Présumé coupable

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Présumé coupable
Présumé coupable
Drame réalisé en 2011 par Vincent Garenq
Genre : Drame, autobiographique
Origine Franco/Belge Acteurs Rôles:
Philippe Torreton : Alain Marécaux.
Jean-Pierre Bagot : le père d'Alain Marécaux.
Michèle Goddet : Thessy.
Wladimir Yordanoff : Hubert Delarue.
Olivier Claverie : le procureur-avocat général.
Noémie Lvovsky : Edith Marécaux.
Farida Ouchani : Myriam Badaoui.
Raphaël Ferret : le juge Burgaud.
Durée : 95 min.
Adaptation au cinéma du livre
« Chronique de mon erreur judiciaire, victime de l’affaire
d’Outreau »
écrit par Me Alain Marécaux, huissier de justice de son état,
qui a fait partie des personnes accusées et condamnées à tort
lors de la désormais, aussi tristement célèbre que sordide,
« Affaire Outreau ».
Quand en 2005, le procès en appel de l’affaire d’Outreau, clôt un
ahurissant processus judiciaire, Alain Marécaux est acquitté mais il a
absolument tout perdu. Le mécanisme impitoyable des procédures lui
a pris son épouse, ses enfants, son étude d'huissier et ses biens. Sa
mère est décédée durant l'affaire et il a assisté à ses obsèques, menottes
aux poignets. Durant ses 23 mois de détention préventive pendant
lesquels où il fera une grève de la faim, il perd cinquante kilos. Même
après l'acquittement, le traumatisme persiste: quelques jours après son
audition par la commission d'enquête parlementaire chargée de faire la
lumière sur les dérives qui ont conduit à un fiasco judiciaire sans précédent, Alain Marécaux fait encore
une tentative de suicide.
Le livre a servi de base au scénario. Ecrit au plus près, le film ne brode pas et ne romance pas une
histoire qui n'a pas besoin d'être transformée pour garder de son effroyable puissance. Ce n’est pas le
film de l’affaire d’Outreau, mais seulement le film d’un homme qui a vécu cet effroyable affaire de
l’intérieur, accusé puis acquitté. Le réalisateur reconstitue pas à pas toutes les stations d'un
invraisemblable chemin de croix. Les interrogatoires, l'instruction à charge, les cellules, le
déchaînement médiatique, chaque étape ajoute au labyrinthe kafkaïen. Le récit est méthodique mais
nerveux, à la manière de ces films-dossiers d'autrefois. Un temps tombés en désuétude, ils semblent
1 aujourd'hui retrouver la faveur du public, comme l'atteste le récent Omar m'a tuer, de Roschdy Zem
(L’année dernière sélection du festival du film judiciaire dans les Hauts-de-Seine).
C'est la longue chute de cet homme à travers une machinerie implacable que le long-métrage de
Vincent Garenq dépeint et c'est Philippe Torreton qui incarne la victime désignée, le comédien a perdu
lui-même 27 kilos pour se rapprocher de la détresse du modèle.
Quelques éléments pour exploiter ce film en classe
Pour voir un reportage avec l’interview d’Alain Marécaux à la sortie du film, un site : culture box de
France Télévision :
http://www.francetv.fr/culturebox/presume-coupable-lhistoire-dalain-marecaux-acquitte-doutreau63013
SYNOPSIS du film
Un matin de novembre 2001, sous la conduite d'un juge d'instruction, des policiers débarquent chez
Alain Marécaux. Pour cet huissier de justice et père de famille, c'est le début d'un effroyable
cauchemar. Il est interpellé sur dénonciation pour agressions sexuelles sur des mineurs dans le cadre
des activités d'un réseau de pédophiles sévissant dans le nord de la France et en Belgique. Marécaux
clame haut et fort son innocence. Il est condamné à la prison. Psychologiquement affecté, mais résolu à
prouver son innocence, il réclame une procédure d'appel, en vain. Il entame alors une grève de la
faim...
En filigrane : « l'affaire d'Outreau ». Tout le monde la connaît. En 2001, dans cette petite ville du Pasde-Calais, la justice croit mettre au jour un vaste réseau pédophile. Sur la foi de témoignages douteux,
elle s'emballe. Treize personnes sont accusées à tort. Elles ne seront acquittées qu'en 2005.
BANDE ANNONCE :
Des coups sur la porte, à l'aube. Des flics, partout dans la maison. Des enfants qui pleurent, arrachés au
sommeil et aux bras de leurs parents. L'image vacille, d'une silhouette à un angle de mur, comme un
regard affolé. Brutale entrée en enfer pour Alain Marécaux, père tranquille et huissier de justice,
embarqué ce matin-là, menottes aux poignets, pour viols d'enfants.
C'est moins le déroulement de « l'affaire » qui intéresse le réalisateur que les effets de l'acharnement
judiciaire sur la vie d'un homme. Les scènes de procès, très classiques, tirent un peu en longueur, alors
que le « présumé coupable » et condamné d'avance est, lui, bouleversant. Très amaigri, le regard
brûlant, Philippe Torreton se laisse posséder par la détresse de son personnage. De l'incrédulité au
désespoir, entre grève de la faim et tentatives de suicide, l'erreur judiciaire devient une maladie létale.
Un cauchemar totalitaire en pleine démocratie.
Bande annonce à voir sur Internet :
http://www.allocine.fr/video/player_gen_cmedia=19230457&cfilm=177780.html
La bande annonce choc, nous donne à voir tout le début du film, l’intrusion chez Alain Marécaux,
l’arrachement à sa famille, l’incompréhension, les questionnements de l’homme… puis l’avocat qui
explique qu’il faut tenir jusqu’aux Assises.
« Qu’est ce que c’est ? Il y a des gens… Qu’est ce que c’est ? Je ne sais pas, je vais voir…
« Police ouvrez ! Qu’est-ce qu’il se passe ?
2 « Vous êtes bien Mr Maricaux ?… « Oui c’est moi pourquoi ?
« Commissaire Duri, à partir de cet instant vous êtes en garde à vue. Nous allons procéder à une perquisition
« Qu’est-ce que c’est que cette histoire ? Vous avez une commission rogatoire ?
« Fabrice Burgaud, juge d’instruction… »
…
Qu’est ce que ça veut dire tout ça ? Qu’est ce que vous me reprochez exactement ?
« Vous et votre épouse êtes accusé de viol sur mineur de moins de 15 ans…
… (arrachement des enfants…) ponctué par des « je t’aime… je t’aime… t’inquiète pas ça va s’arranger…)
arrive alors la musique
(musique classique Mozart) Pas de musique dans le film. Klaus Badelt avait travaillé la musique avant
que l'absence de musique s'impose face à la gravité du sujet.
Subjectivité de l’image, des choix du réalisateur, l’histoire d’un homme filmé à hauteur d’homme.
Filmé à l’épaule. On colle à la réalité. On raconte une histoire vraie. Le film relate la dramaturgie de la
descente aux enfers d’un homme…
Nous sommes proche du film d’investigation, d’enquête journalistique. Vincent Garenq confie que
quand il tourne, il pense à Raymond Depardon. Il nous donne à voir un film aux frontières entre le réel,
film documentaire, tout en nous proposant une fiction. Mais une fiction sous contrôle du principal
protagoniste de l’histoire, Alain Marécaux lui-même. Du début à la fin, Alain Marécaux va être
présent. L’histoire est inspirée de son livre-témoignage, il sera présent à l’écriture du scénario, il sera
consultant sur le tournage…
On peut donner à méditer cette phrase d’Agnès Varda : « je voudrais traquer la réalité jusqu'à ce
qu'elle devienne imaginaire, reprendre l'imaginaire et me servir de la réalité, faire de la réalité,
revenir à l'imaginaire. » (Murs-murs, Real. Agnès Varda, 1980).
Vidéos à voir sur le film, interview de Vincent Garenq, réalisateur, Alain
Marécaux, et Philippe Torreton, acteur principal.
http://www.allocine.fr/personne/fichepersonne-144151/interviews/?cmedia=19246608
Des photogrammes pour comprendre
L’ambiance du film en quelques photogrammes qui relatent l’enfermement de cet homme, accusé
injustement. Outre la prison, le huit clos des tribunaux, la geôle, les barreaux, c’est aussi l’enfermement
dans une énorme injustice, dans l’incompréhension du personnage face à cette injustice, de ce qui lui
arrive, de la dureté du juge Burgaud et de la police qui méprise les pédophiles, de la tornade des
médias.
Derrière les barreaux.
Premier plan flou, la lucarne dans
l’image qui donne à voir un
homme abattu, caché, enfermé.
3 Premier plan, on devine les barreaux, dans l’interstice du plein des
casiers, une fente s’ouvre, l’homme qui marche dans le couloir portant
ses affaires contenant dans une simple bassine.
Le cadre est rempli, l’horizon est
bouché. Pas de respiration possible
du personnage.
Les barreaux au premier plan, l’espace étroit ceint de cloisons, ajoutent
encore à l’étouffement.
Etouffement encore du plan,
pas de perspective.
Un dossier en premier plan
qui bouche l’image et ajoute
à la complexité de l’affaire.
Trop de monde dans cette affaire, le
cadre de l’image n’est pas assez
grand pour contenir tous les personnages, les affirmations qui
viennent et se contre-disent.
Contre-champs, le juge Burgaud
l’œil mauvais chargé de soupçons, qui d’un regard furtif
regarde le prévenu.
Image furtive, comme volée entre les deux personnages,
Marécaux et l’avocat.
On emmène le prévenu, légère contre-plongée à hauteur d’homme.
Une image comme on pourrait la voir dans un journal télévisé, sans
esthétique particulière, caméra portée à l’épaule. Entre réel et fiction.
4 L’affaire d’Outreau, ça vous dit quelque choses ?
Ce serait certainement la première question à poser aux élèves en
classe.
Et Outreau, qu’est-ce que c’est ?
Outreau est une commune française située dans la banlieue sud de
Boulogne-sur-Mer, dans le département du Pas-de-Calais et dans la
région Nord-Pas-de-Calais.
Tous les médias de l’époque en ont parlé à partir de novembre 2001, la France entière est sous le choc.
La machine médiatique est lancée…
Ici, image de fin après l’histoire, qui reprend presque à l’identique les images télévisuelles de l’époque.
Nous sommes bien dans un film entre documentaire et fiction.
Reprendre des articles de presse… (cf références en fin d’article)
Pour comprendre l’affaire d’Outreau : une adresse de site
http://www.agoravox.fr/actualites/societe/article/comprendre-toute-l-affaire-d-57129
Historique de l’affaire Outreau :
Cette histoire aura duré plus de 4 ans, débutant le 22 février 2001 et finissant le 1er décembre 2005.
Ces 4 années auront été un véritable enfer pour les suspects, condamnés et acquittés.
Le début de l’affaire :
Les enfants de Thierry et Myriam Delay sont placés dans des familles d’accueils à partir du 25 février
2000 du fait de la demande expresse de Mme Myriam Badaoui épouse Delay dénonçant des violences
de son mari. En décembre, ces enfants parlent à leurs assistantes sociales de choses que leur aurait fait
subir un certain nombre de personnes. De bonne foi, les assistantes sociales croient les enfants, et
préviennent légitimement les services sociaux
La direction de l’enfance du Pas-de-Calais, à Boulogne-sur-Mer, fait un "signalement", en janvier
2001, au procureur de la République de la ville, Gérald Lesigne. Le parquet déclenche alors l’action
publique. L’enquête policière et, par la suite judiciaire, démarre.
Alors, en garde à vue, la mère avoue en partie les faits. Jusqu’en novembre, plusieurs dizaines de
suspects sont aussi placés en garde à vue. Les avocats ne peuvent accéder au dossier ni même être
présents lors des interrogatoires.
En 2001, le tribunal de Boulogne-sur-Mer ne compte que trois juges d’instruction , dont Fabrice
Burgaud, 30 ans, qui occupe son premier poste depuis à peine une année. L’information est ouverte le
22 février 2001. Dès lors, les mises en examen démarrent.
Le début de l’instruction :
Le juge, voulant placer les mis en cause en détention provisoire, effectue une demande au juge des
libertés et de la détention, qui en décide après des réquisitions du parquet. En théorie, la détention ne
peut être ordonnée que si elle constitue « l’unique moyen de mettre fin à un trouble exceptionnel à
l’ordre public », ce qui sera le cas pour 17 personnes. Une seule personne sera laissée libre. Une va
mourir en prison.
Les demandes de remise en liberté ont toujours été refusées.
Parallèlement aux mises en détention des parents, 24 enfants mineurs sont placés dans des familles
d’accueil. Les parents sont alors destitués de tout droit pour le temps de la procédure.
5 A partir de novembre 2001, l’affaire est médiatisée et la France entière est choquée. La machine
médiatique est lancée.
Devant le nombre important d’accusés, et le nombre d’enfants placés dans des familles, le juge
Burgaud s’oriente vers l’existence d’un réseau pédophile. Il faut parler de l’affaire Dutroux qui avait
marqué, peu de temps avant la Belgique, avec un réseau pédophile pareil.
Malgré des fouilles organisées à Outreau dans le 10 janvier 2002 dans le but de rechercher une fillette
belge qui aurait été violée puis tuée, l’instruction ne repose que sur des témoignages et des aveux après
des heures de garde à vue.
Les accusés souhaitaient être confrontés individuellement aux 4 adultes accusateurs et aux enfants. Or
dès 17 janvier 2002, deux suspects disculpent plusieurs mis en cause. Ce qui n’aura aucun effet en ce
qui concerne l’instruction. La chambre d’instruction de Douai a toujours confirmé, à de rares
exceptions près, les refus d’actes d’instruction du juge et a rejeté toutes les demandes de remises en
liberté au cours des investigations.
De nombreuses enquêtes d’expertise ont été demandées par le juge Burgaud en ce qui concerne la
crédibilité des témoignages des enfants. Elles sont psychologiques, biologiques, sociologiques.
Elles n’étaient pas toutes en accord avec le juge Burgaud.
Le renvoi devant les juridictions compétentes :
C’est pourquoi le juge Burgaud a décidé de renvoyer les intéressés devant les juridictions compétentes
au lieu de rendre une ordonnance de non lieu. L’instruction d’Outreau est close en septembre 2002. En
juillet 2003, les avocats de neuf accusés demandent, en vain, un non-lieu à la chambre de l’instruction
de Douai.
Au dessus de la chambre d’instruction de la cour d’appel, il y a encore la direction des affaires
criminelles et des grâces du ministère de la justice qui supervise dans leur détail les affaires pénales
sensibles. Ces magistrats sont soumis à leur hiérarchie. Comme ce fut le cas pour Outreau. Pourtant il
n’y a pas eu de rapports négatifs.
Dès lors, le procès devant la cour d’assises du Pas-de-Calais siège à Saint-Omer pendant neuf
semaines, à partir du 4 mai 2004. Dix-sept personnes sont accusées. Parmi elles, six seulement
comparaissent libres. Dix-sept enfants sont parties civiles.
Le 18 mai 2004, Myriam Delay innocente treize de ses co-accusés. Le dossier s’effondre. Entendu, le
juge Burgaud ne reconnaît aucune erreur. Huit accusés détenus sont remis en liberté.
Le 2 juillet 2004, la cour d’assises prononce dix condamnations et sept acquittements, après seize
heures de délibéré. Deux condamnés qui se disent innocents retournent en prison.
Comme vous le savez, la loi sur la présomption d’innocence du 15 juin 2000, entrée en vigueur en 2001
permet de faire appel devant une nouvelle cour d’assises. Devant l’exceptionnelle affaire, Paris est
choisi. Six des dix condamnés de Saint-Omer font appel.
La conclusion et l’acquittement quasi général :
Le second procès est programmé pour le 10 mai 2005, mais, quelques semaines plus tôt, un
documentaire de France 5 évoque une possible homonymie concernant l’un des accusés. La présidente
de la cour d’assises d’appel, Odile Mondineu-Hederer, renvoie le procès et ordonne un supplément
d’information. L’audience s’ouvre le 7 novembre. Myriam Delay, à la barre, disculpe les six accusés.
La cour d’assises d’appel de Paris acquitte tous les accusés le 1er décembre. L’Etat présente ses
excuses. L’affaire d’Outreau aboutit à quatre condamnations définitives et à treize acquittements. Sur
les dix-sept enfants initialement considérés comme victimes, seuls les quatre fils du couple Delay sont
finalement reconnus comme tels.
Les erreurs dans cette affaire :
6 Le rapport de la commission parlementaire de 2006 permet de dégager toutes les erreurs dans la
procédure. Devant le nombre impressionnant de pages (150 rien que pour les erreurs).
Le rôle des assistantes maternelles et l’absence de prudence sur les propos des enfants :
Interprétation par les assistantes des propos des enfants.
Le rôle des experts :
Près de 84 expertises psychiatriques et psychologiques ont été réalisées au total. Il s’est révélé que, plus
on faisait d’expertises, plus on s’éloignait de la vérité de la personnalité de tous les acteurs dans cette
affaire. De plus, il y a eu de nombreuses contradictions entre les experts psychiatriques et les experts
psychologiques, qui sont inhérents à la différenciation de ces deux matières.
De plus, de nombreuses expertises demandées par la défense ont été refusées.
Le rôle des médias :
Comme l’ont reconnu de nombreux médias, la façon de présenter les évènements a orienté l’opinion
publique. Cela a causé une forme de pression sur le juge Burgaud. D’ailleurs, certains journaux ou
chaînes de télévision (France 3 par exemple), ont créé des chartes de qualité quant au suivi de leurs
propos, images.
Il y a eu un certain manque de prudence, mais aussi de rigueur, ce qui est dommageable. Il y a eu trop
de certitudes, trop de faits présentés comme réels alors qu’il n’y avait aucune preuve.
On peut ajouter : des images sans autorisation des personnes concernées, aucun respect de la protection
de la vie privée, aucun anonymat sur les enfants présentés comme victimes.
Tout cela a forcément eu un impact sur les propos des enfants.
On peut aussi critiquer le retournement remarquable des médias dès que la conjoncture judiciaire a
changé sur cette affaire.
Ces mêmes critiques sont toujours présentes pendant l’audition du juge Burgaud devant la commission,
qui sera présentée sur France 2 (mais pas dans son intégralité) devant près de 5 millions de personnes.
La famille Delay : une famille connue pour ses problèmes :
L’enfant de 10 ans avait déjà fait l’objet d’une mesure de placement le 30 juin 1995 et se trouvait
depuis 1998 en famille d’accueil. Les trois autres enfants étaient pris en charge par les services
sociaux.
Ils vivaient dans un contexte pénal, économique et social défavorable, marqué par de nombreuses
affaires pénales en matières sexuelles. Cela a pu influencer le juge.
De même, c’est la mère de famille qui a été le principal instigateur de cette affaire. En effet, c’est elle
qui a dénoncé de nombreuses personnes. C’est sur ses propos que toute l’affaire a tenu pendant des
années. Elle s’est révélée mythomane, voire perverse qui, par vengeance et par intérêt, a pensé qu’elle
et ses complices atténueraient leurs responsabilités en impliquant un maximum de tiers dans la
procédure.
Le cas Burgaud :
Le juge Burgaud était désigné dans cette affaire alors qu’il n’avait qu’une faible expérience. Il a été
catapulté sur ce dossier très lourd et très difficile.
« Une chaine de responsabilité » :
Le juge Burgaud a fait des erreurs mais il n’est pas le seul. La chambre d’instruction et la cour d’appel
de Douai, supposées exercer un contrôle sur l’action du magistrat instructeur, se sont en réalité limitées
à un examen purement formel du dossier. Ils se sont peu préoccupés du fond de la procédure, tout en
ignorant de façon systématique les nombreuses demandes faites par la défense, permettant ainsi au
magistrat instructeur d’agir en dehors de tout contrôle.
Irrespect des droits de la défense :
La demande de la défense qui sollicitait le droit, pour chacun des accusés, d’être confronté non pas
collectivement mais individuellement à chacun de ses accusateurs, n’a jamais obtenu de réponse
favorable.
7 La détention préventive a été utilisée comme moyen de pression sur les mis en examen.
La présomption d’innocence n’était pas présente tout au long de la procédure.
L’un des prévenus est même mort d’une overdose de sédatifs et d’autres médicaments qui lui étaient
administrés en prison pour qu’il « se tienne tranquille ».
Karine Duchochois : "Pendant ma garde à vue, j’ai pris deux gifles par un inspecteur"
Thierry Dausque : "J’ai été un an et demi sans avocat, ils étaient désignés d’office mais pas prévenus
de mes interrogatoires" (...) "
Odile Marécaux : "Vous avez compris comment on est entrés dans la machine à broyer, on en est tous
sortis très difficilement". Alors qu’elle était assise par terre pendant sa garde à vue : « Un inspecteur
m’a dit : ’c’est pas assez bas, vous êtes une sale pédophile’ »
Les remises en question de la Justice après l’affaire d’Outreau :
La commission parlementaire Outreau, en 2006, a effectué de nombreuses propositions :
- réforme du régime de garde à vue : par l’autorisation d’accès pour l’avocat au dossier, enregistrer les
interrogatoires par exemple.
- plus de contradictions dans les enquêtes du parquet : accès au dossier facilité, reconnaitre à l’avocat
le droit de présenter des observations par exemple.
- limitation de la détention provisoire : limite de la durée maximale de la détention provisoire, un plus
grand encadrement légal de cette détention :
- Collégialité de l’instruction : mettre un âge minimum pour les magistrats sur les affaires de viols,
nouvelle organisation de l’instruction
- Mieux protéger l’intérêt des enfants : Décloissonement des services sociaux, Favoriser les
concertations entre les différents acteurs, redéfinir les condition de recueil des déclarations des enfants.
- Plus grande responsabilisation : des médias, des magistrats avec un plus grand suivi de la carrière...
Sur le site on peut trouver :
Les véritables évolutions après cette affaire ?
Les propositions du chef de l’Etat.
Le juge Burgaud devant le conseil supérieur de la magistrature
UN ARTICLE A LA SORTIE DU FILM
"Présumé coupable" : quand le cinéma s'empare de l'affaire d'Outreau
Article du Monde de Thomas Sotinel: Lemonde.fr
http://www.lemonde.fr/cinema/article/2011/09/06/presume-coupable-quand-le-cinema-s-empare-de-laffaire-d-outreau_1568391_3476.html
La violence des émotions et des sensations que suscite Présumé coupable est telle que l'on n'est pas sûr
de pouvoir recommander le film sans réserve. Tout le monde n'a pas envie de partager le sort d'une
victime pendant cent minutes, même si ce laps de temps n'est qu'une minuscule fraction du temps - cinq
années, de son arrestation à son acquittement - qu'a duré l'injustice faite à Alain Marécaux, huissier à
Outreau.
Cette immersion brutale dans la souffrance et la peur a pourtant un but pédagogique - rappeler quelques
principes du droit, et donc de la vie en société, au premier rang desquels la présomption d'innocence.
Les moyens qu'emploie le réalisateur Vincent Garenq pour administrer cette notion sont énergiques. Ils
sont aussi rigoureux et relèvent d'un usage judicieux du langage cinématographique.
8 On a à peine eu le temps de faire la connaissance d'Alain Marécaux (Philippe Torreton), de son métier
(dont les aspects les moins populaires sont traités avec beaucoup de discrétion), que le jeune notable est
tiré de son lit par les aboiements de son chien, au petit matin. Dès cet instant, sa vie devient un enfer.
Isolé des siens, il est traité comme s'il était pédophile - chacune de ses paroles est reçue avec un
scepticisme méprisant, puisque les policiers et le magistrat qui l'interrogent sont d'ores et déjà
convaincus de sa culpabilité.
Vincent Garenq, auteur en 2008 d'une comédie sentimentale décalée, Comme les autres, puise ici dans
un arsenal de gros calibres. Les situations, les figures de la fiction policière (particulièrement ces séries
"procédurales" qui mettent en scène les exploits des enquêteurs, scientifiques ou pas) sont retournées
comme des gants. La foi des policiers dans les révélations que livreront une fibre de moquette et un
cheveu se heurte à la vérité que nous connaissons : Alain Marécaux est innocent.
Contrairement à ce qui se passait dans le récent Omar m'a tuer, le film ne s'éloigne jamais de son
personnage. Chaque étape de l'instruction, des procès, devant la cour d'assises puis en appel est vue à
travers les yeux d'Alain Marécaux. La tragédie dépasse son seul cas, d'autres innocents ont été accusés,
incarcérés, l'un d'eux s'est donné la mort en prison (ce que l'huissier a également tenté de faire, on le
voit dans le film) mais elle est sans doute plus immédiatement perceptible pour un étranger à l'affaire
s'il la vit par le truchement d'un seul homme.
Surtout s'il est incarné par Philippe Torreton. On fait grand cas des variations du poids de l'acteur au fil
des tribulations de son modèle. Parce qu'il ne s'agit pas tout à fait d'un personnage, rien de ce qui est
montré à l'écran n'est imaginé, chaque incident - de grève de la faim en dépression - a été relaté par
Alain Marécaux dans le livre de souvenirs qu'il a publié, Chronique de mon erreur judiciaire
(Flammarion, 2005).
On peut être tout aussi saisi par la force de ces moments, au début du film, pendant lesquels un homme
dans la force de l'âge, en bonne santé, prospère, perd en quelques heures son identité, ses repères.
Torreton tient systématiquement le cap de la banalité, de la fragilité. Toute son énergie, toute sa force,
le prisonnier les consacre à clamer son innocence. Cette débauche d'énergie le laisse vulnérable face à
tout le reste - la famille qui se défait, les collègues qui se détournent, les humiliations quotidiennes de
la vie en prison.
Ce parti pris confronte le metteur en scène à des difficultés qu'il ne surmonte qu'en partie. Le couple
Marécaux, qu'on a découvert harmonieux, se sépare dans une atmosphère délétère, sans que l'on sache
ce qui a suscité la défection puis l'hostilité de l'épouse, incarnée par Noémie Lvovsky. Mais cette
incompréhension est sans doute celle de l'auteur du récit que l'on voit, dans son incarnation
cinématographique, sans cesse renvoyé à sa solitude.
Il se trouve que la machine folle qui a emporté Alain Marécaux a un visage, qui est devenu familier aux
Français lors des auditions de la commission parlementaire en 2006. Le jeune acteur Raphaël Ferret ne
trouve aucune circonstance atténuante au juge d'instruction Fabrice Burgaud. Il en fait un débutant
présomptueux, qui voudrait faire passer son indifférence (à la souffrance des autres, aux aspérités de la
vérité qui grippent son raisonnement) pour de la force d'âme. Pour une fois, c'est la réalité qui vérifie le
dicton d'Alfred Hitchcock : "Meilleur le méchant, meilleur le film".
Le cinéma du réel est, certes, un art que pratique de plus en plus le cinéma français (de Omar m'a tuer à
L'ordre et la morale en passant par L'assaut) mais il n'en demeure pas moins un exercice difficile. Et
dangereux. On ne pourra donc que tirer notre chapeau à Vincent Garenq pour ce film brut, sec et
choquant sur l'affaire Outreau, mais surtout sur le destin effroyable d'Alain Marécaux, huissier
injustement accusé de pédophilie. Loin de Comme les autres, vision plutôt gentillette de
l'homoparentalité, le réalisateur révèle, dans son second film, une hargne hallucinante pour dépeindre
minutieusement et implacablement la descente aux enfers d'un homme lentement broyé par un petit
juge buté, par la machine judiciaire et par la rumeur publique. Adaptant le livre éponyme d'Alain
9 Marécaux (dont on vous conseille la lecture), il fait de Présumé coupable un film (presque) sans effets,
(presque) sans musique, au plus près des visages et des corps. Édifiant, parfois insoutenable, toujours
révoltant, le film glace le sang. Et la performance de Philippe Torreton, assourdissante, porte ce film
témoignage encore plus haut, sûrement en tout cas jusqu'au prochain César du meilleur acteur. Présumé
coupable est une belle réussite de cinéma. Mais cela n'est rien en regard de son propos. Voilà un film
essentiel sur une vie broyée. Pour, surtout, ne jamais oublier.
Différents articles sur l’Affaire d’Outreau :
Le Monde :
Johannes Franck, « Dix-sept mis en examen dans l’enquête
sur un réseau franco-belge », 13 janvier 2002
Garcia Alexandre, « Au terme de dix-huit mois d’enquête
sur le réseau pédophile d’Outreau, des zones d’ombre
subsistent », 18 août 2002
Pereira Acacio, « La tranquille galerie de portraits des
accusés d’Outreau », 9 mai 2004
Pereira Acacio, « Au procès des pédophiles d’Outreau, la
révolte des accusés mis en cause par Myriam Delay », 16
mai 2004
Pereira Acacio, « Le juge d’instruction de l’affaire
d’Outreau ne reconnaît pas une erreur », 10 juin 2004
Pereira Acacio, « Les sept acquittés, entre douleur et colère », 1er décembre 2005
Galinier Pascal, Pereira Acacio, « Outreau, de la tempête médiatique, au naufrage judiciaire », 4
décembre 2005
« Devant la commission d’enquête les acquittés d’Outreau accusent le juge Burgaud », 18 janvier 2006
Robert-Diard Pascale, « Le juge Burgaud a donné l’image d’une justice aveugle », 10 février 2006
Libération :
Saberan Haydée, « Pédophilie : le quartier de l’orreur à Outreau », 11 janvier 2002
Saberan Haydée, « Outreau : un suspect revient sur ses aveux », 19 avril 2002
Coignard Jacqueline, « Dix-sept adultes face aux horreurs de la tour du Renard à Outreau », 12 août
2003
Aubenas Florence, « Deux accusatrices, dix-sept accusés et combien d’innocents ? », 13 mai 2004
Aubenas Florence, « Les certitudes d’un juge à la barre » 10 juin 2004
Aubenas Florence, « A la loterie judiciaire, dix condamnations requises », 25 juin 2004
Aubenas Florence, « Outreau, autopsie d’un gâchis », 2 décembre 2005
Aubenas Florence, « Après la curée », 7 décembre 2005
Aubenas Florence, « Les mots pour dire Outreau » 19 janvier 2006
Aubenas Florence, « Il est 16H45, le juge très pâle s’explique », 9 février 2006
Les Sites Internet sur l’Affaire d’Outreau :
Rapport de la commission d’enquête parlementaire chargée de rechercher les causes
des dysfonctionnements de la justice dans l’affaire dites d’Outreau et de formuler des
propositions pour éviter leur renouvellement :
http://www.assemblee-nationale.fr/12/rap-enq/r3125-t1.asp
-CARA Thibault, « « Affaire d’Outreau » : après le « délire » médiatique, l’amnésie
10 collective », ACRIMED, mis en ligne le 14 décembre 2005,
http://www.acrimed.org/article2221.html
-CARA Thibault, « « Affaire d’Outreau » : aveux involontaires et trous de mémoire
journalistique », ACRIMED, mis en ligne le 30 janvier 2006,
http://www.acrimed.org/article2259.html
-« La presse et Outreau (2001-2006) », Le Tigre, mis en ligne le 8 décembre 2006
http://www.le-tigre.net/La-presse-et-Outreau-2001-2006.html
Des articles :
-BALBASTRE Gilles, « Les faits divers ou le tribunal implacable des médias », Le
Monde diplomatique, décembre 2004
-JACQUIN Pierre, NGUYEN Frédéric, « L’information victime des rapports entre justice
et médias », Médias Pouvoirs, n°22, avril-mai-juin 1991
-LITS Marc, L’affaire Dutroux : la création médiatique d’un monstre, Pré-actes du
colloque Le fait divers dans tous ses états, Lyon, 23 et 24 mars 2006
-OUEST-FRANCE, Lettre à la rédaction, n°33, 16 mars 1993
-ROSSET Clément, « La proximité du réel », Traverses n°25, juin 1982
Des ouvrages pour parler du lien journalisme / justice :
-AUBENAS Florence, La méprise. L’affaire d’Outreau, Seuil, Paris, 2005
-BARRET Anne-Laure, TRAPIER Patrice, Innocents. Le calvaire des accusés
d’Outreau, Calmann-Lévy, Paris, 2006
-SCHNEIDERMANN Daniel, Le cauchemar médiatique, Denoël, Paris, 2004
-BOLTANSKI Luc, La souffrance à distance, Métailier, Paris, 1993
-CHARON Jean-Marie, FURET Claude, Un secret si bien violé. La loi, le juge et le
journaliste, Seuil, Paris, 2000
-FOUCAULT Michel, Surveiller et punir. Naissance de la prison, Gallimard, Paris, 1975
-LEVER Maurice, Canards sanglants. Naissance du fait-divers, Fayard, Paris, 1993
Pour en savoir plus sur les secrets de tournages :
http://www.allocine.fr/film/fichefilm-177780/secrets-tournage/
Le film remporte le Valois du public lors du quatrième Festival du film francophone d'Angoulême en 2011, Philippe Torreton reçoit le Valois du meilleur acteur Le film remporte le prix du Meilleur film européen lors de la 68e Mostra de Venise4. Le film est nommé pour le César du meilleur acteur et pour le César de la meilleure adaptation en 2012. Aide pédagogique aux enseignants participant au Festival du film judiciaire dans les Hauts-de-Seine
Dominique Pince-Salem, conseillère pédagogique arts visuels
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