1. la reine des abeilles: besoin d

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1. la reine des abeilles: besoin d
ON NE PEUT PAS
ME PENETRER
LILLE 2009
Docteur Nadine GRAFEILLE
Directeur de l’enseignement Universitaire de Sexologie
Bordeaux
Nature et diagnostic du vaginisme

Nature: impossibilité d’être pénétrée.

Le diagnostic est posé sur la base de interrog. complété
de l’examen clinique (ou plutôt de son impossibilité). 
DSMIV (F52.5) : Spasme involontaire, répété et persistant, de la
musculature du 1/3 externe du vagin, survenant lors de toute tentative de
pénétration (doigt, tampon, spéculum, verge). Chez certaines femmes la
simple anticipation déclenche cette contracture. L’affection est à l’origine d’un désarroi. Il n’y a pas de trouble du désir, de l’excitation, du plaisir.
Epidémiologie
Prévalence: enquêtes laissent septiques car
pourcentages discordants:
 1970: Masters W. et Johnson V.: 29 cas en 11
ans.
 1982: Grafeille N: 100 cas en 5 ans.
 1999: Reissing, Elke, Binik and coll.: Does
vaginismus exist?
 2006: Colson M.H cite un travail Italien auquel
à participé A.Giami: 29% des motifs de consult.
 2007: Grafeille N.: 20 à 30% de la pathologie F.
Epidémiologie

12 à 17% de femmes seraient concernées selon les
sexologues américaines Hyde et Delamater.

Babael and coll (1999) indiquent une prévalence du V.
de 8% chez les femmes âgées de 16 à 53 ans (centre
de planning familial).

45 % dans certaines populations d’ Afrique parce que confondu notamment avec une dyspareunie.
Fréquence moyenne probable

Distinction entre vaginisme et dyspareunie faite
par francophones depuis 1976 et anglo-saxons
depuis 2005.
Donc 20 à 25% serait le plus réaliste si on utilise
tous les critères.
Démarche en couple de 30% à 90%.

2008: 200.000 chats sur sites francophones.


Toutes ces enquêtes mettent en
évidence différentes formes cliniques

V. primaire: diagnostic d’inclusion.

V. secondaire: comorbide à * (on ignore ce qui a commencé et ce qui

Autres possibilités**: V. selon gravité : global, situationnel,
est le plus important influence réciproque). Traumatisme sexuel (Silverstein
1989: 40%), cause organique de départ (Badeau 2000, Reissing 1999).
chronique.
*Pf Charles Morin Psy. Québec/
**Sur 23 études (2300 patientes) V.1: 15 études, V.2. 4; V.3:4 V.
Ces enquêtes épidémiologiques
conduisent aux motifs de consultation



Problèmes de stérilité, de non consommation de
mariage, d’une sexualité incomplète, de tensions (conflits de couple), rarement de
séparation ou divorce (statistique).
Demande d’ enfant (++) or C.O, de conformité / autres F et H, d’ épanouissement (-).
Or démarche après 2 à 25 ans de souffrance.
Cercle vicieux du vaginisme
Contraction
réflexe
Peur de
La douleur
Angoisse
Contre
attitude
perception
douleur
Mécanisme psychologique





La V. voit et sent ce qu’elle croit. Le vagin n’existe pas, ou s’il existe il est étroit ou fermé, et « désorienté ».
La dynamique sexuelle n’est pas imaginée.
Phobie de pénétration et réponse conditionnée (Kröger et
Freed 1950) de type pavlovien ou skinnerien.
« Je sais bien … mais quand même » disait Freud.
Anxiété de pénétration devient celle du
couple*. Le déni c’est « contagieux ».
* Grafeille N , Colson MH, Crépault C.
Caractéristiques des femmes
vaginiques
Etude de Hawton et Catalan (1990):




27% des F ont croyances religieuses fortes, 20% ont déjà eu TT
pour autre problème psy, 7% abus sexuel.
Ces couples ont bonne relation, 90% ont orgasmes, peu ou pas de
partenaire antérieur, pas de relations extra maritales, pas
d’aversion.
Education conservatrice, attitude parentale « oppressive », parlent
de virginité, de violence sexuelle et de risques.
62% se sentent coupables, 65% se pensent non traitables, 39%
corps sans attrait.
Caractéristiques des femmes
vaginiques


Ward et Ogden (1994) insistent sur le
besoin d’approbation de la sexualité (90%), évitent les conflits (68%), rêves de
viol (64%).
Cabanis: le vaginisme les protège contre
quelque chose de menaçant sur le plan de
l’ intimité. Caractéristiques des femmes
et de leur partenaire
Grafeille 1982 - 1986: Etudie l’idée que ces couples ont du sexe, de la relation sexuelle, mais aussi celle des
parents.
 Sexe sale ou honteux, hymen doit être déchiré, image
du sexe est désaxé, coït dommageable;
 Angoisse de castration avec culpabilité de l’expérience génitale accentuée par existence d’un père autoritaire, une mère « sacrée » ou absente;
 Couple: phobies /douleur / coït / sang / viol / MST /
grossesse / cancers, conceptions inappropriées
(respect, infidélité, pénis captivus), image de sexualité
parentale négative.
Le partenaire


Partenaire: éducation rigide, dysfonctions sexuelles :
EP, DE: plus de 50%; homosexualité latente 6% ;
désintérêt / sexualité adulte.
La personnalité du partenaire*: parfois RAS, mais
souvent doux, timide, peu pénétrant, maladroit,
problèmes (sexuels ou autres). Parfois trop attentif est
source d’angoisse. La femme vaginique accorde attention au moindre signe.
* Grafeille, Colson
Or le choix du partenaire n’est pas neutre, ni dû au hasard.


« Quelles angoisses d’engagement participent au choix du partenaire ? L’essentiel de la collusion est une interaction intense basée sur
une correspondance des angoisses et des
demandes relationnelles immatures ».
« Cette collusion favorable au début précipite le
retour du refoulé et crée une sorte de polarité. »
Jorg Willy (Suisse) et Francesco Albéroni (sociologue italien 1989).
Profil psychologique des femmes
vaginiques

D’après Friedman:
1.
La reine des abeilles: besoin d’enfant, désintérêt/sexe. Sexualité = danger, maternité.
La belle au bois dormant: éducation stricte et tabous de
virginité et peur défloration, méconnaissance du corps,
carence (déni) informative, polyphobique, attente .
Sexualité = peur, dégoût, culpabilité, attente.
Brunehilde et la reine vierge: haine des hommes, lutte
de pouvoir, besoin de décider et contrôler, de justifier,
homosexualité latente. Sexualité = combat.
2.
3.
Au total: différents facteurs

1°) Facteurs de vulnérabilité : antécédents familiaux, éducation,

2°) Facteurs précipitant : désir d’enfant, âge, séparation, sœur, mère, tante, partenaire (soit problème, soit désir de sexualité).

3°) Facteurs perpétuant la difficulté de départ: d’autres facteurs se créent et augmentent la crainte. C’ est l’anticipation de l’échec. Ces femmes choisissent des partenaires hypo rassurants,
hypo actifs, hypo expérimentés, quand ce n’est pas falots (et inverst).

Le travail thérapeutique visera à diminuer voire supprimer ces facteurs
d’entretien du problème. Travailler en circularité (Reynaert).
anxiété, névrose phobique: ça s’apprend, ce n’est pas génétique. Souvent des femmes hyper craintives avec des croyances irraisonnées, des dénis.
Prise en charge thérapeutique

C’est l’évaluation (systémique M. Elkaïm 2008) de départ qui
dictera la conduite à tenir. Evaluer la fonction du
symptôme avant de le supprimer. « Le symptôme pointe
ce qui n’est pas dit; s’interroger sur le sens qu’a cette dysfonction / au couple est essentiel ». R. Porto.

Comprendre le degré d’anxiété du couple et le niveau de l’impossibilité de faire face à angoisse de pénétration (chez femme et partenaire).
Prise en charge thérapeutique


Cibler les attentes du couple: réalistes ou non
(croyances erronées); respecter le choix des
patients, mais le magique est demandé. Quel
est leur but ? Procréer, accéder à la pénétration,
rester en couple, obtenir une performance, avoir
une sexualité épanouie.
Hiérarchiser et résoudre les difficultés les unes
après les autres. Patience.
Prise en charge thérapeutique


Le partenaire: son (in)expérience, ses craintes,
allié thérapeutique ou charge; comprendre ses
propres problèmes psychiques et (ou) sexuels.
La difficulté d’aboutir dépend beaucoup de l’existence ou non d’une problématique chez le partenaire. « Le potentiel thérapeutique du partenaire
est généralement sous employé. Il constitue un co
thérapeute naturel parfois efficace. » R. Porto.
Résultats de prise en charge



Impossible de comparer les résultats car
thérapies dites à composantes variables donc
combinaison de plusieurs TTT.
Si patiente s’implique seule résultats peu probants, si en couple bon pronostic.
La non prise en charge thérapeutique aboutit à
une chronicité.
Badeau, Colson, Crépault & Lévèque, Grafeille.
Prise en charge




Les psychanalystes interprètent le V. comme symptôme
de conversion et proposent psychoTTT de type
analytique.
Les comportementalistes interprètent le V. comme
réflexe appris dû à expérience réelle ou fantasmée * et
proposent TCC.
Multiples propositions TTT: thérapie de couple (M & J),
TCC, relaxation, hypnose, TTT analytique, botox.
Aucune méthode ne peut apporter toutes les réponses
positives.
* Schwendke-kliem A., Bitzer J, Colson, Grafeille, Reissling.
Résultats de la prise en charge
Sommaire des données probantes.
 70 à 80% des personnes bénéficient de TCC.
 Peu deviennent des femmes épanouies à tous
les niveaux de leur sexualité.
 Gain thérapeutique maintenu à long terme.
 Résultat plus satisfaisant si V. 1aire ou simple.
Si comorbidité (si partenaire a aussi problème)
c’est plus complexe.
 *Crépault, Faye, Harrison,Wright.
Résultats






Masters W. Johnson V.: 1970: 100% succès!
O’Sullivan et Barnes: 1978: 52% succès.
Grafeille N.: 1982- 94: si pénétration seule: 85%,
si épanouissement de sexualité 65%.
Hawton et Catalan (1990) 61%.
Harrison (1996) 69%.
Ghazizadeh (2005) 95,8%.
Conclusion(1)


Problème de santé publique, fréquent,cause de
mariage non consommé, conséquences sur
procréation, sur couple, sur société, nécessite
prise en charge adéquate (peu connue, 12 à 30
séances de 30 minutes).
Ne pas sous estimer le rôle du partenaire dans
la révélation, le maintien, le pronostic.
Conclusion(2)


La possibilité qu’une femme a d’accéder à cette intimité, ce « rentré dedans » diminue avec l’âge, est lié à l’acceptation (ou non) corporelle, à sa personnalité, mais surtout à la relation d’intimité qu’elle est capable d’admettre de son compagnon. Un apprentissage progressif permet de diminuer l’image d’effraction et conduit à l’idée que l’intimité c’est aussi dedans. La personnalité du couple et sa dynamique interfèrent
sur la mobilisation des blocages réciproques au point
que la prise en charge en sera conditionnée.
BIBLIOGRAPHIE
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