Humour sans frontières - RECIT des Samares

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Humour sans frontières - RECIT des Samares
Situation d’évaluation
Deuxième cycle
Troisième secondaire
MAI-JUIN
2011
Humour sans frontières
Nom :
Date :
Groupe :
BIM
Société GRICS / Adaptation Commission scolaire des Samares 2011
Humour sans frontières
Dossier rire
INTRODUCTION .................................................................................................................. 1
Textes 1 à 9
1. TROIS THÉORIES EXPLIQUENT POURQUOI L’ON RIT ....................................................................
2
2. QU’EST-CE QUI FAIT RIRE LES QUÉBÉCOIS ? .............................................................................
5
3. DIFFÉRENTES FAÇONS DE CLASSIFIER L’HUMOUR .......................................................................
8
4. AVIS AUX NOUVEAUX IMMIGRANTS .......................................................................................10
5. LE PLUSILLANISME ..........................................................................................................13
6. L’HUMOUR en BD ...........................................................................................................15
7. LES PATENTEUX ............................................................................................................18
8. D’OÙ VENONS-NOUS? ......................................................................................................19
9. UNE ABOMINABLE FEUILLE D’ÉRABLE SUR LA GLACE ..................................................................22
FEUILLE DE NOTES PERSONNELLES
BIM
.........................................................................................25
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Humour sans frontières
Dossier rire
INTRODUCTION
QUEL EST LE DIVERTISSEMENT NUMÉRO UN AU
QUÉBEC DEPUIS LE DÉBUT DES ANNÉES 1990?
Si on ne répond pas à cette question en plaçant
l’humour en tête de liste, il y sûrement erreur.
Qu’on le veuille ou non, les Québécois semblent
faire du rire un trait national. (Festival Juste
pour rire, École nationale de l’humour, Musée
Juste pour rire).
L’humour a envahi la société québécoise. On
dit d’ailleurs que le Québec produit le plus
grand nombre d’humoristes par tête de pipe au
monde. L’humour est sûrement le produit
culturel qui rapporte le plus, tant à la
télévision, à la radio, qu’en salle de spectacle
ou dans la publicité. L’humour a même son
musée, son école, son gala et, évidemment, son
festival.
AIRD, Robert. L’histoire de l’humour au Québec, de 1945 à nos jours, VLB éditeur, Montréal, 2004, 166 pages
Note :
Le Musée Juste pour rire a fermé ses portes en décembre 2010.
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Humour sans frontières
Dossier rire
Texte 1
Trois théories expliquent pourquoi l’on rit
Qu’est-ce qui nous fait rire? Délicate question, à laquelle philosophes et
psychologues répondent par trois théories : l’incongruence1(sic), le
soulagement et la supériorité. Reste que l’humour varie aussi selon l’âge, le
sexe ou la culture
Ce sont deux chasseurs qui marchent dans les
bois. Soudain, l’un d’eux s’écroule. Il semble ne
plus respirer; ses yeux sont fixes. Paniqué, son
compagnon appelle le Samu2 « Mon ami est
mort! Qu’est-ce que je dois faire? » « Calmezvous, lui répond-on. Et d’abord, assurez-vous
qu’il est bien mort... » Silence. On entend une
détonation de fusil. Le chasseur reprend le
combiné : « Voilà, c’est fait. Et maintenant,
qu’est-ce que je dois faire? »...
Proposée parmi 40 000 autres, cette blague a
été élue en octobre 2002 « meilleure
plaisanterie du monde », à la suite d’un
sondage effectué par le psychologue
britannique Richard Wiseman, de l’Université de
Hertfordshire (Royaume-Uni), et réunissant 2
millions de votants. Il s’agissait d’une énième
tentative de chercheurs pour comprendre ce qui
nous fait rire, une question terriblement
complexe. Comment, en effet, fouiller dans la
psychologie d’un comportement aussi instinctif
que le rire? Un défi qui ne date pas d’hier :
depuis Platon, philosophes et psychologues ont
tenté de percer le secret de l’humour. Jusqu’à
élaborer, pour ces derniers, diverses théories,
dont trois d’entre elles synthétisent les
différentes situations qui déclenchent le rire :
l’incongruence (sic), le soulagement et la
supériorité.
Le rire naît de décalage
« Monsieur, votre chien a aboyé toute la nuit»
« Ce n’est pas grave, il dort toute la journée. »
Nous sommes ici
dans une situation d’incongruence (sic),
première théorie de l’humour, développée par
Aristote, puis reprise par Emmanuel Kant deux
mille ans plus tard. Dans ce cas, le rire naît
lorsqu’il y a décalage entre la réponse attendue
et la réponse réelle. Au début d’une histoire
drôle, notre cerveau anticipe naturellement
l’issue logique. Dans notre exemple, on s’attend
à ce que le maître s’excuse du comportement
de son chien.
Mais la chute de la blague est illogique. Notre
cerveau est un instant perplexe; il cherche une
nouvelle solution... et comprend le décalage. De
là naît l’humour, et donc le rire. Comment le
cerveau reconnaît-il qu’une telle réponse
illogique tient de l’humour, et non de la simple
erreur? L’effet comique provient de la
découverte que cette réponse en apparence
irrationnelle est le produit d’une autre logique
que celle attendue. Alors que s’il s’agit d’une
simple erreur, il n’existe tout bonnement aucune
explication... et donc aucune raison de rire.
Précision : l’incongruence (sic) ne dépend pas
forcément d’un effet de surprise. On peut aussi
rire d’un gag régi par cette théorie, même si on
connaît sa chute. Un exemple : après avoir vu
dix fois le célèbre film, Le Père Noël est une
ordure, le spectateur continue de rire des
mêmes dialogues et des mêmes ressorts
comiques. Car la capacité du cerveau à
«naviguer» entre la chute attendue d’une
situation incongrue et la chute réelle demeure.
Or, c’est cette simple opération mentale qui
provoque l’amusement, même s’il n’y a pas
d’effet de surprise.
1 Incongruence (sic) : Le terme n’est pas attesté, il faut utiliser incongruité.
2 Samu : En France, service d’aide médicale urgent disposant d’unités mobiles (voitures, hélicoptères) équipées pour assurer les premiers soins
aux victimes d’accidents et les transporter vers un centre hospitalier.
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Humour sans frontières
Dossier rire
Deuxième théorie de l’humour : celle dite du
soulagement. Une maman joue avec son bébé.
Soudain, elle cache son visage dans ses mains,
puis les rouvre pour lui faire «coucou». Le bébé
se met à rire. Devant une situation tendue, nos
émotions sont en éveil. Le stress monte. Ici, le
bébé se demande ce qu’il y a derrière ces
grandes mains. Puis il découvre un visage connu,
celui de sa maman. Le rire arrive alors pour
soulager la tension. Ce ressort est très souvent
utilisé dans les films d’action ou les dessins
animés. Le réalisateur fait monter le suspens au
maximum, puis brise la tension par un ressort
comique. Le rire de soulagement apparaît aussi
lorsqu’on est nerveux (par exemple, aux
enterrements...), ou confronté à une situation
dangereuse. Il permet alors de libérer toute la
tension contenue.
Un outil de régulation sociale
Des survivants racontent que, pendant la
Seconde Guerre mondiale, cachés dans des
abris alors que des bombes tombaient tout
autour, ils ne pouvaient s’empêcher de rire.
Troisième situation : un clown trébuche sur un
ballon et tombe la tête la première sur... une tarte
à la crème. Le public s’esclaffe. Ce cas illustre la
théorie de la supériorité. Cette fois, nous nous
moquons des erreurs de quelqu’un, de son
ridicule, de sa malchance ou de sa bêtise
(«Hélas», disait Jerry Lewis...). En fait, le rieur se
sent ici supérieur et rit des faiblesses d’autrui.
Dans la mesure où nous ne sommes par
directement impliqués dans les conséquences
désagréables d’une telle situation, nous pouvons
en rire. Supérieurs, nous pouvons aussi avoir
l’impression de l’être face à un groupe de
personnes que l’humour va stigmatiser : les
fameuses blagues sur les blondes ou les Belges
entrent dans cette catégorie. Pour certains
chercheurs, la théorie de la supériorité s’explique
encore autrement : on rit dès que nos codes
comportementaux et nos repères sociaux sont
brisés. Un jeune homme arrive à une soirée
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mondaine déguisé en fille : il transgresse les
codes du groupe et déclenche l’hilarité.
Un rire qui permettrait à la société de
«s’autoréguler» et de savoir quand un
comportement est hors norme. Des nombreux
essais littéraires et philosophiques traitant du rire,
(c’est par exemple le cas de plusieurs écrits de
Sénèque, de l’ouvrage Anatomie de la mélancolie
du penseur anglais du XVIIe siècle Robert Burton,
ou encore de passages contenus dans le célèbre
traité Critique de la raison pure de Emmanuel
Kant), on retiendra surtout celui, devenu
célébrissime, de Henri Bergson, proche de la
théorie de la supériorité.
L’art de la caricature
Dans son ouvrage intitulé Le rire. Essai sur la
signification du comique, publié en 1911, le
philosophe français Bergson écrit que «les
attitudes, gestes et mouvements du corps humain
sont risibles dans l’exacte mesure où ce corps
nous fait penser à une simple mécanique». On va
rire par exemple d’un homme qui tourne
mécaniquement la tête pour suivre du regard une
jolie fille dans la rue... et se cogne contre un
poteau. Ou de Charlot, dans Les Temps
modernes, qui continue de serrer des boulons,
même lorsqu’il ne travaille plus à la chaîne. Dans
les deux cas, l’homme se comporte comme un
robot. Le rire apparaît alors, comme pour
protéger la vie contre les assauts de la
mécanique.
Au-delà de ces trois techniques humoristiques,
force est de constater que nombre de scènes
nous font rire parce qu’elles amplifient à l’excès
une situation réelle, jusqu’à la vider totalement de
son sérieux. Un ressort universel, utilisé
indifféremment par les trois grandes théories de
l’humour. C’est le principe de la caricature, qui
consiste à exagérer un trait ou un comportement.
Mais si les ressorts de l’humour sont
universellement compréhensibles par tous, il est
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Humour sans frontières
Dossier rire
aussi des éléments tels que l’âge, le sexe ou la
culture des rieurs qui influent sur son efficacité.
Ce qui fait rire un groupe d’adolescents dans la
cour de récréation de collège est très différent de
ce qui fait rire leurs parents.
Car il nous arrive aussi parfois de rire seul. En se
remémorant une situation comique, en lisant, en
regardant un film, ou même en rêvant, seul à son
bureau. Rien d’anormal à ce comportement,
puisque l’individu se replace alors virtuellement
dans un contexte social. Reste que l’on rirait
trente fois moins en solitaire qu’en groupe.
On rit mieux en compagnie
Yonna Sultan / Science et Vie 1051
Le sexe module également notre perception de
ce qui est drôle. Des études menées en 1993 par
un neurobiologiste américain montrent par
exemple que l’homme rit plus fort et plus
longtemps lorsqu’il est en présence d’autres
camarades du même sexe. La femme, elle, a
tendance à rire davantage lorsqu’elle écoute un
homme parler... alors que l’homme rit peu en
écoutant une femme.
Et il est encore un paramètre qui détermine
considérablement l’efficacité de l’humour : la
présence d’autrui. Des tests en laboratoire l’ont
prouvé : lorsqu’un volontaire visionne des
sketches comiques, seul dans une pièce, il ne se
déride pas vraiment. Alors que s’il regarde
exactement les mêmes sketches, mais cette fois
en groupe, il s’esclaffe! La présence de l’autre
agirait donc comme un « stimulant » du rire...
mais pas comme une condition sine qua non.
Piste de réflexion...
Que retenez-vous de ce texte?
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Dossier rire
Texte 2
QU'EST-CE QUI FAIT RIRE LES QUÉBÉCOIS?
Que le Québec aime rire, cela est bien connu et, tout compte fait, plutôt
réjouissant. On peut, toutefois, commencer à s'inquiéter quand ce rire se
suffit à lui-même et que tout geste ou parole comique se désamorce en
s'inscrivant dans la molle idéologie du «juste pour rire». L'humour, alors,
tourne à vide, privé de la charge libératrice qui lui donne sa noblesse et
sa dignité […]
Robert Aird, dans son excellente Histoire de l'humour au Québec de
1945 à nos jours, suggère la thèse selon laquelle «le comique de
scène est lié directement à la conjoncture politique, sociale,
culturelle et économique du moment». En d'autres termes, à tel état
social correspond tel rire. Aussi, faire l'histoire de l'humour au
Québec permet à la fois de mieux comprendre l'évolution de notre
sens du comique et celle de notre société.
Louis Cornellier,
journaliste,
écrivain et
professeur de
littérature au
Cégep régional de
Lanaudière à
Joliette, livre ici
une critique de
l’ouvrage de
Robert Aird,
L'Histoire de
l'humour au
Québec de 1945 à
nos jours.
Cet extrait retrace
l’évolution de
l’humour
québécois.
Du burlesque à la contestation
Dans les années 1930 et 1940, le burlesque, au Québec, a la cote. Boudés par
l'élite qui les trouve vulgaires, les Arthur Pétrie, Jean Grimaldi et Rose Ouellette
cartonnent. Grâce à un discours qui procède, le temps d'un spectacle, au renversement des rôles
dominés/dominants et qui met en avant un «réalisme grotesque qui marque la prédominance du
principe de la vie matérielle et corporelle» au mépris du discours dominant, les «burlesquers» (le
genre est d'origine américaine) font la joie des Canadiens français dominés. La ville, ici, n'est pas
diabolisée, la femme (souvent la Poune – Rose Ouellette) renverse l'autorité, les francophones se
moquent des anglophones et les pauvres ont le dessus sur les riches. On rit, on se console de nos
petites misères, […]
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Dossier rire
L'humour des cabarets, qui apparaît vers la fin des années 1940 avec les Jacques Normand, Paul
Berval, Dominique Michel et Claude Blanchard, marque un passage en douce de la tradition à la
modernité. La forme du comique se modifie et gagne parfois en raffinement, mais il s'agit, au fond,
plus d'un changement d'enrobage que de nature, même si les audaces langagières et thématiques
(la sexualité, entre autres) présentent une évolution par rapport à la période précédente. Les
cabarets ne survivront pas à leur réputation douteuse (liens avec la pègre) et à la popularité
grandissante de la télévision.
Et vint la Révolution tranquille. On devine déjà, suivant la thèse de l'historien, que, puisque «la
conjoncture joue un rôle déterminant dans la production humoristique», on entre ici dans l'âge d'or
de l'humour québécois. Au Québec en ébullition modernisatrice correspond, en effet, «un humour
critique, engagé et même contestataire». Désormais, le fatalisme et la résignation du Canadien
français, parfois suspendus le temps de quelques jokes, font place au désir de libération et à la
quête d'autonomie du Québécois. Les humoristes, qui partagent les valeurs à la base de ce
nouveau projet de société, transforment le rire en instrument de contestation des anciennes
valeurs qui résistent, mais aussi, et c'est là tout leur génie, des travers du nouveau pouvoir qui
s'impose.
Les monologues sociaux de Clémence DesRochers et d'Yvon Deschamps ébranlent le colonisé en
nous et, du même souffle, stigmatisent les préjugés persistants du nouvel être québécois. Sol
manie le calembour pour éveiller les consciences. Les Cyniques, maîtres dans l'art de la satire
sociale, tournent leur humour parfois raffiné et cruel contre les personnalités publiques qui
entravent la marche du progrès. Plus rien, ni la religion, ni les autorités publiques et policières, ni
nos propres travers, ne résiste à l'humour engagé de ces comiques qui pensent. Yvon
Deschamps, le plus brillant d'entre tous, incarne à merveille ce rire intelligent et libérateur d'un
Québec qui fête son printemps sans par ailleurs se raconter d'histoires sur lui-même.
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De l'absurde et de la bêtise
Au début des années 1980, changement d'attitude. Les Lundis des Ha!Ha!, inaugurés en 1983 par
Claude Meunier et Serge Thériault, appartiennent, en effet, à un univers différent dans lequel
règnent l'apolitisme et l'abandon de l'engagement sur fond d'absurde et de triomphe de la bêtise
(Ding et Dong). […]
Si, chez Meunier, on retrouve encore un certain souci de
réflexion qu'illustrent des
thèmes comme
le manque
d'authenticité dans les rapports humains et «l'incommunicabilité
des êtres», ce glissement du comique vers la sphère
essentiellement privée n'en annonce pas moins l'humour de
plus en plus vide, narcissique et strictement commercial qui
suivra et dont il a été question en introduction.
Piste de réflexion...
L’humour québécois s’est
transformé au fil des ans.
Tracez le portrait de cette
transformation.
L'humour qui dépasse le simple divertissement, «qui en appelle
à la réflexion, à la responsabilisation, à la critique» et «qui
redécouvre son intensité transgressive» est-il encore possible
au Québec? Robert Aird en trouve des traces chez Daniel
Lemire qui, malgré son cynisme, «vise souvent les détenteurs
du pouvoir», «semble prendre le parti des moins nantis et ne
tombe surtout pas dans un humour bas de gamme», […] et
surtout, chez Les Zapartistes, qui refusent le cynisme, «croient
encore aux idéaux d'égalité, de justice sociale et de liberté» et
permettent ainsi au citoyen de redécouvrir «l'essence du rire
libérateur». […]
Source : Louis Cornellier
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Le Devoir, 30 avril 2004
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Texte 3
DIFFÉRENTES FAÇONS DE CLASSIFIER L’HUMOUR
LES TYPES D’HUMOUR – Daniel Mativat, auteur de L’humour ado, paru chez Triptyque à Montréal en
2001, reprend la classification en quatre types d’humour proposée par un Éric Smadja, un « expert du
rire » :
1) L’humour bête et méchant permet d’exprimer l’agressivité en attaquant sans pitié l’objet risible et en
renforçant par la même occasion, les mécanismes d’exclusion sociale (blagues sur les minorités, les
femmes, les homosexuels, etc.);
2) L’humour à caractère sexuel permet de libérer les pulsions sexuelles;
3) L’humour noir agit comme un mécanisme de défense en aidant à supporter les
situations douloureuses et le caractère tragique de l’existence;
5) L’humour absurde transgresse les idées reçues et le discours social généralement
admis.
PETIT RÉPERTOIRE DES THÈMES RISIBLES
CLASSIQUES (Daniel Mativat) :
☺ Les têtes de Turc traditionnelles : les étrangers, les marginaux,
les exclus;
☺ Le pouvoir politique et les travers de notre société;
☺ La sexualité et les rapports hommes-femmes;
☺ Le langage lui-même (transformations ludiques, jeux de mots).
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LES TYPES DE SITUATIONS COMIQUES
COMIQUE DE GESTES :
L'effet comique est produit par l'interprétation (par exemple : mimiques, grimaces, coups, chutes,
vêtements ou accessoires)
COMIQUE DE MOTS, QUI INCLUT LES JEUX DE MOTS :
L'effet comique est produit par les paroles (choix des mots, du niveau de langue, quiproquos, défauts de
prononciation, double sens, calembours, jurons, mots déformés, etc.)
COMIQUE DE MŒURS :
L'effet comique est produit par les usages d'une classe d'hommes ou d'une époque. C'est la satire d'un
comportement social.
COMIQUE DE SITUATION :
L'effet comique est produit par la situation d'un personnage dans l'histoire qui est racontée (surprises,
rebondissements, coïncidences, retournements, etc.).
COMIQUE DE CARACTÈRE :
L'effet comique est produit par la peinture des caractères (traits moraux propres à une classe d'êtres : la
personnalité, les manières, le phrasé, les défauts et les manies).
COMIQUE DE RÉPÉTITION :
L'effet consiste à répéter plusieurs fois les mêmes mots, les mêmes gestes ou la même situation.
DU BOUFFON À L’HUMORISTE
L’humoriste existait déjà au Moyen Âge, sous un autre nom : le
bouffon. Tantôt bouffons des rues, tantôt bouffons des rois,
ces personnages avaient pour but d’attirer l’attention, de faire
rire, pouvaient se permettre beaucoup de choses, le tout
excusé par la folie.
Source : Laurène Hoffmann – Revue Humoresques, 25, 2007 : L’humour québécois.
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Texte 4
AVIS AUX NOUVEAUX IMMIGRANTS
Vous venez de France, d’Haïti, du Zaïre, du Vietnam ou de n’importe quel pays normal. Vous avez
immigré au Québec durant l’été. Vous trouvez ça beau. Vous avez adoré le chaud soleil du mois de
juillet. Et les couleurs féériques de l’automne. Jeudi dernier, quand vous avez vu la première neige
tomber, vous avez été charmé. Une vraie carte postale. Pauvres nouveaux Québécois!
Il faut, à tout prix, vous prévenir. Il faut que vous sachiez. L’hiver, c’est une chanson de Black Sabbath!
La petite neige de jeudi dernier, ce n’était pas l’hiver. C’était la fin de l’été. L’hiver, c’est autre chose.
Vous n’avez encore rien vu. Et si vous n’êtes pas préparé psychologiquement à faire face à la musique,
vous allez disjoncter. Vous allez retourner chez vous! Et comme on vous aime, et que l’on veut vous
garder, laissez-moi vous apprendre quelle sera votre dure réalité.
Un matin de la semaine prochaine ou de la suivante, vous
allez vous lever, innocent. Vous allez sortir et paf! Ça va
vous frapper! Dans les gosses! Le froid! Il va faire moins dix
dehors. Avec le facteur vent, moins trente. Votre corps va se
demander ce qui se passe. Vous allez regarder autour de
vous. Vous allez tenter de trouver des gens pour vous
expliquer cette horreur. Mais vous n’allez voir personne.
Vous n’allez voir que des manteaux passer. Bien sûr, il y a
des gens dedans. Mais vous ne les verrez pas, tellement ils
sont emmitouflés. Vous, nu-tête, avec votre petit
imperméable, vous allez vraiment avoir l’air d’un touriste.
Parce que le Québécois de souche sait qu’il n’y a qu’une
façon de survivre à l’hiver, c’est de porter plusieurs couches.
Avant de sortir de chez lui, le Québécois de souche met une
camisole, une chemise, un chandail, un veston, des caleçons longs, des pantalons, des souliers, des
bottes, un manteau en doudoune, un foulard, des mitaines et une tuque. Ça lui prend une heure pour
s’habiller, mais quand il sort, il est prêt. Le Néo-Québécois tarde parfois à adopter cette pratique. Mais
habituellement, après sa troisième pneumonie, il se décide à aller acheter son Kanuk. Et il troque le béret
pour la tuque.
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Transi de froid, vous allez embarquer dans votre Peugeot. Vous allez essayer de la faire démarrer. Elle
ne démarrera pas. Elle est gelée, votre Peugeot. Vous allez devoir apprendre à pratiquer le sport national
du Québécois : réchauffer son char. Le Québécois passe l’hiver à réchauffer son char. Avant de se
coucher, le Québécois démarre son moteur pour être certain que son auto ne sera pas gelée, au matin.
Puis, il se lève durant la nuit pour répéter la manoeuvre. Et le matin, il se lève deux heures plus tôt. Une
heure pour s’habiller. Une heure pour réchauffer son char. Le Québécois ne dort pas l’hiver.
Après avoir appelé le CAA pour booster votre Peugeot,
vous allez finalement arriver au bureau. Bleu et ahuri.
Vous allez dire à vos confrères de travail : « Mais c’est
épouvantable, c’est la Sibérie, le corps humain ne peut
endurer cela. Merde! » Et c’est alors que vos confrères
vont vous répondre : « Ça, c’est rien. Attends en janvier!
» Et vous allez devenir blanc. Même si vous venez
d’Haïti.
Puis, de la fenêtre de votre bureau, vous allez voir la
neige tomber. Pas une petite neige folle, comme jeudi
dernier. Non. Une vraie chute de neige. Avec des gros
flocons, format Club Price. Vous allez trouver ça
magique. Enchanteur. Attendez de sortir dehors! Vous
allez dire votre premier tabarnak. Vous allez tomber sur le derrière. Parce que vous ne saviez pas que
c’était si glissant que ça. Et si vous ne vous êtes pas cassé une jambe, vous allez essayer de retrouver
votre Peugeot. Ensevelie sous un tas de neige de dix pieds. Vous allez devoir, pour la première fois de
votre vie, déneiger votre automobile. Avec vos pieds. Vous n’aviez pas prévu vous acheter une pelle.
Une pelle, dans votre pays, ça sert seulement pour enterrer les gens. Ici, ça sert tous les jours, pour nous
déterrer du banc de neige. Et vous allez voir que la neige, ça semble tout léger quand ça tombe, mais ça
pèse une tonne rendue au sol. Vous allez vous faire votre première hernie discale. Puis, si par miracle
votre Peugeot accepte de démarrer, vous allez prendre le chemin de votre maison. Vous n’êtes pas
rendu! En hiver, quand il neige, conduire, c’est du sport. Tout le monde se rentre dedans. Même les
Québécois de souche ne se sont jamais habitués à conduire l’hiver. Ils conduisent tout croche. Comme
vous. Vous allez sûrement rentrer dans le cul de quelqu’un. N’en soyez pas gêné. C’est normal. Dans
quelques secondes, quelqu’un va rentrer dans le vôtre. C’est ainsi. […]
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Dossier rire
Au bout de trois heures de pare-choc à pare-choc, vous allez finalement arriver chez vous, dans la
chaleur de votre foyer. Après avoir remis vos esprits en place, vous allez avoir le goût de manger au
restaurant et d’aller voir un bon film. Cependant, vous avez eu votre leçon. Vous savez quoi faire. Vous
mettez un gros chandail de laine. En dessous du manteau d’hiver que vous acheté ce midi. Et vous
sortez de chez vous. Vous n’aurez pas le temps de faire deux pas. Vous allez paralyser. Vous allez
devenir un gros glaçon. Un iceberg. Car voyez-vous, le soir en hiver, on ne sort pas au Québec. À moins
quarante, même les phoques restent dans leur bungalow. Tous les Québécois de souche savent ça. Les
soirs d’hiver, il n’y a qu’une chose à faire : regarder la télé. Si vous ne souffrez pas d’hypothermie
instantanée, vous allez réussir à faire demi-tour. Et à rentrer chez vous. Pour de bon.
Vous allez vous coucher, en vous disant que c’est
sûrement exceptionnel, que demain, ça ira mieux. C’est
pas exceptionnel du tout. Ça va être ainsi, tous les
jours, jusqu’au mois d’avril. Cent vingt jours d’enfer
froid. Vous êtes prévenu. Un homme averti en vaut
deux niaiseux. Il faut, quand même, que je sois honnête
avec vous, chers amis immigrants. L’hiver québécois
n’est pas exactement comme je le décris dans cette
chronique. Il est bien pire! Bon hiver, quand même!
Prenez soin de notre pays. Nous, on s’en va en Floride!
Piste de réflexion...
Qu’est-ce qui vous fait rire dans ce texte?
LAPORTE, Stéphane. Chroniques du dimanche,
Tome 1, Éditions La Presse, 2003, p. 64 à 67
ISBN 2-923194-01-2
Caricatures : Yohann Morin, magazine Safarir, numéro 232
Coup d’œil sur l’hiver québécois, janvier 2008, p.17, 18 et 19
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Texte 5
Le plusillanisme *
Quand j’ai vu le jour, c’était la nuit,
la peur m’a pris et m’a gardé...
J’ai toujours eu peur de tout.
La nuit j’entendais les symptômes qui rôdaient...
Tout petit j’avais peur des frémilles,
des escarmouches, des acariâtres...
Les bons et les méchants pignons, je savais pas...
les anamites, les sauterelles et les gorilles
même quand c’était trié sur le bolet, j’avais peur.
Plus tard, j’ai commencé à préambuler dans la rue
j’ai eu encore pluss peur. Je voyais personne
personne qui souriait! Que des gens pressés...
avec une tronche de citron... pressés pressés...
les soucieux tout gris, gris froncé...
et une cravate pour avoir l’air dans le coup.
Moi je me disais : mais qu’est-ce qu’ils ont?...
Et comme j’avais pas de réponse,
je me suis remis en questions...
— Ah, je vais vous en faire un son d’âge :
Weuheu! weuheueu...he...heu!
— Pôvre vieux monsieur ancien...
vous êtes dépérimé depuis longtemps?
— Ah! Dans mon jeune temps, c’était le bon
vieux temps... mais depuis le bon vieux temps
est devenu pluvieux... avant, on savait s’amuser,
on avait des centres d’attraction...
maintenant il nous reste que le centre de gravité...
c’est grave partout, sous toutes les lassitudes...
c’est l’immondialisation... et ça s’aggrave...
c’est l’aggravitation universelle!
Tenez, là-bas, ceux-là qui font un film,
ils ont pas l’air de s’amuser...
encore un film à dormir debout en bout,
j’en ai bien peur...
Là-dessus, moi, quand j’ai vu qu’il toussait à sa fin,
je laisse le vieux pour avoir du neuf,
et je trouve un type drôlement
sérieux qui criait dans un entonnoir :
Y avait justement là un vieux rassis sur un banc :
— Tout le monde en place!
— Pardon monsieur, je peux vous approcher?
— Vous pouvez toujours essayer, mais vous me rejoindrez jamais...
— C’est pour un sondage...
* Jeu de mots où Sol fait de l’adjectif « pusillanime » (qui signifie craintif, faible),
un nom avec « plus » pour désigner « la plus grande peur »
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— Ouille vous avez un gros cornet...
— C’est un mégaphone.
— Ah, ça va être un film drôle!
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Humour sans frontières
Dossier rire
Vous voulez rire?
On fait plus ça, des films drôle...
On fait seulement des drôles de films...
les gens veulent avoir peur...ils veulent
avoir des fripons partout... alors on fait des films
de science affliction...
— C’est vous le moteur en scène?
— Non, moi je suis son attristant,
chaque fois que je cris : silence! moteur!
ça tourne au drame!
— Je peux parler aux acteurs?
— Y a plus d’acteurs! Pshouitt... les acteurs!
Ils arrêtaient pas de nous faire des histoires...
Non mais ils se prennent pour qui?
Passqu’ils ont leur nom dans le cabotin du cinéma
ils s’imaginent qu’ils peuvent crever l’écran?
Ils font vraiment de la projection!
Y en a même un qui refusait de sauter du dixième
sans porter un cascadeur...
Il voulait une doublure!
Une doublure par une chaleur pareille!
Alors quand on a vu qu’ils voulaient pas jouer
leur rôle de décomposition, on les a virés! […]
Et c’est vraiment là que j’ai compris : on sourit
plus passqu’on a peur. Tout le monde a peur! […]
Ah mais ah mais... quand j’y pense :
c’est passqu’on est petit qu’on a peur!
Moi, par exemple, j’ai toujours été maigre.
Maigre comme un os qui a perdu son chien...
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Mais les gros... demande à un gros s’il a
peur, n’importe quel gros gras saturé :
— Pourquoi j’aurais peur?
J’ai l’embonpoint culminant!
Je sais, il me faudrait un régime...
et j’y pense, je pense qu’à ça...
Chaque matin je sens que le régime m’appelle.
Je vais pas résister c’est sûr, je vais
me laisser tenter par le régime...
Je vais me présenter, et je serai un candide ah!
Et je ferai une campagne propre, ah oui...
Tous les jours je prendrai des bains de foules!
Personne pourra me traiter de sale individu!
Et avec mon régime je soulèverai les foules
et je serai élu au nauffrage universel...
Je deviendrai l’homme fort du régime...
Celui qui peut lever une armée!
Ouille, alors là je rigole... pôvre pôvre gros.
Il a pas pensé que quand on lève une armée,
c’est là qu’on commence à avoir peur...
passqu’on peut plus jamais la laisser tomber!
Source : Marc Favreau, Presque tout Sol, Stauké, Montréal, 1997, p.417 à 424
Piste de réflexion...
Attardez-vous au vocabulaire imagé de Sol.
Sourires garantis!
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L’HUMOUR en BD
Texte 6
Portraits de société
Source : CÔTÉ, André-Philippe. Tous Fous, Le docteur Smog craque, 2006, p.44
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Source : CÔTÉ, André-Philippe. Tous Fous, Le docteur Smog craque, 2006, p.13
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Source : CÔTÉ, André-Philippe. Tous Fous, Le docteur Smog craque, 2006, p.5
Piste
Piste de réflexion...
Comment trouvez-vous l’humour de Côté?
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Humour sans frontières
Dossier rire
Texte 7
LES PATENTEUX
C’est un des traits particuliers de la culture québécoise. Une distinction sur
laquelle on devrait miser pour les avenirs et touristes internationaux. Le Québec
en est rempli. Si on gratte bien. Chaque rang de campagne, chaque
retranchement de terre battue, chaque village dispose de son patenteux.
Comme un représentant de ces artisans modérés issus de la grande lignée des
bizouneux de cossins d’inventions de patentes à gosses. Ces créateurs d’objets
fascinants qu’on nous présente toujours comme des solutions. Parfois tellement
poussées dans la performance que ça se présente comme des solutions à des
problèmes qui n’existent pas encore. Et qu’il peut devenir angoissant de tenter
de s’imaginer le type de problème à venir en voyant certaines propositions de
bidule de secours. Voilà.
Pour faire face à la misère, les patenteux de l’époque occupaient un poste important dans la hiérarchie
des communautés. À Saint-Élie-de-Caxton, pour assumer la fonction, nous avions droit à un forgeron
Riopel débrouillard. Son invention la plus reconnue fut sans doute les fers à cheval à talons hauts. Vint
ensuite le grille-pain à une seule fente. Pour venir en aide aux familles au nombre d’enfants impair. Parce
qu’on sait bien qu’en temps de manque, l’utilisation du grille-pain conventionnel n’était permise qu’avec
un chargement minimum de deux tranches de pain. En deçà de ça, on vous rangeait dans la marge
gaspilleuse. Les hommes et les femmes se forçaient donc à engendrer dans un
nombre pair d’enfants pour satisfaire sur les déjeuners. Chez les familles moins
chanceuses dont le décompte ne se divisait pas par deux, le petit dernier
demeurait plus svelte que les autres. Par pur principe d’économie d’énergie
brûlatoire de toaster. Par chance, avec la sortie de ce grille-pain à une fente, on
réglait le cas de la tranche unique. Et du non-désiré par le fait même. Et puis
revoilà.
Cette fois-là des vols répétés de vêtements sur la corde à linge, le forgeron
Riopel puisa dans les idées géniales. Il imagina un dérivé de l’épingle à linge, celle que l’on connaît, sur
laquelle il ajouta l’option d’une serrure. Une pince à linge qui se barre à clé. En fer forgé. Une révolution
lessivaire. Et un succès commercial dans le voisinage.
Bien sûr que les femmes se retrouvaient avec des trousseaux de sept à huit cents clés dans les poches
de leur tablier et des heures entières à enlever le linge de la corde […] Mais malgré tout le désagrément,
pas question de se plaindre. On entrevoyait enfin la possibilité d’un retour aux habits secs.
PELLERIN, Fred. Comme une odeur de muscles, contes de village, Planète rebelle, Montréal, 2005, 150 pages, p. 103 et 104
ISBN : 2-922528-55-3
Piste de réflexion...
Qu’est-ce qui vous fait rire dans ce texte? Surlignez ces passages.
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Humour sans frontières
Dossier rire
Texte 8
Un des thèmes chéris par les humoristes est la politique.
Il y a quelques années, les fusions municipales faisaient couler beaucoup d’encre au Québec.
D ans un café bondé de Paris, seul à sa table, un touriste déguste une
crème caramel. Soudain, un autre touriste s’approche de lui :
« Est-ce que pouvoir m’asseoir ici?
— Pas de problème…
— Merci, vous êtes gentil…
— Vous êtes en vacances?
— Oui, moi arrivé hier…
— Vous venez de quel pays?
— De Norvège. Et vous?
— Du Québec.
— Québec? Moi pas connaître…
— Ben, je viens du Canada…
— Ah! Canada! Ça connaître! Mais pourquoi avoir dit que vous venez du Québec?
— Parce que je viens d’abord du Québec!
— Ah, vous êtes né au Québec et avoir immigré au Canada…
— Non, moi être né au Québec, pis être resté Québec…
— Ah, votre père vient du Canada?
— Non, mon père, ma mère, ma femme, tout le monde vient du Québec…
— Alors, pourquoi avoir dit Canada?
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Humour sans frontières
Dossier rire
— Parce que vous saviez pas c’était quoi, le Québec!
— Mais si vous pas avoir su c’était quoi Norvège, moi pas vous avoir dit que mon pays être le Japon.
— Le Canada, c’est pas le Japon. Le Canada, c’est mon pays.
— Ah, votre pays plus être Québec…
— Mon pays, c’est le Québec. Mais mon pays, ça peut aussi être le Canada, si la personne ne sait pas
c’est quoi le Québec…
— Moi pas comprendre…
— Regarde, c’est simple, je viens de la province du Québec dans le pays du Canada.
— Aah. Mais moi pas avoir demandé de quelle province vous venez, mais de quel pays… Moi venir de
région Lofoten en Norvège, mais avoir répondu Norvège quand vous demandiez de quel pays je
venais…
— Je sais, je suis pas cave! Mais moi, quand on me demande de quel pays je viens, je réponds le
Québec! Même si c’est le nom de ma province, pour moi, c’est mon pays.
— Oh! Moi comprendre. Vous êtes séparatiste. Vouloir que votre province Québec devienne votre
pays…
— Es-tu fou? Je veux rien savoir de ça!
— Moi pus comprendre.
— C’est simple. Tu m’as demandé de quel pays je viens, j’ai répondu le Québec, parce que le Québec
c’est mon pays, mais je veux pas que ce le soit vraiment, parce que ce serait trop de trouble. Je
veux juste pouvoir le dire. Faque je peux-tu le dire!?
— Moi tout mêlé. Toi avoir passeport de quel pays : Québec ou Canada?
— CANADA!
— Alors, pourquoi toi pas avoir répondu tout de suite Canada?
— Parce que ça me tente pas. Pour moi, le Canada, c’est Anne Murray, le Stampede, la police à
cheval, Toronto, le SRAS, c’est pas chez nous. Chez nous, c’est Séraphin, La P’tite Vie, Paul Piché.
Tu comprends???
— De moins en moins…
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Humour sans frontières
Dossier rire
— Regarde, on va oublier ça. Pose-moi une autre question.
— De quelle ville tu viens?
— Euh… Ben là, je ne sais plus…
— Toi pas savoir c’est quoi ta ville?
— Oui, je sais c’est quoi ma ville. Mais ma ville, c’était une ville qui a fusionné avec une autre ville mais
qui, là, va peut-être défusionner avec la ville qui serait censée être devenue ma ville…
— Toi pas évident! Quand toi écrire ton adresse, toi écrire quoi?
— Je le sais pus. Parce qu’avant, j’écrivais Outremont, mais Outremont est devenu Montréal, mais y
ont dit d’attendre trois ans avant de ne plus écrire Outremont pour pas mêler la Poste. Mais là, les
libéraux ont passé une loi qui permet à Outremont de redevenir Outremont, mais je sais pas s’il va
falloir attendre encore trois ans avant de pouvoir l’écrire. Ou si lorsque les trois premières années
vont être finies, il va falloir écrire Montréal durant trois ans et après écrire Outremont. À moins que
le PQ soit revenu au pouvoir et que là, on ait refusionné avec Montréal et là on pourrait écrire
Montréal, trois ans plus tard.
— Je pense que moi y aller, avoir mal de tête…
— Pourtant, c’est simple : ma ville, c’est Outremont, mon pays, c’est le Québec. Mais si t’aimes mieux,
ma ville, c’est Montréal, pis mon pays, c’est le Canada,
— OK, là je comprends!
— Y était temps. En tout cas, ça été ben l’fun de jaser avec toi, pis si
jamais tu viens dans mon coin, tu viendras me voir.
— OK. Mais tu vas être où? À Montréal, à Outremont, à Québec ou à
Canada? »
LAPORTE, Stéphane. Chroniques du dimanche, Tome 1, Éditions La Presse, 2003, p. 285 à 288
Piste de réflexion...
Finalement, le touriste norvégien est-il en compagnie
d’un Canadien ou d’un Québécois? Vivant à Montréal ou à Outremont?
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Humour sans frontières
Dossier rire
Texte 9
UNE ABOMINABLE FEUILLE D’ÉRABLE SUR LA GLACE
Les hivers de mon enfance étaient des saisons longues, longues. Nous vivions en trois lieux : l’école,
l’église et la patinoire; mais la vraie vie était sur la patinoire. Les vrais combats se gagnaient sur la
patinoire. La vraie force apparaissait sur la patinoire. Les vrais chefs se manifestaient sur la patinoire.
L’école était une sorte de punition. Les parents ont toujours
envie de punir les enfants, et l’école était leur façon la plus
naturelle de nous punir. De plus, l’école était un endroit
tranquille où l’on pouvait préparer les prochaines parties de
hockey, dessiner les prochaines stratégies. Quant à
l’église, nous trouvions là le repos de Dieu : on y oubliait
l’école et l’on rêvait à la prochaine partie de hockey. À
travers nos rêveries, il nous arrivait de réciter une prière :
c’était pour demander à Dieu de nous aider à jouer aussi
bien que Maurice Richard.
Tous, nous portions le même costume que lui, ce costume
rouge, blanc, bleu des Canadiens de Montréal, la meilleure
équipe de hockey au monde; tous, nous peignions nos
cheveux à la manière de Maurice Richard et, pour les tenir
en place, nous utilisions une sorte de colle, beaucoup de
colle. Nous lacions nos patins à la manière de Maurice
Richard, nous mettions le ruban gommé sur nos bâtons à la manière de Maurice Richard. Nous
découpions dans les journaux toutes ses photographies. Vraiment nous savions tout à son sujet.
Sur la glace, au coup de sifflet de l’arbitre, les deux équipes s’élançaient sur le disque de caoutchouc;
nous étions cinq Maurice Richard contre cinq autres Maurice Richard à qui nous arrachions le disque;
nous étions dix joueurs qui portions, avec le même brûlant enthousiasme, l’uniforme des Canadiens de
Montréal. Tous nous arborions au dos le très célèbre numéro 9.
Un jour, mon chandail des Canadiens de Montréal était devenu trop étroit; puis il était déchiré ici et là,
troué. Ma mère me dit : « Avec ce vieux chandail, tu vas nous faire passer pour pauvres! » Elle fit ce
qu’elle faisait chaque fois que nous avions besoin de vêtements. Elle commença de feuilleter le
catalogue que la compagnie Eaton nous envoyait par la poste chaque année. Ma mère était fière. Elle
n’a jamais voulu nous habiller au magasin général; seule pouvait nous convenir la dernière mode du
catalogue Eaton. Ma mère n’aimait pas les formules de commande incluses dans le catalogue; elles
étaient écrites en anglais et elle n’y comprenait rien. Pour commander mon chandail de hockey, elle fit ce
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Humour sans frontières
Dossier rire
qu’elle faisait d’habitude; elle prit son papier à lettres et elle écrivit de sa douce calligraphie d’institutrice :
« Cher Monsieur Eaton, auriez-vous l’amabilité de m’envoyer un chandail de hockey des Canadiens pour
mon garçon qui a dix ans et qui est un peu trop grand pour son âge, et que le docteur Robitaille trouve
un peu trop maigre? Je vous envoie trois piastres et retournez-moi le reste s’il en reste. J’espère que
votre emballage va être mieux fait que la dernière fois. »
Monsieur Eaton répondit rapidement à la lettre de ma mère. Deux semaines plus tard, nous recevions le
chandail. Ce jour-là, j’eus l’une des plus grandes déceptions de ma vie! Je puis dire que j’ai, ce jour-là,
connu une très grande tristesse. Au lieu du chandail bleu, blanc, rouge des Canadiens de Montréal, M.
Eaton nous avait envoyé un chandail bleu et blanc, avec la feuille d’érable au devant, le chandail des
Maple Leafs de Toronto. J’avais toujours porté le chandail bleu, blanc, rouge des Canadiens de Montréal;
tous mes amis portaient le chandail bleu, blanc, rouge; jamais, dans mon village, quelqu’un n’avait porté
le chandail de Toronto, jamais on n’y avait vu un chandail des Maple Leafs de Toronto. De plus, l’équipe
de Toronto se faisait terrasser régulièrement par les triomphants Canadiens. Les larmes aux yeux, je
trouvai assez de force pour dire :
— J’porterai jamais cet uniforme-là.
— Mon garçon, tu vas d’abord l’essayer! Si tu te fais une idée sur les choses avant de les essayer, mon
garçon, tu n’iras pas loin dans la vie…
Ma mère m’avait enfoncé sur les épaules le chandail bleu et blanc des Maple Leafs de Toronto et, déjà,
j’avais les bras enfilés dans les manches. Elle tira le chandail sur moi et s’appliqua à aplatir tous les plis
de cette abominable feuille d’érable sur laquelle, en pleine poitrine, étaient écrits les mots Toronto Maple
Leafs. Je pleurais.
— J’pourrai jamais porter ça.
— Pourquoi? Ce chandail-là te va bien… Comme un gant…
— Maurice Richard se mettrait jamais ça sur le dos…
— T’es pas Maurice Richard. Puis, c’est pas ce qu’on se met sur le dos qui compte, c’est ce qu’on se
met dans la tête…
— Vous me mettrez pas dans la tête de porter le chandail des Maple Leafs de Toronto.
Ma mère eut un gros soupir désespéré et elle m’expliqua :
— Si tu gardes pas ce chandail qui te fait bien, il va falloir que j’écrive à M. Eaton pour lui expliquer que
tu veux pas porter le chandail de Toronto. M. Eaton, c’est un Anglais; il va être insulté parce que lui, il
aime les Maple Leafs de Toronto. S’il est insulté, penses-tu qu’il va nous
répondre très vite? Le printemps va arriver et tu auras pas joué une seule partie
parce que tu auras pas voulu porter le beau chandail bleu que tu as sur le dos.
Je fus donc obligé de porter le chandail des Maple Leafs. Quand j’arrivai à la
patinoire avec ce chandail, tous les Maurice Richard en bleu, blanc, rouge
s’approchèrent un à un pour regarder ça. Au coup de sifflet de l’arbitre, je partis
prendre mon poste habituel. Le chef d’équipe vint me prévenir que je ferais
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plutôt partie de la deuxième ligne d’attaque. Quelques minutes plus tard, la deuxième ligne fut appelée;
je sautai sur la glace. Le chandail des Maple Leafs pesait sur mes épaules comme une montagne. Le
chef d’équipe vint me dire d’attendre; il aurait besoin de moi à la défense, plus tard. À la troisième
période, je n’avais pas encore joué; un des joueurs à la défense reçut un coup de bâton sur le nez, il
saignait; je sautai sur la glace : mon heure était venue! L’arbitre siffla; il m’infligea une punition. Il
prétendait que j’avais sauté sur la glace quand il y avait encore cinq joueurs. C’en était trop! C’était trop
injuste!
C’est de la persécution! C’est à cause de mon chandail bleu! Je frappai mon bâton sur la glace si fort
qu’il se brisa. Soulagé, je me penchai pour ramasser les débris. Me relevant, je vis le jeune vicaire, en
patins, devant moi :
— Mon enfant, ce n’est pas parce que tu as un petit chandail neuf des
Maple Leafs de Toronto, au contraire des autres, que tu vas nous faire
la loi. Un bon jeune homme ne se met pas en colère. Enlève tes patins
et va à l’église demander pardon à Dieu.
Avec mon chandail des Maple Leafs de Toronto, je me rendis à l’église,
je priai Dieu; je lui demandai qu’il envoie au plus vite des mites qui
viendraient dévorer mon chandail des Maple Leafs de Toronto.
CARRIER, Roch. Les enfants du bonhomme dans la lune, Stanké, 1979, Montréal, 167 pages. p. 77 à 81
ISBN 2-7604-0201-X
Piste de réflexion...
Faites ressortir l’effet comique du dernier paragraphe.
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NOTES PERSONNELLES
NOTES DE LECTURE
Quelques théories liées au rire
Ce qui fait rire les Québécois
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Nom : _______________________________
Gr. : ___
AIDE-MÉMOIRE GRAMMATICAL
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