L`agroécologie est une voie incontournable

Transcription

L`agroécologie est une voie incontournable
N°104 Juin 2012
Habbanae
L e j o u r nal d es d o na t eu r s d’AVS F
Madagascar
© Jean Mas
L’agroécologie
est une voie
incontournable
Vie des projets
Brésil : des pratiques
agricoles durables
aux marchés locaux
Madagascar :
les paysans se taillent
une agriculture
sur mesure
Pour que les Hommes vivent de la Terre durablement -
www.avsf.org
Edito
L’agroécologie, plus qu’une technique,
une philosophie
C
Thierry Lemaire
Directeur
de publication
omme son nom l’indique, l’agroécologie est un mode d’agr iculture qui se
préoccupe autant de produire des biens alimentaires que de préserver les milieux
et les ressources naturelles. Tout l’art des paysans est ici de produire en symbiose
avec le sol, l’eau et la biodiversité ambiante en évitant de les épuiser ou de les polluer
puisque cela reviendrait à détruire leurs moyens de production. Mieux, les relations de
cette agriculture avec les territoires ne sont pas que physiques et biologiques. Elles sont
aussi économiques et sociales puisqu’agroécologie signifie également valorisation des
territoires et des paysages, emplois locaux, marchés de proximité, tissu rural...
Dans un contexte de crise économique, climatique et d’extinction de la biodiversité,
l’agroécologie est bien une voie incontournable si nous voulons à terme nourrir la planète.
Au Brésil, à Madagascar et ailleurs, AVSF participe depuis plusieurs années au développement de ce mode de production en s’appuyant sur les savoir-faire et la technicité
des paysans et des ONG locales. 
Actualités
Avec la
société Régalb,
envoi de vœux
solidaires 2013
Fabricant de cartes de vœux,
faire-part de mariage et de
naissance, la société Régalb
soutient pour la 3ème année
consécutive les actions d’AVSF,
en proposant aux entreprises et
collectivités, une collection de
cartes de vœux solidaires aux
couleurs d’AVSF : pour 100 euros
de cartes achetées, 25 euros
seront reversés à l’Association
pour soutenir les familles paysannes vulnérables d’Afrique,
d’Amérique Centrale et du Sud
et d’Asie.
Grâce à votre soutien, les fonds
reversés ont permis de mener
plusieurs actions d’AVSF.
Réservez votre brochure 2013
en vous connectant sur le site
www.regalb.com/voeuxAVSF n
Les nouveaux
arrivants
Evénement
à Lyon
Nous tenons à vous informer de
la prise de fonction de Paulin
Hyac Rakotoarisoa, comme
nouveau Coordinateur National à Madagascar & Comores
depuis le 1 er mai 2012, en
remplacement de Gauthier
Ricordeau.
Paulin était précédemment
responsable de projet sur le
Lac Alaotra (promotion de
pratiques agroécologiques et
aménagement de terroir).
Paulin participera à la prochaine Assemblée Générale
d’AVSF les 22 et 23 juin prochain.
Le 17 avril dernier, à l’occasion
de la journée mondiale des
luttes paysannes, AVSF a organisé un événement à Lyon,
place des terreaux, pour alerter
sur les méfaits du réchauffement climatique sur les petits
éleveurs.
Des animations variées (performance d’artiste, grande
fresque en temps réel, théâtre
de rue) ont permis de sensibiliser
les nombreux passants.
Cette action fait partie d’une
grande campagne que mène
AVSF pendant 3 ans au sein du
collectif VSF Europa. n
Au Pérou, Roberto Aparicio
ancien AVSF en Amérique Centrale et en Bolivie, est devenu
le nouveau coordinateur national, en remplacement de
César Paz, nommé directeur de
cabinet du Ministère de l’Agriculture. n
Lyon : 18 rue de Gerland
69007 Lyon
Nogent : 45 bis avenue
de la Belle Gabrielle
94736 Nogent sur Marne
Cedex
Tél. : 04 78 69 79 59
E-mail : [email protected]
Internet : www.avsf.org
Directeur de publication :
Thierry Lemaire
Rédacteur en chef :
Gaëtan Delmar
Ont participé à ce
numéro : Emmanuel
Bayle, Jacques Caplat,
Paulin Hyac Rakotoarisoa,
Valentin Beauval
Rédactrice freelance :
Anaïs Frapsauce
Maquette et Réalisation :
Bruno Forand
Impression :
Uniservices
Développement Z.I de la
Prairie - 91140 Villebon sur
Yvette
Commission paritaire :
0913 H 86626
ISSN 1148 - 4357.
CCP 6200 M - Lyon
Imprimé sur papier recyclé
Au nord Niger, lorsqu’un
éleveur Peul perd
son troupeau, les autres
éleveurs lui offrent chacun
une génisse pleine,
en échange de sa parole
de restituer à chacun, trois
ans plus tard, une génisse
pleine issue de la même
lignée : c’est l’Habbanae
ou le prêt de l’amitié.
L’agriculture paysanne a pour objectif de rendre
autonomes les familles brésiliennes.
Brésil :
Des pratiques agricoles durables
aux marchés locaux
A
u Brésil, grande puissance agricole d’exportation, les deux tiers
des paysans (près de 3 millions
de personnes) n’arrivent pas à sortir
de la pauvreté, ni de l’engrenage qui
les exclut de plus en plus.
Le travail d’AVSF est ainsi indispensable pour que ces paysans
retrouvent leur place au sein de la
société brésilienne.
■ L ors des réunions d’information et
d’échanges paysans organisées
par le réseau PARDAL 2, il a été
décidé collectivement de stopper
les brûlis et de gérer la biodiversité de la caatinga en favorisant
les espèces les plus utiles (pour la
production de piquets, de miel,
de fruits ou de fourrages). Cette
gestion améliorée de l’environnement a favorisé l’enrichissement
des sols ainsi que l’apiculture, qui
est devenue dans certains assentamentos la production agricole
la plus lucrative. Les agriculteurs
ont ainsi été encouragés à réduire
drastiquement l’usage de pesticides.
L’équipe d’AVSF est présente dans la
région depuis 1999.
En partenariat avec des ONG
locales, l’Embrapa1, des groupes
d’ag r iculteurs et des “assenta mentos” (paysans récemment
installés par la réforme agraire), elle
tente de diffuser des pratiques définies avec les groupes d’agriculteurs
les plus dynamiques et novateurs.
Plusieurs préfectures de la région se
sont associées à cette dynamique
en mettant à disposition des espaces
pour des marchés paysans agroécologiques. La vente sur les marchés
locaux est une pratique intégrante
de la démarche promue par AVSF.
Cela permet aux familles paysannes
de sortir de la pauvreté, grâce à ce
revenu supplémentaire.
AVSF encadre un projet
qui vise à intégrer la culture
du coton Bio et l’apiculture
3
© AVSF
La région d’Apodi est située dans
le Nord Est brésilien, son climat est
semi-aride et marqué par une pluviométrie anarchique.
La végétation arbustive dense,
typique de cette région, est appelée
“caatinga” (forêt blanche en langue
tupi).
■ L es parcelles de coton bio se font
maintenant en cultures associées :
cultures de rentes et vivrières
(maïs, sésame, haricot, courge,
arachide, pastèque, fève). Ce coton a l’avantage d’être
moins attaqué par les insectes,
il permet donc des économies
en intrants. L’association de
cultures, quant à elle, ne nécessite pas de recours à l’irrigation,
grâce aux plantes basses, qui
retiennent l’humidité du sol. Enfin, cette production renforce le
lien agriculture / élevage, car le
coton est fertilisé grâce au fumier
et les résidus de cultures servent de
fourrage.
La gestion améliorée de
l’environnement a favorisé
l’enrichissement des sols.
H a b b a n a e n ° 1 0 4 - J u i n 2 0 1 2 - A g r o n o m e s e t V é t é r i n a i r e s S a n s F r o n t i è r e s - w w w. a v s f. o r g
© Rodriguo Sena
Vie des projets
Une loi fédérale oblige maintenant
les cantines scolaires à s’approvisionner à hauteur de 30% auprès des
paysans locaux.
Les familles qu’AVSF a pu accompagner dans cette démarche apprécient le fait que leur savoir ancestral
soit mis en avant. Elles ont aussi
constaté qu’une production agricole
diversifiée constituait la meilleure
stratégie anti-risque dans une région
ayant une pluviométrie si aléatoire.
Et surtout, elles ont maintenant les
moyens de vivre de la vente de leur
production. n
1 - Organisme de recherche agronomique qui
s’est notamment beaucoup impliqué sur
le thème du coton organique en cultures
associées.
2 - Le réseau PARDAL a été créé en 1999 et
regroupe 9 organisations de l’Etat du RN. Avec
le concours d’AACC et d’AVSF, ce réseau a
bénéficié d’appuis et de financements pour la
mise en œuvre de projets agroécologiques.
© Rodriguo Sena
Emmanuel Bayle
Coordinateur national d’AVSF au Brésil
Le métier d’agronome chez AVSF
Le travail des agronomes qui
accompagnent les paysans
du Sud dans la démarche
d’autonomie propre à AVSF
nécessite non seulement des
compétences techniques,mais
aussi d’écoute, de compréhension et d’analyse de leurs
choix.
Des compétences diversifiées
Ils doivent être en mesure de mesurer
la fertilité des sols et d’évaluer leur
potentiel agricole, ainsi que de
faire un état des lieux du contexte
environnemental. Sur la base du
diagnostic qu’ils font des systèmes
d’exploitation agricole, ils aident
les paysans à mieux comprendre
les contraintes auxquelles ceux-ci
doivent faire face.
Une démarche participative
Un travail d’animateur est également nécessaire, pour organiser
les réunions de formation et les
échanges entre paysans.
Les techniciens d’AVSF aident les
organisations paysannes à mieux
se structurer, afin qu’elles se dotent
des compétences et services qui
leur permettront d’améliorer leur
capacité d’approvisionnement en
outils et de commercialisation des
produits agricoles sur les marchés
locaux et internationaux.
Enfin l’organisation paysanne a
aussi pour objectif de défendre
collectivement leurs droits auprès
Les parcelles de coton bio se
font en cultures associées.
Le but étant que les paysans puissent
se les approprier et, à moyen terme,
prendre en charge leur diffusion.
© Rodriguo Sena
Les paysans choisiront eux-mêmes
le système d’exploitation et les
techniques les plus adaptées tant
à leur milieu agroécologique qu’à
leurs conditions socioéconomiques.
La vente sur les marchés locaux est une
pratique intégrante de l’agroécologie.
M É T I E R
de collectivités locales, d’entreprises, de services d’Etat ou d’autres
acteurs du monde rural.
Grâce au travail des équipes d’AVSF,
les villageois renforcent leurs compétences et connaissances pour
gérer durablement les ressources
naturelles de leur territoire, parfois
très dégradées.
Sur la base d’un diagnostic participatif des systèmes d’exploitation, ils
doivent aussi comprendre et partager avec les paysans les contraintes
auxquelles ils doivent faire face et
les objectifs qu’ils poursuivent.n
Les techniques d’intégration d’agriculture et d’élevage ont
rencontré un grand succès auprès des agriculteurs.
Madagascar :
Les paysans se taillent
une agriculture sur mesure
A Madagascar, une grande majorité de la population est rurale. 70% des paysans vivent sous le
seuil de pauvreté et pratiquent une agriculture rudimentaire d’autosubsistance : cultures à répétition
de cycles courts, recours au brulis ou au labour accompagné d’une faible fertilisation, etc. Ces
techniques traditionnelles ont énormément fragilisé les sols, alors que la population à nourrir n’a
cessé d’augmenter.
Intensifier la production
et restaurer les sols
Proposer des techniques variées
et adaptées
Aujourd’hui, l’agroécologie permet
aux paysans malgaches de retrouver leur autonomie alimentaire et
d’améliorer leurs conditions de vie,
tout en assurant la restauration de
leur environnement déjà fortement
dégradé.
Traditionnellement, les paysans
malgaches utilisaient déjà des
techniques proches de celles de
l’agroécologie telles que les associations de cultures, l’agroforesterie, le
fumier, les jachères, etc.
La majorité de la production de
vanille, par exemple, est pratiquée
de longue date sans travail du sol
et sous couver ture végétale, en
utilisant un arbuste comme tuteur et
fournisseur d’azote : le gliricidia ou le
grévilléa.
Toutefois, les innovations (systèmes de
riziculture intensive, semis direct sous
couverture végétale, etc.), promues
ces dernières décennies par diverses
équipes de recherche-action avec
l’aide d’AVSF, permettent d’intensifier
la production tout en contribuant à la
restauration du sol et de l’environnement.
AVSF intervient depuis 2002 auprès
des communautés et organisations
paysannes dans différentes régions
de l’île, à travers quatre programmes
pour la promotion d’innovations
agroécologiques.
5
L’amélioration et la diffusion
des méthodes agroécologiques
promues par l’association
passent par des échanges et des
formations de “paysan à paysan”.
Même si la majorité des paysans
malgaches, trop vulnérables pour
investir dans ces nouvelles techniques,
préfèrent valoriser les pratiques plus
traditionnelles, les techniques d’intégration d’agriculture et d’élevage
(IAE) ont rencontré un grand succès
auprès des agriculteurs.
En 2010, AVSF a aidé 357 paysans à
mettre en place des cultures fourragères, ainsi que des fosses fumières
et compostières. Les zébus sont les
principaux compagnons des agri-
culteurs malgaches. Toutefois AVSF a
développé également des activités
d’intégration d’agriculture et d’élevage (IAE), avec les élevages de
poules, de porcins, d’abeilles et de
poissons.
A l’échelle des communautés, grâce
au soutien de l’association, des
règles de gestion à l’échelle du terroir appelées “Dina” ont été mises en
place collectivement afin de restaurer également l’environnement.
De nombreuses techniques ont ainsi
pu être testées puis évaluées par nos
techniciens, ainsi que par les communautés paysannes impliquées.
Ceci a permis à AVSF de constituer une
banque de données d’une gamme
diversifiée de pratiques et techniques
ayant fait leurs preuves depuis de
nombreuses années, afin de favoriser
des options réellement pérennes de
pratiques agroécologiques.
Chaque famille paysanne peut ainsi
faire son choix en fonction de son
environnement, de ses ressources et
de son niveau de technicité. n
Paulin Hyac Rakotoarisoa
Coordinateur national d’AVSF à Madagascar
RURALTER :
Pour plus d’informations sur nos projets à Madagascar : www.ruralter.org
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© Jean Mas
Vie des projets
Rencontre
Interview de Jacques Caplat
Pourquoi refuse-t-on l’idée que
l’on pourrait nourrir la planète avec
l’agriculture Bio ?
Si nous considérons le sens que M.
Altieri ou Pierre Rabhi donnent à
l’agroécologie, il est alors pratiquement synonyme d’agriculture biologique.
En effet, la bio n’est pas simplement une agriculture “sans produits
chimiques de synthèse”.
Elle a clairement été définie dès
les années 1930-1940 comme une
agriculture qui considère les humains,
l’écosystème naturel, et l’agrosystème
cultivé et élevé, comme formant
un organisme complexe. Elle vise à
inscrire l’agriculture dans les cycles
naturels et donner aux sociétés agricoles les moyens de leur autonomie
technique et économique.
À cause des malentendus qui persistent sur ce mode de production.
De nombreux agronomes confondent
“agriculture biologique” et “agriculture conventionnelle sans produits
chimiques de synthèse”.
Ils constatent que lorsque l’on supprime
la chimie dans des systèmes conventionnels, les rendements baissent.
Mais cela n’est pas l’agriculture biologique !
Un agriculteur qui emploie des variétés sélectionnées pour être soutenues
par la chimie, qui n’a plus de haies,
qui cultive ses végétaux en monoculture de clones... ne peut évidemment
pas obtenir de bons rendements sans
des béquilles chimiques.
Développer l’agriculture biologique
impose de reconstituer des écosystèmes agricoles et de valoriser les
savoirs paysans.
L’agroécologie est donc une reformulation des fondements de l’agriculture biologique, elle peut être
considérée comme un renforcement de l’agriculture bio originelle
(par opposition à une agriculture
bio industrielle, encouragée parfois
par les multinationales ou des
règlementations trop légères), en
particulier dans le cadre des paysanneries tropicales.
Editions Actes Sud
© P.A. Garcia
Quelles sont les complémentarités
entre l’agroécologie et l’agriculture
Bio ?
Jacques Caplat
Dans le contexte actuel, pourquoi
selon vous l’agriculture Bio est une
nécessité ?
Les dégâts environnementaux et
sanitaires de l’agriculture conventionnelle ne sont plus à présenter.
Ses dégâts sociaux sont également
dramatiques : les monocultures surmécanisées conduisent à l’accaparement des terres par de grands
domaines et à un chômage de
masse. Les 12 millions de Brésiliens qui
souffrent de la faim sont presque tous
d’anciens salariés agricoles poussés
au chômage par la surmécanisation
des domaines exportateurs de soja
et d’agrocarburants.
Mais les prétendus bénéfices de
l’agriculture conventionnelle sont
une imposture.
La chimie ne permet pas les meilleurs
rendements à l’hectare et ne pourra
pas nourrir le monde ! En effet, les
monocultures chimiques obtiennent
de moins bons rendements que les
cultures associées.
Surtout, les monocultures conventionnelles ne fonctionnent que dans des
milieux tempérés - or les trois-quarts
de l’agriculture mondiale se situent
dans des régions non-tempérées.
Dans ces conditions, l’agriculture
conventionnelle est irrégulière, inefficace et conduit à l’endettement.
Biographie
Agronome, Jacques Caplat a été successivement conseiller technique
au sein d’une chambre d’agriculture, chargé de l’accompagnement
d’agriculteurs en conversion vers l’agriculture biologique, puis des
politiques agricoles et environnementales au sein de la Fédération
nationale d’agriculture biologique (FNAB).
Il a participé à la fondation du Réseau Semences Paysannes.
C’est bien l’intensification des cultures
associées qui permet d’atteindre les
meilleurs rendements par hectare.
Cette intensification ne peut pas
utiliser la chimie, car les engrais
détruisent la vie du sol et les pesticides déstabilisent l’agroécosystème ; mais les plantes diverses se
protègent mutuellement, et l’association cultures-élevage ou l’imbrication d’arbres au milieu des cultures
permettent d’assurer la fertilité à long
terme.
Quelques études de grande ampleur
ont étudié les conséquences d’une
généralisation de l’agriculture bio
à toute la planète : elles concluent
toutes que les rendements baisseraient
légèrement en Europe et en Amérique
du Nord mais augmenteraient très
fortement dans le reste du monde...
et que le bilan global serait très largement positif.
L’agriculture bio est la meilleure technique pour nourrir une humanité à 9
ou 12 milliards. n
Propos recueillis par Gaëtan Delmar
Rédacteur en chef
Il faut sortir de la monoculture, afin d’obtenir une forte biodiversité
et de réduire, voire d’éliminer l’utilisation des pesticides.
Quelles approches de l’agroécologie
souhaite-t-on promouvoir ?
Depuis les années 80, j’ai eu l’occasion de mettre en œuvre avec mon associé sur notre ferme
(66 ha de grandes cultures-semences) plusieurs techniques pouvant être qualifiées d’agroécologiques.
Pour illustrer la diversité des situations, je décris brièvement ci-dessous deux approches agricoles
différentes.
L
a 1ère approche est “l’agriculture
conventionnelle” avec des techniques de semi direct (sans labour
du sol). Elles couvrent aujourd’hui des
dizaines de millions d’hectares et se
sont développées dans les grandes
exploitations motorisées d’Amérique
du Nord, du Sud, et en Europe.
Outre la faible biodiversité des
systèmes de culture concernés, leur
point faible est à mon sens l’utilisation plus fréquente de pesticides
que dans les itinéraires avec labour.
On note ainsi l’utilisation quasi systématique d’herbicides totaux (cf.
glyphosate qui deviennent de
moins en moins efficace vu sa trop
fréquente utilisation).
Les eaux superficielles et profondes
des terroirs concernés par ces
formes de cultures intensives sont très
fréquemment polluées par les
pesticides.
Parmi eux, l’AMPA, un dérivé persistant du glyphosate et qui serait
cancérigène selon plusieurs études
internationales.
Les insecticides systémiques très utilisés pour la protection des semences
dans ces itinéraires sont également
au centre de multiples polémiques
scientifiques et, outre leur toxicité
pour les abeilles et autres insectes
polinisateurs, leur toxicité pour
l’homme est élevée.
7
La 2ème approche, celle de l’agroécologie :
Pour nous et de nombreuses organisations paysannes, avec lesquelles
nous travaillons ces dernières années,
l’agro- écologie se décline sans ou
avec très peu de pesticides et les
techniques les plus prônées sont les
suivantes :
■u
tilisation de variétés rustiques et
donc moins exigeantes en intrants
chimiques ;
■ rotations diversifiées et, chaque
fois que cela est possible, associations de cultures annuelles dans les
parcelles afin d’obtenir une forte
biodiversité et de réduire, voire
d’éliminer, l’utilisation des pesticides ou de les remplacer par des
“auxiliaires naturels” des cultures
(comme les coccinelles…) ;
■a
ssociation agriculture-élevage
(que ce soit élevages de bovins
ou de petits ruminants, porcs
et volailles…) car cela permet
souvent une meilleure efficience
des systèmes de production et une
réduction des risques économiques
ou liés au climat ;
■a
ssociation d’arbres utiles et de
cultures annuelles (agroforesterie
et de haies) lorsque les conditions
le permettent ;
H a b b a n a e n ° 1 0 4 - J u i n 2 0 1 2 - A g r o n o m e s e t V é t é r i n a i r e s S a n s F r o n t i è r e s - w w w. a v s f. o r g
■ t echniques améliorant l’autonomie des exploitations que ce soit
au niveau des semences (peu
d’hybrides, pas d’OGM) ou de la
réduction des achats d’engrais,
lesquels sont rendus moins indispensables du fait de l’intégration
agriculture-élevage et de la présence de légumineuses fixant
l’azote dans les rotations et
intercultures.
Dans les deux cas, je relève que l’accompagnement sur le terrain des
“agriculteurs-expérimentateurs” (les
novateurs qui testent des techniques
agroécologiques basées sur des
principes agronomiques anciens ou
nouveaux) est très insuffisant.
Cet accompagnement me paraît
pourtant vital pour permettre aux
agricultures du Monde, toujours majoritairement familiales, de nourrir une
population qui ne cesse de croître
sans porter préjudice aux ressources
en sol, en eau, etc. sans oublier,
Copenhague oblige, les incidences
de nos pratiques agricoles sur le climat. n
Valentin Beauval
Valentin Beauval est adhérent chez AVSF.
Il est agronome et a été coopérant 10 ans
à l’étranger (Nicaragua, Algérie, Cameroun
et Sénégal). Il a été paysan pendant 30 ans
et a réalisé une centaine de missions
de consultant en développement rural
dans une trentaine de pays.
© Rodriguo Sena
Plaidoyer
Parole aux donateurs
Habbanae évolue ! Notre journal vous fait réagir, nous avons donc décidé de laisser une place à vos
témoignages, car sans vous, notre association ne serait pas ce qu’elle est.
“A lire Habbanae mars, ce samedi
gris, j’ai le cœur plein de joie. Je vais
peut-être consulter votre site, ce qui
veut dire surmonter mon appréhension à l’égard de l’informatique.
Ainsi, en vous soutenant, je progresse
un peu et me sens plus impliquée
dans le monde. Merci.”
Mme Dupuy Monique, 09/03/12
“Je suis militant contre l’agriculture
productiviste et polluante au Nord,
et j’apprécie beaucoup vos efforts
visant à aider conjointement les
agriculteurs et les éleveurs.
Cette façon d’aider les gens du Sud
vers l’autonomie est la seule bonne
et nous devrions la méditer aussi pour
notre agriculture !”
M. Le Meur Hervé, 22/05/12
“Bonjour et merci de ce que vous
faites, je ne peux pas le faire, seulement aider modestement financièrement. Salutations.”
M. Jean-Paul, 08/03/12
Notre réponse :
Merci à vous qui nous encouragez
toujours un peu plus dans nos actions.
Nous espérons que ce nouveau
numéro vous plaira autant ! n
Notre réponse :
En effet, nous insistons sur l’importance
de prendre le problème à la base
pour trouver des solutions durables
plutôt qu’apporter une aide dans
l’urgence. Et nous cherchons aussi à
sensibiliser les pays du Nord, car notre
modèle agricole doit aussi être repensé… Merci de votre engagement
et de vos remarques positives ! n
Notre réponse :
Vous nous aidez régulièrement et
c’est déjà très généreux de votre
part ! Toute l’équipe d’AVSF vous
remercie pour votre soutien et est
heureuse que vous partagiez ses
valeurs. n
Si vous aussi, vous souhaitez réagir ou partager vos questions, n’hésitez pas à contacter
Nina Cloiseau du Service Donateur, par e-mail à l’adresse [email protected]
ou par courrier au 45bis av. de la Belle Gabrielle, 94736 Nogent sur Marne
RURALTER :
Site internet éditorial d’AVSF, Ruralter se présente comme une bibliothèque
des publications d’AVSF. Celles-ci sont le fruit des nombreuses études et
capitalisations menées par l’association à partir de ses actions de terrain,
pour identifier et diffuser les expériences les plus réussies de son action.
En 2012, AVSF a créé un comité “Ruralter et métiers” qui regroupe des
professionnels bénévoles aux compétences et origines diverses mais toutes
en lien avec les métiers d’AVSF. Ce comité définit les priorités des sujets de
capitalisation et apporte un appui éditorial à l’ensemble des publications
Ruralter.
En 2011, Ruralter s’est enrichi de plusieurs publications notamment sur
l’aviculture villageoise, les dispositifs de santé animale de proximité et l’agro écologie à Madagascar.
Le site est disponible en français, en espagnol et en anglais. Pour en savoir plus : www.ruralter.org

B ull e tin d’abo nnem ent et d e s ou t i en
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et je fais un don :
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