2. Paix impossible, guerre improbable

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2. Paix impossible, guerre improbable
2. Paix impossible, guerre improbable (Raymond Aron) : l'affrontement bipolaire de 1947 à 1962.
En introduction,
quelques réflexions sur la signification des coupures chronologiques choisies pour construire les
chapitres d’histoire (pourquoi 47 ? et 62 ?);
une question : l’affrontement appelé guerre froide est-il le fruit de volontés malignes ou simplement la conséquence inéluctable d’un état de fait ?
Première partie, sur le blocage progressif de la relation entre les deux grands, au cœur de
la guerre froide.
1. L’entrée en guerre froide
- repose sur les conditions inégales de sortie de la guerre des deux Grands, en particulier la
question atomique ;
- sur une mésentente dans l’application des résolutions des conférences de Yalta et de
Potsdam à propos de la « libération » et de la reconstruction de l’Europe ;
- et sur le profond affaiblissement du Royaume Uni qui force les Américains à prendre son
relais.
et se concrétise en 1947
- par la doctrine Truman qui formalise la coupure du monde en « deux modes de vie opposés » et la définition d’un conflit sans recours à la guerre ouverte (containment);
- et le Plan Marshall qui applique à l’Europe ruinée cette politique qui veut que la prospérité économique soit le substrat de la liberté ;
- auxquels les Soviétiques répondent par la doctrine Jdanov qui insiste sur l’anti-impérialisme et l’antifascisme de l’URSS et annonce la création du Kominform, nouveau Komintern.
Dans ces textes et décisions se trouve l’embryon de tout le conflit à venir.
2. L’opposition fondamentale de deux systèmes.
explique et les modalités de cette entrée en guerre et les formes nouvelles que va prendre ce conflit.
Un jeu de mots tragique :
- démocratie, « libérale » ou « populaire » ? sens des mots « liberté » et « totalitarisme » ;
- séparation des pouvoirs et bipartisme contre dictature du prolétariat et parti unique ;
- libertés formelles (bourgeoises) ou réelles (égalitaires) ? (liberté religieuse et athéisme
d’Etat ; liberté de la presse et oppression des intellectuels, « Jdanovisme ») ;
- culte de la personnalité, nouveau fascisme ou expression excessive de la personnalisation
du pouvoir qui touche aussi l'Ouest assoiffé de pouvoir charismatique ?
La preuve recherchée par la réussite économique :
- stalinisme industriel et planification quinquennale : rattraper le retard sur les EU et leur
capitalisme libéral par un capitalisme d’Etat (« Kombinat », sovkhozes…) ;
- modifier la nature, conquérir l’espace (spoutnik, 1957), caractère prométhéen des deux
systèmes (politique des terres vierges au Kazakhstan), importance de la recherche scientifique (« Lyssenkisme », négation idéologique du darwinisme scientifique) ;
-
les ratées du système économique dirigiste côté soviétique et l’impossibilité de sa réforme
(cf. Khrouchtchev, Brejnev) ; l'inefficacité du welfare state aux EU pour faire disparaître la
pauvreté (voir la "Grande Société" de Johnson) ;
Le bonheur social :
- fascination pour l’American Way of Life; consumérisme des classes moyennes ; individualisme et esprit d’entreprise ;
- égalitarisme prolétarien (gratuité des services sociaux, absence de chômage etc.), stakhanovisme, création de l'"homo sovieticus" détaché de toute attache nationale ;
- les privilégiés et les exclus du rêve : xénophobie et racisme ouverts aux EU ; chômage et
pauvreté ; pouvoir de la « nomenklatura »soviétique.
Tout ceci explique pourquoi la principale arme des Soviétiques dans cette guerre froide est la
propagande, quand c’est le dollar pour les Américains.
3. Des modèles « proposés » au reste du monde :
parler de modèles entraîne que ces systèmes sont destinés à être exportés de gré ou de force au
reste du monde.
La stalinisation de l’Est de l’Europe :
- dans chaque pays élimination des communistes nationaux au profit des moscovites (« tactique du salami »), culte de la personnalité autour de Staline locaux ;
- planification et industries lourdes imposées à toutes les économies, même les plus arriérées ; CAEM, 1949 ;
- lutte contre Eglises et paysanneries, problème en Pologne.
L’anticommunisme, ciment de l’Ouest :
- maccarthysme (1947-1953), exécution des Rosenberg (1953) entraîne véritable psychose imposée à l'ensemble de l'Ouest : espionnite aigu en particulier en GB ; censure politique alourdie, comme en Italie où Démocratie Chrétienne réussit à stopper le grand cinéma néo-réaliste né après la guerre sur des thématiques sociales dénonciatrices et aligne
Cinecitta sur le modèle du divertissement hollywoodien ;
- définition des partis communistes comme partis de l’étranger : départ des ministres communistes des gouvernements ; création de syndicats sur les fonds de la CIA (FO en
France) ; arrêt des politiques de dénazification et démilitarisation en Allemagne ;
- du $ comme arme anticommuniste : accords Blum-Byrnes, mai 1946 ; création de
l’OECE (1948) pour l’application du Plan Marshall ;
L’impossible neutralisme :
- Europe sommée de choisir son camp : à l’est, Staline impose refus du plan Marshall à la
Tchécoslovaquie ; mise au pas des voies particulières vers le socialisme, mais échec à lutter contre le "schisme titiste" (1948), Tchécoslovaquie devient chef de file des non alignés
;
- à l’ouest, création d’une union européenne sous la protection américaine (CECA en 1951,
CED en 1952-4, CEE en 1957) ; mais pouvoir de fascination de l’URSS sur les milieux
intellectuels occidentaux empêche les débordements de l'hystérie anticommuniste qui
frappe les EU ;
La guerre froide se transforme ainsi en un enjeu de politique intérieure dans tous les Etats à
l'intérieur de chaque bloc.
Deuxième partie, sur le flirt avec une troisième guerre mondiale, chacun des deux
Grands cherchant à pousser ses avantages sans provoquer de réactions trop vives de
l’autre camp (1947-1962).
1. Crises et points de fixation du conflit en Europe,
qui reste, bien malgré elle, au centre du conflit.
- coup de Prague en février 1948 qui est la prise de pouvoir « pacifique » des communistes
dans un pays encore libre en apparence provoque la panique à l’Ouest : d’où la création
de l’UEO, alliance militaire mais sans la participation américaine ;
- juin 1948, à la suite de la création du mark ouest-allemand, première crise de Berlin, son
blocus, échec soviétique, consacre la définitive coupure de l’Europe en deux par la création de deux Allemagne antagonistes (8 mai 49) ; doc. 1 et 2 p. 102 et doc. 1 p. 259.
- coups de force communiste en plus de l’éclatement de la première bombe atomique soviétique poussent les Européens à réclamer la protection américaine, création de l’OTAN
en avril 49, cette fois avec la protection américaine (problème de l’automaticité de
l’alliance ; amendement Vandenberg), qui, à son tour, entraîne celle du pacte de Varsovie
(1955).
2. Extension de la guerre froide à l’Asie,
quand la situation est complètement figée en Europe.
- octobre 49, Mao Zedong a pris Pékin pendant que les Américains protègent Tchang Kaï
Chek à Taïwan : un pays communiste de plus, mais soviétique ?
- guerre de Corée (50-53) erreur stratégique mutuelle des deux Grands ; amène le développement de la « pactomanie » américaine et l’appui sans faille au « miracle » japonais ;
- transformation de la guerre coloniale d’Indochine française (47-54) en guerre anticommuniste à partir de 1950 avec le soutien des Américains.
3. Débuts hésitants de la détente après la mort de Staline :
La mort de Staline en 53
- entraîne une progressive déstalinisation du régime sous son successeur, Khrouchtchev,
qui culmine avec les deux rapports qu’il lit au XXème Congrès du PCUS ;
- dégel libère alors les forces centrifuges en Pologne et surtout en Hongrie en 56, ce qui
provoque une sévère répression ;
- mais aussi dans les anciennes colonies européennes : naissance du Tiers Monde à la conférence de Bandoung en 55 ; fiasco franco-britannique à Suez en 56 ;
- et enfin en Asie, émancipation des communistes chinois envers leur « Grand frère » (épisode du « Grand bond en avant » en 58).
Deux dernières crises montrent que les relations entre les deux Grands ne sont toujours
pas normalisées : le mur de Berlin en 61 et la crise de Cuba en 62 qui signent la déchéance de
Khrouctchev. La gravité de cette dernière crise convainc Américains et Soviétiques de se lancer
sérieusement dans la détente.

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