Janvier 2010 - La Distillerie
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Janvier 2010 - La Distillerie
.tv e i n ler g i -l il en ist .d w ww u ea JOURNAL DE LA DISTILLERIE Édition no.10, janvier 2010 GUEULE DE BOIS Brandy Alexander : parce que depuis un bon bout de temps, moi aussi, comme mon vieux pote John, je suis perdu dans les méandres d’un «Lost Weekend» carrément interminable. Et que tant qu’à être finalement, finalement, sorti de mon appart, tant qu’à me payer un verre, tant qu’à être encore une fois tout seul comme un con avec mes chagrins d’amour mauvais comme les films d’après-midi de feu TQS : aussi bien me la jouer totale et me permettre un breuvage un tant soit peu réconfortant. Brandy Alexander : j’ai peut-être pas le foyer, la peau d’ours et le corps chaud et nu d’une femme contre le mien, toujours salé de nos ébats, mais, au moins, j’aurai le verre ultime de la soirée d’hiver utopique par excellence. Brandy Alexander : parce que c’est janvier, putain de janvier de merde, et que je suis resté caché dans mon lit assez longtemps. Depuis la nouvelle année en fait, depuis qu’elle l’a quitté, mon pieu, en faisant la promesse de ne pas en faire, des promesses. Bonne année! Tu parles. Putain de janvier. Brandy Alexander : comme la toune de Feist, comme l’album que j’écoute en boucle, en cachette, dans mon iPod, en marchant sur Saint-Denis, sur Ontario, sur mon orgueil. - Brandy Alexander, que je commande à Rock avant même de le saluer. - Hé! Un revenant!, il fait en me tendant la main. - C’est le cas de le dire, en effet. Ses mots signifient... Brandy Alexander : j’observe attentivement le brandy et la crème de cacao s’unir sur un lit de glaçons, bordés par une généreuse part de crème. Je souris, déjà l’eau à la bouche, en entendant le son si réconfortant de la mixture que Rock agite énergiquement – réveiller les ingrédients et saveurs toujours endormis du cocktail – avant de la laisser s’étendre en souplesse dans le creux d’un verre à martini. Les arômes de la muscade me montent au nez avant même qu’il n’ait posé l’élixir devant moi. - J’ai revu ta folle des années folles. - Avec son autre j’imagine? - Naaa. T’es pas au courant? - Au courant… - C’est fini. Elle lui a donné son 4%. J’ai comme un feeling que t’as quelque chose à voir là-dedans moi. - Arrête… - Ben… - Tu penses? Il sourit avant de s’éloigner. Merde. Je sais que je ne devrais pas. Je sais que je devrais me la fermer, avec mes conneries d’âme sentimentale. Je sais que je devrais remettre le téléphone dans la poche de mon manteau. Éditorial par LE BUVEUR Je sais qu’il est passé 1 heure du mat. Je sais, mais… Ça sonne deux coups. Et ça répond. - Qu’est-ce que tu veux?, fait la voix endormie, un tantinet impatiente, à l’autre bout du fil. - Tu dormais. - Non, pas vraiment. Mais c’est pas une raison pour te sentir moins coupable d’appeler à cette heure-là. Le monde normal est couché man. - T’étais pas couché. - Ouain. T’es où? - Au bar. - Wow! T’es sorti de chez vous! En quel honneur? - C’était encore le Roi Lion qui passait à la télé. J’avais pas le cœur de me retaper «Hakuna Matata». - Tu ne «feelais» pas le «love tonight»? - Qu’est-ce tu fais? Viens-tu me rejoindre? - Oublie ça. Catherine va me tuer si je sors. Aucune envie de parler de sa Catherine : je le coupe : - Elle l’a laissé. LE BEC VERSEUR Chef, oui chef! Par alexandre lefebvre Le succès d’Amarula tient, bien sûr, à sa grande qualité, mais aussi aux efforts soutenus de ceux qui en assurent la mise en marché. Ce n’est pas tout que d’importer un produit unique, venu des confins d’un autre continent, encore faut-il le faire connaître. Venez découvrir le “Vaillant” exotique et délicieux. Une base d’Amarula et d’eau de noix de coco. Disponible en plusieurs variantes au bar à Mojito, exclusivement à La Distillerie #2. En Afrique du Sud, de façon bisannuelle, les agents venant de près de 100 pays et oeuvrant pour « Distell » se réunissent. Ils échangent des idées, partagent leurs façons de faire et se mettent d’accord sur les meilleures pratiques en ce qui concerne les méthodes pour populariser leurs produits. Le Québec est bien représenté lors de ces rencontres, car la dame siégeant en notre nom n’est nulle AUTOUR DU TONNEAU Le soleil se lève sur la steppe africaine, glorieux et aveuglant. Tous les animaux, comme appelés par un signal universel, convergent vers le même point. Ils ne vont pas vers une grosse roche pour voir un lionceau venir au monde, non, ils se dirigent vers un arbre. Un arbre majestueux, trônant sur la savane du haut de ses neuf mètres, offrant l’ombrage de son feuillage abondant, les bienfaits médicinaux de son écorce et la solidité de son bois. Mais ce qui attire, par-dessus tout, la faune animale et humaine vers le géant généreux, ce sont ses fruits. Les fruits tombés de l’arbre, mûris au soleil; devenus jaunes et exhalant un parfum envoûtant. Tout ce qui vit et qui marche sur la savane répond à cet appel et vient s’en régaler. C’est l’histoire d’un cycle dix fois millénaire : une trêve entre les tribus et les espèces autour de la source d’un délice bien connu en Afrique subéquatoriale : le Marula. En Afrique du Sud, cet arbre sauvage est la source d’un culte et de multiples rites entourant la fertilité. L’homme n’est pas seul à entretenir une relation privilégiée avec le Marula et ses fruits; les éléphants s’en régalent aussi depuis des temps immémoriaux. Le mastodonte va jusqu’à être associé à l’arbre dans les différents dialectes ou le Marula est aussi appelé « l’arbre aux éléphants». Il existe un autre endroit où l’hommage est encore plus évident : la bouteille d’Amarula où un majestueux spécimen d’éléphant sert d’icône à cette liqueur unique au monde. L’Amarula est produit à partir du fruit du Marula. Un arbre donne, au bas mot, 500 kg de fruits chaque année. Les fruits tombent de l’arbre, mûrissent au soleil et sont ramassés par des paysans lorsqu’ils sont à point. Les paysans transportent tout ce qu’ils peuvent jusqu’à la plantation d’Amarula, ou dans quelques points de ramassages centraux gérés par la compagnie. Amarula achète tout ce qu’on apporte, même si cela dépasse ses besoins de productions. Le paiement se fait de façon individuelle, au poids, dans un esprit d’équité. Pour les paysans, pauvres pour la plupart, cette récolte est d’un grand secours. Amarula investit, d’ailleurs, dans plusieurs programmes afin de venir en aide à la population des régions où le fruit du Marula est récolté. Que ce soit des écoles, des programmes sociaux, voire des projets de banques, la compagnie croit fermement que le dévelop- autre que Danielle Vaillant, chef de marque pour, entre autres, l’Amarula. Certains l’ont peutêtre vue à « Occupation Double» alors qu’elle y vantait les mérites de notre produit vedette. Vous aurez, ici, l’occasion d’en apprendre un peu plus sur elle et son métier. - Hein? - Est plus avec. Elle l’a laissé. - De laquelle tu parles? - C’mon! - Bon. Tu l’as vue? - Non. Danny l’a vue. Il pense qu’elle l’a laissé pour moi. - Il «pense»… - Je devrais l’appeler. - Tu devrais pas l’appeler. - Je vais l’appeler. - T’es-tu déjà saoul coudonc? - Je l’aime. - Justement. - T’as raison. Je l’appelle pas : je vais me pointer direct chez elle. C’est sûrement mieux qu’elle me voit. - C’est sûrement mieux que toi tu ne la vois pas. - J’y vais. - Et merde. Bouge pas, je m’en viens. - Catherine? - T’es ben mieux de m’héberger chez vous quand ma blonde va me mettre à porte. Il raccroche. Et moi, je goûte enfin à mon cocktail, de plus en plus content d’être sorti de ma caverne. Hakuna Matata. tation jeune et dynamique qui assure la communication et facilite les relations entre la SAQ et les différents producteurs à travers le globe. assurer une bonne communication avec l’ensemble des représentants sur le territoire québécois. C’est beaucoup d’ouvrage, mais elle semble y prendre un grand plaisir! Le travail de Danielle Vaillant touche à toutes les facettes de la mise en marché : des tablettes de la SAQ jusqu’aux campagnes publicitaires à grand déploiement. Minutie est le mot d’ordre, il faut penser chaque détail et être en mesure de mesurer son impact. Elle doit aussi Comment prend-elle son Amarula lorsqu’elle en déguste? Pur, sur glace, dans un café : comme tout un chacun. Elle a, ceci dit, quelques recettes des plus intéressantes. Elle mélange 2 parts d’Amarula avec une part de rhum jamaïcain Appleton et nous assure que le résultat est divin. Aussi, elle nous recommande de mélanger l’Amarula à de l’eau de noix de coco. Après des études universitaires en «marketing», Danielle Vaillant a la chance de travailler pour Labatt, alors qu’elle n’a que 22 ans. Son dynamisme, et sa rigueur, la mène chez Distell, pour qui elle siège chez « LCC vins et spiritueux», une agence de représen- Nants ingonyama bagithi Baba!! pement durable est essentiel à ses activités présentes et futures. Lorsque le fruit est récolté, on effectue un tri minutieux, puis, on sépare la chair du noyau et on la stocke dans des citernes réfrigérées. La température doit rester basse : le fruit du Marula étant très riche en sucre, la fermentation pourrait se mettre en branle avant l’arrivée à la distillerie. C’est donc bien au frais que la chair des fruits de Marula traverse le pays sur presque toute sa longueur, voyageant du parc national Kruger, dans le nord-est, jusqu’à Stellenbosch, à moins d’une heure de Cape Town. Lorsqu’elle termine son parcours d’environ 1600 kilomètres, la chair des fruits est transvidée dans des cuves de fermentation, où l’on y ajoute des levures. Ces levures travaillent entre sept et dix jours à transformer les sucres en alcool, créant une forme de vin que l’on distillera par la suite. La première distillation s’effectue dans un alambic à colonne, puis une seconde distillation est faite dans de petits alambics en cuivre à chauffe directe. (Pour de plus amples informations sur les procédés de distillation, visitez notre site, dans la section « blog».) Le distillat, ainsi obtenu, est mis en fut Voilà un bref survol d’une femme passionée. Levons-lui, nous aussi, notre verre et buvons à sa réussite! Par alexandre lefebvre de chêne pour atteindre son point de maturation pendant non moins de deux ans. On choisit ensuite la plus fine et la plus fraîche des crèmes que l’Afrique du Sud a à offrir, puis, on l’ajoute, avec un peu de sucre, au spiritueux vieilli à point. Le résultat est cette texture riche et onctueuse, laissant place à la saveur envoûtante et exotique du fruit de Marula. le Marula JOURNAL DE LA DISTILLERIE Édition no.10, janvier 2010 www.distillerie.tv design graphique : ektoplasme.com Un vers dans le nez Last Call/Dernier Service par alexandre lefebvre Écrit par Alexandre Lefebvre I wanna Rock and roll all night, and Danny everyday! Ce mois-ci, on s’intéresse à un membre de notre équipe pour qui la vie est un feu roulant d’aventures et de voyages. On ne s’ennuie pas lorsque l’on est Danny Rock, quand on est assis à son bar non plus, d’ailleurs. Son dynamisme et sa vivacité n’ont d’égal que sa fougue et son appétit pour la nouveauté. C’est un homme qui ne reste pas en place. Lorsqu’il n’est pas derrière le bar, il est au volant de son Westfalia emblématique, parcourant les routes du Québec et d’ailleurs. Élevé (pas très haut me direz-vous) à Laprairie, Danny est un jeune homme droit ayant déjà acquis un ensemble de valeurs des plus riches. Il aime le travail bien fait et, même s’il reconnaît l’importance des études, il n’est pas de ceux qui s’y lancent sans savoir où ça les mènera. La fin de son adolescence est parsemée d’emplois dans la vente, la boucherie, la restauration et le domaine de la sécurité. monde des médias, puis part pour l’Ouest canadien, avec un ami, afin de tenter d’enrayer le dendroctone du pin ponderosa. Ale La photo lui titille toujours l’âme et Danny saisit l’occasion offerte par une subvention fédérale pour lancer sa propre compagnie : « Photographie Nomade», une opération qu’il porte à bout de bras, et à qui les publications de La Distillerie doivent plusieurs de leurs photos, en ligne ou sur papier. Puis, vers ses 19 ans, Danny sent l’appel du large. En 24 heures, il vend sa voiture pour acheter un billet d’avion et annonce à sa famille qu’il quittera le pays deux semaines plus tard. Muni d’un billet ouvert et d’un sac à dos, il part pour l’Europe où il dévore, en bonne compagnie, une dizaine de milliers de kilomètres. À son retour, il rencontre un photographe de métier et devient son assistant, apprenant par le fait même l’ABC d’un art dont il allait faire carrière. Il entreprend des études collégiales en photo, question de parfaire ses connaissances et de rendre ses aspirations légitimes. Il travaille dans la vente, plus spécifiquement dans le e xandre Lefebvr Son énergie et sa détermination le mèneront au succès une fois de plus et c’est en voyageant que M. Rock se récompensera. Le Costa-Rica s’avère un passage initiatique important pour notre barman vedette. Il y découvre un paradis terrestre que seule l’étincelle dans ses yeux est en mesure d’exprimer adéquatement. C’est grâce, encore une fois, à son esprit décisif qu’on le retrouve derrière le bar; il avait dans l’idée qu’il travaillerait parmi nous et ce n’était qu’une question de temps avant que nous ne l’embauchions. Depuis, c’est l’explosion : il vogue en eaux nouvelles, s’éclate les papilles à chaque détour, découvre des techniques révolutionnaires tout en développant son approche de la mixologie avec ardeur. Ses cocktails sont comme des portraits, des albums de vacances dont on ne se lasse pas. Ne me croyez pas sur parole, allez le rencontrer et découvrez par vous-même où il vous emportera. Danny Rock Saveur estivale Je vous aurais fait un poème Digne des plus grands rois d’antan. Des mots pour l’élite, la crème, Des vers qui traversent le temps. Je vous aurais fait pleurer Ou alors rire, voire mieux : penser. Mes rimes vous auraient effleurés Et vos sens m’auraient encensé. Mais rien ne me vient, ma muse s’est tue. Mon encre est sèche et mon papier rompu. Ça me tue de le dire, mais je ne suis plus poète Et la raison est fort simple : y fait trop frette! J’ai peur de sortir sans manteau de laine J’arrive pas à écrire avec mes mitaines. J’ai l’inspiration poignée dans la glace Ah comme j’irais dans le Sud à la place! Au Sud du Sud, l’autre bout du monde, Je veux qu’y fasse trente degrés à l’ombre! Mais va falloir que je me fasse une raison Je peux pas enrayer la danse des saisons. Je vais donc me mettre au chaud parmi vous Me prendre un verre d’élixir de bon goût. Un somptueux cocktail à base d’Amarula L’été sur glace a sûrement ce goût-là. “ Boire, c’est comme faire l’amour. Il n’y a que les gens idiots ou malheureux qui font ça tout seul” - Paul-Loup Sulitzers - JOURNAL DE LA DISTILLERIE Édition no.10, janvier 2010 www.distillerie.tv te e! s ur. ul” Il s’en est bu, des Brandy Alexander, en 1973, durant ces dixhuit longs mois que John Lennon a par la suite surnommé son «Lost Weekend». Cocktail favori de l’ex-Beatles et des ses acolytes (Ringo Starr entre autres), le «Milkshake» (c’était le nom que la bande avait donné au cocktail) est constitué de deux parts de brandy (cognac), une de crème de cacao et une de crème et a réussi plus d’une fois à placer Lennon dans l’embarras. C’est que la mixture en est une des plus faciles à boire et ce, malgré sa grande teneur en alcool. C’est sans doute pourquoi le breuvage a été populaire dès sa création – alors qu’il ne portait que le nom d’Alexander – et ce, jusqu’à aujourd’hui. Comme nous le mentionnions le mois dernier, il n’était pas rare, du temps de la prohibition, de tomber sur des lots d’alcool de très mauvaise qualité. On se souvient que le Southside (voir notre site internet sous la section blog) était né de la volonté de quelques hommes de rendre un tord-boyaux buvable : les le Brandy Alexander circonstances menant à la naissance du Alexander sont à peu près les mêmes. Afin de masquer le goût irritant d’un «bathtub» gin, un illustre inconnu (personne n’a jamais revendiqué la paternité du cocktail) a ajouté de la crème et du sucre au spiritueux. Le Alexander devient aussitôt le favori de ces dames qui, dès lors, en font «le» digestif par excellence. Avec le temps et la fin de la prohibition, l’Américain laisse peu à peu tomber le gin au profit du brandy : le Alexander suit lui aussi la parade. C’est en 1936 que la mixture prend prénom et devient, comme on la connaît depuis, Brandy Alexander. Selon certaines sources, c’est Harry McElhone (voir notre numéro de novembre) qui aurait eu l’idée, aux alentours de 1922, de combiner les composantes du Brandy Alexander, alors qu’il travaillait au Ciro’s Club de Londres. Le maître ne fait pourtant jamais allusion au cocktail dans son ouvrage «ABC of Mixing Cocktails», ce qui permet de mettre en doute de cette allégation. Ailleurs, on prétend que le cocktail dessert aurait été in- Plus près de nous, dans la Nouvelle-Angleterre du 17e siècle, les colons se réchauffaient à l’aide d’une mixture composée de sherry, œuf, crème, sucre et épices : le Sack Posset. Et vers les années 1700, c’était au tour du Mulled Wine, un sherry sucré aux petits fruits, ou du Julep de ragaillardir les troupes. Il faut dire qu’à l’époque de Washington, les colons buvaient encore plus qu’énormément : comme le prescrivait le médecin. En effet, l’alcool était alors le principal «médicament» prescrit. Washington lui-même était réputé pour avoir «la célébration facile» et appréciait volontiers un «drink» (on ne parlait toujours pas de cocktail) ou deux. Ou trois… Ou treize (pourquoi pas?) : en l’honneur des treize états d’Amérique. C’est à la fin du 18e que les «cocktails» avec de la glace font leur arrivée et, rapidement, se popularisent. Cette mode mettra deux cents ans de plus avant d’atteindre l’Europe alors qu’en Amérique, où les étés sont chauds, les boisons servies froides deviennent quasi aussitôt la norme. Un autre siècle meurt. Et le cocktail est né! Dès 1820, l’Américain peut commander des «spécialités maison» et une première génération de mixologues commence à nommer ses créations. On commande alors des breuva- ges comme le «Moral Persuasion», le «Fiscal Agent» ou le «Sweet Ruination». C’est en 1862 que Jerry Thomas, le Grand Manitou (le premier du moins), publie son «How to Mix Drinks, or The Bon Vivant’s Companion», la première «bible» de recettes de cocktails au monde. Alors qu’en Angleterre (Terrington publie «Cooling Cups and Danity Drinks» en 1869) et en Australie le cocktail fait aussi des petits, aux États-Unis, la demande est de plus en plus grande. De 1890 jusqu’à la prohibition, c’est l’Âge d’Or du cocktail. À cette époque, il y a trois genres d’établissements servant des cocktails : 1. Les bars d’aristocrates, où l’on sert la crème de la crème à la grande et moyenne bourgeoisie, prête à payer le gros prix pour tenir entre ses mains et contre son palais la dernière création d’un «cocktalian» bouffi d’orgueil. 2. Le bar de quartier où le travailleur épuisé vient noyer sa journée pour une somme modique. On est prêt à tout pour attirer la clientèle : billard, gambling, serveuses sexy, boxe, combats de chiens, de coqs, french cancan… Les cocktails y sont composés d’un bon mélange de n’importe quoi : ici, c’est la quantité qui compte. 3. Les quelques établissements où l’homme Dans les années 1800, l’Américain moyen buvait quatre fois plus que celui d’aujourd’hui. Au 19e siècle, en Ohio, un établissement avait installé un système de gouttières sous le bar afin de permettre à ses clients de se soulager sans avoir à quitter leur place. Ainsi, ils avaient plus de temps pour boire. JOURNAL DE LA DISTILLERIE Édition no.10, janvier 2010 Une chose demeure certaine : le Brandy Alexander est un cocktail crémeux et riche qui ne saurait déplaire à personne. En digestif, accompagnement au chocolat ou rassa carrément en guise de desMarie-Ève Bou sert, une simple gorgée suffit à nous faire comprendre la chanson de Feist : «He’s my Brandy Alexander, Always gets me into trouble.» derrière le bar prend l’art de mixer des cocktails au sérieux sans oublier que l’important est de s’amuser : c’est, au fond, la principale raison pourquoi tous les clients se donnent rendez-vous à son bar. À New-York, il y a – pour ne nommer qu’eux – le Old Waldorf-Astoria, le Manhattan club, le Hoffman House, le Metropolitan (où travaillait Jerry Thomas)… Sans oublier le Old Absinthe House et le Ramos de la Nouvelle-Orléans… Et tant d’autres, de San Francisco jusque dans le Far West. Harry Johnson, Billy King et Buckskin Frank Leslie : voici des noms auxquels nous dédierons plus de mots prochainement. Les premiers cocktails sont principalement constitués de spiritueux – bien sûr – et d’amers (Peychaud’s, Angostura, orange, etc.) L’arrivée du vermouth (rouge et blanc) en Amérique est marquante : dès lors, plus de la moitié des cocktails recensés en contiennent. La fin du 19e, c’est aussi l’arrivée du tonic et la popularité croissante des allongés ou «highballs». Avec l’arrivée de la prohibition, plusieurs bartenders s’exilent en Europe. Harry Craddock publie en 1930 son «Savoy Cocktail Book» (une autre «bible») où le (Brandy) Alexander no2 fait son apparition. La vodka, plutôt timide jusqu’alors, prend de la vitesse dès les 1940, propulsée entre autres par en garniture... On ne sait pas exactement d’où vient l’appellation «cocktail». Plusieurs théories, soit, mais aucune qui soit réellement et satisfaisante et plausible à la fois. Entre les queue de coq (coq tail), queue de cheval bridé (jadis, on tressait la queue des cheveux n’étant pas pur-sang), femme de peu de vertus désirable, mais impure (cock-tail, selon une vieille expression anglaise), coquetier (verre dans lequel on servait le Sazerac), «cock» pour la tête du baril et «tail» pour le fond; sincèrement, on ne saurait choisir. Si une théorie tient un tant soit peu la route, l’histoire en est ordinaire. Et si l’anecdote est enfin attrayante, les faits, toujours ceux-là, ne concordent pas. Nous vous laissons donc faire vos propres recherches et, de là, choisir votre étymologie favorite. venté lors des noces de la princesse et comtesse de Harewood, Mary – toujours en 1922, toujours à Londres… et toujours plus ou moins bien documentée. Cocktail: une histoire américaine histoire de pub Même si le mot n’apparaît que le 13 mai 1806 dans «The Balance and Columbian Repository» (New-York), l’homme buvait déjà, et depuis un nombre assez impressionnant de lunes, des «cocktails». Pas moins de 5 siècles av. J.-C., les Égyptiens ajoutaient à leur bière dattes et fruits afin d’en améliorer le goût. On sait aussi que les Romains avaient l’habitude de boire, sans doute en raison des vertus «médicinales» de la concoction, un mélange de vin, miel et/ ou herbes. Par Marie-Eve Bourassa par Marie-Eve Bourassa le Moscow Mule, cocktail popularisé par Jack Morgan et composé de ginger-beer et vodka. 1940, c’est aussi la décennie qui assiste à la célébrité naissante du Rhum & Coke. En 1948, David Embury, une sommité du monde de la mixologie, publie son ouvrage «The Fine Art of Mixing Drinks» où il redéfinit et affine les règles de l’art du cocktail à une époque où la majorité des gens, malheuseument, ne boivent plus que pour «les effets». Les «pré-mixes» font leur apparition et, dès 1950, les campagnes publicitaires prennent en otage l’image du cocktail : on vante les attributs d’un «Manhattan Comfort» ou d’un «Gordon’s Julep». En 1960, plus personne n’a besoin de citron et de lime : le «sour mix» vient d’apparaître sur le marché! Et les années 1970, c’est la consécration (enfin) de la tequila et, avec elle, du Margarita qui vient se loger aux côtés du Martini et du Manhattan au haut de la pyramide : la Sainte Trinité des cocktails. Avec les «Punks Cocktails» des années 1980 et leurs noms, hum…, évocateurs (Blow Job, Abortion, Sex on the Beach, Cock Sucker…) quelque chose qui rappelle la vieille époque semble vouloir renaître : l’art d’avoir du plaisir tout en buvant bien. Parce que, finalement, un peu plus de deux cents ans après le «premier» cocktail, c’est toujours, à peu de chose près, la même histoire. Il y aura toujours des gens prêts à boire n’importe quoi. Et il y aura toujours des prétentieux : que ce soit derrière ou devant un bar. La meilleure recette, somme toute, c’est un peu un mélange des deux : se prendre au sérieux avec un gros grain de sel. S’amuser. C’est surtout ça, un cocktail. Par Alexandre Lefebvre & marie-ève bourassa Jadis, le bartender était un membre de «l’élite». Jerry Thomas, barman légendaire et auteur de « How to mix drinks» 1862, était mieux payé que le vice-président. Si, dans votre Brandy Alexander, vous remplacez la crème de cacao brune pour de la blanche, vous obtiendrez un Panama. Le fruit du Marula contient quatre fois plus de vitamine C qu’une orange. Amarula a d’abord été commercialisé sous la forme d’une liqueur claire, mais les ventes n’étaient pas satisfaisantes. On a ensuite introduit la boisson à la crème et son succès fut si grand qu’aujourd’hui c’est le seul produit portant le nom d’Amarula disponible en magasin. En juin 1973, Yoko Ono décide qu’elle et John Lennon doivent se séparer. Il déménage à Los Angeles en compagnie de May Pang, l’assistante du couple qui deviendra la maîtresse de Lennon pour une période de dix-huit mois. Durant cet an et demi, l’ex-Beatles est réputé pour avoir surbu. Les paroles et actes de l’auteur de «Imagine» durant ce «dérapage» ont été grandement couverts par les médias. C’est aussi à cette période qu’il renoue avec son fils, Sean. Le fruit du Marula était l’aliment de base des anciens peuples du Botswana et de Namibie. www.distillerie.tv design graphique : ektoplasme.com LE CLASSE...HIC! Les Fleurs du mal 8.00$ Alexander’s Safari 8.00$ Rock’a’rula 8.00$ / 16.00$ 0.75oz 1oz 1oz 1oz 0.25oz 0.75oz 1oz 2oz Amarula 1oz Blanc d’oeuf Compléter avec ROOT BEER 2 traits Angostura Angostura Vaporisé Amarula Campari cordial de sureau jus d’orange crème de cacao Brandy Amarula Préparation : Refroidissez un verre à martini avec des glaçons et de l’eau. Combinez tous les ingrédients dans un verre Boston rempli de glaçons. Agitez au shaker une dizaine de secondes. Versez dans un verre à martini. Décorez le tout de trois gouttes d’angostura. Préparation : Combinez tous les ingrédients dans un verre Boston rempli de glaçons. Agitez vigoureusement au shaker une dizaine de secondes. Versez dans un verre old fashionned. Décorez d’angostura flambé et d’une tranche d’orange. Préparation : Dans un verre Boston rempli de glaçons, combinez l’Amarula, le blanc d’oeuf et l’angostura. Agitez au shaker une dizaine de secondes. Versez dans un verre collins. Complétez avec de la root beer. Décorez d’une cerise Marasquin. carte de la distillerie Les Allongés Les cocktails Les Short Drinks (choix de format : 14oz ou notre fameux POT MASON) (Type Martini) Diablossima 9.50$ (généralement + concentrés en alcool) Mojito Bacardi 8.50$/17$ Tequila Sauza, Cointreau, concombre, sirop de piment fort, jus de lime Macha thé-ni 9.50$ Bombay Sapphire, coulis goyave et thé vert, jus de citron, sirop simple, verre rincé de Chartreuse verte (ajouter une purée de fraise ou framboise pour 1$ de plus ou 2$ pour pot mason) Apple Schmidtzel 9.50$ Bacardi Superior, lime en cubes, menthe fraîche, sirop simple, eau gazéifiée Bacardi Superior, Bacardi Big Apple, Sortilège, jus de citron, jus de pomme, givré de sucre et cannelle Cooler Lime-Gingembre 8.50$/17$ Bramble 9.50$ Gringo 9.50$/19$ Castro Flambé 10.50$ Hurricane 8.50$/17$ Cucumber Rickey 9.50$ Bombay Sapphire, purée de mûre, jus de citron, sirop de lavande London Dry Gin, Triple Sec, jus de lime, sirop de gingembre, amers à l’orange, gingerale Mango Cablecar 9.50$ Grand Marnier, Captain Morgan Spiced, purée de mangue, jus de citron, sirop simple, givré de cannelle Bacardi 8 ans, cubes de lime flambés à l’Angostura, sirop simple Tequila Sauza Blanco, Triple sec, cubes d’ananas, jus de citron, sirop de gingembre, bière de gingembre Poire Asiatique 8.50$ Bacardi Superior, rhum brun, purée de fruit de la passion, jus de lime, sirop simple, grenadine, jus d’orange Vodka SKYY, liqueur de melon, liqueur de litchi, purée de poire, jus de citron, sirop simple Bombay Sapphire, concombre, jus de lime, sirop simple, amers à l’orange Edinburgh Sour 10.50$ Jus de Tonneau 9.50$/19$ Southern Style 8.50$ Drambuie, Jim Beam, jus de citron, sirop simple, blanc d’œuf, servi sur glace concassée Canadian Club, Drambuie, purée de fraise, jus de citron, sirop simple, 7-up Southern Comfort, purée de fruit de la passion, jus de lime, sirop simple, amers à l’orange, mousseux Martini Asti Key Lime Colada 8.50$/17$ Sazerac 9.50$ Lady Sidecar 8.50$/17$ Spiced Mango Cobbler 9.50$ Verre refroidi au Ricard, Canadian Club, sirop simple, amers Peychaud’s Bacardi Limón, Bacardi Cóco, jus d’ananas, jus de lime, sirop simple, blanc d’œuf Yoland Gingras 9.50$ Bombay Sapphire, Grand Marnier, Campari, jus de canneberge, sirop de lavande Brandy, Galliano, Triple Sec, purée de mangue, jus de citron, sirop simple, 7-up Amarula, Navan, purée de mangue, Angostura, lait Le Patriote 8.50$/17$ Vodka SKYY, Blue Curaçao, Bacardi Razz, jus de lime, sirop simple, 7-up et Romarin. de la distillerie toute l’équipe vous souhaiter en profite pour ée 2010! Bonne Ann , du succès ent, santé Amour, arg ... dans vos études Ramos Gin Fizz 9.50$ (seulement dispo en format 14oz) London Dry Gin Bombay Sapphire (UK) Citadelle (FR) 7$ 7$ 8$ 7$ 8$ 11$ 25$ 9$ 12$ 6$ 7$ 6$ Gordon’s (UK) Hendrick’s (ÉCOS) Tanqueray (UK) Tanqueray Ten (UK) Nous sommes ouverts London Dry Gin, jus de citron, jus de lime, eau de fleur d’oranger, sirop simple, crème, blanc d’œuf, eau gazéifiée l’armoire à boissOn Brandy Pisco Demonio de los Andes De Negri Grappa (ITA) Boulard Calvados (FR) Global Cognac VS (FR) Gaston de Lagrange Cognac VS (FR) Gaston de Lagrange Cognac VSOP (FR) Marnier Fine Champagne Cognac XO (FR) Rémy Martin Grand Cru Cognac VS (FR) Rémy Martin Cognac VSOP (FR) Raynal VSOP (FR) Aussi disponible au Bar à mojitos Bacardi 6$ 9$ 7$ 9$ Rhum/Spiritueux de canne à sucre 7$ Appleton V/X (JAM) Appleton Reserve (JAM) 8$ Bacardi Superior (PRI) 6$ Bacardi Gold (PRI) 7$ Bacardi 8 ans (PRI) 8$ Bacardi Big Apple (PRI) ** 7$ Bacardi Cóco (PRI) 7$ 7$ Bacardi Limón (PRI) Bacardi Razz (PRI) 7$ Cachaça Leblond (BRA) 7$ Cachaça Pitú (BRA)** 7$ Captain Morgan Black (PRI) 7$ Captain Morgan Spiced (PRI) 7$ Cockspur 12 ans (BRB) 9$ 7 jours à partir de 16h! ** IMPORTATION PRIVÉE Notez, les dispos peuvent varier selon la SAQ Havana Anejo (CUB) Havana 7 ans (CUB) Sailor Jerry Spiced (VIR)** St-James Ambré (MTQ) 7$ 8$ 9$ 8$ Tequila Copas 4 Reposado 100% Agave: 13$ Sauza Blanco 7$ Don Julio Blanco 100% Agave** 12$ Don Julio Reposado 100% Agave** 13$ Don Julio Anejo 15$ 100% Agave** Jose Cuervo Tradicionale 100% Agave** 9$ Cazadores Reposado 100% Agave** 9$ Sauza Plata Tres Generaciones 100% Agave** 12$ JOURNAL DE LA DISTILLERIE Édition no.10, janvier 2010 Sauza Reposado Tres Generaciones 100% Agave** 13$ Sauza Anejo Tres Generaciones 100% Agave** 14$ Sauza Hornitos Plata 100% Agave** 12$ Sauza Hornitos Reposado 13$ 100% Agave** Vodka Absolut (SWE) Absolut Citron (SWE) Grey Goose (FR) Grey Goose Le Citron (FR) Grey Goose L’Orange (FR)** Grey Goose La Poire (FR)** Ketel One (NLD) Moskovskaya (RUS) SKYY (ÉU) Zubrowka (POL) www.distillerie.tv 7$ 7$ 9$ 9$ 9$ 9$ 7$ 7$ 6$ 7$ Whisk(e)y (Écosse) Balvenie 12 Bowmore 12 Chivas 12 Dewar’s Glenfiddich 12 Glenfiddich 18 Glenlivet 12 Glenmorangie 10 Glenmorangie PORT Finish Grant’s Jonnie Walker Red Lagavulin 16 Macallan 12 11$ 11$ 9$ 6$ 8$ 13$ 9$ 12$ 12$ 7$ 7$ 15$ 12$ Whisk(e)ys du monde Basil Hayden’s (ÉU) Blanton’s (ÉU) Bulleit (ÉU)** Bushmill’s (IRL) 9$ 9$ 9$ 7$ Canadian Club (CAN) 6$ 8$ Canadian Club 12 (CAN) Evan William’s (ÉU) 10$ Gentleman Jack (ÉU) 8$ Jack Daniel’s no.7 (ÉU) 6$ Jack Daniel’s Single Barrel (ÉU)9$ 6$ Jameson (IRL) Jim Beam (ÉU) 7$ Knob Creek (ÉU) 9$ Maker’s Mark (ÉU)** 8$ Wild Turkey (ÉU) 7$ Woodford Reserve (ÉU) 9$ Photos par Danny Rock - photographienomade.com design graphique : ektoplasme.com COCKTAILS DU MOIS. Ce mois-ci, plusieurs bartenders de la Distillerie se sont prêtés au jeu et ont décidé de relever le défi lancé par l’administration et l’agence LCC: créer trois cocktails originaux à base d’Amarula. Nous vous offrons les trois grands favoris: «Les Fleurs du mal», une création de Jonathan Homier; le «Alexander’s Safari», une variation du Brandy Alexander réalisée par Philippe Haman; le «Rock’a’rula», une vision de notre barman du mois, Danny Rock.