dISPARItIOn dE LA hOLdIng 1929 Et ALtERnAtIvES

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dISPARItIOn dE LA hOLdIng 1929 Et ALtERnAtIvES
TAX
2010 LETTRE D’INFORMATION n°.1
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Disparition de la Holding 1929 et
alternatives luxembourgeoises
vues sous la loupe belge
L
e succès de ces sociétés holdings luxembourgeoises, appartenant pour la plupart
à des familles fortunées, se situe dans un
régime d’imposition très favorable provenant
d’une législation de 1929.
Il s’agissait pour le Luxembourg d’un véritable
pôle d’attraction qui s’est reflété par la création
de plus de 10.000 de telles Holdings 29.
Une exemption totale d’impôt sur les revenus, de
taxation sur les dividendes et sur les intérêts ainsi
que l’absence de tout impôt foncier- ont fait le
succès des Holdings 29. Les seuls impôts à charge
d’une Holding 29 sont en effet un droit d’apport très réduit ainsi qu’une taxe d’abonnement
de 0,2%. Au niveau international, la Holding
29 a depuis longtemps été considérée comme
bénéficiant d’un régime fiscal exorbitant du droit
commun et a été, à ce titre, exclue du bénéfice
de l’application des conventions préventives
de double imposition et des directives fiscales
européennes.
Sous la pression de la Commission Européenne
qui a estimé que le régime des Holdings 29 représentait une aide d’Etat interdite, le Luxembourg
a décidé l’abrogation de ce régime à partir du 1er
janvier 2007, avec un sursis jusqu’au 31 décembre
2010 pour les Holdings existantes.
Le Luxembourg a dès lors dû trouver des alternatives (fiscalement acceptables) à ce régime, dont
on peut dire que la « Société de Gestion de Patrimoine Familial » (SPF) est celle qui se rapproche
le plus de l’ex-Holding 29.
Quelle(s) solution(s) proposer à une personne
physique ou à un groupe familial qui veut créer
un nouveau véhicule de placement au Luxembourg ou qui se trouve dans l’obligation de
chercher un substitut à la société holding 1929
dont il est aujourd’hui actionnaire ?
Les véhicules
luxembourgeois
envisagés sont
les suivants :
• la Société de gestion
de Patrimoine Familial (SPF)
• le Fonds d’Investissement
Spécialisé (FIS)
• la Société d’Investissement
en Capital à Risque (SICAR)
• la Société de Participations
Financières (SOPARFI).
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Sous l’angle
juridique
Comme c’était le cas pour la H29, tous les véhicules luxembourgeois alternatifs proposés sont
ouverts à un "petit groupe" d’actionnaires.
La SPF est la seule entité où les actionnaires
doivent nécessairement être des personnes
physiques, encore que celles-ci puissent agir au
travers d’une entité ou société intermédiaire, si
cette dernière n’exerce aucune activité économique, industrielle ou commerciale.
De par la possibilité de créer des compartiments
étanches, le FIS et la SICAR permettent de
différencier dans les faits certains actionnaires
les uns des autres.
Face à la H29 – qui, dans la suite logique de
sa dénomination de « holding », ne pouvait
exercer d’activité industrielle ou commerciale,
ni détenir d’autres terrains ou immeubles que
ses propres locaux -, les autres entités ne sont
pas toujours plus contraignantes.
Il est vrai que la SPF ne peut pas prêter avec
intérêts (ce qui était permis à la H29 envers
des sociétés détenues) et que l’objet social
des deux OPC est plus orienté : la SICAR
doit investir dans du capital à risque (c’està-dire principalement dans des actions) et le
FIS a une obligation de diversification (avec
notamment aucun actif de plus de 30 % du
total) mais pouvant aller jusqu’à la détention
d’immeubles.
Par contre, toutes les alternatives permettent
la prise de participation dans tous types de
sociétés, même celles qui ne seraient pas de
capitaux; la SOPARFI, en outre, n’est soumise
à aucune restriction quelconque et est la seule
à pouvoir, par exemple, facturer des
management fees.
Sous l’angle fiscal
du véhicule
(détenteur de
placements belges)
Au niveau des dividendes perçus et à l’instar
de la H29 qui n’était visée ni par les directives
européennes ni par les conventions préventives
de la double imposition, la SPF et le FIS subiront
toujours en Belgique la retenue à la source
(25 % ou 15 %) mais ne seront pas imposés au
Luxembourg (sous réserve, pour la SPF, de ne
pas dépasser le seuil des 5 % de mauvais dividendes, provenant de sociétés non résidentes et
non cotées qui ne sont pas soumises à un impôt
comparable à l’IRC luxembourgeois) .
Pour la SOPARFI – pouvant prétendre aux
directives et conventions – la situation de la
retenue source belge sera la suivante :
•Aucune retenue à la source pour une participation minimum de 10% qui est (sera)
détenue durant au moins une année ;
•ou une retenue à la source de 10% ou 15%
dans les autres cas.
tandis qu’au Luxembourg, il y aura également non imposition moyennant le respect
des conditions d’exemption – semblables
aux belges
Pour la SICAR opaque (par opposition à une
SICAR fiscalement transparente, deuxième
forme de SICAR possible), l’exonération inconditionnelle des dividendes au Luxembourg
entraîne une relative incertitude au niveau du
précompte mobilier belge : l’exonération totale
issue de la directive mère-filiale serait a priori
impossible, tandis que les limitations à 10 ou à
15% prévues par la convention belgo-luxembourgeoise paraissent plus défendables.
Concernant les plus-values sur actions, l’exonération est assez générale : inconditionnelle pour
le FIS et la SICAR (comme ce l’est pour la H29) ;
sous réserve, pour la SPF, de ne pas dépasser les
5% de mauvais dividendes et, pour la SOPARFI,
moyennant le respect de certaines conditions
– notamment que les participations soient de
minimum 10% ou 6.000.000 euros - .
Pour ce qui est de l’encaissement d’intérêts par
la SPF et le FIS, la situation est fort comparable à celle des dividendes perçus : retenue à la
source de 15 % en Belgique et normalement
non imposition au Luxembourg (tel aujourd’hui
pour la H29).
La retenue à la source belge peut généralement être évitée pour la SOPARFI et la SICAR
(opaque) :
• soit sur base de la Directive Intérêts –
Redevances (en cas de participation de
25 % minimum dans la société belge)
• soit sur base de la convention Belgique –
Luxembourg (dans le cas inverse où la participation serait inférieure à 25 % et où le
prêt ne serait pas représenté par des titres;
ceci néanmoins avec une réserve quant à
l’applicabilité à la SICAR),
tandis qu’au Luxembourg, la première (SOPARFI) sera pleinement imposée mais la seconde
(SICAR opaque) sera exonérée si les intérêts
proviennent de valeurs mobilières.
Enfin, en contrepartie de leur non-assujettissement à l’impôt sur les revenus, précisons que la
SPF et le FIS sont assujettis à une taxe d’abonnement annuelle de respectivement 0,25% et
0 ,01% sur leur patrimoine (contre 0,20 % pour
la H29), sachant que cette taxe est plafonnée à
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TAX
125.000 euros pour la SPF et que le FIS peut en
être exempté en fonction des investissements
qu’il effectue.
Sous l’angle fiscal de
l’investisseur belge
personne physique
Seuls les dividendes distribués par la SOPARFI
subissent une retenue source au Luxembourg,
au taux interne et conventionnel de 15 %.
En Belgique, la taxation sera de 25 ou 15 %
quel que soit le véhicule, entraînant une double
imposition dans le cas de la SOPARFI.
Pour les distributions de liquidation, le régime
est similaire dans tous les cas : absence de
retenue source au Luxembourg et taxation à 10
% en Belgique sur la distribution dépassant le
capital libéré.
Concernant les plus-values sur les titres du véhicule quel qu’il soit, l’imposition dévolue à la
Belgique ne sera effective qu’en cas de revenus
divers (spéculation, gestion anormale, …).
Pour les intérêts, quel que soit le cas, il n’y aura
pas de retenue source au Luxembourg et imposition à 15 % en Belgique. Avec une nuance :
le prélèvement supérieur au Luxembourg pour
l’état de résidence, sur les intérêts versés par la
SPF, si le prêteur n’accepte pas la communication de son identité au fisc belge.
On notera encore le cas un peu particulier d’un
FIS de type FCP (Fonds Commun de Placement)
avec un éventuel prélèvement à Luxembourg
pour l’état de résidence en cas de distribution
par le fonds ou de vente de ses parts, si celui-ci
est trop investi en créances (15 % ou 40 %
selon les hypothèses).
Sous l’angle fiscal
de l’investisseur
belge société
Seuls les dividendes provenant d’une SOPARFI
sont potentiellement soumis à une retenue à la
source de 15 % au Luxembourg.
Toutefois, celle-ci pourra être évitée si la société
belge détient ou s’engage à détenir, pendant
une période ininterrompue d’au moins 12
mois une participation minimum de 10 % ou
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1.200.000 euros dans la SOPARFI ; et elle se
limitera à 10 % dans le cas d’une participation
(depuis le début de l’exercice social) de minimum 25 % ou d’une valeur d’acquisition d’au
moins 6.197.338,12 euros.
En Belgique, les dividendes seront pleinement
imposables à l’I.Soc. s’ils sont distribués par
une SPF ou un FIS (à l’instar d’une H29).
Par contre, dans le cas de la SICAR (opaque)
et de la SOPARFI, ils pourront être exonérés à
95 % s’ils remplissent les conditions du régime
RDT, conditions qui seront il est vrai rarement
rencontrées par une telle SICAR.
Le traitement fiscal du boni de liquidation est
semblable à tous égards à celui des dividendes,
à la différence qu’il n’y aura jamais retenue à la
source au Luxembourg, même au niveau de la
SOPARFI.
Relativement aux plus-values sur les titres du
véhicule quel qu’il soit, l’imposition dévolue à la
Belgique impliquera, comme pour les dividendes encaissés, d’un côté, une taxation pleine
dans le cas de la SPF ou du FIS (comme pour
la H29) et de l’autre, une exonération certaine
pour la SOPARFI ou conditionnelle pour la
SICAR (opaque).
à des investisseurs « avertis » et soumis à une
règlementation/surveillance financière. Toutefois, si ce cap – nullement infranchissable – des
contraintes juridiques est dépassé, le FIS n’est
pas imposé sur ses revenus et la SICAR, plus
subtilement encore, tout en étant pleinement
imposable, est exonérée sur les revenus de
valeurs mobilières – ce qui, certes, complique
la fiscalité de ses opérations internationales
mais n’empêche pas nécessairement l’application des directives européennes et conventions
bilatérales -.
Ceci étant, tout choix entre ces diverses entités
ne pourra, bien sûr, s’opérer que sur base de
paramètres concrets (type d’investisseurs,
nature des investissements, opérations à terme
envisagées,…) et suite à une analyse spécifique
des législations concernées, allant plus en profondeur que n’a pu le faire le présent article.
Il est enfin évidemment possible d’envisager
une structure alternative belge, via un apport
de placements de trésorerie dans une société
belge et la transformation de la Holding 29 en
une SOPARFI.
La Belgique demeure également un pays très
attractif pour les sociétés holdings.
Enfin, pour les intérêts, le régime est identique
sur toute la ligne: pas de retenue à la source au
Luxembourg et taxation pleine à l’I.Soc. belge.
Conclusions
Thierry Servais
[email protected]
Dans quelques mois la Holding 29 aura vécu.
Pour les résidents des pays avoisinant le Grand
–Duché de Luxembourg, il s’agissait d’un outil
de détention et de placement bien connu et
apprécié pour sa fiscalité avantageuse.
Jean Dulak
[email protected]
BDO Conseils Fiscaux
L’analyse comparée ici effectuée des alternatives mises au point par le gouvernement luxembourgeois montre, à bien des égards, que cette
disparition se trouve largement compensée par
l’activation de divers (nouveaux) véhicules.
Dans ce cadre, l’on songe généralement à la SPF
– ressemblant le plus à la H29 mais réservée à
des actionnaires personnes physiques ou sociétés (que ces personnes physiques contrôlent)–
ainsi qu’à la SOPARFI – ayant un régime assez
comparable à celui de la « holding » belge -.
Moins évidents sont le FIS et la SICAR, destinés
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