hiatus entre un marketing de masse — destiné à attirer le plus
grand nombre — et le mythe originel
de la montagne, domaine du dépassement réservé à un petit nombre.
On assiste à une sorte de « décathlonisation » du marché. Les produits de
glisse (planches, fixations, chaussures),
hier apanage de marques prestigieuses
comme Rossignol, Salomon, Atomic…,
sont désormais beaucoup vendues à
bas prix en MDD. Cette standardisation
induit une perte de valeur.
Et dans ce contexte, les autres marques
utilisent peu, dans leur publicité, une
montagne qui ne fait plus rêver. Même
Évian a délaissé sa référence aux Alpes
et aux forces qu’elles donnaient à son
eau.
intermédia. Est-ce une tendance lourde ?
Cela en prend le chemin, parce que
la communication de la Collective de
la montagne abonde dans ce sens, du
moins dans ses campagnes en France.
Elle y prône des sports gentillets et des
loisirs cool : on peut même y faire de
la pâte à modeler !
C’est sans doute une erreur. Les
marques ont besoin de valeur « aspirationnelle ». Et il y a toujours chez elles
un élastique assez tendu entre une promesse qui fait rêver et un marketing
adapté, plus opérationnel, voué à la
rentabilité immédiate.
Aujourd’hui, c’est ce marketing qui a
remodelé l’image de la montagne. v
gl
”
IL l’a dit IL l’a fait
Frédéric Cassoly, fondateur de l’agence Tournée Générale, dirige depuis dix ans le Festival international de la
comédie de l’Alpe d’Huez
Je vais faire de l’Alpe d’Huez le premier
festival de cinéma en Rhône-Alpes ”
”
les faits En 2001,
Frédéric Cassoly
a repris l’organisation du Festival
international du
film de comédie
de l’Alpe d’Huez,
qui connaissait
des difficultés
financières. En
dix ans, il a assis
le festival et en
a fait le premier
événement
cinématographique de
la région. La
prochaine édition
se déroule du
17 au 22 janvier
2012.
intermédia. Pourquoi avez-vous repris le
Festival international du film de comédie
de l’Alpe d’Huez ?
fc Je dirige l’agence parisienne Tournée Générale depuis vingt-trois ans.
L’événementiel cinématographique
est notre spécialité : nous collaborons
avec le Festival de Cannes et plus récemment avec le festival Lumière de
Lyon pour qui nous gérons les RP. Le
festival de l’Alpe d’Huez nous intéressait, car c’est le seul festival de comédie ouvert au public et gratuit. C’est
d’ailleurs l’unique événement que
l’agence organise entièrement.
intermédia . Dans quelle situation se
trouve le festival aujourd’hui ?
Dix ans après, le festival est financé à 60 % par des partenaires
privés. Le budget s’élève à 650 K€
(hors échanges). Nous attirons des
marques comme Renault, Screenvision, EuroNews, JCDecaux, Insert...
fc
Et pour la première fois cette année,
la cérémonie de clôture sera retransmise en direct et en clair sur une des
chaînes d’Orange. La fréquentation
a gagné 30 % pour atteindre 12 000
spectateurs par an, et 2 000 festivaliers
(jury, équipes des films, presse...).
intermédia. Quel est l’intérêt du festival
du film de comédie pour les marques ?
fc L’événement leur permet de faire
des opérations de RP et d’inviter leurs
clients au ski tout en rencontrant des
stars du cinéma. Par exemple, EuroNews convie les régies européennes
et profite du réceptif du festival. Quant
à Renault, la marque fait découvrir
chaque année ses modèles sport sur le
circuit de glace. Cette année, ce sera
la Mégane RS.
intermédia. Quelles seront les nouveautés de l’édition 2012 ?
Pour la première fois, nous organisons deux journées professionnelles
pour attirer les acteurs du secteur
(distributeurs, exploitants...) qui ont
tendance à bouder ce genre de manifestation, trop grand public à leurs
yeux. Des déjeuners leur seront proposés ainsi qu’un tournoi de pétanque
sur glace. v
fc
Festival international du film de comédie de l’Alpe d’Huez.
Création : 1997 • 12 000 spectateurs • Budget : 650 K€ • 8 films en compétition.
n° 1147 I 14 décembre 2011 I InterMédia Magazine I 13
CAPTIF
10 minutes.
C’est la durée
moyenne d’attente
des skieurs dans les
gares de remontées
mécaniques des
stations de ski
françaises. Une
captivité des cibles
qui permet une
diffusion de
messages spécifiques via des écrans
digitaux disposés
dans les gares.
(Source : SBC - Ooh
Montagne.)
tourisme
domaine
38,3 millions
325 stations
C’est le nombre de nuitées qu’ont passées les touristes
en Savoie Mont Blanc au cours de l’hiver 2010-2011.
Une fréquentation touristique qui se maintient pour
le troisième hiver consécutif. Un résultat honorable
en dépit du calendrier scolaire défavorable, des très
faibles chutes de neige et, bien sûr, de la situation
économique morose. La destination assure maintenir
ce niveau de fréquentation notamment grâce à ses
stations d’altitude, mais aussi en raison du report
de certains séjours dû à l’instabilité politique des
destinations soleil concurrentes. v
C’est le nombre de stations de ski répertoriées en France,
dont 14 sont considérées comme majeures car elles
accueillent plus d’un million de journée skieurs par an. En
tête, le territoire de Savoie Mont Blanc, avec 110 stations
qui se partagent 17 domaines alpins skiables reliés, soit
4 800 km de pistes et 47 sites de ski nordique. En outre,
les remontées mécaniques des stations de Savoie Mont
Blanc ont généré 742,2 M€ de recettes en 2009. C’était
66 % des recettes nationales. Du côté des forfaits, ces
domaines ont enregistré 34 millions de journées skieurs
en ski alpin et 679 000 en ski nordique. v
Quelques chiffres utiles
pour les marques afin de mieux cerner
les marchés de la montagne
chiffres
BUSINESS
479. C’est le
nombre d’hôtels
équipés pour les
séminaires
d’entreprise sur le
territoire de Savoie
Mont Blanc. Ce qui
représente plus de
18 000 chambres
au total. À noter
aussi que treize
centres de congrès
sont enregistrés sur
le même territoire.
SONDAGE
La Savoie donne
confiance. 79 %
des jeunes
Savoyards et
Haut-Savoyards
disent éprouver un
sentiment de
complicité envers
leurs parents. Un
résultat qui dépasse
de 7 % la moyenne
nationale. C’est ce
qu’indique une étude
Ipsos pour la Banque
de Savoie. L’enquête
révèle également
que, globalement,
les 18-30 ans des
deux Savoie se
sentent bien dans
leur corps et dans
leur tête et qu’ils ont
davantage confiance
en eux que la
moyenne des autres
jeunes Français.
palmarès
Top 10 des stations françaises
(en nombre de journées skieurs)
L
34%
Part de la recette
et de la fréquentation
pour les différentes
périodes commerciales
35 %
30 %
25 %
pourcentage de
skieurs étrangers
qui viennent dévaler
les pistes des
stations de ski
françaises. Contre
66% en Autriche et
50% en Suisse.
20 %
(Source : Domaines
skiables de France).
Source : Montagne Leaders.
La Plagne
2,53
Les Arcs-Peisey
2,12
Courchevel Méribel
1,9
Val Thorens
1,66
Alpes d’Huez
1,59
Les Menuires
1,5
Tignes
1,48
Serre-Chevalier
1,37
Chamonix
1,37
Val-d’Isère
1,28
Les meilleures périodes pour faire sa pub
INTERNATIONAL
25. C’est le
CSP+++.
Un autre critère important est le
taux de passage moyen par skieur.
Un argument qui permet à un message d’être diffusé vers une cible
à de nombreuses reprises. Dans
ce domaine, ce sont les Arcs qui
tiennent le haut du pavé. Chaque
skieur passe en moyenne 20 fois
par ses remontées mécaniques.
C’est quasiment le double de La
Plagne qui ne compte que 12 passages par skieur. Un autre argument
qui pourrait intéresser agences et
annonceurs. v
oin devant ses poursuivants,
c’est la station savoyarde de
La Plagne qui squatte la première place du classement. Elle
comptabilise 2 537 751 journées
skieurs sur la saison 2010/2011. La
deuxième place est occupée par
une autre station savoyarde : Les
Arcs, qui affiche 2 124 996 journées
skieurs pour la saison dernière.
Des chiffres de fréquentation qui
font de la montagne et des remontées mécaniques en particulier des
lieux idéaux pour compléter une
campagne d’affichage nationale
en ciblant des catégories CSP+ à
Station
Journées
skieurs
(millions)
(saison 2010-2011)
25%
recette
fréquentation
36%
14%
15 %
26%
11 %
11%
14%
10 %
13%
5%
0%
7%
AVANT
SAISON
NOËL
14 I InterMédia Magazine I n° 1147 I 14 décembre 2011
INTER
JANVIER
FÉVRIER
INTER
MARS
4%
0%
4%
0%
PÂQUES
FIN DE
SAISON
Pour bien communiquer en montagne, il faut bien choisir
sa période. L’hiver est bien sûr le meilleur moment de
l’année en termes de fréquentation. Mais le mois le plus
intéressant est celui de février, qui concentre à lui seul
36 % des recettes annuelles des stations françaises. Il
correspond à un pic de fréquentation puisque 34 % des
touristes, français et étrangers, viennent en février. En
cause : les vacances scolaires, mais aussi le bon enneigement. La mi-janvier est la deuxième période la plus
opportune puisqu’elle représente 26 % des recettes
annuelles et 25 % de la fréquentation. Les fêtes de
Noël n’arrivent qu’en troisième position (14 % des
recettes et de la fréquentation), suivies de la mi-mars
et de l’avant-saison. v
Source : Domaines skiables de France sur la saison 2010-11.
enquête
Voix off : « En ce moment chez Mc Donald’s, la saga des fromages… Chaque jour de la semaine une recette
Quand la montagne
gagne les annonceurs
des plaines
Elles n’ont rien à voir avec la montagne. Mais elles ont
compris que cet univers, avec ses valeurs et son imaginaire,
était vendeur. Focus sur quelques marques qui s’approprient
la montagne dans leur communication, de manière plus ou
moins honnête.
C’
Alexis Martinod,
directeur de
Savoîcime
« La montagne,
c’est très vendeur.
En un seul mot,
ça évoque la
nature, l’air pur,
le dépassement
de soi...
Pour une marque,
c’est un univers
très intéressant
à exploiter. »
est un cas marketing d’école.
Le jambon d’Aoste s’est
imposé dans les années 80
comme une des charcuteries les plus consommées de France
grâce à Michel Hébert et son agence,
Jump. Tout repose sur une habile confusion entre Aoste, le village en Isère d’où
venait ce jambon industriel, et le Val
d’Aoste, place forte du jambon artisanal
dans les Alpes italiennes. Un malentendu
entretenu à grand renfort de publicité,
mettant en avant le soi-disant environnement montagnard d’Aoste...
Il aura fallu attendre 2008 et une décision de la Commission européenne
pour que l’ambiguïté cesse. La marque
a depuis été renommée Jambon Aoste.
D’autres utilisations abusives de l’image
et des produits de la montagne ont
mené des annonceurs devant la justice,
comme McDonald’s (voir encadré).
Il faut dire que l’image d’Épinal de la
montagne reste une ficelle couramment utilisée par les publicitaires et les
annonceurs. Alexis Martinod, directeur
de Savoîcime qui défend les fromages
de la Savoie, confirme : « La montagne,
16 I InterMédia Magazine I n° 1147 I 14 décembre 2011
c’est très vendeur. En un seul mot, ça
évoque la nature, l’air pur, le dépassement de soi, mais aussi les vacances,
les moments conviviaux entre amis...
Pour une marque, c’est un univers très
intéressant à exploiter. »
Usurpation d’identité
« Généralement, ce sont les marques qui
n’ont rien à voir avec la montagne qui
communiquent le plus dessus, ajoute
Xavier Dullin, DG de Package Organisation à Lyon et conseiller municipal
de Chambéry. Alors que celles qui sont
implantées dans les Alpes n’ont pas
besoin de se justifier en jouant sur les
symboles de la montagne ».
Sans surprise, c’est surtout dans l’agroalimentaire que l’usurpation de la montagne est la plus fréquente. Les produits
du terroir sont particulièrement touchés.
« La croix de Savoie est un repère pour
le consommateur, car elle véhicule une
image positive d’un produit authentique.
Le problème, c’est qu’elle n’est pas protégée. Du coup, beaucoup d’industriels
l’utilisent sur leur emballage, même
s’ils ne sont pas du tout implantés en
Savoie ! Et au final, les consommateurs
sont trompés ! », fulmine Denis Geoffroy, grossiste en produits de montagne
à La Ravoire (73), en citant le cas d’un
confrère qui commercialise des crozets
avec une belle croix de Savoie, alors
qu’ils sont fabriqués... en Italie, avec une
méthode bien loin de celle utilisée pour
faire ces pâtes alimentaires spécifiques
à la Savoie.
Autre exemple : les pots de miel vendus en grande distribution sont régulièrement ornés de sapins, cimes et autres
marmottes. « Mais le miel de montagne
est une denrée rare, il serait impossible
d’en produire autant ! Un important industriel français distribue ainsi des miels
de Savoie fabriqués à Dijon », précise
Denis Geoffroy.
Authenticité recherchée
Mais toutes les marques ne vont pas
jusqu’à tromper le consommateur. La
majorité d’entre elles se contentent d’exploiter l’univers de la montagne pour
promouvoir leurs produits. Dès 1948,
Coca-Cola diffusait au cinéma un spot
sous forme de dessin animé, dans lequel
différente… Mercredi, le son des cloches des tarentaises… Le goût fruité des fondues au Beaufort… La sauce au fromage de montagne… Vous sentez comme ça fleure bon là haut ?…
un avion-cargo et zigzaguer entre les
bombes ! Au volant, une sorte de James
Bond tout en maîtrise qui arrive pile à
l’heure pour son rendez-vous galant.
Aujourd’hui, ce sont sans surprise les
marques commercialisant des 4X4 qui
communiquent le plus sur la montagne.
À l’image des récents spots pour le BMW
X1 ou le Land Rover Freelander 2.
Audi, avec ses modèles Quattro réputés pour leur adhérence, n’est pas en
reste. La marque allemande a carrément inversé les rôles dans un récent
spot publicitaire : à la place de la traditionnelle voiture roulant sur la neige,
on a eu droit à un skieur effectuant une
descente dans les rues de San Francisco.
Le message ? La technologie Quattro
procure une sensation de conduite identique à celle que l’on peut connaître
avec des skis paraboliques...
Du côté des Français, Citroën jouait le
cobranding avec Rossignol l’année dernière et mettait en scène Sébastien Loeb
dévalant les pistes à toute vitesse pour
faire la promotion de sa DS3 Racing.
La marque au chevron utilise aussi les
routes enneigées et les virages sinueux
pour communiquer sur le confort de sa
dernière C5.
Une saga des fromages qui finit mal
C’est l’éternelle histoire de David
contre Goliath. Dans le rôle du
« petit », trois syndicats de fromage
de Rhône-Alpes. Dans celui du géant,
l’enseigne McDonald’s.
L’histoire remonte à l’hiver 2000.
Le roi du fast-food lance « La saga
des fromages », une campagne de
promotion pour trois hamburgers
thématiques, chacun proposant un
produit du terroir : tomme de Savoie,
reblochon et beaufort. Dans son spot
télé, McDo ne recule devant aucun
cliché de la montagne : les cimes
enneigées, les cloches des vaches,
l’herbe verdoyante...
« On était en pleine polémique sur la
malbouffe. McDonald’s avait besoin
de rassurer les consommateurs en
s’appuyant sur l’image positive de nos
produits et l’univers de la montagne.
C’était une formidable opportunité
de communication pour eux », se
souvient Caroline Glise du Syndicat
de défense du beaufort. Sauf que les
organismes interprofessionnels n’ont
pas été associés à l’opération.
Les contrôles effectués par la
DGCCRF révèleront que les fromages
de terroir proposés aux clients
l’étaient en infime quantité. Et qu’au
final, les consommateurs avaient été
un drôle d’alpiniste était secouru par un
saint-bernard après une chute. Sauf que
le remontant n’était pas une rasade de
rhum, mais du soda américain ! Sousentendu : après l’effort, le réconfort.
Dans la même veine, Carlsberg a revisité
l’an dernier l’histoire de la conquête de
l’Everest. Cette fois, l’alpiniste plantait
une antenne télé au sommet, avant de
redescendre au refuge pour voir un
match de foot avec ses compagnons
de cordée... en buvant une bière !
D’autres marques préfèrent jouer sur le
côté fun et convivial de la montagne.
À l’image des produits laitiers dans
leur spot de 2001. Les plans classiques
de neige fraîche sont entrecoupés de
plans plus osés, où un surfeur essuie
avec sensualité les moustaches de lait
trompés.
Après une très longue procédure,
le reblochon et la tomme de Savoie
ont eu droit à 150 000 € chacun de
dommages et intérêts, et le beaufort,
à 50 000 €.
Le géant américain semble avoir
retenu la leçon. Début 2011, pour
sa campagne sur les sandwichs aux
fromages d’Auvergne, McDonald’s
faisait toujours appel à l’imaginaire
de la montagne. Mais en associant
cette fois les fromagers et en
intégrant une vraie tranche de bleu
dans son hamburger ! v
Besoin
de se démarquer
d’une jeune fille, avant de se lécher le
doigt... Comme quoi la montagne, c’est
aussi sexy !
Univers hostile
Sur un
packaging,
la croix de Savoie
véhicule
l’image
d’un produit
authentique.
Mais nul besoin
d’être Savoyard
pour l’utiliser.
Autre secteur surfant sur l’imaginaire de
la montagne : l’automobile. A priori, tout
oppose la voiture et son pot d’échappement à l’air pur des sommets. Du coup,
dans leur campagne, les annonceurs
mettent en avant un autre aspect de la
montagne : son climat. Neige, verglas,
froid... Il faut à la fois une technologie
fiable et une sacrée tenue de route pour
évoluer dans cet univers hostile.
La publicité pour la 205 GTi (1988)
reste un modèle du genre. On y voit un
bolide rouge, parachuté sur une piste
de ski, faire une course sur glace avec
Face à cette exploitation de la montagne,
comment réagissent les vraies marques
alpines ? Les procès pour tromperie du
consommateur restent une exception. La
riposte s’organise plutôt sur le terrain de
la communication.
« La montagne est galvaudée aujourd’hui
par les marques qui ne sont pas sur ce
territoire. Du coup, nous devons aller
plus loin pour nous démarquer, en axant
sur l’image du produit, ses valeurs, son
histoire... », explique Alexis Martinod de
Savoîcime. Pour être facilement reconnaissables par les consommateurs, les
fromages savoyards ont ainsi décidé
d’inscrire Savoie sur leur pourtour.
L’agence Texto (74) a aussi mené une
opération de séduction chez les fromagers, pour faire connaître l’Emmental de
Savoie et son mode de fabrication traditionnel, qui lui permet de bénéficier d’une
IGP (Indication géographique protégée).
Le message : « Emmental de Savoie : la
tradition lui donne ses trous, la Savoie son
goût ! » Mais le goût de la montagne, lui,
est partagé par tous... v Thomas Nardone
n° 1147 I 14 décembre 2011 I InterMédia Magazine I 17
dossier L’événementiel en montagne
26
28
30
32
[ REPORTAGE ] 150 stations… Comment s’y retrouver ?
[ FOCUS ] JO d’Albertville 92. Un jackpot pour les marques.
[ ANALYSE ] Les 7 erreurs à éviter pour rester au sommet.
[ pour/contre ] La communication en montagne est-elle efficace ?
Événementiel
en stations
Un terrain de jeu qui reste à exploiter
par les marques
Les stations de sports d’hiver : un formidable terrain de
jeu pour les annonceurs qui peuvent toucher une clientèle
ciblée et disponible sur un espace réduit. Mais les stations
doivent professionnaliser leur marketing pour séduire
davantage les marques.
P
as besoin d’être devant sa télévision pour
avoir le cerveau disponible. Au ski aussi,
les consommateurs sont détendus et réceptifs aux messages publicitaires. C’est
tout l’intérêt pour une marque d’être sur
place à ce moment-là.
« Les annonceurs recherchent la proximité avec leurs
clients pour leur faire vivre une expérience de marque.
En vacances, ces derniers sont disponibles et déconnectés du quotidien. Il est donc plus facile de leur faire
découvrir de nouveaux produits », explique Benoît
Fritsch, dirigeant-fondateur de l’agence lyonnaise Front
de Neige, qui est l’une des rares à être spécialisée dans
la communication événementielle en montagne.
Une audience captive et ciblée
Pour les annonceurs en quête d’altitude, Rhône-Alpes
est incontournable.
Avec ses 150 stations de sports d’hiver, la région représente 80 % du tourisme hivernal en France. Chaque
18 I InterMédia Magazine I n° 1147 I 14 décembre 2011
année, on estime à 16 millions le nombre de skieurs
qui dévalent les pistes, en grande majorité des CSP+.
Mieux, il est facile de connaître la population captive dans chacune des stations. Il suffit de recenser
le nombre de lits proposés dans les résidences de
tourisme, les hôtels, les logements privés...
Outre une clientèle captive et ciblée, une station de
ski présente un autre avantage : c’est une ville en format réduit. Sur une petite superficie, il est facile de
toucher un maximum de gens. Surtout si la marque
crée l’événement à un endroit stratégique, comme le
front de neige, véritable zone de transit d’une station,
où se croisent à la fois les skieurs et les non-skieurs.
« À Tignes, on garantit 30 000 contacts uniques par semaine sur le front de neige pendant la semaine haute
des vacances de février », assure Marion Duffournet,
responsable partenariat de la station.
D’ailleurs, c’est sans surprise durant les vacances scolaires de Noël et surtout de février que les animations
de marque sont les plus nombreuses. En particulier,
les semaines de chevauchement des zones scolaires.
« Les temps forts pour toucher le plus de monde pos-
Les remontées mécaniques. Elles
permettent de toucher uniquement les pratiquants,
mais à un moment où ils sont captifs : dans les files
d’attente ou sur les remonte-pentes.
Les résidences de tourisme.
Les clubs et résidences de tourisme organisent
généralement des pots d’accueil et de départ.
Pour une marque, c’est une occasion privilégiée
de rentrer en contact avec toute la famille.
La patinoire. Un endroit clé pour cibler
les non-skieurs, qui représentent en moyenne
40 % des touristes en station.
Le front de neige. Pour une marque,
c’est « the place to be » : il permet de toucher à
la fois les skieurs qui se rendent aux remontées
mécaniques, et les accompagnateurs, notamment les parents qui amènent leurs enfants aux
cours de ski.
La place du village. Idéal pour une
marque qui cible les familles avec les enfants
en bas âge, mais aussi les seniors.
C’est souvent le rendez-vous de l’après-ski.
sible sont le matin, entre midi et 14 h, et au retour des
pistes », précise Christophe Ravelet, cogérant de Strada
Marketing (Lyon). À ces périodes, les marques peuvent
même suivre les consommateurs dès leur départ de
la gare de Lyon à Paris ou bien aux péages des autoroutes des Alpes.
Concernant les prix, il faut compter au moins 50 K€
pour une animation simple, du genre une activation
pendant plusieurs jours sur une seule station. Mais ce
sera plutôt 300 K€ pour une tournée dans plusieurs
stations avec une équipe importante à déplacer, loger,
nourrir...
« La montagne constitue un formidable terrain de jeu
pour les marques, même si elles n’ont pas de lien particulier avec cet univers. En fonction des budgets et des
objectifs, tout le monde peut trouver le produit qui lui
correspond, du séminaire au sponsoring d’événement
sportif ou culturel, en passant par l’affichage ou les
tournées commerciales », souligne Benoît Fritsch.
Les marques alimentaires sont les plus présentes à
la neige. Milka a ainsi associé son nom à l’univers
de la montagne depuis plus de dix ans grâce à ses
Les 5 lieux clés
pour communiquer en station
fameuses pistes mauves et ses distributions de chocolat chaud. L’an dernier, William Saurin a fait déguster
sa nouvelle recette de tartiflette en conserve dans huit
stations familiales des Alpes. « Nous voulions recruter
de nouveaux clients et les inciter à acheter ce produit
en leur distribuant un bon de réduction. Ils pouvaient
s’en servir à la supérette du coin, qui avait mis notre
produit en avant, ou bien de retour chez eux après
les vacances », raconte Philippe Lalere, responsable
marketing chez William Saurin, qui se félicite de l’opération. « Son taux de transformation de 15 % est largement supérieur à la moyenne ».
D’autres secteurs d’activité sans lien particulier avec la
montagne ont su tirer leur épingle du jeu, à l’image des
constructeurs automobiles (Audi, BMW, Nissan...). Si le
Salon du 4x4 de Val-d’Isère a fini par disparaître sous
la pression du développement durable, les marques
multiplient les essais auprès des particuliers en station.
Et le Trophée Andros, une course de voitures sur glace,
continue à attirer les foules et les sponsors.
...
Maxime Bourbon,
gérant de Dragonne (74)
« Avec plus de 90 % de taux de remplissage
durant les vacances, la montagne permet aux marques d’être au
plus près de leurs cibles :
familles, seniors, CSP+... »
n° 1147 I 14 décembre 2011 I InterMédia Magazine I 19
dossier L’événementiel
presse gratuiteen montagne
Focus Front de Neige mise
sur l’événementiel durable
... Un retard marketing
« Hormis ces quelques marques qui ont très vite trouvé
un intérêt à communiquer en montagne, les autres
annonceurs présents en station sont liés à cet univers.
On va ainsi retrouver les marques de ski, de sportswear,
de crèmes solaires... », déplore Maxime Bourbon de
l’agence Dragonne, qui constate un « effondrement des
animations commerciales sur les fronts de neige depuis
une dizaine d’années ». En cause : les stations, qui ne
savent pas suffisamment se vendre. « À l’inverse des
stations autrichiennes ou américaines qui ont très vite
adopté un positionnement fort, attirant ainsi une foule
de marques, les stations françaises ont négligé le marketing pendant longtemps. Elles se contentaient de leur
réputation pour attirer des skieurs, sans penser à valoriser ce potentiel », ajoute Maxime Bourbon.
Du coup, en France, la montagne est souvent vendue
comme un univers à part, avec des valeurs de convivialité, d’authenticité, de nature... Des arguments désormais
insuffisants pour attirer les annonceurs qui exigent un
retour sur investissement.
Mais aujourd’hui, dans un contexte de concurrence
mondiale, même les stations françaises doivent séduire
les marques pour financer des événements attirant les
touristes.
Les 10 grands événements de l’hiver en station
Lieu
Thème
Winter X Games
Tignes
Freestyle
Grande Odyssée
Savoie Mt-Blanc
Chamonix
Chiens de traineau
Le Kandahar
Chamonix
Ski alpin
Transjurasienne
Jura-Doubs
Ski de fond
Trophée Andros
Val Thorens,
Alpe d’Huez...
Course auto
Festival du
film de comédie
Alpe d’Huez
Cinéma
Critérium de
la Première Neige
Val-d’Isère
Ski alpin
La grande trace
Hautes-Alpes
Ski alpinisme
Coupe du monde
féminine
Courchevel
Ski alpin
Autrans
Ski de fond
Foulée blanche
Reste que le retard pris dans l’exploitation des fichiers
clients et la définition du positionnement marketing
ne se rattrape pas en une saison. « Il a fallu plusieurs
années et beaucoup de courage politique pour imposer
Tignes comme la station des jeunes sportifs. Décréter
que les familles n’étaient pas notre cœur de cible n’a pas
été simple à faire passer au début », se souvient Sébastien Mérignargues, directeur de la station de Tignes.
Face à ce flou artistique, les annonceurs ont du mal
à appréhender l’univers de la montagne. D’autant plus
qu’en station, les décideurs sont multiples : mairie, office
de tourisme, exploitant des remontées mécaniques, club
des sports... Chacun peut organiser ses propres animations. De plus, les réseaux sont encore plus forts qu’en
vallée, avec souvent quelques familles qui « tiennent »
une station. D’où un aspect relationnel exacerbé.
« J’ai fait beaucoup de street-marketing en ville, mais
je n’ai jamais vu un environnement aussi complexe et
difficile d’accès que la montagne », résume Maxime
Bourbon.
Mais les annonceurs ne sont pas pour rien non plus dans
cette sous-exploitation de la montagne. « En Rhône20 I InterMédia Magazine I n° 1147 I 14 décembre 2011
Benoît Fritsch,
fondateur
de l’agence
Front de Neige
Création : 1992 • Siège : Oullins (69) • CA 2011 : 1,5 M€ • 10 salariés.
L
a neige, il est tombé dedans quand
il était petit. Fils du patron du club
des sports de Val-d’Isère, Benoît Fritsch
a créé Front de Neige en 1992. L’agence
s’est imposée comme l’un des leaders
français de l’événementiel et du marketing sportif en montagne.
Glissade. Mais pour en arriver là, Front
de Neige a dû slalomer entre les bosses.
Créée dans la foulée des JO d’Albertville,
l’agence, qui s’appelait alors Traces International, se spécialise dans le sponsoring
des compétitions de ski. Son rachat
en 1998 par le groupe italien Media
Partners lui permet de gérer les droits
de la FFS. Mais quand cette dernière
est placée en redressement judiciaire
en 2007, Media Partners se retire du
marché français. « Nous avons frôlé la
catastrophe. La douzaine de salariés
de l’entreprise a été licenciée. J’ai alors
racheté l’agence pour un euro symbolique et créé Front de Neige », explique
Benoît Fritsch.
Casser les a priori. Aujourd’hui, l’agence
est spécialisée sur trois métiers. Tout
d’abord, la conception et l’organisation
d’événements en montagne (50 % du
CA). Comme la piste mauve de la marque
Milka. L’agence gère aussi la partie
opérationnelle de l’Acticross, le parcours
ludique mis en place par Malls pour
promouvoir la marque Actimel (Danone).
Front de Neige fait également du conseil
en marketing sportif et sponsoring
auprès des marques (30 % du CA).
L’agence a par exemple mis en place le
partenariat entre Riches Monts et les
équipes de France de ski. Elle a aussi
organisé le Ski Challenge pour le compte
de la Caisse d’Épargne.
Troisième métier de Front de Neige : les
séminaires et les voyages VIP autour des
grandes compétitions internationales.
Approche 360°. « Nous conseillons nos
clients sur leur communication globale
en montagne : événementiel, affichage,
RP, incentive... L’objectif n’est pas de
tout réaliser nous-mêmes, mais de
donner une cohérence à leur stratégie,
souligne Benoît Fritsch. Nous privilégions les opérations qui donnent du
sens aux valeurs de la marque, tout en
respectant le milieu naturel et la culture
montagnarde ».
Un positionnement « nature » qui a
permis à Front de Neige de descendre
dans la vallée : elle vient de coordonner la
dernière Transat Jacques Vabre. v TN
Alpes, nous avons un prisme déformant sur le marketing de la montagne du fait de la proximité. Tandis que
pour les marketeurs parisiens, la montagne ne fait pas
partie des habitudes. Ils préfèrent souvent la mer, où les
tournées sont plus longues et plus simples à organiser »,
affirme Christophe Ravelet de Strada Marketing.
« Pour passer un cap, l’événementiel en montagne va
devoir se professionnaliser », conclut Benoît Fritsch de
Front de Neige. Avec d’un côté les stations qui doivent
affiner leur positionnement marketing et structurer leur
offre commerciale pour attirer les annonceurs. Et de
l’autre des annonceurs qui doivent prendre conscience
du potentiel de la montagne. v Thomas Nardone
dossier L’événementiel en montagne
Trois opérations de communication réussies
TIGNES
PlayStation fait jouer les jeunes
Pour faire découvrir son nouveau système de jeu,
Sony a imaginé le PlayStation Move Experience Tour,
qui s’est arrêté à Tignes en février 2011. L’événement a
été un succès, car il collait à la cible de la PlayStation 3 :
des jeunes avec un certain pouvoir d’achat. Un immense
dôme a été aménagé sur le front de neige, permettant aux
vacanciers d’imiter le Moonwalk de Michael Jackson ou
de jouer virtuellement aux tennis.
praz-sur-arly
Menier distribue son chocolat chaud
Pour promouvoir sa boisson chocolatée, la marque s’est
offert l’hiver dernier une tournée dans huit stations familiales
des Alpes, dont Praz-sur-Arly. Au total, 16 000 dégustations ont été organisées et 50 000 échantillons distribués,
dans une ambiance très rétro pour rappeler les valeurs de
Menier : un véritable Tub Citroën des années 50 accueillait
petits et grands au pied des pistes. Conçue par Strada Marketing, la tournée a généré 200 000 contacts.
150 stations... Comment s’y retrouver ?
Pas facile pour un annonceur de faire vivre une expérience de
marque aux consommateurs. Un bon moyen peut être d’organiser
un événement en montagne. Encore faut-il trouver la station
qui correspond à sa cible.
A
vec 150 stations dans les Alpes françaises, les annonceurs ont l’embarras
du choix pour faire découvrir leurs
produits à des publics cibles : familles,
jeunes, seniors, sportifs ou non... Seul
problème : le positionnement marketing
de ces stations n’est souvent pas très précis.
« J’ai réalisé pendant trois ans une étude de benchmarking auprès de 262 stations du monde entier.
Et 95 % d’entre elles affirment viser la clientèle
familiale », observe Armelle Solelhac, dirigeante de
Switch Consulting (74), avant d’ajouter : « Il faut donc
distinguer le positionnement réel de la station de son
22 I InterMédia Magazine I n° 1147 I 14 décembre 2011
positionnement rêvé. Pour certaines, l’écart tourne
parfois au gag ! »
Pourtant, la bonne connaissance du terrain est
indispensable. « La montagne est un environnement
très marketé, avec des cibles bien définies qui sont
idéales pour les annonceurs. En fonction de la
marque et du produit, on oriente notre client sur une
catégorie de stations, un lieu précis, une période... »,
détaille Maxime Bourbon de l’agence Dragonne.
Pour dresser une typologie des stations par cible, InterMédia a donc consulté une dizaine d’experts : consultants, dirigeants d’agence de marketing opérationnel, patrons de station... Il en ressort quatre grandes catégories.
©andyparant.com
©Megève Tourisme
megève
Swarovski illumine le sapin de Megève
Le joaillier crée l’événement depuis trois ans dans la
station haut-savoyarde, en ornant le sapin de la place
du village de 3 000 étoiles en cristal. Plus de 4 000
personnes ont assisté à la mise en lumière du sapin le
10 décembre dernier. Quelques happy few ont également participé au repas VIP organisé par Swarovski,
en compagnie de l’actrice Alice Taglioni.
Sébastien Mérignargues est directeur de la station de Tignes
“ Tignes a cassé les codes
du marketing des stations ”
INTERMÉDIA. Quel est le cœur de cible
Les familiales. Ces stations attirent surtout
des parents ou des grands-parents avec de jeunes
enfants. Les marques ne se bousculent pas pour
annoncer dans ces stations souvent méconnues, du
coup celles qui sont présentes sont généralement
bien accueillies et n’ont pas besoin de payer de droit
d’asile. De plus, elles bénéficient d’un public réceptif, pour peu qu’elles distribuent des produits ciblés
enfants : chocolat, fromage pasteurisé, pâtes...
On trouve ces stations essentiellement en Maurienne
(La Toussuire, Valloire, Valmeinier, Le Corbier...),
dans le massif de Belledonne (Chamrousse, Les 7 Laux), mais aussi dans les Alpes du Sud
(Orcières, Praloup).
Les sportives Pour les marques qui veulent
séduire un public jeune, branché et pratiquant
assidument le ski. Dans ce domaine, Tignes est
incontournable. Son cœur de cible, les 20-35 ans,
lui a permis d’attirer Billabong, Swatch, Sony… (voir
encadré ci-contre)
Val Thorens et dans une moindre mesure Val-d’Isère
ont également une clientèle très sportive, mais moins
jeune. Chamonix est hors catégorie : si la station au
pied du mont Blanc attire des skieurs confirmés du
monde entier, son domaine skiable est trop éparpillé pour permettre des opérations commerciales
efficaces.
Les huppées Deux stations se distinguent
des autres par leur clientèle CSP+++ : Courchevel
et Megève, auxquelles on peut ajouter Méribel. Le
public est souvent plus âgé et pratique le ski de
manière moins régulière. Dans ces stations, l’échantillonnage d’une tartiflette en conserve ferait un flop.
Courchevel dissuade d’ailleurs de telles opérations
en fixant le droit d’asile à 5 000 e. En revanche,
de Tignes ?
sm Les études que nous menons
régulièrement montrent que Tignes
est une caricature des stations de
montagne : notre clientèle est encore
plus sportive, plus jeune et plus masculine qu’ailleurs. Chez nous, il y a très
peu d’enfants ou de plus de 55 ans.
À partir de ce constat, nous avons
développé une stratégie de différenciation en ciblant les 20-35 ans, alors que
généralement les stations essaient de
toucher à la fois les jeunes, les familles,
les seniors...
INTERMÉDIA. Comment ce positionnement se traduit-il dans votre stratégie
événementielle ?
sm Nous cherchons à organiser des
événements qui apportent une valeur
ajoutée à nos clients, tout en permettant aux marques de développer leur
capital sympathie. À côté de nos
cinq partenaires à l’année (Nissan,
Salomon, Swatch, Billabong et
Sport+), nous sommes très sélectifs
sur les tournées promotionnelles
pour n’accepter que des marques qui
visent un public jeune. Cette année,
par exemple, nous accueillerons
de nouveau le PlayStation Move
Experience Tour sur le front de
neige, alors que nous avons refusé
une opération Babybel, plus tournée
vers les familles. Ce positionnement
affirmé nous a aidés à obtenir les
X Games, un événement qui renforce
notre image de station jeune et
sportive à l’international. v
BMW valorise son image en sponsorisant le Polo
Masters Tour. Autre exemple : Azimut Yachts expose
un de ses bateaux à Courchevel.
Les géantes Ces stations disposent de très
fortes capacités d’hébergement pour attirer le grand
public : La Plagne, Les Arcs, Les 2 Alpes, l’Alpe
d’Huez, Les Menuires... Leur atout ? Une clientèle
variée qui convient aux marques visant le plus grand
nombre. L’inconvénient ? Une concurrence forte
entre marques et un risque de télescopage des opérations. Mais aussi des droits d’asile à payer, autour de
3 000 e en moyenne. Sauf dans le cas d’un partenariat
avec la station. v TN
n° 1147 I 14 décembre 2011 I InterMédia Magazine I 23
dossier L’événementiel
presse gratuiteen montagne
Pour les JO d’Albert­
ville, les marques
partenaires n’ont pas
fait dans l’originalité.
A l’image de Coca-Cola
ou de France Telecom, la
majorité se sont contentées de l’image du skieur
pour leur communication
corporate.
Mais la présence des
anneaux olympiques
devaient suffire à
renforcer leur notoriété
et leur crédibilité. Seule
Candia s’est démarquée
en osant une campagne
légèrement décalée.
JO d’Albertville 92 Un jackpot pour les marques
Vingt ans après, les jeux d’hiver d’Albertville restent une
référence. Suivis par plusieurs milliards de téléspectateurs,
ils furent une formidable publicité pour les stations de la
Tarentaise mais aussi les entreprises de Rhône-Alpes.
7
000 journalistes, 8 000 volontaires, 1 800 athlètes issus de 64 pays, un budget de 4,2 MdF
(640 M€)... Des chiffres à donner le vertige.
Les JO d’Albertville restent l’événement
le plus important jamais organisé dans les
Alpes. Ils ont donné un coup de projecteur sur toute
une région. Mais pour profiter des retombées médiatiques, les entreprises ont dû sortir leur carnet de
chèques.
Les millions du Club Coubertin. « Albertville a été un vrai tournant dans la gestion des marques
liées à l’olympisme, confirme Bruno Laneyrie, l’ancien
dircom du Comité d’organisation des Jeux Olympiques
d’Albertville (COJO), qui est aujourd’hui à la tête de
K. éditions/Ediplus, une agence éditoriale spécialisée
dans le sport. Auparavant, il n’y avait pas de démarche
structurée. Le Comité d’organisation avait tendance à
signer avec toutes les entreprises. »
Ainsi, pour la première fois dans l’histoire des JO et du
partenariat sport-entreprise, le COJO crée le Club Coubertin en 1988. Le ticket d’entrée minimum pour intégrer ce cercle très fermé ? 50 MF (7,6 M€). En contrepartie, les membres peuvent utiliser en exclusivité le
titre de « partenaire officiel » sur l’ensemble de leur
communication en vue de maximiser les retombées
24 I InterMédia Magazine I n° 1147 I 14 décembre 2011
d’image et de notoriété. Douze entreprises françaises
vont rejoindre le Club dont IBM, Renault, La Poste,
France Telecom, AGF, le Crédit Lyonnais... En région,
seules Candia et Évian font partie des « happy few ».
Pour faire respecter la nouvelle règle du jeu, le Comité d’organisation s’entoure d’une solide équipe de
juristes spécialisés, chargés de scruter et de verbaliser
la moindre utilisation frauduleuse des symboles de
l’olympisme. « Il y avait des avocats partout », se rappelle Claire Grangé, directrice de la Maison des Jeux
Olympiques.
Des anneaux médiatiques. Recrutés en
18 mois, les douze membres du Club saisissent rapidement l’intérêt d’un tel partenariat. Ainsi, pour Michel
Albert, président des AGF en 1990, l’objectif est clair :
« Nous sommes présents dans quarante pays. La part
de notre chiffre d’affaires à l’étranger passera de 25 à
40 % d’ici 1993 ». D’autres y voient davantage un gain
en termes de notoriété. À l’image de Jacques Fournier,
le président de la SNCF qui affirme : « Les valeurs de
l’olympisme sont aussi celles de l’entreprise et de ses
hommes. Je pense en particulier au goût de l’effort, à
la compétence et à la qualification, à la rigueur et à
la discipline, au sens de l’équipe et du partenariat. »
Quant à Patrick Faure, secrétaire général de Renault,
les anneaux olympiques sont pour lui « l’emblème le
plus connu au monde. Les Jeux bénéficient par là
même d’une large couverture médiatique. »
Même les PME.
Mais pour les PME régionales,
le Club Courbertin est inaccessible. Pour profiter de
l’effet JO, certaines vont alors devenir « fournisseur
officiel » du COJO. En contrepartie, elles peuvent utiliser l’emblème des Jeux et organiser des RP.
C’est le cas de Vicat, un cimentier installé en Isère,
aujourd’hui numéro trois du marché en France. Ou
d’un certain France Equipement, alors propriété de
Générale Location (GL Events), qui réalise là ses premières installations de tribunes et de gradins sur un
événement d’envergure internationale. Un véritable
tremplin, qui lui permettra de poursuivre l’aventure
lors des JO d’été de Barcelone organisés la même
année.
Afin de promouvoir les Jeux Olympiques, le COJO
développe enfin un programme restreint de licences
de marque auprès des entreprises chargées de la
fabrication et de la diffusion de produits arborant les
emblèmes des Jeux d’hiver de 1992 (textile, insignes,
jeux…). La société voironnaise Logitoys, enseigne
du groupe King Jouet, réalise par exemple toutes les
déclinaisons de la mascotte, des jeux et jouets, de la
bagagerie et des accessoires. Tefal diffusera une série
d’appareils à raclette.
Quant à Opinel, l’entreprise familiale commercialise
des couteaux à l’effigie des JO. Une opération qui lui
permet de découvrir la communication et d’exporter
ses premiers produits. v Camille Nagyos
« Une valorisation
exceptionnelle du territoire »
Charles Zanoni a
présidé l’association
« Savoie 92 » créée
pour promouvoir la
Savoie et la
Région Rhône-Alpes
durant les JO.
intermédia. Quel était l’objectif
de l’association ?
cz En marge des programmes
officiels de partenariat, « Savoie
92 » permettait aux PME locales
qui n’avaient pas accès aux
anneaux olympiques de se faire
connaître grâce aux Jeux. L’association comptait des institutions
et quelques dizaines d’entreprises
parmi lesquelles EDF Savoie, le
Crédit Agricole de Savoie, Cellier
SA, ETS communications, Chapel
Reprographie ou SKF Transrol.
« Savoie 92 » a permis à l’ensemble
des partenaires du département de
travailler ensemble à la valorisation
du territoire.
intermédia. Quelles ont été
ses principales actions ?
cz Nous nous sommes regroupés
sous une marque : « Savoie Terre
des Sommets ».
Celle-ci était déclinée sur différents
supports comme des objets publicitaires, des vidéos, des messages
audio ou du papier. Nous éditions
par exemple un journal qui mettait
en valeur les entreprises de l’association à travers l’avancement des
travaux, les visites, les épreuves.
Nous avions également créé un logo
représentant une fleur olympique.
Il était apposé sur tous les produits
locaux fabriqués par les entreprises
adhérentes. v
n° 1147 I 14 décembre 2011 I InterMédia Magazine I 25
dossier L’événementiel
presse gratuiteen montagne
Si la montagne est un formidable terrain d’expression pour les
marques, elle peut rapidement virer au piège. Pour ne pas rater son
événement, voici quelques conseils à méditer.
7
Les erreurs à éviter pour rester au sommet
1
S’habiller comme des citadins
Ça paraît évident, mais la principale
contrainte de la montagne est trop souvent sous-évaluée : « On ne fait pas de l’échantillonnage pendant des heures à - 10°C avec un
pantalon et des ballerines ! », insiste Maxime
Bourbon de l’agence Dragonne. Et comme le « froid commence par la tête »,
il faut d’abord prévoir un bonnet. Plus chaud
qu’une simple casquette, il peut aussi facilement devenir un outil de communication.
Autre accessoire incontournable : la paire de
gants. Maxime Bourbon préconise « une paire
fine, ou des mitaines, pour faciliter l’échantillonnage, et une grosse paire de gants de ski
pour se réchauffer entre deux opérations ».
Enfin, des bottes chaudes et imperméables
sont indispensables. Même à Pâques, quand
les températures sont plus douces mais que la
neige est mouillée.
Le vent peut être violent en montagne.
Bien arrimer la tente est donc indispensable.
2
Installer du matériel
qui ne supporte pas
les intempéries
Pour éviter de voir sa tente s’envoler sous une
brusque rafale de vent, mieux vaut installer
du matériel conçu spécifiquement pour les
conditions extrêmes. Les tentes pliables gé26 I InterMédia Magazine I n° 1147 I 14 décembre 2011
néralement utilisées en ville sont à éviter. À
moins d’utiliser un châssis renforcé. Le mieux,
c’est d’opter pour des équipements gonflables
autoportants, qui peuvent supporter des rafales
supérieures à 50 km/h.
Pour les véhicules, les 4X4 ne sont pas forcément indispensables. Au contraire des pneus
neige et d’une paire de chaînes pour chaque
voiture.
3
Négliger les contraintes
de fonctionnement
d’une station
Que ce soit sur le front de neige ou sur le domaine skiable, les prises électriques ne sont
pas légion. Il faut donc tirer un câble et creuser
la glace pour l’enfouir. Jusque-là, rien d’insurmontable. Sauf qu’il faut prévoir le passage
des dameuses, dont les lames peuvent s’enfoncer jusqu’à 80 cm dans le sol. À Valmeinier,
une soirée avec DJ a ainsi été interrompue :
insuffisamment enfouis, les câbles avaient été
arrachés !
La montagne recèle un autre piège : le transport des marchandises vers le domaine skiable
se fait le matin avant l’ouverture des pistes,
dans les bennes à vide. Attention à ne pas rater
le départ, sachant que les horaires fluctuent
d’une remontée à une autre... Par ailleurs, il
faut une autorisation spécifique pour transporter du matériel inflammable. Le problème, c’est
que suivant les stations, les procédures peuvent
durer de quelques jours à plusieurs semaines !
En montagne, il faut aussi anticiper le mauvais temps rendant difficiles les conditions de
circulation, en prévoyant au moins une demijournée de battement entre chaque opération
dans le cas d’un roadshow. Et pour ne pas se
retrouver bloqué dans les embouteillages, éviter de circuler les week-ends de chassé-croisé.
Surtout que pendant les vacances scolaires, les
stations sont vides le samedi !
4
Méconnaître
les acteurs locaux
Office du tourisme, syndicat des moniteurs, club des sports, remontées mécaniques...
Cette profusion d’acteurs peut nuire à l’efficacité d’une opération de marketing opérationnel. « J’ai déjà vu trois marques de voitures
faire leur promotion la même semaine dans
une station ! », raconte Benoît Fritsch de Front
de Neige. Pour éviter ce genre de télescopage,
mieux vaut prévenir les différents partenaires
de l’action que vous souhaitez mener.
5
Ne pas mettre en place
un suivi sur le terrain
En montagne, il est indispensable d’avoir
une personne sur place pour superviser le bon
déroulement des opérations. Sous peine de
grosses désillusions.
Powerade l’a appris à ses dépens : malgré
un partenariat avec l’École du ski français,
la marque de boisson énergisante manquait
de visibilité sur les pistes. C’est en travaillant
auprès des moniteurs qu’elle a découvert le
problème : les drapeaux Powerade fournis
aux ESF n’étaient d’aucune utilité. Aujourd’hui,
la marque est présente sur tous les stades de
slalom à travers des piquets, des dossards...
6
Se tromper de cible
en choisissant
la mauvaise station
Megève, Courchevel, Val Thorens... Ces noms
font rêver les dircoms. Soit parce qu’ils y skient
eux-mêmes, soit parce que la notoriété de ces
stations constitue une sorte d’assurance tout
risque vis-à-vis de leur direction.
Pourtant, ces stations ne correspondent pas
forcément au public de leur marque. Il y a
quelques années, la distribution de chocolats
Milka à Megève a ainsi fait un bide.
« L’autre piège à éviter pour un annonceur, c’est
de signer pour une opération dans une station
prestigieuse, alors qu’elle n’a pas donné son
accord. La distribution se fera alors dans un
village en dessous », prévient Benoît Fritsch
de Front de Neige.
7
Se tromper de message
N’importe quelle marque ne peut pas
faire sa publicité en station. « C’est un
terrain spécifique. Soit la marque propose un
produit adapté à la montagne, soit c’est une
marque généraliste et alors, dans ce cas, elle
doit délivrer un message qui a du sens », souligne Christophe Ravelet, le patron de Strada
Marketing, qui a organisé une tournée l’année
dernière pour William Saurin afin de promouvoir sa nouvelle recette de tartiflette. v TN
dossier L’événementiel en montagne
[ pour/contre ] De très nombreux événements permettent
de toucher toutes les cibles dans les stations.
Reste à savoir s’ils répondent aux attentes des annonceurs.
La communication en
montagne est-elle efficace ?
oui
« Depuis les premières actions impulsées
par la Caisse d’Épargne des Alpes en
1996, notre partenariat avec la Fédération française de ski (FFS) est monté en puissance.
En 2010, la Caisse d’Épargne a décidé de ne pas renouveler son soutien à une équipe cycliste et à la coupe
de France de football, pour se concentrer sur le ski. D’abord parce que parmi
nos 26 millions de clients, beaucoup pratiquent le ski dans les Alpes, les Pyrénées,
les Vosges, le Jura... Mais aussi pour les
valeurs de simplicité et de solidarité véhiculées par l’équipe de France de ski. Ça
nous est utile dans la période actuelle,
où les banques sont quelque peu remises
en cause.
Nous sommes très satisfaits des opérations mises en place depuis un an avec la
FFS. Le logo sur le maillot de l’équipe de
Guillaume Cade
France de ski et de snowboard nous offre
est directeur
une belle visibilité. Mais nous ne voulions
mécénat et
pas nous arrêter aux champions. Notre
sponsoring à la
volonté était aussi de soutenir cinq jeunes
Caisse d’Épargne
sportifs qui seront les grands talents de
demain, chacun dans leur catégorie : le
ski alpin, le biathlon, le snowboard et le
saut à ski. Nos clients peuvent suivre leurs
performances et leurs aventures à travers une page
Facebook dédiée qui compte plus de 11 000 fans.
Pour toucher le grand public, nous organisons cette
année la deuxième édition du Ski Challenge Caisse
d’Épargne. C’est une course virtuelle organisée dans
chacune de nos 17 caisses régionales, avec à la clé,
pour les meilleurs, un séjour à la montagne pour suivre
la finale des championnats de France. Nous avons aussi
monté un Freestyle parc dans huit stations. Le partenariat avec la FFS nous permet enfin d’organiser des
opérations de RP plus classiques, comme inviter nos
clients à une étape de la Coupe du monde de ski.
Au final, ces opérations permettent de fidéliser nos
clients et de donner envie aux autres de le devenir ! Et
même si on ne dévoile pas notre budget sponsoring,
je peux vous assurer que communiquer en montagne
est très rentable. » v
28 I InterMédia Magazine I n° 1147 I 14 décembre 2011
non
« Aujourd’hui, la montagne n’est
pas un vecteur de communication vraiment intéressant pour
nous. D’abord, parce qu’elle ne fait pas partie de
nos territoires commerciaux : nous ne sommes pas
présents sur les deux départements de Savoie et
l’essentiel de nos 25 agences iséroises
est situé dans l’agglomération grenobloise. Ensuite, parce que nous n’avons
pas trouvé d’opérations très séduisantes
pour faire des relations publiques suivies
avec nos clients et prospects, alors que
les RP constituent notre premier outil de
communication.
Cela dit, nous avons quand même été
partenaires pendant trois ans de la
Coupe Icare, l’un des plus grands événements mondiaux dédiés au vol libre.
Mais nous avons arrêté cette année, à la
Éric Vernusse
fois par souci de renouvellement, mais
est directeur de
aussi parce que nous préférons des manila communication
festations plus intimistes que des grands
de la Banque
raouts, et des opérations en série plus
Rhône-Alpes.
que des « one shot ».
Aujourd’hui, à Grenoble, nous avons des
partenariats avec le club de rugby et la
maison de la culture. Nous achetons des
places à l’année pour chaque match et spectacle,
pour inviter régulièrement nos clients et prospects.
C’est plus souple pour nos invités, qui peuvent choisir leurs dates, et beaucoup plus convivial de les
recevoir en petit comité. Sur Lyon et nos autres zones, c’est la même philosophie qui prévaut, à travers des partenariats avec
le théâtre des Célestins, les Nuits de Fourvière, Jazz
à Vienne ou le Quatuor Debussy. Sans compter nos
trophées de golf, qui sont autant d’opérations relationnelles. Au total, en 2011, nous avons organisé
192 manifestations et reçu 8 200 invités, sans l’aide
d’agences événementielles !
Pour en revenir à la montagne, nous ne sommes pas
fermés non plus. Et peut-être que cette interview va
générer des propositions intéressantes en matière de
relations publiques ! » v
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n° 1147 I 14 décembre 2011 I InterMédia Magazine I 29
t moin
© Nuts.fr
Jean-Marc Silva,
51 ans, est
directeur depuis
le printemps
2010 de France
Montagnes, la
collective qui
regroupe tous
les acteurs de
la montagne
hexagonale.
Un promoteur de la montagne française
LE CRÉATEUR DES ARC 1950. Sa devise : « Là où il y a la volonté,
il y a un chemin. » Autrement dit : « Rien d’impossible quand
on veut. » Bref, il aime relever les défis.
Son dernier : assurer la promotion de la montagne tricolore
dont les acteurs — une cinquantaine d’associations — sont
réunis depuis 2 ans au sein de France Montagnes, une entité
chargée de communiquer enfin d’une seule voix. Vaste tâche.
Mais Jean-Marc Silva est du genre à n’avoir peur de rien,
capable de renverser des montagnes.
C’est l’homme qui a créé la station des Arc 1950. « Quand
on m’a recruté comme directeur général, en 2003, il n’y avait
rien et beaucoup de gens pensaient que le projet allait faire
un flop. » Sept ans plus tard, mission accomplie : le village
était livré au grand complet avec ses 750 appartements,
ses 4 000 lits, sa trentaine de commerces...
De quoi parfaire un CV déjà plutôt brillant dans l’univers de
la montagne, et décrocher la direction de France Montagnes
à sa naissance, début 2010.
30 I InterMédia Magazine I n° 1147 I 14 décembre 2011
DE POMAGALSKI À FRANCE MONTAGNES. Un choix justifié par
une grande et large expérience des secteurs de la montagne.
Armé d’un seul BTS de mécanique, il a travaillé chez
Pomagalski (le roi français des téléphériques) et dirigé à
29 ans les remontées mécaniques des 7 Laux. Après un petit
intermède dans une compagnie maritime à Saint-Malo, il est
chargé de lancer l’OT des Arcs et de Bourg-Saint-Maurice
en 1993. Il y restera 10 ans avant de créer son village 1950.
À la tête de France Montagnes, il ne manque pas d’occupations et court l’Hexagone en mission institutionnelle.
Le reste du temps, il fait du sport, intensément, et rien de ce
qui est activité de montagne ne lui semble étranger. Fan de
ski hors piste, il fait aussi du télémark, du ski de randonnée,
de l’escalade dans l’Oisans et de la via ferrata, un peu de
spéléo dans le Vercors...
Il est encore président du club de karaté de Bourg-SaintMaurice et moniteur de plongée sous-marine, une autre
grande passion contractée en Bretagne.v
Depuis 50 ans l’image de la montagne ne cesse d’évoluer dans
l’imaginaire des Français. Aujourd’hui convertie au tourisme de
masse, elle veut être un espace de plaisir et de bien-être.
Jean-Marc Silva
“ Les marques suivent
les évolutions de l’image
de la montagne ”
intermédia. Quelles valeurs la montagne
intermédia. De quels autres symboles
Elles sont assez nombreuses sur le plan
humain. Pour moi, la première, c’est la persévérance. La montagne est un territoire où il est
difficile de vivre et travailler. Historiquement,
elle a été très peu habitée par l’homme.
Dans ce sens, la montagne induit aussi le courage. Ses habitants ont très souvent besoin
d’exercer plusieurs emplois pour survivre dans
un environnement difficile. Elle induit aussi
l’humilité parce que le montagnard doit affronter une nature qui a toujours le dernier mot ! Il
doit savoir s’adapter aux éléments et au climat.
C’est l’homme qui s’adapte à la nature et pas
le contraire.
Pour résumer, la montagne véhicule des valeurs
d’effort, d’endurance et de dépassement de soi.
jms
véhicule-t-elle ?
jms
intermédia. C’est la montagne aux exploits ?
jms Oui. C’est la conquête des sommets de
la
terre et la découverte d’un des derniers territoires vierges. C’est un terrain d’aventure qui
fait rêver.
Cette image doit beaucoup aux expéditions
d’alpinistes légendaires comme Edmund
Hillary, Maurice Herzog, Lionel Terray, Louis
Lachenal ou Walter Bonatti. La conquête de
l’Annapurna, puis celle de l’Everest au début
des années 1950, ont eu un formidable retentissement.
C’est aussi l’époque des romans à succès de
Roger Frison-Roche. Une série entamée dans
les années 40 avec « Premier de cordée ». Cette
image des sommets sauvages et grandioses, aux
neiges perpétuelles, est l’une des composantes
fortes de l’imaginaire de la montagne.
se nourrit cet imaginaire ?
La pérennité par exemple. Les Alpes sont
nées voici des centaines de millions d’années.
Idem pour les autres chaînes. Elles étaient là
hier et elles y seront encore demain. Elles forment un milieu naturel, pittoresque,
vivant et dynamique, un espace qui exhale
l’authenticité. Un espace préservé où l’air est
plus pur, les eaux bénéfiques pour la santé — le
thermalisme est très présent.
La montagne est aussi un espace protégé par
l’altitude, peu accessible. Et ses paysages marient majesté, beauté et spectacle grandiose. intermédia. C’est tout cet imaginaire qui
pousse les marques à utiliser la montagne
dans leur communication ?
jms Bien sûr, car elle donne de fait une valeur
ajoutée aux produits auxquels sont spontanément associées ses valeurs.
Aujourd’hui, il n’y a plus beaucoup d’environnements naturels qui dégagent des émotions
comme la montagne : elle est devenue le dernier espace naturel.
Des eaux minérales naturelles comme Évian,
Volvic ou Thonon l’arborent dans leurs logos.
Évian cultive depuis les années 1930 l’image
d’une eau lentement filtrée qui lui assure une
naturalité et une pureté exceptionnelles : dépourvue de la moindre bactérie, elle est par
excellence l’eau des biberons. Et ce sont les
Alpes qui lui confèrent le goût délicieux des
sources. La montagne est récurrente dans sa
communication, jusque dans les bouteilles collectors qu’elle commercialise pour les fêtes de
fin d’année.
intermédia. Le chocolat surfe aussi
sur les sommets…
Tout à fait. À commencer par le Suisse
Milka qui a mis depuis longtemps sa vache
mauve « en cure » à la montagne. Elle y mange
la bonne herbe des alpages et s’abreuve de
bonne eau de source pour produire un bon
lait pour faire du bon chocolat !
Toblerone, autre marque suisse née à Berne, a
adopté le mont Cervin à la fois comme logo,
mais aussi dans la forme même de sa barre chocolatée. Une manière efficace pour la marque
de rappeler l’identité montagnarde de la Suisse.
Autre chocolatier inspiré par la montagne, Poulain sponsorise depuis un siècle le prix du meilleur grimpeur du Tour de France. Hommage
appuyé aux géants de la route qui ont beaucoup fait pour la promotion et la légende de la
montagne auprès du grand public.
jms
Aujourd’hui, il n’y a plus beaucoup
“ d’environnements naturels qui dégagent
des émotions comme la montagne. ”
n° 1147 I 14 décembre 2011 I InterMédia Magazine I 31
...
grandtémoi
...
Jean-Marc Silva
intermédia. Qui voyez-vous encore comme
intermédia. Quelles sont les grandes étapes
intermédia. La montagne commence à devenir
Les marques automobiles plus particulièrement. Ainsi, Audi, BMW, Citroën ou Peugeot
tournent régulièrement des films publicitaires
pour montrer la bonne tenue de route et la
fiabilité de leurs véhicules dans les conditions
les plus extrêmes (neige, glace, virages…).
Cette année, on a pu voir que les 4x4 Dodge
se riaient de chutes de neige phénoménales,
grâce à leur système AWD de transmission
intégrale.
La rudesse de la montagne sert à mettre en
exergue les performances d’une Peugeot 207
ou d’une Citroën C5. Et cet environnement difficile se transforme en circuit de sport automobile. Notamment dans un spot Peugeot où le
GPS de bord incite le conducteur à se défouler
sur une route à lacets en lui lançant : « C’est
parti, mon kiki ! »
Dans la première moitié du XXe siècle, on
était dans les exploits d’une élite, tant d’alpinistes que de champions de ski, qui était un
sport encore confidentiel et pratiqué dans des
endroits peu accessibles.
Les sports d’hiver ont commencé à être médiatisés avec les premiers Jeux Olympiques d’hiver
à Chamonix en 1924. Mais il faudra attendre
les JO de Grenoble, en 1968, pour en faire un
phénomène populaire grâce à la télévision (ce
furent les premiers JO télévisés). Avec un effet
d’entraînement sur la mise en tourisme de la
montagne.
jms
marques branchées montagne ?
jms
intermédia. N’est-on pas toujours
dans la montagne aux exploits ?
jms Oui, mais pas dans le registre des grandes
conquêtes des années 50. Là, on est déjà plus
dans le ludique. La montagne est devenue un
espace dynamique et tonique, un espace plaisir
et expérientiel. Un espace de liberté aussi.
C’est l’aboutissement de plus d’un demi-siècle
d’évolutions de l’image d’un territoire que
l’homme a entrepris de domestiquer avec la
mise en tourisme de son espace.
de cette évolution ?
jms
intermédia. Quand démarre ce tourisme
des cimes ?
jms Dans les années 60, avec le lancement du
« Plan neige » qui visait à démocratiser le ski.
C’est ce plan qui va générer la création des
stations d’altitude, comme Tignes, Val Thorens
et autres, dont le lancement va marquer les
esprits. Ce Plan neige et les congés payés ont
fortement contribué à une démocratisation de
l’accès à la montagne.
La communication touristique, la littérature,
le cinéma et surtout la télévision modèlent
peu à peu une image plus positive de la montagne. Notamment grâce aux feuilletons TV
comme Belle et Sébastien ou Les Sesterain
(Miroir 2000).
attrayante dans les années 70 ?
Tout à fait. Elle devient aussi tendance. Le
show-biz et le Tout-Paris font de Megève, Vald’Isère ou Méribel des stations à la mode. La
montagne devient de plus en plus accueillante
et attractive et génère une image de plus en
plus positive. De plus en plus ludique et festive
aussi avec l’énorme succès des Bronzés font du
ski, devenu un film culte à l’humour décalé,
cultivant la dérision avec légèreté.
Cette fin des années 70 marque une rupture
avec la sortie de l’aspect conventionnel et glorieux au profit d’un attrait grandissant pour ces
nouveaux espaces de liberté exaltés par l’essor,
dans les années 80, de la nouvelle glisse du surf.
Un sport porté par des films, eux aussi cultes,
comme Apocalypse Snow, où de méchants
monoskieurs cherchent à capturer le gentil
surfeur pour s’emparer du secret de la glisse.
Plus tard, le film Taxi, dans l’un de ses épisodes,
exaltera aussi les valeurs de la glisse dans des
séquences de poursuites automobiles mémorables sur la neige.
intermédia. Cette évolution se retrouve-t-elle
dans la publicité des marques ?
Naturellement. Dans un spot Milka, c’est
une marmotte qui emballe ses tablettes de chocolat dans du papier aluminium. Le Caprice des
dieux célèbre le bonheur suprême de déguster son fromage dans une télécabine dans un
jms
Intermedia.fr Le portail
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le lundi, appels d’offres
de toute la France, études
et rapports, consultation
des articles publiés
depuis 2005…
32 I InterMédia Magazine I n° 1147 I 14 décembre 2011
environnement paradisiaque. Coca-Cola, McDo,
Ovomaltine ou Hollywood Chewing Gum ont
utilisé avec humour la montagne. Sans oublier
le skieur victime d’un coup de barre, qui repart
tout gaillard après avoir avalé sa confiserie
Mars. La publicité met aussi en avant les vertus de
santé de la montagne. On se souvient des campagnes du Club Med avec son slogan « Respirez ». Et diverses stations joueront sur les
bienfaits de la montagne sur le thème : une
semaine à la montagne, c’est une bonne santé
toute l’année.
intermédia. Les bienfaits, c’est aussi le thème
de la nouvelle communication de la montagne
française depuis un an.
jms Oui, mais surtout sur son marché domestique. À l’étranger, dans ses 19 pays cibles,
France Montagnes vend l’excellence de son
domaine skiable, le premier du monde. Dans
l’Hexagone, on vise naturellement les pratiquants du ski, mais aussi les femmes qui sont
les grandes prescriptrices de vacances : elles
sont 58 % en France à décider seules du choix
des vacances de la famille ou du couple. Et
sont plus sensibles au message de « bien-être ».
Depuis un an, nos campagnes jouent l’humour
décalé, avec l’agence lyonnaise Native, en vantant les bienfaits de la montagne, tant dans des
activités sportives que dans la randonnée, la
découverte de la flore, la détente, la gastrono-
Dans les années 70, la montagne
“ devient tendance. Et même ludique et festive
avec l’énorme succès des Bronzés font du ski,
film culte à l’humour décalé. ”
mie, etc. Avec des slogans comme « Vos marmots vont adorer les marmottes », « Envoyez
tout balader », « On ne fait pas de tartiflette sans
monter dans des œufs »…
Cet hiver on voit une femme embrasser sa paire
de skis en prévenant : « Vous allez vite faire une
fixation », tandis qu’une autre, devant un télésiège, lance à un homme : « Tu montes, chéri ».
intermédia. C’est ce que viennent chercher
aujourd’hui vos clients ?
Oui, nous visons à répondre aux désirs
d’une clientèle qui vient dans un environnement exceptionnel, vivre quelque chose
d’unique, sous forme d’expérience. On n’est
plus dans le ski à tout prix. Même s’il reste
la locomotive, il est bien entouré par de multiples activités : raquettes, traîneau, patinoire,
spa, moments ludiques et festifs… C’est une montagne plurielle qui cultive divertissement et bien-être. Le bonheur est dans la
neige, et il n’y a pas de honte à avoir du plaisir
jms
à seulement contempler la montagne, sans faire
de ski. Ou à venir profiter des saveurs de la gastronomie de montagne, qui compte aujourd’hui
de nombreuses tables étoilées.
Et les marques se sont aussi engouffrées dans
cette quête d’expériences des consommateurs.
intermédia. Quelles sont ces marques ?
jms Par exemple Actimel qui a créé l’Acticross,
un parcours ludique et sportif pour les enfants
et leur famille, dans plusieurs stations. Tout
comme les pistes mauves Milka permettent
aux enfants de découvrir la faune et la flore.
Surtout, les marques font beaucoup de streetmarketing au pied des pistes. Les gens en
vacances sont plus réceptifs aux lancements
de produits de consommation, comme notamment une nouvelle boisson chocolatée v
Propos recueillis
par michel texier
n° 1147 I 14 décembre 2011 I InterMédia Magazine I 33
decrytage
Milka, Toblerone, Évian... Ces marques ont choisi
de s’incarner à travers la montagne, même si elles
n’en sont pas originaires. Décryptage avec JeanJacques Urvoy, consultant en image de marque.
Des logos au sommet
La montagne :
un symbole
universel
La montagne, représentée par
un triangle, fait partie des trois
symboles universels avec le
carré et le cercle. « Le cercle représente le ciel, le carré la terre
et le triangle fait le lien entre la
terre et le ciel. La montagne est
donc un triangle aspirationnel
qui emmène ailleurs, élève,
transforme... », explique JeanJacques Urvoy. Elle véhicule la
pureté mais aussi la progression
et le leadership.
Jean-Jacques Urvoy,
55 ans, est l’auteur de
Créer un logotype avec
Pierre-Emmanuel Fardin.
Spécialiste de l’image des
marques, il a travaillé
en agences (Carré Noir,
Proximité BBDO...) et chez l’annonceur
(groupe Richemont, Meccano...). Il
est aujourd’hui à la tête de sa propre
structure, La simple agence.
stylos montblanc Difficile de
porter le nom de Mont-Blanc sans s’associer
à la montagne. Depuis 1913, la marque de
stylos de luxe utilise pour logo une étoile,
« qui est en réalité constituée de deux
triangles imbriqués, entourés d’un cercle »,
fait remarquer Jean-Jacques Urvoy. Chaque
branche représente un glacier du massif
du Mont-Blanc. La montagne est aussi
rappelée dans la typographie avec un A
triangulaire.
34 I InterMédia Magazine I n° 1147 I 14 décembre 2011
adidas
Créée en 1924, la marque de sport a adopté le logo
à trois bandes en 1967. Mais il faudra attendre 2005 pour
qu’elles prennent la forme d’une montagne. « C’est un
logo miroir : chacun peut se projeter. Certains verront
la montagne, l’aventure et le dépassement de soi.
D’autres les starting-blocks d’athlétisme... C’est là
toute sa force », explique Jean-Jacques Urvoy.
La marque a adopté récemment un nouveau
logo, qui arbore toujours les trois barres, mais
en position horizontale.
evian La célèbre eau minérale
utilise les montagnes comme
symboles de son origine et de ses
bienfaits. En effet, Évian puise
sa source au-dessus du Léman
et a choisi de représenter trois
montagnes jeunes des Alpes en
référence à sa base-line : « source
de jeunesse pour votre corps ».
« Le cercle qui entoure la montagne
symbolise la maternité et rappelle
que l’eau d’Évian est celle que l’on
utilise dans les biberons », précise
Jean-Jacques Urvoy.
toblerone Depuis 1970, le logo
du chocolat Toblerone représente
le Cervin situé dans les Alpes à la
frontière entre la Suisse et l’Italie. Au
second coup d’œil, un ours est visible
en filigrane. L’animal est le symbole de
Berne, ville dont la marque Toblerone
est originaire. « En plus de l’origine,
la montagne traduit l’intensité du
plaisir du chocolat ». Adéquation
parfaite entre un logo et son produit :
la barre Toblerone a adopté la forme
triangulaire.
paramount Très connu des cinéphiles,
le logo Paramount est apparu sur les écrans
pour la première fois en 1927. L’utilisation
d’une montagne fait référence au nom de la
société qui signifie littéralement « par-delà les
monts » et s’inspire de l’Artesonraju, un des
plus hauts sommets péruviens (6 025 mètres).
« C’est un logo qui s’exporte très bien,
car il associe deux éléments universels : le
triangle et le cercle. S’ajoutent à cela les étoiles
pour symboliser le cosmos ».
idées
incentive
Séminaires en montagne : retour à la simplicité
Finis les team-buildings bling-bling en hélicoptère au-dessus des glaciers. Les annonceurs diminuent leur budget et privilégient la simplicité pour leurs événements
internes.
« La tendance est aux incentives conviviaux
comme des balades en raquettes suivies
d’une dégustation de produits locaux »,
détaille Pascale Josephe, chef de projet au
sein de l’agence Evolution 2 Events (74).
Pour Quiksilver, elle a ainsi organisé dernièrement une randonnée glacière et une
journée d’initiation au secourisme en horspiste pour les meilleurs skieurs.
Nestlé a préféré une chasse au trésor en station par SMS. Quant à Eider, la marque de
vêtement a opté pour une course d’orientation suivie d’une nuit dans une yourte. v
CAMPAGNE
AFFICHAGE
25-27.04.2012
Salon mondial de l’aménagement en
montagne à
Grenoble.
Salon qui réunit
les industriels et
les usagers qui font
de la montagne
un terrain de loisir
et d’innovation.
www.alpexpo.com
27-29.04.2012
Biennale du
développement durable
en montagne
à Chambéry.
Trois jours de
rencontres autour
du développement
touristique durable
de la montagne.
Topeak’s Média filme les
skieurs pour faire du buzz
L’
entreprise chambérienne propose aux stations de créer des
concepts ludiques sur leurs
pistes pouvant être exploités par les
marques. Créée en 2011 par Pierre
Marhic, Topeak’s Média s’appuie notamment sur la technologie de captation d’images Viewshare pour filmer
les skieurs pendant leur descente de
slalom. Le principe : trois caméras
automatiques sont positionnées le
long d’un parcours et enregistrent
les performances des participants.
Le montage se fait automatiquement
et de façon instantanée, afin que
le skieur récupère le
mini film de 15 secondes retraçant ses
exploits à l’arrivée. Il
utilise alors une borne
tactile pour transférer
la vidéo sur son smartphone et la relayer sur
www.alpipro.com
4-9.06.2012
Festival
international
du film
d’animation
à Annecy.
Récompense les
films d’animation
du monde entier.
www.annecy.org
36 I InterMédia Magazine I n° 1147 I 14 décembre 2011
les réseaux sociaux et auprès de ses
amis.
Marketing viral. Les stations
peuvent commercialiser ces concepts
auprès d’annonceurs. Les marques
s’associent alors à une technologie
innovante et peuvent surtout cobrander ces petits films viraux. La
Caisse d’Épargne a d’ailleurs choisi
l’offre de Topeak’s Média pour ses
freestyle parks organisés cet hiver
dans huit stations. Plus de 500 000
vidéos aux couleurs de l’écureuil sont
attendues. v
Respirer l’air pur
Les Suisses allemands de Braunwald
Tourism ont imaginé une campagne
originale pour vanter les mérites de
leur centre de vacances en montagne,
où les voitures sont interdites. Avec
l’agence Wirz BBDO Network (Zurich), ils ont affiché des panneaux
remplis de bulles d’air frais. Les passants étaient invités à les percer et à
respirer l’air non pollué de la station
de ski suisse. v
OBJET
Le Drapo : après
le bandeau, le bonnet
Fort du succès de son bandeau,
l’entreprise savoyarde Affiches Toi
développe cette année la version
bonnet. Le concept reste le même :
un objet made in France et une histoire forte, puisque le Drapo a été tricoté par la sœur du champion de ski
Jean-Baptiste Grange pour lui porter
bonheur. Les annonceurs ont déjà
été conquis par ce bonnet en laine
personnalisable : Valloire, Val-d’Isère,
Savoie Mont Blanc, les concessions
automobiles Jean Lain... Mais il est
aussi vendu auprès du grand public
en France, en Suisse, en Autriche, en
Finlande et dans les pays baltes. v
débloque
-notes
Jacques Simonet,
éditeur
d’InterMédia
Mona Lisa
est une vieille planche
La planche de ski sera-t-elle le meilleur support de
création artistique de ce début de siècle ?
Les fabricants ont pris l’habitude de faire décorer
leur production par de jeunes artistes qui profitent
de cette diffusion de masse pour se faire une
notoriété internationale.
Ainsi de Rossignol qui a lancé le projet Seven
Artistic Sins avec les centres d’art rhônalpins
Spacejunk (ci-contre : «Invidia» du Californien
Andy Howell).
Mais à bien y regarder, ce travail de peinture sur
planches n’est-il pas un retour aux sources ? Avant
l’invention, finalement récente, de la toile tendue
sur châssis, les peintres ne disposaient que des
murs ou de panneaux de bois pour s’exprimer.
C’est ainsi que la Joconde a été peinte sur un
morceau de peuplier. Pauvre Leonardo qui
devait se contenter d’une vulgaire plaque de bois
alors que nos artistes bénéficient de supports de
haute technologie qui mettent en oeuvre des
matériaux polymères sophistiqués recouverts
d’un composite époxy renforcé de fibre de
verre (pour faire simple).
À défaut de bonne peinture, la bonne glisse est
à ce prix. Et je vous mets au défi de dévaler la
Kandahar à Chamonix sur la Joconde même
avec des bords de cadre bien affûtés et un
fartage de compétition.
La board generation
découvre le châssis
Après avoir peinturluré de coûteuses
planches qui permettent à des ados
boutonneux de faire les casse-cou dans les
38 I InterMédia Magazine I n° 1147 I 14 décembre 2011
Une grimace énigmatique
À la perspective du traitement qui l’attend sur les
pentes (torsions des skis, croisements de spatule,
froid glacial...), cette Mona Lisa des temps modernes
n’a pas vraiment le sourire.
champs de bosses, les artistes de la board culture ont
fini par découvrir les vertus de la toile tendue.
La respectabilité est à ce prix. L’entrée dans les
galeries aussi. La board culture c’est bien, mais les
collectionneurs d’art au compte en banque bien garni
ce n’est pas mal non plus. Surtout quand on commence
à désirer une maison avec femme et enfants.
Et puis la toile a quand même des avantages : sa légèreté
et son coût dérisoire. Accessoirement, les voleurs de
tableaux apprécient sa facilité de découpage au cutter.
Et un vol spéctaculaire est une étape marketing primordiale dans la carrière d’un artiste. On dit que sans celui de
la Joconde en 1911 et le fort battage médiatique qui s’ensuivit, jamais Mona Lisa ne serait devenue aussi célèbre. v