Grossesse arrêtée - Centre Pluridisciplinaire de Diagnostic Prénatal

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Grossesse arrêtée - Centre Pluridisciplinaire de Diagnostic Prénatal
CHU MARTINIQUE – MFME Service Gynécologie Obstétrique Rédacteur : B. SCHAUB – JL VOLUMENIE TRAITEMENT DES FAUSSES COUCHES Vérificateurs : A. MONTHIEUX -­‐ C. BONNIER – J.L. VOLUMENIE -­‐ Ref : Recommandations pour la pratique clinique CNGOF 2014 Créé le : 30/07/2013 Version du : 16 janvier 2015 Approbateurs : B. SCHAUB Les fausses couches sont un motif fréquent de consultations aux urgences. Le diagnostic de fausse couches ou grossesse arrêtée n'est pas une urgence et au moindre doute sur l'évolutivité de la grossesse un contrôle échographique à une semaine voire 10-­‐12 jours (œufs clairs) doit être envisagé. Les « menaces » de fausse couche (douleurs, saignements) ne nécessitent aucun traitement dans le but « d’éviter » la fausse couche. Sont en particulier inutiles : • Le repos, voire l’arrêt de travail • La supplémentation en vitamines (acide folique…) • La progestérone • Y compris en cas d’antécédent de fausse couche précoce 1. Définitions et critères diagnostiques. 1.1 Diagnostic échographique : L’échographie pelvienne endovaginale est recommandée en cas de douleurs ou de saignements en début de grossesse. La mesure du sac gestationnel doit se faire en ne prenant en compte que la zone anéchogène (calipers placés en dedans de la couronne trophoblastique présumée). La valeur retenue de taille du sac gestationnel est la moyenne de 3 mesures : deux mesures effectuées en coupe sagittale et une mesure effectuée en coupe transversale. L’existence d’une image de vésicule vitelline à l’intérieur d’un sac gestationnel signe la GIU, même sans embryon visible. L’évolutivité est incertaine si le sac mesure moins de 25 mm ou l’embryon moins de 7 mm sans activité cardiaque. Par prudence, le seuil d’incertitude est fixée à la Maison de la Femme, de la Mère et de l'Enfant à 10 mm (équivalent de 7 SA). 1.2. Les grossesses arrêtées. Patiente pauci symptomatique (venant souvent consulter après une échographie ou pour spotting). Col fermé. Le risque d’erreur dépendant de la taille échographique de l’embryon, par sécurité, on affirmera le diagnostic de grossesse arrêtée que si l'embryon est : • > 10 mm sans activité cardiaque. •
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≤ 10 mm sans activité cardiaque avec l’absence d’évolution sur 7 jours. Présence d’un sac gestationnel > 25 mm sans embryon (œuf clair) 1.3. Les œufs clairs. Patiente pauci symptomatique venant souvent consulter après une échographie. Col fermé. Sac gestationnel intra utérin sans embryon > 25 mm, vérifié par un senior. Si le sac gestationnel mesure moins de 25 mm, faire un contrôle échographique à dix jours. Se méfier des pseudo sacs dans le cadre d'une GEU 1.4. Les fausses couches en cours. Douleurs pelviennes spontanées, métrorragies ± expulsion trans-­‐cervicale de débris trophoblastiques ± instabilité hémodynamique (y compris malaises vagaux). Col ouvert ± produit d’expulsion en intra cervical. Echographie : rétention trophoblastique 1.5. Les rétentions. Patientes pauci symptomatique. Col fermé. Echographie : débris trophoblastiques avec un diamètre antéropostérieur des débris > 15 mm mesurée sur une coupe sagittale. En l’absence de certitude sur le siège intra-­‐utérin de la grossesse (couronne trophoblastique, vésicule vitelline ± embryon), on confirmera le diagnostic par la cinétique des hCG (deux dosages à 48 heures d’intervalle dans le même laboratoire) puis on surveillera son évolution après traitement par un dosage par semaine jusqu’à diminution. 2. Modalités thérapeutiques. Si la grossesse intra utérine est confirmée ainsi que son caractère arrêtée 3 solutions. Sauf indication médicale le choix de la patiente joue un rôle fondamental. 2.1. L'expectative : Elle est applicable sur les patientes stables, elle conduit à l’expulsion de la grossesse dans 50 à 76 % des cas le plus souvent entre J3 et J5. Elle semble, en revanche, moins efficace en cas de grossesse arrêtée strictement asymptomatique et d'œuf clair (16 à 18 % d’expulsion spontanée) que dans les cas symptomatiques. Elle est pour cette raison déconseillée en cas de grossesse arrêtée asymptomatique. Elle doit être réservée aux fausses-­‐couches incomplètes, en alternative de l’aspiration. Informer la patiente des avantages et inconvénients : pas de geste chirurgical possiblement iatrogène mais que 50 % d'efficacité Prévenir du risque de douleurs ou de saignement importants qui devront motiver un nouvel avis gynécologique. Prescrire des antalgiques (conférer infra) Un contrôle échographique sera systématiquement prescrit après 5 à 7 jours 2.2. Le traitement médical : Repose sur l’utilisation du misoprostol, Cytotec® dosé à 200 μg Deux comprimés de Cytotec® soit 400 μg par voie vaginale, répétés 12 heures après, soit 800 microgramme en tout. Les comprimés de Cytotec® ne doivent pas être prescrits sur une ordonnance car certaines pharmacies refusent de délivrer ce médicament aux femmes enceintes, mais pris dans la pharmacie du bloc obstétrical et donnés en main propre à la patiente en expliquant la posologie. L’efficacité est de 83 % dans la plus part des publications (prévenir les patientes du risque d’échec, de douleur, de saignement). Contre indication : -­‐ La fausse couche en cours avec col ouvert et produits d’expulsion dans le col dans laquelle il s’est avéré inefficace (13 % à 12 heures) et délétère (perte d’hémoglobine). -­‐ L’asthme sévère. -­‐ Les maladies inflammatoires coliques. Effets secondaires spécifiques : l’hyperthermie, les frissons, les vomissements et nausées et les diarrhées. Prescrire des antalgiques (conférer infra) Le traitement médical expose à des saignements plus longs, davantage de douleurs et davantage de risques d’hospitalisation en urgence que le traitement chirurgical. Les complications sont < 5%. Un contrôle échographique sera systématiquement prescrit après 7 jours et une aspiration programmée passé ce délai en cas d’échec. 2.3. L’aspiration : Les indications de l’aspiration endo-­‐utérine sont : -­‐ les grossesses volumineuses (sac gestationnel d’un diamètre > 50 mm ou embryon ≥ 25 mm). -­‐ la fausse couche en cours hémorragique et/ou hyperalgique (ENS > 4). -­‐ la suspicion de môle hydatiforme. -­‐ la fausse couche à répétition (obtenir du trophoblaste stérile pour caryotype). -­‐ les échecs de traitement médical. Les avantages sont l'efficacité à 95 à 98 %. Les inconvénients sont les risques anesthésiques, l'hémorragie et l'infection (4 à 6 %), les synéchies, les plaies cervicales et les perforations. Réduire le taux d'aspiration conduit dans toutes les études à augmenter la satisfaction des patientes (malgré les douleurs et métrorragies des autres techniques) à la condition de respecter la préférence des femmes. De plus réduire les taux d'aspiration réduit les coûts et allège le travail des équipes. Sauf urgence médicale il convient de privilégier la prise en charge programmée dans les jours à venir en HDJ gynécologique; Aux heures ouvrables de l'HDJ : → Contacter l'anesthésiste de garde (dect 2944) pour effectuer la consultation d'anesthésie → Prescrire le bilan opératoire à faire en ville : Groupe Rhésus, RAI, NFS, Plaquettes, TP, TCK, Fibrinogène → Mener la patiente en HDJ gynécologique et programmer son aspiration dans les jours à venir (pas d'urgence) en fonction des disponibilités et prévenir le bloc opératoire. → La préparation cervicale doit être systématique par deux comprimés de Cytotec ® intra vaginal donnés au moins trois heures avant l’intervention. Aux heures non ouvrables demandez à la patiente de revenir aux urgences dès l'ouverture de l'HDJ et respecter la même procédure. 3. Stratégie thérapeutique Les alternatives non chirurgicales ne sont envisageables que si le contenu endo utérin (sac gestationnel) mesure moins de 50 mm ou si l'embryon est < 25 mm (9 SA). Cette limite, seuil de sécurité, garantit un taux d’échec, de fausse couche hyper algique ou hémorragique acceptable. Les alternatives non chirurgicales ne sont également envisageables que sur des patientes stables et pauci symptomatiques Les complications de ces traitements sont l’échec, la fausse couche hémorragique ou hyper algique et l’infection. Les données sont insuffisantes pour conclure à la supériorité d’une technique par rapport à une autre (absence de méta analyse). On peut néanmoins proposer : • Devant une grossesse arrêtée ou un œuf clair, soit l’aspiration, soit le traitement par misoprostol mais pas l’expectative • Devant une fausse couche incomplète (rétention après fausse couche), soit l’aspiration, soit l’expectative mais pas le misoprostol Leurs effets secondaires sont rares et de natures différentes : • les alternatives non chirurgicales entrainent moins de saignements, d’infections et plus de satisfaction de la patiente, même en cas d’échec (effet bénéfique du misoprostol sur le col pour l’aspiration prochaine). • mais plus de douleurs, de jours de convalescence et de durée de saignement. Du respect du choix de la patiente dépendra son équilibre psychique et le degré de sa satisfaction. L’explication sur les différentes alternatives sera objective et la patiente devra être guidée et non conduite. Il faut toujours conseiller une expectative de 5 à 7 jours. En pratique, une expectative de 5 à 7 jours à partir de l’évocation du diagnostique permettra la confirmation de la fausse couche dans les cas ou celle-­‐ci ne peut être affirmée d’emblée. Parfois elle permettra d’obtenir l’expulsion spontanée (> 50 % des cas). En cas de certitude diagnostique d’emblée, ce délai devra être modulé en fonction du souhait de la patiente et du délai écoulé depuis le début de la prise en charge. En cas d’échec de l’expectative, la proposition thérapeutique dépendra des éléments médicaux du dossier et du traitement souhaité par la patiente (principe de préférence) et de l’appréciation du médecin (interne ou senior) : aspiration ou traitement médical 4. Quelques précisions : 4.1. Antalgie : • prévenir la patiente et lui donner des explications • en externe : Spifen 400 (X 3 par jour au cours des repas) Lamaline ® (Trois à cinq gélules par jour ou un à trois suppositoires par jour) Ibuprofène ® 400 mg (X 3 par jour), Profénid ® 100 mg (X 2 par jour) • en hospitalisation : Perfalgan ® : quatre gramme par jour en parentéral. En externe le protocole type ci dessous peut être proposé : • lors de la prise des 2 premiers comprimés de Cytotec ® prendre 1 comprimé de Spifen 400 ® • si persistance des douleurs prendre 2 heures après un suppositoire ou 2 gélules de Lamaline ® • lors de la 2ème prise de Cytotec ® reprendre le même schéma • ATTENTION : contre indique la conduite 4.2; Les anti D : Pour toute fausse couche, en cas de Rhésus négatif, la règle est de faire des anti-­‐D (consentement éclairé et formulaire signé) après prélèvement des RAI : Rophylac 200 UI une dose intraveineuse. Cependant, aucune iso immunisation rhésus n’a été rapportée après une fausse couche précoce. Les études fondamentales montrent que l’apparition du facteur rhésus et la quantité de sang nécessaire à iso immunisation n’apparaissent qu’à 7 SA ½. L’abstention pourra être donc être envisagée en cas d’œuf clair, de LCC < 10 mm. L’incertitude sur l’âge gestationnel devra toujours conduire à une immunoprophylaxie ®
4.3. L’arrêt de travail : En règle, deux jours à cinq jours selon le contexte. 4.4. L’antibiothérapie : Son bénéfice est montré dans la prévention des infections post IVG chirurgicales mais pas dans les aspirations post fausses couches où le seul essai l’ayant testée s’est avéré insuffisamment puissant pour prouver son bénéfice. 4.5. L'anatomo pathologie : L'envoi du produit d'expulsion ou d'aspiration en anatomo pathologie n'est utile qu'en cas de suspicion de mole ou de doute sur une GEU 5. Que dire à la patiente : Ne pas dramatiser, ne pas banaliser En procréation médicalement assistée, on estime que : • 15 % des ovocytes fécondés ne s’implanteront pas, • 20 à 25 % des grossesses s’arrêteront avant d’être cliniquement décelable, 12 à 19 % des grossesses conduiront à une fausse couche précoce. Dans ce dernier cas, on trouvera des anomalies chromosomiques graves dans plus de la moitié des cas, le reste se partageant entre anomalies de développement, maladies systémiques (anti phospholipides, thrombophilie) et anomalies utérines. Une femme sur quatre fera une fausse couche au cours de sa vie. Les métrorragies du premier trimestre concernent 21 % des grossesses dont la moitié conduiront à une fausse couche. Il est recommandé à une patiente qui souhaite une nouvelle grossesse après fausse couche de ne pas attendre avant de tenter celle-­‐ci. Références : Protocoles cliniques en obstétrique – Abrégés de Périnatalité – D. Cabrol et F. Goffinet – Ed MASSON 2009 Protocoles en gynécologie obstétrique – CNGOF – Ed MASSON 2007 Guide des protocoles en gynécologie obstétrique – Centre Hospitalier Intercommunal de Poissy Saint Germain en Laye – Mai 2013 Etat des lieux et expertise de l'usage hors AMM du misoprostol en gynécologie obstétrique -­‐ CNGOF Décembre 2013 Recommandations pour la pratique clinique – les pertes de grossesse – CNGOF décembre 2014 •