Réflexions sur le principe

Transcription

Réflexions sur le principe
Département fédéral de la défense,
de la protection de la population et des sports DDPS
armasuisse
Office fédéral de topographie swisstopo
Représentation des servitudes géométriquement représentables
Réflexions sur le principe
du 1 octobre 2014
Editeur
Groupe de travail «servitudes MO»
Direction fédérale des mensurations cadastrales
Office fédéral de topographie swisstopo
Seftigenstrasse 264, Case Postale
CH-3084 Wabern
Tél. +41 58 464 73 03
Fax +41 58 469 02 97
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www.swisstopo.ch / www.cadastre.ch
Table des matières
1 Introduction et mandat........................................................................................................................ 3
2 But du document ................................................................................................................................ 4
3 Situation actuelle ................................................................................................................................ 4
3.1 L’inscription dans le RF ................................................................................................................ 5
3.2 Le plan du registre foncier ............................................................................................................ 5
3.3 D’un point de vue légal ................................................................................................................. 5
4 Expériences des cantons ................................................................................................................... 5
4.1 En général .................................................................................................................................... 5
4.2 Exemples particuliers ................................................................................................................... 6
4.2.1 Canton de Neuchâtel ............................................................................................................. 6
4.2.2 Canton de Genève ................................................................................................................ 7
4.2.3 Canton de Fribourg................................................................................................................ 7
4.2.4 Canton du Jura ...................................................................................................................... 8
5 Commentaires sur les dispositions actuelles ..................................................................................... 8
5.1 L’extrait de plan du registre foncier .............................................................................................. 8
5.2 Le dessin de la servitude ........................................................................................................... 11
6 Quelques considérations .................................................................................................................. 11
6.1 Les avantages ............................................................................................................................ 11
6.2 Les inconvénients....................................................................................................................... 11
7 Prochaines étapes............................................................................................................................ 12
8 Conclusions ...................................................................................................................................... 12
Représentation des servitudes géométriquement représentables – Réflexions sur le principe
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1 Introduction et mandat
er
1
Depuis l’entrée en vigueur au 1 juillet 2008 de la loi fédérale sur la géoinformation (LGéo) et au
er
1 octobre 2009 de l’ordonnance sur le cadastre des restrictions de droit public à la propriété foncière
2
(OCRDP) , la publicité relative à la propriété foncière et à ses restrictions est assurée par les trois
piliers que sont:
• le registre foncier (RF),
• la mensuration officielle (MO) et
• le cadastre RDPPF.
Dès les années 2000, suivant en cela la stratégie de cyberadministration de la Confédération, stratégie qui vise à plus d’efficacité pour des procédures administratives plus proches de la population, chacun de ces trois domaines a évolué dans cette direction. La gestion des servitudes, et plus particulièrement de leur représentation géométrique, n’a cependant que peu évolué depuis l’introduction du RF.
Et pourtant, avec l’utilisation de plus en plus intensive du terrain, surtout dans les zones construites,
les servitudes peuvent avoir, sur la valeur d’une parcelle, une influence aussi importante que les limites elles-mêmes.
Consciente de ce problème, la stratégie de la mensuration officielle pour les années 2012 à 2015,
prévoit:
Figure 1: Extrait du plan de mesure de la stratégie de la MO
Lorsqu’on parle de servitudes foncières représentables géométriquement il s’agit essentiellement des
emprises en matière:
• de droits de passage,
• de servitudes de conduites,
• de droits de superficie, lorsque le superficiaire n’a le droit de construire que sur une partie du
fonds grevé,
• de droit d’empiètement,
• de droits d’utilisation,
• de droits de vue,
• de restrictions de droit de construire touchant une partie d’un bien-fonds.
L’examen de cette question a été confié à un groupe de travail ad hoc, composé comme suit:
• Représentation de la Confédération
- René Sonney, swisstopo, D+M, responsable du groupe de travail
3
- Karsten Karau, OFJ, OFRF
• Représentation des Cantons
- Nicole Portmann, ZG (RF)
- Alain Perlotto, VD (RF)
- Bernard Fierz, ZH (MO)
- Markus Schreier, BE (MO)
1
2
3
RS 510.62
RS 510.622.4
Office fédéral de la justice, Office chargé du droit du registre foncier et du droit foncier
Représentation des servitudes géométriquement représentables – Réflexions sur le principe
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2 But du document
Le présent document représente la première étape de l’examen demandé par la mise en œuvre de la
stratégie de la mensuration officielle pour les années 2012 à 2015. Son but est d’accompagner et de
documenter le questionnaire adressé aux instances du RF et de la MO/SIG de chaque canton, afin de
faire le point sur la situation existante aujourd’hui, les méthodes, les prescriptions légales et techniques, les habitudes et attentes de chacun d’eux ainsi que sur les expériences faites dans les différents cantons.
Cette analyse de la situation actuelle et des expériences faites permettra, dans une phase ultérieure,
de montrer s’il est opportun de donner aux servitudes géométriquement représentables la même fiabilité et la même visibilité que celle donnée aux limites des bien-fonds et aux restrictions de droit public
à la propriété foncière et de proposer la manière la plus adéquate de le faire.
3 Situation actuelle
L’introduction, actuellement en cours, du cadastre des restrictions de droit public à la propriété foncière (cadastre RDPPF) répond à un besoin relativement urgent posé par l’utilisation de plus en plus
intensive du sol et du sous-sol.
L’introduction du cadastre RDPPF a été prévue en deux étapes successives. La phase pilote, qui a
débuté en 2012 et qui a vu en 2014 six cantons sur les huit participants ouvrir leur géoportail RDPPF
sur une partie ou sur la totalité de leur territoire, se terminera à fin 2015. Dès 2016 débutera la deuxième étape au cours de laquelle tous les autres cantons, forts de l’expérience acquise par les cantons pilotes, auront à ouvrir, avant l’échéance du 1.1.2020, leur propre géoportail RDPPF. Lorsque ce
cadastre RDPPF sera complètement déployé, les autorités disposeront d’un instrument remarquable
pour remplir efficacement leur devoir d’information. Mais le cadastre RDPPF ne s’occupe pas des
servitudes, puisqu’elles ressortent du droit privé, même si elles peuvent avoir, elles aussi, une importance capitale sur la valeur d’une parcelle.
Sachant qu'en Suisse la propriété foncière est grevée d’hypothèques atteignant bientôt 900 milliards
de francs, comme le montre ce graphique tiré du Bulletin mensuel de statistique de la Banque Natio4
nal Suisse de juin 2014 , on comprend l'importance économique de pouvoir disposer d'informations
sûres et rapidement disponibles pour tout ce qui touche à la propriété foncière.
900
800
Somme des prêts hypothécaires
en Suisse
[Mia. Fr.]
700
600
500
400
300
200
100
0
Figure 2: Augmentation des prêts hypothécaires depuis 1987 (Source : BNS)
4
D11 Bankbilanzen / Bilans bancaires, page 36
Représentation des servitudes géométriquement représentables – Réflexions sur le principe
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3.1 L’inscription dans le RF
Les servitudes peuvent avoir une influence prépondérante sur la valeur ou l’utilisabilité d’une parcelle
puisqu’un droit de passage p.ex. équivaut, dans certains cas, à une interdiction partielle ou totale de
bâtir sur une certaine surface. Il peut en être de même pour les parcelles grevées de droits de vues ou
de tout autre servitude ayant une délimitation spatiale. Citons par exemple, outre les droits de passage ou droits de vue, les conduites et lignes électriques apparentes pour lesquelles la servitude
5
existe sans inscription au RF .
Compte tenu de l’influence que peut avoir une servitude sur la constructibilité d’une parcelle, donc en
définitive sur sa valeur, il serait tout à fait normal de s’attendre à ce que la fiabilité, la sécurité et la
précision de l’emprise d’une telle servitude soit aussi grandes que celles relatives aux limites de la
parcelle elles-mêmes. Qu’en est-il vraiment?
Chaque canton a une manière différente de voir la chose et on trouve diverses manières d’enregistrer
l’emprise ou le tracé de ces servitudes au RF. Dans certains cas, la pièce constitutive de la servitude
est simplement répertoriée et le texte de l’inscription de la servitude au registre foncier renvoie à cette
pièce justificative qui n’est accessible que sous sa forme «papier» originale. Parfois elle est «scannée» et mise à disposition sur un serveur, ce qui permet à la personne consultant le registre foncier
de la voir facilement, mais en forme «raster» uniquement. Parfois le canton reporte le tracé de la servitude sur le plan du registre foncier et, dans les cas les plus pointus, le service concerné met à disposition du notaire, avant l’établissement de l’acte, le plan sur lequel est reporté par anticipation le
tracé de la servitude qu’il faudra constituer par l’acte authentique.
3.2 Le plan du registre foncier
Les raisons de cette diversité sont multiples et ont souvent des fondements historiques. Par exemple,
la Suisse romande a longtemps utilisé et, dans quelques cas utilise encore, des plans cadastraux
ème
établis au 19
siècle, soit avant l’introduction du registre foncier fédéral et qui étaient provisoirement
reconnus. Sur ces plans on trouve souvent le tracé de «chemin de servitude». Ces «chemin de servitude» sont souvent inscrits ou mentionnés au RF sous la forme «Chemin de servitude selon plan»,
mais sans que n’y figurent les fonds servants et les fonds dominants. Ils sont pourtant admis comme
des droits et des charges dont il faut tenir compte et par conséquent assurer la publicité. Lors de
l’établissement de la MO le sort de ces «chemin de servitude» est traité de manière très disparate
6
suivant les cantons. Bien que l’article 7, alinéa 3 de l’ordonnance sur la mensuration officielle (OMO)
précise que les cantons ont la possibilité de prescrire que les limites de servitudes soient représentées dans la base de données, certains cantons se contentent d’archiver les anciens plans et de ce
fait il ne reste sur les documents en vigueur aucune trace de ces servitudes.
3.3 D’un point de vue légal
Les textes légaux en relation avec les servitudes sont relativement nombreux. Au niveau fédéral, on
7
les trouve essentiellement dans le Code civil, l’ordonnance sur le registre foncier (ORF) et
l’ordonnance sur la mensuration officielle. Les principaux articles sont cités dans annexe 1.
4 Expériences des cantons
4.1 En général
L’OMO précise:
Art. 7, Plan du registre foncier
…
3
Les cantons peuvent en outre prescrire que soient représentées également les limites de servitudes,
pour autant qu’elles soient définies clairement sur le terrain.
…
5
6
7
CC RS 210, article 676
RS 211.432.2
RS 211.432.1
Représentation des servitudes géométriquement représentables – Réflexions sur le principe
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L’inventaire fait auprès de tous les cantons montrera quelles sont les options retenues par chacun des
cantons. Pour le moment, plusieurs cantons romands ont prescrit cette représentation. Les cantons de
Neuchâtel et de Genève sont même allés bien plus loin puis qu’il ne se sont pas contentés de prescrire la représentation des nouvelles servitudes, mais qu’ils ont décidé de les figurer systématiquement. Il est pertinent de relever que ces deux cantons qui ont opté pour une représentation systématique des servitudes figurent parmi les huit cantons pilotes de la mise en place du cadastre RDPPF.
Les exemples donnés ci-après montrent une grande disparité dans la pratique des cantons.
4.2 Exemples particuliers
4.2.1
Canton de Neuchâtel
Dans ce canton les servitudes à référence spatiale figuraient sur le plan cadastral depuis
ème
l’établissement du cadastre à la fin du 19
siècle. En 1994, avec la réalisation de la MO, les instances cantonales du RF et de la Chambre des notaires ont demandé de créer un «Topic» servitudes
dans la MO. En 1995 les chefs de département respectifs (RF et MO) donnent leur accord au projet
financé par une augmentation de l’émolument relatif à l’inscription d’une servitude au RF et par le
budget de fonctionnement. Le projet démarre en 1996, en coordination avec la MO 93 avec pour but
la fin des travaux en 2016. À ce jour, 32’000 servitudes à référence spatiales ont été saisies et sont
gérées.
Bien que les travaux ne soient pas encore totalement achevés, le canton de Neuchâtel
• recense déjà de nombreux bénéficiaires de ce travail, parmi lesquels on citera:
- les organes du registre foncier
- les services de l’État participant à la gestion du territoire
- les communes
- les études de notaires
- les bureaux d’ingénieurs – géomètres, génie civil, aménagistes
- les sociétés d’approvisionnement en énergie et télécoms
• estime en retirer de nombreux avantages dans les domaines suivants:
- l’analyse et le report des servitudes s’en trouvent facilités:
 lors de morcellements de bien-fonds
 dans le cadre de remaniements parcellaires, notamment lors de la mise à l’enquête des servitudes
 dans le cadre de l’introduction du RFF, notamment dans le cadre de la procédure
d’épuration des servitudes
- la consultation par les utilisateurs est simplifiée
 par une diffusion rapide pour des besoins particuliers
 pour les besoin de plans d’enquête lors d’une demande de permis de construire
- lors d’études liées à l’élaboration de plans directeurs ou de plans de quartier
- par le lien simple entre la géolocalisation de la servitude et son descriptif
et finalement tire un bilan économique largement positif.
Représentation des servitudes géométriquement représentables – Réflexions sur le principe
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Figure 3: Exemple de la représentation des servitudes dans le portail du SIT, http://sitn.ne.ch
4.2.2
Canton de Genève
Le canton de Genève a introduit une démarche similaire à celle du canton de Neuchâtel, avec une
différence importante, cependant puisque seules les servitudes récentes sont saisies et reportées
dans le SIG. Pour le reste, la démarche est assez similaire.
Figure 4: Exemple de la représentation des servitudes dans le portail du SITG, http://ge.ch/sitg/
4.2.3
Canton de Fribourg
Dans le canton de Fribourg les servitudes peuvent également être représentées sur le plan du registre
foncier, mais pas nécessairement. Il n’y a pas non plus eu de saisies des tracés des servitudes sur la
base des contrats existants.
Représentation des servitudes géométriquement représentables – Réflexions sur le principe
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Figure 5: Exemple tiré du portail fribourgeois, http://geo.fr.ch/
4.2.4
Canton du Jura
Dans le canton du Jura, les servitudes dessinées sur les anciens plans ne sont pas reportées sur les
nouveaux dans le cadre de la MO. Les anciens plans sont scannés, épurés et référencés, ce qui permet de garder la trace de ces servitudes.
5 Commentaires sur les dispositions actuelles
Un des buts de la révision partielle du Code civil (droits réels immobiliers et droit du registre foncier),
entrée en vigueur le 1.1.2012, était d’améliorer la publicité du registre foncier, la qualité ainsi que la
clarté des inscriptions et de résoudre des problèmes apparus dans la pratique, entre autres dans le
8
domaine des servitudes. Dans le rapport explicatif relatif à l’avant-projet de révision on dit en parlant
de la constitution de servitude:
«Le motif de cette extension réside avant tout dans le fait que les litiges concernant l'interprétation des
servitudes ont fortement augmenté au cours des dernières années. En plus, les servitudes peuvent
subsister au fil des décennies. Elles survivent ainsi à plusieurs générations de propriétaires. Dès lors,
le changement de propriétaire du fonds dominant ou du fonds servant occasionne souvent des conflits
alors que durant des décennies auparavant l'exercice de la servitude n'avait soulevé aucun problème
entre les parties originaires au contrat. Des motifs tirés de la sécurité du droit justifient dès lors le fait
de confier la rédaction des contrats y relatifs à une personne habilitée à dresser des actes authentiques.»
Le texte de ce rapport explicatif montre bien que l’intention du législateur est de renforcer la sécurité
et la précision des délimitations des servitudes ayant un impact surfacique ou linéaire.
Mais on peut se poser la question de savoir si la solution retenue répond vraiment à ce souci clairement exprimé au vu des deux éléments suivants:
5.1 L’extrait de plan du registre foncier
Lorsqu'elle est prescrite, la localisation de la servitude ou de la charge foncière par les parties doit être
effectuée sur un extrait de plan du registre foncier, conformément à l'article 70, alinéa 3, ORF. L’extrait
du plan du registre foncier est, quant à lui, défini dans l’article 7 OMO. On peut donc en déduire que la
servitude ne peut plus être dessinée sur une copie ou une impression quelconque, mais qu’il s’agit
bien de produire l’extrait du plan du registre foncier sur la base des données de la MO et, puisque les
parties au contrat devront ensuite dessiner le tracé de la servitude sur cet extrait, la forme analogique
est nécessaire. La certification de cet extrait selon l’article 37 OMO n’est cependant pas exigée. On
peut donc raisonnablement penser que la production de cet extrait non certifié par les parties se fera
8
www.bj.admin.ch > Thèmes > Etat & Citoyen > Projets terminés > Révision partielle des droits réels immobiliers et du droit du registre foncier
Représentation des servitudes géométriquement représentables – Réflexions sur le principe
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souvent par l’impression d’un plan crée à partir d’un site internet comme le montre les exemples cidessous. Le premier est imprimé à partir du géoportail du canton de Fribourg,
Figure 6: Copie d’un plan produit avec l’outil d’impression du géoportail fribourgeois
pour autant bien sûr que ce plan soit accepté comme «extrait du plan du registre foncier», ce qui est
une autre question. Il peut également être produit à partir du plan créé lors de la génération d’un extrait du cadastre RDPPF.
Figure 7: Copie du plan produit lors de la génération d’un extrait du cadastre RDPPF avec le géoportail zurichois 9
9
http://maps.zh.ch/?topic=OerebKatasterZH
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La génération de ce type de plan passe souvent par la génération d’un fichier PDF qu’il s’agit ensuite
d’imprimer. Or le format PDF ne garde que rarement l’échelle. La comparaison entre l’ impression
directe, depuis Word, d’un texte ou l’enregistrement du même texte dans le format PDF et que l’on
imprime ensuite depuis le PDF le montre clairement. Nous sommes donc en présence d’un plan imprimé sur lequel est inscrit – Échelle 1:500, mais qui en réalité est plutôt à l’échelle d’environ 1:480.
Ce problème a bien été mis en évidence par les travaux réalisés en vue de la production des extraits
certifiés du cadastre RDPPF.
De plus, l’extrait du plan du registre foncier sur lequel la servitude est dessinée représente l’état du
plan à une date donnée. Comme il est très bien constaté dans le rapport explicatif relatif à l’avantprojet de révision partielle du Code civil «… les servitudes peuvent subsister au fil des décennies.
Elles survivent ainsi à plusieurs générations de propriétaires …».
Au fil des décennies, des générations et des mutations qui en découlent, l’aspect du plan cadastral
change beaucoup. Les routes sont rélargies ou réaménagées, ce qui implique des modifications des
limites et de la couverture du sol, les bâtiments sont agrandis, transformés, reconstruits, les limites
sont modifiées par des achats ou échanges de terrain, par des adaptations à l’état des lieux, etc.
La conséquence de toutes ces modifications est que plusieurs générations plus tard, il est difficile de
«calquer» la situation datant de la création de la servitude avec la situation parcellaire du jour (voir à
ce sujet l’exemple donné par Jean-Paul Miserez dans l’article mentionné dans la bibliographie que l’on
trouve à la fin de ce document). Et encore, on ne parle pas là des cas où un remaniement parcellaire,
agricole ou de terrain à bâtir, passe par là.
Cette constatation met donc en évidence une première contradiction entre l’esprit de la prescription
légale qui veut renforcer la fiabilité et la précision dans la durée et la solution retenue pour la réalisation concrète.
Mais si, comme nous l’avons dit plus haut, les bâtiments, les limites et la couverture du sol se modifient au cours des années, il en est de même pour les servitudes dont le tracé doit parfois être adapté
à l’évolution de l’environnement proche. Il n’est pas rare de constater que, suite à l’agrandissement
d’un bâtiment, l’assiette réelle d’un droit de passage ou d’une conduite soient de fait déplacés dans le
terrain, sans cependant que le droit y relatif soit adapté, souvent par manque de connaissance de
l’existence ou de l’assiette de ce droit, ce qui peut engendrer ultérieurement d’importants problèmes
du fait que l’emprise du droit n’est pas conforme avec l’emprise réelle dans le terrain comme le montre
bien cet exemple:
Figure 8: Droits de passage, commune de Corcelles – Cormondrèche tiré du portail du SIT, http://sitn.ne.ch
Représentation des servitudes géométriquement représentables – Réflexions sur le principe
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5.2 Le dessin de la servitude
Aux termes de l'article 70, alinéa 3, ORF «lorsqu'un extrait de plan du registre foncier doit être joint au
justificatif, la localisation de la servitude ou de la charge foncière doit être effectuée par les parties sur
cet extrait [de plan du registre foncier] de telle manière qu’elle ne donne lieu à aucune ambiguïté du
point de vue géométrique.»
La spécificité du plan cadastral, par rapport à un plan d’architecte ou d’ingénieur, est qu’il ne contient
pas de cotes et c’est donc le dessin lui-même qui «dit » le droit, contrairement au plan d’ingénieur où
la cote a la priorité sur la précision du dessin. Mais un dessin précis, d’autant plus sur un papier normal, n’est pas à la portée de tout le monde. N’oublions pas qu’un millimètre sur un plan au 1:1000
représente 1 mètre sur le terrain. Cette simple constatation met dès lors en évidence un deuxième
problème qui contredit l’intention du législateur de renforcer la sécurité de la délimitation géographique
des servitudes qui ne doit donner lieu, rappelons-le «à aucune ambiguïté du point de vue géométrique». «Cette mesure devrait permettre de désamorcer les conflits dès lors que la volonté commune
10
des parties aura ainsi été vérifiée, puis reportée de façon claire et précise» .
Mais la difficulté de produire un dessin clair et précis n’est pas le plus lourd des inconvénients. En
effet avec l’option retenue, soit le dessin sur un extrait de plan du RF, la géométrie de la servitude
restera toujours à une échelle figée et en deux dimensions. Or actuellement toutes les informations
relatives à la MO sont saisies dans des systèmes d’information du territoire et peuvent donc être reproduites sans perte de précision à n’importe quelle échelle et sur n’importe quel support, réel ou virème
tuel. De plus, l’utilisation de plus en plus dense du sol et du sous-sol implique que le recours à la 3
dimension pour en préciser l’utilisation deviendra une règle. Or ceci n’est pas possible avec l’option
retenue, qui ne peut être que bidimensionnelle.
6 Quelques considérations
Le dépouillement et l’analyse des résultats du questionnaire accompagnant ce document devrait permettre de faire une analyse détaillée de la situation et donner au groupe de travail les arguments pour
étayer les propositions qu’il aura à faire. Néanmoins et dans l’état actuel de ces réflexions on peut
mettre en exergue, sans toutefois que cette liste soit exhaustive, quelques avantages et quelques
inconvénient à organiser la gestion du tracé des servitudes au moyen des outils actuels.
6.1 Les avantages
• Comme on l’a dit plus haut, la pression sur les terrains, notamment dans les zones constructibles
devient de plus en plus forte. Une information relative au territoire complète et fiable devient donc
un outil indispensable pour gérer efficacement ce territoire, y compris les servitudes qui y sont rattachées.
• Lorsqu’elles sont facilement à disposition, les servitudes sont très fréquemment consultées,
comme par exemple lorsque le canton de Neuchâtel a souhaité connaître l’ensemble des chemins
situés le long du lac ou y donnant accès. C’est une aide précieuse à la décision qui n’est possible
que par une gestion des servitudes au moyen de systèmes d’information du territoire. Le canton de
Neuchâtel estime d’ailleurs que le bilan économique est positif.
• Comme il en est de l’extrait du cadastre RDPPF qui contient non seulement les dispositions juridiques, mais aussi le plan, un extrait du registre foncier contenant le tracé des servitudes représente incontestablement une augmentation de la fiabilité et de la sécurité de l’information.
• Les outils actuels utilisés dans le cadre de la géoinformation permettent des analyses, des comparaisons, des inventaires par la possibilité qu’ils offrent de représenter les objets sur différents fonds
de cartes ou orthophotos. Une divergence entre le tracé théorique de la servitude et l’utilisation réelle dans le terrain apparaît ainsi immédiatement.
6.2 Les inconvénients
• L’opération de saisie des servitudes actuellement inscrites n’est certes pas gratuite. À titre de
comparaison le canton de Neuchâtel consacre un équivalent plein temps à ce travail durant 20
ans.
10
Rapport explicatif relatif à l’avant-projet de Révision partielle du Code civil – page 15
Représentation des servitudes géométriquement représentables – Réflexions sur le principe
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• Il est toujours «délicat» de changer les habitudes établies et les adaptations nécessaires risquent
de ne pas être toujours être bien acceptées.
• Au fur et à mesure des mutations enregistrées, la situation devient de plus en plus délicate. Avec le
temps qui passe le risque d‘avoir une casse, du fait de l’absence ou de la perte d’informations,
n’est pas négligeable.
• La gestion «graphique» des servitudes ne va pas dans la direction des principes de l’egovernment, principes qui sont appliqués pour la tenue du RF lui-même, du cadastre RDPPF et de
la MO.
7 Prochaines étapes
Dès le retour des questionnaires et sur la base des résultats obtenus, le groupe de travail pourra établir la situation réelle de ce qui se passe dans les cantons, puis, sur la bases des pratiques et des
expériences faites par les cantons, il pourra proposer le maintien du statut actuel ou la poursuite de la
réflexion et en cas de poursuite de la réflexion il aura à préparer les choix qui devront se faire entre:
• mettre sur pied un cadastre des servitudes, à l’image de ce qui se fait pour les RDPPF,
• intégrer la représentation des servitudes géométriquement représentables dans le modèle de
données de la MO,
• intégrer les servitudes dans une couche particulière du SIT, en dehors de la MO
• réfléchir à d’autres possibilités.
8 Conclusions
Comme on l’a vu plus haut, l’intention du législateur en imposant la forme authentique pour la constitution d’une servitude était d’«améliorer la qualité et la clarté des inscriptions», mais la solution retenue pour leur représentation n’est pas totalement satisfaisante sous cet angle-là..
La gestion de la représentation de l’emprise ou du tracé des servitudes géométriquement représentables, telle qu’elle est faite aujourd’hui, ne répond plus aux besoins de plus en plus nombreux
qu’exige une gestion rationnelle de terrains sur lesquels la pression exercée est de plus en plus forte.
La résistance d’une chaîne se mesure à son maillon le plus faible. À l’époque où l’on s’investit pour
informer de manière claire et officielle sur les restrictions de droit public à la propriété foncière, il est
souhaitable que l’on attache plus d’importance à la représentation des restrictions de droit privé que
sont les servitudes géométriquement représentables.
Représentation des servitudes géométriquement représentables – Réflexions sur le principe
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Annexe 1: Bases légales
Afin d’analyser la situation relevons ici les principaux articles de lois qui ont une relation directe avec
la thématique traitée:
-
Code civil suisse (CC), RS 210
Article 732
Acte constitutif
1
L'acte constitutif d'une servitude n'est valable que s'il a été passé en la forme authentique.
2
La servitude doit être dessinée sur un extrait de plan du registre foncier lorsque son exercice se
limite à une partie de l'immeuble et que le lieu où elle s'exerce n'est pas décrit avec suffisamment
de précision dans le titre.
-
Ordonnance sur le registre foncier (ORF), RS 211.432
Article 2: Notion
Au sens de la présente ordonnance, on entend par:
…
f. le plan du registre foncier: l’extrait des données de la mensuration officielle telles que prévues à l’art. 7 de l’ordonnance du 18 novembre 1992 sur la mensuration officielle (OMO) ;
Article 70: Servitudes et charges foncières
…
3
Lorsqu’un extrait de plan du registre foncier doit être joint au justificatif relatif au titre (art. 732, al.
2, CC), la localisation de la servitude ou de la charge foncière doit être effectuée par les parties sur
cet extrait de telle manière qu’elle ne donne lieu à aucune ambiguïté du point de vue géométrique.
…
-
Ordonnance sur la mensuration officielle (OMO), RS 211.432.2
Article 7: Plan du registre foncier
1
Le plan du registre foncier est un produit graphique établi sous forme analogique ou numérique à
partir des données de la mensuration officielle et qui, en tant qu’élément constitutif du registre foncier, délimite les biens-fonds, ainsi que les droits distincts et permanents et les mines différenciés
par la surface; il acquiert la force juridique des inscriptions au registre foncier.
2
Il comprend le contenu des couches d’information «points fixes», «couverture du sol», «objets divers», «nomenclature», «biens-fonds», «conduites», «limites territoriales», «adresses de bâtiments» et «divisions administratives».
3
Les cantons peuvent en outre prescrire que soient représentées également les limites de servitudes, pour autant qu’elles soient définies clairement sur le terrain.
4
La Direction fédérale des mensurations cadastrales définit le modèle de représentation du plan du
registre foncier.
Article 28: Enquête publique
…
2
L’enquête publique porte sur le plan du registre foncier du secteur concerné, ainsi que sur
d’autres extraits des données de la mensuration officielle produits en vue de la tenue du registre
foncier.
3
Les cantons règlent la procédure, en respectant les principes suivants:
…
d. une copie d’un extrait du plan du registre foncier est remise au propriétaire foncier qui en fait
la demande;
…
Article 37: Extraits certifiés conformes
1
Les extraits certifiés conformes sont des extraits des géodonnées de base de la mensuration officielle, produits sous forme analogique ou numérique, dont la conformité avec les données en vigueur de la mensuration officielle a été certifiée par un ingénieur géomètre inscrit au registre des
géomètres.
Représentation des servitudes géométriquement représentables – Réflexions sur le principe
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Annexe 2: Bibliographie
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Article technique «Les servitudes foncières dans la mensuration officielle», Jean-Paul Miserez,
Direction fédérale des mensurations cadastrales swisstopo, revue «cadastre» N° 4 de décembre
2010, pages 4-6
www.cadastre.ch > Mensuration officielle > Documentation > Publication > Revue spécialisée
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Article technique «Établissement d’une couche «servitudes» dans le système d’information du
territoire neuchâtelois», Pierre-Alain Trachsel, Bulletin d’information, INFO D+M 3-2005,
pages 9-11
www.cadastre.ch > Mensuration officielle > Documentation > Publication > Revue spécialisée > Bulletin d’information
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Rapport explicatif relatif à l’avant-projet de révision partielle du Code civil (droits réels immobiliers
et droit du registre foncier)
www.bj.admin.ch > Thèmes > Etat & Citoyen > Projets terminés > Révision partielle des droits réels immobiliers et du droit
du registre foncier
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