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SPÉCIAL IMMOBILIER
STRASBOURG
Photos : Philippe Sautier/Sipa
Un léger mieux
Si la baisse des prix attire des acheteurs, notamment dans l’ancien, la demande reste
fragile. Vendeurs et acquéreurs ne sont pas encore sur la même longueur d’onde
A
vec le printemps qui arrive, les
Strasbourgeois auraient bien
envie de croire à la reprise.
Propriétaire d’un immeuble au
Neuhof, André pousse la porte
des agences mais hésite encore à signer un
mandat de vente. Ronald, lui, a fait le compte
de ses économies et se décide à acheter un
appartement dans le sud d’Illkirch. Dans la
commune chic d’Obernai, Christelle Clauss,
gérante de l’agence Orpi, voit arriver
quelques primo-accédants : « Ils ont entendu
que les prix de l’ancien avaient baissé de 30%
sur les biens les plus standard et ils sont
conscients que les taux d’emprunt sont bas
[moins de 4% sur vingt ans dans l’Est,
d’après le baromètre Empruntis de février
2010, NDLR]. Quand ils ont un apport, ils se
lancent dans l’achat d’une petite maison entre
180 000 et 210 000 euros. » Avec le PassFoncier, mis en place dès 2008 dans le département du Bas-Rhin et relayé depuis l’été 2009
sur la Communauté urbaine de Strasbourg
(CUS), les primo-accédants peuvent aussi
faire construire une maison avec une TVA à
5,5% au lieu de 19,6%. Depuis la mise en
place de l’investissement Scellier en mars
2009, les ventes dans le neuf ont repris
(+93% sur un an au troisième trimestre 2009)
et se concentrent sur l’agglomération (un tiers
des ventes en Alsace).
Plusieurs signes de reprise se manifestent,
mais peut-être en trompe-l’œil. « Les mesures
de relance dans le neuf – loi Scellier, doublement du prêt à taux zéro et Pass-Foncier –
seront toutes terminées fin 2010 », avertit
Frédéric Torre, à la direction du Crédit foncier
de Strasbourg. Et, dans l’ancien, bien que
l’activité ait augmenté depuis l’année ☛
●I
DR
Spécial immobilier
JEAN-PIERRE
KRANTZ
président de la
chambre des notaires
du Bas-Rhin
Le Nouvel Observateur. – Confirmezvous la reprise des marchés ?
Jean-Pierre Krantz. – Il s’agit plus
d’un frémissement que d’une reprise.
Nous ne sommes plus dans le contexte de
sinistrose de l’année 2009, mais nous
n’avons pas retrouvé le niveau d’activité
de 2007, voire 2008. Depuis deux ans, les
ménages sont attentistes. Aujourd’hui,
certains concrétisent leurs projets dans
un contexte un peu plus favorable,
puisque les prix ont chuté de 10% en
moyenne et que les taux d’emprunt sont
bas. Le manque de confiance dans la
conjoncture économique persiste néanmoins. Peu de compromis sont signés, et
la situation reste délicate.
N. O. – Cette baisse des prix offre-t-elle des
occasions aux primo-accédants ?
J.-P. Krantz – Dans l’ancien, elle n’est
pas assez significative pour ouvrir de
réelles possibilités aux primo-accédants.
Au troisième trimestre 2009, le budget
moyen s’élevait à 144 400 euros pour
un appartement à Strasbourg (et
132 900 euros sur la Communauté urbaine) et à 284 400 euros pour une maison. Beaucoup d’acquéreurs ne peuvent
même pas négocier, dans la mesure où
peu de biens sont en vente. Le prix du
foncier reste par ailleurs exorbitant sur
la CUS (145 000 euros en moyenne). Peu
de terrains constructibles sont libérés
par les communes, qui manquent de
moyens pour investir dans les
infrastructures nécessaires à l’accueil de
nouveaux habitants.
N. O. – Dans ce contexte, est-il raisonnable de vouloir acheter ?
J.-P. Krantz. – Dépenser 100 euros de
plus par mois pour rembourser un crédit
plutôt que de payer un loyer n’assure pas
une sécurité financière à terme, mais cela
constitue une épargne forcée. Ici, un jeune
qui a un métier veut devenir propriétaire,
quitte à s’éloigner à 40 ou 50 km dans la
périphérie strasbourgeoise. Avec un
emprunt sur vingt ans à un taux d’endettement raisonnable, le risque est en
général assez limité. Je ne conseille pas de
s’engager sur des crédits plus longs, à
moins d’avoir des perspectives sérieuses
d’augmentation de revenus.
Propos recueillis par V. R.
II ● LE NOUVEL OBSERVATEUR
Les nouvelles résidences de Rive-Etoile
dernière, elle reste fragile. « Vendeurs et acheteurs ont encore du mal à trouver un terrain
d’entente », résume Olivier Bierry, président
du GIE Orpi, qui regroupe onze agences dans
le Bas-Rhin, dont sept sur la CUS. Du côté du
marché locatif, « beaucoup de bailleurs privés
manquent de candidats solvables », affirme
Gérard Durr, président de la Fnaim Alsace.
Même pour les petites surfaces, où la
demande est forte (environ 30 000 étudiants
se logent dans le parc privé), l’offre disponible
était importante en début d’année.
D’après la Fédération nationale des Agents
immobiliers (Fnaim), le prix des appartements a chuté de 10,1% en un an, atteignant
en moyenne 2 281 euros le mètre carré au
troisième trimestre 2009, et celui des
maisons, de 14,7% (240 000 euros). Dans le
LE NOUVEAU PROGRAMME
DE L’HABITAT, ADOPTÉ EN
NOVEMBRE, SE FIXE POUR
OBJECTIF 3000 LOGEMENTS
PAR AN, DONT 1500 AIDÉS
neuf, le mètre carré, estimé à 3 214 euros sur
l’agglomération au troisième trimestre 2008,
est descendu en un an à 3 039 euros, selon la
cellule économique du BTP d’Alsace.
Mais Strasbourg reste cher et doit affronter
des difficultés de longue date : 63% de la population est éligible au parc social et
19 500 personnes – dont 6 500 sont hébergées
dans leur famille ou chez des amis – sont en
attente d’un logement. Paradoxalement, près
de 8% du parc privé est vacant et le taux des
appartements occupés en location a chuté de
20% en sept ans. Etant donné le manque
chronique de foncier (le déficit de construction
est de 1 000 logements par an, par rapport
aux objectifs du dernier programme local de
l’habitat), l’étalement urbain s’est intensifié.
Une centaine de parcelles seulement se
dégagent chaque année sur la CUS (entre
135 500 et 156 400 euros pour des superficies
de 6 à 9 ares). Il faut aller dans les secteurs de
Molsheim ou de Sélestat-Erstein pour trouver
des terrains autour de 110 000 euros. Mais les
nouveaux terrains constructibles apparaissent au compte-gouttes autour des villes et
des villages alsaciens. « Sous prétexte de
lutter contre l’étalement urbain, le foncier se
fait de plus rare, donc de plus en plus cher »,
estime Thomas Leclercq, président du conseil
régional de l’immobilier.
« Le logement fait partie de nos budgets
prioritaires, assure Philippe Bies, adjoint au
maire chargé du logement et vice-président de
la CUS. Malgré la crise, nous intensifions les investissements pour combler le retard, avec une
hausse de 25% en 2009 et de 12% en 2010.
L’effort porte sur la construction de logements
locatifs aidés, en accession sociale et privés
conventionnés, mais aussi sur la réhabilitation
via l’Agence nationale de l’Habitat et la remise
en circulation du patrimoine communal,
comme cet immeuble quai des Bateliers vendu
à des bailleurs sociaux, qui permettra à une
soixantaine de familles de disposer d’un logement social en plein centre. » Le nouveau programme de l’habitat, adopté en novembre
dernier, se fixe pour objectif 3 000 logements
par an, dont 1 500 aidés. Une partie de ces
constructions se situera sur les 150 hectares du
futur quartier du Port-du-Rhin, dans l’axe du
tram Strasbourg-Kehl et le sillage de la ligne
TGV Est. De nouveaux lieux à urbaniser sont
identifiés : les terrains des hôpitaux universitaires de Strasbourg font l’objet de discussions
entre la CUS et les propriétaires institutionnels.
VALÉRIE ROCHAIX

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