Calorie - Activité d`enseignement et de recherche. Supports de

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Calorie - Activité d`enseignement et de recherche. Supports de
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Deux poids,
deux mesures
Qu’est-ce qu’une calorie? Le terme est utilisé tantôt pour évaluer
la quantité d’énergie contenue dans un aliment, tantôt pour
quantifier la dépense d’une activité. Elle s’affiche aussi sur
les appareils électroniques de mesure de l’effort
(cardiofréquencemètres, rameurs, ergocycles, sport testers, etc.).
Mais si l’on s’avise de faire le lien entre ces grands domaines
d’application, on s’aperçoit que rien ne concorde.
Pourquoi? C’est ce que nous allons essayer de comprendre.
Pour commencer, rappelons que la calorie est une unité
de mesure énergétique et qu’elle peut donc revêtir
diverses formes, chimique ou mécanique. Ces deux sortes
d’énergie sont évidement en rapport l’une avec l’autre.
Mais lorsqu’on s’aventure sur le terrain de la comparaison,
on découvre que la première est deux à quatre fois plus
importante que la seconde. L’explication est assez simple
même si elle renvoie aux grands principes de la thermodynamique. A chaque fois que l’on transforme un type
d’énergie en un autre, il se dégage de la chaleur. Prenons
le cas d’un coureur à pied. Il devra consommer deux calories d’énergie chimique à partir des aliments pour fournir
une calorie d’énergie mécanique. Le rendement du fonc-
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tionnement des muscles est ici de l’ordre de à 50%: une
moitié sert à avancer, l’autre est dissipée sous forme de
chaleur. Pour le cycliste, le bilan est nettement moins
glorieux: 25% seulement. Un quart de son énergie seulement se trouve converti en puissance pour vaincre les
résistances (aérodynamique et roulements) s’il roule sur le
plat, et pour vaincre les forces de gravité s’il lui prend
l’envie d’escalader aussi les côtes. Les trois autres quarts
réchauffent le coureur et l’atmosphère. Pourquoi une telle
différence? C’est tout simplement que la course bénéficie
d’un mécanisme très ingénieux de conservation d’énergie
grâce aux composantes élastiques des tendons et des
muscles des membres inférieurs. On parvient ainsi à
stocker de l’énergie dans les phases d’étirement au
moment du contact du pied au sol et à la restituer dans les
phases de raccourcissement lors de la poussée. En
cyclisme, ce n’est pas le cas. Les muscles ne sont jamais
étirés et, à chaque tour de pédalier, il faut réinjecter un
maximum d’énergie dans le système. D’où le rendement
nettement plus modeste. En natation, c’est pire encore.
L’efficacité de la locomotion est tout simplement désastreuse dans un milieu instable. Surtout pour les mauvais
nageurs! En outre, les masses musculaires qui participent
à la propulsion sont relativement modestes par rapport à
celles qui permettent la locomotion terrestre sur les deux
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pieds. Elles sont également plus riches en fibres rapides et
travaillent à une intensité élevée. Or on sait que le rendement musculaire se dégrade lorsque s’accroit la part
d’anaérobie dans la fourniture d’énergie. Tout cela
explique le mauvais rendement.
Des calculs indigestes
A ce stade, on comprend que si un coureur à pied, un
cycliste ou un nageur mange une tarte aux pommes,
chacun en tirera la même énergie mais que celle-ci ne
sera pas utilisée avec la même efficacité selon l’activité
exercée. Essayons de comprendre pourquoi les rendements musculaires varient à ce point et où se produit
exactement la déperdition calorique. La synthèse de l’ATP
tout d’abord. On sait (ou on ne sait pas) que la molécule
d’ATP (adénosine triphosphate) exerce un rôle comparable à un accumulateur énergétique dans la mesure où
elle contient l’énergie qui sera utilisée pour toutes les
tâches incombant à notre organisme. Cette molécule doit
être resynthétisée en permanence. Pour cela, il existe
deux filières bien connues des sportifs, du moins par
leurs noms: aérobie et anaérobie. Dans le premier cas, la
synthèse de l’ATP se déroule au sein des mitochondries
en présence d’oxygène. Le rendement s’avère alors particulièrement bon (de l’ordre de 50%). Dans le second,
l’oxygène fait défaut et le rendement chute sévèrement
(quelques pour cent à peine). Voilà la première grande
source de déperdition d’énergie dont l’importance varie
selon le type d’effort. Vous trouvez peut-être cela un peu
compliqué? Vous n’avez encore rien vu... Car il faut aussi
compter avec un autre facteur qui dépend, lui, directe-
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ment des mécanismes intracellulaires de contraction: la
mise en action des têtes de myosine. Par de minuscules
mouvements de bascule, celles-ci s’accrochent d’abord
et tirent ensuite sur les filaments d’actine qui se trouvent
dans leur voisinage ce qui entraîne le raccourcissement
du muscle. Or, qui dit mouvement dit production de
chaleur. En l’occurrence, on estime le rendement des
têtes de myosine à 50% environ. Soit une calorie utile
pour une calorie perdue sous forme de chaleur. Prenons
le cas d’un exercice aérobie. Au total, nous aurons un
rendement de la synthèse d’ATP de l’ordre de 50% et un
rendement thermodynamique des têtes de myosine de
nouveau égal à 50%. Ce qui aboutit à un rendement
musculaire de 25% (0,5 x 0,5 = 0,25). On retrouve ici l’estimation donnée dans le cadre d’un exercice de contraction simple, style pédalage. Pour un nageur, la situation
est moins enviable. Il faut savoir que le rendement thermodynamique des têtes de myosine diminue légèrement
au sein des fibres rapides. De plus, la part grandissante
des mécanismes anaérobie dans la synthèse de l’ATP fait
littéralement plonger le résultat. A peine quelques pour
cents! Quant au coureur, on rappelle encore une fois qu’il
bénéficie d’un système de restitution d’énergie qui lui
permet de mieux conserver son énergie et d’atteindre de
ce fait des rendements exceptionnels de l’ordre de 50%.
Voilà! Nous sommes désormais en mesure de calculer les
équivalences entre les calories consommées et les calories utiles en fonction du type d’activité. Pour obtenir les
secondes, il suffit de multiplier les premières par la valeur
du rendement. Et le tour est joué. On peut aussi procéder
à l’inverse et partir de l’énergie mécanique pour évaluer
Le rendement du
muscle est meilleur
en course à pied
qu’à vélo.
Démonstration
par le cylocrossman
belge Sven
Vanthourenhout.
Quant à la natation,
elle a le pire de tous
les rendements!
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LES CALORIES
la consommation calorique réelle. C’est ainsi que procèdent la plupart des appareils de mesure de l’effort. En
résumé, ils divisent l’énergie mécanique par 0,25 (ou ils la
multiplient par 4; le résultat étant le même) pour obtenir
le nombre de calories en termes d’énergie chimique
consommée. Mais on doit bien avoir en tête qu’il s’agit
d’une estimation et que celle-ci est susceptible de varier
de façon parfois très importante en fonction d’une multitude de paramètres comme la nature des contractions ou
l’intensité de l’effort.
Le sucre de trop
A présent que toutes ces questions relatives aux conversions mécaniques et chimiques n’ont plus de secret pour
vous, on peut passer aux travaux pratiques avec mission
pour chacun d’équilibrer ces deux grandeurs. Il va de soi
que celui qui consomme plus que ce qu’il dépense
gagnera des kilos. Et inversement pour celui qui bouge
beaucoup et qui mange peu. Pour maintenir son poids,
tout l’art consiste à garder une égalité entre les entrées et
les sorties. Cela n’a rien d’évident. Dans les pays riches, le
dérèglement du système constituerait même plutôt la
règle. Les statistiques révèlent qu’une prise moyenne de
750 grammes de masse grasse par année survient régulièrement après l’âge de 20 ans. Rapporté à une journée,
cela correspond à 17 calories excédentaires, soit à peine
moins que la valeur contenue dans un seul morceau de
sucre (20 calories)! Cette prise de poids généralisée serait
la conséquence d’une vie de patachon, combinée à l’héritage d’anciens préceptes inappropriés. Ainsi le “vide-tonassiette” de l’enfance entraîne des effets délétères indéniables à long terme. D’autant que le nombre de cellules
adipeuses est normalement fixé dans la première partie
de la vie. Ensuite, on ne pourra plus que jouer sur le
niveau de remplissage de chacune de ces cellules. Et ce
n’est pas facile. Ces mauvaises bêtes crient famine dès
Les idées fausses ne font pas maigrir
Ce schéma tiré d’un article de Nature représente les dépenses
caloriques sous la forme d’une colonne avec une partie haute très
variable selon les individus et une partie basse plus ou moins identique pour tous (1). Pour perdre du poids, on doit donc jouer sur
les étages supérieurs, le but étant de faire en sorte que les
dépenses énergétiques dépassent la valeur des apports quotidiens. Pour cela, il n’est pas nécessaire de se focaliser sur le type
de carburant. Oubliez donc toute cette littérature qui préconise de
se soumettre à des efforts d’intensité modérée qui correspondent
en théorie à une oxydation maximale des graisses. En réalité, tous
les exercices sont les bienvenus. Même les plus intenses. Certes,
ceux-ci auront tendance, dans un premier temps, à épuiser les
réserves en glucides. Ce n’est pas grave. Ce qui compte c’est
qu’ils participent à creuser le déficit calorique. De plus, ils entraînent dans les heures qui suivent une élévation durable du métabolisme qui génère un effet anorexigène. En clair, on n’a pas faim
après s’être défoncé la couenne. Ils augmentent aussi le niveau de
dépense dans la tranche thermogénèse du schéma. Les physiologistes désignent ce phénomène sous les initiales EPOC (Excess
Post-exercise Oxygen Consumption). Cette période peut durer
quelques dizaines de minutes ou beaucoup plus longtemps. Après
un marathon, par exemple, on a mesuré que le métabolisme énergétique peut s’élever au-dessus des normes habituelles pendant 2
ou 3 jours. L’origine de cette décroissance lente du métabolisme
dans le décours de l’exercice correspond à la nécessité de
restaurer l’homéostasie dans l’organisme et en particulier de
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refaire les stocks énergétiques de phosphocréatine et glycogène
et d’assurer le remodelage du muscle en raison des inévitables
micro-dommages qui accompagnent l’exercice intense. Lorsqu’on
fait le total, on s’aperçoit que l’énergie dépensée dans l’effort
proprement dit peut-être augmentée de quelque 15-20% grâce à
l’EPOC. Une sorte de bonus des exercices courts et intenses. Voilà
qui réjouira sans doute tous ceux qui disposent de peu de temps à
consacrer à leur propre forme. Du moins, c’est ce qu’ils disent... A
raison de quelques séances par semaine, ils peuvent retrouver la
ligne! Et puisque nous en sommes à balayer les théories
fumeuses, réglons aussi le sort du “spot réduction” qui voudrait
nous faire croire que l’on maigrit de façon spécifique en fonction
des chaînes musculaires sollicitées. Laissez cela aux bateleurs des
chaînes de télé-achat. C’est totalement faux. Une observation
systématique de la masse grasse des deux bras des tennismen
suffit à révéler l’inanité du raisonnement. Certes, l’un est un peu
plus musclé que l’autre mais le taux de graisses reste similaire.
Bref on ne maigrit pas à la demande comme l’imaginent encore
beaucoup de gens au moment de concevoir leur petit programme
de gymnastique.
Comment maigrir à ne rien faire?
Intéressons-nous à présent à la partie basse du schéma, celle qui
représente les dépenses basales de l’organisme. On désigne ainsi
tout ce qui est nécessaire au maintien des fonctions vitales de
l’organisme: respiration, circulation, digestion, fonctionnement du
cœur et du cerveau... Tout cela coûte de l’énergie. Nous avons dit
que ce métabolisme de base bougeait peu selon les individus de
même poids. En réalité, cela dépend aussi du morphotype. Il est
plus élevé chez les sujets musclés et plus faible chez les individus
moins costauds. Tout simplement parce que le tissu musculaire
demeure un grand consommateur d’énergie. Même lorsqu’on ne
bouge pas. Encore un élément à verser au dossier des vertus du
sport. De plus il varie en fonction de l’alimentation. Lors d’un
régime hypocalorique, l’organisme diminue son métabolisme de
base et il l’augmente au contraire si l’on opte pour un régime
hypercalorique. Cette thermogénèse adaptative vise en somme à
s’opposer aux fluctuations. Enfin, il varie selon les individus.
Certaines personnes bénéficient ainsi d’un processus appelé
“cycles futiles” qui désigne une augmentation du métabolisme
énergétique sans que cela s’accompagne d’un travail mécanique
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Quelle calorie
est-il?
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qu’elles perçoivent la moindre tendance baissière et une
économie de sauvegarde se met immédiatement en
place qui rend la poursuite de l’amaigrissement de plus
en plus compliquée. A la reprise d’une alimentation
normale, le poids regrimpe en flèche. D’où ce phénomène bien connu du yo-yo nécessairement associé à tout
régime hypocalorique drastique sur de courtes durées. Le
premier enseignement à tirer de ce puissant mécanisme
physiologique sera d’y aller tout en douceur. Pour celui
qui veut perdre du poids, l’important n’est pas de maigrir
vite mais de maigrir longtemps! Le succès d’un contrôle
durable de la masse corporelle ne peut s’accompagner
que d’une modification, apparemment modeste, mais
durable des habitus. Juste avant de passer à table,
rappelez-vous le morceau de sucre de trop. Essayez
plutôt de terminer le repas avec une très légère sensation
de faim. Cette façon de faire vise à compenser la
tendance naturelle de l’hypothalamus à faire des
plus important. Ce découplage entre la dépense énergétique et la
synthèse d’ATP est l’œuvre d’une famille de protéines mitochondriales désignées par les lettres “UCP” pour “UnCoupling
Proteins”. Elles sont massivement exprimées dans la graisse
brune chez les animaux polaires qui sont capables d’atteindre de
très hauts niveaux de dépense calorique de façon à assurer une
bonne thermogénèse. Grâce à ce système, les ours blancs et les
marmottes sont peu menacés d’obésité. Et les hommes? Vous
l’aurez deviné, nous sommes moins bien armés pour brûler de la
graisse gratuitement. Notre métabolisme s’élève un peu lorsqu’il
fait froid... mais pas beaucoup. Ne serait-ce pas tout de même une
piste à creuser? A l’heure où tous les laboratoires pharmaceutiques du monde rêvent de mettre au point une pilule anti-obésité,
les chercheurs s’intéressent de près à ces protéines découplantes
et plus précisément à l’une d’entre elles, l’UCP3 qui s’exprime au
sein du muscle. De façon assez intéressante, une corrélation a
déjà été établie entre le niveau d’expression d’UCP3 au sein des
muscles et la dérive de la consommation d’oxygène lors de l’effort
à intensité continue. C’est assez logique finalement. Plus l’athlète
possède un niveau élevé d’UCP3, plus ses mitochondries doivent
consommer d’oxygène pour synthétiser la même quantité d’ATP.
Présenté de la sorte, on pourrait se dire que cette particularité
présente certes un intérêt lorsqu’on ne veut pas grossir mais
qu’elle constitue aussi un élément délétère pour la performance
en endurance. On peut aussi la voir différemment. Car le découplage offert par ces fameuses protéines présente l’avantage de
protéger les tissus des radicaux libres produits en masse à haute
intensité. La composante lente de VO2 représenterait alors un
mécanisme de protection plutôt qu’un phénomène délétère pour
la performance. De nouvelles recherches devraient progressivement éclaircir cette relation. Et certains fantasment déjà sur les
possibles applications. Ainsi les souris chez lesquelles l’UCP3 est
surexprimée mangent plus tout en ne grossissant pas et affichent
un taux d’insuline diminué (c’est bon pour la longévité). Le rêve!
Malheureusement, il est très difficile de surexprimer l’UCP3 chez
l’homme. La course en descente et les stages en altitude le
peuvent mais il s’agit d’une augmentation transitoire qui a probablement un impact très limité sur le métabolisme. D’autres
méthodes sont actuellement en voie d’exploration. On n’a pas fini
d’en parler. RC
(1) Brandford and Spiegelman Nature 404, 652-660 (6 April 2000)
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Sous le règne de
l’hypothalamus
Les sportifs
dépensent plus
d’énergie. Même
au repos. Ici les
footballeurs
allemands Mario
Gomez, Bastian
Schweinsteiger et
Kevin Kuranyi.
réserves. Cette glande à la base du cerveau (à ne pas
confondre avec Hippopotamus, la marque de restaurantgrill) se comporte comme le véritable chef d’orchestre de
l’organisme. Elle agit notamment comme centre de la
satiété en déclenchant la sensation de faim et en décidant aussi quand il est temps d’arrêter de manger. Seulement voilà, l’hypothalamus du bon chrétien (mais c’est
pareil pour les musulmans, les bouddhistes et même les
non-croyants) est angoissé de nature! Il redoute les privations. On aura beau le persuader qu’en cette période
d’abondance, nous ne sommes pas immédiatement
menacés par la famine, rien n’y fera. Il règle les apports
toujours légèrement au-dessus de ce qui serait strictement nécessaire. Ce réflexe est ancré très profondément
dans notre comportement d’espèce et sans doute a-t-il
permis à l’humanité de traverser les siècles malgré les
terribles périodes de vaches maigres. Il était même plus
crucial encore pour les femmes chargées
de donner la vie, ce qui explique probablement un taux de masse grasse un peu
supérieur pour la gent féminine. Cette
tendance à la suralimentation varie aussi
selon les individus. Mais le fait qu’elle soit
aussi largement répandue offre un socle
solide d’arguments à tous ceux qui expliquent que nous sommes génétiquement
programmés pour devenir obèses. Vu
sous cet angle, le combat contre les kilos
semble perdu d’avance. Tout cela par la
faute de ce maudit hypothalamus.
Coupable tout désigné de nos bourrelets
disgracieux. Et pourtant, lorsqu’on fait
l’économie de l’ensemble du système, on
s’aperçoit que l’hypothalamus ne
constitue pas un mauvais juge de paix. Il
fonctionne presque aussi précisément
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qu’un thermostat chargé de réguler la température d’un
appartement puisque pour un apport quotidien de l’ordre
de 2000 Calories chez le sédentaire, il ne se trompe que
de 17 Calories soit une erreur inférieure à 1%. C’est peu
de chose quand on pense à la diversité des menus qui
égayent notre existence et aux petites folies auxquelles
on s’adonne goulûment. Comment l’hypothalamus
arrive-t-il à détecter aussi précisément la quantité de
calories cachées dans la structure profonde des
aliments que nous ingérons? C’est même une source
d’émerveillement. Il existe cependant un cas de figure
où le centre de régulation de la satiété commet des
erreurs. Il sous-estime la ration calorique lorsque le
repas est riche en lipides. Le meilleur moyen de dribbler
l’hypothalamus consiste donc à se goinfrer de ces
substances qui flattent le palais mais dérèglent le
système de régulation. D’où les sages recommandations
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LES CALORIES
de ne pas abuser des produits gras. Cela implique de
résister aux offensives des industriels de l’agro-alimentaire et de la restauration rapide qui ont bien compris
comment nous empoigner par notre point faible. Une
savante proportion de lipides et de sucres et nous voilà
aimantés comme des mouches sur le crottin. Facteur
aggravant: les aliments subissent des transformations
importantes avant d’atteindre notre assiette et cela
sème le trouble auprès de l’hypothalamus. Tout se
passe comme si le chef d’orchestre ne reconnaissait
plus ses musiciens lorsque ces derniers se présentent
trop maquillés pour la représentation. Enfin, plus on
avale vite, plus faible est le pouvoir discriminant de l’hypothalamus. Heureusement, la “slow food attitude”
progresse en réaction aux fast-foods. Qui l’emportera?
Notre avenir en dépend. Car si les Américains possèdent
sur nous une bonne décennie d’avance, avec les Allemands dans leur sillage, il ne faut pas se leurrer: nous
suivons malheureusement de très près. Cette obésité
galopante peut alors être perçue comme le résultat de
déterminants physiologiques mariés à une organisation
sociale totalement schizophrène qui pousse sans cesse
à la consommation et érige dans le même temps de
solennelles mises en garde.
Les maigres ambitions
Autre phénomène curieux: cette prise de masse grasse
de 750 grammes par an que nous évoquions pour le Français moyen ne se voit pas sur la balance. Elle est partiellement compensée, si l’on peut dire, par une perte de
masse maigre de l’ordre de 250 grammes par an. En clair,
on perd du muscle! Au total, le bilan de la prise de masse
corporelle s’établit à 750 - 250 = 500 grammes, soit un
demi-kilo par an, ou encore 10 kilos entre 20 et 40 ans.
Qu’en est-il pour vous? Echappez-vous à cette règle? Si
c’est le cas, tant mieux. Sinon voyons ce qu’il est possible
de mettre en œuvre pour limiter la casse. La première
solution qui consiste à prendre l’habitude de sortir de
table avec une très légère sensation de faim, n’est pas
évidente à réaliser car le comportement autour d’un
repas est éminemment complexe. Il ne répond pas seulement à des impératifs physiologiques mais aussi à des
notions de plaisir, d’apaisement des angoisses et des
comportements culturels difficilement expurgeables. Ce
premier précepte risque donc bel et bien d’être un vœu
pieux. Il faudra alors le combiner avec d’autres stratégies
qui visent cette fois à augmenter la dépense énergétique.
Le recours à des exercices réguliers représente de loin le
meilleur traitement du surpoids et des problèmes cardio-
De la suite dans les muridés
Devinette: je suis capable d’ingurgiter 60% de calories de plus tout en
restant mince et lorsque je cours je tiens sans fatigue sur des
distances 25 fois plus longues que mes congénères. Qui suis-je?
Réponse: elle se trouve dans un article consacré à la puissance du
génie génétique (1). Ces performances sont effectivement celles
d’une souris surnommée “Speedy Gonzales” qui possède cette particularité de surexprimer une enzyme particulière: la PEPCK (Phosphoenol Pyruvate Carbo Kinase) ce qui lui permet de développer le
nombre de ses mitochondries dans des proportions impressionnantes
et de brûler un maximum de calories à l’effort (2). Spontanément,
cette souris recherche d’ailleurs le moyen d’assumer cette exceptionnelle vigueur. Elle se montre plus active que les autres dans toutes
sortes de situations. Elle vit aussi plus longtemps et en meilleure
santé. Doit-on considérer le PEPCK comme une enzyme miracle et
souhaiter que l’on trouve très vite le moyen de bidouiller aussi le
génome humain pour obtenir les mêmes effets? Pas sûr. Car on a
remarqué parallèlement que les souris PEPCK sont anormalement
agressives et, dans notre monde de brutes, on aurait plus volontiers
besoin d’un gène qui rende doux et généreux plutôt que de voir
produire à la chaîne des générations d’increvables bagarreurs.
Evidemment, s’il s’agit de remporter des médailles, un peu d’agressivité n’est pas à dédaigner. Cela vaut aussi dans d’autres domaines qui
auraient plutôt tendance à valoriser les caractères belliqueux. Pour
s’en persuader, il suffit d’analyser le profil des grands prédateurs du
monde de la finance et de la politique. Bref, on a peu de chance de
dissuader le monde avec l’argument de l’agressivité décuplée.
Heureusement, un obstacle de taille se dresse face à cette forme de
dopage par surexpression de l’enzyme. Le bricolage génétique semble
pour le moment quasiment impossible à réaliser chez l’homme. Il
nécessiterait une intervention dans l’œuf même et on ne connaît
encore personne qui soit assez fou pour oser ce genre de combine
hasardeuse. Ceci dit, il n’est pas absolument nécessaire de disposer
du gène pour mettre ces bonnes recettes en application. L’exercice
physique régulier suffit à déterminer tout ce que l’on a évoqué précédemment: de l’augmentation du nombre de mitochondries en passant
par une meilleure utilisation des graisses et la fonte des réserves
Plus loin,
plus vieux,
plus fort
adipeuses trop abondantes et si dévastatrices pour les principales
fonctions de l’organisme. On reste svelte et on vit mieux et plus longtemps. Moralité: de toutes les recettes qui promettent une éternelle
jeunesse, la dépense calorique tout azimut est probablement la plus
efficace. Avec ou sans PEPCK!
(1) Lire Sport et vie n°106 - Génétique: bienvenue dans le futur.
(2) Hanson and Hakimi. Born to run: the story of the PEPCK-Cmus mouse. Biochimie
90 (2008) 838-842
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L’Américain
Allen Johnson,
quadruple champion
du monde du
110 mètres haies:
expert en
motivation.
(*) Notez bien que
ces logiciels proposent
des résultats très
approximatifs. Et la
stratégie qui consiste
à les utiliser pour
organiser la perte de
poids et contestée par
de nombreux
spécialistes. En même
temps, ils permettent
de se faire une idée
des grands équilibres
en jeu dans
l’organisme.
Voir www.coachgym.com/calorie.html.
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vasculaires ou de diabète qui peuvent lui être associés. La
liste des affections pour lesquelles l’exercice possède un
impact positif est en fait bien plus longue mais leur
énumération nous forcerait à sortir de notre propos. En
revanche, on ne peut éluder la triste réalité de l’accroissement des phénomènes de surpoids chez les enfants. Les
jeux vidéo, la télévision et une organisation de la scolarité
complètement déphasée par rapport à la vitalité qui
caractérise les jeunes enfants font de ceux-ci une génération sacrifiée et vouée à présenter plus tard des
problèmes en termes de santé publique. Parents, professeurs, éducateurs, tous devraient être dès lors
convaincus de l’urgence de remédier à cette situation en
encourageant l’activité physique. Car celle-ci ne se
contente pas d’élever de façon significative la dépense
d’énergie quotidienne, elle améliore de surcroit la qualité
de jugement de l’hypothalamus. Le chef d’orchestre
gagne en précision dans la tâche qui consiste à assurer
un meilleur équilibre entre les entrées et les sorties. En
d’autres termes, on risque beaucoup moins de terminer
le repas avec ce léger excédent calorique si préjudiciable
à long terme. Enfin, l’exercice régulier permet de développer la masse musculaire dont on sait qu’elle est énergivore. Même au repos! Vive l’exercice, donc. A condition
toutefois de ne pas ruiner vos acquis en vous ruant
ensuite sur des sodas et autres friandises. Contentezvous d’une légère collation (un biscuit, un fruit) qui
permettra de corriger la chute de glycémie. Efforcez-vous
de boire aussi quelques verres d’eau pour compenser les
pertes hydriques. Cela suffit. Quelques trucs permettent
de mieux résister à la tentation. Il faut savoir par exemple
que les efforts intenses, surtout dans la chaleur, ont
tendance à couper la sensation de faim. L’hypothalamus
se calme en cas d’élévation de la température corporelle.
C’est d’ailleurs la raison pour laquelle on n’éprouve guère
d’appétit lorsqu’on fait de la fièvre. A l’opposé, les exercices en milieu froid ou dans l’eau, stimulent énormé-
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ment la sensation de faim, en particulier l’appétence pour
les produits gras. Si l’on veut maigrir, le badminton est
plus efficace que la natation ou le cyclisme en hiver. N’hésitez pas non plus à changer régulièrement le contenu et
l’intensité des séances. Pendant longtemps, on soutenait
à tort qu’il fallait effectuer de longues sorties à un rythme
modéré. Alors que les entraînements en pleine bourre
font tout aussi bien voire mieux lorsqu’il s’agit d’effacer
les rondeurs. Enfin, on doit s’efforcer de composer son
alimentation en tenant compte de la valeur calorique des
aliments, cette dernière n’étant pas toujours bien perçue
par l’hypothalamus. Des petits logiciels peuvent vous y
aider (*). Vous saisissez le menu du jour et le logiciel vous
renvoie le nombre de calories correspondant. A charge
pour vous de les dépenser intégralement sans accumuler
les retards de paiement, et sans en perdre le moindre
morceau de sucre! Robin Candau
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Comment
c’est possible?
Les nouveaux appareils de mesure de
l’intensité de l’exercice se targuent de
fournir un tas d’informations qui
auparavant nécessitaient de se rendre
dans un laboratoire d’effort.
Mieux même, on dispose non pas d’une
seule, mais de deux technologies
distinctes permettant cette prouesse.
Reste à savoir s’ils sont fiables…
La consommation d’oxygène au repos
Ce n’est pas le plus difficile à établir. On part du
principe que la consommation d’oxygène est de +/5 ml/min/kg et qu’elle varie relativement peu d’un
individu à l’autre. En multipliant cette valeur basale
par le poids du sujet, on connaît sa consommation
d’oxygène au repos. Du moins, on s’en approche.
La consommation d’oxygène à l’effort
Là, cela devient plus mystérieux. Selon l’équation
de Fick, la quantité d’oxygène consommé (VO2) est
égale à chaque instant à la fréquence cardiaque
(FC) multipliée par le volume d’éjection systolique
(VES) et par la différence artério-veineuse (DAV). La
formule s’écrit donc: VO2 = FC x VES x DAV. Cette
valeur augmente évidemment avec l’intensité de
l’exercice jusqu’à son plafond appelé VO2 max.
Mais le fait que cette consommation d’oxygène
atteigne un maximum ne signifie pas forcément
que les trois paramètres qui la composent soient
eux aussi à leur apogée. D’ailleurs ce n’est pas le
cas. On sait par exemple que le volume d’éjection
systolique augmente avec l’intensité de l’effort
puis diminue légèrement lorsqu’on atteint des
fréquences cardiaques proches du maximum,
surtout chez les sujets peu entraînés. Le cœur n’a
plus le temps de se remplir correctement entre
deux contractions. De la même façon, on observe
que la différence artério-veineuse baisse légèrement pour des très hautes intensités d’effort. Là
encore, il faut incriminer la vitesse de passage du
sang. Les organes n’ont plus le temps de prélever
autant d’oxygène qu’ils le font à intensité moyenne.
Donc si l’on reprend cette équation, on s’aperçoit
tout de suite que sur ses trois termes, un seul est
connu: la fréquence cardiaque. Les deux autres
doivent donc être déduits des informations
données au moment du paramétrage. Lesquelles?
L’âge, la taille, le poids (nous l’avons dit), la
fréquence cardiaque de repos et une auto-évaluation du niveau de forme. Les appareils de la marque
Polar vous invitent ainsi à vous situer sur une
échelle qui comporte quatre barreaux: du parfait
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LES CALORIES
sédentaire jusqu’à l’athlète entraîné. A priori, c’est plutôt
mince. Pour estimer la VO2 max sur base de données
aussi générales, les ingénieurs ont forcément dû
emprunter de nombreux raccourcis pour établir une série
d’algorithmes dont on aurait aimé tester la vraisemblance. Malheureusement, ceux-ci sont maintenus dans
le plus grand secret. Concurrence oblige! Il faut dire que
la compétition est rude entre tous ces fabricants. Et les
innovations audacieuses. Pour affiner encore les pronostics, les modèles haut de gamme de chez Polar proposent
un test qui consiste à mesurer la fréquence cardiaque de
repos en position allongée pendant 3 à 5 minutes. Cela
permet d’enregistrer la variabilité cardiaque, un paramètre très dépendant de la forme du sujet. Là encore, on
ignore les détails du mode de calcul. On sait simplement
qu’une armée de physiologistes a participé à sa mise au
point. On peut donc supposer qu’ils sont arrivés à des
résultats satisfaisants. Notez enfin qu’il existe un moyen
simple pour rendre les mesures beaucoup plus fiables. Il
suffit de paramétrer soi-même les appareils avec les
valeurs réelles d’un test d’effort réalisé en laboratoire peu
de temps auparavant.
Retour aux sources
En un quart de siècle, les cardiofréquencemètres ont littéralement
envahi le marché du sport et l’on cherche désormais à banaliser
d’autres fonctions pour relancer l’intérêt pour ces appareils de
mesure de l’effort et bien sûr maintenir les ventes à leur meilleur
niveau. Des appareils comme le FA20 visent précisément ces
consommateurs au profil plutôt urbain, pas spécialement sportifs,
plutôt à la recherche d’une bonne méthode pour perdre quelques
kilos excédentaires. Dans ce contexte, on comprend tout l’intérêt
qu’offre l’estimation de la dépense énergétique journalière. Cette
fonction existait sur les précédents appareils de cardiométrie mais
elle impliquait de conserver sa ceinture thoracique tout au long de la
journée. Le FA20 est beaucoup plus simple. Il ne comporte ni altimètre ni cardiofréquencemètre. Les résultats sont traduits en termes
très simples avec la durée d’activité physique au cours de la journée
écoulée et le temps passé dans chacune des deux zones d’intensité
que comporte l’appareil: santé et forme. Certains s’étonneront d’une
telle dichotomie. Rappelons alors qu’on cible ici une population qui
n’a pas forcément envie de s’encombrer de savants calculs. Pour
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Le métabolisme de base
Pour évaluer le métabolisme de base, on peut procéder
de deux manières. Soit on part de la surface corporelle,
elle-même dépendante du poids et du carré de la taille.
On applique alors des formules comme celle de Black:
Métabolisme de base pour les femmes =
[0,963 x Poids(kg)0,48 x Taille(m)0,50 x Age(an)-0,13] x (1000/4,1855)
Métabolisme de base pour les hommes =
[1,083 x Poids(kg)0,48 x Taille(m)0,50 x Age(an)-0,13] x (1000/4,1855).
Soit on se contente de multiplier simplement la consommation d’oxygène au repos par l’équivalent énergétique
(EE) qui vaut environ 5 calories/litre d’O2. Evidemment,
cette valeur varie selon le substrat utilisé. Elle sera un peu
plus élevée lorsqu’on consomme surtout des sucres et un
peu plus basse si l’on tourne plutôt sur les graisses. En
laboratoire, il est possible de corriger cette erreur en se
basant sur le quotient respiratoire qui dépend précisément du type de carburant. Une chose évidemment
impossible avec un simple cardiofréquencemètre.
Polar, il s’agit même d’une sorte de retour aux sources. Les premiers
modèles de la marque possédaient comme unique fonction, l’affichage de la fréquence cardiaque. Ici aussi, le nombre de données
fournies est également restreint. Mais tout le travail de calcul a été
mâché en amont par les ingénieurs finlandais. Bien sûr, comme nous
l’avons dit dans l’article, les mesures fournies sont sujettes à caution.
Mais cela importe peu pour le commun des sédentaires. L’objectif est
de pouvoir situer “en gros” son niveau d’activité quotidienne et
surtout de pouvoir comparer les journées entre elles afin de dresser
une tendance hebdomadaire. Le risque? Certains utilisateurs pourraient faire l’amalgame entre activité quotidienne et activité physique.
Pour peu que l’on délaisse escalators et les ascenseurs, il est relativement facile d’atteindre les 60 minutes quotidiennes d’activité recommandées par les programmes de santé. On pourrait alors se
persuader que parce que l’on emprunte les escaliers pour sortir du
métro, on fait partie de la population des athlètes, à l’abri des pathologies liées à l’oisiveté, et donc que d’éventuels écarts alimentaires
demeureront sans conséquence. Grave erreur! L’appareil doit donc
être utilisé pour ce qu’il est réellement: un outil d’évaluation qui
oriente, sur le mode ludique, la personne désireuse de se bouger
davantage. Il doit permettre en somme d’adopter les bons réflexes
avant de passer aux choses plus sérieuses de l’entraînement. On trouvera alors son bonheur dans une gamme Polar étirée aux extrêmes.
D’un côté, on propose au public des appareils de plus en plus sophistiqués qui s’adressent aux sportifs de pointe et exigent presque une
formation d’ingénieur pour en exploiter toutes les subtilités. De
l’autre, on s’efforce de simplifier des outils grand public en intégrant
même des appréciations familières sur le nombre de calories dépensées au cours de la journée. L’échelle va du “peut mieux faire” aux
“félicitations du jury”. Attention cependant à ne pas tricher! Une
séance de marteau-piqueur risque d’afficher sur la montre des scores
de skieurs de fond. Pour une utilisation plus rigoureuse, il faut alors
activer les touches d’enregistrement manuel, lors d’un footing par
exemple, qui donne en outre une estimation de la distance parcourue.
Il est même possible de télécharger les données via une interface,
disponible en option. Cette dernière fonction parait antinomique
compte-tenu de la population ciblée. Peut-être faut-il la voir comme
une invitation à passer à la gamme supérieure une fois les bonnes
habitudes intégrées, puisque cette interface est compatible avec les
modèles plus perfectionnés de la marque.
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La physique amusante
Après des heures passées à se creuser la tête sur les méthodes utilisées par les ingénieurs pour évaluer les calories perdues en course à
pied, nous ressentions le besoin d’une petite sortie d’oxygénation
cérébrale. L’occasion était belle de tester les deux techniques présentées dans l’article: cardiofréquencemètre et accéléromètre. Me voilà
donc parti pour une petite balade de 35 minutes effectuée sur le plat
à une allure soutenue, certes, mais loin du maximum. Et si le cœur
battait un peu plus vite que d‘habitude, l’intensité de l’effort n’était
pas à blâmer. Plutôt la peur de se faire dépouiller. Avec une montre à
chaque bras, j’en avais tout de même pour 800 euros de matériel!
Résultat du test? Pas franchement concluant. La mesure basée sur la
fréquence cardiaque m’octroyait une dépense énergétique de 550
calories contre 380 seulement pour celle déduite par accélérométrie.
Cela représente une dépense énergétique horaire respectivement
(sur)estimée à 940 calories dans le premier cas et à 650 dans le
second, soit une puissance métabolique moyenne respectivement de
1000 et 750 watts! J’étais très flatté... mais pas du tout convaincu!
La dépense calorique à l’effort
Là encore, on recourt à un petit calcul qui consiste à multiplier la consommation d’oxygène (estimée) par un équivalent énergétique de valeur plausible. Rappelons que celuici oscille entre 4,7 calories/litre d’O2 lors d’un effort
modéré et 5,05 lors d’un effort très soutenu. Comme on le
voit, c’est très spéculatif. On procède par extrapolations
successives sur base d’un seul paramètre d’entrée (la
fréquence cardiaque) dont l’évolution se fait, de plus, avec
un temps de retard par rapport aux variations de l’intensité de l’exercice. Dans les disciplines qui comportent des
changements de rythme brutaux, comme les sports
collectifs, le résultat final affiché sur le cardiofréquencemètre sera souvent très éloigné des valeurs réelles. La
seconde méthode d’estimation de la dépense énergétique
mise au point par les cerveaux scandinaves se caractérise-t-elle par de semblables raccourcis?
La puissance
Ceux qui ont eu la chance de retenir quelques notions de
leur cours de physique de lycée ont dans un coin de la
tête la relation fondamentale de la dynamique newtonienne qui stipule qu’il est possible de connaître la
somme des forces exercées à partir de la seule mesure
La technologie
actuelle permet de
tout quantifier.
de l’accélération. Or la force est l’une des deux composantes de la puissance (avec la vitesse). Et la puissance
permet de déterminer à son tour la quantité d’énergie
dépensée. Tout cela pour dire qu’il est possible d’évaluer
une dépense énergétique sur base d’une simple mesure
d’accélération. Forts de ce raisonnement, les ingénieurs
de la marque Polar ont intégré un accéléromètre bidimensionnel dans leur nouvelle montre (modèle FA20) qui
relève avec précision les mouvements effectués par le
poignet. A partir de là, ils se targuent de calculer l’énergie
dépensée au cours de votre séance de course à pied par
le biais d’un algorithme là encore breveté et, par voie de
conséquence, inaccessible. L’idée est intéressante mais
souffre tout de même quelques failles. Ainsi les mouvements du poignet ne dépendent pas uniquement des
oscillations liées à la marche ou à la course. Ils résultent
aussi de mouvements “parasites” des bras. Un simple
brossage de dents vigoureux peut être interprété comme
un jogging endiablé! Pour être plus précis, on aurait dû
relever les oscillations du centre de gravité à la taille. Les
concepteurs affirment néanmoins que la méthode a été
validée expérimentalement (1). D’autres appareils de la
gamme fonctionnent selon le même principe mais en plus
sophistiqué. Ainsi le modèle AW200 utilise un accéléromètre tridimensionnel, épaulé par un altimètre. L’estimation de la dépense énergétique prend donc en compte les
mouvements dans les trois plans et intègre le dénivelé
dans le calcul, puisqu’on sait que l’énergie dépensée est
la somme de l’énergie cinétique (liée au mouvement) et
de l’énergie potentielle (liée à l’élévation du centre de
gravité). Astucieux. Mais le résultat final reste assez
approximatif. Est-ce gênant? Peut-être pas. Rappelons
que le principal intérêt de cette fonction est d’ordre pédagogique. Quand le sportif occasionnel réalise que la
valeur calorique d’un pain au chocolat (+/- 300 calories)
équivaut à la dépense d’une heure de sport, il sera tenté
de succomber moins facilement à l’appel de la gourmandise. L’autre intérêt réside dans l’estimation des apports
énergétiques. La mode des épreuves d’ultra-endurance
implique de bien évaluer les besoins au moment de
préparer les ravitaillements. Ce genre d’outils peut aider.
Et une marge d’erreur de 10 ou même 20% entraîne finalement peu de préjudice. Guillaume Sarre
(1) Brugniaux JV et
coll. Polar Activity
Watch 200: a new
device to accurately
assess energy
expenditure.
Br J Sports Med.
2008 Apr 15.
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