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EL MOUDJAHID POLITIS-Final-07.qxp 17/09/11 17:30 Page 1 L'EXPÉRIENCE DE L'ALGÉRIE DANS LE DOMAINE DE LA LUTTE CONTRE LE TERRORISME Une action conforme à la charte onusienne CONDITIONS DE LA LUTTE CONTRE LE TERRORISME Des pistes algériennes de réflexion TERRORISME LES MARCHANDS DE LA MORT SENS ET ESSENCE DU 11 SEPTEMBRE 2001 L’impact sur l’Amérique et sur les relations internationales IF S EXCLU M. DANIEL BENJAMIN : «Notre coopération avec l’Algérie est plus forte que jamais» MICHAEL WA LMA : «Les réalisations de l’Algérie en matière de lutte contre le terrorisme sont remarquables» N°01 01 Septembre Septembre2011-prix 2011-prix150 150DADA N° EL MOUDJAHID POLITIS-Final-07.qxp 17/09/11 17:30 Page 2 EL MOUDJAHID POLITIS-Final-07.qxp 17/09/11 17:31 Page 3 POLITIS - EL MOUDJAHID - N° 001 - SEPTEMBRE 2011 au capital social de 50.000.000 DA 20, rue de la Liberté, Alger Téléphone : 021.73.70.81 Présidente-Directrice générale de la publication Naâma Abbas DIRECTION GENERALE Téléphone : 021.73.79.93 Fax : 021.73.89.80 DIRECTION DE LA REDACTION Téléphone : 021.73.99.31 Fax : 021.73.90.43 COORDINATION : Mourad Termoul COLLABORATEURS : Nora Chergui Nadia Kerraz Dr Mhand Berkouk Bachir Medjahed Amine Esseghir Abdecelem Ikhlef Fouad Irnatene Meriem Zenati Youcef Kaced CONCEPTION ET RÉALISATION : Redouane Meliha RECHERCHE ICONOGRAPHIQUE : Samir Khodja Internet : http://www.elmoudjahid.com E-mail : [email protected] PUBLICITE Pour toute publicité, s’adresser à l’Agence nationale de communication d’édition et de publicité “ANEP” ALGER : 1, avenue Pasteur Tél. : (021) 73.76.78 - 73.71.28 73.30.43 Fax : (021) 73.95.59 - Télex : 56.150 Télex : 81.742 EL MOUDJAHID 20, rue de la Liberté, Alger Tél./Fax : 021 73.56.70 ABONNEMENTS Pour les souscriptions d’abonnement, achats de journaux ou commandes de photos, s’adresser au service commercial : 20, rue de la Liberté, Alger. 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Un espace de réflexion et d’analyse pour les différents analystes politiques et universitaires. Un autre regard sur les questions de l’heure qui secouent le monde et les perspectives qui se dessinent pour les relations internationales. Politis, c’est aussi une autre vision d’un monde reconfiguré tel que nous le voyons, et que nous souhaitons qu’il soit. Un monde où la paix et la justice seraient les principales devises. Mais, hélas, pour celui dans lequel nous vivons, on est loin de cet idéal ! Famine, pauvreté, guerres, crise financière, crise énergétique, crise de l’eau, terrorisme, et bien d’autres fléaux demeurent le lot de l’humanité, en croissance exponentielle. Avec bientôt un peu plus de sept milliards d’habitants, quel avenir commun envisageons-nous ? Pour l’heure, aucune réponse claire. Uniquement des projections très souvent assombries par le reflet de notre présent et les données peu rassurantes d’un futur proche. Dans ce premier numéro, Politis tente de disséquer le mal du siècle, à savoir le terrorisme. Comprendre ses ramifications, ses motivations, ses mécanismes, son sens et son essence, ses sources de financement et la nécessité d’une stratégie mondiale pour en venir à bout, c’est aussi une forme de lutte qu’il faut engager tous ensemble contre cette hydre de Lerne. En constante métamorphose et à la recherche de nouveaux liens, les réseaux terroristes développent des interconnexions avec d’autres groupes maffieux, des trafiquants de drogue, d’autres chargés du blanchiment d’argent avec la criminalité transnationale, et même des liens, qualifiés pourtant de contre nature, avec des mouvements d’extrême droite. Ce mal défie les Etats et les gouvernements qui peinent – à charge ou à décharge – à unifier leurs stratégies, pourtant seul traitement efficace connu jusqu’à présent. On a tous espéré qu’après la disparition de ben Laden, la stratégie de la mort adoptée jusqu’à présent par ses troupes allait prendre fin, et que le cœur d’El-Qaïda allait cesser de battre. Rien de tel. Le risque d’une fragmentation de cette organisation est plus que réel, rendant ainsi les marchands de la mort plus nuisibles. La désignation et la survie d’El-Zawahiri à la tête de la plus grande organisation criminelle au monde, et cela après six semaines de tractations, demeure aléatoire et surtout tributaire des résultats obtenus sur le terrain. En plus clair, des massacres, encore des massacres, à grande échelle, cette fois. M. T. POLITIS. Par Mourad Termoul 3 EL MOUDJAHID POLITIS-Final-07.qxp 17/09/11 17:31 Page 4 4 POLITIS - EL MOUDJAHID - N° 001 - SEPTEMBRE 2011 SOMMAIRE L’éditorial Mieux comprendre p3 Eclairage Tous ensembles p5 Région du Sahel Pour un épistème de sécurité collective p6 La problématique du progrès dans la région sahélo-saharienne Le développement, l’autre arme antiterroriste p8 Paiement de rançons Une violation des engagements internationaux p12 Rançon, drogue et crime organisé Le filon des groupes armés p14 DOCUMENT L'expérience de l'Algérie dans le domaine de la lutte contre le terrorisme Une action conforme à la charte onusienne p17 L’Afrique résolue à combattre le terrorisme L’Union fait la force p22 Les conditions de la lutte contre le terrorisme Des pistes algériennes de réflexion p24 M. Abdelkader Messahel, ministre délégué auprès du ministre des AE, chargé des Relations maghrébines et africaines «La présence importante d’experts à la conférence témoigne de leur disponibilité à renforcer davantage leur coopération avec notre pays» p28 M. Henry S. Ensher, ambassadeur américain en Algérie «Les Etats-Unis et l’Algérie ont été et demeurent engagés à travailler ensemble» p30 EN EXCLUSIVITÉ M. Daniel Benjamin, coordonnateur de la lutte antiterroriste au département d’Etat américain «Notre coopération avec l’Algérie est plus forte que jamais» p32 EN EXCLUSIVITÉ Michael Walma, directeur de la Direction du crime international et du terrorisme au ministère canadien des AE et du Commerce international «Les réalisations de l’Algérie en matière de lutte contre le terrorisme sont remarquables» p34 Sens et essence du 11 septembre 2001 L’impact sur l’Amérique et sur les relations internationales p36 Dix ans après les attentats du 11 septembre 2001 Et les USA changèrent le monde… p45 Lutte contre la criminalité transnationale Nouvelle stratégie des EtatsUnis p49 Understanding International Terrorism p52 EL MOUDJAHID POLITIS-Final-07.qxp 17/09/11 17:31 Page 5 POLITIS - EL MOUDJAHID - N° 001 - SEPTEMBRE 2011 Eclairage Tous ensembles le monde assistait, en direct, à une attaque terroriste qui avait visé les deux tours jumelles du World Trade Center, le Pentagone… Une image chaotique qui restera, à jamais, gravée dans la mémoire des hommes. Car, jamais un tel scénario d’horreur n’avait pu être imaginé. Les images que nous avons tous «consommées», les yeux ébahis, de cet avion kamikaze fonçant à pleins gaz et percutant de plein fouet un building, la fumée, les cris… et le choc. Celui des images retransmises par CNN, puis l’horreur et la mort. Le nombre important de victimes, toutes innocentes, de citoyens qui s’étaient rendus ce jour-là, comme chaque jour que Dieu fait, sur leur lieu de travail. Les premières questions qui viennent à l’esprit : pourquoi une telle violence, pourquoi une telle haine à l’égard de la vie humaine ? Qui sont ces hommes ? Au nom de quoi s’arrogent-ils le droit de détruire autant de vies innocentes ? Beaucoup d’encre a coulé sur ce fameux 11 septembre, et beaucoup de thèses ont été développées les unes plus intéressantes que les autres. Mais une chose reste certaine : il y a eu un avant et un après-11 septembre. En effet, les attentats du World Trade Center aussi terribles que choquants allaient révéler au monde entier la réalité du monstre, le nouveau fléau de ce siècle, le terrorisme en tant que phénomène transnational. Non pas parce que ce dernier n’existait pas auparavant, mais tout simplement celui-ci venait de démontrer sa capacité de nuisance à l’échelle mondiale. On ne cessera jamais de se poser la question et, à juste titre, comment des institutions aussi sophistiquées que la CIA, le FBI et autres n’ont pas vu venir la chose ? S’enfoncer dans la thèse selon laquelle ces attentats sont le fruit machiavélique d’un complot fomenté dans un labo, c’est reprendre à notre compte les fameuses thèses du «qui-tue-qui ?» qui a fait tant de mal à notre pays durant toute la décennie noire qui avait frappé l’Algérie. Les attentats qui ont visé les Etats-Unis d’Amérique aussi violents que choquants ont levé la chape de plomb qui pesait sur le combat que menaient les Algériens seuls face à cet ennemi. Un combat en solitaire dans une souffrance indescriptible et inhumaine. Combien de vies ont-elles été ravies en Algérie pour qu’enfin on puisse comprendre la dangerosité de ce monstre qui commençait à se développer face à la complaisance et au silence à la limite de la complicité des capitales occidentales qui n’étaient nullement gênées par ce qui se passait de ce côté du monde ? Pourquoi a-t-on attendu que des milliers de vies humaines soient fauchées en une seule journée, pour que l’on prenne enfin conscience du danger que représente ce monstre que l’on tentait de domestiquer ? Le 11 septembre n’est-il pas en fait une rupture totale d’un système complaisant enfermé dans ses certitudes et son aveuglement qui a laissé évoluer un phénomène au point de le rendre extrêmement nuisible et de frapper en plein cœur les Etats-Unis dite la superpuissance ? El-Qaïda, organisation terroriste, a, en ce jour du 11 septembre, révélé au monde entier sa capacité de nuisance, une organisation ayant des ramifications dans plus de 60 pays, des connexions avec les narcotrafiquants, la criminalité, le trafic d’armes et le trafic en tous genres. El-Qaïda ne se revendique d’aucun Etat, on sait aujourd’hui que les groupes terroristes fonctionnent grâce à des bases arrières, qu’ils possèdent des soutiens financiers très importants et des sanctuaires dans lesquels ils peuvent se terrer. Il aura fallu plus de dix ans aux troupes de la coalition pour venir à bout de ben Laden. Le terrorisme est-il pour autant vaincu ? Hélas, non ! Sa capacité de nuisance demeure toujours intacte, toujours imprévisible et souvent d’une extrême violence. Aujourd’hui plus que jamais, le monde entier est interpellé à lutter contre ce fléau transnational qui menace notre quiétude et nos vies. L’essence même des thèses algériennes, que notre pays s’est longtemps évertué à développer et sur lesquelles il a attiré l’attention. M. Abdelaziz Bouteflika n’a-t-il pas déclaré déjà à ce propos en 2002, lors de la conférence internationale tenue à Alger, qu’«aucun Etat ne peut fonder sa sécurité en ignorant celle des autres, et encore moins au détriment des autres. Les initiatives unilatérales et contre-productrices doivent céder le pas à une politique de renforcement de la sécurité internationale qui soit concertée et solidaire » ? Une déclaration qui en disait long sur la nécessité de l’engagement international sans faille, pour venir à bout de ce fléau bien ancré dans la mondialisation. N. A. IL Y A 11 ANS, Par Naâma Abbas 5 EL MOUDJAHID POLITIS-Final-07.qxp 17/09/11 17:31 Page 6 6 POLITIS - EL MOUDJAHID - N° 001 - SEPTEMBRE 2011 11 SEPTEMBRE... 10 ANS APRÈS RÉGION DU SAHEL Pour un épistème de sécurité collective Pr Mhand Berkouk (*) Le Sahel a besoin du savoir-faire, du déterminisme et du sens de responsabilité et du légalisme de l’Algérie. e Sahel est devenu depuis le début du Millénaire une aire d’intérêt géosécuritaire pour les acteurs essentiels de ce monde : les USA, la France, la Chine… pour des raisons énergétiques, économiques et stratégiques. Et cette sous-région est devenue une zone d’inquiétude pour les pays de cet espace géopolitique : Algérie, Mali, Niger, Tchad, Soudan, Mauritanie, Burkina Fasso…, à cause de la prolifération d’un certain nombre de dynamiques crisogenes. Cette région est composée d’Etats en faillite (selon la Foreign Policy Failed States Index), avec le Soudan qui fait face à des problèmes de stabilité interne même avec l’indépendance du Sud ; le Tchad avec ses problèmes d’intégration Nord-Sud et les interminables problèmes de crise d’identité au Mali, Niger et Mauritanie. Ces pays souffrent de problèmes endémiques de sous-développement, de surendettement, de pauvreté dépassant dans l’ensemble 50% des populations, la prolifération de plusieurs pandémies, des cas de famine, sans oublier leurs dépendances à leurs anciens colonisateurs (la France notamment pour les pays francophones du Sahel). Le Sahel souffre aussi de problèmes d’inadéquation sécuritaire avec une mauvaise gestion des frontières déjà poreuses, des terriritoires immenses et peu peuplés, et un déficit important en moyens militaires. Cette inadéquation affecte très négativement leurs capacités individuelles à faire face à des menaces mouvantes et transnationales. Des menaces asymétriques Cette sous-région est confrontée à un nombre de menaces asymétriques : la traite humaine, l’immigration clandestine, le trafic d’organes humains, la contrebande, le trafic de drogues dures en provenance d’Amérique latine en passant par la baie de Guinée – le Sahel-Maghreb-Europe. Ces actes criminels sont connectés avec le terrorisme international qui offre des services de protection au crime organisé en contrepartie de sommes colossales d’argent comme un des modes de financement des groupes terroristes. Au fait, ces groupes utilisent aussi les pays du Sahel pour le développement de leurs capacités opérationnelles soit en développant leurs entraînement, en s’armant, en recrutant, et pour entreprendre des actes terroristes contre ces Etats, leurs institutions et leurs citoyens, mais aussi contre des pays voisins et des ressortissants étrangers en contrepartie de payement de rançons pour la libération d’otages. Une autre méthode de financement de la machine terroriste. L’Algérie, en tant qu’Etat sahélo-maghrébin ayant souffert de la dévastation criminelle et sanguinaire du terrorisme, œuvre depuis presque 20 ans pour la promulgation d’un instrument juridique mondial contre le terrorisme. Elle travaille aussi pour le 4 L De étendues qu’il faut impérativement surveiller. développement d’une approche collective contre le terrorisme au Sahel. Cette approche est basée sur un nombre de points fondamentaux : le terrorisme est transnational par son caractère et transfrontalier sur le plan opérationnel. C’est un phénomène qui est connecté aux différentes formes de criminalité organisée. Toute ingérence étrangère peut exacerber la situation sécuritaire au Sahel. Le terrorisme doit être combattu selon une approche multidimensionnelle : préemption-préventionprotection-promotion. L’Algérie a lancé depuis 2009 une initiative collaborative de sécurité au Sahel sur le plan de la coordi- nation de défense après la réunion des chefs d’état-major d’Algérie, du Mali, du Niger et de Mauritanie, et qui s’est matérialisée par la création d’un centre de commandement commun basé à Tamanrasset (avril 2010) et encadré par une volonté politique commune pour éradiquer ce phénomène dans un cadre régional et sans ingérence étrangère. Les actions militaires françaises, à deux reprises, ont joué en faveur des terroristes par la médiatisation de leurs actes criminels. Les concessions françaises dans l’affaire Pierre Camat sont contraires à la logique du contre-terrorisme et du consensus mondial contre ce fléau mondial, et encouragent l’ascendance de la menace terroriste EL MOUDJAHID POLITIS-Final-07.qxp 17/09/11 17:31 Page 7 7 POLITIS - EL MOUDJAHID - N° 001 - SEPTEMBRE 2011 4 MOHAMED BAZOUM, MINISTRE NIGÉRIEN DES AE : « La crise libyenne a transformé le Sahel en poudrière » dans la région. La dynamique de croissance du terrorisme au Sahel peut se consolider avec le climat d’insécurité qui règne en Libye (insurrection armée, un break-down des institutions de sécurité, émergence de zones grises d’insécurité et prolifération d’armes qui risquent d’alimenter la machine terroriste et d’élargir le champ d’actions d’El-Qaïda et de ses acolytes en Afrique). C’est une menace pour la sécurité continentale et un défi majeur pour l’Afrique et les pays de la sous-région. L’Algérie, un leader reconnu Les tractations diplomatiques et les discussions militaires entre les pays de la sous-région démontrent une volonté commune de lutte contre le terrorisme et les crimes connexes, qui requièrent un engagement international de soutien à la paix et à la sécurité en Libye et en développant un plan d’action régional capable de confronter les différentes crises et menaces dans cette région. Les acteurs essentiels de ce monde doivent aussi apporter une plus-value à la lutte régionale contre le terrorisme, non pas par de l’ingérence, mais par un apport au développement des capacités nationales des pays du champ sahélien, notamment la Mauritanie, le Mali et le Niger. L’Algérie, avec son dynamisme diplomatique, son expertise dans le contre-terrorisme et sa crédibilité internationale, par son respect infaillible de la légalité internationale en respectant la souveraineté des Etats et en refusant toute ingérence dans les affaires internes d’autres pays, est un leader régional en matière de sécurité qui est reconnu pour son constructivisme et son statut de leader en peace-making en Afrique, mais aussi à l’échelle mondiale. Le Sahel a besoin du savoir-faire, du déterminisme et du sens de responsabilité et du légalisme de notre pays. M. B. (*) Directeur du Centre de recherche stratégique et sécuritaire (CRSS) LA CRISE libyenne a transformé le Sahel «en poudrière», a déclaré le ministre nigérien des Affaires étrangères Mohamed Bazoum à l'ouverture d'une conférence internationale de deux jours à Alger consacrée à cette région. «La région a été transformée en poudrière», a-t-il dit aux 38 délégations présentes à cette conférence organisée par l'Algérie à la demande des pays dits du «champ», en référence aux quatre pays sahéliens Algérie, Niger, Mali et Mauritanie, touchés par le terrorisme, le crime organisé transnational et la pauvreté. Pour illustrer cette menace, M. Bazoum a évoqué la circulation des armes provenant de Libye où le colonel déchu Mouammar Kadhafi avait distribué des armes avant que ses arsenaux ne tombent dans diverses mains. Il a évoqué une série de vols de véhicules toutterrains qui écument désormais les quelque 8 millions de km2 du Sahel avec à leur bord des terroristes d'Al Qaeda au Maghreb Islamique (AQMI) ou trafiquants. Tant le ministre nigérien que ses collègues malien, mauritanien et algérien ont noté l'influence de cette situation «sur la sécurité globale» du monde. EL MOUDJAHID POLITIS-Final-07.qxp 17/09/11 17:31 Page 8 8 POLITIS - EL MOUDJAHID - N° 001 - SEPTEMBRE 2011 11 SEPTEMBRE... 10 ANS APRÈS LA PROBLÉMATIQUE DU PROGRÈS DANS LA RÉGION SAHÉLO-SAHARIENNE Le développement, l’autre arme antiterroriste Par Amine Esseghir rès de huit millions de kilomètres carrés de désert de rocaille. Un esprit inspiré par un excès de pragmatisme se demanderait pourquo tiend-on à un tel territoire. Pourtant, ce désert intéressait plus que tout les colonisateurs qui ont occupé une bonne partie de l’Afrique entre le XIXe et la première moitié du XXe siècles. La région sahélo-saharienne est d’abord victime de son environnement impitoyable. Subissant d’abord les contraintes climatiques et naturelles, elle a vu les populations se réduire au fur et à mesure du temps. Cet immense territoire n’est plus ponctué que de rares villes, de quelques oasis et de zones de pâturage ou de cultures agricoles. De minuscules zones, au regard de l’étendue du territoire sur lequel elles se trouvent. C’est sur cette surface gigantesque, aride ou semi-aride, que les populations touareg, arabes, haoussa, songaï, peulhs, toubous, kanouri, gourmantchés, bambara, dogon, malinké, sénoufo, massana, dioula, bissa, lyélé, et beaucoup d’autres vivent. Une multitude de cultures, d’usages, de coutumes, voire de religions pour qui la différence peut autant constituer une possibilité extraordinaire d’échanges qu’un obstacle ethnique infranchissable. Cet isolement des populations n’a pas non plus facilité la mise en commun des moyens pour permettre un développement équilibré et un progrès également réparti. Ces populations éparpillées, sans moyens, sans contacts et sans ressources, en dehors d’une agriculture vivrière basique, un élevage sans réelles ambitions en dehors d’une exploitation alimentaire, voire de l’artisanat ou du commerce, se re- P 4 Les groupes terroristes en ont fait une exceptionnelle base arrière et un prodigieux champ de bataille. Une région où la nature et l’environnement peuvent constituer le premier ennemi de l’homme. Des populations rares et éparpillées. La région sahélo-saharienne n’en est pas moins intéressante par les richesses naturelles et surtout la diversité humaine qu’elle recèle. Une diversité qui, si elle n’est pas sérieusement prise en charge, sera livrée pieds et poings liés au diktat des groupes armés. La lutte contre le terrorisme requiert la coopération de tous les Etats de la région. trouvent parfois otages des groupes armés. Dans un contexte d’intense précarité, les groupes armés qui ont jeté leur dévolu sur cette région ont pu trouver dans la misère une aide, un soutien et une capacité de recrutement de militants, alors que le dénuement extrême peut facilement pousser à toutes les dérives. Il faut savoir que les groupes armés, foncièrement menaçant, ont tôt fait de trouver planques et renseignements chez quelques familles parmi les populations locales, notamment là où les Etats sont absents. Dans les zones plus ou moins urbanisées ou simplement habitées, AQMI ou d’autres groupes (on peut évoquer à ce propos les Boko Haram, dits aussi les talibans du Nigeria) peuvent aller se ravitailler, recruter des candidats potentiels et éventuellement mener des opérations de rapt, lorsque la présence d’étrangers le suggère, ou mener des rezzou, des rapines chez des habitants qui n’ont d’ailleurs pas grand-chose à donner. Quand AQMI a érigé le rapt et la rançon en activité particulièrement lucrative, elle ne pouvait s’adonner à cette activité sans l’aide de tous ceux qui essayaient de s’en sortir quand aucun autre débouché n’était proposé. Fournir des renseignements, agir en taupe dans les quelques bases de vie des entreprises de prospection pétrolière ou minière devenaient donc un acte militant pour un djihad supposé ou plus prosaïquement être un moyen de s’enrichir quand ce n’était pas pour protéger sa famille ou ses EL MOUDJAHID POLITIS-Final-07.qxp 17/09/11 17:31 Page 9 9 POLITIS - EL MOUDJAHID - N° 001 - SEPTEMBRE 2011 4 SOUMEYLOU BOUBÈYE MAÏGA, MINISTRE MALIEN DES AE LORS DE LA CONFÉRENCE D’ALGER : «Nous ne voulons pas que le Sahel devienne un théâtre de conflit» proches contre une menace réelle d’un groupe djihadiste lié à AQMI. Les deux faces d’une pièce Il faut dire que dans le cas de la région sahélo-saharienne, le sousdéveloppement aura généré l’insécurité, pour que celle-ci ne subsiste finalement que grâce à l’absence de progrès. La région étendue génère effectivement des difficultés de sécurisation. Un marché concomitant, chthonien, s’ensuit : sans sécurisation, pas de stabilité des populations, absence de populations induisant absence de sécurité. L’absence de sécurité est aussi à l’origine des déboires des populations privées d’infrastructures de base telles que les centres de santé ou les salles de soins, les écoles, les commerces, etc. Une conjoncture qui a plongé les populations dans une précarité devenue la norme et qui ne favorise en aucune manière un développement local. Le plus étrange, c’est que cette région connaît une activité économique intense depuis le VIIIe siècle. Ce qu’on appelle le commerce transsaharien a permis aux produits de l’Afrique subsaharienne d’arriver jusqu’en Europe ou en Orient. L'ambre, la gomme arabique, les peaux venaient du Sud. Les bijoux, les tissus, les dattes le blé, mais aussi l'or, le sel venaient du Nord. Ce commerce qui n’a vraiment cessé qu’au début du XXe siècle a vu malheureusement aussi se développer la traite des êtres humains, même si cette pratique existait également en Occident. C’est ce même commerce qui a permis l’émergence de grandes villes comme Tombouctou, Sijilmassa, Aoudaghost, ou le développement d’Etats comme l’empire de Gao ou le royaume de Kanem Bonou. Une activité économique qui s’était développée dans un contexte aussi difficile naturellement qu’il ne l’est aujourd’hui. D’ailleurs, le mouvement des populations actuelles, le cousinage lui-même vient de ces relations ancestrales qui existaient en Afrique, et particulièrement dans cette région. L’absence de développement actuelle et une prépondérance de la pauvreté qui induisent finalement cette insécurité évoquée au début et qui ne favorise aucunement l’exploitation des ressources naturelles à même de permettre le développement LA CRISE en Libye a amplifié la situation sécuritaire dans la région du Sahel, mais ne nécessite pas l'envoi de troupes extrarégionales, a indiqué à Alger le ministre malien des Affaires étrangères, Soumeylou Boubèye Maïga à la radio nationale. «Nous ne voulons pas que le Sahel devienne un théâtre de conflit, un théâtre de guerre. Notre objectif est de faire de notre zone, une zone de sécurité», a déclaré le ministre à la radio Chaîne III. «La responsabilité de maintenir la sécurité est d'abord fondamentalement du ressort des pays voisins», mais il est possible, a poursuivi le ministre, «de solliciter l'aide des partenaires» sur le plan du renseignement, de l'observation et de la formation. Rejetant toute intervention étrangère dans la région, le chef de diplomatie malienne a ajouté : «Nous n'avons pas besoin de troupes extrarégionales.» Abordant la situation de la crise en Libye, M. Maïga a affirmé qu'«elle est venue amplifier des menaces que nous avions déjà et qui tournaient autour de l'existence de groupes terroristes mafieux». Il a estimé que la situation en Libye est «dangereuse» et que «les capacités d'AQMI se trouvent renforcées» par la circulation des armes dans la région et les connexions avec des groupes mafieux. Toutefois, il reconnaît qu'il faut être «très réaliste» quant aux capacités des Etats à surveiller des frontières très longues pour éviter la circulation des armes. 17/09/11 17:31 Page 10 local et accroître les capacités économiques du pays. Ainsi, autant le développement devrait réduire considérablement les risques de voir les groupes armés s’implanter durablement dans la région, autant le terrorisme éloigne toute possibilité de développement. Car quels moyens de développement sont-ils disponibles sur place ? Un développement local est difficile à imaginer sans l’entremise des Etats et des investisseurs étrangers. Le Niger qui compte exploiter lui-même ses richesses énergétiques (le pétrole et l’uranium) peine à le faire, alors que les récents enlèvements de quelques membres du personnel de l’entreprise Areva dans le Nord- Niger ont réduit considérablement, et pour un moment, les chances de voir les entreprises investir dans cette région. Dans ce même Niger, pays dont la surface est majoritairement un désert, tout comme les pays de la région, souffre de sécheresses répétitives. Une situation qui est loin d’aider un effort de développement orienté vers les zones du nord. Sans l’aide internationale, cela devient une gageure quand le pays lui-même a des difficultés structurelles pour développer les zones du sud, là où se concentre l’essentiel de sa population. Le pays a également connu des troubles au nord, tout comme le Mali voisin qui n’ont pas favorisé les programmes de développement à même de donner aux populations locales des moyens de subsistance suffisants pour être fixés dans leurs régions et pour justifier finalement l’effort de sécurisation des localités dans lesquelles elles vivent. Quels moyens ? La plus grande difficulté réside finalement dans la capacité des Etats à trouver les moyens pour développer ces régions. Cela peut être particulièrement difficile quand ces régions n’ont aucun intérêt économique. Dans le même temps, l’abandon des populations de la région à leur sort tiendrait de l’abdication de la souveraineté des Etats sur une partie de leur territoire. La coopération en matière de sécurité qui a bien évolué entre 4 EL MOUDJAHID POLITIS-Final-07.qxp La lutte militaire à elle seule ne saurait exterminer cette hydre de Lerne. pays de la région se verra-t-elle suivie par une coopération dans le domaine économique et social ? On le sait aujourd’hui, sans une solidarité absolue entre Etats voisins, la lutte contre les groupes terroristes reste hypothétique. Si cette lutte se conjugue au développement local, n’est-il pas utile de voir la coopération aller dans ce sens ? Il y a dans ce sens des initiatives qui, pour le peu de résultats qu’elles ont atteint, indiquent qu’elles ne vont pas dans le bon sens. La création de la Communauté des États sahélo-sahariens (CEN-SAD) tient de ce genre d’initiative pour au moins le peu de résultats qu’elle a atteint. Cette organisation devait entre autres faciliter et accroître le commerce transsaharien. Par ailleurs, des projets plus concrets évoluent dans la sérénité. Ils sont porteurs d’espoir et de stabilité parce qu’ils donnent une importance stratégique à la région sahélo-saharienne pour le progrès de plusieurs pays au même moment. Dans le même temps, ils évacuent les contingences liées aux retards techniques puisqu’ils sont à la page immédiatement. Le projet de la liaison par fibre optique transsaha- rienne Alger-Zinder-Abuja fait partie de cette perspective. Cette liaison permettra de favoriser les liaisons et les échanges d’informations et désenclaver le pays et la zone la plus vulnérable, le Niger. Initié en 2003 par les chefs d’Etat de l’Algérie, du Niger et du Nigeria, ce mégaprojet doit jouer le rôle de levier technologique pour favoriser le processus de développement et d’intégration nécessaire aux pays africains. Mais plus que cela, le développement des technologies de l’information et de la communication (TIC) dans la région par la mutualisation des moyens permettra une sécurisation par le désenclavement, une meilleure gouvernance de la région, les échanges d’informations dans le domaine sécuritaire. Il est évident aussi que même le développement durable passe par le développement des moyens de communication. L’existence d’une infrastructure de télécommunication effective encouragera certainement d’autres initiatives à prendre corps dans la région. Des initiatives qui restent à imaginer et qui doivent faire du développement et du progrès un outil de stabilité et de sécurité, voire une arme contre le terrorisme. A. E. EL MOUDJAHID POLITIS-Final-07.qxp 17/09/11 17:31 Page 11 11 POLITIS - EL MOUDJAHID - N° 001 - SEPTEMBRE 2011 4 L’Algérie en tête de pont L preuve irréfutable fournie par l’Algérie dans sa quête de sa dimension africaine et de l’affirmation de sa profondeur géographique. Mais la Transsaharienne ne devrait pas s’arrêter à Tam ni à la frontière avec le Niger. Cette route devrait permettre de rejoindre Lagos au Nigeria après avoir traversé le Niger. Dès lors, Tam rayonnera. Si pour les habitants de Tam, Algériens et étrangers (la ville compte au moins une vingtaine de nationalités et les représentants de toutes les wilayas), ce progrès peut sembler perfectible – et il l’est certainement –, constater comment Tamanrasset devient un pôle économique et social, voire politique, régional souligne qu’un autre possible est réalisable, même dans des régions aussi reculées et oubliées que ne le sont les régions désertiques. Le développement local (2 103 actions de développement pour 83 milliards de dinars sur 4 ans) a forcé- ment des implications internationales quand on est un carrefour, voire une sorte de port dans le désert où n’accoste bien sûr aucun navire, mais où des gens de toutes origines se retrouvent en quête d’avenir ou de sécurité. Tamanrasset et sa région, ce sont des distances que l’on conçoit mal dans le Nord. Une daïra peut se trouver à 400 km du chef-lieu de wilaya. C’est pourtant une région où l’électrification a atteint un taux de 97% et certains villages éloignés sont électrifiés grâce à de petites stations solaires photovoltaïques. Le développement local dans ce cas passe par la détermination de l’Etat. Ici plus qu’ailleurs, car sans ce moteur fondamental, rien n’est faisable. Sur un autre plan, alors que l’Union africaine a sélectionné sept projets prioritaires pour le développement en Afrique, on note que l’Algérie est concernée au premier chef par trois d’entre eux. La route transsaharienne bien entendu, mais aussi le mégaprojet de fibre optique Alger – Zinder – Abuja où elle est chef de file, tandis qu’elle est partenaire pour le projet de gazoduc Nigeria-Algérie, dont le chef de file est le Nigeria. Ces projets, une fois menés à terme, auront pour première conséquence cette intégration africaine indispensable pour une impulsion du développement et du progrès sans lesquels tout discours sécuritaire et tout effort de sécurisation militaire sera vain. A. E. «L’Algérie a un rôle pivot dans la lutte contre le terrorisme» 4 orsqu’on visite Tamanrasset, à 2.000 km au sud d’Alger, cette étrange impression de changer de monde vous saisit. Certainement à cause du relief, du climat et des paysages, ou du type de construction, probablement à cause des habits des habitants du coin qui aiment bien les chèches et les bazanes, mais pas du fait de la distance. Plus que jamais, on sait que nous sommes en Algérie. Le drapeau sur le fronton des institutions ou les uniformes des policiers qui régulent la circulation ne sont pas les seuls témoignages de l’identité nationale des lieux. Les 2.000 km semblent comme se dissiper lorsqu’on évoque un quartier ou une rue d’Alger ou d’Oran dans un bureau d’une daïra aux fins fonds du désert, parce que le siège de telle entreprise ou de telle institution s’y trouve. Cette même impression revient lorsqu’à l’autre bout d’une ligne virtuelle d’un téléphone portable, se trouve un cousin, un ami ou un collègue qui, reflexe de nordiste oblige, s’inquiète du temps qu’il fait à Tam. Le résultat de cet effort effectif engagé depuis des années pour raccorder, dans tous les sens du terme, cette ville de l’extrême sud au reste du pays est palpable. Pour accéder à Tamanrasset, deux moyens, les airs ou la route. L’aéroport de Tamanrasset répond techniquement à toutes les exigences de la navigation aérienne internationale, et la route de Tam, la RN 1, est l’une des plus importantes infrastructures routières du pays, la Transsaharienne. Sur 2.800 km prévus, plus de 2 400 ont été réalisés. Près de 400 km inaugurent la future autoroute transsaharienne qui sera implantée sur ce tracé. Une route asphaltée en plein désert quand l’image typique d’une route du désert demeure dans l’imaginaire collectif une piste rocailleuse et poussiéreuse sur laquelle seuls les camions les plus robustes et les tout-terrains les mieux équipés peuvent s’aventurer. Il n’en est rien, et c’est en bus climatisé tout confort, identique à celui qui avale des kilomètres d’autoroute au nord, que l’on peut se rendre aujourd’hui à Tam. Dans les années 1980, le bus spécial qui faisait la liaison Ghardaïa-Tamanrasset s’appelait le Safari. Tout un programme. L’incertitude de ses horaires n’avait d’égaux que les cahots de ses secousses sur une piste improbable. C’est justement cette image d’incertitude et d’improbabilité qui est battue en brèche quand une telle route est réalisée dans cette région. La route dans le désert, c’est par là que commence tout effort pour rendre vivable cette région. La vie saharienne est faite de déplacements fréquents et sur de longues distances. Sans une commodité de mouvement, la vie dans le Sud deviendrait insupportable. Artère de développement, son existence donne un sentiment de pérennité à cette impression de provisoire comme si la précarité que suppose le nomadisme s’appliquait à toute vie sociale ou économique dans le Sud. La Transsaharienne, route mythique, aura été la GÉNÉRAL ROBIN SEARBY, CONSEILLER DU PM BRITANNIQUE POUR LA LUTTE CONTRE LE TERRORISME EN AFRIQUE DU NORD ET DANS LE SAHEL Les projets structurants donneront un autre aspect à Tam. L’ALGÉRIE a un rôle pivot et représente un partenaire clé pour le Royaume-Uni dans la lutte contre le terrorisme, a déclaré à l’APS a Londres, le général Robin Searby, conseiller du Premier Ministre britannique pour la lutte contre le terrorisme en Afrique du Nord et dans le Sahel. Ce responsable a mis en exergue l’importance du rôle de l’Algérie dans l’unification de l’approche de lutte antiterroriste des pays de la région. «L’Algérie coordonne l’action pour une approche globale dans la région, il est extrêmement important de travailler ensemble pour lutter contre cette menace commune», a encore ajouté le général Searby, annonçant la participation du Royaume-Uni à la conférence de haut niveau sur la lutte contre le terrorisme et le crime international qui s’est tenue à Alger les 7 et 8 septembre. «Le RoyaumeUni se félicite de l’initiative de l’Algérie d’organiser cette rencontre et tient à traduire, à travers sa présence à ce sommet, son soutien total et public à l’Algérie, ainsi que sa disponibilité à collaborer avec ce pays et les autres pays de la région dans le cadre de la lutte contre le terrorisme et le crime international», a ajouté le conseiller du Premier Ministre. La menace d’AQMI sera anéantie par le travail en commun et la collaboration régionale, c’est pourquoi le RoyaumeUni se félicite de l’initiative algérienne qui entre dans ce cadre, a encore ajouté ce responsable soulignant que les relations entre le Royaume-Uni et l’Algérie sont «excellentes, ouvertes et en constante amélioration». EL MOUDJAHID POLITIS-Final-07.qxp 17/09/11 17:31 Page 12 12 POLITIS - EL MOUDJAHID - N° 001 - SEPTEMBRE 2011 11 SEPTEMBRE... 10 ANS APRÈS PAIEMENT DE RANÇONS Une violation des engagements internationaux AQMI disposerait, actuellement, d´une cinquantaine de millions d’euros, l´équivalent du budget de fonctionnement de certains Etats de la région qui sont parmi les plus pauvres au monde. e non-paiement de rançons aux terroristes est un débat que l’Algérie est parvenue à porter sur la scène internationale. Une action diplomatique soutenue qui a permis, en 2010, d’inscrire ce thème à l’ordre du jour des travaux de l’Assemblée générale de l’ONU. Les prises d’otages dans les pays du Sahel sont devenues, en effet, de plus en plus fréquentes depuis l’enlèvement en 2002, dans le grand Sud algérien, d’une trentaine de touristes allemands et autrichiens, que la libération, dans des conditions assez mystérieuses à l’époque, avait suscité des interrogations. Depuis, confirmation était faite que les gouvernements allemand et autrichien ont payé 5 millions d’euros pour obtenir la libération de leurs ressortissants. A l’initiative de l’Algérie, un projet de résolution sera élaboré à l’ONU, portant sur la criminalisation de ces pratiques. L La polémique autour de cette commode manière de faire libérer des otages s’est installée au plan international, y compris chez les alliés occidentaux. Le président Nicolas Sarkozy a critiqué ainsi le paiement par Madrid d’une rançon de 8 millions d’euros pour obtenir, une première fois au début de l’année 2010, la libération d’Alicia Gamez, puis celle, le 22 août dernier, de ses deux compatriotes Roque Pascual et Albert Vilalta, tous trois enlevés, le 29 novembre 2009, par un groupe d’Al Qaeda pour le Maghreb Islamique (AQMI). Sans citer expressément l’Espagne, le président français avait estimé que le paiement de rançons «n’était pas une bonne stratégie». Une source de financement du terrorisme L’embarras des gouvernements occidentaux Une source importante de financement des groupes terroristes. 4 Tous les gouvernements européens ont, en fait, versé durant ces dix dernières années des rançons, directement ou indirectement, pour obtenir la libération de leurs ressortissants enlevés par les nombreux groupes terroristes qui ont établi leurs bases arrières dans cette terre s’étalant du Tchad à la Mauritanie, sur plus de 4 millions de km2. Les groupes commandés par Abdelhamid Abou Zeid et Mokhtar Ben Mokhtar, qui se sont repliés vers le Sahel, sous la pression soutenue des forces de sécurité algériennes, ont systématiquement exigé rançons, la première source de financement des activités terroristes en Algérie. AQMI disposerait, actuellement, d’une cinquantaine de millions d’euros, l’équivalent du budget de fonctionnement de certains Etats de la région qui sont parmi les plus pauvres au monde. Le tiers de cette somme a été versé par l’Espagne. Visiblement embarrassés par la remarque de son collègue français, le président Zapatero et les membres de son gouvernement soutiendront, sans convaincre, que la libération des otages espagnols avait été obtenue «grâce aux efforts» de la diplomatie espagnole, conjointement à l’action du CNI (services de renseignement espagnol) auprès des gouvernements de la région. «Le gouvernement espagnol a fait ce que tout autre gouvernement se devait de faire pour sauver la vie de ses ressortissants», avait avoué, plus tard, la secrétaire d’Etat espagnole à la Coopération, Mme Soraya Rodriguez. C’est elle qui a joué un rôle de premier plan dans le processus de négociation du montant des rançons à verser par l’Espagne, non sans avoir critiqué à son tour la méthode employée par Paris dans ce genre de situation. Le quotidien El Pais fait remarquer alors que «la libération des ressortissants espagnols avait pris un retard de près de neuf mois, non pas à cause d’une question de rançons, que tous les pays occidentaux confrontés au problème d’otage ont payées, à l’exception du Royaume-Uni dont son ressortissant enlevé au Mali avait été exécuté en 2009, mais de la difficulté à satisfaire les exigences d’AQMI concernant la libération de ses membres emprisonnés en Mauritanie». La balle est renvoyée dans le camp de Paris. 17/09/11 La libération des prisonniers terroristes Il y avait, en effet, un précédent français. En plus d’une rançon dont le montant reste mystérieux à ce jour, Ben Mokhtar avait, en effet, obtenu de Paris, en février 2010, la libération de quatre de ses éléments emprisonnés à Bamako, contre celle de l’otage fançais Pierre Camatte. C’est à cette fin que l’ex-ministre des Affaires étrangères Bernard Kouchner et le secrétaire général de l’Elysée se sont déplacés dans la plus grande discrétion, le 14 décembre dernier, à Bamako. Les deux émissaires français avaient, alors, réussi à «convaincre» le gouvernement malien de donner suite à la demande de remise en liberté des quatre terroristes d’AQMI, dont deux algériens. Rétiçant au départ, le gouvernement malien finira par accéder à la condition posée par l’organisation terroriste, non sans faire remarquer, selon l’expression d’un membre du gouvernement Mamadou Toure, que «libérer des terroristes ou payer des rançons équivaudrait à retourner ses armes contre soimême». 17:31 Page 13 Le gouvernement espagnol a eu la tâche plus difficile avec le général Mohamed Ould Abdelaziz qui, depuis son arrivée au pouvoir en 2008, avait fait de la lutte contre AQMI une priorité. L’ex-chef de la diplomatie espagnole, Miguel Angel Moratinos, a dû se déplacer en juillet 2010 à Nouakchott, accompagné du directeur du CNI (services secrets espagnols), Felix Sanz Roldän, pour demander au président mauritanien de «faire un geste» qui puisse sauver la vie des deux otages espagnols. Ben Mokhtar avait, en effet, exigé, en plus de la rançon versée, la libération de son lieutenant emprisonné à Nouakchott. Ce «geste» effectué avec le coup de pouce de Paris se traduira, trois mois plus tard, par l’extradition d’Omar Sahraoui, l’artisan de l’enlèvement des trois otages espagnols. Moratinos avait effectué, exactement, la même démarche que son collègue français à Bamako. «Qu’auriez-vous fait à notre place ?» Ce «marché» a suscité beaucoup d’indignation au sein même de la classe politique espagnole. La porte-parole du Parti populaire, Soraya Sáenz de Santamaría, avait exigé le passage devant le Congrès des députés de l’ex-viceprésidente, María Teresa Fernández de la Vega, pour répondre aux questions des parlementaires sur les circonstances de la libération des otages espagnols et la question de la rançon. L’opposition conservatrice du Parti populaire n’hésitera pas, au Parlement national, à accuser le gouvernement Zapatero d’avoir «encouragé et financé l’industrie du terrorisme». Dans sa réplique, la porte-parole socialiste Elena Valenciano a accusé, à son tour, le PP de «ne pas se soucier de la vie de ses compatriotes». L’aveu spontané est tombé à travers cette petite phrase de trop : «Qu’auriez-vous fait à notre place ?» Le gouvernement ne reconnaîtra jamais pour autant, de manière formelle, avoir payé la moindre rançon aux ravisseurs, car s’agissant d’un acte contraire aux engagements internationaux pris par l’Espagne au plan de la lutte antiterroriste. La question du paie- 4 EL MOUDJAHID POLITIS-Final-07.qxp «Libérer des terroristes ou payer des rançons équivaudrait à retourner ses armes contre soi-même.» EL MOUDJAHID POLITIS-Final-07.qxp 17/09/11 17:31 Page 14 14 POLITIS - EL MOUDJAHID - N° 001 - SEPTEMBRE 2011 11 SEPTEMBRE... 10 ANS APRÈS ment de rançons reste à ce jour taboue dans le langage diplomatique des Occidentaux. La stratégie de l’Algérie C’est sur la criminalisation du paiement de rançons que l’Algérie élaborera sa stratégie auprès de ses partenaires occidentaux. Les arguments du gouvernement algérien sont de poids. L’argent des rançons versées par les gouvernements occidentaux qui sont, dans la forme, tous ses alliés contre le terrorisme, sert à l’achat d’armement pour les foyers d’AQMI dans le nord du pays. Dans un style diplomatique volontairement ambigu, Moratinos avait déclaré à la presse, en présence de M. Mourad Medelci, le 7 janvier 2009, en marge de la visite de travail du président Bouteflika en Espagne, que le gouvernement espagnol est contre le paiement de rançons au terroristes. L’argent sera versé, en fait, par une autre partie à la demande du gouvernement espagnol, contre remboursement à terme. La Libye, où le président Zapatero s’était rendu en 2010, aurait fait parvenir à Ben Mokhtar par le biais de médiateurs maliens une mallette avec 3,8 millions d’euros. L’Algérie finira par mettre la pression sur les gouvernements européens en agissant activement, avec l’appui des Etats-Unis, pour que soit adoptée par le Conseil de sécurité de l’ONU une résolution par laquelle toute la communauté internationale devrait considérer le paiement de rançons comme une source de financement du terrorisme. Vers des «sanctions internationales» Le 5 août 2010, le journal espagnol El Mundo avait recueilli une déclaration du porte-parole de la Représentation permanente de l’Algérie à New York selon laquelle l’adoption d’une telle résolution constituerait «une première étape vers l’interdiction par le Conseil de sécurité de toutes concessions au terrorisme sous peine de sanctions internationales». Le diplomate algérien avait précisé au même journal à propos de l’Espagne, que «les services de renseignement algériens (DRS) ont dû attirer l’attention de leurs homologues du CNI avec insistance sur le fait que l’argent des rançons sert au financement des activités de terrorisme en Algérie». Le 11 septembre 2010, le conseiller aux affaires de sécurité de la présidence de la République, M. Rezag Bara, fait une intervention en ce sens remarquée à New York : «Le paiement de rançons a encouragé les prises d’otages au Sahel.» L’action de l’Algérie trouvera un appui très large à l’ONU. Notamment auprès des Etats-Unis. C’est en pleine négociation entre Madrid et Nouakchott autour des conditions posées par AQMI à la libération des deux otages espagnols, que le coordinateur de la lutte antiterroriste du département d’Etat, M. Daniel Benjamin, a sorti le grand jeu. Dans son rapport, Daniel Benjamin demande à la secrétaire d’Etat Hillary Clinton d’insister auprès de «tous les alliés des Etats-Unis» et de l’Espagne en particulier, pour ne pas faire de concessions à AQMI. Le soutien des Etats-Unis «L’argent des rançons, soutient-il, constitue la principale source de financement d’AQMI et contribue au renforcement des activités de terrorisme» dans des pays qui comme l’Algérie sont en première ligne du front antiterroriste. «Nous attendons de tous nos alliés à travers le monde de ne pas faire de concessions aux ravisseurs pour que nous puissions empêcher le financement du terrorisme au Sahel», avertit le département d’Etat dans ce rapport qui traduit le malaise ressenti par Washington par le comportement déloyal de ses alliés européens, en dehors du Royaume-Uni qui n’a jamais cédé aux exigences des groupes terroristes. Cette question sera centrale dans la conférence internationale d’Alger, qui réunira les puissances membres du Conseil de sécurité de l’ONU (Etats-Unis, France, Royaume-Uni, Russie et Chine) aux côtés des pays de la ligne de front au Sahel, l’Algérie, le Mali, le Niger et la Mauritanie. B. H. RANÇON, DROGUE ET CRIME ORGANISÉ Le filon des groupes armés Depuis le début de l´année 2011, les unités spéciales de l´armée algérienne ont intercepté ou détruit au moins trois importants convois d’armes dans le Grand Sud, dans la région de Ouargla, près d’Illizi et aux limites de la frontière avec le Niger. C´est à travers ces nouvelles «routes» qu’El Qaeda au Maghreb Islamique (AQMI) tente depuis quelques années d´approvisionner en matériel militaire des plus sophistiqués les foyers de terrorisme qui sévissent encore dans le nord de l´Algérie. EL MOUDJAHID POLITIS-Final-07.qxp 17/09/11 17:31 Page 15 15 POLITIS - EL MOUDJAHID - N° 001 - SEPTEMBRE 2011 4 es autorités algériennes sont persuadées que le trafic d’armes, de drogue et le crime organisé ont augmenté sensiblement depuis que les gouvernements occidentaux ont accepté de payer pour obtenir la libération de leurs ressortissants pris en otage par AQMI. Actuellement, les plus grands trafiquants de matériel de guerre les plus actifs sont, généralement, des Touareg établis en Libye qui ont fui la guerre dans ce pays, emportant avec eux des armes prises aux soldats d’El-Guedaffi, jusque dans les camps qu’ils ont dressés au Mali. Dans le fief et pour le compte d’AQMI. Auparavant, les groupes armés de Mokhtar Benmokhtar et d’Abdelhamid Abou Zeid recevaient des armes depuis la côte somalienne, moins sophistiquées que celles prises aux Libyens, un matériel de guerre dont ne disposent même pas les armées des pays du Sahel. Des experts américains de la lutte L antiterroriste ont acquis, aujourd’hui, la certitude qu’Al Qaeda au Maghreb Islamique est en train de se former au maniement des missiles antiaériens, depuis que cette organisation terroriste a mis la main, en mars dernier, sur un lot de Sam7 de fabrication russe pris par les insurgés libyens aux troupes du colonel El-Guedaffi. Les avertissements de Washington Sur sa page web «Sahel Intelligence», Samuel Benshimon, expert en lutte antiterroriste, fonde sa conviction à ce propos sur un communiqué publié, récemment, par la Direction de la Protection de la Sécurité (DPS) du ministère français de la Défense, reconnaissant, pour la première fois, que «des armes sensibles, y compris des missiles mobiles terre-air puisés dans les arsenaux de guerre du régime libyen, ont été acheminés vers le Mali à travers le territoire algérien». La frontière algérienne étant très sur- Auparavant, les groupes armés de Mokhtar Benmokhtar et d’Abdelhamid Abou Zeid recevaient des armes depuis la côte somalienne, moins sophistiquées que celles prises aux Libyens, un matériel de guerre dont ne disposent même pas les armées des pays du Sahel. veillée par les unités spéciales de l’ANP et de la gendarmerie, les trafiquants d’armes avaient dû ouvrir cette nouvelle route plus longue, mais plus sûre. Pour des raisons évidentes, le communiqué de la DPS n’admet pas qu’une partie de ces missiles avait été acheminée depuis Benghazi vers le nord du Mali, via le Tchad, apparemment avec la complicité des insurgés libyens. L’allusion au transit par le territoire algérien s’explique par le refus de Paris d’admettre que ces convois armés ne pouvaient pas passer inaperçus au Tchad et au Niger où les services de renseignement français sont omniprésents et particulièrement actifs depuis le début des prises d’otages au Sahel. A Alger et EL MOUDJAHID POLITIS-Final-07.qxp 17/09/11 17:31 Page 16 16 POLITIS - EL MOUDJAHID - N° 001 - SEPTEMBRE 2011 11 SEPTEMBRE... à Washington, on s’interroge encore sur la facilité avec laquelle des convois de trafiquants d’armes ont pu se déplacer dans cette région désertique très surveillée par tous les services de renseignements français. Le plus surprenant fut le peu d’inquiétude qu’inspirait chez les «alliés» les stocks de Sam7 russes et de Stringer américains abandonnés à ciel ouvert par l’armée d’El-Guedaffi. Pour la première fois, en juin dernier, les appréhensions des experts de la lutte antiterroriste en Algérie ont commencé à être prises au sérieux par les pays de la coalition, la question du trafic d’armes en Libye devenant évidente. La menace terroriste Les experts américains de la lutte antiterroriste et du crime organisé avaient été les premiers à avertir contre les dangers d’un trafic d’armes qui se faisait à l’ombre de la guerre en Libye où les djihadistes avaient rejoint les rangs des insurgés. Le directeur du bureau de l’Officie International des Migrations de l’ONU de Nouakchott, l’Américain Richard Ots, fut de ceux qui ont averti qu’AQMI a acquis en Libye non seulement des Sam7 russes, mais également des missiles américains de type Stringer dont sont dotées les armés de l’OTAN. Cet expert assure qu’«une fois que les terroriste auront appris le maniement de Les experts américains de la lutte ces missiles antiariens, la meantiterroriste et du crime nace sera encore plus grande organisé avaient été les premiers pour la couverture aérienne des à avertir contre les dangers d´un armées du Sahel, Mauritanie, Mali et Niger, ainsi que pour les trafic d´armes qui se faisait à avions de ligne et les forces de l´ombre de la guerre en Libye, où l’OTAN déployées au sud de la les djihadistes avaient rejoint les Méditerranée». Ses craintes ne rangs des insurgés. tarderont pas à se confirmer puisque les groupes d’Abou Zeid 10 ANS APRÈS vont, dès la réception du premier lot de matériel militaire acquis en Libye, certes moins sophistiqué que les Sam 7, mais plus maniable sur le terrain des opérations, vont lancer une attaque contre la caserne de Bassiknou située à 45 km de la frontière malienne. L’incontournable réplique régionale Le 24 juin dernier, l’armée mauritanienne lancera, à son tour, avec l’appui logistique de la France, une offensive contre la base de Wagadou dans le nord du Mali, dont l’objectif est de détruire ce nouvel arsenal de guerre au maniement duquel AQMI est en train de s’entraîner. Les armes tombées aux mains d’AQMI vont changer le rapport de force sur le terrain, en faveur des terroristes. Dès lors, une réponse internationale collective est devenue incontournable, surtout au regard de l’intérêt manifesté par AQMI pour la haute technologie de guerre. Une plus grande prise de conscience est remarquée, aujourd’hui en Europe, autour de la certitude que seule une coopération militaire des puissances mondiales avec les pays de la ligne de front pourrait freiner l’implantation d’AQMI au Sahel. L’Espagne, le pays qui a versé le plus de rançons à AQMI, a appelé récemment l’OTAN à s’impliquer dans la lutte contre El-Qaïda dans le Sahel. Selon un récent rapport du ministère espagnol de la Défense, «l’Espagne veut que l’OTAN s’engage dans la lutte contre la menace terroriste au Sahel». Ce rapport rédigé par deux officiers supérieurs espagnols auprès de l’Alliance atlantique suggère que «l’OTAN joue un rôle plus important dans les régions d’intérêt stratégique comme le Sahel, à travers un accord avec l’Union africaine ou la Ligue des Etats arabes dans le cadre de l’Union pour la Méditerranée (UPM)». Les objectifs de la Conférence d’Alger La Conférence régionale sur la lutte contre le terrorisme au Sahel d’Alger sera donc l’occasion attendue qui permettra de mesurer le degré d’engagement des puissances occidentales pour la sécurité et la stabilité de la région sahélo-saharienne. En avril dernier, une source diplomatique occidentale à Alger, citée par Reuter, présentait «l’Algérie comme la principale puissance économique et militaire de la région, jouissant d’une longue expérience dans la lutte antiterroriste qui se doit d’assurer la coordination de la lutte contre El-Qaïda dans la région, laquelle ne peut se faire de manière séparée sans risque de voir le terrorisme menacer d’autres parties de la région». C’est là une reconnaissance unanime en Occident du rôle de premier plan que l’Algérie est en mesure de jouer dans la stabilité de la région sahélo-saharienne. Les engagements qui seront pris à Alger ne seront pas seulement sécuritaire puisqu’il s’agit, aussi, de lancer, à moyen terme, un programme de développement dans le Sahel, région économiquement vulnérable pour être l’une des plus pauvres au monde. L’état de pauvreté extrême de cette région qui s’étend du Tchad à la côte ouest africaine sur plus de 4 millions de km2, El -Qaïda y a trouvé, en effet, le terrain idéal pour installer ses bases et organiser le trafic d’armes à destination de l’Algérie. Cette préoccupation a été déjà soulignée par la Conférence d’Alger des ministres des Affaires étrangères des pays du Sahel. B. H. EL MOUDJAHID POLITIS-Final-07.qxp 17/09/11 17:31 Page 17 17 POLITIS - EL MOUDJAHID - N° 001 - SEPTEMBRE 2011 4 T N E M U C O D L'EXPÉRIENCE DE L'ALGÉRIE DANS LE DOMAINE DE LA LUTTE CONTRE LE TERRORISME Une action conforme à la charte onusienne La présente contribution sur l'expérience de l'Algérie dans le domaine de la lutte contre le terrorisme retrace, à grands traits, le dispositif législatif et opérationnel mis en place pour prévenir et réprimer les actes terroristes. Résultat d'un processus évolutif de création normative, ce dispositif a été adapté et renforcé pour répondre aux décisions du Conseil de sécurité des Nations unies suite aux événements du 11 septembre 2001. Il comprend également des mesures reflétant l'importance donnée à la dimension politique de la lutte antiterroriste, notamment la loi sur la Concorde civile et la démarche de Réconciliation nationale dont le mouvement est pour l'essentiel accompli. ette expérience a amené l'Algérie à développer une action soutenue, aux plans bilatéral, régional et international, pour sensibiliser ses partenaires à la nécessité de coopérer pleinement, en toute transparence et de bonne foi afin de donner sens à la lutte mondiale contre le terrorisme conformément à la charte des Nations unies. Cela n'a, hélas, pas toujours été facile. Durant une décennie, l'Algérie a mené seule le combat contre le terrorisme transnational. Les groupes terroristes tiraient alors pleinement profit d'un certain laxisme, voire d'une certaine complaisance au niveau international. Un engagement des pays abritant des réseaux de soutien ciblant l'Algérie aurait sans doute permis d'abréger les souffrances du peuple algérien. La situation a depuis évolué, et il existe, aujourd'hui, chez les partenaires de l'Algérie, une meilleure disponibilité à aborder des questions clés de la coopération comme celles ayant trait au domaine judiciaire. Il faut s'en féliciter, même s'il reste un long chemin à parcourir pour parvenir à une coopération pratique traduisant mieux et plus complètement les obligations au titre de la résolution 1373 du Conseil de sécurité qui organise la riposte antiterroriste de la communauté des nations. C 1- Le volet légal et institutionnel a - L'aspect législatif La qualification de l'acte terroriste était une priorité absolue. Pour ce faire, le législateur algérien l'a défini pour mieux le distinguer des délits de droit commun. Il a criminalisé l'ensemble des actions qui, à l'amont et à l'aval, concourent à la matérialisation de l'acte terroriste, y compris donc le financement. Une définition des actes terroristes a été élaborée et intégrée dans le code pénal. Est considéré comme acte subversif et terroriste «toute infraction visant la sûreté de l'Etat, l'intégrité du territoire et la stabilité et le fonctionnement normal des institutions. Les actes dont la finalité est de semer l'effroi dans la population, entraver la circulation ou la liberté de mouvement et faire obstacle à l'action des autorités publiques et à l'application des lois et règlements». La création d'associations, corps, groupes ou organisations menant des activités terroristes et criminelles, tombe également sous le coup de ces dispositions. Au même titre que l'adhésion, sous quelque forme que ce soit, à ces entités, l'apologie et l'encouragement du terrorisme, son financement, la reproduction ou diffusion de documents, sonores ou écrits à caractère apologétique. ainsi que la possession ou l'utilisation d'armes prohibées. La Loi définit les peines encourues — emprisonnement et sanctions financières — et précise les procédures de perquisition, de gel des avoirs et de biens, d'arrestation, de garde à vue et de traduction en justice. Ce dispositif vient d'être renforcé avec l'adoption, à la fin de 2004, de la loi sur le blanchiment d'argent et le financement du terrorisme. Cette loi prévoit des mesures de prévention et des mécanismes de contrôle de toute transaction ou transfert suspects. Toute transaction, dont le montant est fixé par voie réglementaire, qui n'aura pas été effectuée à travers les circuits bancaires, est assimilée à une opération illégale entrant dans la catégorie du financement du terrorisme ou de fuite ou de blanchiment de capitaux. La Banque centrale se doit de procéder au contrôle de la régularité des opérations bancaires et l'identification des clients institutionnels ou privés. L'obligation de signaler toute transaction suspecte à la Cellule de traitement du renseignement financier est une prescription légale. La Cellule de traitement du renseignement financier agit sur la base de déclarations de soupçons établis par les banques et les organismes financiers. Elle mène les investigations nécessaires afin de déterminer la nature de la transaction suspecte et d'endentifier ses auteurs. Dans les cas où le caractère illégal de l'opération financière est établi, elle ordonne le gel des avoirs et transmet le dossier à la justice. La Cellule a, par ailleurs, entamé une réflexion sur le système de transfert «hawala» afin de déterminer, le cas échéant, les mesures à prendre. Il convient de rappeler que l'Algérie n'a pas attendu les événements du 11 septembre pour criminaliser l'acte de financement du terrorisme. Elle l'a fait bien avant en réglementant et en contrôlant sévèrement l'activité des organisations caritatives habilitées à collecter des fonds dans le public. b- L'aspect institutionnel Dans le domaine institutionnel, d'importants aménagements ont été en- L’Algérie n'a pas attendu les événements du 11 septembre pour criminaliser l'acte de financement du terrorisme. Elle l'a fait bien avant en réglementant et en contrôlant sévèrement l'activité des organisations caritatives habilitées à collecter des fonds dans le public. EL MOUDJAHID POLITIS-Final-07.qxp 17/09/11 17:31 Page 18 18 POLITIS - EL MOUDJAHID - N° 001 - SEPTEMBRE 2011 11 SEPTEMBRE... 10 ANS APRÈS trepris. Le législateur a introduit des dispositions relatives à la compétence des tribunaux pour les cas où un ressortissant algérien est reconnu coupable d'appartenance à une organisation terroriste activant à l'étranger ou auteur d'acte terroriste commis dans un pays tiers. Ainsi est consacré le principe de la compétence universelle des juridictions nationales en matière de terrorisme et l'application du principe «poursuivre ou extrader». Les tribunaux algériens ont compétence pour connaître toute affaire liée au terrorisme. Après avoir mis en place des tribunaux d'exception pour juger les auteurs d'actes terroristes, l'ordre judiciaire classique a pris en charge cet aspect dans le respect des procédures de l'instruction et du droit de la défense. Dans le cadre de la nouvelle organisation du système judiciaire, le ministère de la Justice va mettre en place des pôles judiciaires spécialisés dans le traitement des dossiers liés au terrorisme. Un procureur de la République et un juge d'instruction seront nommés à la tête de ces nouvelles juridictions avec des compétences élargies à l'ensemble du territoire national. II - Le volet opérationnel a - Mesures de protection aux frontières et des infrastructures d'importance stratégique L'imbrication du terrorisme dans la grande criminalité organisée a accru ses capacités de nuisance, grâce aux possibilités offertes par les nouvelles technologies, notamment les flux illicites de capitaux. L'ouverture des frontières aux mouvements de marchandises et de personnes doit également aller de pair avec la lutte contre les phénomènes de criminalité transfrontalière. Les mesures classiques de contrôle aux frontières ont été renforcées pour mieux gérer le flux de passagers de plus en plus important en tenant compte des listes de personnes recherchées pour activités terroristes. Outre leur propre liste, les services algériens de sécurité s'appuient sur celles établies par d'autres pays partenaires et celle du Comité des sanctions contre «les talibans, El-Qaidä et les entités qui leur sont associées» du Conseil de sécurité des Nations unies. Ces mesures renforcées s'appliquent également aux détenteurs de visas d'entrée. Les autorités algériennes se refusent, par ailleurs, d'octroyer le statut de réfugié ou le droit d'asile pour tout individu reconnu coupable par la loi algérienne de crimes terroristes. Les services de protection aux frontières ont été dotés de moyens de détection de faux documents de voyage. La systématisation de l'usage du procédé de contrôle par scanners dans les ports algériens doit également être soulignée. S'agissant des mesures de protection des installations sensibles, le ministère de l'Intérieur et des Collectivités locales a mis en œuvre un plan pour renforcer la sécurité au sein et à l'extérieur de tous les sites d'importance stratégique. Ce plan institue un système de coresponsabilité en matière de gestion sécuritaire. Ainsi, il revient aux dirigeants de ces installations d'en assurer la sécurité au plan intérieur. Il s'agit d'une responsabilité à caractère pénal. Il incombe aux services de police de sécuriser l'environnement externe de ces installations. Grâce à cette coordination, aucun incident majeur n'a été signalé. L'Algérie applique le Code ISPS (Ship and Port Facility Security) de l'Organisation maritime internationale pour la sécurité des navires et installations portuaires. Ces derniers ont fait l'objet, en 2004, d'un audit américain qui a rendu des conclusions très satisfaisantes sur les normes appliquées par l'Algérie en la matière. L'Algérie contribue au processus de sécurisation de la chaîne logistique internationale, notamment en sa qualité de membre élu du «groupe stratégique de haut niveau», mis en place à cet effet par l'Organisation mondiale des douanes. b- Organisation de la lutte antiterroriste Au plan opérationnel, le commandement et la coordination des opérations sont confiés à l'état-major de l'Armée nationale populaire. L'imbrication du terrorisme dans la grande criminalité organisée a accru ses capacités de nuisance, grâce aux possibilités offertes par les nouvelles technologies, notamment les flux illicites de capitaux. Les forces combinées de sécurité – armée, gendarmerie, police – travaillent en étroite collaboration et interviennent en même temps dans des opérations antiterroristes. Aucune armée n'est prédisposée à lutter contre le terrorisme. Une adaptation de la formation et des moyens de lutte est donc indispensable. En Algérie, cette adaptation s'est opérer sans le concours d'aucun pays. Les services algériens de sécurité ont fait face, pendant plusieurs années, seul et avec des moyens inadaptés, à la lutte contre les groupes terroristes rompus à la guérilla après leur retour d'Afghanistan, de Bosnie un de Tchétchénie, et auxquels sont venus se joindre des éléments en provenance de l'étranger. Progressivement, ils sont arrivés à maîtriser la situation sécuritaire. Le schéma organisationnel met l'accent sur la décentralisation dans la chaîne de commandement avec une autonomie pour les commandements régionaux et locaux dans leur action de lutte contre les groupes armés. Au début de l'apparition du terrorisme, la priorité était de sécuriser la capitale et les grandes villes du pays en détruisant l'infrastructure des groupes terroristes. Cet objectif a été atteint. Les rares incursions de groupes armés dans les villes ont été déjouées et les terroristes mis hors d'état de nuire. La collecte de l'information et le renseignement ont été pour beaucoup dans les succès remportés sur les groupes terroristes en termes de prévention des attaques, de déman- tèlement des infrastructures et réseaux de soutien et de poursuites judiciaires. La coopération de la population avec les services dc sécurité a aussi contribué à changer la donne sur le plan sécuritaire. L'aversion de la population pour la violence terroriste, son rejet de l'instrumentalisation de la religion ont également contribué à isoler les groupes terroristes, notamment dans les zones rurales les plus reculées. Le rôle de théologiens et d'hommes de religion algériens de renom, qui se sont prononcés dans le cadre d'une fetwa sur le caractère illicite des actes terroristes, doit également être souligné. La création de corps de sécurité de proximité, police communale et de groupes de légitime défense, a été d'un apport effectif à ce processus de sécurisation. Les groupes de légitime défense, issus de la population, ont pour mission de défendre et de protéger leurs villages des incursions terroristes et d'assurer la protection des citoyens dans leurs activités quotidiennes. L'action sur le terrain de ces deux corps, qui s'effectue dans le cadre de la loi, et en étroite collaboration avec les forces de sécurité, a donné des résultats très probants. En pleine mutation, les services de police ont entrepris avec succès de moderniser et d’adapter les structures de lutte antiterroriste qui disposent de moyens nouveaux, y compris en terme d’équipements. Dans le cadre de la stratégie de lutte contre le terrorisme, la valorisation EL MOUDJAHID POLITIS-Final-07.qxp 17/09/11 17:31 Page 19 19 POLITIS - EL MOUDJAHID - N° 001 - SEPTEMBRE 2011 4 du capital d'expérience a été une préoccupation centrale en l'absence de coopération internationale. Cette expérience fait actuellement partie du cursus des académies militaires et des écoles de police. Les cadres de la police et des forces armées engagés dans la lutte antiterroriste reçoivent une formation en matière de droits de l'homme. Aujourd'hui, la coopération dans le domaine de la formation, notamment, est plus disponible. C'est certainement un atout supplémentaire, surtout si cette coopération vise à la maîtrise des techniques nouvelles. Des formations de juristes, d'agents chargés de l'application de la loi et d'analystes pour les investigations dans le domaine de la répression du blanchiment d'argent et du financement du terrorisme sont programmées avec certains partenaires. III- La dimension politique de la lutte contre le terrorisme : de la Concorde civile à la Réconciliation nationale La dimension politique de la lutte antiterroriste est prise en charge dans le cadre de cette stratégie. Des mesures d'apaisement ont été prises. La loi sur le rétablissement de la Concorde civile, approuvée par référendum, a institué des mécanismes particuliers et mis en place des procédures légales en vue de la réinsertion au sein de la société de personnes reconnues coupables d'actes terroristes ou impliquées dans des activités de même type. Cette loi a offert à des individus appartenant aux groupes terroristes n'ayant pas commis de crime, de renouer avec une vie normale sans être inquiétés. La situation de ceux reconnus coupables de crimes ou de destruction de biens publics ou privés sont examinés par un comité probatoire qui décide des mesures à prendre en même temps que des cas à transmettre aux tribunaux qui accordent la relaxe ou des réductions de peines. En organisant les conditions légales de réinsertion, la Loi sur la concorde civile a constitué une étape importante dans le dénouement de la crise. Le retour massif d'éléments armés, estimé à plus de 10.000 repentis, a sensiblement fait diminuer les actes de violence et contribuer à l'amélioration constante de la situation sécuritaire dans le pays. Cette évolution positive pourrait susciter d'autres initiatives pour parachever le processus de réconciliation nationale, notamment une consultation populaire, le moment approprié, en vue d'une amnistie générale. Mais le terrorisme est un fléau transnational, et les efforts de l'Algérie ne porteront leurs fruits que si l'entreprise mondiale de lutte contre le terrorisme est menée avec détermination, efficacité et cohérence. IV- La contribution de l'Algérie à la coopération internationale La coopération internationale dans le domaine de la lutte antiterroriste est donc primordiale. Outre son aspect opérationnel, celle-ci doit également englober les dimensions politique, diplomatique, judiciaire et financière. Une prise en charge complète de ces aspects est impérative. En matière judiciaire notamment, il faut tenir compte de l'importance de questions relatives à l'entraide mutuelle et l'extradition. Par ailleurs, la collaboration entre les services de renseignement doit être mieux relayée aux plans politique et judiciaire. L'Algérie déploie une action soutenue au triple plan bilatéral, régional et international. a- Au plan bilatéral Elle accorde une attention particulière à l'échange d'informations et de renseignements, à l'assistance technique, a l'acquisition de moyens opérationnels, en particulier des équipements spécifiques. Elle a proposé des formules de coopération pratiques et des modalités opératoires de telle sorte que la coo- pération bilatérale intègre l'ensemble des dimensions qui viennent d'être citées. D'où la création, avec certains partenaires, de groupes de contact mixtes, souples, qui permettraient de traiter simultanément et dans un cadre unique ces différents aspects tout en favorisant le dialogue et la concertation sur les questions de sécurité régionale et mondiale. L'Algérie a conclu plus de 21 conventions judiciaires, dont 15 ont été ratifiées. Des négociations sont en cours pour en conclure d'autres avec plusieurs pays. En application de la résolution 1373, elle a proposé des projets de conventions bilatérales d'assistance judiciaire et en matière d'extradition à quatorze pays. Cependant, la plupart des mandats d'arrêt internationaux lancés par l'Algérie n'ont pas connu de suite. Nous voulons remédier à cette situation en poursuivant un dialogue soutenu avec les différents partenaires concernés. b- Au plan régional L'Algérie croit fermement au rôle de la coopération régionale qu'elle perçoit comme levier de toute stratégie de prévention et de lune contre le terrorisme. Dans cette optique, elle considère que le combat déterminé qu'elle poursuit renforce les conditions de la stabilité et de la prospérité dans son environnement également. WASHINGTON APPELLE LE CONSEIL DE SÉCURITÉ À SE PENCHER SUR LE VERSEMENT DE RANÇONS À AQMI LE COORDONNATEUR américain de la lutte contre le terrorisme au département d'Etat, M. Daniel Benjamin, a appelé le Conseil de sécurité de l'ONU à examiner de près la question de versement de rançons à l'organisation Al Qaeda au Maghreb Islamique (AQMI). Intervenant devant le comité contre le terrorisme du Conseil de sécurité de l'ONU pour expliquer la stratégie américaine pour le contreterrorisme du président Barak Obama, M. Benjamin a déclaré qu'«aucun groupe terroriste n'est aussi EL MOUDJAHID POLITIS-Final-07.qxp 17/09/11 17:31 Page 20 20 11 SEPTEMBRE... Dans le cadre du Forum euro-méditerranéen, l'Algérie a contribué à l'élaboration et à l'adoption d'un code de conduite pour la prévention et la lutte contre le terrorisme. Le COTER – mécanisme de coordination de la lutte antiterroriste de l'Union européenne – a fait part de sa disponibilité à engager le dialogue avec l'Algérie. Dans l'espace euro-méditerranéen, il est clair que le succès de l'entreprise coopérative exige son élargissement à l'OTAN. Aussi, l'Algérie et cette organisation envisagent de structurer le dialogue sur la question du terrorisme. L'Algérie a œuvré avec succès, au sein de la Ligue arabe et de l'Organisation de la conférence islamique, pour l'inclusion de la question du terrorisme dans l’agendas de nos deux organisateurs. POLITIS - EL MOUDJAHID - N° 001 - SEPTEMBRE 2011 10 ANS APRÈS Au niveau du continent africain, l'engagement et le rôle mobilisateur de l'Algérie sont aujourd'hui reconnus. C'est à son initiative que l'OUA – aujourd'hui Union africaine – avait adopté la Convention d'Alger sur la prévention et la lutte contre le terrorisme, en juillet 1999, et un Plan d'action en septembre 2002. Ce plan traduit aussi la volonté des Etats africains de contribuer à une action de la communauté internationale plus cohérente de lutte contre le terrorisme et à une mise en œuvre plus adéquate des sanctions du Conseil de sécurité des Nations unies contre les individus et groupes terroristes. L'Algérie accorde beaucoup d'importance à la coopération pour le renforcement des capacités de lutte antiterroriste. Ses efforts en ce sens ont abouti, notamment à la décision de l'Union africaine de créer à Alger un Centre d'étude et de recherche sur le terrorisme qui a été inauguré par le Président de la République en octobre 2004.Nous voulons conforter la stratégie africaine EL MOUDJAHID POLITIS-Final-07.qxp 17/09/11 17:31 Page 21 21 POLITIS - EL MOUDJAHID - N° 001 - SEPTEMBRE 2011 4 de lutte antiterroriste en dotant le Centre de moyens performants en matière de formation, de collectes de données fiables et d'interactions soutenues entre les experts régionaux et internationaux. Il est important qu'une telle insréseau international des structures similaires existant dans d'autres régions, puisse réaliser ses objectifs avec le concours de tous les partenaires de l'Afrique. Les appels lancés par l'Union africaine pour un soutien conséquent durant la phase de lancement des activités du Centre et au-delà ont reçu un écho favorable auprès des principaux partenaires de l'Afrique a dont certains lui ont déjà apporté une contribution financière. c- Au plan multilatéral La lutte contre le terrorisme transnational constitue une entreprise complexe et de longue haleine dont le succès dépend d'une volonté politique affirmée et d'un engagement fort de l'ensemble de la communauté des nations. L'Algérie a toujours plaidé, dans le cadre des Nations unies, pour une action soutenue et universellement concertée contre ce fléau. Par ailleurs, l'Algérie a fait des propositions concrètes tant sur le plan opérationnel qu’institutionnel. Beaucoup de ces propositions figurent dans l'aide mémoire annexé à son premier rapport national sur la mise en œuvre de la résolution 1373 du Conseil de sécurité. Elle contribue égaLes cadres de la lement à l'amélioSûreté nationale et ration du des forces armées processus d'élaboration et de consoengagés dans la lidation des listes lutte antiterroriste des organisations reçoivent une terroristes, dont le formation en Comité de sancmatière des droits tions contre les de l'homme. «taliban et ElQaïda» a la responsabilité. Il reste qu'une lutte globale plus cohérente contre le terrorisme requiert de développer un sens profond des priorités de la communauté des nations à moyen terme et de penser à l'architecture des relations internationales de demain en ayant en vue les questions de sécurité et de développement. Nous devons en débattre pour en dessiner les contours. V- Conclusion Ainsi, l'expérience de l'Algérie dans le domaine de la lutte contre le terrorisme est riche en enseignements pour ce qui est de l'application des sanctions prévues par la loi, la prise de conscience de la globalité de l'insécurité et l'exigence de la nécessaire coopération internationale. Tout en renseignant sur la nature transnationale de la menace terroriste, elle souligne le rôle premier de l'Etat en tant qu'instrument de protection et de sécurité, l'importance de la mobilisation de l'opinion publique et la nécessité d'un arsenal juridique adéquat et de capacités institutionnelles et opérationnelles adaptées pour combattre efficacement ce fléau dans le cadre de la loi. Avec le parachèvement de la réconciliation nationale, l'Algérie entend fonder en actes la culture démocratique, prendre en charge ses besoins de sécurité et de développement et faire revivre l'idéal d'une société apaisée et stable. Sa contribution à l'effort global de lutte contre le terrorisme transnational répond à cet objectif et traduit sa volonté d'œuvrer avec ses partenaires à l'avènement d'un ordre mondial plus sûr et plus solidaire. notoirement connu qu’AQMI en matière d'enlèvements contre rançons qui sont devenus l'une des sources principales des revenus pour les groupes liés à Al Qaeda». Dans ce sens, le patron du contreterrorisme au département d'Etat a souligné que les EtatsUnis «encouragent vivement le comité contre le terrorisme du Conseil de sécurité à se concentrer davantage sur cet aspect de la menace terroriste,qui s'étend au-delà d'AQMI». Par ailleurs, M. Benjamin a considéré que «l'importance de situer les efforts américains contre le terrorisme dans un large cadre des politiques étrangère et sécuritaire est soulignée par les transformations qui se déroulent au MoyenOrient et en Afrique du Nord, dont le plein impact, y compris pour nos efforts contre le terrorisme, est en train de prendre forme». Estimant que ces bouleversements politiques à travers les pays de la région MENA sont prometteurs en matière de démocratie, M. Benjamin a prévenu, toutefois, que «certains dangers ne peuvent être ignorés». En effet, a-t-il expliqué devant le comité onusien de contre-terrorisme, «ces agitations politiques ont distrait les services de sécurité dans un certain nombre de pays». EL MOUDJAHID POLITIS-Final-07.qxp 17/09/11 17:31 Page 22 22 POLITIS - EL MOUDJAHID - N° 001 - SEPTEMBRE 2011 11 SEPTEMBRE... 10 ANS APRÈS L’AFRIQUE RÉSOLUE À COMBATTRE LE TERRORISME L’Union fait la force Devant l’ampleur des sacrifices et le lourd tribut payé par l’Algérie et le peuple algérien face au terrorisme et à ses connivences internationales, Alger reste, pour l’Afrique et le monde, le symbole de la résistance à ce fléau mondial. L’histoire retiendra que l’Algérie a joué un rôle pionnier en matière de lutte antiterroriste, et ce bien avant les tristement célèbres attentats du 11 septembre. Par Nora Chergui Algérie reste le chef de file de la lutte antiterroriste en Afrique», de l’avis même de nombreux pays occidentaux à leur tête les Etats-Unis d’Amériques. Mais comme le combat contre ce fléau doit être mené en partenariat avec d’autres Etats, notre pays a réussi à faire reconnaître aux pays africains la nécessité de faire face au terrorisme sur les plans individuel et collectif. Cette nécessité a conduit en premier à l’adoption de la convention sur la prévention et la lutte contre le terrorisme par le 35e sommet de l’OUA qui s’est déroulé à Alger en juillet 1999. Depuis, à nos jours, les membres de l’Union africaine continuent de rejeter sans équivoque le terrorisme. Des lois et des stratégies sont élaborées en concertation avec les pays africains pour permettre au continent noir de mener une guerre sans merci à l’hydre terroriste qui veut en faire ses bases arrières. Cet engagement a forcé le respect des grandes nations, en témoigne ce message de Georges W. Bush adressé au président Bouteflika en septembre 2002. «Le peuple américain exprime sa reconnaissance à vous-même et au peuple algérien pour vos contributions à la campagne pour libérer le monde du terrorisme. Les Etats-Unis d'Amérique ont été directement ciblés le 11 septembre dernier. Le terrorisme obscurcit toute perspective à tous les peuples de vivre dans la paix, la liberté et la prospérité. Comme nous nous unissons pour défaire le terrorisme, avec persévérance et courage, nous le vaincrons certainement.» Il faut dire que le débat autour du terrorisme international a indéniablement pris des proportions considérables depuis les attaques spectaculaires et tragiques aux Etats-Unis, des tours jumelles, le World Trade Center, ainsi que le Pentagone. Les attentats du 11 septembre 2001 ont frappé les esprits et marqué le début des inquiétudes selon lesquelles la sécurité mondiale serait menacée. Et c’est là où l’on a commencé à parler de coopération internationale pour pouvoir faire face à ce fléau devenu transnational. Il faut cependant rappeler que, dans le cadre international, beaucoup de conventions ont vu le jour bien avant le 11 septembre. La première convention régionale date de 1971 et relève de la prévention et de la répression des actes de terrorisme. Elle sera suivie de la Convention arabe sur la répression du terrorisme de 1998, de la Convention de l’OUA en 1999… Les Nations unies ont également adopté un «L’ certain nombre de conventions relatives au terrorisme. Les premières conventions de ce En 1999, à type sont relatives aux actes Alger, est concernant l’aviation surtout, puis signé l’acte les transports maritimes. Finalede naissance ment, ce n’est qu’en 1997 qu’une de la convention relative aux attentats coopération terroristes à l’explosif voit le jour. africaine de Celle-ci impose aux Etats concerlutte contre nés de sanctionner les individus le terrorisme. responsables de tels actes. Mais, après 2001, la lutte contre le terrorisme s’est nécessairement affirmée. Ainsi, la résolution 1373 de l’ONU prévoit l’interdiction de tout financement de groupe terroriste par les Etats. Le Comité contre le terrorisme, créé en 2001, a pour mission de veiller au respect de cette dernière résolution. Récemment, une Convention internationale pour la répression des actes de terrorisme nucléaire a été adoptée. Alger 1999, l’éveil africain Pour avoir souffert des affres du terrorisme, longtemps avant que d’autres régions du monde ne soient elles-mêmes concernées, l’Afrique et sous la houlette de l’Algérie s’est diligemment employée à définir les voies et moyens les plus appropriés de prévention et de lutte contre ce phénomène ravageur des temps modernes. Notre continent a non seulement fait œuvre utile, mais s’est aussi distingué par le caractère pionnier de son engagement. Bien avant 2001, la recherche des moyens de lutter contre ce phénomène dévastateur avait bel et bien démarré. En 1999, à Alger, est signé l’acte de naissance de la coopération africaine de lutte contre le terrorisme. Convaincus que le terrorisme ne peut être justifié, quelles que soient les circonstances, et devrait donc être combattu dans toutes ses EL MOUDJAHID POLITIS-Final-07.qxp 17/09/11 17:31 Page 23 23 POLITIS - EL MOUDJAHID - N° 001 - SEPTEMBRE 2011 4 formes et manifestations, notamment lorsque des Etats sont directement ou indirectement impliqués, nonobstant son origine, ses causes et ses objectifs. Les discussions du sommet d’Alger ont porté sur les efforts à fournir et à conjuguer pour faire front commun contre ce que certains appellent le mal du XXIe siècle. Pour tout dire, la coopération africaine en matière de lutte contre le terrorisme a démarré d’Alger. Elle a porté le nom de Convention de l'OUA sur la prévention et la lutte contre le terrorisme. Entrée en vigueur en décembre 2002, cette convention oblige les pays signataires, comme stipulé dans l’article 4, à s’abstenir de tout acte visant à organiser, soutenir, financer, commettre, encourager des actes terroristes ou à leur donner refuge, directement ou indirectement, y compris leur fournir des armes ou les stocker, et à leur délivrer des visas ou des documents de voyage. Un petit pas dans le long combat contre le terrorisme qui ne connaît pas de répit. Et parce qu’il ne connaît pas de frontières, les signataires ont dans l’article 8 évoqué la coopération judiciaire et se sont engagés à procéder à l’extradition. «Les Etats parties s’engagent à extrader toute personne poursuivie, inculpée ou condamnée pour des actes terroristes commis dans un autre Etat partie et dont l’extradition est sollicitée par cet Etat conformément aux procédures et modalités prévues par la présente Convention ou en vertu d’accords d’extradition signés entre eux et sous réserve des dispositions de leurs législations nationales.» Seul un engagement ferme Alger, fidèle à sa réputation de leader, abrite, en septembre 2002, une réunion intergouvernementale de haut niveau des Etats membres de l'Union africaine consacrée à la prévention et à la lutte contre le terrorisme. Cette rencontre entérinée par le sommet de l'OUA/UA de Durban de juillet 2002, et que l'Algérie s'est proposée d'abriter, a été une occasion pour examiner les voies et moyens à même d'assurer l'application de la convention africaine sur la prévention et la lutte contre le terrorisme. Les Etats africains ont été appelés à surmonter les handicaps générés par le retard enregistré dans le domaine de la coopération entre les institutions impliquées dans la lutte antiterroriste en Afrique, ainsi que par l'insuffisance de moyens et de capacités pour mettre au point et conduire la lutte contre le terrorisme. Le premier constat a révélé que peu de pays africains sont en mesure de réunir, seuls, l'ensemble de ces moyens. Ce qui impose une coopération sans faille, seule à même d'unir les moyens pour juguler ce fléau dévastateur qui met en péril la paix, la sécurité et la stabilité à travers le monde. Les participants ont convenu d’un plan d’action qui vise à donner corps à des engagements et obligations, et à promouvoir l’accès des pays africains à des moyens de lutte antiterroriste appropriés à travers un ensemble de mesures fixant un cadre pour la coopération africaine. Le plan d’action souligne, dans son préambule, que l’éradication de ce phénomène requiert un ferme engagement des Etats membres à poursuivre des objectifs communs à travers, notamment l’échange d’informations sur les activités et les mouvements des groupes terroristes en Afrique, l’assistance juridique mutuelle, l’échange de recherche et d’expertise. Ainsi que la mobilisation de l’assistance technique. La rencontre d’Alger a été précédée par celle de Dakar où les représentants d’une trentaine de pays africains ont invité toutes les nations de ce continent à faire diligence pour ratifier la Convention de l'OUA relative à la prévention et à la lutte contre le terrorisme et les instruments similaires de l'ONU, et à prendre les mesures juridiques, diplomatiques, financières et autres, pour lutter contre le terrorisme aux niveaux national, sous-régional, régional et mondial. Les fondements de l’éveil africain, bâti sur la Convention d’Alger (1999) et sur le Plan d’action l’affermissant en 2002, repères auxquels sont venus s’ajouter les efforts du continent en octobre 2004 (réunion et lancement du Centre d’étude et de recherche sur le terrorisme), toujours dans la capitale algérienne. L’ouverture dans la capitale algérienne d’un Centre africain de lutte antiterroriste auquel est attribuée principalement la mission de priver les groupes armés de leurs sources de financement, de prévenir les attentats et d’avertir les pays du continent africain sur d’éventuels actes de terrorisme en préparation s’inscrit dans le prolongement de la stratégie algérienne de lutte contre un fléau que le pays a eu à subir longtemps seul, n’ayant été accompagné le plus souvent que de l’indifférence généralisée, avant que ne se réveille enfin le monde à la suite de la multiplication et de la densification des effets néfastes du terrorisme sur l’ensemble de la planète. Car, si l’Afrique œuvre à sa sécurité, il n’en reste pas moins que le reste du monde, à commencer par la toute proche Europe, a besoin de cette stabilité africaine qui est apte à apporter sa part d’assurance d’une quiétude européenne. Idem pour les Amériques, l’Eurasie ou n’importe quelle autre région du monde. Ne plus se contenter de condamner L’organisation panafricaine a choisi, à Kampala, en juillet 2010, d’adopter la manière forte face au terrorisme dont la progression inquiète au plus haut point. L’UA a montré un nouveau visage. Elle a montré au monde qu’elle ne se contentait plus de condamner toutes les attaques terroristes perpétrées sur le continent. Elle a décidé d’aller plus loin en interdisant aux Etats membres de payer des rançons dans les situations de prise d’otage. Une fermeté qui est en parfaite adéquation avec l’une des priorités de la diplomatie algérienne. Celle-ci considère, en effet, que l’argent résultant des prises d’otages sert à financer les actions terroristes. La ligne dure choisie à Kampala a été un triomphe. En fait, le durcissement de ton a été le résultat d’un concours de circonstances. En outre, l’attentat orchestré par les shebabs somaliens à quelques jours du sommet, qui témoigne d’une certaine audace. 76 morts. Aussi, la mort de l’otage français Michel Germaneau, qui a réellement bouleversé les parties représentées au conflit. L’idée d’une véritable riposte a lourdement pesé sur le sommet. Il faut dire qu’une très grande motivation est constatée chez les Africains d’être partie prenante, d’abord pour eux, à la prévention et la lutte contre le terrorisme, mais également d’être partie prenante dans la stratégie mondiale d’éradication de ce phénomène. Les pays membres de l’Union africaine ont proposé et adopté des mesures concrètes qui rendent beaucoup plus opérationnelles les décisions prises par les chefs d’Etat africains pour que l’Afrique, d’abord dans le cadre d’une coopération sans faille, s’engage résolument, en mobilisant son potentiel, en prenant compte des expériences vécues, à mener des actions de coopération pour éradiquer le terrorisme sur le continent. L’Afrique est résolue à lutter jusqu’à l’éradication du terrorisme. N. C. La réunion intergouvernem entale de haut niveau des Etats membres de l'Union africaine consacrée à la prévention et à la lutte contre le terrorisme, tenue en septembre 2002 et entérinée par le sommet de l'OUA/UA de Durban, de juillet 2002, et que l'Algérie s'est proposée d'abriter, a été une occasion pour examiner les voies et moyens à même d'assurer l'application de la convention africaine sur la prévention et la lutte contre le terrorisme. EL MOUDJAHID POLITIS-Final-07.qxp 17/09/11 17:31 Page 24 24 POLITIS - EL MOUDJAHID - N° 001 - SEPTEMBRE 2011 11 SEPTEMBRE... 10 ANS APRÈS LES CONDITIONS DE LA LUTTE CONTRE LE TERRORISME Des pistes algériennes de réflexion Par Bachir Medjahed «Aucun Etat ne peut fonder sa sécurité en ignorant celle des autres, et encore moins au détriment des autres.» Le 11 septembre est une date charnière. La perception mondiale du terrorisme marque une rupture. Les groupes armés terroristes ou les mouvements terroristes tels que les nomme l’Algérie, ou plutôt le terrorisme transfrontalier, ont acquis la capacité d’opérer des frappes de grande envergure. Des milliers de morts en si peu de temps. Des frappes imparables et surtout non prévues. Désormais, l’extrême violence est le point de départ de leur stratégie. Il ne s’agit pas d’une programmation d’étapes de crises, en crescendo, pour entamer des négociations. Les auteurs des attentats n’appartiennent pas d’origine à un même Etat, d’où la validité de la thèse algérienne. Les terroristes n’ont pas employé des armes de guerre, ne se sont pas réclamés d’un Etat quelconque, mais plutôt d’une organisation non étatique, d’où la mise hors jeu des moyens militaires lourds d’affrontement. Rappelons quelques pistes de réflexion émises par le président Bouteflika, à l’occasion de la conférence internationale organisée par la commission de défense nationale qui s’était tenue à Alger en mai 2002 à destination de la communauté internationale comme positions de l’Algérie presqu’une année après les attentats du 11 septembre. Le président fait le constat du désordre et de l’incertitude et d’autres Etats membres des Naappelle à repenser en profondeur la problématique de la sétions unies. curité des Etats en vue de modifier le système inégalitaire acPar l’énoncé d’observations dont la tuel. Aucun Etat, disait-il, ne peut fonder sa sécurité en ignorant liste n’est pas exhaustive, on pourcelle des autres, et encore moins au détriment des autres. Le rait tenter d’approcher la définition Président affirmait que «les initiatives unilatérales, inefficaces de quelques-unes des problémaet contre-productives doivent céder le pas à une politique de tiques liées à la lutte contre le terrenforcement de la sécurité internationale qui soit concertée et rorisme depuis les attentats du 11 solidaire». «Pareille exigence devant la menace du terrorisme, septembre 2001. un fléau ancré dans la mondialisation, reflet d’un monde déLe terrorisme n’est pas né le 11 pourvu de repères.» «Les amalgames, les politiques du deux septembre. La mobilisation monpoids, deux mesures ne peuvent qu’entamer la crédibilité et la diale qui s’en était suivie profondeur de l’engagement de la communauté interprouve seulement que des nationale contre le terrorisme international». En mai 2002, le Président composantes de la dimen- Des contradictions «obstacles» Bouteflika fait le constat du désordre et de l’incertitude, et appelle à repenser en profondeur la problématique de la sécurité des Etats en vue de modifier le système inégalitaire actuel. De profondes contradictions au niveau des grandes puissances riches et développées. S’engager dans la lutte contre le caractère transnational du terrorisme tout en prenant en otage la prospérité à l’intérieur de leurs frontières. Désarmer les économies des pays en développement par le biais du démantèlement des barrières douanières et présenter le libre-échange commercial comme fondement du développement, de la richesse et même de la prospérité. S’engager à mettre en place un système de sécurité collective qui est censé intégrer toutes les données liées aux menaces contre la paix et à la sécurité internationale tout en s’employant à mettre en œuvre un nouveau logiciel «nous vous détruirons puis nous vous reconstruirons» qui s’arrête en fin de compte au premier stade. Une sécurité collective au nom de la lutte contre toutes les grandes menaces et qui crée de l’insécurité globale dans sion internationale du terrorisme n’a été privilégiée que celle qui a des conséquences directes sur la sécurité intérieure des grandes puissances. Il a fallu, pour sa prise en compte, que l’hyperpuissance américaine se réveille de l’illusion que son propre territoire n’est nullement immunisé contre des frappes terroristes autant meurtrières que hautement spectaculaires. Que de temps aurait été gagné si la thèse algérienne d’un terrorisme transfrontière était prise au sérieux par les pouvoirs occidentaux, au moins pour qu’ils adoptent une position de prudence que leur recommande obligatoirement leur rôle de dirigeants et de protecteurs de leur nation et par leurs services de renseignement qui n’ont nullement le droit d’écarter toutes les hypothèses et qui ont découvert qu’ils étaient en retard d’une profonde réflexion. Ayant placé les frontières de leur sécurité nationale très loin de leurs frontières, les Etats-Unis ont négligé leur défense opérationnelle sur leur propre sol. Dans quelles mesures les Etats-Unis ontils inspiré les «djihadistes» ? Projections des forces américaines hors de leurs territoires, car leur ennemi est lointain, projections des forces terroristes par passeport, car ils considèrent que leur ennemi est lointain. Coalition multinationale d’un côté en vue d’une attaque ou même d’une guerre sans passer par le Conseil de sécurité de l’ONU, frappe terroriste employant en même temps des recrues de plusieurs pays et décidée peut-être unilatéralement. EL MOUDJAHID POLITIS-Final-07.qxp 17/09/11 17:31 Page 25 POLITIS - EL MOUDJAHID - N° 001 - SEPTEMBRE 2011 27 4 Unilatéralisme et niveaux de responsabilité Des questions liées aux responsabilités. Simple négligence des Etats occidentaux plus particulièrement ou des Nations unies de façon plus large ? Qui devait prendre en charge ce type de réflexion au niveau des instances internationales onusiennes ? Les membres occidentaux permanents du Conseil de sécurité du fait qu’ils se posent unilatéralement en bras armé du Conseil de sécurité ? Serait-il possible que la lutte contre le terrorisme soit menée efficacement au nom du droit international tout en continuant à ignorer celui-ci quand les Palestiniens subissent à la fois des atteintes graves aux droits de l’homme et le refus de leur autodétermination ? Même question pour ce qui concerne les Sahraouis. Comment lier la lutte contre le terrorisme après le 11 septembre et l’endiguement de l’influence de celui-ci quand des guerres menées unilatéralement contre des Etats qui n’ont aucun lien prouvé avec ElQaïda sont suivies d’une occupation militaire laquelle fatalement offre des recrues déterminées à ce mouvement terroriste ? Comment mobiliser pour la lutte contre le terrorisme quand des arguments sont offerts facilement aux mouvements terroristes pour que ceux-ci fassent accréditer la thèse de guerres de croisade menées contre les pays musulmans, et donc contre l’islam ? L’après-11 septembre, tel qu’il découle d’une politique internationale conçue unilatéralement, sur la base des amalgames dénoncés par le Président algérien, a servi à exacerber les communautarismes, à fournir les occasions de manipulations des facteurs de rupture des cohésions nationales arabes et africaines, à installer les guerres civiles par la mise en affrontement des populations autour des clivages confessionnels et ethniques, et à placer des pays dans des situations proches de la partition. Ainsi, la lutte contre le terrorisme rencontre les éléments de son inefficacité. Des puissances occidentales se retrouvent ainsi à mener deux guerres, plusieurs même, dans les pays musulmans (plutôt contre des pays musulmans tel que cela est perçu par les populations). Des guerres pourtant que des Etats ne peuvent pas gagner, ne peuvent plus gagner. L’impossible solution militaire L’OTAN reprend à son compte les anciennes déclarations des dirigeants militaires américains selon lesquels les forces armées américaines n’étaient pas en train de gagner la guerre en Irak. Les mêmes conclusions allaient être tirées pour l’Afghanistan. Ce sont certainement les mêmes conclusions qui sont tirées de la guerre en Libye. Des frappes aériennes ne produisent aucun résultat «positif», tandis que des engagements terrestres amèneront les militaires occidentaux à évoluer en immersion au sein de populations hostiles. Alors, que devrait faire l’OTAN à propos de la Libye quand d’évidence, toutes les solutions militaires mènent vers les impasses, là où seule la solution politique peut être un facteur de paix durable pour le pays concerné, pour toute la région. Les solutions militaires renforcent plutôt les mouvements terroristes dont la croissance est liée aux «déstabilisations politiques». Ce type de guerre qui fatalement affaiblit les Etats détruit la cohésion nationale qui est le meilleur espace de défense contre toute menace terroriste. La fin de la première décennie du nouveau siècle nous a mis en présence de nouveaux types de conflits armés ou de guerres. En Afghanistan, en Irak, au Liban, à Gaza, des forces armées des Etats affrontent des mouvements politiques armés. Il s’agit d’armées étrangères face à des mouvements dit de résistance. Qui est en mesure de gagner la guerre ? Comment se mesure la victoire et comment se mesure la défaite ? Le Président algérien disait : «Quand il y a une guerre, c’est la guerre qui a gagné.» Un Etat occupant et un mouvement de résistance se sont affrontés. Sur quels critères faudrait-il fonder la victoire ou la défaite pour un Etat occupant et un mouvement de résistance ? Sur le nombre de victimes à faire dans chaque camp puis à les comparer ? En tout cas, pas par le recensement des armes à possession, puisque c’est une guerre asymétrique où il est difficile de dire qui a gagné et qui a perdu. Peut-on «Les initiatives unilatérales, inefficaces et dire que les Américontre-productives doivent céder le pas à cains par exemple une politique de renforcement de la ont perdu ou gagné ? Qui alors a gagné la sécurité internationale qui soit concertée guerre à Gaza ? Pas et solidaire.» Israël. Une défaite sur le plan moral, mais le plus grave pour lui, c’est qu’il ne pourra jamais gagner une guerre qu’aucun Etat ne sait faire et la gagner. Il ne s’agissait d’ailleurs pas de guerre, car il n’y avait pas en présence deux Etats pour s’affronter ni deux armées. En tout cas, Israël ne peut pas dire qu’il a gagné la guerre. Dans une guerre, on compare les forces en présence, et cela n’est pas valable dans ce cas précis. Hamas n’a pas perdu la guerre, car il est encore là, et même si ses effectifs sont entaillés, l’injustice faite au peuple palestinien alimentera les rangs de la résistance, car les jeunes Palestiniens EL MOUDJAHID POLITIS-Final-07.qxp 17/09/11 17:31 Page 26 26 POLITIS - EL MOUDJAHID - N° 001 - SEPTEMBRE 2011 11 SEPTEMBRE... sont nés dans la révolte permanente de n’être pas comme les jeunes du monde entier, en train de vivre leur vie dans leur propre pays, leur propre Etat. Quelle guerre pourrait-elle être gagnée si ce n’est celle de la paix en ne continuant pas à nier les droits des Palestiniens à avoir leur Etat viable ? L’absence de paix au Proche-Orient couplée à ce qui est dénoncé comme une politique de deux poids, deux mesures, par l’usage du droit de veto américain qui viole le droit international, enfonce la région dans une insécurité permanente. Des analystes considèrent même que le premier facteur d’insécurité pour les Américains est la politique américaine d’Israël, et que cette même politique permet aux terroristes transnationaux d’élargir leur base de recrutement. Une stratégie internationale globale ? Par le biais de la mondialisation, les populations perçoivent que l’économie de marché «qui nous est imposée» n’est pas et ne sera pas celle qui va se substituer à l’endettement étatique et à la dépense publique pour financer le développement et la croissance économique, et que cette dernière soit durable et non artificielle. Que pouvons-nous et que devons-nous faire concrètement pour assurer les conditions d’un développement quand on fait le constat que les IDE tant attendus, promis par les pays riches dès lors que nous aurions procédé aux réformes économiques, ne sont pas au rendez-vous ? Nous allons entrer dans une guerre qui est mondiale. La mondialisation, telle qu’on l’appelle. Une guerre qui nous est imposée, à laquelle il n’y a malheureusement pas d’autre alternative, comme l’avait dit le Président Bouteflika. Aussi nous faudrait-il l’admettre et tenter de réunir les conditions de notre intégration et renforcer notre capacité à pouvoir le faire avec profit. Seulement avec un programme de mise à niveau qui est axé plus particulièrement sur les disciplines liées au management alors que la mise à niveau ne devrait surtout pas ignorer les «gens» qui activent dans les technologies de pointe puisqu’il s’agit de s’imposer par la qualité des produits. Il a même été possible de considérer que cette sorte de concurrence est une guerre commerciale qui possède, avec «Les amalgames, la guerre militaire, bien des les politiques du points communs. Dans une guerre économique, on ferme les deus poids, deux entreprises qui coulent, et cellesmesures ne ci sont fort nombreuses ; et dans peuvent la guerre tout court, on détruit qu’entamer la des usines à partir du ciel. Là, le crédibilité et la résultat est le même : on détruit profondeur de les instruments du développement, avec toutes les consél’engagement de quences qui en découlent. Il ne la communauté faudrait pas occulter qu’il est plus internationale facile de détruire que de contre le construire et, pire encore, de reterrorisme construire. On produit un chôinternational.» mage de masse dans les deux cas, et même parfois un retour à l’âge de pierre. D’un côté, on dit que seule la concurrence peut mener à la prospérité alors que l’on sait que toute concurrence détruit les solidarités, car il faut que fatalement, de celle-ci, il en découle des vaincus et des vainqueurs, très peu de vainqueurs et une masse de vaincus. Dans une telle guerre, probablement que l’on sait bien à l’avance qui va gagner et qui va perdre, qui va prospérer en tant que pays ou qu’entreprise et qui va disparaître. On ne parle plus de la prospérité partagée, et pour cause, celle-ci est plutôt protégée, interdite de passage par les frontières. Le terrorisme est transfrontalier, la corruption internationale l’est également, mais pas la prospérité. B. M. 10 ANS APRÈS Verra-t-on le bout du tunnel ? EL MOUDJAHID POLITIS-Final-07.qxp 17/09/11 17:31 Page 27 POLITIS - EL MOUDJAHID - N° 001 - SEPTEMBRE 2011 4 27 EL MOUDJAHID POLITIS-Final-07.qxp 17/09/11 17:31 Page 28 28 POLITIS - EL MOUDJAHID - N° 001 - SEPTEMBRE 2011 11 SEPTEMBRE... 10 ANS APRES M. ABDELKADER MESSAHEL, MINISTRE DÉLÉGUÉ AUPRÈS DU MINISTRE DES AE, CHARGÉ DES RELATIONS MAGHRÉBINES ET AFRICAINES «La présence importante d’experts à la conférence témoigne de leur disponibilité à renforcer davantage leur coopération avec notre pays» Propos recueillis par Fouad Irnatene La vision d’établir une stratégie claire et commune en matière de lutte antiterroriste et du banditisme dans la région ne se heurte-t-elle pas à l’instabilité en Libye, notamment, où des armes circulent sans contrôle ? Il est tout à fait évident que la crise libyenne a créé une menace supplémentaire dans la région du Sahel du fait de la circulation d’armes et qu’elle a suscité le retour massif de ressortissants vers leur pays d’origine qui deviennent ainsi une charge supplémentaire à leurs Etats, déjà en difficulté financière. Cette nouvelle situation est devenue une source de préoccupation pour les pays de la région qui, saisissant l’opportunité de la tenue de la conférence, ont examiné de concert avec les partenaires les voies et moyens de faire face à ce nouveau défi. Lors de la visite en Algérie de Gilles de Kerchove, coordinateur de l’UE pour la lutte contre le terrorisme, il a été question de nouvelles approches de lutte contre ce fléau dans la région du Sahel. Pouvez-vous nous évoquer ces nouveautés ? La visite en Algérie de M. Gilles de Kerchove, coordinateur de l’UE pour la lutte contre le terrorisme, a été l’occasion pour l’informer de la nouvelle stratégie adoptée par les pays du champ, et notamment la mise en place du mécanisme de coopération régionale aussi bien dans le domaine de la sécurité que dans celui du développement. Elle a été également une occasion pour lui de faire part de ce qui est attendu du partenariat entre les pays du champ et les pays et institutions extrarégionaux dans le domaine de la lutte antiterroriste, contre le crime transnational organisé et le sous-développement. Comment évaluez-vous le niveau de coopération avec certains partenaires, notamment à travers les groupes de contact établis avec l’UE, la Grande-Bretagne et les Etats-Unis ? Il existe un partenariat bilatéral entre l’Algérie et ces pays, tout comme sont tissés des liens de coopération entre ces derniers et les pays de la région. La présence importante d’experts de ces pays à la conférence témoigne de leur disponibilité à renforcer davantage leur coopération avec notre pays. La lutte contre le terrorisme et la criminalité transnationaux nécessite aussi une stratégie d’accompagnement en matière de développement. Seulement, le monde actuel connaît une période de récession économique grave. Comment peut-on, dans ce contexte, parler d’efficacité alors que la misère constitue un terreau important pour les réseaux terroristes ? Il est tout à fait évident que la lutte contre le terrorisme doit s’accompagner d’efforts importants en matière de développement économique et social, et tout particulièrement dans les zones les plus déshéritées de la région du Sahel. Ce thème a représenté un volet important de la conférence à laquelle ont pris justement part des experts en matière de développement venus des pays partenaires et des bailleurs de fonds. Il est clair que l’Algérie fournit un effort considérable en matière de projets structurants, comme la EL MOUDJAHID POLITIS-Final-07.qxp 17/09/11 17:31 Page 29 29 POLITIS - EL MOUDJAHID - N° 001 - SEPTEMBRE 2011 4 transsaharienne. Pour les pays du Sahel, la situation est tout autre, ce qui rend ce binôme amoindri. Quelle solution peut-on préconiser pour impulser une dynamique de développement dans ces pays ? Notre pays a fourni et continue de fournir des efforts importants pour le développement économique et social de notre continent, et plus particulièrement des pays voisins. Que ce soit au niveau bilatéral ou dans le cadre multilatéral, notamment à travers le NEPAD, qui constitue un cadre stratégique de développement global pour accélérer la coopération et l’intégration entre les pays africains, l’Algérie a initié des projets structurants importants dans son environnement immédiat, tels que la transsaharienne. La conférence a été une occasion pour renforcer la dynamique de coopération entre les pays du champ et pour sensibiliser davantage les partenaires extrarégionaux à l’effet de contribuer aux efforts de développement déjà consentis par les pays de la région eux mêmes. L’Algérie n’a pas cessé d’appeler les pays du Sahel, au cours des précédentes rencontres, à converger leurs efforts, notamment dans la perception commune de menaces vers une lutte ferme et coordonnée contre le terrorisme et le crime organisé. Quel bilan faitesvous de la coopération depuis l’avènement du CECOM ? Les conférences d’Alger de mars 2010 et de Bamako de mai 2011, qui ont posé les principes directeurs et mis en place des arrangements, notamment l’établissement du CEMOG et l’UFL, pour organiser et structurer la coopération régionale dans le domaine de la sécurité et de lutte contre le sousdéveloppement, ont constitué des étapes importantes dans le renforcement de la coopération régionale. Elles ont créé une dynamique et une nouvelle stratégie qui a permis à cette coopération de montrer son efficacité et de donner des résultats satisfaisants sur le terrain. L’Algérie a été le premier pays à mettre en garde contre le paiement de rançons, et dont la démarche a abouti par l’adoption, par le Conseil de sécurité, d’une résolution dans ce sens. Dernièrement, Washington s’est aligné sur la vision d’Alger… En effet, notre pays a pris, très tôt, conscience de la problématique de la question du paiement de rançons et n’a eu de cesse de sensibiliser la communauté internationale. Le paiement de rançons est une source importante de financement du terrorisme et constitue un véritable obstacle à l’efficacité de la lutte que mène la communauté internationale contre le terrorisme. La démarche algérienne a abouti au niveau de l’Union africaine et du Conseil de sécurité des Nations unies, et nous constatons que de plus en plus de pays se sont rangés sur notre position. F. I. ROBIN SEARBY, CONSEILLER DU PREMIER MINISTRE BRITANNIQUE POUR LA LUTTE ANTITERRORISTE EN ALGÉRIE : «Nous avons d'excellentes relations dans le domaine de la défense et de la lutte antiterroriste» a coopération algéro-britannique dans la lutte contre le terrorisme a été au centre d'entretiens lundi à Alger entre M. Kamel Rezag Bara, conseiller auprès du Président de la République, et le général major Robin Searby, conseiller du Premier Ministre britannique pour la lutte antiterroriste en Afrique du Nord et au Sahel. «Nous avons discuté de la 3e réunion du groupe de contact bilatéral algéro-britannique de coopération sur la lutte contre le terrorisme et les questions de sécurité connexes, qui aura lieu à Alger à la fin du mois d'octobre prochain», a indiqué M. Bara. Le conseiller du chef de l'Etat a précisé que ce groupe de contact était «un mécanisme informel de structuration du dialogue algéro-britannique sur les questions liées à lutte contre le terrorisme et la sécurité». M. Bara a affirmé à cet effet avoir «procédé à l'évaluation de la situation dans la région avec une focalisation sur la sous-région du Sahel». Ceci a permis, a-t-il dit, de «donner des indications aux partenaires britanniques sur le contenu et les objectifs du programme de la conférence prévue les 7 et 8 septembre prochain à Alger sur le partenariat entre les pays du champ (Algérie, Mali, Mauritanie et Niger) et les partenaires extrarégionaux» dans les domaines de la sécurité et du développement. Il a indiqué également avoir évoqué avec le général major Searby «les risques induits par la crise en Libye sur la stabilité dans la sous-région et insisté sur la nécessité d'une solution politique à cette crise». M. Bara a relevé, en outre, une «similitude de vues» entre l'Algérie et la Grande-Bretagne sur la question de la prohibition du paiement de rançons aux groupes terroristes, en rappelant la «nécessité de continuer à travailler ensemble au niveau des Nations unies pour élargir le consensus multilatéral sur cette question». De son côté, le général major Robin Searby, en visite de deux jours en Algérie, a réaffirmé la «relation importante du Royaume-Uni avec l'Algérie dans la lutte contre le terrorisme et les questions de sécurité», selon les termes d'un communiqué de presse rendu public lundi par l'ambassade du Royaume-Uni à Alger, qui accorde à l'Algérie un «rôle pivot» dans la lutte antiterroriste. «Nous avons d'excellentes relations dans le domaine de la défense et de la lutte antiterroriste, et nous souhaitons pouvoir les poursuivre (...) lors de la conférence d'Alger, prévue en septembre, sur le partenariat dans le Sahel, et le dialogue algéro-britannique sur la lutte antiterroriste prévu à Alger en octobre», a dit l'officier britannique cité par la même source. Selon la représentation diplomatique britannique, il a aussi déclaré que les deux pays avaient en partage «une expérience commune jalonnée de collaboration dans la lutte contre le terrorisme», ainsi que des positions communes en la matière comme le non-paiement de rançon aux groupes terroristes. L EL MOUDJAHID POLITIS-Final-07.qxp 17/09/11 17:31 Page 30 30 POLITIS - EL MOUDJAHID - N° 001 - SEPTEMBRE 2011 11 SEPTEMBRE... 10 ANS APRÈS M. HENRY S. ENSHER, AMBASSADEUR AMÉRICAIN EN ALGÉRIE «Les Etats-Unis et l’Algérie ont été et demeurent engagés à travailler ensemble» Interview réalisée par Mourad Termoul Dix ans après les évènements du 11 septembre, comment les Etats-Unis d’Amérique perçoivent-ils le monde et qu’ont-ils changé dans la vision de Washington ? Il est clair que nous faisons face à une menace continue. Nous présentons nos condoléances pour l’attentat de Cherchell. Nous voyons cela comme un signe évident que notre coopération contre cette menace est nécessaire. Beaucoup de choses ont changé en dix ans depuis le 11 septembre. Les Etats-Unis n’ont pas abandonné leur objectif de poursuivre Oussama ben Laden, et en mai, les éléments spéciaux de nos forces de sécurité ont réussi à l’éliminer. Les Etats-Unis ont poursuivi leur travail avec leurs partenaires pour empêcher les attaques terroristes de se produire et tentent de faire face aux causes qui incitent les gens à basculer dans la violence. Un autre changement significatif que j’aimerais souligner est les développements du « Printemps arabe ». Nous avons été témoins du début de transitions dans certains pays vers des systèmes plus démocratiques en mesure de répondre aux souhaits de ces peuples. Les Etats-Unis soutiennent ces pays dans leur processus de transition, et nous continuons à inciter les nations à travers le monde à être du côté du peuple dans ses aspirations. Quelle évaluation faites-vous de la coopération algéro-américaine dans le domaine de la lutte contre le terrorisme et la criminalité transnationale ? La prolifération du terrorisme et du crime transnational fait de la coopération internationale un élément essentiel pour traduire en justice ceux qui menacent notre sécurité. La stabilité à long terme dépend de la capacité des gouvernements à coordonner leurs ef«La stabilité à forts dans la lutte antiterroriste et long terme l’application des lois. Les Etatsdépend de la Unis et l’Algérie ont toujours été et capacité des demeurent engagés à travailler gouvernements ensemble en vue de faire face à à coordonner cette menace émanant des leurs efforts groupes qui cherchent à perpétrer dans la lutte des attaques contre des civils inantiterroriste et nocents. Le groupe de contact bidans latéral algéro-américain sur le contre-terrorisme et la coopération l’application sécuritaire, lancé en mars 2011, a des lois.» représenté un moment historique dans le développement de la coopération sécuritaire bilatérale. Ce mécanisme a apporté un souffle qualitatif au partenariat américano-algérien stratégique. Il a aidé à structurer un dialogue et une consultation, et à incorporer plusieurs facettes de notre coopération bilatérale dans les domaines de la politique, l’économie, la sécurité, la justice et le domaine technique. Alors que les Etats-Unis sont en contact direct avec les pays du Sahel au sujet des menaces auxquelles ils font face, il appar- EL MOUDJAHID POLITIS-Final-07.qxp 17/09/11 17:31 Page 31 31 POLITIS - EL MOUDJAHID - N° 001 - SEPTEMBRE 2011 4 tient aux gouvernements concernés de déterminer leurs mécanismes de coopération pour combattre les extrémistes sur leurs territoires. Les Etats-Unis saluent les efforts visant à adopter une stratégie collective. Nous espérons que les nations de la région vont continuer à travailler ensemble pour renforcer la coopération régionale et consolider davantage l’action collective contre les groupes qui cherchent à occuper les territoires de ces pays pour lancer des attaques contre des civils innocents. bles. Ceci est un effort du gouvernement, et c’est pourquoi l’administration Obama a renforcé les moyens dont nous avons besoin. Nous sommes guidés par le besoin d’établir des partenariats avec des institutions et des pays à travers le monde. Nous avons multiplié nos efforts pour renforcer la capacité de nos partenaires à combattre El-Qaïda dans leur pays. Selon vous, existe-t-il une stratégie globale contre la menace terroriste et le crime transnational ? Les Etats-Unis comprennent le besoin d’un partenariat avec les institutions et les pays à travers le monde, pour faire face au terrorisme et au crime transnational. Nous usons de chaque opportunité, à l’image de la conférence d’Alger, pour aborder ces questions avec d’autres pays et travailler avec eux. La communauté internationale entière a tout à gagner en prévenant des attentats terroristes futurs. La conférence d’Alger des 7 et 8 septembre est considérée, par les experts, comme très importante. Comment les Etats-Unis perçoivent-ils cette rencontre ? Nous attendons avec impatience la conférence de septembre. Nous avons une grande délégation composée d’officiels militaires et civils américains. Nous voyons cette conférence comme un forum positif d’échange d’idées sur comment combattre le terrorisme dans la région, et les Etats-Unis accueillent positivement les efforts visant à combattre le terrorisme multilatéralement. Durant le mois de juillet dernier, Washington a dévoilé une nouvelle stratégie de lutte contre le terrorisme et la criminalité transnationale. Quels en sont les faits nouveaux ? L’objectif principal de la stratégie nationale de lutte antiterroriste est le réseau El-Qaïda, ses ramifications et ses réseaux. Ceci est la première stratégie de lutte antiterroriste qui se concentre sur l’habilité d’El-Qaïda et son réseau à endoctriner des gens et les inciter à nous attaquer. Ainsi, c’est la première stratégie de lutte contre le terrorisme qui désigne le pays comme premier palier sur lequel il faut insister dans nos efforts de lutte contre le terrorisme. C’est une guerre de grande envergure, une campagne sans relâche qui occupe chaque élément de pouvoir américain, et nous cherchons une destruction totale d’El-Qaïda. Pour atteindre cet objectif, nous aurons besoin de démanteler le cœur d’ElQaïda et d’empêcher son habilité à rétablir des réseaux sûrs. Au même moment, combattre El-Qaïda signifie également faire face à la grande menace que représentent ses filiales et ses adhérents opérants en dehors de cette région, notamment dans d’autres régions telles que le Maghreb. Nous utilisons tous les outils juridiques et légaux disponi- L’Algérie et les Etats-Unis ont condamné le paiement de rançons aux preneurs d’otages, notamment ces derniers temps dans la région du Sahel. Cependant, des pays qui sont confrontés à ce problème continuent à verser des sommes faramineuses qui permettent aux terroristes d’acquérir des armes et de soudoyer des jeunes désœuvrés. Y’a-t-il une réponse à ce problème ? Les Etats-Unis s’opposent au paiement de rançons et aux négociations avec les terroristes. Nous sommes fortement engagés à poursuivre davantage les discussions sur cette question au niveau international, y compris au niveau du comité 1267 des Nations unies. Nous croyons que cette question est d’une importance cruciale dans notre combat mutuel contre les terroristes et leur accès à l’argent, et nous allons continuer à fournir des efforts constructifs en vue de mettre fin à ces actions. Qu’est-ce qui a réellement changé après l’élimination de ben Laden ? Les Etats-Unis et leurs partenaires internationaux ont exercé une pression considérable sur El-Qaïda, et nous avons réussi à amoindrir une grande partie des capacités du groupe ; y compris sa capacité à collecter de l’argent et à recruter de nouveaux éléments. Après avoir éliminé le seul leader d’ElQaïda connu, Ous- «La conférence sama ben Laden, le d’Alger est un forum cœur du groupe est positif d’échange clairement plus faible, d’idées sur comment mais il garde la capa- combattre le cité de conduire des terrorisme dans la attaques régionales région.» et transnationales. En plus de cela, leurs branches régionales comme AQMI demeurent toujours menaçante, comme le montre l’attentat de Cherchell. Nous travaillons avec des partenaires régionaux, tels que l’Algérie, pour combattre cette menace. Les EtatsUnis et l’Algérie ont été et demeurent engagés à travailler ensemble pour faire face aux groupes qui cherchent à lancer des attaques contre des civils innocents. M. T. EL MOUDJAHID POLITIS-Final-07.qxp 17/09/11 17:31 Page 32 32 POLITIS - EL MOUDJAHID - N° 001 - SEPTEMBRE 2011 11 SEPTEMBRE... 10 ANS APRÈS M. DANIEL BENJAMIN, COORDONNATEUR DE LA LUTTE ANTITERRORISTE AU DÉPARTEMENT D’ETAT AMÉRICAIN «Notre coopération avec l’Algérie est plus forte que jamais» EN EXCLUSIVITÉ Le patron du contre-terrorisme au département d’Etat américain a eu l’amabilité de répondre à nos questions. Dans cette interview exclusive, il nous livre les détails de la nouvelle stratégie américaine de lutte contre le terrorisme, ainsi que la coopération avec l’Algérie. Pour Monsieur Sécurité, la conférence d’Alger organisée les 7 et le 8 septembre est une opportunité unique pour entreprendre une stratégie globale de lutte contre ce fléau. Propos recueillis par Mourad Termoul Dernièrement, les Etats-Unis ont dévoilé leur nouvelle stratégie de lutte contre le terrorisme. Peut-on connaître un peu plus sur cette stratégie, ainsi que les nouveautés qu’elle comporte ? Au lieu de définir notre politique de sécurité entière, cette stratégie fait partie de la stratégie du Président Obama, qui vise à faire avancer nos intérêts de sécurité nationale, notamment notre sécurité, prospérité, respect des valeurs universelles et coopération globale, pour répondre aux challenges mondiaux. Il y a de nombreuses composantes de cette stratégie contre le terrorisme qui méritent l’attention et dans certains cas la différencient de la précédente : - cette stratégie est intentionnellement davantage concentrée sur El-Qaïda que sur le terrorisme ou l’extrémisme en sa définition la plus générique. - Au même moment, nous avons clairement indiqué, dans la stratégie, que nous nous concentrons également sur les affiliés et adhérents d’El-Qaïda alors qu’ils continuent de planifier et de préparer des attaques terroristes. - Cette stratégie identifie consciemment les régions et endroits spécifiques prioritaires en termes de lutte antiterroriste, afin de préciser que nos efforts et ressources dans la lutte antiterroriste doivent être dirigés et concentrés, en premier lieu, sur les éléments du réseau d’AEl-Qaïda qui menace directement les Etats-Unis et ses intérêts. - Cette stratégie souligne également le besoin de faire face à l’idéologie meurtrière d’El-Qaïda et sa résonance en identifiant et répondant à des conditions et facteurs spécifiques et localisés qu’El-Qaïda exploite comme moyen de recrutement, radicalisation et mobilisation de la violence. Cette stratégie identifie explicitement la patrie comme endroit prioritaire, davantage que les stratégies précédentes. Pas uniquement, pour bâtir nos défenses et développer l’architecture et les capacités de notre sécurité intérieure, mais également en faisant face au challenge que représentent des éléments d’El-Qaïda radicalisés et opérant sur le plan domestique. - Enfin, cette stratégie affirme notre engagement à respecter EL MOUDJAHID POLITIS-Final-07.qxp 17/09/11 17:31 Page 33 33 POLITIS - EL MOUDJAHID - N° 001 - SEPTEMBRE 2011 4 et à soutenir les valeurs qui définissent notre nation et notre peuple, y compris le respect des droits de l’homme et la loi. Le 7 et le 8 septembre s’est tenue à Alger une conférence internationale sur le terrorisme, la criminalité transnationale et le développement. Cette réunion intervient dans un contexte marqué par une recrudescence des actes terroristes à travers le monde. L’Algérie qui n’a de cesse appelé à une meilleure coopération internationale tente, à travers cette rencontre, d’unifier les positions pour assoir une stratégie commune et plus efficace. En tant que patron du contreterrorisme au département d’Etat, votre appréciation sur cette réunion ? La conférence de la semaine dernière est une opportunité unique et qui intervient au bon moment pour les Etats de la région avec d’autres pays et organisations partenaires pour discuter les aspects clés de la lutte contre la menace terroriste et travailler à mettre au point de nouvelles stratégies pour y faire face. Nous saluons l’Algérie pour l’organisation de cette conférence. Alors que la délégation des Etats-Unis a eu l’opportunité de discuter certains de ses points de vue à cet égard, nos officiels ont eu le privilège d’apprendre des expériences de nos partenaires, en particulier nord- africains. Notre délégation était composée de plusieurs agences des départements d’Etat et de la Défense, ainsi que de l’Agence américaine du développement, conduite par mon adjoint. Nous avons eu la chance de partager nos idées sur la menace terroriste dans la région et les remèdes possibles pour aider à y faire face. Nous espérons être en mesure d’apprendre des expériences et idées des participants afin qu’on puisse créer ou adapter collectivement les stratégies de contre-terrorisme qui pourront aider les nations de la région à faire face à la menace. Comment évaluez-vous la coopération dans la lutte contre le terrorisme avec l’Algérie, et quelles sont les perspectives envisagées entre les deux pays ? L’Algérie est un leader décisif dans les efforts de lutte antiterroriste. Notre coopération bilatérale avec le gouvernement algérien dans le domaine de la lutte antiterroriste est plus forte que jamais. Notre coopération avec l’Algérie comporte l’application des lois, la diplomatie publique, l’économie et les questions militaires. Nous coopérons plus étroitement que jamais sur un forum multilatéral. Lorsque je regarde vers l’avenir, je suis très optimiste concernant notre travail commun et le progrès que nous pouvons réaliser. Washington et Alger ont adopté la même position concernant le non-paiement de rançons aux preneurs d’otages, notamment dans la région du Sahel. Comment comptezvous convaincre les pays concernés par ce problème de s’aligner sur vos thèses ? Les Etats-Unis partageant les sérieuses préoccupations concernant les kidnappings terroristes pour des rançons, abhorrent ce genre d’actions, condamnent sans équivoque l’impunité des preneurs d’otages et soutiennent fermement les efforts visant à mettre fin aux pratiques de paiement des rançons du moment que ces paiements soutiennent di- rectement les terroristes comme l’indique la résolution du Conseil de sécurité des Nations unies 1904. Nous sommes engagés avec force à poursuivre d’avantage de discussions sur cette question sur le plan international, y compris au niveau des Nations unies ou le Comité 1267 de cette instance. Nous estimons que cette question est d’une importance critique dans notre combat contre les terroristes et leur accès aux sources de financement, et nous continuerons à nous engager dans des efforts constructifs pour mettre fin à ces actions. Le paiement de rançons renforce le cycle des preneurs d’otages, finance le terrorisme et encourage et renforce les groupes terroristes. Pour cette raison, les Etats-Unis ne font aucune concession aux terroristes et cherchent à leur refuser tout bénéfice découlant de toute concession, en employant des mesures financières et traduisant ces preneurs d’otages en justice. Lorsque la politique de non concession est clairement établie et respectée, les citoyens sont moins ciblés. Durant un kidnapping, nous travaillons à ramener les otages sains et saufs tout en évitant les concessions en utilisant les pratiques de gestion de crise. Nous promouvons souvent les pratiques de gestion de crise avec d’autres pays et des organisations privées, et, dans certains cas, nous apportons assistance. M. T. «La stratégie américaine de lutte contre le terrorisme est intentionnellement davantage concentrée sur El-Qaïda que sur le terrorisme ou l’extrémisme en sa définition la plus générique.» EL MOUDJAHID POLITIS-Final-07.qxp 17/09/11 17:31 Page 34 34 POLITIS - EL MOUDJAHID - N° 001 DU SEPTEMBRE 2011 11 SEPTEMBRE... 10 ANS APRÈS MICHAEL WALMA, DIRECTEUR DE LA DIRECTION DU CRIME INTERNATIONAL ET DU TERRORISME AU MINISTÈRE CANADIEN DES AE ET DU COMMERCE INTERNATIONAL «Les réalisations de l’Algérie en matière de lutte contre le terrorisme sont remarquables» Propos recueillis par Mourad Termoul TÉ I V I S U L C X E N E Michael Walma est directeur de la Direction du crime international et du terrorisme au ministère canadien des AE et du Commerce international depuis 2009. Il a rejoint le service étranger en 1992 et servi à New York, en Afrique du Sud et en Roumanie. Pour Politis, il nous livre ici ses impressions sur la stratégie globale de lutte contre le terrorisme et la criminalité transnationaux, ainsi que sur la coopération avec l’Algérie dont il salue le rôle pivot dans ce domaine. La contribution du Canada à la lutte contre le terrorisme n’est plus à démontrer. Toutefois, en raison de l’apparition de nouvelles menaces, les États doivent mieux coordonner leur action. Selon vous, pourquoi n’existe-t-il pas encore de stratégie internationale commune face à ce fléau ? Il existe des stratégies internationales sur les enjeux de la lutte contre le terrorisme. Cela comprend la stratégie antiterroriste mondiale des Nations unies de 2006. À la fin de septembre 2011, pour renforcer la coordination et la mobilisation des ressources financières et de l’expertise, il est prévu de lancer Il est prévu de lancer le Forum mondial de lutte le Forum mondial de contre le terrorisme. Cette lutte contre le nouvelle initiative internatioterrorisme. Cette nale, avec une participation nouvelle initiative inclusive, donnera lieu à la internationale, avec création d’un groupe de traune participation vail sur le renforcement des inclusive, donnera capacités de lutte antiterroriste au Sahel. Celui-ci sera lieu à la création coprésidé par deux de ses d’un groupe de membres : l'Algérie et le Catravail sur le nada. Notre pays se réjouit de renforcement des l’occasion qui lui est donnée capacités de lutte de collaborer avec l'Algérie antiterroriste au dans le cadre de la coprésiSahel. Celui-ci sera dence, et de trouver des poscoprésidé par deux sibilités de coopération et des de ses membres : solutions régionales pour rel'Algérie et le médier aux lacunes régioCanada. nales en matière de renforcement des capacités. On ne peut parler de lutte contre le terrorisme et de criminalité transnationale sans tenir compte du développement dans certaines régions, notamment au Sahel, qui sont dépourvues de ressources. Comment est-il possible d’œuvrer à ce développement en pleine crise financière mondiale ? La sécurité et le développement sont des éléments complémentaires d'une même problématique. D'une part, le développement est impossible sans un degré minimum de sécurité. «Le gouvernement du Canada ne paie pas de rançons.» D'autre part, l'établissement d'un environnement sécuritaire ne peut s’inscrire dans la durée que s’il s'accompagne d'efforts de développement. La responsabilité d'assurer la sécurité et le développement incombe avant tout aux États et à leurs collectivités nationales. Les partenaires techniques et financiers ne font qu’apporter leur soutien aux efforts des gouvernements et de la société civile locale. Le Canada estime que pour un développement durable, il faut accroître la capacité des gouvernements, des institutions et des collectivités locales à prendre en main leur propre développement. C’est dans cette optique que, EL MOUDJAHID POLITIS-Final-07.qxp 17/09/11 17:32 Page 35 35 POLITIS - EL MOUDJAHID - N° 001 - SEPTEMBRE 2011 4 au Sahel, le Canada met à exécution des programmes à l’appui du développement social et économique et visant à renforcer les capacités antiterroristes. L’appui du Canada dans les régions touchées par l’insécurité contribue à en réduire les causes et augmente la capacité des États partenaires à gérer les crises, de même qu’à fournir des services de base à leurs citoyens. La réunion d’Alger a porté justement sur cette question, ainsi que sur la vision commune de la lutte contre le terrorisme et la criminalité transnationaux. Peut-on dire ce que cette rencontre marque un tournant dans la stratégie de coopération entre les États ? Le Canada félicite l’Algérie et ses partenaires d’avoir organisé la Conférence sur le Partenariat. Cette initiative régionale a permis de discuter des menaces et des solutions à apporter avec les pays du Sahel les plus menacés par le terrorisme, notamment par les activités d’Al Qaeda au Maghreb islamique (AQMI). L’analyse des solutions face au terrorisme et à la criminalité, ainsi qu’à l’appui du développement, comme les décisions qui s’y rattachent, doit s’inscrire dans une optique régionale. La Conférence sur le Partenariat a été bénéfique pour les pays du Sahel. Elle permettra en outre, grâce à une expérience de première main, à d’autres pays partenaires et à des organisations internationales, d’examiner comment il est possible de mieux coordonner nos efforts de coopération. Comment évaluez-vous le partenariat avec l’Algérie dans le domaine de la lutte antiterroriste et quelles en sont les orientations ? Le Canada et l’Algérie entretiennent d’excellentes relations, dont ce sera le 50e anniversaire l’année prochaine. Le Canada reconnaît le rôle important et stratégique que l'Algérie joue dans la lutte contre le terrorisme dans la région du Sahel. Pendant de nombreuses années, ce pays a été confronté à la menace terroriste. Les efforts du gouvernement algérien pour prévenir, réprimer et combattre le terrorisme ont beaucoup progressé. Ses réalisations ont été remarquables. Les terroristes constituent cependant toujours une menace pour la sécurité et le bien-être de l'Algérie et du Sahel. Pour La Conférence cette raison, les pays doisur le vent continuer à redouPartenariat a été bler leurs efforts pour bénéfique pour mettre fin aux actes terroristes. À cette fin, le Cales pays du nada continuera à Sahel. Elle renforcer son partenariat permettra en avec l'Algérie, y compris outre, grâce à par le partage des une expérience connaissances, des lede première çons et de l'expertise, afin main, à d’autres d’accroître l'efficacité de pays partenaires notre lutte contre le terroet à des risme. organisations internationales Les rançons sont ded’examiner venues une source comment il est de financement pour les activités terropossible de ristes. Des pays mieux confrontés à ce procoordonner nos blème n’hésitent pas efforts de à débloquer des coopération. sommes considérables pour faire libérer leurs ressortissants, malgré la résolution des Nations unies. Que pensez-vous de cette pratique (paiement des rançons) et comment peut-on y mettre fin ? La prise d'otages par des terroristes est déplorable et contraire aux notions fondamentales de liberté. Le Canada soutient les efforts régionaux et internationaux pour mettre fin à cette pratique méprisable, en particulier par une meilleure coopération visant à prévenir ces actes, à enquêter sur ceux-ci, à arrêter les responsables et à les traduire en justice. Le Premier ministre du Canada, Stephen Harper, a clairement énoncé la position du Canada concernant le versement de rançons : le gouvernement du Canada ne paie pas de rançons. Pour mettre fin à cette pratique, il est important de comprendre qu’elle a pour effet d’enhardir et d’encourager les terroristes. M. T. AU LENDEMAIN DES ATTENTATS MEURTRIERS QUI ONT CIBLÉ LA NORVÈGE FAISANT 93 MORTS Londres décide de renforcer le contrôle des groupes d'extrême droite LE CONSEIL de sécurité britannique a décidé lundi 25 juillet, à Londres, de renforcer le contrôle des groupes d’extrême droite, au lendemain des attentats meurtriers qui ont ciblé la Norvège faisant 93 morts. Le conseil réuni par le Premier Ministre David Cameron a appelé les services de sécurité à se montrer plus vigilants et à «prendre au sérieux» la menace posée par les groupes d'extrême droite en Grande-Bretagne, sur la base des premiers éléments de l’enquête menée à Oslo, selon lesquels l’auteur des attentats, Andres Breivik, aurait eu des liens au Royaume-Uni avec des militants de l’extrême droite. Dans son manifeste de 1.500 pages, l’auteur fait part des ses contacts à Londres avec les extrémistes de droite soulignant avoir été «recruté» par deux extrémistes anglais lors d'une rencontre à Londres en 2002. Les services britanniques de lutte antiterroriste ont jusque-là concentré leurs efforts sur El-Qaïda, reléguant au second plan la menace de l’extrême droite britannique. Un porte-parole du 10, Downing Street a indiqué que le gouvernement prendrait acte de ce qui s'est passé en Norvège et tirait les enseignements nécessaires. «Il ne s'agira pas pour la GrandeBretagne de changer, pour autant, sa stratégie sécuritaire», a-t-il souligné. EL MOUDJAHID POLITIS-Final-07.qxp 17/09/11 17:32 Page 36 36 POLITIS - EL MOUDJAHID - N° 001 - SEPTEMBRE 2011 11 SEPTEMBRE... 10 ANS APRÈS SENS ET ESSENCE DU 11 SEPTEMBRE 2001 L’impact sur l’Amérique et sur les relations internationales Par Abdecelem Ikhlef (*) Avant d’aborder le sujet, faut-il revoir des images, décortiquer des vidéos, lire des livres et scruter des documents ? Beaucoup de vérités et de contre-vérités. Le terrorisme est une invention cauchemardesque qui ressemble un peu à cet ogre électronique qui se retourne contre son inventeur. Webster Griffin Tarpley, The Conspiratologist, a écrit un livre important intitulé 9/11 la Terreur fabriquée made in USA, qui, d’un angle complètement différent et radical, délivre les vérités qui blessent et raconte les rapports entre CIA, islamisme et intérêts américains. Pour comprendre le 11 septembre et connaître les commanditaires et le personnel qui auraient pu produire cet événement, dit-il, il faudrait s’imprégner de l’historique des actes terroristes sponsorisés par l’OTAN et la CIA, et non pas partir chercher dans les cavernes de la région du Hindu Kush. EL MOUDJAHID POLITIS-Final-07.qxp 17/09/11 17:32 Page 37 37 POLITIS - EL MOUDJAHID - N° 001 - SEPTEMBRE 2011 4 Les Etats-Unis comprennent, enfin, les effets devastateurs du terrorisme sur leur sol. Washington appelle le Conseil de sécurité à se pencher sur le versement de rançons à AQMI e coordonnateur américain de la lutte contre le terrorisme au département d'Etat, M. Daniel Benjamin, a appelé le Conseil de sécurité de l'ONU à examiner de près la question de versement de rançons à l'organisation Al Qaeda au Maghreb Islamique (AQMI). Intervenant devant le comité contre le terrorisme du Conseil de sécurité de l'ONU pour expliquer la stratégie américaine pour le contre-terrorisme du président Barak Obama, M. Benjamin a déclaré qu'«aucun groupe terroriste n'est aussi notoirement connu qu'AQMI en matière d'enlèvements contre rançons qui sont devenus l'une des sources principales des revenus pour les groupes liés à Al Qaeda». Dans ce sens, le patron du contre-terrorisme au département d'Etat a souligné que les Etats-Unis «encouragent vivement le comité contre le terrorisme du Conseil de sécurité à se concentrer davantage sur cet aspect de la menace terroriste, qui s'étend au-delà d'AQMI». Par ailleurs, M. Benjamin a considéré que «l'importance de situer les efforts américains contre le terrorisme dans un large cadre des politiques étrangère et sécuritaire est soulignée par les transformations qui se déroulent au Moyen-Orient et en Afrique du Nord, dont le plein impact, y compris pour nos efforts contre le terrorisme, est en train de prendre forme». Estimant que ces bouleversements politiques à travers les pays de la région MENA sont prometteurs en matière de démocratie, M. Benjamin a prévenu, toutefois, que «certains dangers ne peuvent être ignorés». En effet, a-t-il expliqué devant le comité onusien de contre-terrorisme, «ces agitations politiques ont distrait les services de sécurité dans un certain nombre de pays». L EL MOUDJAHID POLITIS-Final-07.qxp 17/09/11 17:32 Page 38 38 11 SEPTEMBRE... n se souviendra, pour une raison ou pour une autre, de ce jour du 11 septembre 2001. On a regardé ces images des centaines de fois : l’avion qui percute de plein gaz le «building» qui s’est fait interlocuteur du ciel. Le feu, les flammes, les pompiers, héros de la nation en ce jour, les policiers qui courent dans tous les sens, la fumée comme une folle, la poussière qui monte et enfin des gens anonymes, des sons, des cris…En somme, la panique totale. Le chaos. On se souviendra de ces images qui nous parvenaient en direct, grâce aux prouesses technologiques de cette nation. CNN donnait un titre grandiose : «America under attack». On se souviendra longtemps de ces questions phares qui alimentaient toutes les discussions informelles, les débats politiques et les plateaux de télévision. Qui est derrière ces attentats ? On n’oubliera jamais les réponses toutes faites offertes sur un plateau d’argent : les terroristes, El-Qaïda, le fondamentalisme. L’islam, une cible facile à désigner, car diabolisé depuis belle lurette, instrumentalisé dans différents conflits et figurant dans les théories de conspiration dominantes aux Etats-Unis à l’époque, notamment celle du «conflit des civilisations», de Samuel Huntington, l’homme qui travaillait pour le Pentagone et considérait l’islam comme le grand danger, sinon le plus grand, qui guettait la civilisation occidentale. L’islam en tant que religion, que civilisation et que force physique, la seule d’ailleurs à avoir menacé le «nid» de la civilisation occidentale et encerclé Vienne pendant plusieurs mois. La seule chose qui me trouble peut-être en parlant de cet événement, c’est le nombre de victimes du cataclysme. Des gens anonymes, partis pour travailler, faire des courses ou accompagner des enfants. Ils sont partis pour la dernière fois, victimes d’un acte barbare, honni et condamnable sur toute la ligne. Mais qui l’a fait ? Quelles sont ses conséquences sur la société américaine ? Quel est son impact direct sur les relations internationales ? Y a-t-il un monde post-11/09 ? Le monde a-t-il vraiment changé ? Impact sur la société américaine Il y a dans la société américaine un vieil adage qui dit «ce qui est bien pour General Motors est bien pour le reste du monde». Une vision puritaine qui présente la chose dans toute sa simplicité. La logique des puissances depuis toujours. D’habitude, ce sont les autres seulement qui changent pour s’aligner sur les choix des superpuissances, mais, cette fois-ci, c’est la société américaine qui a subi le changement ; un changement pas superficiel du tout. Wendell Bell, de l’université de Yale, a tenté en 2003 d’énumérer l’impact du 11/09 sur la société américaine, ses institutions et son fonctionnement au quotidien, et ce à travers l’analyse approfondie des mécanismes, des modes de fonctionnement et des reflexes installés depuis longtemps dans cette société. Il résume ces effets en douze points : 1- Il y a moins de tolérance entre les Américains lorsqu’il est question de la politique étrangère. Critiquer les actions du gouvernement devient un acte «anti-américain». Une étudiante de Yale qui a montré son hostilité aux préparations américaines de la guerre contre l’Iraq a vu son appartement investi par un groupe d’étudiants qui, après avoir fracassé la porte, lui ont laissé sur le tableau d’affichage une phrase : «A mort les musulmans et les Irakiens». 2- La création par le gouvernement américain d’une «société de surveillance totale», que certains n’hésitent pas à qualifier de «régime policier». Toutes les lois issues dans le cadre sécuritaire menacent les libertés civiles et sont critiquées même par les conservateurs les plus connus, tels que William Safire et Dick Armey. Beaucoup d’individus ont été poursuivis en justice pour avoir été «suspectés» dans le cadre de la lutte antiterroriste. Suspectés seulement. Ceux qui veulent brader la liberté pour la sécurité n’auront ni l’une ni l’autre, disait B. Franklin. 3- Les alertes policières et la préparation pour la guerre ont créé une certaine distraction quant aux problèmes réels de la société américaine, un combat pour un environnement sain afin de garantir la survie et le bien-être des générations futures, la sécurité sociale et médicale, les réformes éducatives, la protection contre O POLITIS - EL MOUDJAHID - N° 001 - SEPTEMBRE 2011 10 ANS APRÈS EL MOUDJAHID POLITIS-Final-07.qxp 17/09/11 17:32 Page 39 39 POLITIS - EL MOUDJAHID - N° 001 - SEPTEMBRE 2011 4 le crime. Beaucoup d’Américains pensent que le danger se situe à l’intérieur de ces sujets plutôt police La l’extérieur. qu’à routière donne le chiffre de 38.000 morts dans les accidents de la route en l’an 2000. Une question de priorités, dites-vous ! 4- L’attaque a rendu les Américains conscients de l’incompétence et des erreurs dans la routine du travail des institutions américaines. Il est devenu évident pour la majorité des citoyens que le FBI n’est pas garant de leur sécurité. De faux permis de conduire circulent partout sans être détectés. Les tests de sécurité dans les stations nucléaires montrent d’une manière flagrante les lacunes qui minent la routine du contrôle. La sécurité des aéroports a été longtemps critiquée par le département des Transports avant le détournement des avions du 11 septembre. Afin de tester le dispositif sécuritaire, des agents ont pu facilement introduire de fausses bombes et autres engins explosifs dans les aéroports et les avions. Les fonds alloués aux guerres méritent d’être guidés pour éradiquer ces lacunes. 5- Les Etats-Unis d’Amérique se comportent en «Etat voyou». Les citoyens américains, victimes du matraquage médiatique, commencent à sentir le besoin d’aller punir «les terroristes» là où ils se trouvent. Certains ont perçu cette attitude comme une autorisation pour tuer loin de toute considération du droit international. Le président Bush a donné des ordres pour assassiner «des chefs terroristes». Au lieu de canaliser son énergie afin de s’attaquer aux «terroristes», l’ennemi invisible qui a perpétré les attentats du 11 septembre, l’administration s’est dirigée vers l’Afghanistan, une cible facile et accessible. Les listes des morts grandissaient de jour en jour. La guerre contre l’Irak n’avait aucun rapport avec le 11 septembre, car aucun des «terroristes du ciel» n’était irakien. Il était clair qu’avec la nouvelle stratégie de la sécurité nationale de septembre 2002, l’opinion internationale ne devait plus avoir de poids devant l’unilatéralisme américain. L’Amérique est devenue au-dessus de la loi. 6- Le citoyen américain a été longtemps bombardé par le discours autour du «mal». C’est le président Bush lui-même qui voulait «débarrasser le monde de ces faiseurs de mal». Voir le monde dans cette optique du «bien et du mal» est très réductrice, simple et fade. C’est plu- tôt un exercice linguistique qu’autre chose puisque incapable de résoudre quoi que ce soit. «L’enfer c’est les autres», disait Sartre, et les « autres» qui font du «mal» aux «autres» méritent le châtiment. Simple et efficace ? Simple mais pas efficace du tout. Les Américains ont laissé tomber le statut de «victime» pour prendre la place des criminels. C’est un choix. 7- Il est clair que le groupe qui mène les Etats-Unis vers le XXIe siècle veut substituer l’endiguement du communisme pour la mission de la domination du monde. Il croit que les institutions internationales sont inefficaces et veulent les remplacer par un impérialisme américain. Cet état de choses ne peut que mener vers une anarchie incontrôlable. Le futur nous le dira. 8- Les agressions israéliennes contre les Palestiniens deviennent de plus en plus flagrantes et les Etats-Unis ne peuvent les condamner faute d’une absence de séparation entre agression et défense de sa terre, entre bourreaux et victimes. Toute présence des Américains sur une terre d’islam devient suspecte et source de conflit. Aucune solution ne peut être envisagée sans un changement radical dans la position biaisée des EtatsUnis. 9- Le rôle des fondamentalistes chrétiens américains en tant que soutient à la violence au MoyenOrient. Ils représentent une vraie pierre d’achoppement aux négociations de paix dans la région. Ils croient tout simplement que la fin du monde est toute proche, faut-il que chacun y mette la main pour accélérer le processus. Jésus Christ sera de retour pour punir les mécréants et régner sur le monde. Le 11/09 leur a donné l’impression que les choses s’accéléraient. Pour ces gens, l’ONU est un instrument de Satan qui vise la destruction de la souveraineté des Etats-Unis. 10- L'avidité du monde américain de l'entreprise est devenue de plus en plus apparente. Les fonds du Trésor public sont transmis vers des comptes privés, surtout avec l’avènement de «la reconstruction» de l’Irak. Avant la déclaration officielle de la guerre, la firme Haliburton Co. avait déjà décroché un contrat pour la réparation des systèmes de contrôle des feux, ainsi que les dégâts qui pourraient endommager les champs de pétrole. En 2003, Bechtel Co a eu une part de 680 millions de dollars. Les documents qui concernent ces contrats sont classés sous le sceau de la sécurité nationale. Aucune soumission, car ces contrats sont donnés aux anciens fonctionnaires, civils et militaires, de l’administration qui travaillent maintenant pour les corporations du complexe militaro-industriel. 11- Les Américains deviennent de plus en plus conscients du coût de l’action unilatérale. Les spécialistes estiment les dépenses américaines en Irak entre 127 et 682 milliard de dollars. Le coût à la fin de la guerre s’élèvera à 2 trillions de dollars après l’addition de l’effort de la guerre, de la reconstruction et des effets sur l’économie américaine. Il est évident que les chiffres ne parlent jamais des souffrances et des pertes humaines. 12- La croissance des crimes de haine aux Etats-Unis à l’encontre des immigrés, notamment musulmans, ainsi que leurs commerces et lieux de culte. Tous les rapports du FBI le montrent clairement. En 2001, ces crimes ont grimpé en pourcentage de 1.600%, c’est-àdire de 28 actes criminels en 2000 à 481 en 2001. Tous les rapports auparaIl y a dans la société américaine un vieil vant désignaient la adage qui dit «ce qui est bien pour General communauté musulMotors est bien pour le reste du monde». Une mane comme la vision puritaine qui présente la chose dans moins ciblée par ce toute sa simplicité. La logique des puistype d’actes. sances depuis toujours. Il est clair que ces remarques montrent d’une manière subtile les effets néfastes sur la société américaine, effets dont seuls les citoyens sur place peuvent sentir le poids. Ils sont d’accord sur l’élimination des terroristes, mais pas sur la destruction de l’âme de cette société, ses valeurs et ses droits civils. Cela dit, beaucoup d’autres effets se feront sentir sur la scène internationale et qui vont sûrement durer. Impact du 11/09 sur les relations internationales Le fait de considérer le 11 septembre comme un acte de guerre contre les Etats-Unis justifie toutes les études sur le terrorisme proliférant dans les sciences sociales. La majorité des commentateurs et académiciens des relations internationales insistent sur deux points essentiels concernant l’impact du 11 septembre. Un, dire que l’Etat est l’unité de base dans l’analyse et l’acteur principal des relations internationales devient obsolète vu le succès d’ElQaïda en tant qu’organisation non gouvernementale qui possède des ramifications dans 60 pays du monde. Le 11/09 ne peut même EL MOUDJAHID POLITIS-Final-07.qxp 17/09/11 17:32 Page 40 40 11 SEPTEMBRE... POLITIS - EL MOUDJAHID - N° 001 - SEPTEMBRE 2011 10 ANS APRÈS pas venir dans le rêve d’un souverain quelconque possédant une armée régulière et des milliers de soldats armés dans la norme. Deux, la communauté internationale va plus ou moins être solidaire vis-à-vis du terrorisme en tant que phénomène mondial. Cela se voit déjà dans la coalition qui s’est organisée juste après l’évènement tragique du 11 septembre. Pour parler un peu sémiotique et resituer les chiffres dans leur contexte historique, il faut dire que l’Amérique est une grande nation et une force de frappe géante qui veut (mais le pourrat-elle ?) accaparer l’histoire du XXe siècle comme acteur majeur dans le façonnage des grands repères des relations internationales. Je me souviens de ce petit personnage dans une rue anonyme de Santiago, capitale du Chili, à qui on vient de demander un point de vue sur le 11 septembre, et lui de répondre tout bonnement : «C’est le jour anniversaire de la mort de Salvador Allende assassiné par les Américains.» Je me suis dit à ce moment-là qu’apparemment, chaque peuple a son 11 septembre. Terroristes ou Etats L’évidence, c’est que les groupes terroristes ne peuvent fonctionner que grâce à des bases-arrières, un support financier important et des sanctuaires dans lesquels ils peuvent se mouvoir en toute quiétude. Ce qu’a reçu El-Qaïda par exemple chez les talibans. 39.000 écoles existent au Pakistan, financées par l’Arabie saoudite sous l’égide de la CIA. Ces écoles enseignent le djihad et «l’istish’had», le martyre. L’histoire, appuyée par les documents, dira pour toujours que les talibans sont la création par excellence des Etats-Unis, de l’Arabie saoudite et du Pakistan, création devenue incontrôlable par la suite en se transformant en une très riche organisation. Elle pouvait opérer dans une douzaine de pays qui ne lui procuraient pas forcément de l’aide, car elle possédait les fonds nécessaires de son succès. Les documents montrent que les talibans utilisaient El-Qaïda comme une armée classique plus qu’autre chose. Etat à abattre Dire que l’organisation terroriste était sous la coupe du gouvernement afghan, c’est accepter l’idée du rattachement des groupes terroristes aux Etats. C’est aussi une justification aux mains des Américains pour pouvoir s’attaquer à n’importe quel pays soupTous les rapports du FBI monçonné d’abriter ou de financer ce genre trent clairement la croissance de groupuscules nuisibles. Aller en Afdes crimes de haine aux ghanistan pour faire la guerre confirme Etats-Unis à l’encontre des cette idée. D’ailleurs, c’est mieux que immigrés, notamment musuld’aller chercher un ennemi invisible. mans, ainsi que leurs comDans un discours devant le Congrès, merces et lieux de culte. En Bush a déclaré, après l’attaque du 11 2001, ces crimes ont grimpé septembre, à l’encontre des présidents en pourcentage de 1.600%, et rois des pays du monde : «Soit vous c’est-à-dire de 28 actes crimiêtes avec nous, soit vous êtes avec les nels en 2000 à 481 en 2001. terroristes.» Une vision de la guerre froide quand le monde était divisé en deux camps, en noir et blanc, schéma simpliste du Bien et du Mal. Le monde a beaucoup changé depuis, pas à cause du 11 septembre, mais grâce à la fin de la guerre froide et du système bipolaire. Les interactions et les échanges des richesses entre Etats ne vont pas être trop altérés, et Kenneth Waltz, l’un des plus grands théoriciens de la politique internationale, nous dira que la mondialisation, un concept devenu à la mode il y a peu de temps, n’est qu’illusion, car en termes d’échanges commerciaux, le monde des années 1990 ressemble à celui des années 1910. N’est-il pas temps d’écouter un peu les scientifiques qui peuvent illuminer notre chemin ? Ce même Waltz a manifesté son opposition de la guerre contre l’Irak pour des raisons théoriquement fondues. Il faut aller du côté de la théorie réaliste pour comprendre son point de vue. Une décennie déjà après le 11 septembre, les Etats-Unis pour- suivent leur chemin de nation dominante qui fait du business comme toujours. Terrorisme et États défaillants Au lieu d’être des organisations non gouvernementales, les groupuscules terroristes deviennent des organisations quasi gouvernementales. Elles vont poser un réel problème à la sécurité régionale, et notamment dans les zones sensibles déclarées «défaillantes» où elles trouveront refuge et support pour sévir plus longtemps. La Somalie n’est pas le seul exemple où les choses ont failli dégénérer, à cause des «requins», terroristes marins montés sur des embarcations et qui font ravage au sein du personnel et du matériel des firmes de transport de la marine marchande. Les rançons demandées sont faramineuses, et les Etats font tout sinon rien pour contrer ce type de racket, ce qui va compliquer le phénomène et lui donner la chance de s’offrir les meilleurs moyens de nuisance et de devenir global. Les intérêts des Etats, individuellement conçus, déterminent la nature des relations internationales et continueront à le faire pour longtemps, ce qui empêchera le travail collectif de «la communauté internationale» contre les terroristes. Comme cette communauté n’existe que par rapport aux intérêts des puissances mondiales, les rapports entre Etats demeureront tels quels, du moins dans le moyen terme. Coalition et anti-coalition Il est clair dès le départ que les Etats qui composent la coalition antiterroriste ont des intérêts différents, ce qui complique leur tâche. Au nom de cette guerre sacrosainte contre le terrorisme, l’administration Bush a créé un amalgame suffisant pour casser la coalition. Le choix d’un nombre de pays à mettre dans la fameuse liste de «l’axe du mal» a bien montré les intentions de Washington et les intérêts typiques d’une hyperpuissance. Le dossier iranien est un exemple de l’unilatéralisme américain qui risque d’ébranler non seulement les coalitions antiterroristes, mais aussi toutes les coalitions pour la paix internationale. L’échec européen et russe de jouer le contrepoids en dit long sur le monde à construire au milieu de ces idéologies guerrières, belliqueuses et conservatrices. L’unilatéralisme sera la caractéristique dominante du système international et la majorité des Etats répondront à l’appel américain de vouloir prouver leur allégeance. EL MOUDJAHID POLITIS-Final-07.qxp 17/09/11 17:32 Page 41 POLITIS - EL MOUDJAHID - N° 001 - SEPTEMBRE 2011 41 4 Mondialisation après le 11/09 Malgré les divergences autour de sa définition, la mondialisation est un phénomène qui englobe des processus affectant et transformant les activités et les interactions des Etats. Temporaire ou permanente, elle est là. Certains analystes la considèrent comme une simple accélération du processus d’internationalisation du capitalisme et ne voient en elle aucun changement radical. D’autres, par ailleurs, le sociologue A. Giddens, entre autres, la perçoivent comme un phénomène nouveau et révolutionnaire qui possède un fonctionnement contradictoire. Après le 11 septembre, les EtatsUnis ont compris que la mondialisation qui mène vers la création du «petit village» peut servir comme cheval de Troie. Leur dominance dans le domaine de l’information et de la communication à l’échelle mondiale les aide à exporter les produits de leur culture populaire, films, musique, revues (Readears’ Digest est publiée en 19 langues dans 48 éditions internationales), livres et autres logiciels d’ordinateurs, ce qui fait voyager aussi leurs valeurs et visions de la politique, de la richesse, de la violence, etc. Le fait de dresser une liste des maux à traiter par tous les pays appartient à cette réflexion. Tout le monde parle, par exemple, de pollution sans savoir que les USA n’ont ratifié aucun des traités et conventions traitant le sujet. C’est comme si à eux l’argent, aux autres le débat ; ces derniers qui doivent financer et apporter «des solutions» aux soi-disant «problèmes communs». La guerre contre le terrorisme n’a fait, en fin de compte, qu’accélérer les processus d’intégration au niveau international des économies locales de beaucoup de pays qui se trouvent «piégés» par leur propre politique de coalition et d’assimilation dans l’économie et la culture de consommation, que les firmes américaines prônent au détriment des classes de faibles revenus et des populations démunies. Le développement des services (représentant 30% des exportations américaines) se retrouvera à la tête du commerce mondial, ce même commerce qui verra à sa tête les Etats-Unis comme leader des changements. Ils sont latents pour le moment, mais seront bientôt tangibles à tout le monde, y compris les supporters de la mondialisation. Les 100 plus grandes multinationales se trouvent dans le triangle Etats-Unis, Europe et Japon. Elles détiennent à elles seules 50% du commerce mondial en produits manufacturés et 80% des terres agricoles, dont les produits sont destinés au marché international. Selon les spécialistes américains, ouvrir ses frontières aux firmes est un geste qui confirme le respect des lois du libre marché de la part d’un Etat qui avance vers la démocratie. La gouvernance : outil de la mondialisation ? Le plus grand danger (peut-être après le terrorisme) est cette convergence des forces idéologiques, économiques et technologiques qui gouvernent la mondialisation et qui jouent un rôle prépondérant dans les processus de transfert des outils de la gouvernance internationale des mains des Etats à ceux des institutions multilatérales et un nombre limité de firmes multinationales et d’institutions financières qui détiennent déjà un mode d’influence politique et économique subtil et notoire. Les Etats puissants peuvent résis- ter et même détourner ces processus au profit de leurs populations et leur bien-être, alors que beaucoup de pays pauvres et autres modèles fragiles, pour une raison ou pour une autre (conflits ethniques et religieux), vont se fragLes groupes terroristes ne peuvent menter et se trouver fonctionner que grâce à des bases arrières, incapables de gérer un support financier important et des «la chose» politique. sanctuaires dans lesquels ils peuvent se Ils perdront le qualifimouvoir en toute quiétude. catif d’acteur politique viable et avec qui ils perdront aussi leur raison d’être. Certains sont déjà qualifiés d’Etats défaillants et d’autres d’effondrés. La sécurité nationale des EtatsUnis ne permettra pas, c’est toujours le point de vue américain, de laisser sévir ce type d’Etats qui peuvent nuire au climat dans lequel pourront s’émanciper les firmes commerciales internationales. Internationales jusqu’à nouvel ordre, car elles deviendront américaines par la force des mêmes lois économiques qui les ont engendrées. EL MOUDJAHID POLITIS-Final-07.qxp 17/09/11 17:32 Page 42 42 11 SEPTEMBRE... Force contre défaillance Les Etats vont continuer à exister, mais sous une autre forme. Auparavant, c’est-à-dire durant la bipolarité et la guerre froide, ce qui faisait peur aux Etats-Unis, c’était l’existence de pays forts militairement et économiquement qui pouvaient défier son autorité. Aujourd’hui, dix années après le 11/09, la vision a complètement changé. Ce sont ces Etats faibles, défaillants qui représentent un danger, car ils peuvent facilement devenir des fiefs de terrorisme et des «paradis» aux trafiquants de drogue et autres criminels. Boycotter, négocier, émettre des avertissements au sein du Conseil de sécurité des Nations unies, etc. seraient de vains actes aux yeux des gens qui occupent ces Etats sans souveraineté, dont les institutions (si elles existent) manquent d’autorité et n’ont aucun rôle à jouer face aux milices et autres armées illégales qui, dans beaucoup de cas, possèdent des armes plus sophistiquées que les armées régulières. Les Etats-Unis préfèrent bien les concurrents visibles et bien situés dans l’espace et dans le temps. La globalisation aura besoin d’une coopération internationale dans plusieurs domaines entre pays riches et pays pauvres. Le problème, c’est que la situation de ces derniers va se détériorer davantage, ce qui est en train d’ébranler toute confiance dans les mécanismes de la globalisation. Source de matières premières naturelles (remplacées par des produits synthétiques) et de la main-d’œuvre bon marché (remplacée par les machines), ces pays «en voie de développement» n’auront plus le même poids. D’ailleurs, ils sont loin du développement. La part dans le revenu global des 20% de la population la plus pauvre de la planète est de 1,1%. Ce même taux était de 1,4% en 1991 et 2,3% en 1960. Tous les rapports des Nations unies concernant le développement humain mentionnent la pauvreté. La moitié de la population de la Terre vit avec moins de 2 Kenneth Waltz, l’un dollar/jour. Il reste entre les des plus grands mains des pays en voie de théoriciens de la podéveloppement de saisir leur litique internationale, chance, chose qui dépend nous dira que la entièrement de leur pouvoir mondialisation, un de se repositionner stratégiconcept devenu à la quement et comprendre les mode il y a peu de changements immédiats de temps, n’est qu’illul’économie internationale et sion, car, en termes des nouveaux facteurs strucd’échanges commerturels qui entrent en jeu. Le ciaux, le monde des développement durable par années 1990 ressemexemple nécessitera un ble à celui des ancompromis sine qua non nées 1910. entre la souveraineté nationale et le multilatéralisme. Les gouvernements perdront, sinon auront moins de contrôle sur les conceptions de leurs politiques publiques, et notamment économiques. Par ailleurs, les Etats-Unis auront à faire face aux tentatives de résistance et d’hésitation de la part des pays du monde qui ont constaté dans le détail la politique américaine en Afghanistan et le désarroi dans lequel elle a plongé des populations entières pour une période indéterminée. Guerre des hommes et guerre des idées Le terrorisme, Guantanamo, la justice, etc. Faut-il revoir toutes les définitions ? disent les chercheurs de certains cercles illuminés. Les Etats auront du mal à déléguer leurs pouvoirs et céder leur souveraineté. Le 11/09 y était pour quelque chose. Son effet est néfaste. Sans les politiques et les manœuvres américaines de l’après 11/09, le monde aurait pu se trouver en état meilleur. Les statistiques parlent mieux quant aux sommes colossales dépensées dans les guerres et les conflits. Entre 2000 et 2009, le budget militaire américain a augmenté d’un taux de 9% annuellement et les Etats-Unis auront besoin de dépenser en 2012 entre 1.030 et 1.415 milliards de dollars. Les chiffres ne sont guère imaginaires, mais il faut simplement ima- POLITIS - EL MOUDJAHID - N° 001 - SEPTEMBRE 2011 10 ANS APRES EL MOUDJAHID POLITIS-Final-07.qxp 17/09/11 17:32 Page 43 POLITIS - EL MOUDJAHID - N° 001 - SEPTEMBRE 2011 43 4 Les Américains ont dû revoir leur opinion à l’égard des institutions censées veiller sur leur sécurité. EL MOUDJAHID POLITIS-Final-07.qxp 17/09/11 17:32 Page 44 giner ce que l’humanité pourrait faire avec. Le paradigme L’unipolarité est remise en cause constructiviste nous apprend une nouvelle approche afin de par les actes terroristes qui ont pouvoir changer le monde. Il faut construire conceptuellement montré les défaillances d’une puiset sociologiquement le monde de la paix. L’analyse réductionsance qu’on croyait invincible. L’héniste et restreinte tend à limiter le conflit à deux acteurs, les gémonie américaine devient Américains d’un côté et le reste du monde de l’autre, ce qui relative et la menace terroriste deplonge les Etats-Unis dans un cycle dangereux de haine, de vient mondialisée. L’Europe, la revanche et de conflits interminables. De nouvelles générations Russie et la Chine peuvent la de décideurs américains sauront gérer la mondialisation et les concurrencer. Il faut un nouvel modalités de la gouvernance internationale qui aura le mérite ordre international. Les administrad’intégrer toutes les populations, y compris celles des zones tions futures auront du mal à redéshéritées dans l’élan d’une nouvelle modernité basée sur la dresser ce qui a été abîmé. Les science et les connaissances. USA sont une grande puissance qui Le citoyen voudrait bien faire confiance aux forces de sécurité fait peur. et à toutes les agences chargées de sa protection. Quand la CIA et le FBI échouent totalement dans leur mission d’alerter 11 septembre, et après ? la population et de la protéger du danger immédiat est un fait Dans une analyse de ce qu’ils apqui donne à réfléchir. Des réformes en matière de sécurité se pellent les «révolutions arabes» en sont imposées, car le 11/09 est la preuve irréfutable des lales glorifiant, Bruce Riedel a écrit cunes dans les systèmes de protection. Pour éviter que cela ne dans la revue américaine The Nase reproduise, le rapport de la commission du 11/09 publié en tional Interest un article intitulé «Le 2004 prévoit une solution parmi tant d’autres, basée sur l’utiliprochain pays à tomber sera l’Algésation par le gouvernement américain de tous les rie». Au-delà de son point moyens disponibles y compris les livres, la radio, la téde vue, il mérite d’être évoL’administration Bush a lévision (al Hurra fait partie de cette conception), les qué pour deux raisons. créé un amalgame suffibourses académiques, les programmes d’échange, La première, c’est qu’il sant pour casser la coalil’aide, etc. pour «éduquer» les musulmans et leur tracer tion. Le choix d’un nombre mentionne les événements le profil de l’Amérique et des Américains. Sic ! Ceci, le qui ont éclaté en Algérie au de pays à mettre dans la rapport stipule, pourra donner la chance «de traiter les mois de janvier comme fameuse liste de «l’axe du terroristes potentiels comme amis, les convertir et enfin précédent pour toutes les mal» a bien montré les inles domestiquer». Il est clair que le 11/09 a donné des tentions de Washington et révolutions venues après. Il leçons à tout le monde, et notamment aux Etats-Unis les intérêts typiques d’une est clair que l’Algérie est un qui ont senti le besoin de comprendre les autres et leurs pays différent dans son hishyperpuissance. aspirations avant de vouloir les «domestiquer» et s’entoire et sa politique, et a gager dans «une guerre des idées». Il est devenu clair tout le mérite de venir en pour les institutions américaines chargées des affaires extéchef de file des révolutions anticorieures que le profil de leur pays présenté par le rapport de la loniales, ainsi que des combats des commission du 11/09 comme «une force amicale qui recherche droits des peuples. La deuxième, l’ordre et la paix dans le monde» est une image qui a beauc’est qu’il clôture son article par une coup souffert sous l’administration Bush. phrase que les concernés connais- sent bien en disant «les Algériens vont faire face à leur dilemme tous seuls». Le dilemme pour lui, c’est la balance fragile entre la violence d’un côté et les réformes de l’autre. La guerre antiterroriste n’était pas facile, mais ils étaien seuls tout de même, ces mêmes Algériens. Il est évident que certains analystes américains se dédouanent avec une simplicité étrange, ce qui dit clairement que les Etats-Unis ont appris à vivre avec un monde que le terrorisme a réinventé pour toujours, pas seulement le terrorisme du 11/09, mais celui de toute une décennie qui a ravagé des continents entiers. L’Algérie est très bien placée dans ce dossier pour dire son mot dans un monde où les faibles sont relégués au second plan. Le 11/09 ne pourrait avoir de sens historique, stratégique et moral que le jour où il serait intégré dans un débat autour du processus de souffrance qui a martyrisé des populations entières partout dans le monde ,sinon on tomberait à nouveau dans des discours «exclusivistes» qui donneraient plus de place à certains dans les livres d’histoire au détriment des autres. Souvenons-nous de George Orwell et de sa phrase assassine : «Tous les animaux sont égaux, mais certains sont plus égaux que d’autres.» (*) Université de Constantine A. I. EL MOUDJAHID POLITIS-Final-07.qxp 17/09/11 17:32 Page 45 45 POLITIS - EL MOUDJAHID - N° 001 - SEPTEMBRE 2011 4 DIX ANS APRÈS LES ATTENTATS DU 11 SEPTEMBRE 2001 Et les USA changèrent le monde… Les évènements du 11 septembre allaient inciter les capitales occidentales à revoir leurs stratégies et à revisiter leur «projet politique» à l’égard de l’Algérie. Par Nadia Kerraz n cette matinée de mardi 11 septembre 2001, peu de personnes auraient imaginé que le scénario qui allait être mis en scène au pays du cinéma relèvrait du possible. En effet, qui aurait pu penser qu’un jour dix-neuf pirates de l’air allaient détourner quatre avions de ligne afin de les écraser sur des bâtiments hautement symboliques du nord-est des Etats-Unis - les tours jumelles du World Trade Center, le Pentagone et Washington ? Avouons qu’un tel synopsis ne pouvait être le produit que de ces réalisateurs cinématographiques hollywoodiens qui cartonnent au box-office. Pourtant, ce scénario n’avait rien d’une fiction à grand budget. Les USA allaient bel et bien être frappés par le plus grand attentat terroriste jamais perpétré dans l'histoire, comme en témoigne le nombre de victimes : près de 3. 000 morts et plusieurs milliers de personnes blessées. Sans oublier des dégâts matériels estimés en milliards de dollars. E Impacts multiples Qualifiés le 17 octobre 2001 de crimes contre l'humanité par Mary Robinson, le haut-commissaire des Nations unies aux droits de l'homme de 1997 à 2002, l’impact de ces attentats ne se limitera pas, cependant, aux seuls aspects humanitaire et matériel. En effet, s’il est indécent, pour la mémoire de toutes les victimes du terrorisme à travers le monde, de passer sous silence ou de minimiser le bilan humain de ces attaques, il reste que pour les analystes et observateurs des relations internationales, ce sont les conséquences politiques et militaires des attentats du 11 septembre qui interpellent aujourd’hui les consciences au point de soulever quelques interrogations. En effet, force est de reconnaître que depuis la survenance de ces évènements, le monde a profondément changé. Les dix dernières années ont enregistré un recadrage, imposé lorsqu’il n’est pas accepté de bon gré, des relations internatio- nales et un recentrage, dans le sens du durcissement, des politiques sécuritaires internes. Un changement inévitable lorsqu’on sait que la «victime» de ces évènements n’est autre que la première puissance mondiale. Une puissance qui se devait donc de laver l’affront subi. Tant pis pour les victimes collatérales ! Il est difficile du reste de protester, lorsque vous avez une puissance qui ne manque pas d’exhiber à la face de ceux qu’elle estime être responsables de la tragédie américaine, sa force militaire .Pire, comment oser protester alors que le président Bush a estimé que les attentats du 11 septembre sont un acte de guerre livré à son pays ? De plus, au regard de la médiatisation des attentats, vécus presque en temps réel par des centaines de millions de téléspectateurs à travers le monde, l’administration américaine ne risquait de susciter aucune indignation. Mieux, elle pouvait compter sur la sympathie et la compassion du reste de la planète. Et c’est ce qui est arrivé puisque à l’unanimité, les Etats ont soutenu la réaction US. Autant dire donc que l’impact psychologique considérable provoqué par les images de l'avion s’écrasant sur la deuxième tour du World Trade Center, ainsi que celles de l'effondrement complet en quelques secondes des deux édifices de Manhattan diffusées en direct, ne pouvait que baliser la voie à la politique de l’Oncle Sam et légitimer son discours va-ten-guerre. Ce qui permet d’affirmer que les attentats ont de ce fait sonné le glas d’une certaine approche de la lutte antiterroriste qui prévalait avant ces évènements. Car, faut-il le rappeler, le terrorisme ne datait pas de 2001. Avant ce 11 septembre, de nombreux pays, à l’image de l’Algérie, luttaient seuls contre le phénomène. Pis, les terroristes avaient même réussi à susciter des sympathies auprès des capitales occidentales. On cite no- tamment Paris, Londres et Washington. Alors que ces dernières, sur la base des rapports établis par leurs diplomates en poste à Alger, avaient misé sur l’aile politique de la nébuleuse islamiste, qu’on présentait comme les futurs chefs du fait, avait-on estimé, qu’ils étaient à deux doigts de prendre le pouvoir. L’avènement du 11 septembre allait les inciter à revoir leurs calculs et à réviser leur projet politique à l’égard de l’Algérie. Mieux, en lieu et place de l’embargo qu’on avait imposé, ces pays ont même proposé leur coopération, y compris militaire, en vue d’éradiquer le phénomène qui s’était exporté au-delà de ce qui était gérable pour leurs services de sécurité. C’est dire qu’au lendemain des attentats de ce mois de sep- EL MOUDJAHID POLITIS-Final-07.qxp 17/09/11 17:32 Page 46 46 POLITIS - EL MOUDJAHID - N° 001 DU SEPTEMBRE 2011 11 SEPTEMBRE... a doté les autorités fédérales de pouvoirs exceptionnels. Mais face à l’argument avancé par la MaisonBlanche, qui estime que cette loi est absolument «cruciale pour la sécurité des Etats-Unis», leur protestation n’a aucun poids. La loi, faut-il aussi le rappeler, avait notamment créé le statut de «combattant ennemi» et de «combattant illégal», qui a permis à l’administration Bush d’ignorer l’habeas corpus afin de détenir sans inculper des personnes soupçonnées par l’administration de projeter des actes terroristes. Guantanamo, zone de non-droit, témoigne de ce dérapage. D’autres pays ont suivi l’exemple des Etats-Unis, en décidant de renforcer leurs mesures de sécurité, comme la France qui a augmenté le niveau d'alerte de son plan Vigipirate. tembre 2001, la lutte contre le terrorisme a pris, en Occident, une nouvelle tournure. A commencer par la terminologie employée. Il ne s’agit plus de la lutte antiterroriste, mais de la guerre contre le terrorisme et les islamistes, accueillis à bras ouverts auparavant, dès lors qu’ils exerçaient leurs sales besognes en Algérie, qui ont commencé à devenir persona non grata. Du reste la guerre qui sera livrée au terrorisme international et ses chefs autoproclamés sera sans merci, car l’Amérique et l’Europe avaient fini par admettre que le phénomène ne pouvait être circonscrit à un pays ou à une région du monde, mais qu’il était transnational. Paris et Madrid allaient du reste le constater à leurs dépends. C’est pourquoi le gouvernement des États-Unis et celui de nombreux autres pays européens, qui se singularisaient par leur laxisme à l’égard des islamistes, ont réagi en renforçant leur législation antiterroriste. Désormais, ils étaient en «guerre contre le terrorisme». Et dès lors que la main d’El-Qaïda dans ces attentats était indéniable – et si un doute aurait pu persister dans les esprits, il a vite été balayé par ben Laden qui a revendiqué sa responsabilité directe dans l'orchestration de ces attaques – Washington, qui pouvait compter sur le soutien inconditionnel de ses alliés, n’avait plus qu’à dérouler sa nouvelle stratégie. Le gendarme du monde pouvait passer aux actes. Changement de cap L’Afghanistan, première étape Le tournant Au-delà du drame humain occasionné par les attentats, il ya lieu de noter que la célérité avec laquelle les gouvernements occidentaux ont réagi pour promulguer des lois et prendre des mesures restreignant les libertés constituent, à n’en pas douter, un premier indice quant aux parties qui ont trouvé leurs comptes au lendemain des attentats. Patriot Act, loi antiterroriste initiée par l’administration Bush et signée le 26 octobre 2001, en est l’exemple parfait. Son anticonstitutionnalité n’a pas choqué outre mesure. Et pourtant, n’est-ce pas au nom du respect des droits de l’homme que des croisades sont menées contre des pays qualifiés d’antidémocrates ? Alors qu’elle était censée être une loi d’exception, dont certaines disposition n’étaient valables que pour quatre années, le Congrès américain a majoritairement voté en 2011 pour sa reconduction jusqu’en 2015 ! Une loi «temporaire» reconduite pour la troisième fois, au grand dam des organismes de défense des droits civiques qui voient dans le Patriot Act une restriction importante des droits et libertés individuels. Car ce qu’il faut surtout retenir de cette loi, c’est qu’elle Une lutte son merci, mais beaucoup de ratages. 4 Le premier pays à avoir constaté, à ses dépends, le changement opéré dans la stratégie US a été l’Afghanistan, dont le régime taliban, qui avait prêté allégeance à El-Qaïda, était soupçonné d'héberger ben Laden. Partant, Washington n’avait besoin d’aucune autorisation pour passer à l’acte. Pouvait-il en être autrement lorsque l’ONU et tous les pays ont dénoncé ces attentats ? Quant au Saoudien ben Laden, il deviendra après cette date l’ennemi public numéro 1 des Américains. Un statut dont il s’accommodera très bien. Mieux, il l’assumera, jusqu’au bout. Avait-il conscience qu’en s’y prêtant au jeu US, il légitimait la nouvelle stratégie militaire de l’administration américaine ? Ce qui est sûr, c’est que ben Laden restera jusqu’à sa mort, intervenue le 1er mai 2011 lors d’une opération menée par les forces spéciales américaines au Pakistan, le justificatif avancé au déploiement et au maintien des troupes militaires en Asie centrale. Même son élimination, qui ne manquera pas de susciter de nombreuses interrogations laissées sans réponses par l’administration Obama, n’y a rien changé. 10 ANS APRÈS Mais, selon des analystes, cette réduction des libertés est une étape indispensable pour briser les résistances à la mondialisation et contraindre les populations à accepter l'inacceptable en préparation du nouvel ordre économique imposé par le libéralisme et la mondialisation. Mais les USA ne se sont pas limités à adopter un comportement sécuritaire sur son sol. Ce changement interne a été accompagné par un autre au niveau de sa politique étrangère. Les éléments les plus visibles sont le lancement de la guerre contre le terrorisme (dont la guerre d'Afghanistan en 2001), la dénonciation de l'«Axe du mal» et, bien qu'aucun lien n'ait été officiellement établi entre Baghdad et les auteurs de l'attentat, le lancement de la guerre en Irak en 2003. Véritable aubaine, les attentats ont donc permis à l'administration Bush de modifier radicalement la politique intérieure et extérieure des États-Unis d'Amérique. La guerre en Afghanistan lancée en 2001 a été appuyée et cautionnée par les partenaires et l’OTAN (qui ont envoyé des troupes) et l’ONU. Si officiellement cette guerre a été lancée dans le but «d’éradiquer l’un des foyers le plus importants du terrorisme», de nombreux analystes soulignent que les véritables enjeux sont ailleurs. Cette guerre visait en réalité des objectifs immédiats et des objectifs stratégiques. Les objectifs immédiats consistaient à renverser un gouvernement hostile aux États.-Unis (les talibans) et mettre en place un gouvernement afghan favorable aux intérêts étasuniens dans la région. Selon Michael Meacher, ex-ministre britannique de l’Environnement dans le gouvernement Blair de mai 1997 à juin 2003, «les États-Unis envisageaient déjà une intervention militaire contre l’Afghanistan avant le 11 septembre 2001, car le régime des talibans a refusé l’offre EL MOUDJAHID POLITIS-Final-07.qxp 17/09/11 17:32 Page 47 47 POLITIS - EL MOUDJAHID - N° 001 DU SEPTEMBRE 2011 4 US relative à la construction de pipelines traversant l’Afghanistan et le Pakistan, pour amener le pétrole et le gaz naturel du Turkménistan, de l’Ouzbékistan et du Kazakhstan vers l’océan Indien». Mais après l’établissement d’un gouvernement favorable à Washington, une entente est finalement signée au mois de décembre 2002 entre Hamid Karzai et des représentants des gouvernements turkmène et pakistanais : un projet de 3,2 milliards de dollars... Ce renversement de régime et l'établissement d'un gouvernement de transition sont aussi accompagnés par l'arrestation de nombreux musulmans présumés terroristes. La création de la prison de Guantanamo s'explique en partie par cet afflux important de prisonniers. Pour qui des objectifs stratégiques ; la mise en place d’un gouvernement pro-américain permettrait d’installer non seulement en Afghanistan, mais dans plusieurs autres pays d’Asie centrale des bases militaires. Légitimées par ben Laden, trois bases aériennes en Afghanistan ont vu le jour, quatre autres dans le reste de l'Asie centrale, notamment en Ouzbékistan, et un important dispositif terrestre dans le Caucase a été déployé. Ce qui permet de dire que l'équipée américaine en Afghanistan a reconfiguré la carte géopolitique en Asie centrale. La carte géopolitique de l’Asie centrale reconfigurée Une belle revanche sur l’ex-URSS qui avait fait de cette région, une chasse gardée, et un avertissement à peine voilé à Pékin puisque cette région est située dans l’arrière-cour de la Chine. L'Iran se voit ainsi menacé. Quant au Pakistan, il s’est rangé de lui-même dans le camp américain. D’aucuns voient dans la «guerre contre le terrorisme» une tentative, réussie, de Washington de camoufler la poussée ultime d’expansion de l’empire étasunien dans le monde, principalement par la force des armes. Parce que au plan de la stricte compétition économique, les pays partent à chances égales, les USA soucieux d’augmenter leurs chances ont recouru à leur atout maître : leur puissance de feu. Le pétrole irakien étant l’exemple majeur de la deuxième guerre lancée par Washington. C’est le second impact militaire d’importance. Bien que l'Irak de Saddam Hussein n'ait pas participé aux attentats du 11 septembre, le régime de Baghdad a été désigné par l'administration américaine comme un soutien actif du terrorisme international et un détenteur d'armes de destruction massive, malgré l'absence de preuves sur le terrain. L'invasion de l'Irak provoquera de houleux débats à l'ONU et des manifestations à travers le monde, protestant contre les véritables raisons qui seraient d'ordre économique et stratégique (indépendance énergétique vis-à-vis de l'Arabie saoudite, notamment) plutôt que pour libérer le peuple irakien. Une thèse que l’histoire confirmera. Mais Bush tenait sa proie et refusait de la laisser échapper. Au plan interne, le lancement de la guerre décidée en 2003 lui a assuré sa réélection en 2004 avec plus de 3,5 de voix d’avance sur l’opposant démocrate John Kerry. A qui le tour ? L’Iran sera-t-il la prochaine cible de la guerre contre le terrorisme menée par Washington ? Ce qui est sûr, c’est que Téhéran est dans le collimateur des USA. Oui, mais cela ne date pas d’hier, seraient en- clins à rétorquer les observateurs, sans pour autant que Washington n’ait osé franchir le pas. Sauf qu’aujourd’hui, la menace est devenue plus palpable. Pour preuve, après l’élimination de Ben Laden, Téhéran se retrouve accusé d'avoir organisé les attentats du 11 septembre 2001. C'est un article de Benjamin Weiser et Scott Shane publié dans le New York Times et le Sydney Morning Herald qui vient de lancer l'affaire. Selon ces journalistes, deux transfuges des services de renseignements iraniens ont déclaré que les responsables iraniens étaient informés à l'avance des attentats du 11 septembre 2001, contre le WTC et le Pentagone. Des accusations qui viennent à point nommé pour donner du crédit à l’escalade menée conjointement contre Téhéran. Car si les Américains et les Européens se sont donné le mot pour s’en prendre au même moment aux Iraniens, il est à craindre pour ce pays. L’histoire a démontré que dans les relations internationales, les coïncidences n’ont rien d’innocent. N. K. EL MOUDJAHID POLITIS-Final-07.qxp 17/09/11 17:32 Page 48 48 POLITIS - EL MOUDJAHID - N° 001 - SEPTEMBRE 2011 11 SEPTEMBRE... 10 ANS APRÈS PREDATOR ET CAMOUFLAGE «PIXELLISÉ» Les équipements de l'après-11-Septembre Une décennie de guerre en Afghanistan et en Irak a donné lieu à la mise en œuvre de nouveaux équipements et tactiques qui ont marqué les conflits de l'après-11-Septembre. En voici les principaux : - Traquer les insurgés : le Predator S'il a effectué son premier vol en 1994, c'est en Afghanistan que ce drone a connu son baptême du feu, dans un premier temps comme engin de reconnaissance doté de seules caméras. L'idée de le doter de missiles pour mener des frappes aériennes contre des groupes de militants islamistes s'est vite imposée : le 11 septembre 2001, une directive en ce sens n'attendait plus que la signature de George W. Bush. Le Predator, dont l'armée américaine a reçu le dernier des 269 exemplaires commandés en mars, a été de toutes les campagnes, officielles comme clandestines (Pakistan, Yémen, Somalie). Il a vite été rejoint par le drone Reaper, qui dispose d'une capacité d'emport cinq fois supérieure, est plus endurant et plus rapide. Une centaine a déjà été construite. Un autre drone, à réaction celui-là, a, lui aussi fait son apparition : le Global Hawk. Successeur à terme de l'avion espion U2, il est capable de voler pendant 36 heures à haute altitude (18 km) à une vitesse de croisière de 650 km/h. Les Etats-Unis en disposent de 28 exemplaires. - Résister aux bombes artisanales : le MRAP Face aux mines artisanales (IED) utilisées par les combattants irakiens et afghans, la traditionnelle jeep Humvee s'avère vite inefficace. Le nombre de victimes s'envole. Le Pentagone décide en décembre 2006 d'équiper les troupes déployées d'un engin d'une quinzaine de tonnes : le véhicule «protégé contre les embuscades, résistant aux mines» (MRAP). Lourdement blindé, le véhicule est surélevé. Son dessous de caisse est façonné en forme de «V» pour dévier le souffle de l'explosion et empêcher qu'il ne frappe l'habitacle de plein fouet. Immédiatement, le nombre de victimes dû à l'explosion de mines baisse de plus de 80%. L'armée américaine dispose de 27.740 MRAP, dont le coût unitaire est d'environ 500.000 dollars. - Protection et précision : l'équipement du soldat Treillis aux tons sable dont le camouflage est «pixellisé», genouillères, support pour lunettes de vision nocturne sur le casque... le matériel individuel des soldats américains a fortement évolué au cours des conflits. La plupart des fantassins disposent de lunettes de visée sur leur fusil et leur protection s'est renforcée. Les simples gilets pare-balles en kevlar de 2003 se sont garnis de plaques de protection supplémentaires et sont devenus plus couvrants. Chaque soldat est également doté d'un garrot pour qu'il puisse stopper une hémorragie à un bras ou une jambe. - Eliminer les responsables rebelles : les forces spéciales. La «guerre contre le terrorisme» a mis en avant le rôle prépondérant des forces spéciales, soldats d'élite suréquipés et opérant par petits groupes. En Afghanistan à l'automne 2001, des commandos de la CIA et des forces spéciales sont à la manœuvre pour chasser les talibans du pouvoir. Dans ce pays comme en Irak, elles seront ensuite utilisées de façon intensive pour mener des raids de nuit pour capturer ou éliminer des chefs insurgés et récupérer du renseignement. Plusieurs dizaines de ces raids sont menés chaque nuit en Afghanistan où elles seraient au nombre d'une dizaine de milliers. Leur heure de gloire reste l'opération menée au cœur du Pakistan pour éliminer Oussama ben Laden, le 2 mai 2011. EL MOUDJAHID POLITIS-Final-07.qxp 17/09/11 17:32 Page 49 POLITIS - EL MOUDJAHID - N° 001 - SEPTEMBRE 2011 4 LUTTE CONTRE LA CRIMINALITÉ TRANSNATIONALE Nouvelle stratégie des États-Unis La nouvelle «stratégie de lutte contre la criminalité transnationale» du gouvernement Obama vise à réduire «l'étendue de la criminalité, son échelle et son influence, ainsi que ses conséquences sur les États-Unis et sur la sécurité et la gouvernance internationales», a dit le conseiller du président Obama en matière de sécurité intérieure et de lutte antiterroriste, John Brennan. a stratégie du Président viendra consolider et intégrer tous les moyens dont disposent les ÉtatsUnis pour lutter contre le crime organisé transnational, tout en reconnaissant que nous ne pourrons pas le faire à nous seuls. Les ÉtatsUnis doivent continuer de jouer un rôle primordial, de concert avec leurs partenaires engagés, afin de mobiliser les ressources internationales nécessaires pour faire face aux nouvelles menaces», a déclaré, pour sa part, le soussecrétaire d'État Williams Burns à l'occasion du dévoilement de cette stratégie le 25 juillet dernier. Outre MM. Burns et Brennan, étaient également présents à la cérémonie à Washington la ministre de la Sécurité intérieure, Janet Napolitano, le ministre de la Justice, Eric Holder, et des responsables du ministère des Finances, du Bureau de la politique nationale en matière de contrôle des drogues et de l'Agence des États-Unis pour le développement international (USAID). Selon M. Brennan, la criminalité organisée menace l'économie mondiale du fait que ses auteurs portent atteinte aux systèmes financiers qu'ils déforment en entrant illicitement sur les marchés dont ils minent l'intégrité et la concurrence légitime. Les criminels violent aussi les droits de la propriété intellectuelle américaine, dont le coût s'élève à 188 millions de dollars en 2010, selon la Maison-Blanche. Ces activités non seulement portent tort au milieu d'affaires, a noté M. Brennan, mais aussi, dans le cas de médicaments de contrefaçon, peuvent entraîner mort d'homme. Les trafiquants de stupéfiants profitent de la demande mondiale de drogues illicites, «ce qui ne fait qu'augmenter le pouvoir, l'impunité et la violence du crime organisé à l'échelle internationale», a souligné M. Brennan. Les réseaux de traite des personnes «sont un fléau mondial qui devient de plus en plus violent et lucratif en exploitant les membres les plus vulnérables de notre société». Connexion avec les réseaux criminels M. Brennan a ajouté que les terroristes et les insurgés se tournaient de plus en plus vers les réseaux criminels pour trouver un financement et un soutien logistique, notamment par le truchement de rapts contre rançon. Selon une fiche analytique pertinente à la nouvelle stratégie, publiée le 25 juillet par la Maison-Blanche, 29 des 63 princi- 4 «L Nouveau président, nouvelle approche ? paux réseaux de trafic de drogue identifiés par le ministère de la Justice en 2010 avaient des liens avec des organisations terroristes. La nouvelle stratégie consistera en une lutte contre chacun de ces problèmes avec une série d'objectifs stratégiques, a indiqué la MaisonBlanche. Parmi ces objectifs, protéger les Américains et les partenaires des États-Unis de la violence des réseaux criminels, aider les pays partenaires à renforcer leur système de gouvernement pour briser la puissance desdits réseaux, et miner la puissance économique de la criminalité organisée transnationale en protégeant les marchés stratégiques et le système financier des États-Unis contre les incursions illicites et les violations. La stratégie visera aussi à vaincre les réseaux en ciblant leur infrastructure et en empêchant la facilitation d'activités terroristes, ainsi qu'en forgeant un consensus international, une coopération multilatérale et des partenariats entre les secteurs public et privé. La stratégie réalisera ces objectifs en mettant en œuvre des capacités et des moyens novateurs, grâce notamment à un décret, à une nouvelle proclamation présidentielle et à un ensemble de projets de loi, a aussi indiqué la Maison-Blanche. M. Burns a qualifié toute forme de crime organisé «de menace contre les gens honnêtes et les travailleurs du monde entier», un danger qui mine les activités économiques légitimes, l'État de droit et l'intégrité des institutions vitales des gouvernements dont le but est de protéger la paix et la sécurité. Il entrave aussi la lutte contre la pauvreté et ralentit le progrès du développement durable, a-t-il ajouté. Notant que le crime organisé transnational était un problème mondial, M. Burns a affirmé que le département d'État «demeurait déterminé à œuvrer de concert avec ses partenaires dans toutes les administrations du gouvernement, pour transformer nos intérêts communs en une action commune qui renforcera notre sécurité à tous.» EL MOUDJAHID POLITIS-Final-07.qxp 17/09/11 17:32 Page 50 50 POLITIS - EL MOUDJAHID - N° 001 - SEPTEMBRE 2011 11 SEPTEMBRE... ATTENTAT CONTRE L’ACADÉMIE INTERARMES DE CHERCHELL Les Etats-Unis d'Amérique condamnent avec force 10 ANS APRÈS Les principaux attentats d'AQMI Rappel des principales actions du groupe Al Qaeda au Maghreb islamique (AQMI, exGroupe salafiste pour la prédication et le combat - GSPC), qui a revendiqué, dimanche, le double attentat suicide ayant fait 18 morts en Algérie, vendredi 26 août. - fév-mars 2003 : 32 touristes européens enlevés par le GSPC dans le Sud algérien. Les derniers otages sont libérés en août depuis le Mali où ils ont été transférés. - 4 juin 2005 : 15 soldats mauritaniens tués dans une attaque dans le nord-est de la Mauritanie revendiquée par le GSPC. - 11 avr : 30 morts, plus de 200 blessés dans deux attentats à Alger, dont un contre le palais du Gouvernement, revendiqué par AQMI. - 6 sept : 22 morts dans un attentat suicide visant le cortège du Président dans l'Est. - Le 8 sept : 30 morts dans un attentat suicide contre une caserne en Kabylie. Revendiqués par AQMI. La communauté internationale est désormais unanime à condamner la barbarie du terrorisme. es Etats-Unis ont réaffirmé lundi leur «soliderelation» avec l'Algérie et ont réitéré leur condamnation de l'attaque terroristeperpétrée vendredi dernier contre l'Académie militaire interarmes de Cherchell.Dans une déclaration liminaire faite avant de passer aux questions-réponsesde son briefing quotidien, la porteparole du département d'Etat américain,Mme Victoria Nuland, a souligné que «les Etats-Unis condamnent fermement l'attaqueterroriste perpétrée le 26 août contre l'académie militaire de Cherchell, enAlgérie». «Nos pensées et nos prières vont aux proches de ceux qui ont été tués oublessés à la suite de cet horrible événement», a-t-elle ajouté.Tout en condamnant cet acte terroriste, la porte-parole du département deHillary Clinton a tenu également à réaffirmer que «les Etats-Unis et l'Algérieont une solide relation bilatérale, et cette tragédie (de cette attaque terroriste)souligne la nécessité de continuer à renforcer nos efforts conjoints en tantque partenaires pour combattre le terrorisme sous toutes ses formes». L - 14 déc : 41 morts dans deux attentats suicide à Alger. Revendiqués par AQMI. - 24 déc : En Mauritanie, quatre touristes français tués dans le Sud-Est. Trois Mauritaniens affiliés à AQMI seront condamnés à mort en 2010. - 22 fév : Deux touristes autrichiens sont enlevés en Tunisie puis transférés dans le nord du Mali. AQMI les libère en octobre. - 15 sept : Des éléments d'AQMI attaquent une patrouille de l'armée dans l'extrême nord de la Mauritanie. Les corps de 11 soldats et leur guide retrouvés décapités. - 14 déc : Rapt de deux diplomates canadiens au Niger, revendiqué par AQMI. Libérés en avril 2009. - 22 jan : Quatre touristes européens (deux Suisses, un Allemand et un Britannique) capturés dans la zone frontalière Mali/Niger. - En juin, AQMI annonce avoir tué le Britannique Edwin Dyer. Les autres libérés en avril et juillet. - 26 nov : Enlèvement d'un Français, Pierre Camatte, dans le nord-est du Mali. Relâché en février 2010 par AQMI après la libération au Mali de quatre islamistes qu'elle réclamait. - 29 nov : Enlèvement de trois Espagnols dans le nord-ouest de la Mauritanie, revendiqué par AQMI. Une femme est libérée en mars 2010, les deux autres en août. - 18 déc : Enlèvement d'un couple d'Italiens dans le sud-est de la Mauritanie, revendiqué par AQMI. Libérés en avril 2010. - 30 juin : 11 gendarmes algériens tués dans une attaque revendiquée par AQMI. - 25 juil : AQMI revendique l'exécution d'un Français, Michel Germaneau, enlevé au Niger en avril et transféré au Mali. Un raid franco-mauritanien mené le 22 juillet pour tenter de le libérer avait échoué. - 16 sept : Sept personnes (cinq Français, un Togolais et un Malgache), essentiellement des collaborateurs des groupes français Areva et Satom, sont enlevées à Arlit (site d'extraction d'uranium) dans le nord du Niger. Revendiqué par AQMI. - Le 24 février 2011, une Française, le Togolais et le Malgache sont libérés en territoire nigérien. - 7 jan : Deux Français, Antoine De Léocour et Vincent Delory, sont enlevés à Niamey. Ils sont tués le lendemain lors d'une opération de sauvetage franconigérienne au Mali. AQMI revendique l'enlèvement le 13. - 2 fév : AQMI revendique une tentative d'attentat contre le président mauritanien Mohamed Ould Abdel Aziz, déjouée dans la matinée par l'armée mauritanienne. - 2 fév : Une touriste italienne enlevée dans le Sud algérien. Le 18, elle indique être aux mains d'AQMI dans un enregistrement audio. - 20 avr : AQMI revendique l'attaque menée le 15 contre un poste militaire en Kabylie (Algérie) dans laquelle 14 militaires ont été tués. - 18 mai : Un colonel et un soldat de l'armée tunisienne, ainsi que deux Libyens, sont tués à Rouhia (Nord), à environ 200 km de la frontière algérienne, dans des échanges de tirs avec des hommes «fortement suspectés d'appartenir à El-Qaïda» (sources autorisées). - 26 août : 18 morts dans un attentat suicide à l'entrée de l'Académie interarmes de Cherchell (100 km à l'ouest d'Alger), revendiqué le 28 par AQMI. EL MOUDJAHID POLITIS-Final-07.qxp 17/09/11 17:32 Page 51 51 POLITIS - EL MOUDJAHID - N° 001 - SEPTEMBRE 2011 4 WILLIAM HAGUE, MINISTRE BRITANNIQUE DES AE, CONDAMNE L’ATTENTAT DE CHERCHELL «Ces terroristes n'ont absolument aucun respect pour la vie humaine» e Royaume-Uni a condamné l'attentat perpétré contre l'Académie militaire interarmes de Cherchell, dans un communiqué diffusé par le Foreign Office. «J'ai été choqué d'entendre parler de l'attaque terroriste contre l'Académie militaire algérienne à Cherchell le 26 août, dans laquelle beaucoup ont été tués et blessés», a affirmé le ministre britannique des Affaires étrangères, William Hague, dans ce communiqué. «Je condamne cette attaque brutale et impitoyable», a souligné M. Hague qui a relevé que le timing de l'attentat terroriste, juste après la rupture du jeûne, démontre que «ces terroristes n'ont absolument aucun respect pour la vie humaine ni pour le Ramadhan». Le chef de la diplomatie britannique a assuré que le Royaume-Uni se tient «fermement au côté de l'Algérie» dans la lutte contre le terrorisme et adressé ses plus sincères condoléances aux familles des victimes de l'attaque, au gouvernement et au peuple algériens. L «El-Qaïda n'est pas la seule menace pour la sécurité du Royaume-Uni» e ministre britannique des Affaires étrangères William Hague a déclaré, le 24 juillet dernier à Londres, qu’«Al Qaeda n'est pas la seule menace à la sécurité du Royaume-Uni». «Le Royaume-Uni considère clairement dans sa stratégie de lutte antiterroriste qu'Al Qaeida n’est pas la seule forme de menace à laquelle le pays pourrait faire face», a-t-il dit dans une déclaration à la BBC. Lors d’une réunion le lendemain, du Conseil de la sécurité de la Grande-Bretagne, il a annoncé qui’il devra s’assurer qu’«une attention suffisante est accordée à toutes les formes de terrorisme». «Le Conseil national de sécurité devra également tirer les leçons des attaques qui ont ciblé la Norvège» vendredi, a ajouté M. Hague, soulignant que des mesures avaient été mises en place sous le gouvernement actuel, afin de mettre le pays à l’ abri d’attaques terroristes. M. Hague a également évoqué le contrôle rigoureux des armes à feu en Grande-Bretagne et les contrôles «très stricts» effectués sur la vente de matériel nécessaire pour la fabrication des bombes. Selon lui, la Grande-Bretagne a les professionnels «les mieux formés au monde» dans le domaine du contrôle et de la circulation des armes, «travaillant en étroite collaboration avec les services de renseignement pour la sécurité et la protection du pays». L ATTENTATS DE CHERCHELL Catherine Ashton : «La violence sera vaincue et ne réussira pas à arrêter l'Algérie sur son chemin des réformes» Union européenne (UE) a condamné «fermement» l'attentat perpétré vendredi soir contre l'Académie militaire interarmes de Cherchell. La Haute représentante de l'UE pour les Affaires étrangères et la politique de sécurité, Catherine Ashton, et le commissaire européen à l'Elargissement et à la Politique européenne de voisinage, Stefan Füle, ont «condamné fermement», dans un communiqué commun cet «acte de terreur» et exprimé leur «solidarité au peuple algérien et, en particulier, aux amis et aux familles des victimes». «La violence sera vaincue et ne réussira pas à arrêter l'Algérie sur son chemin des réformes», ont-ils affirmé, assurant que «l'UE est prête à développer davantage sa coopération avec l'Algérie pour soutenir le programme de réforme». 18 personnes ont été tuées et 26 autres blessées dans un attentat terroriste perpétré vendredi, une dizaine de minutes après la rupture du jeûne, contre le «mess extérieur» de l'Académie militaire interarmes de Cherchell. Le ministère de la Défense nationale a souligné que ce crime terroriste «démontre une nouvelle fois que les groupuscules terroristes tentent à travers cet acte abject d'atteindre des objectifs médiatiques afin de desserrer l'étau qui leur est imposé sur le terrain par les forces combinées de sécurité qui ont réalisé des résultats remarquables, notamment durant les dernières semaines». Le Haut Commandement de l'Armée nationale populaire, «tout en s'inclinant à la mémoire des chouhada ayant péri dans cet acte ignoble», a réitéré sa «détermination à mettre hors d'état de nuire ces bandes criminelles et à assurer la paix et la quiétude dans l'ensemble du pays». L’ EL MOUDJAHID POLITIS-Final-07.qxp 17/09/11 17:32 Page 52 52 11 SEPTEMBRE... POLITIS - EL MOUDJAHID - N° 001 - SEPTEMBRE 2011 10 ANS APRÈS Understanding International Terrorism Prof.Dr Mhand Berkouk, Director, Centre de Recherche Stratégique et Sécuritaire errorism is an old phenomenon that dates back to the year 3AD with violent actions taken by Jewish zealots against Roman authorities in Palestine… These were violent, organized and politically motivated. These are found features of modern terrorism to which Europe was confronted in the 1970s… when it was ideologically inspired … and with clear political discourses … Terrorist acts were then perpetrated by some extreme left groups in a highly polarized international system . Terrorist groups like Action Directe (France), Red Brigades (Italy) or Baader Meinhof were all actively involved in violent actions against the state …. Their actions were justified through the prism of anti-capitalism or anti-imperialism. Some separatist movements, using violence, were also dubbed as terrorist groups …ETA in Spain, the IRA in the United Kingdom or the PKK in Turkey , the Tamil Tigers of Sri Lanka … They all resorted to such violent modus operandi. Even some liberation movements like the Palestinian Liberation Organization (PLO) was presented by the «Atlantic World» as a terrorist entity … before recognizing it by the West as a partner in peace in the Middle East and as the sole representative of the Palestinian People…. From these examples, one would notice the diversity of the profiles and agendas and normative constructs of such organizations … What is a terrorist for some, is a freedom fighter for others. Terrorism is a value-laden concept … it is not neutral and it is highly prone to manipulation at both the political and etymological levels. In fact, its cacophonous character is made worse through its instrumentation by states and nonstate actors alike … This had a clear impact on the lack of consensus on its «legal definition» at the international level and this despite the fact that terrorism is an ubiquitous threat to individuals, states and the whole international community. Terrorism is a threat that recognizes no borders, no religion and culture … It is a trans-generic phenomenon that cannot be scientifically profiled. There are no found common direct causes that produce such heinous violence and disrupt to human life. The Gurrian (Ted Gurr, famous American specialist of political violence) formula which stipulates that … poverty and repression create the fertile ground for political violence, rebellion and terrorism … does not hold ground when doing a mapping of the countries struck by such a threat…. Some are more democratic than others like Spain, the United States (in the cases of its home grown terrorism with the Unibomber and the Oklahoma bombing as examples)…. Or the United Kingdom ( with its own home bred terrorists)…. Moreover, the poverty hypothesis cannot be sustained as several ,if not the majority of, African states are underdeveloped, non democratic but were not confronted to cases of terrorism . This is the reason why all objective analysts of terrorism reject this simplistic presentation. The latest terrorist attacks in Norway (July 22nd, 2011) by an extreme right wing militant (Anders Behring-Breivit) using combined non-simultaneous tactics (car blast and random shooting at a summer camp) further complicated the task of identifying potential terrorists … and denigrates the overtly is- T lamophobic singularisation of Islam as the creed that breeds terrorists … or as a Green Peril ( to use Judith Miller’s famous catch phrase) that will threaten western civilization and way of life. It is a narrow ethno-centric approach and a blurred culturalist conception of terrorism (à la Bernard Lewis in his book “The Political Language of Islam). Terrorists do not use the same modus operandi … their acts range from individual assassinations to mass murders, car and device explosions, ambushes, sabotage of public institutions or facilities … to the use planes as in the case of the 9/11 attacks on the World Trade Centre in New York. In addition to these, they resort to racketeering, kidnapping and tactical alliances with drug traffickers and organized crime to draw financial resources to finance their activities. A sketchy mapping of terrorism worldwide would demonstrate that it is an international threat … from the abu Sayaf group in Jolo (Philippines), Gamaat islamiya in Indonesia, to al-Qaida in Afghanistan, Yemen and elsewhere; to right wing terrorist acts in Europe, terrorist cells (discovered several times) in Australia, to left wing terrorist splinter groups in Latin America… to alShabab al Islami in Somalia, Buku Haram in Nigeria, Aqmi in the Sahel region …. It is a widespread threat that cannot be defeated so- EL MOUDJAHID POLITIS-Final-07.qxp 17/09/11 17:32 Page 53 53 POLITIS - EL MOUDJAHID - N° 001 - SEPTEMBRE 2011 4 lely by decapitating the head of alQaida international … It requires a relentless effort that should transcend altruistic national calculations and move towards a genuine international partnership against terrorism while respecting national sovereignty and by refraining from unilateral military actions or foreign intervention. The international community is facing a real proliferation of such a threat specially with the «complexification» of the world’s interconnectedness … where terrorists recruit, train and might even finance and transmit orders from any place in the world to carry terrorist atrocities anywhere on the planet. Ten years after the 9/11 terrorists attacks on the United States and despite the engagement of the international community against this phenomenon, and despite the American –led global war on terror (GWOT) the threat is still real … just to see the recent attacks in Norway, Pakistan and Yemen …one would conclude that this threat is gaining in geographical terms … and it is becoming more dangerous for its strategic connections with organized crime and narco-trafficking and with some unfounded reluctance (for reasons of political calculations) by some states to enforce a stringent system of counter-terrorism and its financing … as in the case of criminalizing the payment of ransom to terrorists.September 2011 should be a time not only to remember the victims of the 9/11 attacks and all the victims of terrorists activities worldwide, but it should be an opportunity to critically evaluate what has been done at national-regional and international levels against this menace. The international community ought to be more resolute in adopting a work plan to confront a mounting threat while acknowledging that terrorism recognizes no borders, nationality or religion. It is a strategic challenge … to render the world a much safer place by defeating the ogre of terrorism. M. B. EL MOUDJAHID POLITIS-Final-07.qxp 17/09/11 17:32 Page 54 54 POLITIS - EL MOUDJAHID - N° 001 - SEPTEMBRE 2011 11 SEPTEMBRE... DOCUME 10 ANS APRÈS NT Nations unies S/RES/1373 (2001) Conseil de sécurité 28 septembre 2001 Résolution 1373 (2001) Adoptée par le Conseil de sécurité à sa 4385e séance, le 28 septembre 2001 Le Conseil de sécurité : Réaffirmant ses résolutions 1269 (1999) du 19 octobre 1999 et 1368 (2001) du 12 septembre 2001, Réaffirmant également sa condamnation sans équivoque des attaques terroristes Commises le 11 septembre 2001 à New York, à Washington et en Pennsylvanie, et exprimant sa détermination à prévenir tous actes de ce type, Réaffirmant en outre que de tels actes, comme tout acte de terrorisme international, constituent une menace à la paix et à la sécurité internationales, Réaffirmant le droit naturel de légitime défense, individuelle ou collective que consacre la Charte des Nations unies, et qui est réaffirmé dans la résolution 1368 (2001), Réaffirmant la nécessité de lutter par tous les moyens, conformément à la Charte des Nations Unies, contre les menaces à la paix et à la sécurité internationales que font peser les actes de terrorisme, Profondément préoccupé par la multiplication, dans diverses régions du monde, des actes de terrorisme motivés par l’intolérance ou l’extrémisme, Demandant aux États de collaborer d’urgence pour prévenir et réprimer les actes de terrorisme, notamment par une coopération accrue et l’application intégrale des conventions internationales relatives au terrorisme, Considérant que les États se doivent de compléter la coopération internationale en prenant des mesures supplémentaires pour prévenir et réprimer sur leur territoire, par tous les moyens licites, le financement et la préparation de tout acte de terrorisme, Réaffirmant le principe que l’Assemblée générale a établi dans sa déclaration d’octobre 1970 (2625 XXV) et que le Conseil de sécurité a réaffirmé dans sa résolution 1189 (1998), à savoir que chaque État a le devoir de s’abstenir d’organiser et d’encourager des actes de terrorisme sur le territoire d’un autre État, d’y aider ou d’y participer, ou de tolérer sur son territoire des activités organisées en vue de perpétrer de tels actes, Agissant en vertu du Chapitre VII de la Charte des Nations unies, 1. Décide que tous les États : a) Préviennent et répriment le financement des actes de terrorisme; b) Érigent en crime la fourniture ou la collecte délibérée par leurs nationaux ou sur leur territoire, par quelque moyen que ce soit, directement ou indirectement, de fonds que l’on prévoit d’utiliser ou dont on sait qu’ils seront utilisés pour perpétrer des actes de terrorisme; c) Gèlent sans attendre les fonds et autres avoirs financiers ou ressources économiques des personnes qui commettent, ou tentent de commettre, des actes de terrorisme, les facilitent ou y participent, des entités appartenant à ces personnes ou contrôlées, directement ou indirectement, par elles, et des personnes et entités agissant au nom, ou sur instruction, de ces personnes et entités, y compris les fonds provenant de biens appartenant à ces personnes, et aux personnes et entités qui leur sont associées, ou contrôlés, directement ou indirectement, par elles; d) Interdisent à leurs nationaux ou à toute personne ou entité se trouvant sur leur territoire de mettre des fonds, avoirs financiers ou ressources économiques ou services financiers ou autres services connexes à la disposition, directement ou indirectement, de personnes qui commettent ou tentent de commettre des actes de terrorisme, les facilitent ou y participent, d’entités appartenant à ces personnes ou contrôlées, directement ou indirectement, par elles et de personnes et entités agissant au nom ou sur instruction de ces personnes; 2. Décide également que tous les États : a) S’abstiennent d’apporter quelque forme d’appui que ce soit, actif ou passif, aux entités ou personnes impliquées dans des actes de terrorisme, notamment en réprimant le recrutement de membres de groupes terroristes et en mettant fin à l’approvisionnement en armes des terroristes ; b) Prennent les mesures voulues pour empêcher que des actes de terrorisme ne soient commis, notamment en assurant l’alerte rapide d’autres États par l’échange de renseignements ; c) Refusent de donner asile à ceux qui financent, organisent, appuient ou commettent des actes de terrorisme ou en recèlent les auteurs; d) Empêchent que ceux qui financent, organisent, facilitent ou commettent des actes de terrorisme n’utilisent leurs territoires respectifs pour commettre de tels actes contre d’autres États ou contre les citoyens de ces États; e) Veillent à ce que toutes personnes qui participent au financement, à l’organisation, à la préparation ou à la perpétration d’actes de terrorisme ou qui y apportent un appui soient traduites en justice, à ce que, outre les mesures qui pourraient être prises contre ces personnes, ces actes de terrorisme soient érigés en crimes graves dans la législation et la réglementation nationales et à ce que la peine infligée soit à la mesure de la gravité de ces actes ; f) Se prêtent mutuellement la plus grande assistance lors des enquêtes criminelles et autres procédures portant sur le financement d’actes de terrorisme ou l’appui dont ces actes ont bénéficié, y compris l’assistance en vue de l’obtention des éléments de preuve qui seraient en leur possession et qui seraient nécessaires à la procédure ; g) Empêchent les mouvements de terroristes ou de groupes de terroristes en instituant des contrôles efficaces aux frontières, ainsi que des contrôles lors de la délivrance de documents d’identité et de documents de voyage et en prenant des mesures pour empêcher la contrefaçon, la falsification ou l’usage frauduleux de papiers d’identité et de documents de voyage ; 3. Demande à tous les États : a) De trouver les moyens d’intensifier et d’accélérer l’échange d’informations opérationnelles, concernant en particulier les actions ou les mouvements de terroristes ou de réseaux de terroristes, les documents de voyage contrefaits ou falsifiés, le trafic d’armes, d’explosifs ou de matières sensibles, l’utilisation des technologies de communication par des groupes terroristes, et la menace que constituent les armes de destruction massive en possession de groupes terroristes ; b) D’échanger des renseignements conformément au droit international et national et de coopérer sur les plans administratif et judiciaire afin de prévenir les actes de terrorisme ; c) De coopérer, en particulier dans le cadre d’accords et d’arrangements bilatéraux et multilatéraux, afin de prévenir et de réprimer les actes de terrorisme et de prendre des mesures contre les auteurs de tels actes ; d) De devenir dès que possible parties aux conventions et protocoles internationaux relatifs au terrorisme, y compris la Convention internationale pour la répression du financement du terrorisme en date du 9 décembre 1999 ; e) De coopérer davantage et d’appliquer intégralement les conventions et protocoles internationaux relatifs au terrorisme ainsi que les résolutions 1269 (1999) et 1368 (2001) du Conseil de sécurité ; f) De prendre les mesures appropriées, conformément aux dispositions pertinentes de leur législation nationale et du droit international, y compris les normes internationales relatives aux droits de l’homme, afin de s’assurer, avant d’octroyer le statut de réfugié, que les demandeurs d’asile n’ont pas organisé ou facilité la perpétration d’actes de terrorisme et n’y ont pas participé ; g) De veiller, conformément au droit international, à ce que les auteurs ou les organisateurs d’actes de terrorisme ou ceux qui facilitent de tels actes ne détournent pas à leur profit le statut de réfugié, et à ce que la revendication de motivations politiques ne soit pas considérée comme pouvant justifier le rejet de demandes d’extradition de terroristes présumés ; 4. Note avec préoccupation les liens étroits existant entre le terrorisme international et la criminalité transnationale organisée, la drogue illicite, le blanchiment d’argent, le trafic d’armes et le transfert illégal de matières nucléaires, chimiques, biologiques et autres présentant un danger mortel et, à cet égard, souligne qu’il convient de renforcer la coordination des efforts accomplis aux échelons national, sous-régional, régional et international afin de renforcer une action mondiale face à ce grave problème et à la lourde menace qu’il fait peser sur la sécurité internationale ; 5. Déclare que les actes, méthodes et pratiques du terrorisme sont contraires aux buts et aux principes de l’Organisation des Nations Unies et que le financement et l’organisation d’actes de terrorisme ou l’incitation à de tels actes en connaissance de cause sont également contraires aux buts et principes de l’Organisation des Nations Unies ; 6. Décide de créer, en application de l’article 28 de son Règlement intérieur provisoire, un comité du Conseil de sécurité composé de tous les membres du Conseil et chargé de suivre l’application de la présente résolution avec l’aide des experts voulus, et demande à tous les États de faire rapport au Comité, 90 jours au plus tard après la date de l’adoption de la présente résolution puis selon le calendrier qui sera proposé par le Comité, sur les mesures qu’ils auront prises pour donner suite à la présente résolution ; 7. Donne pour instructions au Comité de définir ses tâches, de présenter un programme de travail 30 jours au plus tard après l’adoption de la présente résolution et de réfléchir à l’appui dont il aura besoin, en consultation avec le Secrétaire général ; 8. Se déclare résolu à prendre toutes les mesures nécessaires pour assurer la pleine application de la présente résolution, conformément aux responsabilités qui lui incombent en vertu de la Charte; 9. Décide de demeurer saisi de la question. EL MOUDJAHID POLITIS-Final-07.qxp 17/09/11 17:32 Page 55 EL MOUDJAHID POLITIS-Final-07.qxp 17/09/11 17:32 Page 56