L`article de Ciné Spectacles au format PDF
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CS 31-01-07 29/01/07 18:31 Page 6 «LA VIE DES AUTRES» : rencontre avec ATTENTION TALENT Il venait d’apprendre que son film était nominé aux Oscar 2007 quand le réalisateur est venu présenter La vie des autres au public du Gaumont… heureux élus puisque le cinéaste s’est déplacé dans seulement trois villes : Lille, Toulouse et Rennes. Au premier coup d’œil, on s’attend à un film sur la STASI - cette police d’état qui a sévi de 1950 à 1989 en RDA ex Allemagne de l’Est, le résultat est beaucoup plus riche : forcément quand on mesure 2,05 m qu’on porte un nom aussi long que le mien Florian HENCKEL VON DONNERSMARCK on s’est habitué au démesuré et j’ai donc appris très tôt à ne pas respecter les règles s’amuse le cinéaste. Mon film dure 2 h 17, le temps nécessaire pour arriver à l'équilibre exact. Le jeune réalisateur sait ce qu’il veut, chaque plan, chaque détail de son film est pensé, prévu et peut-être longuement expliqué et argumenté, les spectateurs de l’avant-première ont pu s’en rendre compte. L’aventure de La vie des autres commence par une citation de Lénine à son ami Gorki “La Passionata est ma pièce de musique préférée, quand je l’écoute, j’ai envie de caresser les têtes des gens et de leur dire des choses gentilles, alors que je dois continuer ma révolution.” Elle montrait à quel point une idéologie doit fermer son cœur aux émotions explique Florian HENCKE, il y avait là-dedans la trame d’un film, puis j’ai eu une vision d’un idéologue avec des écouteurs qui croyait qu’il allait écouter ce qu’il attendait, mais il entendait de la musique ! J’ai aussitôt commencé à écrire, puis je me suis documenté sur l’appareil d’Etat et l’histoire de l’Allemagne de cette période. Tâche facilitée par ses années passées à Berlin Ouest et ses visites à l’Est, le résultat est bluffant, j’ai tourné dans les locaux de la STASI après avoir recréé les décors d’époque. À l’extérieur le gris, le vide et la crainte sont omniprésents c’était une dictature brutale, prête à tuer, la seule qui revendiquait sa nature en s’appelant elle-même “dictature du prolétariat” , précise HENCKEL. La surveillance était partout, la police devait tout savoir sur tout le monde : la STASI recrutait des psychologues très fins, intelligents capables de briser les âmes, c’est pire que de briser les os. Quelle lecture privilégier ? Le film historique sur la STASI, le suspense policier, l’histoire d’amour, l’hymne à l’ouverture d’esprit, à la culture, l’érotisme de Christa-Maria SIELAND ? Le tout servi par un casting de tout premier ordre sur une musique de Gabriel YARED. À la même époque, l’an passé, certains avaient résumé “Le secret de Brokeback Mountain” à l’histoire de deux cow-boys homos - raccourci bien pauvre. “Un type de la STASI chargé de surveiller un écrivain” serait tout aussi étriqué. Si vous voulez donner un bon tuyau à vos amis, dites leur que vous avez vu l’histoire d’un porteur de journaux dont la dernière phrase était “es ist für mich”* avec une petite lueur de fierté dans l’œil comme celle qu’aura peut-être Florian HENCKEL VON DONNERSMARCK en mars prochain à la cérémonie des Oscar. *C’est pour moi R.M. D’autres photos sur www.cine35.com 6 Photo Benoît Meudec Florian HENCKEL VON DONNERSMARCK réalisateur