machine - Le Nouvel Observateur

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La cour d’assises
Comment fonctionne
la machine judiciaire
(En matière criminelle)
La police judiciaire
(Police nationale,
Gendarmerie…)
intervient au cours de
l’enquête préliminaire ou de
l’enquête de flagrance, puis
exécute les demandes
d'investigation du juge
d’instruction. Elle est
soumise au contrôle de la
chambre de l’instruction.
En vertu de la séparation des pouvoirs, il n’intervient pas
sur le cours d’une instruction mais il a autorité sur tous
les membres du parquet et peut être informé de
l’évolution d’une affaire.
A partir de janvier 2001,
le capitaine Didier
Wallet de la brigade des
mineurs de Boulogne-sur-Mer interroge
les enfants. Entre juin 2001 et juin
2002, François-Xavier Masson, du
SRPJ de Lille, est nommé « chef
d’enquête » et se voit confier la piste du
« réseau pédophile » et des « notables ».
Ils ont eu des doutes sur la crédibilité de
l’affaire et disent de ne pas avoir été
consultés. La PJ a interrogé des enfants
sans procéder aux enregistrements
vidéo prévus par la loi. Elle n’a jamais
récolté de preuves matérielles
irréfutables.
Le procureur
de la République
Dominique
Perben
60 ans (mai 2002juin 2005)
Pascal
Clément
60 ans (depuis
juin 2005)
Les deux premiers ont été régulièrement informés par le
parquet de Boulogne-sur-Mer entre 2001 et 2004. Après le
premier verdict, Dominique Perben a reçu les 7 acquittés de
Saint-Omer, en septembre 2004. A l'issue du second procès, son successeur
Pascal Clément a présenté ses excuses aux 13 personnes innocentées.
5 décembre 2000 :
Exerce sa
tutelle
sur…
Supervise
l'enquête
Procureur général
Le parquet regroupe les
magistrats chargés de requérir
l’application de la loi. Ce sont les
procureurs, leurs adjoints, les avocats
généraux et les substituts. A l’inverse
de leurs collègues du siège (juges
d’instruction, des libertés, présidents
de cour…), ils ont un devoir
d’obéissance hiérarchique.
Procureur de la République
la protection de
l’enfance de
Boulogne-sur-Mer informe le
parquet des soupçons
d’agressions sexuelles du
couple Badaoui- Delay sur
leurs enfants. L’enquête est
confiée aux services de police
de la ville début janvier.
Février-mai 2002 :
22 février 2001 :
l’instruction est confiée au
juge Fabrice Burgaud.
Juin 2002 : l’un des 18 mis
Mars-mai 2001 :
Il dirige le parquet général. Les officiers et agents
de police judiciaire sont placés sous sa
surveillance. Il peut les charger de recueillir tous
les renseignements qu'il estime utiles. A la tête du
ministère public, il peut faire appel des
ordonnances du juge d’instruction ou demander
le dépaysement d’une affaire (instruite alors dans
une autre juridiction).
C’est lui qui a avancé, dès janvier
2001, l’hypothèse d’un réseau
pédophile au juge Burgaud. Il a suivi
de près l’affaire et ne s’est quasiment pas
démarqué de l’instruction. A la fin de celle-ci, il a
demandé deux non-lieux pour Odile Marécaux et
Christian Godard, finalement infirmés par la
chambre de l’instruction. Avocat général au procès
de Saint-Omer en 2004, il n’a requis « que »
7 acquittements sur les 13 personnes clamant leur
innocence.
interpellations de 6 personnes,
dits « les notables » : un huissier
et son épouse, un chauffeur de
taxi, un prêtre ouvrier, un
métallurgiste et son fils.
en examen, François
Mourmand, décède en détention
provisoire. Odile Marécaux est
remise en liberté, un mois après
Christian Godard. Seule Karine
Duchochois n’a pas été
incarcérée.
17 décembre 2002 : le
parquet requiert deux non-lieux
Jean-Amédée
Lathoud
Le procureur
général
Informe
57 ans, procureur de la
République de
Boulogne-sur-Mer
depuis 1996
Novembre 2001 :
interpellations de Christian
Godard, le mari de la
boulangère, et d'un couple
d'anciens voisins des Delay.
première vague
d’interpellations : 8 voisins
des Delay. Parmi eux,
6 personnes qui seront
ultérieurement innocentées
dont la boulangère Roselyne
Godard.
Supervise
Gérald Lesigne
Cette deuxième cour d’assises réexamine
entièrement le dossier en appel et rejuge l’affaire.
Elle est composée de 3 magistrats et de 12 jurés,
10 voix sur 15 sont nécessaires pour décider
de la culpabilité.
57 ans, président de chambre à la cour
d'appel de Douai, présidait la cour à
Saint-Omer
Le 4 juillet 2004, à la stupéfaction
générale, la cour n’a acquitté que
7 accusés et condamné 10 personnes dont
6 clamaient leur innocence.
Cour d'assises
d'appel
Jury
pour Christian Godard et Odile
Marécaux, la femme de
l’huissier.
Cour d'assises
Lacombe, qui a succédé à
Burgaud fin août, requiert un
seul non-lieu, pour Christian
Godard. La chambre de
l’instruction ne suit ni le parquet
ni le juge et renvoie les
17 accusés devant les assises.
Contrôle
le respect
de la procédure
Transmet
l'ordonnance
de mise
en accusation
Prison
President
Décide de
la détention
Juge des
libertés et de
la détention
Contrôle
Juge d'instruction
Saisit
Demande
la mise en détention
provisoire
Contrôle
Désigne
Fabrice Burgaud,
34 ans (février 2001août 2002)
Cyril Lacombe,
34 ans (août 2002mars 2003)
Fabrice Burgaud n’a pas demandé à être assisté
d’autres juges d’instruction, comme le permet
la loi pour les affaires complexes. Il a mis en examen
18 personnes, dont une, François Mourmand, est décédée en
prison en 2002. Son successeur, Cyril Lacombe, a renvoyé
16 accusés aux assises, ne demandant un non-lieu que pour
Christian Godard, refusé par la chambre de l’instruction.
Les experts
Plus haute juridiction
de l'ordre judiciaire,
elle siège à Paris et est divisée en
6 chambres, dont la chambre
criminelle. Cette dernière exerce un
contrôle sur le respect de la
procédure et non sur le fond. Par
ailleurs, la Cour de Cassation se
prononce sur les décisions rendues,
en dernier ressort. Là aussi, elle
n’examine pas les faits mais le
respect du droit.
1er décembre 2005 : à
Paris, les 6 condamnés qui ont
fait appel sont acquittés.
Contrôle
les conditions
de détention
Demande des
investigations
Enquêteur
Le juge des
libertés et de la
détention (JLD)
Magistrat du siège,
il décide du placement en détention
provisoire demandé par le juge
d’instruction.
Bruno Cotte
La Cour de
Cassation
Mai-juillet 2004 :
à Saint-Omer, seuls les couples
Badaoui-Delay et GrenonDelplanque ont reconnu les faits
mais, stupéfaction,
10 personnes sont condamnées
et 7 acquittées.
59 ans, procureur
général près la cour
d’appel de Douai
(août 1999 -juillet 2004)
En contact avec
le procureur de
la République et
le juge d’instruction Fabrice
Burgaud, Jean-Amédée Lathoud
ne s’est guère manifesté durant
l’affaire. Malgré le climat
détestable, il n’a pas demandé
à délocaliser le dossier.
Jury
Mars 2003 : le juge Cyril
Le juge d’instruction
Magistrat du siège, donc indépendant, il peut toutefois être
dessaisi d’une affaire. Après l’ouverture d’une information par
le procureur de la République, il instruit à charge et à décharge
en prenant des décisions (ordonnances), susceptibles d’appels.
Ses pouvoirs sont très étendus : interrogatoires, confrontations, perquisitions, écoutes téléphoniques, mandats de
recherche, de comparution (convocation) ou d’amener
(contrainte par la force publique)… Il décide des mises en
examen comme des remises en liberté et peut demander un
placement sous contrôle judiciaire plutôt qu’une incarcération.
En fin d’instruction, il rend une ordonnance de mise en
accusation (renvoi devant les assises) ou de non-lieu.
Jean-Claude Monier,
En avril 2005, Martine Varin,
58 ans, qui présidait la cour
d'assises à Paris, a reporté le procès « pour
supplément d’information », alors que le dossier ne
semblait plus tenir debout. Les 6 derniers accusés
devront donc attendre le 1er décembre 2005 pour
bénéficier d’un acquittement, sous la présidence
cette fois d’Odile Mondineu-Hederer, 59 ans.
Le jour du réquisitoire, le procureur général de
Paris, Yves Bot, leur présente ses regrets au nom
de l’institution judicaire.
Désigne
Dirige
Il a de larges attributions, et ce tout au long d’une affaire : enquête de
police, instruction et procès. Il reçoit les plaintes et les dénonciations,
décide de poursuivre ou de classer l'affaire. Il dirige la police judiciaire et
peut faire procéder à tous les actes qu’il estime nécessaires. C’est lui qui
saisit le juge d’instruction. Il peut assister aux interrogatoires et
confrontations, faire appel des ordonnances du juge d’instruction et
demander son dessaisissement. A la clôture, il rédige un
réquisitoire et le transmet au juge qui rend son ordonnance.
A l’audience, en tant qu’avocat général il requiert la peine.
Il peut aussi demander l’acquittement de personnes qu’il
avait lui-même décidé de poursuivre.
59 ans (octobre 2000mai 2002)
CHRONOLOGIE
Les enquêteurs
Le garde
des Sceaux
Marylise
Lebranchu
Elle juge en premier ressort les crimes, qu’elle peut décider
de requalifier en délits. Elle est composée de trois
magistrats, dont un président, et d’un jury populaire de
9 personnes tirées au sort. Le président mène les débats,
il peut prendre toutes les mesures nécessaires à la
manifestation de la vérité, convoquer qui il veut ou se faire
communiquer des pièces non versées au dossier. A l’issue de
l’audience, la délibération est secrète et les trois magistrats
votent avec les jurés : 8 voix au moins sur 12 sont
nécessaires pour décider de la culpabilité.
La cour d’assises
d’appel
60 ans, président
de la chambre
criminelle
La chambre
criminelle de la
Cour de Cassation n’a pas
remis en cause l’instruction.
« Les 13 d’Outreau » n’ont pas
eu à se pourvoir en cassation
puisqu’ils avaient été
innocentés en premier ressort
pour 7 d’entre eux, en appel
pour les 6 autres.
La chambre de
l’instruction
Composée de trois magistrats,
c’est le garde-fou de l’instruction.
Elle peut prononcer la nullité
d’actes de police, statue sur
les appels formés par les avocats contre les
ordonnances du juge d’instruction ou du JLD.
Elle peut ordonner tout acte
qui lui paraît utile à la manifestation de la vérité,
procéder directement
à des mises en examen et
en annuler. En fin d’instruction,
elle rend un arrêt de non-lieu ou de mise en
accusation. Son président peut prononcer
directement une remise en liberté.
Maurice Marlière
49 ans, actuellement
vice-président du
tribunal de grande
instance de
Boulogne-sur-Mer
Il a fait incarcérer
17 des 18 mis en
examen (de quelques semaines
à trois ans). Entre 2001 et 2004, il
a examiné et refusé 244 demandes
de remise en liberté, rejetant
notamment plus de 100 demandes
de l’abbé Wiel, une trentaine pour le
chauffeur de taxi Pierre Martel. Au
total, 360 demandes ont été
rejetées durant l’affaire. Les
innocentés d’Outreau ont
cumulativement effectué plus
de 25 ans de prison.
Didier Beauvais
58 ans, président de la
chambre de l’instruction
de la cour d'appel de
Douai (jusqu’en 2005)
La chambre a validé l’instruction du
juge Burgaud et de son
successeur. Elle a confirmé la
quasi-totalité de leurs décisions, notamment les
refus de confrontations individuelles réclamées
par les avocats. Elle a rejeté toutes les demandes
de remise en liberté durant l’instruction. Elle a
ensuite renvoyé 17 personnes aux assises, alors
que des demandes de non-lieu avaient été
formulées par le procureur de la République (pour
Christian Godard et Odile Marécaux) et le juge
Lacombe (pour Christian Godard).
Textes : Stéphane Arteta
Infographie : Mehdi / « le Nouvel Observateur »
Photos : X. Mouthon/Globepix — Courtois-Barreau/Asa-Picture —
Facelly/Sipa — Steph/Visual Press Agency —
Photopqr/Le Parisien/Maxppp — Vernier/JBV News —
P. Huguen/AFP — J. Guez/AFP — C. Petit Tesson /Maxppp

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