Emmanuel Macron défie François Hollande

Emmanuel Macron défie François
Hollande
François Hollande et Emmanuel Macron, lors de la présentation de La Nouvelle France
Industrielle, en septembre 2014, à Paris. – Crédits photo : François BOUCHON/Le Figaro
Par Solenn de Royer
Deux jours avant l’intervention présidentielle du 14 Juillet, la dernière du
quinquennat, l’ambitieux ministre de l’Économie organise ce mardi son premier
grand meeting à la Mutualité.
Exercice régalien par excellence, le 14 Juillet a souvent aiguisé les
appétits de ceux qui se verraient bien calife à la place du calife. En 2005,
depuis son bureau de la place Beauvau, Nicolas Sarkozy avait comparé Jacques
Chirac à Louis XVI, alors que le chef de l’État se livrait à la
traditionnelle intervention télévisée, de l’autre côté de la rue du FaubourgSaint- Honoré. En 2013, Manuel Valls, avait, lui aussi, grillé la politesse à
François Hollande en prononçant un véritable discours de politique générale
dans le Gard, à la veille du 14 Juillet. Cette fois, c’est Emmanuel Macron
qui joue les trouble-fête: le ministre de l’Économie, qui cache de moins en
moins ses ambitions présidentielles, réunit ses soutiens à la Mutualité à
Paris, pour un premier grand meeting, deux jours avant le dernier 14 Juillet
du quinquennat du chef de l’État. «On ne bordélise pas l’intervention
présidentielle du 14 Juillet du président de manière aussi désinvolte!»,
s’agace le fidèle député hollandais Sébastien Denaja.
Le fondateur d’En marche! espère faire de ce meeting une «démonstration de
force» et poser un nouveau jalon sur la route de 2017. Samedi, sur le Tour de
France, Macron a une nouvelle fois entretenu le doute sur ses intentions. «Je
ne concours pas pour le maillot à pois ou le maillot blanc (…) Quand on fait
du vélo, c’est le maillot jaune»,a-t-il confié au JDD . «Il est de moins en
moins ambigu», se félicite un soutien, qui le pousse à rompre.
Certains proches de Hollande se disent même persuadés que Macron sera l’un
des meilleurs atouts du chef de l’État quand celui-ci se déclarera
Si l’entourage de Macron assure que ce dernier a évoqué le contenu de son
discours avec le président, le texte lui-même n’a pas été transmis à
l’Élysée. «Macron joue double jeu, dénonce un haut gradé de la majorité.
Devant Hollande, il jure qu’il reste à sa place. Mais en même temps, le
simple fait qu’il se prépare sape la position du président. Macron est dans
une stratégie d’impeachment, il veut empêcher le président d’être candidat.»
À l’Élysée, où l’on rappelle qu’un ministre doit «s’inscrire dans le
collectif», on feint de ne pas prendre ombrage des initiatives de l’exconseiller. Certains proches de Hollande se disent même persuadés que Macron
sera l’un des meilleurs atouts du chef de l’État quand celui-ci se déclarera.
De son côté, le ministre reste persuadé que Hollande sera dans
l’impossibilité de se représenter. Ses proches, qui répètent que les Français
ne veulent pas d’un duel Hollande-Sarkozy, jugent qu’une «troisième voie à la
Bayrou en 2007» est possible. Selon nos informations, Emmanuel Macron a
d’ailleurs déjeuné avec le président du MoDem à Pau la semaine dernière, afin
de le sonder.
Contraint de cultiver l’ambiguïté
Quoi qu’il en soit, le ministre de l’Économie, qui ne veut pas décourager ses
partisans et doit redonner du souffle à son mouvement, est contraint de
cultiver l’ambiguïté. Mais il ne franchira pas pour autant la ligne rouge
mardi: il n’annoncera ni son départ du gouvernement – que certains de ses
proches le poussent toutefois à accélérer – ni sa candidature à la
présidentielle. «Macron veut d’abord partir d’un diagnostic partagé sur
l’état du pays, développer des idées et une nouvelle offre politique, avant
de passer aux questions de personnes», justifie un proche, Benjamin Griveaux.
Dans un discours de 45 minutes, Macron tracera les «grandes lignes» et les
«valeurs» de son projet et détaillera une «offre politique nouvelle», selon
son entourage. «Il veut montrer qu’il a une vision», insiste un proche.
Réforme, écologie, croissance, égalité réelle, Europe: il sortira de son
champ ministériel. «Ce sera un premier discours de politique générale»,
s’amuse un soutien.
Selon son entourage, 4000 personnes se sont inscrites à la Mutualité, qui
peut en accueillir 2000
Macron, dont le discours pour la fête de Jeanne d’Arc à Orléans, en mai,
avait été jugé perfectible, s’est préparé à l’exercice lors de plusieurs
trainings. Selon son entourage, 4000 personnes se sont inscrites à la
Mutualité, qui peut en accueillir 2000. Une trentaine de parlementaires et
des maires de grandes villes seront présents. «On a assez d’entendre qu’il
est seul et que son mouvement est une bulle, insiste un proche. Ce sont les
mêmes reproches qu’on faisait en 2006 à Ségolène Royal!» La ministre de
l’Écologie, qui regarde l’ascension du trublion avec bienveillance, a
d’ailleurs été invitée. Mais aucun ministre ne devrait être présent mardi.
Afin d’incarner «l’ouverture» et la «proximité», Macron fera son discours au
milieu des 600 formateurs de son mouvement qui ont formé les «marcheurs» au
porte-à-porte et au recueil des doléances des Français. Son discours sera
précédé de cinq interventions de personnalités de la société civile, dont
probablement l’écrivain Alexandre Jardin. «Macron n’a pas d’autre choix que
d’être dans une stratégie de la tension et de l’attention, sinon il meurt»,
résume un dirigeant PS.
Source :©
Le Figaro Premium – Emmanuel Macron défie François Hollande