Le point sur

Transcription

Le point sur
Le point sur
A LLE R P LUS LOIN DA NS V OT RE A CT UA LIT É LOGIS T IQUE T RA NS P ORT
LOGISTIQUE TRANSPORT
Septembre 2011
Mémo Pratique
Litiges sur le prix, retard, dégâts ou
pertes de marchandises…
Comment réagir face aux problèmes
de livraisons ?
Contact :
Bérengère LEENHARDT
Tel : 01 44 55 35 08
[email protected]
SOMMAIRE
Fiche 1 : Litiges sur le prix du transport
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Facture à régler dans les 30 jours
Carburant : Répercussion du gazole
Action directe en paiement : Le risque de payer deux fois
Droit de rétention des marchandises
Fiche 2 : Retard de livraison ou de retrait des marchandises
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•
•
Retrait de la marchandise par l’acheteur
Délais de chargement ou de déchargement
Retard de livraison
Responsabilité du transporteur
Fiche 3 : Dégâts de livraison ou perte des marchandises
•
•
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•
Qui assume les risques du transport ?
Préserver ses droits vis-à-vis du transporteur
Refus de la marchandise : Le « Laissé-pour-compte »
Indemnité due par le transporteur ou son assureur
Fiche 4 : Situations particulières
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•
•
•
Véhicule laissé seul chez le destinataire en attente de déchargement
Livraison en l’absence du destinataire
Prise de possession de la marchandise, suivi d’un refus du destinataire
Acceptation partielle d’un envoi
Fiche 5 : Principales obligations de l’expéditeur et du destinataire
•
•
Principales obligations de l’expéditeur
Principales obligations du destinataire
Annexes
Sources : Revue fiduciaire, Lamy Transport
Fiche 1 : Litiges sur le prix du transport
Facture à régler dans les 30 jours
Depuis la loi 2006-10 du 5 janvier 2006, les délais de paiement pratiqués dans le secteur des transports ne
peuvent plus dépasser 30 jours à compter de la date d'émission de la facture (c. com. art. L. 441-6, al.
5). Il est donc inutile de négocier un délai supérieur.
Remarques :
• Location de véhicule : Cette règle concerne le transport routier de marchandises mais aussi la location de
véhicule (avec ou sans conducteur), la commission de transport, les activités de transitaire, d'agent
maritime, de fret aérien, de courtier de fret et de commission en douane.
• 30 jours ou moins : Le transporteur est libre de fixer des délais de paiement à moins de 30 jours, voire de
ne pas en accorder du tout.
Sanction : Le fait de ne pas respecter les délais de paiement prévus par l’article L. 441-6 du code du
commerce est puni d’une amende de 15 000 euros qui, pour les sociétés, peut être portée à 75 000 euros
maximum.
Carburant : Répercussion du gazole
Tout transport routier intérieur de marchandises doit être rémunéré sur la base des éléments suivants (loi
95-96 du 1er février 1995, art. 24) :
-
les prestations accomplies par le transporteur et ses préposés ;
les durées pendant lesquelles le véhicule est à disposition en vue du chargement et du
déchargement ;
la durée nécessaire au transport (dans des conditions compatibles avec le respect des
réglementations de sécurité) ;
les charges de carburant (depuis l'intervention de la loi 2006-10 du 5 janvier 2006).
• Révision du prix : Lorsque le contrat mentionne les charges de carburant retenues pour l'établissement du
prix du transport, le prix initialement convenu est révisé de plein droit à la hausse ou à la baisse pour
prendre en compte la variation des charges liée à la variation du coût du carburant entre la date du contrat et
le jour du transport effectif (loi 95-96 du 1er février 1995, art. 24 II).
Le contrat ne peut pas écarter le principe de la révision. Il peut, en revanche, déterminer librement les
modalités de cette révision, c'est-à-dire le niveau de la répercussion (Sénat, rapport n° 14, p. 57).
À défaut de clause contractuelle identifiant les charges de carburant, un dispositif légal d'indexation
s'applique automatiquement (loi 95-96 du 1er février 1995, art. 24 III).
• Facturation : Les factures émises par le transporteur doivent toujours faire apparaître les charges du
carburant (loi 95-96 du 1er février 1995, art. 24 II et III)
Pour plus d’information sur le sujet, voir le Point Sur « Dispositif de « répercussion gazole » en transport
routier de marchandises » Novembre 2008 sur le site CGI à l’adresse suivante :
http://www.cgi-cf.com/index.php?option=com_content&task=view&id=144&Itemid=194
Action directe en paiement : Le risque de payer deux fois
Le transporteur a une action directe en paiement à la fois contre l'expéditeur et le destinataire, lesquels sont
tous deux garants du paiement du prix du transport (c.com art.L.132-8).
Peu importe que l'envoi des marchandises soit « franco de port » (transport à la charge de
l'expéditeur) ou « port dû » (transport à la charge du destinataire).
Autrement dit, si l'expéditeur est mis en liquidation en laissant une facture de transport impayée, le
transporteur peut en réclamer le paiement au destinataire, (même chose en cas de liquidation du
destinataire). Et si le destinataire a déjà réglé le prix du transport à l'expéditeur, en même de temps que sa
commande, il sera ainsi conduit à régler deux fois le prix du transport.
Par ailleurs, si le transporteur sous-traite le transport, le sous-traitant dispose des mêmes droits que le
transporteur : il peut réclamer le paiement de sa facture à l'expéditeur ou au destinataire (c.com art.L.132-8).
Une entreprise peut, ici aussi, être amenée à régler deux fois le prix du transport, si par exemple :
- l'expéditeur règle la facture du transporteur ;
- le transporteur dépose ensuite le bilan sans avoir réglé le sous-traitant ;
- le sous-traitant se retourne contre l'expéditeur.
Mieux vaut donc ne pas conclure avec n'importe quel transporteur.
Pour plus d’information sur le sujet, voir le Point Sur « Action directe en paiement du transporteur »
Septembre 2008 sur le site CGI à l’adresse suivante :
http://www.cgi-cf.com/index.php?option=com_content&task=view&id=140&Itemid=190
Droit de rétention des marchandises
Transporteur
Le transporteur peut :
- retenir les marchandises confiées tant qu'il n'est pas payé.
- utiliser ce droit de rétention pour obtenir le paiement de factures afférentes à des transports
antérieurs (c. com. art. L. 133-7).
Le commissionnaire dispose d’un droit identique.
Exemples :
• Peu importe le redressement judiciaire du client : Le transporteur dispose d'un droit de rétention sur
l'ensemble des marchandises qui lui ont été confiées ; ce droit n'est pas limité aux seules marchandises qui
lui ont été remises par le client avant le prononcé de son redressement judiciaire (CA Besançon 8 mars
2000, Sem. Jur. 2000, 259).
• Paiement de transports précédents : Le transporteur peut retenir des marchandises à transporter en raison
de précédents transports demeurés impayés ; encore faut-il que le propriétaire des marchandises qu'il
retient soit impliqué dans ces transports impayés (cass. com. 27 juin 2006, n° 05-16053).
Fiche 2 : Retard de retrait ou de livraison
des marchandises
Retrait de la marchandise par l’acheteur
Le vendeur met dans ses magasins la marchandise à la disposition de l'acheteur et celui-ci doit venir la
retirer.
Lors du retrait, le vendeur :
-
Doit vérifier que les marchandises qu'il remet sont bien celles indiquées sur le bon de commande
Pour les opérations courantes, il n’a pas à vérifier l’identité de l’acheteur
En cas de défaut de retrait ou de retard du client
• Le vendeur peut demander la résolution de la vente
A l’expiration du terme convenu pour le retirement de la marchandise, le vendeur peut s’il le souhaite
considérer que la vente est résolue (article 1657 code civil). Pour cela, le vendeur n'a ni besoin d'adresser
une mise en demeure à l'acheteur ou d'engager une action en justice
Mais il peut tout aussi bien préférer tenter de contraindre le client à respecter son engagement et à régler le
prix.
• Tous les types de ventes sont concernés
Cette règle vaut :
- quelle que soit la qualité de l'acheteur : professionnel ou particulier
- quel que soit le bien vendu : denrées périssables ou toute autre marchandise.
En pratique, cette règle concerne très généralement les ventes payables à terme, mais elle a pu également
trouver à s'appliquer dans le cadre de ventes réglées comptant.
Exemple :
Un acheteur commande 10 tonneaux de vin et en règle le prix. Le vendeur accuse réception du chèque et
rappelle au client qu'il doit procéder à l'enlèvement des tonneaux « avant fin décembre prochain, dernier
délai ». Le vendeur veut en effet libérer ses cuves pour la récolte suivante. Au mois de décembre, le client
ne se présente pas chez le vendeur qui, le 25 janvier suivant, lui retourne le prix.
L'acheteur assigne alors le vendeur pour obtenir la livraison des vins et des dommages et intérêts. Il perd
son procès : le vendeur était en droit de considérer le marché comme résilié à défaut de retirement dans le
délai convenu (CA Bordeaux 12 avril 1948, D. 1948, 446).
• Limites de cette règle :
- Le vendeur ne peut invoquer la résiliation de plein droit qu'en cas de défaut de retirement ;
- Il ne peut pas l'invoquer pour un autre motif, spécialement pour le non-paiement du prix. Dans ce
cas, le vendeur, qui veut annuler le contrat, doit demander en justice la résolution de la vente.
Conditions de la résolution
La résolution du contrat de plein droit n’est possible que si les 3 conditions suivantes sont remplies
ere
1
condition : un délai a été prévu à la commande
Dans le cas contraire :
-
le vendeur doit mettre l'acheteur négligent en demeure de venir retirer la marchandise, en lui fixant
un délai raisonnable et conforme aux usages de sa profession.
-
Si cette mise en demeure reste sans effet, il doit, en principe, demander cette résolution en justice.
S'il n'engage pas cette procédure et estime de lui-même que la vente est résolue, il le fait à ses risques et
périls.
eme
2
condition : la marchandise est mise à la disposition de l’acheteur
Le défaut de retirement est dû au fait de l'acheteur.
Le vendeur, ayant fait le nécessaire pour mettre la marchandise à la disposition de l'acheteur, devra être à
même de le prouver en cas de litige.
eme
3
condition : La marchandise est sans vice ni défaut
Par ailleurs, le vendeur ne peut reprocher à l'acheteur un défaut de retirement que s'il a mis à la disposition
de celui-ci une marchandise conforme à la commande et exempte de vice.
Refus du client de retirer la marchandise :
•
Résolution ou paiement du prix
Lorsque l'acheteur refuse de prendre la marchandise commandée, le vendeur n'est pas obligé de considérer
le contrat comme résolu ; il peut préférer contraindre l'acheteur à exécuter le contrat mais, en pratique, il doit
alors engager une procédure judiciaire.
•
Dommages et intérêts
Lorsque l'acheteur ne procède pas au retirement des marchandises à la date fixée, le vendeur peut
également demander la condamnation de l'acheteur à lui verser des dommages et intérêts s'il établit qu'il a
subi un préjudice.
En pratique, lorsque le vendeur revend la marchandise, les dommages et intérêts sont fixés au montant de
la différence entre le prix de la première vente et celui de la seconde si ce dernier est inférieur.
•
Remboursement des dépenses
Par ailleurs, le vendeur peut demander à être indemnisé s'il a dû faire des dépenses pour l'entretien et la
conservation des marchandises depuis le jour de la vente (par exemple, des frais de magasinage). Encore
faut-il, pour qu'il puisse présenter une telle demande, qu'il n'ait pas déjà récupéré ces sommes lors d'une
revente.
Délais de chargement ou de déchargement
Les délais de chargements et de déchargement résultent de la convention écrite des parties, ou, à défaut,
du contrat type régissant le transport en cause.
Mise à disposition du véhicule
• Heures pendant lesquelles le transporteur peut se présenter
En l’absence d’accord avec son client :
Le transporteur est fondé à se présenter à n’importe quel moment entre 8 et 18 heure, les délais n’étant pas
suspendus pendant la coupure du déjeuner et continuant donc à courir entre 12 et 14 heures. Le samedi
demeure légalement un jour ouvrable. Le transporteur est donc fondé à se présenter le samedi comme tout
autre jour, à moins qu’il n’ait été informé, lors de la conclusion du contrat de transport, de la fermeture, ce
jour-là, de l’établissement expéditeur ou destinataire.
Rendez-vous et plage horaire :
Rendez-vous : D’un commun accord, le donneur d’ordre et le transporteur fixe un jour et une heure, précis et
fermes, pour la mise à disposition du véhicule au lieu de chargement. Le transporteur commet une faute s’il
ne respecte pas cet horaire qu’il accepté. De la même façon, le destinataire et le transporteur peuvent se
mettre d’accord sur une date et une heure précises de livraison.
Les contrats types généraux (pour les envois de plus de 3 tonnes), citernes, température dirigée, objet
indivisibles et animaux vivants (pour les envois de plus de 500 kg) admettent, en cas de rendez-vous, un
retard de 30 minutes par rapport à l’heure d’arrivée fixée et corrélativement, un allongement de 30 minutes
de la durée d’immobilisation.
Plage horaire : Elle correspond à la période « pour un jour donné ou non, fixée d’un commun accord entre le
donneur d’ordre et le transporteur pour la mise à disposition du véhicule sur les lieux de chargement ou de
déchargement », période limitée à 4 heures.
Confirmation de mise à disposition : À moins que l’indication ne figure déjà dans le document de cadrage du
transport, il est recommandé de confirmer par écrit l’heure de mise à disposition du véhicule convenue au
téléphone. En effet, si tout reste verbal, un transporteur de mauvaise foi pourra, en cas de défaillance,
contester avoir pris l’engagement d’enlever la marchandise à une heure déterminée et même nier carrément
tout engagement.
• Point de départ du délai
Les temps d’attente courent à compter de l’identification du véhicule, c'est-à-dire du moment où le
transporteur, arrivé sur le site, informe le représentant de l’établissement de chargement (ou de
déchargement) que son véhicule est à disposition pour effectuer les opérations de chargement (mention
devant en être faite sur le document de suivi).
Par représentant de l’établissement de chargement il faut entendre toute personne présentant l’apparence
d’un préposé qualifié pour recevoir ce genre de déclaration (ex : au poste de garde).
Si un rendez-vous a été pris et que le transporteur se présente en avance, le délai ne commence à courir
qu’à l’heure du rendez-vous et non à l’heure de mise à disposition du véhicule.
• Suspension pendant la nuit et les jours non ouvrables
Nuit : Sauf rendez-vous ou plages horaires fixés, lorsqu’ils ne sont pas écoulés à l’heure de fermeture de
l’établissement ou à 18 heures pour les établissements qui ne ferment pas, les délais de chargement ou de
déchargement sont suspendus, selon le cas jusqu’à l’heure d’ouverture ou à 8 heures le premier jour
ouvrable qui suit.
Si l’établissement a des horaires de chargement ou de réception (et non pas d’ouverture) différents et que le
donneur d’ordre en a informé le transporteur lors de la conclusion du contrat, ce sont ces horaires qu’il faut
prendre en compte.
Jours non ouvrables : Lorsque le délai de chargement n’est pas expiré la veille d’un jour non ouvrable à
18 heures (ou heure de fermeture) la partie restant à courir est reportée au premier jour ouvrable suivant,
sauf si ce délai est incompatible avec la bonne conservation des marchandises.
Durée de mise à disposition du véhicule (Contrats types « général » et température dirigée)
Les durées de mise à disposition du véhicule en vue du chargement (ou du déchargement) mises en place
par ces deux contrats types sont strictement similaires :
Poids et volume des envois
< 3 tonnes
≥ 3 tonnes
Durée de mise à disposition du véhicule
> 100 kg et > 20 colis
15 min
≥ 100 kg et/ou ≥ 20 colis
30 min
RDV
respecté
Plage horaire
respectée
Autres cas
3 ≤ x ≤ 10 tonnes et < 30 m3
1h
1 h 30
2h
(+ 1/4 h en cas de rdv manqué)
> 10 tonnes ou > 30 m3
1h
2h
3h
(+ 1/4 h en cas de rdv manqué)
Fin de l’immobilisation du véhicule
À l’enlèvement : L’immobilisation prend fin après chargement et remise des documents de transport
(document de suivi compris)
À la livraison : L’immobilisation prend fin après déchargement du véhicule et émargement du
document de transport par le destinataire. Le délai de déchargement inclut le temps nécessaire à la
vérification de l’état de la marchandise.
Le transporteur peut-il refuser d’attendre ? Les contrats types fixent le délai à 24 heures. Le transporteur
est donc tenu de patienter dès lors que l’immobilisation annoncée ou prévisible n’excède pas 24 heures et
semble-t-il, cela même si un rendez-vous est convenu, les contrats types ne distinguant pas cette situation.
Une telle attente doit être considéré comme faisant partie des aléas de l’exploitation.
Au-delà de 24 heures on tombe dans l’empêchement à la livraison et le transporteur est en droit de
décharger la marchandise en l’absence d’instructions de la part du donneur d’ordre.
Indemnisation de l’immobilisation
Sauf cas de force majeure ou faute imputable au transporteur, tout dépassement des délais fixés entraîne la
perception d’un complément de rémunération sur la base du prix de revient d’un véhicule et d’un conducteur
et non pas l’indemnisation du préjudice causé par l’immobilisation.
Retard de livraison
Mettre en demeure le fournisseur
•
La date de livraison n’est pas impérative
Une entreprise a acheté un matériel ou des marchandises dont elle aurait dû recevoir la livraison. Ce retard même important - ne l'autorise pas à annuler d'emblée sa commande. Si, lors de la commande, le vendeur
ne s'est pas engagé par écrit sur une date de livraison ferme et impérative, l'acheteur doit absolument lui
adresser une mise en demeure lorsque le délai promis n'est pas respecté.
Exemples de délais approximatifs :
Le bon de commande mentionne : « Livraison dans un mois environ », « Livraison suivant fabrication du
fournisseur », « Livraison dès que possible ». Dans tous ces exemples, l'acheteur, s'il n'est pas livré, doit
adresser une mise en demeure au fournisseur.
•
À titre préventif : Lire les conditions générales de vente
Dans ses conditions générales de vente, le fournisseur peut prévoir que le délai convenu pour la livraison est
seulement indicatif et que son dépassement n'ouvre pas droit à des dommages et intérêts.
L'acheteur doit lire avec attention les clauses portées sur le bon de commande et dans les conditions
générales de vente : le vendeur a pu indiquer sur le bon de commande un délai de livraison d'un mois, par
exemple, et préciser dans ses conditions générales de vente que les délais de livraison sont donnés à titre
indicatif.
L'acheteur ne doit pas hésiter à rayer les clauses « livraison » qui seraient préjudiciables à son entreprise.
Ce peut être, par exemple, une clause indiquant que l'acheteur ne peut pas prétendre à des
dédommagements s'il est livré avec retard. L'acheteur ajoutera son paraphe en marge du texte raturé et
conservera une photocopie du document.
Modèle de clause « livraison », voir Annexe n°1
•
Quand adresser la mise en demeure ?
Sur certains bons de commande, le vendeur fixe un délai qui peut ne pas être assez précis pour l'acheteur.
Voici comment le déchiffrer :
Livraison indiquée
Il faut entendre jusqu’au
« début de mois »
« fin de mois »
« milieu de mois »
« courant du mois »
10e jour du mois*
Dernier jour du mois*
19e jour du mois*
Dernier jour du mois*
* Le client doit laisser passer cette date avant d'adresser une mise en demeure.
•
Présentation et contenu de la mise en demeure
La mise en demeure s'effectue par lettre recommandée avec avis de réception.
Dans ce courrier, l'acheteur doit fixer une nouvelle date de livraison à son vendeur et ce nouveau délai est
impératif : le vendeur sera fautif s'il ne le respecte pas.
La mise en demeure doit accorder un délai normal au vendeur pour livrer. À titre d'exemple, un délai de 24
heures pour une livraison de Lille à Marseille ne serait pas suffisant.
Modèle de Mise en demeure de livraison, voir Annexe n°2
•
En l’absence de mise en demeure
Tant que l'acheteur n'a pas adressé de mise en demeure, le vendeur ne peut pas être considéré comme
fautif, même si le retard de livraison est très important. Ceci peut avoir des conséquences graves et
inattendues pour l'acheteur.
Exemples :
• Retard de 3 mois
Un entrepreneur avait acheté un camion qui lui a été livré avec trois mois de retard. Il n'a pas pu refuser ce
camion, car il n'avait adressé aucune mise en demeure. De même, il n'a obtenu aucun dédommagement
pour le retard (cass. com. 24 juin 1980, D. 1981 IR 40).
• Retard de 2 ans
Un acheteur avait refusé une livraison hors délai mais n'avait adressé aucun courrier au vendeur. Plus de
deux ans après la date de livraison initialement prévue, le vendeur a pu contraindre l'acheteur à venir retirer
la marchandise (cass. com. 18 janvier 1984, BC IV n° 24).
•
Lorsque la date de livraison est impérative
Dans certaines situations, le délai de livraison est impératif. Les acheteurs n'ont alors pas besoin d'adresser
de courrier à leur vendeur ; ils peuvent refuser purement et simplement une livraison hors délai.
Dates de livraison implicitement impératives :
• L'acheteur peut refuser la marchandise livrée hors délai :
- lorsqu'il s'agit de denrées périssables, telles que des pommes
- lorsque la vente d'un groupe électrogène a été conclue sous la condition d'une livraison tel jour, pour pallier
une grève d'EDF
- lorsque les marchandises ont été achetées pour être présentées à la clientèle à l'occasion d'un salon
• De même, une entreprise qui a commandé des dépliants publicitaires spécifiques pour l'année à venir, peut
les refuser lorsqu'ils ne lui sont livrés qu'au mois d'octobre de cette année ; peu importe qu'elle n'ait pas
adressé de mise en demeure.
•
L’acheteur peut-il imposer une date impérative de livraison ?
Les acheteurs professionnels peuvent être tentés de mentionner systématiquement sur leurs commandes :
« livraison le…, date impérative », afin de ne jamais avoir à effectuer de mise en demeure.
Cependant, en cas de litige, un tribunal pourra estimer que le retard de livraison (7 jours de retard, par
exemple) n'était pas suffisamment grave pour permettre à l'acheteur d'annuler sa commande. Il est donc
prudent, de la part de l'acheteur :
-
de ne pas trop compter sur la mention « délai impératif » ajoutée sur le bon de commande ;
-
d'adresser par précaution une mise en demeure.
Recours de l’acheteur
•
Laissé-pour-compte ou action judiciaire ?
Le laissé-pour-compte, c'est le refus de l'acheteur de prendre livraison de la marchandise.
Passé le délai imparti dans sa mise en demeure, le client peut refuser la livraison des marchandises ; il en
est de même lorsque le délai de livraison était impératif. Ce procédé a le mérite d'éviter, au moins
provisoirement, les inconvénients d'une action en justice.
Mais l'acheteur sera contraint de saisir la justice :
-
s'il veut récupérer un acompte
s'il veut contraindre le vendeur à livrer
si, souhaitant s'approvisionner chez un concurrent, il entend mettre à la charge du vendeur le prix à payer
si le retard de livraison lui a causé un préjudice financier
Quel que soit le choix que l'acheteur fait dans sa mise en demeure, entre les diverses solutions, il est
toujours en droit de revenir sur son option et de présenter en justice une demande différente.
Pour obtenir la
livraison
Pour éviter une
action judiciaire
Pour récupérer les
acomptes versés
Pour obtenir des
dommages et intérêts
Laissé-pour-compte
Non
Oui
Non
Non
Résolution
Non
Non
Oui
Oui
Livraison forcée
Oui
Non
Non
Oui
Achat chez un concurrent
Oui
Non
Non
Oui
Choix ouvert à l’acheteur
•
Résolution de la vente
La résolution d'une vente conclue entre commerçants est demandée devant le tribunal de commerce.
L'acheteur engage cette procédure :
-
s'il entend récupérer des acomptes qu'il a versés
et/ou si le défaut de livraison lui cause un préjudice qui doit être indemnisé.
•
Livraison forcée
L'acheteur demande au tribunal de commerce de condamner le vendeur à livrer la marchandise
commandée. Pour que cette condamnation ait un réel effet sur le vendeur, l'acheteur demandera qu'une
astreinte soit prononcée. Le tribunal pourra, par exemple, condamner le vendeur à livrer le matériel dans les
48 heures, et ce, sous astreinte de 2 000 € par jour de retard, passé les 2 jours.
La demande peut être présentée en référé, c'est-à-dire devant le président du tribunal de commerce, pour
qu'une décision soit obtenue rapidement (dans les 8 jours environ).
La procédure peut ensuite être poursuivie devant le tribunal, notamment si l'acheteur souhaite obtenir des
dommages et intérêts (que le juge des référés ne peut pas accorder).
•
Achat chez un concurrent
Si la même marchandise peut être achetée chez un concurrent, le commerçant non livré peut se fournir chez
lui et faire supporter le prix par le vendeur défaillant.
En principe, l'acheteur doit y être préalablement autorisé par le juge mais, en cas d'urgence, il est admis qu'il
achète directement la marchandise chez le concurrent ; il saisira ensuite le tribunal de commerce pour
obtenir la résolution de la première vente avec des dommages et intérêts.
•
Dommages et intérêts
Les dommages et intérêts ont pour but de réparer :
- la perte éprouvée par l'acheteur,
- mais aussi le manque à gagner.
L'acheteur doit chiffrer sa demande de dommages et intérêts devant le tribunal et l'étayer au maximum de
documents justificatifs (courriers de son propre client, commande auprès d'un autre fournisseur, etc.).
En fonction de ces éléments, les juges statueront sur le bien-fondé de la demande et fixeront, s'il y a lieu, le
montant des dommages et intérêts (sans jamais aller au-delà de la demande qui leur a été présentée).
Exemples de préjudices indemnisés :
-
Impossibilité de livrer une partie de la commande
Obligation de sous-traiter certains travaux ;
Prix plus élevé de la marchandise achetée chez un concurrent ;
Remise en état du matériel utilisé par le vendeur après la date prévue de livraison ;
Perte d'un marché.
Responsabilité du transporteur
Indemnisation limitée au prix du transport
Le transport est toujours assorti d'une limitation de la responsabilité du transporteur en cas de retard :
- soit le transporteur a prévu cette limite dans ses contrats de transport ou ses conditions générales ;
- soit c'est le plafond réglementaire qui s'applique.
•
Plafond réglementaire
L'article 22-3 du contrat type de transport routier de marchandises dispose : « En cas de préjudice prouvé
résultant d'un retard à la livraison du fait du transporteur, celui-ci est tenu de verser une indemnité qui ne
peut excéder le prix du transport ».
•
Déclaration spéciale de l’expéditeur
Si l'expéditeur veut être indemnisé correctement en cas de retard, il doit le négocier avec le transporteur au
moment de la signature du contrat. Le contrat contiendra alors une « déclaration d'intérêt spécial » qui aura
pour effet de substituer le montant de cette déclaration au plafond réglementaire de l'indemnité.
Indemnisation totale en cas de faute lourde
Dans le cas d'une faute lourde (et dans ce cas seulement), le transporteur doit réparer intégralement le
préjudice que son retard a provoqué. La faute lourde est rarement retenue. Elle est liée à la gravité du
comportement du transporteur.
L’ambiguïté des transports rapides
Même lorsqu'un transporteur vante la rapidité de sa prestation et s'engage sur un délai de livraison (« avant
telle date », « avant telle heure »), le client n'obtiendra pas pour autant des dédommagements réels si le
transporteur livre en retard. S'il souhaite une réelle indemnisation, l'expéditeur doit toujours démontrer
l'existence d'une faute lourde, ce qui paraît le plus souvent impossible. À défaut d'une telle preuve, le client
sera uniquement remboursé du prix du transport.
Exemples :
• Retard inexpliqué : La faute lourde ne peut résulter du seul retard dans l'acheminement des plis confiés ni
de l'incapacité pour le transporteur de fournir des explications sur la cause du retard (cass. ch. mixte 22 avril
2005, nos 02-18326 et 03-14112).
• Retards répétés : Des juges écartent la clause légale de limitation de responsabilité, la société ayant
commis, selon eux, une faute lourde. Cette faute consiste à avoir, par deux fois, livré avec un retard de
24 heures des plis confiés par une même entreprise. Cette décision est censurée par la Cour de cassation :
la faute lourde de nature à tenir en échec la limitation légale d'indemnisation ne peut pas « résulter du seul
manquement à une obligation contractuelle, fût-elle essentielle, mais doit se déduire de la gravité du
comportement du débiteur » (cass. com. 21 février 2006, n° 04-20139).
• Livraison à 25 km seulement : Une entreprise confie à la société Chronopost un pli contenant une
soumission pour un marché public. Ce pli porte la mention : « livraison impérative vendredi avant midi ». Ce
délai n'est pas respecté. Sa candidature n'ayant pu être examinée, l'entreprise assigne le transporteur. Les
juges soulignent que celui-ci s'est engagé à faire parvenir le pli, le lendemain avant midi, dans une localité
située à une très courte distance (25 km) du lieu de son expédition. Cet acheminement ne présentait aucune
difficulté. Ils déclarent inapplicable la clause légale de limitation de responsabilité et condamnent le
transporteur à verser 6 000 € de dommages et intérêts. Cette décision est censurée par la Cour de
cassation, qui reprend toujours la même motivation : la faute lourde de nature à tenir en échec la limitation
d'indemnisation prévue par le contrat type ne peut pas résulter du seul manquement à une obligation
contractuelle, fût-elle essentielle, mais doit se déduire de la gravité du comportement du transporteur (cass.
com. 13 juin 2006, n° 05-12619).
Fiche 3 : Dégâts de livraison ou perte des
marchandises
Qui assume les risques du transport ?
Conditions de ventes :
Le vendeur est tenu de délivrer la chose vendue en la remettant à l'acheteur. Lorsque cette délivrance doit
entraîner le transport de la marchandise vendue, la convention prévoit si la livraison se fait au départ de
l'entreprise du vendeur ou à l'arrivée, chez l'acheteur.
• Si la livraison a lieu au départ des magasins du vendeur
À partir du moment où la marchandise est remise au transporteur elle voyage aux risques et périls de
l'acheteur.
Modèle de clause à insérer dans les conditions générales de vente, voir Annexe n°3
• Si la livraison a lieu à l’arrivée chez l’acheteur
Si le vendeur prend à sa charge le transport et si la vente est conclue avec la stipulation que la marchandise
est livrable chez l'acheteur, le vendeur assume les frais et les risques du transport.
• Si rien n'est prévu
Les risques du transport sont à la charge de l’acheteur, sauf s'il prouve que l'expéditeur a commis une faute
(par exemple, un emballage insuffisant).
Conditions d’achat
De son côté, l'acheteur peut adopter des conditions d'achat pour écarter les risques du transport.
Exemple : Risques mis à la charge du fournisseur
Une entreprise prévoit, dans ses conditions générales d'achat, que les marchandises voyagent aux risques
et périls du fournisseur. La marchandise achetée est volée au cours de son transport depuis l'Italie. Pour
obtenir le paiement de sa facture, le fournisseur met en avant la clause « franco-frontière » incluse dans son
contrat de vente. Il perd son procès, les juges donnant application aux conditions générales d'achat. Quant à
la clause « franco-frontière », elle ne concerne que les frais de transport et n'a pas pour effet de différer le
transfert de propriété (cass. com. 23 juin 1998, BC IV n° 210).
Responsabilité présumée du transporteur : L 133-1 du code de commerce
Important :
Que les risques du transport aient été mis à la charge du vendeur ou de l’acheteur, le transporteur
routier est toujours présumé responsable des défectuosités et des manquants constatés à la
livraison.
Pour être indemnisé par le transporteur le destinataire n'a pas à démontrer la faute de celui-ci.
Encore faut-il qu'il accomplisse les formalités décrites au paragraphe 2 ci-dessous.
Ces formalités doivent être respectées par le destinataire, même si les marchandises voyagent aux risques
et périls de l'expéditeur.
Dans un tel cas, le destinataire pourra être tenté de ne pas s'astreindre aux formalités légales s'il n'a aucun
préjudice à faire indemniser. Il doit cependant s'y conformer car, à défaut, le transporteur pourra refuser
toute indemnité à l'expéditeur ; celui-ci sera alors en droit de se retourner vers le destinataire pour obtenir la
réparation de son préjudice.
• Cela concerne tous types de transports : Nationaux et internationaux
Dès lors qu'il a pris en charge la marchandise et jusqu'à ce qu'elle soit délivrée, le transporteur en est
responsable. La loi française comme les conventions internationales ratifiées par la France consacrent une
responsabilité ‘‘de plein droit'', ‘‘objective, du transporteur''.
• Le transporteur a une obligation de résultat
A défaut de réserves au départ, le transporteur est censé avoir pris en charge une marchandise en bon état
et au complet, de sorte que tous les dommages constatés à l’arrivée seront automatiquement réputés
survenus en cours de transport.
Sa responsabilité peut donc être engagée par le simple fait que des avaries ou des manquants ont affecté
les biens transportés. Seuls quelques mécanismes peuvent l’exonérer de sa responsabilité, comme par
exemple la force majeure.
Le transporteur conserve cependant tous ses droits en matière de preuve, mais si l’absence de réserves au
départ entraîne la présomption que le transporteur a reçu les marchandises en état, elle ne lui interdit
aucunement d’invoquer ultérieurement le vice propre à la chose ou la faute de l’expéditeur en vue de
dégager sa responsabilité.
• Une responsabilité plafonnée
Traditionnellement, la responsabilité du transporteur pour manquants ou avaries est une responsabilité
plafonnée. Les conventions internationales comme la loi française ainsi que les « contrats-types transport »
prévoient qu'en cas de manquants ou d'avaries, la victime ne sera indemnisée que pour une somme limitée.
Attention !!!
Les paragraphes qui suivent se limitent essentiellement à la présentation des
règles applicables au transport terrestre national.
Préserver ses droits vis-à-vis du transporteur
Ouvrir le colis
Bien qu'il soit parfois difficile de disposer du temps nécessaire à l'ouverture des colis au moment où le livreur
se présente, cela est indispensable si le destinataire veut conserver un recours en cas de dégâts.
La mention « sous réserve de déballage » est sans valeur. Cette mention, trop souvent indiquée sur les
bons de livraison, est dépourvue de toute efficacité. En effet, si le destinataire constate ensuite des
dommages ou des manquants, cette seule mention ne suffira pas à démontrer qu'ils existaient déjà lors de la
livraison.
Le déchargement est à la charge du transporteur pour les envois de moins de 3 tonnes (si la marchandise
est endommagée lors du déchargement, le transporteur est présumé responsable).
En revanche, le transporteur n'est pas responsable du déchargement pour les envois de 3 tonnes et plus :
ce déchargement est effectué par le destinataire sous sa responsabilité (décret 99-269 du 6 avril 1999).
Faire des réserves
• Où les inscrire ?
S'il constate des anomalies, le destinataire doit formuler ses réserves de façon aussi complète et précise
que possible. Il les inscrira sur le document que le transporteur lui demande de signer (bordereau de
livraison, feuille de route, récépissé, livre d'émargement…).
Le destinataire doit veiller à ce que la date de livraison et les réserves apparaissent bien sur tous les
exemplaires du document et spécialement sur le feuillet que garde le transporteur.
• Des réserves précises
Si le destinataire ne formule pas de réserves, il est censé avoir reçu une marchandise en bon état. Ceci est
vrai, quel que soit le mode de vente, franco ou non.
De plus, les réserves doivent être précises. Elles donneront ainsi moins facilement prise à la contestation.
En revanche, les réserves vagues ne permettront pas, en cas de litige, de prouver aux juges la réalité des
dégâts au moment de la livraison.
Exemples : Les destinataires n'ont pas été indemnisés lorsqu'ils s'étaient bornés à indiquer :
• La température relevée à l'ouverture d'un véhicule réfrigérant, sans formuler une observation sur l'état du
chargement ;
• « Cartons éclatés, sous réserve de contrôle de comptage »
• « Cartons ouverts - nombre indéterminé de pièces manquantes »
Adresser un courrier recommandé
• Délai de 3 jours à respecter
Le destinataire a tout intérêt à téléphoner au responsable présumé (fournisseur ou transporteur) afin
d'obtenir un règlement amiable, surtout s'il existe entre eux de bonnes relations d'affaires.
Toutefois, le destinataire doit, dans tous les cas et sous 3 jours, adresser au transporteur un courrier
recommandé avec demande d'avis de réception, afin de lui rappeler les dommages ou les manquants de
façon détaillée ; ce délai ne comprend pas les jours fériés (c. com. art. L. 133-3).
Modèle de lettre, voir Annexe n°4
• Défaut de courrier recommandé dans le délai
Le destinataire perd tout recours contre le transporteur. Le tribunal n'examinera pas le dossier et
déclarera que le destinataire est irrecevable à saisir la justice.
Peu importe que la responsabilité du transporteur soit certaine ; peu importe même qu'il ait commis une
faute lourde (cass. com. 28 mars 2000, Dr. et patrimoine décembre 2000, 72).
Exemples :
• Télex inefficace : Une entreprise achète des carburants qui lui sont livrés pollués. Elle engage un procès à
l'encontre du vendeur et du transporteur. Ce dernier demande aux juges de rejeter l'action menée à son
encontre car le destinataire ne lui a adressé qu'un simple télex dans le délai légal.
L'argument du transporteur est retenu car l'article L. 133-3 du code de commerce exige soit une lettre
recommandée, soit un acte extrajudiciaire ; un télex n'est ni l'un ni l'autre (cass. com. 30 novembre 1993, BC
IV n° 446).
• Dégâts non apparents : À défaut d'un courrier recommandé AR dans les 3 jours de la livraison, toute action
contre le transporteur est impossible, même pour des dégâts qui n'étaient pas apparents lors de la réception
des marchandises (cass. com. 7 novembre 2006, n° 04-17128).
Laisser la marchandise en l’état
Si le destinataire accepte la marchandise avec des réserves, il doit la conserver en l'état, le temps que le
transporteur reçoive le courrier recommandé AR et en avise son assureur.
Un délai minimal de 8 jours est indispensable et sera prolongé si le matériel doit être expertisé.
Demander une expertise
• Intérêt de l’expertise
-
Pour le transporteur : dans le cas où il conteste sa responsabilité.
Pour le destinataire : si le dommage que lui a causé le transporteur est difficile à évaluer.
Pour l’expéditeur : si les marchandises voyageaient à ses risques et périls.
Plus l'expertise sera faite tôt, plus elle sera efficace et incontestable. Demander une expertise est simple et
ne nécessite pas l'intervention d'un avocat. Il suffit de se présenter au tribunal de commerce le plus proche
du lieu où se trouve la marchandise et de déposer une demande sur papier libre.
Mais celui qui demande l'expertise devra régler une provision sur les honoraires de l'expert.
Le destinataire a tout intérêt à provoquer une expertise :
- lorsqu'il a reçu une machine hors d'état de marche alors que le choc apparent n'est qu'anodin ;
- lorsque les retombées commerciales sont pour lui particulièrement lourdes.
Constat d'huissier : Beaucoup de destinataires se contentent de faire dresser, par un huissier, un constat
des dégâts. C'est une erreur car un tel constat sera sans valeur devant les tribunaux : les appréciations de
l'huissier, qui n'est pas un technicien, pourront toujours être contestées.
• Convocation à l’expertise
Celui qui a demandé l'expertise doit y appeler, par lettre recommandée ou par télégramme, toutes les
personnes susceptibles d'être mises en cause : expéditeur, destinataire, transporteur, commissionnaire,
propriétaire du véhicule loué par le transporteur, etc.
Si une de ces personnes n'a pas été convoquée à l'expertise, les conclusions de l'expert ne pourront pas lui
être opposées.
• Dépôt du rapport de l’expert
Si aucun arrangement n'intervient, les juges statueront au vu du rapport de l'expert. En général, aucun délai
n'est imposé à l'expert pour déposer son rapport. Il ne faut pas hésiter à relancer l'expert et, si le rapport n'a
pas été déposé 11 mois après la livraison, il est impératif d'assigner le transporteur devant le tribunal afin de
se mettre à l'abri de la prescription (voir paragraphe ci-dessous).
• Assigner en justice dans les 12 mois
Les actions en justice auxquelles le transport peut donner lieu sont prescrites dans un délai d'un an (article
L. 133-6 du code de commerce).
Ainsi, à défaut d'arrangement satisfaisant, le destinataire (ou l'expéditeur si les marchandises voyageaient à
ses risques et périls) doit impérativement assigner le transporteur dans les 12 mois qui suivent la livraison.
Passé ce délai, son action sera prescrite ; même si elle est bien fondée, elle ne pourra pas être examinée
par les juges.
L'assureur du transporteur peut lui aussi opposer la prescription annale (cass. civ., 1re ch., 10 mai 2000, BC I
n° 134).
Exemples :
• Transport international : La convention de Genève relative au transport routier (dite « CMR ») prévoit
également une prescription d'un an, mais porte ce délai à 3 ans en cas de dol ou de faute lourde du
transporteur (art. 32). En application de cette disposition, une action, engagée dans les 3 ans, a été jugée
recevable au vu des circonstances suivantes : des voleurs avaient emporté un conteneur (et son
chargement) à l'aide d'un camion, qui se trouvait chez le transporteur, démuni de système de sécurité. Par
ailleurs, le transporteur n'avait pas mis en place un système externe de surveillance vidéo alors que
plusieurs vols étaient déjà intervenus. La faute lourde a ainsi été retenue (cass. com. 10 mars 2004, n° 0218043).
• Perte définitive des marchandises : En cas de perte totale de la marchandise transportée, le délai d'un an
court à compter du jour où la remise de la marchandise aurait dû être effectuée (cass. com. 11 juillet 2006,
n° 04-18079).
• Marchandises retenues par le transporteur : En cas de rétention de la marchandise par le transporteur (voir
fiche prix du transport) la prescription annale de la demande d'indemnisation contre le transporteur est
suspendue pendant toute la durée de la rétention (cass. com. 26 septembre 2006, n° 04-19843).
Refus de la marchandise : Le « Laissé-pour-compte »
Comme en cas de retard de livraison, le destinataire peut refuser la marchandise lorsque celle-ci lui parvient
avariée, en faisant abandon au voiturier et en traitant l’affaire en perte totale.
Conditions
Tout manquement du voiturier à ses obligations ne justifie pas automatiquement le laissé-pour-compte.
Il faut que :
- ce manquement soit d’une gravité hors du commun
- et que les marchandises arrivent à une époque ou dans un état tel qu’on ne puisse plus les vendre,
qu’elles soient impropres à leur usage ou que le destinataire n’en ait plus l’utilisation normale.
Les juges apprécient, selon les circonstances particulières à chaque situation (nature de la marchandise,
importance de l’avarie, possibilité d’utilisation par le destinataire, etc.) si le laissé-pour-compte doit être
admis.
A titre indicatif, les assureurs n’admettent ce qu’ils appellent le « délaissement » qu’à partir d’une perte ou
dépréciation d’au moins 75% de la marchandise.
Sous la responsabilité du destinataire
Le laissé-pour-compte n’est pas subordonné à autorisation préalable du tribunal.
Le destinataire le pratique sous sa responsabilité, cependant, le juge peut, a posteriori, déclarer son attitude
injustifiée.
Il est donc conseillé d’avoir recours au laissé-pour-compte avec circonspection et doigté car sa mise en
œuvre abusive peut engendrer de lourdes conséquences.
Indemnité due par le transporteur ou son assureur
Condamnation du transporteur
À défaut d'accord amiable, le transporteur sera condamné, par le tribunal, à verser une indemnité.
Le transporteur est en effet garant de la perte des marchandises et des avaries ( voir 1)). Il ne peut pas, par
exemple, échapper à sa responsabilité en se prévalant de l'assurance souscrite par l'expéditeur pour la
marchandise. Par ailleurs, sa responsabilité demeure engagée chaque fois que la cause des dégâts n'a pas
été trouvée.
Exemple : Cause inconnue de l'avarie
Deux experts sont désignés pour rechercher l'origine d'une avarie. Ils attribuent le dommage à des causes
différentes. Seule une de ces causes exonérerait le transporteur et rien ne permet de trancher avec certitude
entre les deux thèses. Dans ces conditions, la responsabilité totale du dommage est imputée au transporteur
(CA Rouen, 2e ch., 21 mars 1991, Parmain et Préservatrice Foncière c/ Sealand).
Exonération du transporteur
• Cas d’exonération
Le transporteur
-
sera déchargé de sa responsabilité s'il prouve que le dommage résulte :
de la faute de l'expéditeur,
d'un vice propre à la marchandise,
ou d'un cas de force majeure.
• Faute de l’expéditeur
Si le transporteur peut prouver qu'une faute de l'expéditeur a été la seule cause des dégâts, il est totalement
libéré de sa responsabilité. La faute de l'expéditeur peut consister en :
- une fausse déclaration des marchandises à transporter,
- une insuffisance d'emballage,
- ou encore un choix de mode de transport inadapté à la marchandise.
Il ne faut cependant pas oublier que le transporteur, comme tout professionnel, a un devoir de conseil envers
son client.
Exemples :
• Véhicule inadapté : Un maraîcher charge un transporteur d'acheminer des palettes de légumes à Roissy à
destination du Japon. Les légumes gèlent au cours du transport. Le maraîcher assigne le transporteur
devant le tribunal de commerce afin d'obtenir la réparation de son préjudice. Le tribunal rejette sa demande,
estimant que le maraîcher aurait dû choisir un véhicule adapté à la période hivernale.
En appel, le maraîcher obtient gain de cause : il revenait au transporteur professionnel de prescrire le type
de transport le mieux adapté à la marchandise (CA Paris 18 février 1998, Maternaud c/ Virolle).
• Emballage insuffisant : Lors d'un accident, le chargement de fromages est endommagé. L'expéditeur est
jugé seul responsable de ce dommage dû à l'insuffisance du conditionnement des fromages (cass. com. 29
avril 2003, n° 657 FD).
• Vice propre à la marchandise
Le transporteur est exonéré de sa responsabilité s'il démontre que la détérioration d'une marchandise a une
cause qui lui est uniquement interne : une particularité ou un défaut de la marchandise la rend inapte à
supporter, sans dommage, un transport effectué dans des conditions normales.
Exemples : Le vice propre de la marchandise peut consister dans :
- l'insuffisante préréfrigération de denrées périssables
- la présence de larves d'insectes dans une cargaison de légumes secs
- la virose pour des abricots
• Force majeure
Le transporteur pourra être déchargé de sa responsabilité :
- s'il prouve que l'avarie ou la perte a été causée par un cas de force majeure
- et si lui-même n'a commis aucune faute.
Il n'existe pas de liste des cas de force majeure. Un même événement (le gel, par exemple) peut ne pas être
un cas de force majeure (en plein hiver) et le devenir dans d'autres circonstances (à une autre période de
l'année). De même, le vol du camion est souvent invoqué par le transporteur comme un cas de force
majeure ; en réalité, il est rarement admis comme tel par les juges.
Exemples :
• Incendie : L'incendie qui prend naissance à l'intérieur du camion ou dans les locaux du transporteur n'est
pas un cas de force majeure (CA Paris, 7e ch., 5 décembre 1984, Guardian Royal c/ Sobotraf et a.). En
revanche, l'incendie est bien un cas de force majeure lorsque le feu a pris naissance dans l'immeuble voisin
de celui du transporteur (cass. com. 6 décembre 1965, n° 64-11056).
• Chauffeur pris en otage : Est exonéré de sa responsabilité en raison d'une force majeure le transporteur
qui, sauf à se rendre coupable de non-assistance à personne apparemment en danger, a stoppé son
véhicule devant le corps inanimé d'un cycliste. Aucun fait ne pouvait l'inciter à la méfiance et les conditions
de la prise d'otage excluaient toute résistance du chauffeur (cass. com. 29 mai 2001, BC IV n° 109).
• Transport international : Présentait les caractères de la force majeure la situation de blocage qui empirait
dans le transport aérien du fait de la guerre du Golfe et à laquelle s'est heurté un commissionnaire de
transport (cass. com. 16 mars 1999, Les Échos 12 mars 2003, p. 53).
Montant limité de l’indemnité due par le transporteur
• Limitation réglementaire de l’indemnité
Dans tous les cas, l'indemnité due par le transporteur est réglementairement plafonnée. Ces limitations
s'appliquent automatiquement, que l'indemnité soit réclamée par l'expéditeur ou par le destinataire.
Indemnités réglementaires :
• Pour les envois inférieurs à 3 tonnes, le contrat type approuvé par le décret 99-269 du 6 avril 1999 prévoit
que l'indemnité due par le transporteur ne peut pas excéder :
- 23 € par kilogramme de poids brut de marchandises manquantes ou avariées pour chacun des objets
compris dans l'envoi,
- sans pouvoir dépasser 750 € par colis perdu, incomplet ou avarié, quels qu'en soient le poids, le
volume, les dimensions, la nature ou la valeur.
• Pour les envois égaux ou supérieurs à 3 tonnes, l'indemnisation ne peut pas excéder :
- 14 € par kilogramme de poids brut de marchandises manquantes ou avariées,
- sans pouvoir dépasser, par envoi perdu, incomplet ou avarié, 2 300 € multipliés par le nombre de tonnes
de l'envoi.
Le Conseil d'État a eu l'occasion de juger que les clauses du contrat type approuvé par le décret de 6 avril
1999 ne présentaient pas un caractère abusif (CE, 10e et 9e ss-sect., 6 juillet 2005, n° 261991).
De plus, lorsque le commissionnaire est poursuivi à la suite de la perte des marchandises, le
commissionnaire de transport profite de la limitation de responsabilité dont bénéficie le transporteur (cass.
com. 5 décembre 2006, n° 04-19385
• Limitation contractuelle de l’indemnité
La limitation réglementaire de l'indemnité est supplétive. Elle ne s'applique qu'en l'absence d'une clause
différente prise par le transporteur et l'expéditeur.
Cette clause peut être opposée au destinataire s'il en a eu connaissance et, notamment, si elle apparaissait
sur le document de transport qu'il a émargé.
Elle est cependant écartée par les juges lorsque l'indemnité prévue est dérisoire, c'est-à-dire lorsque cette
indemnité est tellement inférieure à la valeur des objets abîmés qu'elle équivaut, en réalité, à une
exonération de la responsabilité du transporteur.
Indemnisation totale
• Faute lourde ou intentionnelle du transporteur
La faute intentionnelle (ou « dol ») du transporteur fait échec à toutes les clauses légales ou contractuelles
qui restreignent sa responsabilité. Ceci vaut aussi pour la faute lourde du transporteur ou de ses salariés.
Exemples :
• Grève annoncée : Chargé d'organiser l'acheminement de denrées périssables, un commissionnaire de
transport envoie les marchandises par la SNCF. Cependant, les denrées restent bloquées plusieurs jours
dans les wagons, suite à une grève des cheminots, et se trouvent ainsi dépréciées.
Les juges retiennent la faute lourde du commissionnaire de transport qui, sachant qu'une grève allait
intervenir, aurait dû modifier l'acheminement des marchandises (cass. com. 6 mai 1997, BC IV n° 127).
• Vol : Dès lors que le vol n'était pas imprévisible et aurait été évité par le choix d'une aire de repos mieux
sécurisée, l'idée d'un cas de force majeure doit être écartée ; en revanche, l'existence d'une faute lourde doit
être retenue (cass. com. 26 septembre 2006, n° 04-18232).
• En cas de vol des marchandises
Bien souvent, en cas de vol des marchandises, alors que le transporteur tente de démontrer que les
circonstances correspondent à un cas de force majeure, les juges retiennent souvent que les circonstances
dénotent au contraire une faute lourde du transporteur et écartent, en conséquence, toute limitation de
l'indemnisation due pour celui-ci.
Les situations dans lesquelles la faute lourde est le plus souvent retenue correspondent au cas du camion
laissé sur la voie publique, pendant la nuit, et sans aucune surveillance (cass. com. 3 avril 2002, BC IV n°
68)
Exemples :
• Vol à main armée : Une cour d'appel considère qu'un vol à main armée ne constitue pas un cas de force
majeure car le vol à main armé est un risque prévisible. Cette décision est censurée par la Cour de
cassation : les juges doivent rechercher si le transporteur a ou non pris toutes les précautions pour éviter le
vol (cass. com. 1er octobre 1997, n° 1897 P)
• Stationnement dans une zone à risques : La faute lourde a également été retenue à l'encontre d'un
chauffeur qui avait stationné son camion dans une zone déconseillée par son commissaire et s'était endormi
pendant cinq heures (cass. com. 28 novembre 2000, BC IV n° 188
• Camion garé sans système antivol : Lors de la prise en charge de la marchandise, le chauffeur quitte son
véhicule par suite d'un appel téléphonique lui demandant d'aller chercher une enveloppe destinée à son
supérieur hiérarchique. Ce coup de fil est en fait une supercherie qui va permettre le vol du camion. Le
transporteur assigné fait valoir la force majeure. Cette prétention est repoussée. Bien plus, les juges écartent
l'application de la clause limitative de responsabilité : le transporteur a commis une faute lourde en
stationnant son camion sur la voie publique sans système antivol (CA Paris 21 janvier 1998, Mondy
Extension c/ Grimaud Transports)
• Code d'accès aux locaux du transporteur : La faute lourde a également été retenue à l'encontre d'un
transporteur qui n'avait pas changé le code d'accès à ses locaux après le départ d'un salarié remercié à
l'issue de sa période d'essai. Ce code d'accès neutralisait le système d'alarme et de télésurveillance et avait
permis le vol des marchandises dans les véhicules (CA Paris, 5e ch. A, 25 octobre 2000, Générali France c/
Transports Danzas
• Chauffeur endormi : Le chauffeur se fait voler son chargement pendant qu'il dort dans son camion
stationné sur une aire d'autoroute. La faute lourde est retenue car le chargement se trouvait dans une
remorque simplement bâchée. Le chauffeur aurait dû prévoir soit de ne pas partir en milieu de journée, soit
de partir avec un second chauffeur (CA Versailles, ch. com. réunies, 4 février 2003, n° 01-1551)
• Précautions prises par le chauffeur : Un chauffeur gare son camion dans la cour fermée de son employeur
contre un quai de déchargement pour bloquer les portes. De plus, il verrouille l'antivol. Le camion est
néanmoins dérobé avec son chargement par effraction du portail de la cour et de la porte du camion. La
faute lourde n'a pas été retenue par les juges (cass. com. 3 avril 2002, BC IV n° 67)
• Faute lourde et partage des responsabilités
Les juges peuvent également estimer que la faute lourde du transporteur n'a pas été la seule cause du
dommage :
- soit qu'une autre personne peut également être tenue responsable,
- soit que l'expéditeur a lui-même une part de responsabilité qu'il doit assumer.
Exemple : Faute de l'expéditeur
Un transporteur est chargé d'acheminer un matériel de 20 tonnes. Le convoi heurte un pont. Le coût de la
remise en état du matériel s'élève à 1 MF. Les juges considèrent que l'expéditeur a commis une faute en
indiquant au transporteur la hauteur de la marchandise à nu, sans son emballage ni son support. Le
transporteur a, quant à lui, commis une faute lourde : en sa qualité de professionnel, il aurait dû vérifier la
hauteur de son véhicule, chargement compris. En conséquence, le transporteur est condamné à supporter
pour moitié le préjudice causé (trib. com. Paris, 9e ch., 30 novembre 1995, Gan c/ Meiffret).
• Action du destinataire
Le destinataire peut également espérer une indemnisation totale de son préjudice en cas de perte des
marchandises pendant le transport.
En effet, la Cour de cassation considère que, tant qu'il n'a pas signé le bon de livraison, le destinataire n'a
pas adhéré au contrat de transport. Il est un tiers par rapport à ce contrat et peut donc être dédommagé à
hauteur de son préjudice, en prouvant la faute du transporteur et le préjudice qu'elle lui a causé (cass. com.
18 mars 2003, n° 522 FSPB).
Fiche 4 : Situations particulières
Véhicule laissé seul chez le destinataire en attente de déchargement
• Le destinataire ne peut accepter la marchandise qu'après avoir vérifié son état et sa conformité au contrat de
vente, chose impossible tant qu'elle se trouve à l'intérieur du véhicule.
Par conséquent, faute de prise de possession physique, la cargaison d'une semi-remorque arrivée trop tard pour
être déchargée le soir même et laissée dételée devant les entrepôts du destinataire, ne peut être regardée comme
livrée. La responsabilité du voiturier demeure donc engagée au titre du contrat de transport si cette semi-remorque
et son chargement sont volés pendant la nuit (Cass. Com 11 juin 2003 n°01-15.663).
• Cela posé, différer sans raison le retrait de la marchandise constitue-t-il une faute du destinataire
susceptible d'exonérer le transporteur pour les pertes ou avaries survenant dans l'intervalle ?
La réponse de principe ne peut être que négative.
• Procéder au déchargement avec retard constitue :
− un manquement du destinataire à ses obligations contractuelles,
− mais ne relève pas pour autant le transporteur de son obligation de garantie à l'égard des
marchandises.
La sanction pour le destinataire réside uniquement dans :
−
−
le paiement d'un complément de rémunération pour immobilisation du véhicule
ou encore le déchargement d'office de la marchandise par le transporteur en cas d'immobilisation
supérieure aux durées spécifiées par les contrats types.
Observations
Ce n'est donc que dans des situations sortant nettement de l'ordinaire que le transporteur pourrait espérer obtenir
sa mise hors de cause en se plaçant sur le terrain de la faute du destinataire, par exemple dans le cas où on lui
aurait assuré que le véhicule ferait l'objet d'une surveillance et où cet engagement n'aurait pas été tenu.
Livraison en l’absence du destinataire
Contexte
Les livraisons de marchandises en l'absence du destinataire (notamment les livraisons de nuit) se pratiquent de
plus en plus et ce, dans des secteurs aussi différents que les denrées périssables, la grande distribution, le
transport de véhicules roulants. D'où l'émergence de litiges difficiles à résoudre puisque :
− d'un côté, les voituriers éprouvent toutes les peines du monde à prouver l'exécution de leur
obligation : Comment un transporteur peut-il démontrer que sa prestation a bien été effectuée alors qu'il n'a
pu, à l'arrivée, obtenir décharge dûment émargée ?
− de l'autre côté, les destinataires, non présents physiquement sur les lieux, se trouvent dans l'impossibilité de
constater sur-le-champ toutes les pertes ou avaries éventuelles.
Pour pallier ces difficultés, la meilleure solution consiste, semble-t-il, à fixer un bref délai de réclamation (une
heure à compter de l'ouverture du magasin, par exemple) avec imputation automatique au transporteur de tous les
dommages notifiés dans ce délai et rejet des autres
Prise de possession de la marchandise, suivi du refus du destinataire
Il arrive aussi qu'un destinataire, après avoir pris possession de la marchandise, déclare quelques jours plus tard la
refuser et la retourne à l'expéditeur.
Cette volte-face n'empêche pas qu'il y a bien eu livraison, faisant courir :
− le délai de 3 jours de l'article L. 133-3 du Code de commerce (voir fiche 2)
− le délai de prescription, au jour de la prise de possession de la marchandise, le retour de la marchandise
donnant lieu à un nouveau contrat de transport.
Il convient, cependant, de réserver le cas d'une acceptation conditionnelle, le destinataire déclarant ne prendre
possession de la marchandise que sous réserve d'une expertise. Si les résultats de cette dernière autorisent le
destinataire à refuser l'envoi, on considérera qu'il n'y a jamais eu livraison. Cette solution va dans le sens de celle
aujourd'hui prônée par les contrats types.
Acceptation partielle d’un envoi
En raison par exemple d'avaries touchant une partie seulement du chargement, le destinataire peut ne procéder
qu'à une acceptation partielle de l'envoi. Dans une telle hypothèse, il semble qu’il faille scinder l'expédition en deux
et considérer que :
− la livraison est effective pour la partie acceptée,
− le contrat de transport initialement conclu se prolonge pour la marchandise refusée
Fiche 5 : Principales obligations de l’expéditeur
et du destinataire
Principales obligations de l’expéditeur
1
Faire le choix d’un transporteur de bonne réputation, solvable et correctement assuré (mais pas
d’obligation de vérifier sa situation administrative)
3
Lui adresser, en temps voulu, le « document de cadrage » de l’opération Modèle Annexe n°5
4
Emballer et étiqueter la marchandise
5
Respecter les réglementations particulières éventuellement applicables (marchandises dangereuses,
entre autres)
6
Vérifier, par des diligences raisonnables, que le véhicule est adapté à la marchandise, en bon état et
propre
7
Signaler les particularités non apparentes de la marchandise
8
Procéder au chargement et l’arrimage, pour les envois à partir de 3 tonnes et Éviter toute surcharge
9
Ne pas immobiliser le véhicule au-delà du délai de chargement
10
Prendre garde aux limitations d’indemnité et formuler si besoin une déclaration de valeur
11
Soigner la rédaction du document de transport : désigner de façon précise la nature de la
marchandise, le poids brut de l’envoi, le nombre de colis, le nom et l’adresse du destinataire
12
S’interdire toute exigence de délai de livraison incompatible avec le respect des limitations de
vitesse et des durées de conduite
13
Acquitter le prix de transport en cas de port payé
Principales obligations du destinataire
1
Se faire présenter les documents de transport, s’assurer que l’envoi lui est bien destiné
3
Vérifier l’état de la marchandise (vérification extérieure et vérification du contenu des colis) et sa
conformité au contrat de vente
4
Procéder au déchargement du véhicule (envoi de 3 tonnes et plus)
5
Ne pas immobiliser le véhicule au-delà du délai de déchargement
6
En cas de dommage, formuler des réserves écrites, précises et motivées au moment même de la
livraison
7
Accomplir la formalité de l’article L.133-3 du Code de commerce (Lettre recommandée motivée au
transporteur dans les 3 jours) dans les cas où elle demeure nécessaire Modèle Annexe n°4
8
Si besoin, laisser toutes choses en l’état et provoquer une expertise judiciaire
9
Acquitter le port (en cas d’envoi en port dû)
10
En cas d’assurance de la marchandise, accomplir les formalités prévues par la police (déclaration du
sinistre, intervention du commissaire d’avaries des assureurs, etc.)
Annexes
Annexe n°1
Modèle de clause « Livraisons »
« Les délais de livraison sont donnés à titre purement indicatif et sans garantie. Les retards de livraison ne donnent
pas à l'acheteur le droit d'annuler la vente ou de refuser la marchandise. Ils ne peuvent pas donner lieu à retenue,
compensation, pénalité ou dommages et intérêts. »
Annexe n°2
Modèle de mise en demeure de livrer
Lettre Recommandée avec Avis de Réception
Monsieur (Madame),
Le … [date de la commande], nous vous avons commandé … [précisez le matériel ou les marchandises] dont la
livraison devait être effectuée le … [date de livraison prévue initialement].
À ce jour, nous n'avons toujours pas reçu ces marchandises. Il ne nous est pas possible de subir un tel retard sans
dommage [précisez les conséquences du retard pour votre entreprise]. En conséquence, nous vous mettons en
demeure d'effectuer, d'ici … jours, la livraison promise.
Ce nouveau délai est impératif et s'il ne devait pas être respecté, nous refuserions la livraison des marchandises
sans préjudice des dommages et intérêts que nous serions alors en droit de vous réclamer.
Variante : Ce nouveau délai est impératif et s'il ne devait pas être respecté, nous engagerions immédiatement
une action judiciaire à votre encontre afin d'obtenir l'exécution de vos engagements, sans préjudice des dommages
et intérêts que nous serions alors en droit de vous réclamer.
Variante : Ce nouveau délai est impératif et s'il ne devait pas être respecté, nous serions contraints d'acheter ces
marchandises chez un de vos concurrents en mettant à votre charge l'éventuelle différence de prix et ceci, sans
préjudice des dommages et intérêts que nous serions alors en droit de vous réclamer.
Veuillez recevoir, Monsieur (Madame), l'expression de nos salutations distinguées.
Annexe n°3
Modèle de clause à insérer dans les Conditions Générales de Ventes (CGV)
« Les marchandises voyagent aux risques et périls du client, auquel il appartient de vérifier le bon état des
marchandises au moment même de leur livraison »
Annexe n°4
Modèle de protestation motivée
Lettre Recommandée avec Avis de Réception
Monsieur (Madame),
Le … (date), vous nous avez livré un envoi de … (identification de l’envoi : nombre de colis, poids, nature de la
marchandise), en provenance de la Société … (nom ou dénomination de l'expéditeur), sous couvert d’une lettre de
voiture (ou d’un bon de livraison) n°…
Un contrôle quantitatif et qualitatif nous a amenés à porter sur le document de transport les réserves
suivantes : …
En complément de ces réserves immédiates, nous sommes aujourd’hui en mesure de vous préciser
… (si la chose est possible, fournir des détails sur la nature et l’étendue des dommages)
Ou
Un contrôle opéré en présence de votre conducteur a fait ressortir l’existence de … (avaries ou
manquants) concernant lesquels (elles) des réserves vous ont été immédiatement adressées par
téléphone.
Conformément aux prescriptions de l’article L. 133-3 du Code de commerce, nous protestons contre la mauvaise
exécution de ce transport, pour laquelle nous considérons votre responsabilité comme seule et entièrement
engagée.
Nous vous ferons connaître dès que possible le montant exact de notre préjudice, dont tout donne penser qu’il
sera important.
Veuillez recevoir, Monsieur (Madame), l'expression de mes salutations distinguées.
Annexe n°5