les contentieux sociaux deuxieme partie
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les contentieux sociaux deuxieme partie
Polycopie contentieux sociaux cours de PASCAL LABBEE année 2012-2013 page N°1 ANNÉE UNIVERSITAIRE 2012-2013 LES CONTENTIEUX SOCIAUX DEUXIEME PARTIE AVERTISSEMENT: LE PRÉSENT POLYCOPIE NE CONTIENT PAS L'INTÉGRALITE DU COURS de Mr PASCAL LABBEE Il reproduit un certain nombre de données pour faciliter les révisions en vue de l'examen oral de MAI - JUIN 2013 LE PROGRAMME DES REVISIONS ET DE L’EPREUVE EST LIMITE AUX THEMES ABORDES DANS LE PRESENT POLYCOPIE QUESTIONS D'EXAMEN: Les étudiants axeront leurs révisions sur les aspects PROCEDURAUX des questions abordées (Un certain nombre de développements ont été intégrés à destination des étudiants qui n'ont jamais eu à étudier en particulier le droit de la Sécurité Sociale) AVERTISSEMENT : CE COURS POLYCOPIE EST A L'USAGE DES ÉTUDIANTS DE L'UNIVERSITE DE LILLE II - IL A ÉTÉ ÉTABLI POUR LEUR FACILITER LE TRAVAIL DE RÉVISION ET N'A D'AUTRE FINALITÉ .UN CERTAIN NOMBRE DE DÉVELOPPEMENTS N'ONT PAS ÉTÉ INTÉGRÉS POUR LIMITER LE POLYCOPIE AUX DOMAINES A REVOIR POUR L'EXAMEN PORTANT SUR LE COURS SEMESTRIEL Polycopie contentieux sociaux cours de PASCAL LABBEE année 2012-2013 page N°2 LES CONTENTIEUX SOCIAUX PLAN DU TITRE II : LES CONTENTIEUX LIES A LA RELATION DE TRAVAIL CHAP. I) LES CONTENTIEUX DES RAPPORTS INDIVIDUELS DE TRAVAIL I) PRINCIPES GÉNÉRAUX DU PROCES PRUD'HOMAL SECTION 1 : LE CONSEIL DES PRUD'HOMMES - LES ASPECTS ORGANIQUES SECTION 2 : LA COMPÉTENCE DU CONSEIL DES PRUD'HOMMES - ratione materiae -ratione loci SECTION 3 : LE PROCES PRUD'HOMAL - Saisine -Audience de conciliation- procédure - mesures prises - condamnation au provisoire -audience de jugement;- généralités, demande - moyens de défense SECTION 4 : LES VOIES DE RECOURS Voies de rétractation et voies de recours ordinaires Procédure d'appel - détermination du taux de ressort Procédure de Cassation. II) LE RÉFÉRÉ PRUD'HOMAL ET LA PROCÉDURE EN MATIERE DE MOTIF ÉCONOMIQUE III) LE CONTENTIEUX DES SANCTIONS DISCIPLINAIRES ET DES NORMES DISCIPLINAIRES Section 1 LE REGLEMENT INTÉRIEUR - adoption - contenu. - contentieux du règlement intérieur - Contrôle de légalité et exception d’illégalité. Section 2 : LE CONTENTIEUX DES SANCTIONS DISCIPLINAIRES - la procédure disciplinaire et son contrôle - La Spécificité du contentieux des sanctions disciplinaires - CHAPITRE II) LES CONTENTIEUX DES RAPPORTS COLLECTIFS DE TRAVAIL A) LE " DROIT DE LA GREVE" TECHNIQUE DE REGLEMENT DES LITIGES B) LES DROITS COLLECTIFS - LES " CONSTITUTIONS DE PARTIE CIVILE " Le DROIT D’AGIR SYNDICAL CHAPITRE III ) LA PROTECTION DE L’ORDRE PUBLIC SOCIAL PAR LES GARANTIES JURIDICTIONNELLES Polycopie contentieux sociaux cours de PASCAL LABBEE année 2012-2013 page N°3 A) LE CONTENTIEUX ELECTORALB) LE « DROIT PENAL » DU TRAVAIL -> Le DROIT PENAL INSPIRE le DROIT SOCIAL DE PROTECTION Le constat des infractions en DROIT DU TRAVAIL La procédure DISCIPLINAIRE -> LE DROIT PENAL PROTEGE L’ORDRE PUBLOIC SOCIAL Les actions pénales – plainte, citations, actions du Parquet – les actions syndicales C) NOTIONS SUR LE CONTENTIEUX ADMINISTRATIF E) ANNEXE LES LITIGES "ENTRE MEDECINS" DEVELOPPEMENTS FORMANT LE DOMAINE DES REVISIONS POUR L’EXAMEN 2013 TITRE II) LES CONTENTIEUX DE LA RELATION DE TRAVAIL Le DROIT de la relation de travail présente sur le plan procédural un certain nombre d'aspects spécifiques liés à la nature même du droit du Travail. La relation de travail s'inscrit d'abord dans un cadre contractuel liant un salarié à son employeur. Une première source de litiges peut s'inscrire dans ce contexte C'est la question des LITIGES INDIVIDUELS nés de la relation de travail. Puisque ces litiges opposent deux personnes de droit privé (on exclura la relation de travail entre l'Etat ou les collectivités et ses agents (territoriaux ou fonctionnaires) - qui relèvent du Droit Public on admettra l'existence d'une JURIDICTION SPÉCIFIQUE appelée à trancher les litiges nés de cette relation contractuelle. Ce sera la question du CONSEIL DES PRUD'HOMMES Juridiction judiciaire, que l’on appréhendera de façon classique (aspect organique) pour voir quelles sont les particularités procédurales qui lui sont applicables au travers des différents types de litige pouvant survenir entre les deux cocontractants. (I) La relation de travail s'inscrit également dans un contexte COLLECTIF (Employeur, ou collectivité des employeurs / et collectivité des salariés). Ces litiges entre COLLECTIVITÉS peuvent amener des contentieux spécifiques (II) La relation collective de travail s'inscrit dans une triple approche - D'une part dans le cadre de l'exercice des droits collectifs (Contentieux électoral Droit de GrèveDroit de la relation " conventionnelle collective") (A) - D'autre part dans l'action des personnes ayant qualité à agir pour le compte de la collectivité (Droit Syndical) (B) Polycopie contentieux sociaux cours de PASCAL LABBEE année 2012-2013 page N°4 - Et d'autre part encore dans le cadre de la protection de la relation de travail, de celui qui a qualité à représenter la collectivité (Droit des " salariés protégés" - ou droit du " gréviste" (C) Enfin les règles du DROIT DU TRAVAIL contribuent à un certain ORDRE SOCIAL GÉNÉRAL (III) qui amène une double problématique en matière de litige - D'une part un certain nombre de règles sont à peine de SANCTIONS PÉNALES (A) et il faudra apprécier s'il existe des règles spécifiques en matière de DROIT PÉNAL DU TRAVAIL et de procédure pénale du Travail, Et pourquoi pas convenir que la Procédure Pénale ou le droit pénal peuvent inspirer les règles du Droit du Travail (droit disciplinaire ou rôle de l’Inspection du Travail dans le constat des infractions) - D'autre part la question des REPRÉSENTANTS DE L'ETAT vis à vis de l'employeur - de leur actionde leurs pouvoirs et du Droit qui protège ces différents intervenants (Inspection du Travail.) (B) CHAPITRE I) LES LITIGES INDIVIDUELS NÉS DE LA RELATION DE TRAVAIL Nous verrons cette question dans deux axes : En premier lieu nous verrons les PRINCIPES GÉNÉRAUX de la PROCÉDURE PRUD'HOMALE (I) Puis nous rechercherons les SPÉCIFICITÉS de la procédure prud’homale au regard des règles générales du Droit du Procès (Principe d'unicité d'Instance - droit de la Preuve, exécution provisoire des décisions - exceptions et fins de non recevoir particulières et quelques procédures spécifiques (licenciement pour motif économique par exemple)... (II) I) PRINCIPES GÉNÉRAUX DU PROCES PRUD'HOMAL Les conseils de prud'hommes sont des juridictions professionnelles élues et paritaires, seules compétentes pour régler les litiges issus du contrat de travail. SECTION I : LE CONSEIL DES PRUD'HOMMES - LES ASPECTS ORGANIQUES a) LA STRUCTURE DES CONSEILS DES PRUD'HOMMES Le Code du Travail prévoit la mise en place d'un CONSEIL DES PRUD'HOMMES dans le ressort de chaque TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE Ceci étant lorsque des raisons économiques sociales ou géographiques imposent la création de plusieurs Conseils des Prud'hommes dans le même ressort cela est possible (ex Lille Roubaix Tourcoing – Ont été supprimés les Conseils des Prud’hommes Halluin Haubourdin Armentières dans le cadre de la réforme de la carte judiciaire). Leur renouvellement général a lieu tous les 5 ans à date unique, fixée par décret, pour l'ensemble des conseils de prud'hommes. La composition et le nombre de conseillers sont fixés pour chaque conseil de prud'hommes par décret. La Juridiction Prud’homale est PARITAIRE et ÉLECTIVE Polycopie contentieux sociaux cours de PASCAL LABBEE année 2012-2013 page N°5 Paritaire car ses structures juridictionnelles ou décisionnelles sont composées à parité d'employeur et de salariés (sections, bureaux, formation de référés formation de jugement..) chaque formation de ce conseil comprend donc des salariés et des employeurs en nombre égal et est présidée alternativement chaque année par un salarié ou par un employeur Élective puisque les Conseillers sont élus au suffrage direct par les employeurs et les salariés pour une durée de 5 ANS. Les élections se font par scrutin de liste, section par section, et par collège (salarié / employeurs) Scrutin à la représentation proportionnelle " à la plus forte moyenne». Les listes sont libres (mais le plus généralement " syndicales" sans monopole) Les votes se font pendant le temps de travail, sans diminution de la rémunération Les électeurs ne peuvent être inscrits que dans un collège .Pour voter il faut avoir 16 ans Pour être électeur salarié il faut, sans condition de nationalité, être salarié, ou être salarié chômeur Pour les employeurs il faut employer un ou plusieurs salariés .Outre les dirigeants "statutaires" sont électeurs dans le collège employeur les " cadres détenant une délégation de pouvoirs d'autorité, justifiant de cette délégation laquelle doit être effective et durable (délégation d'un établissement ou d'un département ou d'un service ". Sont éligibles, les électeurs ayant au moins 21 ans - ni condamnés pénalement pour un certain nombre de crimes et délits Ils ne doivent justifier d'aucune autre condition .Simplement, dans la limite de 6 semaines par mandat ils peuvent recevoir une formation payée par l'employeur au titre de la formation professionnelle Les conseillers prud'hommes sont rééligibles Les conseillers salariés doivent avoir de leur employeur " le temps nécessaire pour se rendre et participer aux séances des bureaux de conciliation jugement, référé, mesures d’instruction, délibérés, assemblées générales ...Les présidents et vice Président ont le temps nécessaire (plafonné) pour les taches administratives. Le temps nécessaire est payé comme temps de travail, sans diminution (le conseiller prud'homme dresse un "état mensuel" adressé au greffier en chef qui le fait viser par le Président du CPH Les heures d'activité qui ne sont pas prises sur le temps de travail sont payées par l'état en vacations Les conseillers prud'hommes salariés sont SALARIÉS PROTEGES (s’il est pris pendant le temps du travail), les accidents qui surviennent sont des accidents de travail - ou de trajet - L'obstacle à leurs fonctions constitue un délit d’entrave. Les Conseillers se réunissent en assemblée générale et élisent le Président et le vice Président du Conseil des Prud'hommes Sur le plan ORGANIQUE le Conseil des Prud'hommes est divisé en 5 SECTIONS - la section de l'encadrement ; - la section de l'industrie ; - la section du commerce et des services commerciaux ; - la section des activités diverses compétente notamment pour les employés de maison, les concierges ; - la section de l'agriculture ; lorsque le ressort d'un tribunal de grande instance comprend plusieurs conseils de prud'hommes, il est constitué une section agricole unique pour l'ensemble du ressort dudit tribunal. Chaque section comprend au moins 4 conseillers employeurs et 4 conseillers salariés Ce nombre peut être réduit exceptionnellement à 3 pour des raisons d'ordre géographique, économique et social. Chaque section se réunit en assemblée générale et élit sont président et son vice président .On alterne année par année la présidence employeur / salarié Chaque section du Conseil des Prud'hommes comprend au moins, toujours paritairement Polycopie contentieux sociaux cours de PASCAL LABBEE année 2012-2013 page N°6 - un bureau de conciliation - un bureau de jugement Chaque conseil des Prud'hommes lorsqu'il est important (et contient des " chambres" doit obligatoirement comprendre une chambre compétente pour connaître des litiges relatifs aux licenciements économiques Plusieurs chambres peuvent être constituées au sein d'une même section. Chaque chambre comprend au moins 4 conseillers employeurs et 4 conseillers salariés. Toute section comportant plusieurs chambres doit comprendre une chambre qui sera compétente pour connaître des litiges relatifs aux licenciements économiques et aux conventions de conversion. Chaque section ou chaque chambre comprend : - un bureau de conciliation (1 conseiller employeur, 1 conseiller salarié) ; - un bureau de jugement (2 conseillers employeurs, 2 conseillers salariés). Chaque Conseil des Prud'hommes comprend une formation de référé (paritaire) (2 conseillers). La gestion sur le plan administratif est assurée par le secrétariat-greffe Les formalités nécessaires à l'introduction et à l'avancement du procès sont gérées par le du conseil de prud'hommes ; ce sont les agents du greffe qui enregistrent les demandes, convoquent les parties, assistent les conseillers prud'hommes aux audiences et font connaître les décisions rendues. SECTION II : LA COMPÉTENCE DU CONSEIL DES PRUD'HOMMES On notera d'abord que certains litiges sont réservés- alors pourtant qu'ils relèveraient théoriquement du CPH à la compétence de certaines juridictions différentes On retiendra ainsi : - En premier lieu et bien sur le TASS (mais le CPH peut ordonner une affiliation à l'employeur + allocation de DI pour refus ou absence ou retard dans l'affiliation) Ainsi en matière d'accident de travail Les litiges entre armateurs et marins - pour ce qui concerne les contrats d'engagements régis par le Code du Travail maritime - = Tribunal d'Instance après tentative de conciliation devant l'administrateur des Affaires Maritimes) - Et ce qui relève expressément d'autres Juridictions (Contentieux Électoral - Contentieux de l'autorisation administrative de licenciement- (TRIB ADMINISTRATIF) - saisies arrêt sur salaires (TI) A) LA COMPÉTENCE RATIONE MATERIAE: a) UN LITIGE INDIVIDUEL Le Code du Travail définit la compétence du CPH pour connaître " des différends qui peuvent s'élever à l'occasion de tout contrat de travail de droit privé qui lie ou a lié le salarié à l'employeur" On admettra que la notion de " contrat de travail" s'entend plus précisément de tout ce qui fait le statut individuel du salarié dans l'entreprise ( litige lié à l'exercice du droit disciplinaire - à l'application à l'avantage du salarié d'une clause d'une convention collective ) ou encore aux avantages découlant de la présence du salarié dans l'entreprise ( affiliation à tel organisme de protection sociale complémentaire par exemple ( mais pas le litige direct avec l'organisme pour telle ou telle prestation) Si les Juridictions de Droit Commun sont compétentes pour les " litiges collectifs», le Conseil des Prud'hommes est compétent pour connaître " de la juxtaposition de litiges individuels, tous fondés sur Polycopie contentieux sociaux cours de PASCAL LABBEE année 2012-2013 page N°7 la même cause (par exemple tel avantage résultant du statut collectif), et tendant aux mêmes fins .Même si la solution du litige implique l'application ou l'interprétation d'une norme collective On ajoutera que le Code du Travail permet aux groupements signataires d'un accord collectif d'agir devant le CPH sur le fondement de la convention ou de l’accord, pour la défense des intérêts collectifs en cause - s'il s'agit d'une INTERVENTION dans le cadre d'un litige individuel. (Le syndicat est alors partie intervenante) Mais s'il s'agit d'une action spécifique engagée par un groupement, ayant pour objet l'interprétation ou l'exécution d'une convention collective - il semblerait que cette question échappé à la compétence du CPH (cass Soc 30 avril 1997) Nous reverrons cette notion - de même lorsque sera abordée la question de la GREVE. Si le litige individuel né de l'exercice du droit de grève relève de la compétence du CPH (ex : salarié licencié pour faute lourde ou sanction disciplinaire pour fait de grève, demande de dommages et intérêts pour lock out, litige entre grévistes et non grévistes..), le litige collectif (exemple : expulsion de grévistes) relève de la compétence des juridictions de Droit Commun. b) une RELATION DE TRAVAIL SALARIÉ - Il faut un CONTRAT DE TRAVAIL Cette condition est bien sur essentielle (elle est d'ailleurs d'ordre public...le CPH pourrait relever d'office son incompétence) Peu importe la dénomination de la relation de travail. Le contrat de travail s'entend comme un rapport subordonné - Lien de subordination juridique - dépendance économique - ou encore " intégration au service organisé On relèvera que ne sont pas par nature salariés subordonnés les travailleurs handicapés places en CAT, le stagiaire de formation vis à vis de son "terrain d'accueil" (sauf s'il existe une subordination) En revanche le contrat d'apprentissage étant un contrat de travail, il relève de la compétence des CPH, de même et par exemple les emplois précaires (CES- même s'il a été conclu avec un service public administratif, ou contrat de qualification,..) - Il faut un CONTRAT DE TRAVAIL de DROIT PRIVE Le Conseil des Prud'hommes est incompétent dans les litiges qui opposent un fonctionnaire à l’état. Mais les " membres du personnel des services publics employés dans des conditions de droit privé et qui ne participent pas directement au fonctionnement du service public" (exemple négatif la femme de ménage d'une école) relèvent de la compétence du Conseil des prud'hommes Ou pour un fonctionnaire employé (par exemple en cas de détachement) par une structure de droit privé c) UN LITIGE LIE A L'EXÉCUTION DE LA RELATION DE TRAVAIL On étendra bien sur à la notion d'exécution, les litiges nés de la validité, de l’interprétation, de la conclusion et de la cessation de la relation de travail On admettra que la relation " pré contractuelle" (promesse d'embauche) s'inscrit également dans la relation de travail On peut imaginer que " tout litige " survenant à l'occasion de la relation de travail soit soumis au CPH (demande de dommages et intérêts par exemple ou litige entre salariés eux mêmes.) La difficulté peut apparaître avec les accessoires du contrat de travail (logement accessoire du contrat de travail, clause de non concurrence, dépôt de marchandises...) Polycopie contentieux sociaux cours de PASCAL LABBEE année 2012-2013 page N°8 Pour ce qui concerne le logement, il est admis, s'il s'agit effectivement d'un logement accessoire à la relation de travail que le CPH est compétent Il a même été admis que la revente d'un véhicule de fonctions accessoire du contrat de travail relevait de la compétence du CPH, de même le dépôt de marchandises entre les mains d'un salarié (collection), la compensation entre salaire et remboursement d'un prêt personnel... Pour les clauses de non concurrence la compétence du CPH est acquise s'il y a effectivement une clause dans le contrat de travail (action de l'employeur contre l'ancien salarié en dommages et intérêts pour violation de la clause - contrepartie financière à la clause de non concurrence - annulation ou réduction d'une clause de non concurrence) En revanche l'action en CONCURRENCE DÉLOYALE relève du Tribunal de Commerce (s'il y a activité commerciale) ou des juridictions de Droit commun. De la même façon relève du Tribunal de commerce l'action contre un concurrent qui a débauché du personnel On admettra encore à partir de la notion même de litige qu'il importe peu que le demandeur soit salarié ou employeur. Par effet des dispositions classiques du Code de Procédure Civile, On admettra encore - la possibilité d'INTERVENTION FORCÉE d'organismes tels - l'ASSEDIC (dans l'éventualité d'une condamnation de l'employeur)- l'AGS en cas de dépôt de bilan de l'employeur et impossibilité de payer les créances salariales - les mandataires de Justice en cas de dépôt de bilan de l’employeur, les Caisses de Congés payés (seul exemple : la Caisse de Congés payés du bâtiment) - On admettra également, sous réserve de connexité - et pourvu qu'elles soient de la compétence du CPH les demandes reconventionnelles (demande de dommages et intérêts présentée par l'employeur contre le salarié par exemple- sabotage ou dégradation...) B) COMPÉTENCE RATIONE LOCI Nous trouvons ici des règles DEROGATOIRES DU DROIT COMMUN (compétence forum rei, ou en matière contractuelle lieu d'exécution du contrat...) Les règles sont fixées par le Code du Travail : - Si le travail est effectué dans un établissement, le Conseil des Prud'hommes compétent est celui dans le ressort duquel cet établissement se situe...C'est l'idée de la compétence du lieu où le travail s'exécute habituellement. (Idem en cas de mutation refusée) - Si le travail s'exécute en dehors de tout établissement, ou à domicile la Juridiction compétente est celle du domicile du salarié (exemple : VRP ou salarié travaillant sur des chantiers) MAIS le salarié (et seulement le salarié) peut toujours saisir : ` - le forum rei - le Conseil des Prud'hommes du lieu où l'engagement a été contracté (lieu de conclusion du contrat) En matière de contrat par correspondance = lieu d'où est partie la lettre d'acceptation du contrat de travail Les règles sont impératives .Il ne peut y être dérogé et les clauses attributives de compétence territoriales sont nulles. EN MATIERE DE CONTRATS INTERNATIONAUX, il faut bien sur rappeler la distinction entre COMPÉTENCE DES TRIBUNAUX et LOI APPLICABLE En ce qui concerne la compétence nous distinguerons d'abord Polycopie contentieux sociaux cours de PASCAL LABBEE année 2012-2013 page N°9 - les CONVENTIONS INTERNATIONALES, et en particulier les règles de DROIT EUROPÉEN La Convention de Bruxelles du 27 SEPTEMBRE 1968 permet d'attraire le défendeur domicilié sur le territoire d'un état signataire devant le Tribunal du lieu où l'obligation a été ou doit être exécutée .En d'autres termes un salarié travaillant en France peut attraire devant le CPH l'emprise employeur dont le siège est sis à l'étranger .Cette règle ne joue pas en cas de clause attributive de compétence insérée dans le contrat de travail puisque la Convention de Bruxelles valide les dites clauses ( et que la Convention a une force supérieure à l'article R 517-1) - En dehors du Cadre EUROPÉEN et CONVENTIONNEL Nous rappellerons les dispositions du Code Civil (privilège du for- art 14 et 15) qui permettent au ressortissant français d'attraire un étranger (ou un français résidant à l'étranger) devant la juridiction française pour l'exécution de ses obligations. (Une réserve est à poser pour le contrat à exécution à l’étranger, souscrit par un français avec un étranger et comportant une clause attributive de compétence claire) On retiendra encore que dans la mesure où la compétence du CPH est d'ordre public, que l’on ne peut déroger à cette clause. Toute formule d'arbitrage (si elle est déniée) ou clause compromissoire est nulle. De la même façon les commissions de conciliation, ou commission paritaire ne peuvent faire obstacle à la saisine du CPH .Et les décisions prises ne peuvent avoir que valeur d’AVIS, à défaut de procès verbal de conciliation SECTION III: LE PROCES PRUD'HOMAL A) LA SAISINE DU CONSEIL DES PRUD'HOMMES a) GÉNÉRALITÉS La saisine du Conseil des Prud'hommes se fait soit par dépôt de la demande auprès du Greffe (un imprimé est le plus généralement mis à disposition) - soit par lettre recommandée avec AR adressée au secrétariat greffe de la Juridiction On remarquera que la demande ne contient que l'état civil des parties (nom prénoms profession adresse du demandeur salarié ou coordonnées de l'employeur (On remarquera l'importance du Code APE ou de la définition de l'activité de l'entreprise qui peut déterminer l'orientation du dossier sur telle ou telle section du CPH) - car le demandeur n’a pas à préciser la section qu'il estime compétente... C'est le Greffe qui distribue Le demandeur porte également " les chefs de demande" c'est à dire précise la cause de la demande (congés payés, dommages et intérêts, indemnité..).On peut même imaginer que le chiffre de la demande ne soit pas en l'état indiqué Le greffe délivre récépissé soit immédiatement soit par courrier. Le Greffe avise le demandeur soit verbalement, lors de la présentation de la demande soit par lettre simple, du jour de la séance de conciliation où l'affaire sera évoquée La partie adverse est convoquée par le secrétariat greffe du CPH par LRAR + par lettre simple; La convocation contient- ce qui est classique en matière de procédure- les modalités de l'audience de conciliation qui se tiendra - et informe également des risques de condamnation qui peuvent intervenir des le stade de conciliation ( des décisions exécutoires par provision pourront être prises par le bureau de conciliation même en son absence " Rien n'empêche bien sur que soit faite en parallèle une convocation de la partie adverse par acte d'huissier (citation à comparaître en audience de conciliation) Polycopie contentieux sociaux cours de PASCAL LABBEE année 2012-2013 page N°10 b) SPÉCIFICITÉS On observera d'ores et déjà quelques particularités : En matière de licenciement pour motif économique l'employeur doit communiquer dans les 8 jours de la date à laquelle il reçoit la convocation devant le bureau de conciliation, par lettre recommandée avec AR ou par dépôt au greffe, tous les éléments qu'il a fourni aux représentants du personnel dans le cadre de la procédure, ou tous les éléments transmis à la DDTE. A défaut il en est tenu compte dans le cadre de l'appréciation du motif économique. Le greffe avertira le salarié qu'il peut en prendre connaissance. La séance de conciliation doit avoir lieu dans le Mois de la saisine du Conseil des Prud'hommes .Le bureau de conciliation déterminera les mesures d'instruction et d'information nécessaires au Conseil .Celles ci doivent être exécutées dans un délai de trois mois maximum. Ce délai pouvant être prorogé par le bureau de jugement à la demande de l'un des conseillers chargés de l'enquête ; Le bureau de conciliation fixe la date d'audience du bureau de jugement qui doit statuer dans un délai ne pouvant excéder 6 mois à compter de la date à laquelle l'affaire lui a été renvoyée De la même façon on remarquera que le préalable de conciliation n'existe pas - Lorsqu'il s'agit de REQUALIFIER un contrat de travail à durée déterminée en contrat de travail à durée indéterminée (souhait de rapidité) - Lorsqu'il s'agit d'une procédure opposant le salarié à une entreprise qui a fait un dépôt de bilan (pas de conciliation avec l'AGS) B) l'AUDIENCE DE CONCILIATION - Le principe premier est celui de la COMPARUTION personnelle des parties Les parties sont tenues de comparaître en personne, sauf motif légitime aux jour et heure fixées, devant le bureau de conciliation L'employeur s'il est personne morale est représenté par son représentant légal. La question posée est celle du " motif légitime" .S'il y a motif légitime la représentation est possible (par l'une des personnes que l’on verra ci-après) Le bureau de conciliation est tenu de vérifier si le motif d'absence est légitime ( empêchement lié& à la santé, à l'éloignement géographique ,à des obligations professionnelles .Il n'y a pas de forme particulière pour se faire excuser ,mais tout justificatif permet d'éviter les difficultés S'il n'y a pas de motif légitime ou s'il n'y a pas de pouvoir de représentation ( l'avocat n'a pas nécessité de justifier d'un pouvoir spécial , mais il est recommandé) emporte DÉFAUT de la partie non valablement représentée . Qui peut assister devant le Conseil des Prud'hommes ? Les personnes habilitées à assister ou à représenter les parties sont : 1° Les salariés ou les employeurs appartenant à la même branche d'activité ; (même si le salarié assisté n'est pas syndiqué, ou s'il est syndiqué d'un autre syndicat, ou même s'il appartient à une autre branche d’activité) 2° Les délégués permanents ou non permanents des organisations d'employeurs et de salariés ; 3° Le conjoint, le partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou le concubin ; 4° Les avocats. L'employeur peut également se faire assister ou représenter par un membre de l'entreprise ou de l'établissement... Polycopie contentieux sociaux cours de PASCAL LABBEE année 2012-2013 page N°11 S'il y a représentation (hors de cas de l'Avocat) la personne doit être munie d'un pouvoir spécial de représentation (qui contiendra pouvoir de transiger) La liste est LIMITATIVE - LE " DÉFAUT DE COMPARUTION DE CONCILIATION Si le demandeur ne comparait pas, sans avoir justifié d'un motif légitime, la demande et la citation sont CADUQUES La demande ne pourra être réitérée qu'une seule fois (sauf cas fortuit empêchant la seconde comparution) Si le défendeur ne comparait pas l'affaire sera renvoyée en audience de jugement ou devant Conseiller rapporteur .Mais le Bureau de conciliation peut bien sur prononcer toute condamnation ou toute mesure entrant dans le domaine de sa compétence Le Conseil des Prud'hommes peut également renvoyer en conciliation à une autre date (motif légitime, ou irrégularités dans la convocation), soit par LRAR soit par acte d'huissier) - L'AUDIENCE PROPREMENT DITE : La tentative de conciliation n'est pas publique Un procès verbal est dressé soit de conciliation, soit de non conciliation S'il y a conciliation le procès verbal en rend compte (il peut y avoir conciliation partielle) .Le procès verbal est dressé ; un exemplaire en forme exécutoire en est remis aux bénéficiaires. S'il n'y a pas conciliation totale, le PV rend compte des demandes sur lesquelles il n'y a pas eu de conciliation Et la cause est renvoyée en audience de jugement (souvent avec un " calendrier de procédure») MESURES PRISES PAR LE BUREAU DE CONCILIATION Indépendamment de ce qui précède le Bureau de conciliation peut décider - le renvoi de la cause devant un (mais plus généralement deux) conseillers rapporteurs Ceux ci auront une mission précisée (mesure d'enquête par exemple) - Ordonner toute mesure d'instruction Lorsqu'il estime qu'il manque certains éléments pour que l'affaire puisse être jugée, le bureau de conciliation peut ordonner toute mesure d'instruction qu'il juge utile même d'office. Ou des mesures nécessaires à la conservation de preuves ou objets litigieux... - Condamner provisoirement l’employeur au versement d'une provision sur salaires et accessoires de salaires , commissions indemnités de congés payés , de préavis, de licenciement , indemnité de fin de contrat , indemnité pour non respect du délai de prévenance en matière de report de terme ou de reconduction du CDD , indemnité de précarité d'emploi , et ce lorsque l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable , DANS LA LIMITE DE SIX MOIS DE SALAIRES Cette phase de demande de condamnation est contradictoire et publique Avant d'étudier les mesures provisoires, on retiendra qu'ici comme en audience de jugement il se peut qu'il y ait PARTAGE DE VOIX Dans ce cas l'affaire est renvoyée en AUDIENCE DE DÉPARTAGE sur la demande de condamnation provisoire. Polycopie contentieux sociaux cours de PASCAL LABBEE année 2012-2013 page N°12 L'audience sera présidée par le Juge d'Instance " Juge départiteur" Lors de l'audience de départage le bureau de conciliation est composé du magistrat et des deux conseillers prud’hommes. S'il manque un conseiller le Juge tient l’audience, en prenant l'avis du conseiller présent. - Le bureau de conciliation peut prendre des décisions exécutoires par provision - même si le défendeur n'est pas présent .Ces décisions, comme des ordonnances de référé sont de plein droit exécutoires et ne sont pas susceptibles d’opposition. Ces décisions peuvent porter - Sur la délivrance de bulletins de paye, de certificats de travail ou de tous documents que l'employeur est tenu de délivrer. Le bureau de conciliation peut ainsi ordonner, même d'office, la remise par l'employeur de tout document autre que ceux qu'il est tenu de remettre légalement au salarié Le Bureau de conciliation peut prononcer une astreinte et a le pouvoir de liquider l'astreinte .Si l'employeur n'exécute pas l'ordonnance du bureau de conciliation, le salarié doit s'adresser à nouveau au bureau de conciliation qui fixera alors la somme globale due au salarié par l'employeur condamné (il " liquidera les astreintes "). Logiquement ces décisions ne sont susceptibles d'aucun recours sinon avec la décision au fond. Ceci étant des tempéraments sont apportés En effet selon l'article R 516-18 (ancienne numérotation) un appel immédiat est possible lorsque le bureau de conciliation commet un excès de pouvoir en statuant hors du cadre ci dessus rappelé L'absence de motivation constitue aussi un excès de pouvoir qui justifie un appel immédiat. - Il est admis que l’on peut faire appel lorsque le Conseil a négligé une contestation sérieuse (Compétence, bien fondé de la créance, réalité d'un contrat de travail...) ou s'il y a condamnation au delà des 6 mois. Même chose si le Conseil ordonne une réintégration (hors les cas définis par la Loi) On retiendra également de l'analyse du texte que la demande de condamnation provisionnelle ne peut être demandée que par le seul salarié C) L'AUDIENCE DE JUGEMENT A) PRINCIPES DE BASE La convocation pour l'audience de jugement se fait oralement lors de la comparution en audience de conciliation s'il n'y a pas conciliation bien sur .Les parties émargeront sur le PV (ou plus généralement sur le dossier).cette signature vaut convocation - et si l'une des parties ne comparait pas le jugement sera réputé contradictoire. Si le défendeur ne comparait pas en conciliation la convocation sera faite par le greffe pour l'audience de jugement, par lettre recommandée avec AR confirmée le jour même par lettre simple. A l'audience les parties comparaissent en personne, mais elles peuvent se faire assister ou représenter comme on l'a vu, par les personnes déjà citées. Si le demandeur ne comparait pas en audience de jugement, le Conseil des Prud'hommes pourra - sauf s'il estime qu'un motif légitime justifie une nouvelle convocation Polycopie contentieux sociaux cours de PASCAL LABBEE année 2012-2013 page N°13 - prononcer d'office la caducité de la citation (la demande de caducité peut être rabattue si motif légitime exprimé dans le délai de quinze jours) S’il y a caducité, le demandeur ne pourra réinscrire qu'une seule fois - renvoyer à une audience ultérieure - statuer au fond si le défendeur le demande SI LE DEFENDEUR NE COMPARAIT PAS ; Le Conseil des Prud'hommes peut - statuer au fond - s'il y a motif légitime, renvoyé avec nouvelle convocation - si le défendeur n'a jamais été touché - possibilité de nouvelle convocation pour une autre audience soit par LRAR soit par citation d'huissier Si le Conseil statue au fond, il ne fera droit à la demande qu'autant qu'elle apparaît régulière en la forme, recevable et bien fondée, et au vu des éléments produits par la partie demanderesse (art 472 CPC) On rappellera que devant le Conseil des Prud'hommes la procédure est ORALE, en d'autres termes on ne peut simplement envoyer un dossier .Il faut au moins qu'il y ait présentation Devant le Conseil des Prud’hommes, les règles classiques de procédure s'imposent L'article 6-1 de la CESDH rappelle que chacun a droit au procès impartial Nous avons un texte spécifique en droit interne Prud’homal en ce qui concerne la RÉCUSATION, qui le garantit L'article L.518-1 du Code du Travail fixe les cas de récusation - Si un conseiller a un intérêt personnel à la contestation - s'il y a rapport de parenté (parent allié des parties au 4 eme degré - si dans l'année qui a précédé la récusation il y a eu action judiciaire criminelle ou civile entre eux et une des parties ou son conjoint ou ses parents ou alliés en ligne directe - s'il a donné un avis écrit dans l'affaire - s'ils sont employeurs cadres ouvriers ou employé de l'une des parties en cause Mais sans doute aurons-nous sur l'analyse de l'article 6-1 une vision plus large des cas de récusation La procédure de récusation est classique - elle doit être formée avant tout débat par déclaration écrite remise au Greffe de la Juridiction. b) LA DEMANDE ET LES MOYENS DE DÉFENSE On retiendra en matière prud'homale DEUX règles qui se complètent : - D'une part le principe de l'UNICITE D'INSTANCE qui veut que toute demande dérivant du contrat de travail doit être présentée dans le cadre d'une seule instance (Sauf si la cause de la nouvelle demande est survenue après l'introduction de la première instance) En d'autres termes une instance terminée, le salarié (ou l'employeur) ne peut engager une nouvelle procédure prud'homale si la cause de cette instance se fonde sur une cause existant avant l'engagement du premier procès. - D'autre part le principe de l'ADMISSIBILITE de toute demande nouvelle en cours d’instance, même en cause d'appel Cette demande sera une demande "incidente" ou "additionnelle". .Sur le même principe On peut parfaitement concevoir une modification des demandes, ou un changement du montant de ce qui est demandé. B) Les ripostes à la demande. Polycopie contentieux sociaux cours de PASCAL LABBEE année 2012-2013 page N°14 Elles se regroupent autour de différents objets. Certaines consistent à critiquer les modalités d'exercice de l'action sans critiquer le droit d'agir lui même; ce sont les exceptions (a). D'autres consistent à dénier le droit d'agir : ce sont les fins de non-recevoir (b). Ensuite est abordée la défense au fond, qui est la critique directe de la prétention émise (c). Enfin il se peut que se greffent, une ou des demandes reconventionnelles (d). a) Les exceptions. Il est logique de commencer l'étude des ripostes par celle des exceptions. En effet, sur le plan procédural, elles doivent en principe, être soulevées, avant tout autre moyen, et simultanément, dès que l'acte prétendu nul a été pris : tandis qu'une fin de non recevoir peut être soulevée en tout état de cause. Elles ne sont pas la dénégation du droit d'agir, mais la critique des modalités d'exercice (le demandeur a saisi une juridiction incompétente ; l'acte introductif est nul...). Nous trouvons d'abord l’exception de nullité pour vice de forme. L'une des parties au procès soutient qu'un acte fait par son adversaire ne respecte pas le formalisme imposé par les textes. Cette contestation ne sera reçue qu'autant que la nullité a été expressément prévue par le texte qui a prévu la forme de l'acte, et qu'autant que l'irrégularité fait grief (même si la formalité non respectée était d'ordre public ou substantielle). Cette nullité - qui n'affecte que la forme de l'acte - sera couverte si des moyens autres sont opposés par celui qui pouvait la soulever. Cette exception n'est fondée que sur l'intérêt particulier du plaideur. Elle ne pourra, dès lors, n'être soulevée que par lui. On retiendra en matière prud'homale que les hypothèses sont rarissimes (Absence de formalisme lourd dans l'engagement de la demande) Nous trouvons ensuite les exceptions de nullité pour irrégularité de fond. Le code de procédure en donne la liste à l'article 117 : "... Le défaut de capacité d'ester en justice. Défaut de pouvoir d'une partie ou d'une personne figurant au procès comme représentant soit une personne morale soit une personne atteinte d'une incapacité d'exercice, défaut de capacité ou de pouvoir d'une personne assurant la représentation d'une partie en justice" Absence de mandat par exemple pour une personne qui fait un procès pour le compte du salarié... Ou absence de prévenance du syndicat qui agit au nom d'un salarié Ces nullités de forme ou de fond, si elles sont reçues par le magistrat, amèneront la disparition de l'acte entaché de nullité. S'il s'agit de l'acte introductif, l'instance disparaîtra …Et si une nouvelle instance est réintroduite se posera la question de sa recevabilité au regard du principe d’unicité d’instance. D'autres exceptions ne feront pas disparaître le rapport d'instance mais auront pour résultat de décharger le magistrat saisi du dossier au profit d'une autre juridiction. Ce sont les exceptions d'incompétence, de litispendance, et de connexité. Il se peut que le Conseil des Prud'hommes saisi soit incompétent ratione loci ou ratione materiae. Dans ce cas, l'incompétence peut être soulevée par la partie défenderesse, qui doit non pas prouver le grief, mais motiver son déclinatoire et désigner la juridiction qu'elle estime être compétente. Le juge ne peut soulever d'office son incompétence ratione materiae quand la règle de compétence d'attribution est d'ordre public, ou lorsque le défendeur ne comparaît pas. L'incompétence ratione loci ne peut être soulevée d'office par le juge qu'en matière gracieuse,… ou si le défendeur ne comparaît pas. Polycopie contentieux sociaux cours de PASCAL LABBEE année 2012-2013 page N°15 Nous verrons qu'il est des voies de recours spécifiques en matière de décision sur la compétence. Si le juge s'estime compétent, l'affaire sera gardée par lui à défaut de contredit (contestation de la décision déclarant compétence). Si le juge estime que le procès relève d'une juridiction répressive, arbitrale, administrative ou étrangère, il renvoie les parties à se pourvoir. Si le juge estime que le procès relève d'une autre juridiction de l'ordre judiciaire, non répressive, le dossier est transmis à celle ci. L'instance n'est donc pas annulée. Il y a en matière prud'homale une particularité en matière d'INCOMPETENCE DE LA SECTION chargée d'un dossier. Nous avons vu que le Conseil des Prud'hommes s'organise en sections. Un plaideur peut soutenir que la section à qui l'affaire est dévolue est " incompétente" au profit d'une autre section. Cette difficulté sera tranchée, en dernier ressort par le Président du Conseil des Prud'hommes Le même raisonnement peut-être suivi avec les exceptions de litispendance (même procès pendant devant deux conseils de Prud’hommes différents = difficile à concevoir) et de connexité… (réunion ou jonction de deux procès qu’il est « de bonne administration de la justice » de faire juger par une seule juridiction) Enfin, le dernier type d'exception concerne les exceptions dilatoires. Elles ont pour effet de suspendre l'instance, jusqu'à l'accomplissement d'un acte ou d'un délai (par exemple pour faire inventaire, appeler en garantie un tiers dans un délai donné, attendre la solution d'un litige pendant devant la juridiction pénale (le "pénal tient le civil en l'état «) ou une réponse à une question préjudicielle, ou encore l'exécution d'une mesure d'instruction à la suite d'un jugement avant dire droit) b) les fins de non recevoir. Elles consistent à denier le droit d'agir à celui qui l'exerce. Dans le contentieux privé "constitue une fin de non recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut du droit d'agir tel que le défaut de qualité, le défaut d'intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée". En matière prud'homale On citera plus spécialement : - La prescription (les créances de nature salariales se prescrivent par 5 ans) - le principe de l'UNICITE D'INSTANCE - la problématique de la PÉREMPTION D'INSTANCE (une instance périmée ne peut être reprise...Puisque le principe d'unicité d'instance s'applique) Il en existe d'autres. Certaines sont générales (il s'agit par exemple de la transaction, ou du désistement d'instance - en matière prud'homale le désistement d'instance emporte désistement d'action - principe d'unicité toujours...) On rappellera que le juge peut soulever d'office telle fin de non recevoir qui serait d'ordre public. On indiquera enfin que les fins de non recevoir peuvent être soulevées en tout état de cause, en d'autres termes à tout moment du déroulement du procès. Si une fin de non recevoir est soulevée tardivement dans un but dilatoire, elle est valablement soulevée ; mais le juge peut condamner à des dommages et intérêts celui qui l'a fait sciemment, pour gagner du temps. c) les défenses au fond. On retiendra de façon classique que les défenses au fond peuvent s'organiser autour de trois axes: 1) le débat sur la preuve (le demandeur établît il la preuve de ce qu'il allègue...En procédure prud'homale un certain nombre de spécificités font que le droit de la preuve est original Polycopie contentieux sociaux cours de PASCAL LABBEE année 2012-2013 page N°16 En particulier liées à deux notions : - Le renversement de la charge de la preuve dans certains contentieux (par exemple en matière de licenciement pour faute ou de sanction disciplinaire...L'employeur doit établir les griefs allégués puisque le doute bénéficie au salarié - en matière de licenciement économique .L'employeur doit fournir aux débats les éléments qu'il a communiqués aux représentants du personnel...En matière de licenciement maladie / nécessité pour l'employeur de justifier la perturbation apportée par l'absence du salarié - ou d'inaptitude ..Nécessité de justifier de l'impossibilité de reclassement...) - L'importance des Présomptions (Exemple : en matière de contrat de travail à durée déterminée - si n'est par respecté le formalisme de ce type de contrat On présume qu'il est à durée indéterminée...) 2) le débat sur le fait lui même 3) le débat sur le Droit, avec les deux aspects classiques : -; la qualification- l'analyse de la règle de droit elle même. d) les demandes reconventionnelles. Comme nous l'avons vu le défendeur greffe sur la demande principale, une demande contre celui qui a agi contre lui. Cette demande reconventionnelle est recevable pourvu qu'elle soit liée à la demande principale par un lien suffisant). Pour le reste le régime de la demande reconventionnelle suit le régime de la demande principale pour les autres causes d'irrecevabilité ou d'exception. Elle est en effet une demande autonome, simplement greffée sur une demande principale. b) PRINCIPES DE PROCÉDURE -ORALITÉ DES DÉBATS Le juge doit se prononcer sur toutes les demandes qui lui sont présentées Mais difficulté liée aux DEMANDES NOUVELLES (elles doivent être présentées et débattues de façon contradictoire.). - LE CONTRADICTOIRE Le sens du principe CONTRADICTOIRE doit s'entendre comme une règle imposant à la fois qu'une partie ne puisse être jugée sans avoir été entendue ou appelée, ni sans avoir eu le temps et les moyens d'être informée des causes du litige et de pouvoir y opposer tout moyen contraire. Un certain nombre de règles (a) vont organiser ce débat contradictoire, et pour sanctionner ces règles le magistrat sera investi de pouvoirs spécifiques (b). a) Le principe du contradictoire s'entend donc d'abord comme un ensemble d'obligations imposées aux parties d'un procès civil, et au juge, à la fois gardien et débiteur celles ci. 1) Dans le contentieux privé, les obligations pèsent sur les parties, qui doivent se faire connaître en temps utile les moyens de fait, les moyens de preuve, et les moyens de droit qu'elles entendent présenter ou développer. 2) L'obligation de communiquer. Le contradictoire contient surtout l'obligation pesant sur chacune des parties de faire connaître "à temps" les arguments et les pièces. Chacune des parties doit avoir "le temps" d'apprécier les pièces et Polycopie contentieux sociaux cours de PASCAL LABBEE année 2012-2013 page N°17 les arguments adverses et d'y répondre. L'article 15 du code de procédure, fixe l'obligation de communication des pièces "en temps utile" et le code interdit les "notes en délibéré" (messages transmis au juge par une partie alors que l'affaire a été plaidée, le "débat contradictoire" étant dès lors clos). 3) L'obligation de loyauté. L'obligation de communication se double de l'obligation de "débat loyal". Les parties doivent s'abstenir de procédés déloyaux. Certes, cette obligation ne va pas jusqu'à obliger une partie de reconnaître la position de la partie adverse, ou de reconnaître ce que cette dernière serait en peine de prouver. Il n'y a pas, finalement, à charge des parties d'obligation de "vérité". Dire la vérité incombe au témoin. L'obligation des parties n'est que de respecter une certaine loyauté ; manque au devoir de loyauté celui qui sciemment, maquillerait des pièces ou affirmerait comme étant juste une pièce qu'il saurait fausse. Le magistrat, débiteur de l'obligation de juger, est créancier des parties du devoir qui pèse sur elles "d'apporter leur concours aux actes d'instruction". Lorsque le magistrat est saisi, il se doit non seulement de donner une réponse à la question posée, mais surtout une réponse éclairée à même d'être reconnue comme juste. Dans cet esprit, les actes d'instruction peuvent être ordonnés par le juge. Si celui-ci entend obtenir une information plus complète que celle qui ne transparaîtrait que des pièces communiquées aux débats par les parties. Ces dernières doivent "apporter leur concours". Si l'une des parties refuse, le juge en "tirera toutes conséquences". Les parties doivent donc participer à la manifestation d'une certaine vérité ; mais finalement rien de plus. b) La sanction Ce principe du contradictoire, pour être effectif, doit être sanctionné. Le juge est le gardien du principe du contradictoire : "le juge en toutes circonstances fait observer et observe lui même le principe de la contradiction". Lorsque le juge fait observer le principe du contradictoire, il a deux possibilités d'action : d'une part agir sur le temps. Si l'une des parties n'a pas eu le temps de répondre ou de faire tel acte de procédure, le magistrat reportera la date de l'audience en prononçant une "remise". Il a une seconde arme, c'est celle qui touche aux pièces et arguments. Le juge ne doit pas retenir dans sa décision les pièces qui n'auraient pas été valablement communiquées aux débats. Le juge peut encore autoriser celui qui n'aurait pas eu le temps de répondre sur tel élément à le faire, par une note en délibéré (qui devient permise lorsqu'elle est autorisée par le juge). Également, le juge peut ordonner la réouverture des débats. Le juge a encore la faculté, d'office ou sur la demande de l'une des parties, d'enjoindre à l'autre de communiquer une pièce ou un élément qu'elle ne verse pas spontanément aux débats. Enfin, les parties sont créancières sur le juge du même devoir de respect du contradictoire. Le juge doit observer le principe du contradictoire. Cela justifiera, par exemple, qu'il ordonne la re-convocation d'une partie non présente et citée autrement qu'à personne. Le juge se doit également de vérifier que les délais de comparution ont été respectés. Le juge doit veiller à ce que chaque partie ait le droit de s'exprimer (audi alteram partem). Le débat est contradictoire sur tout. Et On pourrait ajouter que, s'il a la faculté d'interroger les parties sur tel élément de fait, le juge ne peut fonder sa décision sur des éléments qu'il connaîtrait personnellement, s'ils n'ont pas intégré le débat contradictoire. Si le juge soulève d'office un moyen de pur droit, chacune des parties doit être en mesure de s'expliquer sur tout moyen élevé ou opposé, quel que soit celui qui soulève le moyen. Le principe du contradictoire suppose encore que le magistrat ne puisse faire exécuter ou ordonner des investigations sans que celles ci ne soient exécutées également de façon contradictoire. Cette Polycopie contentieux sociaux cours de PASCAL LABBEE année 2012-2013 page N°18 conception des obligations des parties et des devoirs du juge-arbitre, rend compte d'une relative neutralité du juge civil, qui veille, à ce stade préliminaire du procès, à la bonne tenue du débat, mais n'y intervient guère. Le litige qui viendrait à naître sur une décision de cette nature est, du fait de cette motivation préalable dès le départ circonscrit. SECTION IV) LES VOIES DE RECOURS LES VOIES DE RECOURS EN MATIERE PRUD'HOMALE On distingue de façon classique les voies de recours qui amènent nécessairement un nouveau débat (voies de rétractation) - des voies de recours fondées sur l'allégation d'une erreur, entre les mêmes parties présentés au litige (appel et cassation) Les voies de RÉTRACTATION s'exercent devant la même juridiction que celle qui a rendu la décision critiquée (Opposition, tierce opposition, révision) I) VOIES DE RECOURS PORTÉES DEVANT LA JURIDICTION QUI A RENDU LA DÉCISION ATTAQUÉE a) l'opposition qui tend à faire rétracter un jugement rendu par défaut (adversaire non touché par les convocations et décision en dernier ressort). Elle est régie par les articles 473. 538 et 571 du Nouveau Code de procédure civile et R.1463-1 du Code du travail ; b) La tierce opposition qui tend à faire rétracter ou réformer un jugement par un tiers qui l'attaque par Ce que la décision rendue porte atteinte à tel de ses intérêts .Ce tiers fera convoquer les parties au jugement, devant la juridiction qui a rendu la décision de façon que cette dernière soit revue « dans la limite de l’intérêt du tiers) . Elle est régie par les articles 582 et suivants du Nouveau Code de procédure civile ; c) le recours en révision qui tend à faire rétracter un jugement passé en force de chose jugée pour qu'il soit à nouveau statué en fait ou en droit : cette voie de recours exceptionnelle qui ne peut être utilisée qu'au cas où la décision attaquée ne peut plus l'être par les voies de recours de droit commun, est régie par les articles 593 à 603 du Nouveau Code de procédure civile. Elle suppose que la décision. Initiale ait été rendue sur des éléments faux (faux témoin, faux serment..) ou frauduleux. II) LES VOIES DE RECOURS ORDINAIRES : A) L'APPEL L’appel qui tend à faire rejuger l'affaire en fait et en droit pour aboutir à une décision confirmant ou au contraire infirmant, en totalité ou partiellement, le jugement rendu par le conseil des prud’hommes. Il oppose l'appelant (qui est le demandeur à l'appel) à l'intimé (le défendeur à l'appel principal) ; Quels sont les jugements susceptibles d'appel ? En principe, un jugement n'est susceptible d'appel que s'il est tranche au fond On réservera les ordonnances de référé (mais ce ne sont pas des jugements) Les jugements avant dire droit ne sont pas susceptibles d'appel (Exceptions qui confirment la règle : Pour les jugements ordonnant une expertise et ceux prononçant un sursis à statuer. l'appel peut être autorisé par le premier président de la cour d'appel s'il y a motif grave et légitime. (NCPC, art. 272 et 380) . Polycopie contentieux sociaux cours de PASCAL LABBEE année 2012-2013 page N°19 B) SPÉCIFICITÉ PRUDHOMALE : DÉTERMINATION DU TAUX DE RESSORT Un jugement est susceptible d'appel lorsqu'un des chefs de demande excède le taux de compétence en dernier ressort du conseil de prud'hommes La possibilité de faire appel d'un jugement du conseil de prud'hommes est déterminée à partir du taux de compétence en dernier ressort : ce taux est fixé à l'article D. 517-1 du Code du travail et revalorisé périodiquement. Le taux de compétence applicable est celui en vigueur au moment de l'introduction de la demande devant le conseil de prud'hommes. Pour savoir si ce taux est ou non atteint, il faut prendre en considération les demandes telles qu'elles figurent dans le dernier état des conclusions. Peu importe que la demande soit initiale ou incidente (faite en cours d’instance) Un jugement est susceptible d'appel dès lors que l'un des chefs de demande sur lesquels il statue dépasse ce taux de compétence en dernier ressort. Pour l'appréciation du taux de compétence, il convient d'additionner les différentes prétentions du demandeur et de les regrouper en un seul chef de demande selon qu'elles présentent un caractère salarial ou indemnitaire. En application de ce principe, présentent un caractère salarial et constituent un seul chef de demande, les prétentions d'un salarié tendant au paiement - de salaires, primes, heures supplémentaires et indemnités de congés payés, à l'exception des indemnités compensatrices de congés payés et de préavis. - de rappel de salaires, d'heures supplémentaires et de repos compensateurs. A l'inverse, présentent un caractère indemnitaire lié à la rupture du contrat et constituent un seul chef de demande, les prétentions d'un salarié tendant au paiement : - de l'indemnité légale ou conventionnelle de licenciement, de l'indemnité compensatrice de congés payés et de l'indemnité compensatrice de préavis ; - des indemnités pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, pour procédure irrégulière ... ; Les demandes de remboursement des dépens ou de condamnation au titre de l'article 700 n'entrent pas en ligne de compte Il peut s'agir d'une demande reconventionnelle, sauf si cette demande reconventionnelle est fondée exclusivement sur la demande principale. Mais les demandes reconventionnelles reconnues mal fondées, qui ont eu pour effet de rendre, en raison de leur montant, le jugement susceptible d'appel, exposent leur auteur à une amende civile et à des dommages-et-intérêts s'il en est réclamé... Un jugement rendu sur une demande dont le montant est indéterminé est également susceptible d'appel Un jugement prud'homal qui statue sur une demande dont la valeur est indéterminée est susceptible d'appel, à l'exception des jugements ordonnant la remise de pièces par l'employeur (NCPC, art. 40. Une demande est indéterminée quand elle vise à faire trancher une question de principe. Par exemple :- demande d'annulation de sanction disciplinaire - demande tendant au maintien, sans autre précision, de l'avantage acquis constitué par l'octroi d'une prime annuelle dite " de gratification " ; - demande de paiement d'une prime mensuelle depuis une date déterminée " jusqu'au jour du jugement "; Polycopie contentieux sociaux cours de PASCAL LABBEE année 2012-2013 page N°20 - demande tendant à la suppression sur plusieurs bulletins de paie de la mention de l'activité de représentation du personnel du salarié concerné; Mais la demande de payement de x heures de travail, bien que non chiffrée, n'est pas indéterminée puisque son montant est facilement déterminable. Si l'action en justice vise à interpréter ou à faire appliquer une convention ou un accord collectif, ou au contraire à voir dire inapplicable à l'entreprise telle convention collective de branche même si le montant de la demande soit inférieur au taux de compétence en dernier ressort du conseil de prud’hommes. La demande doit être considérée comme indéterminée Le jugement est en dernier ressort et n'est donc pas susceptible d'appel lorsque - aucun chef de demande initiale ou incidente ne dépasse à lui seul le taux de compétence en dernier ressort ou statuant sur la demande tend à la remise, même sous astreinte, de certificats de travail, de bulletins de paie, ou de toute autre pièce que l'employeur est tenu de délivrer, à moins que le jugement ne soit susceptible d'appel en raison du montant des autres demandes. Le délai d'appel est d'un mois et de quinze jours en matière de référés. La qualification contenue dans le jugement est sans incidence sur la possibilité de faire appel Ainsi il est possible de faire appel d'un jugement qui a faussement été qualifié en dernier ressort. NCPC, art. 536. L'appel incident, par lequel l'intimé demande à son tour à la cour d'appel déjà saisie par l'appelant de réformer les dispositions du jugement qui lui sont défavorables, ou se statuer sur des demandes nouvelles et reconventionnelles, peut également être formé en tout état de cause alors même que le délai pour former l'appel principal serait expiré. NCPC, art. 550. Le délai d'un mois court à compter de la notification de la décision de première instance. Lorsque cette notification est faite par lettre recommandée avec AR, expédiée par le secrétariat-greffe du conseil de prud'hommes, le délai court à compter de la date portée sur l'avis de réception signé par le destinataire.( le délai d'appel ne court pas si la lettre n'est pas remise.. dans cette hypothèse le Greffe invite le gagnant à signifier par ministère d'huissier ) L'appel est formé par une déclaration que la partir ou tout mandataire fait, ou adresse par pli recommandé, au secrétariat Greffe de la chambre sociale de la Cour d’Appel L'appel peut être fait par LRAR adressé au Greffe, la date de l'appel est celle de l'expédition de la lettre recommandée ainsi adressée Si l'appel est formé par déclaration ou par lettre simple, la date prise en considération est celle à laquelle l'appel a été enregistré par le greffe. La déclaration doit indiquer les nom, prénoms, profession et domicile de l'appelant ainsi que les nom et adresse des parties contre lesquelles l'appel est dirigé. Elle désigne le jugement dont il est fait appel et mentionne, le cas échéant. les chefs de jugement auxquels se limite l'appel ainsi que les nom et l'adresse du représentant de l'appelant devant la cour. La copie du jugement est jointe à la déclaration d’appel... Procédure en appel Il existe au niveau de chaque cour d'appel au moins une chambre sociale, chargée de juger les affaires relatives à la sécurité sociale, au contrat de travail et à l'application des lois sociales. Les chambres sociales sont composées de magistrats de carrière Polycopie contentieux sociaux cours de PASCAL LABBEE année 2012-2013 page N°21 Les débats se déroulent habituellement devant la chambre sociale en formation collégiale, composée d'un président et de deux conseillers. Mais l'audience peut également être tenue " à juge unique" si les parties ne s'y opposent pas. Dans ce cas le magistrat qui a tenu seul l'audience en rend compte à la cour dans son délibéré. NCPC, art. 945-1. La procédure devant la chambre sociale statuant en appel de jugements prud'homaux est dite " sans ministère d'avocat obligatoire ". Les parties peuvent donc se défendre seules devant la cour d'appel ou se faire assister ou représenter dans les mêmes conditions que devant le conseil de prud'hommes. LE CONTREDIT DE COMPETENCE Le contredit est un recours contre une décision de première instance ayant statué seulement sur la question de la compétence, matérielle ou territoriale de la juridiction prud'homale Le contredit doit être formé dans un délai de 15 jours. Ce délai court non pas à compter de la notification du jugement, mais de son prononcé, (NCPC, art. 82).D'où l'importance de connaître la date du délibéré L'article 450 du NCPC oblige le président à indiquer aux parties la date à laquelle était renvoyé le prononcé du jugement que lorsque celui-ci ne peut être rendu sur-le-champ, Le contredit se forme au secrétariat de la juridiction qui a rendu la décision. Il doit à peine d'irrecevabilité être motivé, c'est-à-dire faire état d'un moyen de nature à justifier l'incompétence de la juridiction dont on conteste la décision. Le contredit formé par une lettre non motivée peut être régularisé et, par conséquent, être considéré comme recevable, si la motivation du contredit est apportée avant l'expiration du délai de 15 jours. Le secrétaire de la juridiction qui a rendu la décision notifie sans délai à la partie adverse une copie du contredit, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, et en informe également son représentant si elle en a un. Il transmet simultanément au greffier en chef de la cour le dossier de l'affaire avec le contredit et une copie du jugement. Le premier président fixe la date de l'audience, laquelle doit avoir lieu dans le plus bref délai, et le greffier de la cour en informe les parties par lettre recommandée avec demande d'avis de réception. Les effets du contredit Si le conseil de prud'hommes s'est déclaré compétent, l'instance est suspendue jusqu'à ce que la cour d'appel ait rendu la décision. La cour d'appel peut décider de faire droit à l'exception d'incompétence et renvoyer l'affaire à la juridiction qu'elle estime compétente. Cette décision s'impose aux parties et au juge de renvoi. Lorsque la cour est juridiction d'appel relativement à la juridiction qu'elle estime compétente, elle peut procéder à l’évocation c'est à dire évoquer le fond si elle estime de bonne justice. De donner à l'affaire une solution définitive après avoir ordonné elle-même, le cas échéant, une mesure d'instruction. Enfin, lorsque la cour estime que la décision qui lui est déférée par la voie du contredit devait l'être par celle de l'appel, elle n'en demeure pas moins saisie. L'affaire est alors instruite et jugée selon les règles applicables à l'appel des décisions rendues par la juridiction dont émane le jugement frappé de contredit. LE POURVOI EN CASSATION . Cette voie de recours s'exerce devant la Cour de cassation qui censure la non-conformité du jugement ou de l'arrêt attaqué aux règles de droit ou la mauvaise activité du juge. Polycopie contentieux sociaux cours de PASCAL LABBEE année 2012-2013 page N°22 La Cour de cassation ne constitue pas un troisième degré de juridiction. Elle ne rejuge pas les faits mais contrôle si la décision rendue par le conseil de prud'hommes en dernier ressort ou par la cour d'appel est conforme au droit. Le pourvoi ne peut être introduit que pour l'un des moyens suivants - la violation de la loi (mauvaise analyse de la règle de droit) - l'incompétence ; - l'excès de pouvoir; - la violation des formes - le vice de motifs (le "manque de base légale" ex: contrariété des motifs, défaut de réponse à conclusions..). En effet, il n'est pas possible en principe de faire valoir devant la Cour de cassation des moyens nouveaux qui n'avaient pas été soumis préalablement aux juges du fond : l'absence de motivation de la lettre de licenciement, ou le dépassement du délai de deux mois imparti par l'article L. 122-44 pour infliger une sanction, ne peuvent ainsi être invoqués pour la première fois devant la Cour de cassation. Le pourvoi en cassation n'a pas d'effet suspensif c'est-à-dire qu'il ne peut suspendre l'exécution de la décision attaquée. Au contraire il faudra justifier que l'exécution de la décision est intervenue sinon le pourvoi risque de ne pas être instruit. En matière prud'homale le recours à un avocat à la Cour de cassation est devenu - depuis 2.006 obligatoire Il s'agit donc dorénavant d'une "Procédure avec représentation obligatoire" Le pourvoi en cassation doit être formé dans les deux mois suivant la notification du jugement en dernier ressort ou de l'arrêt... Le pourvoi en cassation se fera par le dépôt, au greffe de la cour de cassation, d'une "déclaration de pourvoi ", signée par l'avocat aux conseils, qui devra comporter des mentions semblables à celles contenues dans la déclaration d'appel. Ce dépôt sera suivi des mêmes diligences que celles accomplies par le greffier de la cour d'appel (lettre adressée au défendeur au pourvoi - en cas de retour de la lettre au greffier, obligation pour le demandeur au pourvoi de lui signifier la déclaration de pourvoi, en lui indiquant l'obligation de constituer un avocat, ainsi que le délai pour déposer un mémoire en réponse - invitation faite au greffier de la juridiction du fond de transmettre le dossier). A peine de déchéance prononcée par le Premier Président de la cour de cassation, le dépôt de la déclaration de pourvoi doit être suivi, dans le délai de cinq mois, de la, signification au défendeur (et du dépôt au greffe) d'un mémoire', qui contient les moyens de droit invoqués - chacun de ces moyens ou de ses éléments (appelés branches,,) ne doit, à peine d'irrecevabilité, viser qu'un seul cas d'ouverture de pourvoi en précisant quel est ce cas d'ouverture; la mesure dans laquelle la décision attaquée est critiquée (totalité ou partie) ; enfin, en quoi la décision attaquée est critiquable, Au mémoire devront être jointes une copie de la décision attaquée, et de celle sur laquelle, éventuellement, a statué celle-ci ; enfin les pièces invoquées à l'appui du pourvoi. L'avocat du défendeur au pourvoi a un délai de trois mois pour (à peine d'irrecevabilité, prononcée d'office) déposer au greffe son mémoire en réponse et le notifier sans formes (comme les conclusions entre avocats devant les juridictions du fond). Dans le même délai. Et sous les mêmes sanctions, le défendeur pourra déposer et notifier un pourvoi incident ou un pourvoi provoqué (le défendeur à ce pourvoi aura alors un délai d'un mois pour déposer et notifier son mémoire en réponse). S'il y a cassation l'affaire sera rejugée par une juridiction de renvoi, désignée par l'arrêt de cassation. (Sauf s'il y a cassation sans renvoi) Polycopie contentieux sociaux cours de PASCAL LABBEE année 2012-2013 page N°23 La juridiction de renvoi doit être saisie, par simple déclaration son secrétariat-greffe, dans les 4 mois suivant la notification de l'arrêt de cassation. Passé ce délai, la juridiction de renvoi ne peut plus être saisie et le jugement rendu en premier ressort acquiert la force de chose jugée. NCPC, art- 1034. II) PROCÉDURES SPÉCIALES Nous ne développerons que deux aspects spécifiques : - la procédure de référé - la Procédure de contestation d'un licenciement individuel économique d'un salarié non protégé. A) LA PROCÉDURE DE RÉFÉRÉ PRUD'HOMAL Comment saisir le Conseil des Prud'hommes en formation de référés ? La demande en référé peut être formée - soit par acte d'huissier de justice c'est à dire par CITATION A COMPARAITRE devant la formation des référés du Conseil des Prud'hommes (dans une telle hypothèse il est prudent de solliciter préalablement le Conseil des Prud'hommes pour obtenir une date) La citation doit contenir toutes les mentions classiques de l'acte d'huissier Une copie de l'assignation doit être " enrôlée " c'est à dire remise au secrétariat du conseil de prud'hommes, pour inscription sur le rôle de l'audience au plus tard la veille de l'audience. - soit selon les modalités normales de saisine du conseil de prud'hommes - c'est à dire par déclaration au Greffe du Conseil des Prud’hommes. Les règles relatives à la comparution, l'assistance et la représentation s'appliquent au référé prud’homal. De même l'audience se déroule comme devant le bureau de jugement : le caractère d'urgence ne dispense pas les parties de respecter la contradiction et le juge doit s'assurer à cet égard qu'il s'est écoulé un délai suffisant entre l'assignation et l'audience pour que le défendeur ait pu préparer sa défense. La formation de référé peut être saisie même lorsque l'affaire est déjà engagée devant les prud'hommes ou éventuellement en même temps que l’on saisit le conseil de prud'hommes sur le fond du litige. En effet les deux actions sont indépendantes : Le fait que le demandeur se soit désisté de l'action intentée devant la formation de référé du conseil de prud'hommes ne lui interdit pas d'agir devant la formation de jugement.( la règle de l'unicité d'instance s'entend d'instance " au fond" ) COMPÉTENCE DE LA FORMATION DES RÉFÉRÉS DU C.P.H Au sens strict la compétence d'une formation de référé est " calquée" sur la compétence (ratione materiae et loci) de la juridiction dont elle est l'émanation Et donc la compétence de la formation de référé du conseil de prud'hommes correspond au champ de la compétence prud'homale elle-même... C'est à dire aux litiges individuels nés de la relation de travail : A contrario ce sera le Juge des Référés Droit commun (Président du tribunal de grande instance statuant en référé) qui sera compétent sur les litiges d'ordre collectif: par exemple, actions en expulsion de grévistes ou en matière d'affichage syndical QUAND Y A-T-IL "LIEU A RÉFÉRÉ" ? Polycopie contentieux sociaux cours de PASCAL LABBEE année 2012-2013 page N°24 Les pouvoirs de la formation de référés sont liés à l'urgence ou à l'évidence La formation de référé peut ordonner toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l'existence d'un différend, dans les cas d'urgence ; Elle peut prescrire les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite et ce, même en présence d'une contestation sérieuse ( Par exemple : Réintégration d'un salarié protégé suite à un licenciement irrégulier : en effet le non-respect de la procédure de licenciement des salariés protégés (représentants du personnel, candidats aux élections de représentants du personne-1, conseillers prud'hommes) entraîne la nullité du licenciement et par conséquent un trouble manifestement illicite nécessitant une remise en l'état , même chose pour le licenciement de salariés pour faits de grève Elle peut accorder une provision au créancier ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire, dans le cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable. (C’est le domaine de " l'évidence») En aucun cas la demande ne doit impliquer de trancher une question de fond, qui relève du seul bureau de jugement ; LA PASSERELLE Si le Bureau des référés constate qu'il n'y a pas lieu à référé en raison d'une difficulté sérieuse au fondmais que néanmoins il y a urgence , il peut , avec l'accord des parties , se transformer en bureau de conciliation ( en pratique il se retire en salle de délibéré ,puisque la conciliation n'est pas tenue en public ) .La tentative de conciliation est tenue entre les parties qui peuvent alors soit se concilier - soit ne pas se concilier auquel cas l'affaire est renvoyée directement en audience de jugement . L'ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ Elle est par nature de plein droit exécutoire. Elle ne tranche pas au fond et n'a pas l'autorité de la chose jugée. Elle est susceptible d'appel (délai d'appel : 15 jours à compter de la notification qui est faite par le greffe) B) LA SPÉCIFICITÉ DE LA PROCÉDURE DE CONTESTATION D'UN LICENCIEMENT ÉCONOMIQUE D'UN SALARIÉ NON PROTÉGÉ Le Code du Travail organise une procédure spécifique devant le Conseil des Prud'hommes quant il s'agit d'un licenciement pour motif économique individuel ou collectif (mais en pratique tout cela semble illusoire.) La mise en œuvre de cette procédure est décidée au moment de la saisine du conseil de prud'hommes. Il appartient donc au demandeur de préciser lors de la saisine, la nature économique du licenciement, à l'origine du litige. Logiquement le contentieux des licenciements économiques relève d'une chambre spéciale (créée au sein des sections des conseils de prud'hommes) qui statue en urgence. Seulement cette création dépend finalement de la taille du CPH Toute section (on sait que le CPH est divisé en 5 sections) comportant plusieurs chambres (ce qui suppose un gros CPH) doit comprendre une chambre compétente pour connaître des litiges relatifs aux licenciements économiques Les sections n'ayant pas de chambre (comme c'est le cas dans la majorité des conseils) ont la faculté (et non l'obligation) de constituer une chambre spéciale. Mais ceci suppose un nombre de conseillers Polycopie contentieux sociaux cours de PASCAL LABBEE année 2012-2013 page N°25 suffisant (16) et une décision du premier président de la cour d'appel sur proposition de l'assemblée générale du conseil de prud'hommes. En l'absence de chambre spéciale, c'est la section qui reste compétente. Afin d'accélérer leur règlement, les litiges relatifs aux licenciements économiques ont été enserrés dans certains délais L'employeur doit communiquer aux juges les éléments d'information fournis aux représentants du personnel lors de la procédure de licenciement. Cette communication doit se faire dans les 8 jours suivant la date de réception de la convocation devant le bureau de conciliation. Ces documents sont déposés au greffe ou envoyés par lettre recommandée avec accusé de réception... La séance de conciliation doit avoir lieu dans le mois- de la saisine du conseil de prud'hommes Le bureau de conciliation détermine les mesures et délais nécessaires à l'instruction de l'affaire ou à l'information du conseil, après avoir provoqué l'avis des parties, et fixe le délai de communication des pièces ou des notes que celles-ci comptent produire à l'appui de leurs prétentions, Les mesures d'instruction et d'information doivent être exécutées Dans un délai n'excédant pas 3 mois. Ce délai ne peut être prorogé que par le bureau de jugement et sur la demande motivée du technicien ou du conseiller rapporteur commis. C. trav., art. R. 516-47. Si, lors de la séance de conciliation, une section du conseil de prud'hommes est saisie par plusieurs demandeurs de procédures contestant le motif économique d'un licenciement collectif, le bureau de conciliation en ordonne la jonction. A défaut de conciliation, le bureau de conciliation fixe la date d'audience du bureau du jugement ; celui-ci doit statuer dans un délai ne pouvant excéder 6 mois à compter de la date à laquelle l'affaire lui a été renvoyée CHAPITRE II) LES LITIGES COLLECTIFS NOUS VERRONS LA QUESTION SOUS DEUX ASPECTS : I) LES CONFLITS COLLECTIFS ET LEURS MODES DE REGLEMENT II) LA PROTECTION DES INTÉRETS COLLECTIFS - La mise en place des institutions représentatives du personnel (Le contentieux électoral) - l’action syndicale" - Les règles relatives aux contrôles et actions de l'Inspection du Travail et de la médecine du Travail. I) LES CONTENTIEUX LIES AUX CONFLITS COLLECTIFS DU TRAVAIL Le Droit de grève est constitutionnellement reconnu mais il n'est pas - ou très peu- réglementé Ce droit de grève, même s'il s'exerce collectivement, est un droit individuel que tout salarié peut choisir d'exercer ou de ne pas exercer. Le choix de ne pas faire grève est légitime et l'employeur est tenu de fournir du travail aux salariés qui ne participent pas à la grève. Sauf s'il prouve qu'il est dans une situation contraignante de nature à le libérer de son obligation de fournir du travail à ses salariés (force majeure ?) Dans le secteur privé peu de dispositions légales " réglementent " le droit de Grève. Sauf les règles disant : - que la grève ne rompt pas le contrat de travail, sauf faute lourde imputable au salarié Polycopie contentieux sociaux cours de PASCAL LABBEE année 2012-2013 page N°26 - Que tout licenciement prononcé pour fait de grève, en l'absence de faute lourde est nul de plein droit - Qu' aucun salarié ne peut être sanctionné ou licencié en raison de l'exercice normal du droit de grève, toute disposition ou tout acte contraire étant nul de plein droit ; - Que l'exercice du droit de grève ne saurait donner lieu de la part de l'employeur à des mesures discriminatoires en matière de rémunération et d'avantages sociaux. - Qu'il est interdit de faire intervenir des entreprises ou des services de surveillance ou de gardiennage de transport de fonds ou de sécurité des personnes - Que l'exercice du droit de grève ne doit pas faire l'objet d'une mention sur le bulletin de paye. - Qu'en aucun cas, un contrat de travail temporaire ne peut être conclu pour remplacer un salarié dont le contrat de travail est suspendu par suite d'un conflit collectif de travail. - Qu'en aucun cas un contrat de travail à durée déterminée ne peut être conclu pour remplacer un salarié dont le contrat de travail est suspendu par suite d'un conflit collectif de travail. Alors la question se pose de la définition même du droit de grève et de ses composantes. Si les dispositions constitutionnelles et législatives sont parcellaires, ne peut on avoir recours aux autres domaines du droit pour définir ben totalité ce qu’est le « droit de grève » ? Et finalement n’est ce pas au travers du contentieux ou des contentieux que sera défini de façon prétorienne le contenu du droit de grève (Les contentieux pouvant etre judiciaire, administratif et répressif) La Grève est un mouvement collectif, de personnes liées par un contrat de travail. La définition jurisprudentielle est la suivante : la grève est la cessation collective et concertée du travail, en vue d'appuyer, ou d'obtenir la satisfaction des revendications professionnelles déjà déterminées et connues de l'employeur. Il importe de définir deux notions / -D'une part ce qu'est une grève, pour la distinguer des mouvements qui ne peuvent constituer un mouvement de grève La reconnaissance de la grève, en tant que liberté fondamentale et droit reconnu à tout travailleur, impose aux juges de définir avec précision les mouvements qui relèvent du statut protecteur du salarié gréviste et ceux qui doivent en être exclus... La grève existe ou n'existe pas. -D'autre part de déterminer quant une grève peut devenir " abusive" Comme tout droit, le droit de grève peut être exercé abusivement. Les tribunaux ont donc été amenés à fixer certaines limites au droit de grève, en vue d'en éviter un usage "abusif». Et On verra que la problématique est en fait double puisque la grève - mouvement collectif - se traduit par l'action de différents salariés, tous liés par un contrat de travail Quels sont alors les comportements individuels qui peuvent générer sanction individuelle ? Comment passer du " collectif" au rapport " personnel" ? A) Quand y- a t-il GREVE Il faut repartir de la définition donné par la Jurisprudence Il faut d'abord une cessation du travail La grève suppose un arrêt complet du travail. La grève perlée qui consiste à exécuter le travail au ralenti ou dans des conditions différentes des conditions habituelles ne constitue pas un exercice licite du droit de grève. Il n'y a pas arrêt du travail quand le travail est exécuté au ralenti ou dans des conditions volontairement défectueuses. La grève du zèle, consistant à appliquer très strictement les consignes données pour l'exécution du travail, aboutit elle aussi à ralentir (parfois considérablement) cette exécution. Même s'il n'y a pas arrêt Polycopie contentieux sociaux cours de PASCAL LABBEE année 2012-2013 page N°27 du travail, et parce que l’on ne peut soutenir qu'il y a mauvaise exécution du travail il semblerait que l’on puisse dire que la grève du zèle rentre dans la définition de la grève On ne peut admettre non plus la grève " d'auto satisfaction" Ne constitue pas par exemple une grève le refus de venir travailler un samedi alors que l'entreprise avait organisé le travail le samedi. La cessation du travail doit être collective et concertée La grève ne peut pas être le fait d'un seul salarié sauf si elle s'inscrit dans un cadre plus large (national par exemple) ou si le salarié est seul dans l’entreprise. Il n'est pas nécessaire que la totalité ni même la majorité du personnel de l'établissement ou de l'entreprise participe à la grève La grève est une action concertée La concertation préalable à la grève n'implique pas que la grève ait été préparée à l'avance : La grève peut se déclencher spontanément, mais elle doit traduire une décision commune des salariés d'entamer un mouvement revendicatif. En d'autres termes la concertation s'assimile à la volonté commune d’agir. Un salarié qui déclencherait seule une grève à laquelle se rallieraient ses collègues n'est pas " gréviste" lors du déclanchement. ... pour soutenir ou obtenir satisfaction sur des Revendications professionnelles licites et collectives Ces revendications sont professionnelles lorsqu'elles portent par exemple sur les salaires, Elles peuvent concerner aussi d'autres aspects de la vie professionnelle. (Modifications des conditions de travail ; la mise à disposition d'un moyen de transport.. ou de matériel adapté... Elles doivent porter sur une revendication collective : Par exemple contre les menaces de compression de personnel préfigurées par le licenciement de plusieurs salariés ; Grève parce que l'employeur avait enlevé à l'établissement les moyens lui permettant de fonctionner normalement, Mais on peut concevoir des actions de " solidarité" (grève appuyant une demande d'élection de délégués du personnel) ou encore grève consécutive à l'annonce d'un licenciement individuel économique. La grève déclenchée à l'intérieur d'une entreprise pour protester contre des sanctions infligées à certains salariés, et pour amener l'employeur à revenir sur ces sanctions, peut être estimée licite. Mais la grève de solidarité sera considérée comme injustifiée si la sanction infligée au salarié correspond à une faute personnelle de celui-ci, et si aucune revendication n'est émise ... soutenir un salarié qui a commis une faute n'est pas une revendication professionnelle La grève peut également être de solidarité vis à vis de salariés extérieurs à l'entreprise .La participation à une grève général est une grève licite dès lors qu'elle tend à la satisfaction de certaines revendications d'ordre social et professionnel. La revendication doit être connue de l'employeur Et on ajoutera : " à même d'être satisfaite par l'employeur, et de sa compétence " (On ne peut demander à l'employeur de changer la loi impérative...il peut l’améliorer, pas la faire disparaître.) Même s'il n’appartient pas au Juge " de substituer sa propre appréciation de la rationalité du mouvement collectif à celle normalement débattue entre employeur et syndicat professionnel, non plus que d'exercer un contrôle sur les problèmes d'ordre technologique, économique ou financier qui font l'objet du débat et d'imposer sa solution aux dits problèmes ; La grève risquerait alors d'être estimée " abusive" parce que portant sur des revendications " abusives». La présentation de revendications professionnelles doit précéder la cessation du travail. Il n'est pas nécessaire que l'employeur ait refusé les revendications Polycopie contentieux sociaux cours de PASCAL LABBEE année 2012-2013 page N°28 La Cour de Cassation a estimé que "si la présentation de revendications professionnelles doit être préalable, la grève n'est pas soumise en principe à la condition d'un rejet desdites revendications par l'employeur. Dans cette mesure on admettra que rien n'impose un " préavis de grève" La grève ne perd pas son caractère licite du fait qu'elle n'a pas été précédée d'un avertissement. Les conventions collectives ne peuvent plus valablement limiter le droit de grève par l'instauration d'un préavis En effet, « la grève étant un droit constitutionnellement reconnue seule la loi peut créer un délai de préavis de grève s'imposant à eux ». Sous réserve que l'employeur ait connaissance des revendications, les grévistes peuvent déclencher leur mouvement à n'importe quel moment : la grève « surprise » est parfaitement licite. La revendication doit être de nature " Professionnelle " Les grèves politiques ne sont pas des grèves Si la grève a à la fois un caractère politique et un caractère professionnel, les juges du fond devront rechercher quelles ont été ses causes déterminantes. Sera licite la grève dont la cause directe est professionnelle, même si sa cause est d'ordre politique La définition donnée se limite à ces termes. Sont donc exclues d'autres notions Ainsi la grève ne doit pas nécessairement être déclenchée par les syndicats ou syndicalistes Ainsi rien n'interdit une grève " illimitée " Ni la loi, ni les conventions collectives ne fixent les durées minimales ou maximales des arrêts de travail observés par les grévistes. La grève " à répétition " est licite ...La répétition d'arrêts de travail dont l'employeur avait été prévenu à l'avance, même de très courte durée, constitue l'exercice normal du droit de grève. Un débrayage, connu à l'avance par l'employeur, qui avait lieu à heure fixe et pour une durée invariable, et répété est une grève licite On admettra que puisse être mis en place - sans porter atteinte au droit de grève un "service minimum" pour assurer la sécurité. B) LES " MOUVEMENTS ILLICITES " Quand la grève ne répond pas à la définition elle n'est pas un grève (autrefois la notion existait de " grève illicite») On parle alors de " Mouvement illicite " Le mouvement n'étant pas " grève" les salariés qui y participent ne sont pas protégés par le droit de grève... Des lors on reviendra à la situation purement individuelle...Le salarié a-t-il commis une faute en participant à un " mouvement illicite" C) L'ABUS DU DROIT DE GREVE Un certain nombre de mouvements de grève peuvent être conformes à la définition elle même ... mais révéler un " abus" Tel sera le cas des mouvements qui amènent " une désorganisation manifeste, volontaire et anormale de l'entreprise " (non pas de la production : La grève entraîne nécessairement une désorganisation de la production : les arrêts de travail répétés ne seraient illicites que s'ils entraînaient une désorganisation de l'entreprise elle-même). Ce préambule étant donné il importe d'examiner dans le cadre des contentieux liés à la grève Polycopie contentieux sociaux cours de PASCAL LABBEE année 2012-2013 page N°29 - D'une part les contentieux liés au mouvement de grève lui même, et le mode de règlement des conflits - d'autre part les contentieux " individuels "de la grève S I) LES CONTENTIEUX DU MOUVEMENT COLLECTIF ET LES MODES DE REGLEMENT DU CONFLIT COLLECTIF Avons-nous des techniques procédurales pour « sortir de la grève »...La réponse est- non. Tout au plus peut on imaginer qu’en cas de « péril » puissent etre prises en référé des mesures de « remise en état » « conservatoires » ou que justifie l’existence du différend Et c’est donc au travers de la compétence du Magistrat des Réfères que pourra se caractériser (peut etre) une frontière entre ce qui est « trouble manifestement illicite » ou « voie de fait » ou « péril crée » dans le cadre du mouvement de grève. Nous verrons aussi qu’au travers du pouvoir de prendre « toute mesure » le juge judiciaire peut devenir acteur d’une solution au conflit (autorisation de telle mesure sous réserve de la mise en place de telle structure de médiation par exemple) A) LA GREVE SUR LE TAS L'EXPULSION DES GRÉVISTES L'Occupation des locaux (Grève sur le tas) et les piquets de grève sont des modalités relativement classiques des mouvements collectifs La question n'est pas en l'état de savoir si la participation de tel ou tel est constitutif d'une faute lourde. On conviendra que ces modalités ne peuvent en elles mêmes constituer l'élément matériel de l'infraction d'entrave à la liberté du travail (des non grévistes) ni à la liberté du travail de l'entrepreneur. Les piquets de grève qui interdisent l'accès au travail sont illicites De même l'occupation des locaux qui porte atteinte à la liberté du travail et à l'exercice par un entrepreneur de son industrie est illicite. A défaut d'entrave les piquets de grève ne constituent pas un usage abusif du droit de grève De même lorsque l'occupation de l'entreprise par les grévistes n'a eu qu'un caractère symbolique ou lorsqu'elle a pour but de sauvegarder le droit au travail et de préserver l'outil de travail et qu'aucune entrave n'a été apportée à la liberté du travail, la faute lourde est écartée. LA PROCÉDURE DE RÉFERE MODE CLASSIQUE DE REGLEMENT DU LITIGE LIE A L'EXPULSION La demande d'expulsion sera présentée au juge des référés. Et puisque le litige est collectif et non pas individuel la compétence du Conseil des Prud'hommes sera écartée au profit du Magistrat de droit commun savoir le Président du Tribunal de Grande Instance. Les règles en matière de motivation de la demande en référé sont celles tirées du Code de procédure Civile ; La " compétence" du Juge des Référés repose par application de l'article 809 du Nouveau Code de procédure civile, sur l'existence d'un trouble manifestement illicite qu'il y a lieu de faire cesser ( le " Péril ") Le juge peut prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.et ce même en présence d'une contestation sérieuse de la partie assignée . Le trouble manifestement illicite sera caractérisé le plus souvent par l'existence de l'entrave à la liberté du travail, ce peut être également par la paralysie de l'entreprise, les risques importants de dégradation Polycopie contentieux sociaux cours de PASCAL LABBEE année 2012-2013 page N°30 On peut admettre complémentairement l'idée d'urgence à la mesure d'expulsion demandée Il va de soi que l'employeur devra argumenter et apporter la preuve du trouble manifestement illicite (constats d'huissier par exemple, voire témoignages.) On pourrait se poser la question éventuelle de l'action de TIERS à la relation de travail (exemple : le propriétaire de l'immeuble occupé, des dépositaires de matériel dans l’usine...Peuvent ils récupérer leurs biens ou faire cesser l'occupation qui met en péril leurs biens situés dans l’entreprise.) QUI ASSIGNER ? Peut on admettre d'assigner simplement " des représentants" des grévistes (meneurs, syndicalistes ...) Faut il assigner l'ensemble des " occupants " au risque de voir un phénomène "d'occupation tournante" Dans la plupart des cas, il sera matériellement impossible à l'employeur d'assigner, devant les juges des référés, chacun des grévistes pris nommément, pour demander son expulsion. Certain tribunaux ont admis l'action contre les représentants du personnel et les représentants syndicaux estimant que ceux ci " du seul fait de leur pouvoir de représentation " ont compétence pour représenter l'ensemble ; qu'ils " continuent pendant la grève à représenter les intérêts professionnels des salariés ; qu'ils ont "qualité pour s'exprimer en toutes circonstances au nom des travailleurs de l'entreprise .." D'autres juridictions adoptent une position plus nuancée en demandant que soit établie une " occupation du chef" des délégués D'autres admettent l'action contre les " meneurs" (même non syndiqués) et il appartiendra à l'employeur demandeur d'établir que ces salariés sont en quelque sorte en étant " meneurs " mandataires de l'ensemble des grévistes...Qu'ils ont un rôle de " représentativité " Ceci étant la plupart des juridictions refuse de reconnaître la possibilité de donner à certains salariés la qualité juridique de représentant. Et la Cour de Cassation a écarté la mise en œuvre d'une responsabilité collective des représentants du personnel qui ne sont pas " les instruments d'une mesure collective d’expulsion, qui ne peut être prescrite qu'après une mise en cause de tous les intéressés ou en cas d'impossibilité par ordonnance sur requête " Que faire alors ? Une autre possibilité a été admise par la Cour de cassation : celle d'obtenir, en s'adressant au président du tribunal de grande instance, une ordonnance sur requête ordonnant l'expulsion de l'ensemble des grévistes, ceci en raison de l'urgence à prévenir un dommage imminent, et de l'impossibilité pratique d'appeler individuellement en cause tous les occupants Nous sommes sur l'application de l'article 812 du NCPC ( le Président peut ordonner sur requête toutes mesures urgentes, lorsque les circonstances exigent qu'elles ne soient pas prises contradictoirement" Cette formule est certes pratique... mais le Juge a pouvoir de refuser de signer l'ordonnance au seul motif qu'il y a nécessité d'un débat contradictoire, Ou encore que la preuve de l'impossibilité de connaître le nom des occupants n'est pas révélée. La solution vers laquelle il semble qu'il faille s'orienter consiste à cumuler les deux procédures -En assignant en référé les personnes connues ou " meneurs" ou délégués... Polycopie contentieux sociaux cours de PASCAL LABBEE année 2012-2013 page N°31 -Et en présentant concomitamment, voire pourquoi pas à l'audience même de référé une requête aux fins d'ordonnance sur requête en expulsion de l'ensemble des personnes qui occupent. Ce qui supprimera la question de la mise à exécution de l'ordonnance d'expulsion rendue en référé, (les décisions de justice ici en référé n'ont d'effet qu'à l'égard des personnes nommément désignées dans l'assignation...en revanche l'ordonnance sur requête s'exécute sans cette restriction) L'ORDONNANCE RENDUE : Il ne faut pas imaginer que le seul pouvoir du Président du TGI soit de faire droit ou de refuser. Il peut assortir d'autorité, sa décision à des conditions particulières. Il peut par exemple ordonner dans un premier temps des mesures d'instruction pour savoir si, compte tenu des éléments du conflit, l'occupation constitue ou non une voie de fait, et autoriser l'expulsion si constant de voie de fait Il peut également subordonner l'expulsion à la mise en place d'une structure de médiation L'employeur qui a obtenu une ordonnance de référé ordonnant l'évacuation et revêtue de la formule exécutoire peut, si les grévistes refusent l'évacuation, demander l'intervention de la force publique, soit au maire, soit à l'administration préfectorale. L'autorité administrative peut, en invoquant les nécessités de l'ordre public, refuser le concours de la force publique En ce cas, l'employeur pourra réclamer à l'État des dommages et intérêts pour le préjudice à lui causé par cette carence administrative De même si, pour des raisons tirées de l'ordre public, l'administration a décidé de différer l'intervention de la force publique, l'employeur pourra prétendre se faire indemniser par l'État, pour la prolongation de l'occupation de l'entreprise au-delà du délai dont l'administration doit naturellement disposer pour intervenir. La Cour de cassation admet également que l'employeur s'adresse directement à l'autorité administrative, en l'absence même d'une décision judiciaire, pour lui demander de procéder à l'expulsion. Le refus d'intervention de l'autorité administrative met alors l'employeur dans l’impossibilité d’exécuter ses obligations... L'employeur se trouve de ce fait dispensé de verser aux non-grévistes toute indemnité compensatrice. B) LES MODES DE REGLEMENT DU LITIGE COLLECTIF Les litiges collectifs intervenant entre les salariés et les employeurs des professions visées à l'article L. 131-2 du Code du travail font l'objet de négociations soit lorsque les conventions ou accords collectifs de travail applicables comportent des dispositions à cet effet, soit lorsque les parties intéressées en prennent l'initiative. C'est l'idée des protocoles de fin de grève ou accords de fins de conflits La négociation entre l'employeur et les grévistes peut permettre d'aboutir au règlement du conflit par la signature d'un accord de fin de conflit. Ces accords posent problème au niveau de leur nature juridique Ils sont parfois qualifiés de " transaction" ratifiée tacitement par l'ensemble des salariés Parfois " d'engagement unilatéral de l'employeur " Parfois comme un " accord collectif d'entreprise " (s’il est signé ou ratifié par les délégués syndicaux) Ces accords de fin de conflit contiennent le plus généralement outre les clauses relatives à la rémunération, au paiement ou au rattrapage des heures perdues pour fait de grève et aux conditions de travail, et réponse aux revendications. Leur application individuelle relève du Conseil des Prud'hommes Polycopie contentieux sociaux cours de PASCAL LABBEE année 2012-2013 page N°32 Lorsque la négociation se révèle impossible, les textes ont prévu la possibilité de s'adresser à des personnes ou des organismes extérieurs au conflit au travers de trois procédures distinctes : a) la conciliation, (facultatif) qui permet de soumettre le conflit à une commission et qui peut déboucher sur un accord qui a les mêmes effets qu'une convention ou un accord collectif de travail ; La procédure de conciliation peut être établie soit par la convention ou l'accord collectif de travail, soit par un accord particulier, en vue de soumettre le litige à une commission de conciliation composée de façon paritaire. Elle peut à défaut de dispositif préalable conventionnel s'organiser selon les dispositions (facultatives) légales On se contentera ici de reproduire les dispositions légales et réglementaires très précises Les conflits collectifs qui, n'ont pas été soumis à une procédure conventionnelle de conciliation établie soit par la convention ou l'accord collectif de travail, soit par un accord particulier, peuvent être portés devant une commission nationale ou régionale de conciliation Les commissions nationales ou régionales de conciliation comprennent des représentants des organisations les plus représentatives des employeurs et des salariés en nombre égal ainsi que des représentants des pouvoirs publics dont le nombre ne peut excéder le tiers des membres de la commission. Des sections départementales peuvent être constituées au sein des commissions régionales La commission nationale de conciliation est compétente pour connaître des conflits collectifs de travail s'étendant à l'ensemble du territoire national ou intéressant plusieurs régions. La commission régionale de conciliation est compétente pour connaître des conflits collectifs s'étendant à toute la circonscription de la direction régionale du travail et de l'emploi, sauf lorsque des sections départementales ou interdépartementales ont été créées. Dans cette dernière hypothèse, le conflit peut toutefois être porté devant la section régionale de la commission régionale par décision du préfet de région, soit sur la proposition du directeur régional du travail et de l'emploi, soit à la demande des parties ou de l'une d'elles. Lorsque plusieurs régions ou plusieurs départements limitrophes sont intéressés par le conflit, les parties peuvent se mettre d'accord pour porter le conflit devant l'une ou l'autre des commissions ou sections compétentes, sous réserve que le ministre du Travail décide de saisir la commission nationale. Les commissions de conciliation peuvent être saisies par : - les parties au conflit ; - le ministre du Travail ou le directeur régional du travail et de l'emploi ; - le préfet de région. Les parties sont tenues de comparaître en personne devant les commissions de conciliation Les parties peuvent être assistées d'un membre de l'organisation syndicale ou professionnelle à laquelle elles appartiennent. La non-comparution de la partie qui a introduit la requête aux fins de conciliation vaut renonciation à la demande. En cas de non-comparution, sans motif légitime, d'une partie régulièrement convoquée, est établi un procès-verbal de carence indiquant les points de désaccord précisés par la partie présente ou représentée. A l'issue des réunions de la commission de conciliation, est établi un procès-verbal qui constate l'accord, le désaccord total ou partiel des parties. L'accord de conciliation produit les effets des conventions et accords collectifs de travail. Il est applicable à partir du jour qui suit son dépôt au secrétariat-greffe du conseil des prud'hommes et auprès des services du ministère du Travail En cas d'échec de la procédure de conciliation, le conflit est soumis soit à la procédure d’arbitrage, soit à la procédure de médiation Polycopie contentieux sociaux cours de PASCAL LABBEE année 2012-2013 page N°33 b) la médiation, Elle permet d'avoir recours à une personnalité désignée en fonction de son autorité morale ou de ses compétences et qui peut également déboucher sur un accord qui a les effets d'une convention ou d'un accord collectif de travail ; La procédure de médiation peut être engagée dans les cas suivants : - après l'échec d'une procédure de conciliation, par le ministre du Travail ou par le président de la Commission régionale de conciliation, à la demande de l'une des parties ou de sa propre initiative ; - directement par le ministre du Travail, à la demande des parties ou de sa propre initiative ou, s'il s'agit d'un différend à incidence régionale, départementale ou locale, par le préfet ; - lorsque les parties présentent conjointement des requêtes à fin de médiation en indiquant le nom du médiateur choisi d'un commun accord. Les parties au conflit peuvent désigner un médiateur. En cas de désaccord, le médiateur est choisi par l'autorité administrative sur une liste de personnalités désignées en fonction de leur autorité morale et de leur compétence économique et sociale. Le médiateur a les plus larges pouvoirs pour s'informer de la situation économique des entreprises et de la situation des travailleurs intéressés par le conflit. Il peut procéder à toutes enquêtes auprès des entreprises et des syndicats et requérir des parties la production de tout document ou renseignement d'ordre économique, comptable, financier, statistique ou administratif susceptible de lui être utile pour l'accomplissement de sa mission. Il peut recourir aux offices d'experts et, généralement, de toute personne qualifiée susceptible de l'éclairer. Après avoir, s'il y a lieu, essayé de concilier les parties, le médiateur leur soumet, sous forme de recommandation motivée, des propositions en vue du règlement des points du litige. Le médiateur dispose d'un délai d'un mois pour produire ses propositions, délai susceptible d'être prorogé si les parties en sont d'accord. Aux termes d'un délai de huit jours, le médiateur constate l'accord ou le désaccord des parties. L'accord sur la recommandation du médiateur lie les parties qui ne l’ont pas rejetée. L'accord produit les effets des conventions et accords collectifs de travail. En cas d'échec de la tentative de médiation, le médiateur communique son rapport au ministre du Travail qui peut le rendre public. c) l'arbitrage, ` Il permet de soumettre le litige à une personnalité qui statue en droit et en équité, la sentence arbitrale n'étant susceptible de recours que devant la cour supérieure d'arbitrage. La convention ou l'accord collectif de travail peut prévoir une procédure contractuelle d'arbitrage et l'établissement d'une liste d'arbitres dressée d'un commun accord entre les parties. Dans le cas où la convention ou l'accord collectif de travail ne prévoit pas de procédure contractuelle d'arbitrage, les parties intéressées peuvent décider d'un commun accord de soumettre à l'arbitrage les conflits qui subsisteraient à l'issue d'une procédure de conciliation ou de médiation. L'arbitre est choisi soit par accord entre les parties, soit selon les modalités établies d'un commun accord entre elles. L'arbitre ne peut pas statuer sur d'autres objets que ceux qui sont déterminés par le procès-verbal de non-conciliation ou par la proposition du médiateur. Il peut toutefois prendre en compte les événements postérieurs à la conciliation ou à la médiation, qui sont la conséquence du conflit en cours. Polycopie contentieux sociaux cours de PASCAL LABBEE année 2012-2013 page N°34 L'arbitre statue en droit sur les conflits relatifs à l'interprétation et à l'exécution des lois, règlements, conventions ou accords collectifs de travail en vigueur. Il statue en équité sur les autres conflits, notamment lorsque le conflit porte sur les salaires ou sur les conditions de travail qui ne sont pas fixées par les dispositions des lois, règlements, conventions ou accords collectifs de travail en vigueur, et sur les conflits relatifs à la négociation et à la révision des clauses des conventions collectives. Les sentences arbitrales doivent être motivées et ne sont pas susceptibles de recours que devant la Cour supérieure d'arbitrage. La Cour supérieure d'arbitrage connaît des recours pour excès de pouvoir ou violation de la loi formés par les parties contre les sentences arbitrales. Elle est composée de conseillers d'État et de magistrats de l'ordre judiciaire, nommés par décret pour trois ans. Son siège est au Conseil d'État à Paris. La Cour peut prononcer l'annulation en tout ou partie d'une sentence arbitrale. L'affaire est alors renvoyée aux parties qui peuvent désigner un nouvel arbitre. Dans l'hypothèse où la Cour est saisie à nouveau d'un recours sur la seconde sentence arbitrale, elle peut faire procéder à une instruction complémentaire. Elle rend alors une sentence arbitrale qui ne peut faire l'objet d'aucun recours. Ces trois procédures distinctes et facultatives peuvent se superposer : la procédure de médiation peut être engagée après l'échec d'une procédure de conciliation ; Peuvent être soumis à l'arbitrage les conflits qui subsisteraient à l'issue d'une procédure de conciliation ou de médiation. Toutes ces règles sont en pratique relativement ineffectives... S II) LES CONTENTIEUX NÉS DU MOUVEMENT COLLECTIF ET LES MODES DE REGLEMENT DES LITIGES INDIVIDUELS Le mouvement collectif est mené par les salariés - et donc par des personnes qui sont liées à l'employeur par un contrat de travail. Peut-on imaginer que du litige collectif, on passe au litige individuel. Les actes illicites commis par des salariés au cours d'une grève peuvent elle permettre des sanctions disciplinaires ? On pourra se poser la question sous trois angles : - la relation individuelle de travail - la responsabilité civile (éventuellement des syndicats) - la responsabilité pénale - et la responsabilité de l'état (déjà abordée .il s'agit du refus par la force publique d'exercer une décision autorisant l'expulsion des grévistes) A) L’ACTION CONTRE LE SALARIE GRÉVISTE. L'ACTION CONTRE LE MENEUR " Le salarié gréviste ne peut être sanctionné à raison d'un fait commis à l'occasion de la grève à laquelle il participe que si ce fait est constitutif d'une faute lourde "ce quelque soit la sanction envisagée (licenciement ou simple sanction disciplinaire) Sauf le cas de faute lourde, aucun salarié ne peut être sanctionné ou licencié en raison de l'exercice normal du droit de grève. Toute disposition ou tout acte contraire est nul de plein droit. Peut-on imaginer qu’un employeur agisse contre le salarié gréviste ? La réponse se trouve – dans le cadre du droit social – dans la possibilité de licencier le salarié pour Polycopie contentieux sociaux cours de PASCAL LABBEE année 2012-2013 page N°35 « Faute lourde « Il faudra se poser la question du droit d’agir (éventuellement) sur d’autres fondements (citation directe devant le Tribunal Correctionnel en cas d’infraction ou plainte) voire devant les juridictions civiles ( ?) (demande de dommages et intérêts) Existe –t-il une définition « légale » de la faute lourde ? a) la FAUTE LOURDE Seule la faute lourde imputable au salarié permet de rompre le contrat de travail en cas de grève. Tout licenciement prononcé en dehors de ce cas est nul de plein droit. Mais il faut bien sur comme on l'a vu en introduction qu'il y ait " grève " et non pas mouvement illicite … dans ce dernier cas le " simili- gréviste « ne pourra pas bénéficier de la protection. Il sera le plus généralement sanctionné pour insubordination La faute lourde " dolosive " que la loi ne définit pas suppose une faute caractérisée, d'une gravité particulière qui, révèle l'intention de nuire, et qui ne peut être excusée par les circonstances Elle doit être appréciée dans chaque cas individuel On pourrait faire le parallèle avec la faute pénale intentionnelle En effet le plus souvent il s'agira d’actes de violence de dégradation des biens appartenant à l'entreprise, d'entrave à la liberté du travail, ... qui sont des délits L'existence d'une faute lourde est reconnue lorsque la participation individuelle des grévistes à l'entrave à la liberté du travail de l'ensemble du personnel est clairement établie On étendra à la participation volontaire et abusive à un mouvement illicite de la grève. La faute lourde est également retenue à l'encontre de salariés qui avaient personnellement participé à la fermeture des accès de l'usine et qui avaient fait obstacle à toute entrée ou sortie des véhicules, ce qui avait entraîné la désorganisation de l'entreprise. Constitue une faute lourde le fait d'occuper les locaux de l'entreprise et de s'y maintenir au mépris de décisions de justice exécutoires. Constitue une faute lourde : le fait d'occuper les locaux de l'entreprise, d'interdire l'accès de l'usine en condamnant l'entrée et d'afficher des menaces de mort envers le directeur ; le fait de frapper un autre salarié non gréviste ou de séquestrer des membres du personnel… Mais plus encore, la faute lourde est également reconnue lorsque la grève a eu pour conséquence de désorganiser le service et de nuire à l'établissement. Ou de participer à un mouvement qui n'entre pas dans le cadre de l'exercice licite d'une grève" Il faut bien sur que les faits soient caractérisés et individualisés...Il faut une participation PERSONNELLE établie, et active. Seuls les auteurs des faits doivent répondre de leurs actes En d'autres termes il n'y a pas de " faute lourde collective». De même devra être établie " l'intention de nuire" (qui peut être la volonté de désorganisation de l'entreprise Il appartiendra – si bon semble- à l’employeur d’engager le processus disciplinaire ou de licenciement disciplinaire faute lourde … Et au Conseil des Prud’hommes d’apprécier le bien ou le mal fondé de l’allégation d’une faute de cette nature Si la FAUTE LOURDE alléguée par l'employeur n'est pas retenue le licenciement prononcé est nul de plein droit. La nullité du licenciement doit entraîner la réintégration du salarié .Le juge des référés est alors compétent pour ordonner la continuation du contrat de travail. b) PARTICULARISME POUR LES REPRÉSENTANTS DU PERSONNEL ? Les représentants du personnel (délégués et représentants syndicaux, délégués du personnel, membres du comité d'entreprise ou du CHSCT) continuent d'exercer leur mandat pendant la grève même si le Polycopie contentieux sociaux cours de PASCAL LABBEE année 2012-2013 page N°36 contrat de travail est suspendu La grève n'est pas de nature à interrompre l'exercice des mandats des représentants du personnel et laisse à ceux-ci la liberté de circuler dans l'établissement pour l'exécution de leurs missions." Ont-ils une responsabilité particulière pendant la grève qui amènerait à donner pour eux une autre qualification de " Faute lourde" Lorsqu'un délégué du personnel exerce au cours d'une grève son mandat de façon normale, ce qui implique sa présence sur les lieux du conflit et le conduit à être l'interlocuteur de l'employeur, des salariés non grévistes et des tiers dans la transmission des décisions collectives prises par les participants à la grève, aucune faute lourde ne peut être établie à son encontre. Ce temps d'ailleurs peut s'imputer sur le crédit d’heures. On ne peut bien sur retenir la faute lourde d'un salarié protégé du seul fait de l'illicéité du mouvement - tant qu'il n'est pas établi qu'il ait été " instigateur" La question se posera – si le salarié protégé est soupçonné de faute lourde – d’obtenir pour le licenciement l’autorisation de l’Inspection du Travail. La procédure protectrice doit être respectée Le licenciement des représentants du personnel et des délégués syndicaux ne peut intervenir qu'après autorisation de l'inspecteur du travail. L'inspecteur du travail contrôlera le caractère non discriminatoire du licenciement et le degré de gravité de la faute invoquée et examinera notamment si la mesure de licenciement est en rapport avec le mandat détenu, brigué ou antérieurement exercé par l'intéressé Dans l’éventualité d’un recours contre la décision de l’Inspection du Travail (positive ou négative) de saisir la juridiction administrative (ou éventuellement de faire un recours hiérarchique) Nous serons donc ici avec une autre autorité compétente pour apprécier la « faute lourde » (du salarie protégé)...Le Conseil d'Etat retient la faute lourde si elle est caractérisée, individualisée mais il semble qu'il prenne en compte une sorte de mission de " modération" des représentants salariés dans le cadre d’un mouvement qui « dégénère » La faute lourde serait ainsi caractérisée s'il participe personnellement et activement au fait illicite et qu'il n'est pas établi qu'il ait joué un rôle modérateur L'inspecteur du travail contrôle si la faute est d'une gravité suffisante pour justifier le licenciement. La faute est d'une gravité suffisante lorsque par exemple les représentants du personnel participent activement et personnellement à des piquets de grève faisant obstacle à la liberté du travail. B) LES ACTIONS EN RECHERCHE DE RESPONSABILITÉ CIVILE La grève peut être une cause de préjudice pour l'entreprise (préjudice commercial- maintien des salaires des non grévistes.. ou perte de salaire pour les non grévistes si l'employeur est dans l'impossibilité absolue de maintenir le travail pendant la grève... Des lors pourraient s'imaginer trois types d'actions - par l'employeur contre les grévistes ou les meneurs ou contre le syndicat (le Conseil constitutionnel a invalidé les dispositions exonérant les syndicats pour les faits commis en temps de grève - chacun étant responsable de ses actes. - par les non grévistes contre les grévistes Pour ce concevoir une telle action suppose ou que l’on soit devant un " mouvement illicite" ou devant des faits individualisés illicites le fait de grève ou la grève étant un droit reconnu. La responsabilité civile des grévistes meneurs et des syndicats à l'occasion d'une grève peut être mise en jeu en application de l'article 1382 du Code civil qui suppose un fait fautif (nous dirions ici illicite) qui ne se rattache pas à l'exercice normal du droit de grève.- un dommage - et un lien de causalité La Jurisprudence a écarté 1384 (le syndicat n'est pas le " commettant' des grévistes, de même que le meneur. S'il l'action illicite a été menée par plusieurs, on peut imaginer une condamnation " in solidum' Polycopie contentieux sociaux cours de PASCAL LABBEE année 2012-2013 page N°37 Quant au dommage il doit découler de l'acte reproché (et non pas de la grève ou des effets de la grève) La responsabilité civile d'un salarié gréviste ne peut être engagée par l'employeur aux fins de réparer le préjudice économique subi par l'entreprise du fait d'une grève que s'il démontre que ce préjudice est distinct de celui que tout mouvement de grève provoque. La recherche de responsabilité supposera la preuve de la faute personnelle du défendeur constituée par la participation personnelle à des actes illicites commis pendant l'arrêt du travail. Le lien de causalité direct entre la faute reprochée et le préjudice invoqué doit être un lien direct Quant à la compétence et s'agissant d'un différend né entre salariés à l'occasion du travail, ou entre l'employeur et tel salarié, la Cour de cassation retient la compétence du conseil des prud'hommes. On peut imaginer également la mise en œuvre (devant cette fois les juridictions civiles (TI ouTGI) des syndicats Le fondement sera le même (1382) La reconnaissance de la responsabilité civile des syndicats sera soumise aux mêmes conditions que celle des grévistes : - existence d'un préjudice ; - agissements fautifs ; - lien de causalité direct entre le préjudice invoqué et les agissements constatés ; - participation effective du syndicat aux agissements abusifs constatés. Si la responsabilité civile d'un syndicat ne peut en principe être engagé à l'occasion de l'exercice du droit de grève il en est autrement lorsque le syndicat a effectivement participé à des agissements constitutifs d'infractions pénales ne pouvant se rattacher à l'exercice normal du droit de grève. De même, la responsabilité civile d'un syndicat peut être engagée lorsqu'il incite des salariés à participer à des agissements fautifs constituant un mouvement illicite. La responsabilité civile du syndicat n'est à l'inverse pas reconnue lorsque le syndicat n'a commis aucune faute dans l'organisation et le déroulement de la grève. Le préjudice doit résulter directement du comportement fautif. Il ne saurait être mis à la charge du syndicat et des salariés ayant commis des actes illicites ou y ayant participé, la réparation de l'entier dommage subi par l'entreprise. Il convient de préciser, en ce qui concerne chacun pris séparément, à quel acte fautif il avait effectivement participé ; Responsabilité civile de l'employeur On peut encore imaginer qu'un tiers (client de l'employeur par exemple) soulève l'inexécution ou la mauvaise exécution d'une obligation contractuelle lui causant un dommage en raison de l'obligation inexécutée. C. civ., art. 1146 et s. Un employeur qui n'exécute pas ses obligations en raison d'une grève de son personnel peut ainsi voir sa responsabilité engagée par le ou les cocontractants concernés. La nature de la GREVE peut d’une certaine façon etre complétée par une approche « civiliste »...La greve peut elle constituier un « cas de force majeure » au sens du Droit Civil des contrats. L'employeur poursuivi en responsabilité peut s'exonérer selon lés règles classiques de la responsabilité civile en établissant que l'inexécution ou la mauvaise exécution du contrat résulte : - soit d'un cas de force majeure ; - soit d'un cas fortuit. Polycopie contentieux sociaux cours de PASCAL LABBEE année 2012-2013 page N°38 La question est donc de savoir si la grève est un " cas fortuit ou un cas de force majeure " la Cour de cassation a pu juger (mais c'est peut être un cas d'espèce) qu'une grève pouvait présenter les caractères constitutifs de la force majeure (extérieur, imprévisible et irrésistible) : Cass. Soc. 11 janv. 2000," D) LES ACTIONS PÉNALES On retiendra que l'action pénale est possible s'il existe bien sur un délit On peut imaginer les modes classiques d'action (plainte auprès du Procureur - qui appréciera s'il y a lieu de poursuivre) plainte avec constitution de partie civile, citation directe à la requête de la victime Pour être recevable devant la juridiction répressive, l'action civile doit avoir pour but la réparation d'un préjudice personnel résultant directement de l'infraction. .Des délits peuvent être commis à l'occasion d'une grève .Il n'y a pas de spécificité particulière. On relèvera ainsi - Le délit d'entrave à la liberté du travail Le Code pénal punit d'un emprisonnement et/ou d'une amende les violences, voies de fait, menaces ou manœuvres frauduleuses réalisées dans le but d'inciter les salariés à l'égard de qui ces agissements sont exercés à se joindre à une cessation concertée du travail. C. pén., art. 431-1 - les Violences et voies de fait, menaces et manœuvres frauduleuses (C Pen 414 du Code pénal) - Les menaces, également, peuvent être retenues, - La séquestration (délit ou crime) Le Code pénal réprime sévèrement le délit de séquestration : Peuvent également être sanctionnés : - la violation de domicile avec violences ou menaces (C. pén. art. 226-4 (ancien art.184)) : - la destruction, la dégradation ou la détérioration d'un bien appartenant à autrui (C. pén., art. 322-1) ; - le vol d'objets mobiliers (C. pén., art. 311-1 ) ; - les violences, les menaces, les blessures et coups volontaires (C. pén, art. 222-17, 431-9 ) ; - la rébellion, les outrages et injures envers les représentants de la force publique (C. pén., art. 433-3, 433-5) Et toute autre forme de délit CHAPITRE III LES CONTENTIEUX LIES A L’ORDRE SOCIAL GENERAL Les règles du DROIT DU TRAVAIL contribuent à un certain ORDRE SOCIAL GÉNÉRAL (III) qui amène diverses problématiques en matière de prévention ou de traitement des litiges - D'une part un certain nombre de règles sont à peine de SANCTIONS PÉNALES (A) et il faudra apprécier s'il existe des règles spécifiques en matière de DROIT PÉNAL DU TRAVAIL et de procédure pénale du Travail (Traité – non au programme de révision : le constat des infractions – le rôle de l’Inspection du Travail et des agents URSSAF) - D'autre part la question des REPRÉSENTANTS DE L'ETAT vis à vis de l'employeur - de leur actionde leurs pouvoirs et du Droit qui protège ces différents intervenants (Inspection du Travail.) (B) Polycopie contentieux sociaux cours de PASCAL LABBEE année 2012-2013 page N°39 - ET ENCORE : L’action collective suppose que ses organes soient à la fois PROTEGES et que les MODALITES de leur action soir reconnues (C) ( – non au programme : C- a) le contentieux électoral Cb-) LE DROIT D’AGIR EN JUSTICE DES SYNDICATS QUELQUES NOTIONS : Cette question est intéressante en ce qu’elle peut préfigurer ce que serait un DROIT D’ACTION COLLECTIF,- à une époque où l’on parle d’ACTION DE GROUPE ou encore de CLASS ACTIONS. Historiquement le droit d’agir des syndicats a été reconnu par la JURISPRUDENCE (Chambres réunies 5 AVRIL 1913 (DP 1914 I 65)- sous le bénéfice d’une notion tout à fait progressiste de porte parole de l’INTERÊT COLLECTIF L’arrêt des Chambres Réunies parle de l’INTERÊT DE LA PROFESSION. La Loi du 12 MARS 1920 a consacré ce droit d’agir des syndicats pour défendre les intérêts de la profession lorsqu’un acte est de nature à porter atteinte à ses intérêts Ceci étant le droit d’agir des syndicats ne s’arrête pas à cette simple notion... Nous avons tout un ensemble de DROITS D’ACTION qui appartient aux syndicats Et il faut également rappeler qu’à coté du DROIT D’AGIR existe en procédure de DROIT D’INTERVENIR - soit à titre PRINCIPAL - soit à titre ACCESSOIRE I) ACTION DANS LE CADRE DE L’INTERET COLLECTIF : A) LE DROIT D’AGIR DES SYNDICATS - DANS LE CADRE DE L’INTERET PROPRE DE LA PERSONNE MORALE a) L’INTERET PERSONNEL A AGIR EN RAISON DE LA PERSONNALITÉ JURIDIQUE ET L’EXISTENCE D’UN PATRIMOINE Il s’agit ici de la défense de ses droits patrominaux et moraux .Voire de ses droits “ disciplinaires” (exclusion d’un membre par exemple) Puisque le Syndicat a la personnalité civile, il a un patrimoine et donc la capacité d’agir en Justice (L.411-12) b) LA CAPACITÉ DE CONTRACTER- LA SPÉCIFICITÉ DES ACCORDS COLLECTIFS Les syndicats ont la liberté de contracter (seule exclusion : sortir de leur activité statutaire - ne pas faire d’acte de commerce) Ils peuvent affecter leurs biens et ressources à toutes sortes d’opérations... Et bien sur ils peuvent gérer les conflits liés aux contrats passés devant les Juridictions compétentes. Polycopie contentieux sociaux cours de PASCAL LABBEE année 2012-2013 page N°40 On mettra à part la question de leur droit d’action en raison de la signature d’un ACCORD COLLECTIF (Convention Collective ou accord d’entreprise) Le Code indique : “ Les organisations ou groupements ayant la capacité d’ester en justice, liés par une convention ou un accord collectif de travail peuvent en leur nom propre intenter contre les autres organisations ou groupement, leurs propres membres ou toute personne liée par la convention ou l’accord, toute action visant à obtenir l’exécution des engagements contractés et le cas échéant des dommages et intérêts. » Et de même encore “ les personnes liées par une convention ou un accord collectif peuvent intenter toute action visant à obtenir l’exécution des engagements contractés et le cas échéant des dommages et intérêts contre les autres personnes ou l’organisation ou groupements lies par la convention ou l’accord qui violeraient à leur égard ces engagements “ Le but est d’obtenir et de faire respecter les dispositions conventionnelles L’intérêt à agir existe nécessairement - l’inexécution d’un accord collectif entraînant nécessairement un préjudice matériel ou même simplement moral ( cass Soc 19 janvier 1999) L’action est menée non pas dans le but de faire payer à l’employeur des rappels de salaires par exemple... mais de faire pression sur lui en faisant reconnaître le non respect de la norme collective Il va de soi que l’action est une action civile - A engager devant la Juridiction de Droit commun c’est à dire le Tribunal de Grande Instance. - Rien n’interdit d’ailleurs d’imaginer une procédure de référé... La seule qualité qu’il faudra avoir pour le groupement est d’être signataire de l’accord ou de la convention. De la même façon on admettra que le signataire d’une convention puisse agir sur le terrain de la convention elle même (par exemple action en nullité); B) LE DROIT D’AGIR DES SYNDICATS - DANS LE CADRE DE L’INTERET PROPRE DE LA PROFESSION Les syndicats peuvent « devant toutes les juridictions exercer tous les droits réservés à la partie civile relativement aux faits portant un préjudice direct ou indirect à l’intérêt collectif de la profession qu’ils représentent » L’action est plus large .D’ailleurs le seul critère est le préjudice “ direct ou indirect” à l’intérêt collectif de la profession On admet même que la non application d’une convention collective étendue par un employeur entrant dans le champ est de nature à porter préjudice à l‘intérêt collectif de la profession représentée par le syndicat (cass Soc 10 février 2003) (on imagine ici par exemple qu’un syndicat non signataire agisse sur le fondement de la nature « étendue » de la convention) Le droit d’agir s’entend tant sur l’aspect CIVIL - que sur l’aspect PÉNAL a) -Aspect CIVIL (- DROIT D’ACTION… C'est-à-dire de saisir la Juridiction Polycopie contentieux sociaux cours de PASCAL LABBEE année 2012-2013 page N°41 (- ET DROIT D’INTERVENTION c'est-à-dire « d’intervenir » dans le cadre d’une instance engagée par une autre personne .Intervention qui peut etre « à titre principal » …le syndicat demandant alors par exemple des dommages et intérêts en raison du préjudice causé « à la profession » ou « accessoire » .. le syndicat appuyant alors la cause de l’une ou l’autre des parties au litige engagé ) b) - Aspect PÉNAL Ici se pose la question de la frontière entre INTÉRÊT GÉNÉRAL (Ministère Public) - Intérêt INDIVIDUEL et INTÉRÊT COLLECTIF Quels sont les « droits de la partie civile “ - Ce n’est pas simplement porter plainte - C’est porter plainte avec CONSTITUTION DE PARTIE CIVILE - c’est également la CITATION DIRECTE On admettra en particulier la CITATION DIRECTE EN MATIÈRE D’ENTRAVE ou de DISCRIMINATION SYNDICALE Voire l’entrave aux fonctions de représentants du personnel (Où rien n’interdit d’ailleurs un concours de partie civile.. la question étant de savoir si les préjudices sont distincts) II) LE DROIT D’AGIR DES SYNDICATS - DANS LE CADRE DE L’INTERET PROPRE D’UN SALARIÉ a) LE SALARIÉ MEMBRE DU SYNDICAT L’article L.135-4 (a .n) du Code du Travail indique “ Les organisations ou groupements ayant la capacité d’ester en Justice dont les membres sont liés part une convention ou un accord collectif de travail, peuvent exercer toutes les actions en justice qui naissent de ce chef en faveur de leurs membres, sans avoir à justifier d’un mandat de l’intéressé, pourvu que celui ci ait été averti et n’ait pas déclaré s’y opposer .L’interessé peut toujours intervenir à l’instance engagement par le groupement ou l’organisation Lorsqu’une action née de la convention ou de l’accord collectif de travail est intentée soit par une personne soit par une organisation ... toute organisation ou groupement ayant l capacité d’ester en justice dont les membres sont liés par la convention ...peut toujours intervenir à l’instance engagée à raison de l’intérêt collectif que la solution du litige peut présenter pour ses membres L’action est “ individuelle” des lors la compétence est du Conseil des Prud'hommes b) les ACTIONS EN SUBSTITUTION : = Action engagée pour le compte et dans l’intérêt d’une personne physique Nous trouvons ici un ensemble de textes (dérogatoires au principe “ nul ne plaide par procureur ?”) - Licenciement pour cause économique Article L.321-15 du code du Travail : reconnaît aux organisations syndicales représentatives le pouvoir d’exercer les actions personnelles qui naissent des dispositions conventionnelles légales ou réglementaires régissant le licenciement économique au profit des salariés pris individuellement - contrat précaires L 122-3-16 - Travailleurs étrangers L.341-6-2 Polycopie contentieux sociaux cours de PASCAL LABBEE année 2012-2013 page N°42 - travailleurs à domicile L 721,19 - Action personnelle découlant de la sous-traitance et du prêt de main d’œuvre illicite L 125-3-1: habilite les organisations syndicales à exercer les actions individuelles nées au profit des salariés, de l’application des dispositions régissant le prêt de main d’œuvre illicite et de la responsabilité de l’entrepreneur principal, en cas de défaillance du sous traitant... sans avoir à justifier d’un mandat .Le salarié doit être averti par LRAR Les indications de la lettre sont fixées par l’article R 125-2 le salarié peut s’être fin à tout moment Particularisme de la DISCRIMINATION (L.122-45-1) Deux structures peuvent exercer l’action - LES SYNDICATS - LES ASSOCIATIONS (le texte de L.122-45-1 fait une différence entre les deux types d’organismes - Les Association doivent avoir un accord écrit de l’intéressé - alors que le syndicat peut agir pourvu que la personne ne s’y soit pas opposée L.123-6 : Lutter contre les discriminations Particularisme en matière d’abus d’autorité en matière sexuelle et harcèlement L .122-53 : nécessité de l’accord écrit du salarié intéressé C c) DROIT DISCIPLINAIRE ET CONTENTIEUX Les règles du Droit Pénal et de la Procédure Pénale inspirent –t-elles les règles du Droit Social ? Ou encore / Peut on imaginer de faire référence au Droit Pénal et à la procédure pénale, dans l’analyse des dispositions disciplinaires du Droit du Travail ? Nous allons trouver ici un exemple de domaine où toutes les structures juridictionnelles peuvent avoir compétence pour connaître des litiges pouvant résulter des modalités d'exercice du droit disciplinaire Nous aborderons la problématique sous deux angles : - D'une part le contentieux lié au NORMES DISCIPLINAIRES ( I) - D'autre part le contentieux du POUVOIR DISCIPLINAIRE ( II) I) LE CONTENTIEUX DES NORMES DISCIPLINAIRES / LE REGLEMENT INTÉRIEUR a) Généralités Sans remettre en cause le pouvoir disciplinaire de l'employeur, la loi relative aux libertés des travailleurs (L. no 82-689, 4 août 1982) en a réglementé l'exercice. La loi du 4 AOUT 1982 en a fixé le contenu et les règles et a inséré dans le Code du travail les articles L. 122-40 à L. 122-45 qui, sous l’intitulé : - d'une part, donnent une définition générale des sanctions ; - d'autre part, instituent une procédure disciplinaire en organisant le droit à la défense des salariés ; - enfin, permettent aux tribunaux d'exercer un contrôle de la proportionnalité de la sanction à la faute commise et, le cas échéant, d'annuler la sanction. . On rappellera que le règlement intérieur est un document unilatéral élaboré par l'employeur après avis des représentants du personnel. Il fixe les conditions générales de discipline auxquelles est soumis le personnel. Il exprime le pouvoir de direction du chef d'entreprise et en constitue le support. La définition du règlement intérieur est donnée par le Code du Travail Polycopie contentieux sociaux cours de PASCAL LABBEE année 2012-2013 page N°43 " Le règlement intérieur est un document écrit par lequel l'employeur fixe exclusivement : - les mesures d'application de la réglementation en matière d'hygiène et de sécurité dans l'entreprise ou l'établissement … ; ces instructions précisent, en particulier lorsque la nature des risques le justifie, les conditions d'utilisation des équipements de travail, des équipements de protection individuelle, des substances et préparations dangereuses ; elles doivent être adaptées à la nature des tâches à accomplir ; - les conditions dans lesquelles les salariés peuvent être appelés à participer, à la demande de l'employeur, au rétablissement des conditions de travail protectrices de la sécurité et de la santé des salariés dès lors qu'elles apparaîtraient compromises ; - les règles générales et permanentes relatives à la discipline, et notamment la nature et l'échelle des sanctions que peut prendre l'employeur. Il énonce également les dispositions relatives aux droits de la défense des salariés, …. Il rappelle les dispositions relatives à l'abus d'autorité en matière sexuelle, …". Dans les entreprises de droit privé, le règlement intérieur est un acte de droit privé qui s'applique aux personnes travaillant dans l'enceinte de l'entreprise, qu'elles soient ou non liées par un contrat de travail Il s'impose à tous les membres du personnel comme au chef d'entreprise, dès lors qu'il est régulièrement pris." Il constitue un acte réglementaire de droit privé " Le règlement intérieur est obligatoire dans les entreprises où sont employés habituellement au moins vingt salariés Les notes de service de nature disciplinaire doivent obéir au même régime d'adoption (si elles présentent un caractère et une portée généraux et permanents) Si elles édictent des obligations en matière disciplinaire ou des consignes et prescriptions en matière d'organisation du travail qui revêtent un caractère " général et permanent, les notes de services sont soumises aux mêmes contraintes légales par la loi du 4 août 198. pour leur adoption et les modalités de publicité. et " sont assimilables au règlement intérieur et en suivent le régime" b) Adoption du Règlement intérieur le contenu du règlement intérieur est élaboré par l'employeur seul (c’est un acte "unilatéral") Il doit être soumis à la consultation des représentants du personnel (comité d'entreprise ou, à défaut, à l'avis des délégués du personnel ainsi que, pour les matières relevant de sa compétence, à l'avis du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail) Le règlement intérieur sera ensuite communiqué à l'Inspection du Travail qui opérera un contrôle de légalité du texte. La communication à l'autorité administrative permet comme nous allons le voir le contrôle de Légalité. La non transmission à l'inspection du Travail est pénalement sanctionnée Cette communication du règlement intérieur en deux exemplaires est accompagnée de l'avis des représentants du personnel. Puis le règlement intérieur fera l'objet des formalités de dépôt et de publicité - qui conditionnent son entrée en vigueur... Le règlement intérieur sera ensuite affiché, par les soins de l'employeur à "une place convenable et aisément accessible dans les lieux où le travail est effectué, ainsi que dans les locaux et à la porte des locaux où se fait l'embauche" c) Le contenu du règlement intérieur Il est strictement défini par la Loi Le code impose au règlement intérieur un contenu limité aux questions d'hygiène et de sécurité, la discipline et de droits-de la défense des salariés et, depuis la loi du 2 novembre 1992, aux clauses relatives à l'abus d'autorité en matière sexuelle. Doivent figurer uniquement dans le règlement intérieur) les règles sur 1)- L'hygiène et la sécurité du travail Polycopie contentieux sociaux cours de PASCAL LABBEE année 2012-2013 page N°44 2)- les règles relatives à la DISCIPLINE Le règlement intérieur peut préciser ce qui pour l'employeur peut être constitutif d'une faute passible d'une sanction disciplinaire - et ce de façon indicative. Il va de soi que le contrôle de la faute alléguée sera opéré comme nous le verrons par le Conseil des Prud'hommes Que peut prévoir l'employeur ? Il n'existe pas de définition légale de la faute. Et la Jurisprudence nous renvoie au pouvoir de l'employeur de la définir ou de l'alléguer "Constitue une faute tout agissement du salarié considéré comme fautif par l'employeur. Il s'agit donc d'un comportement du salarié ne correspondant pas à l'exécution normale de la relation contractuelle, qui se manifeste par un acte positif ou une abstention de nature volontaire ". De façon classique on distingue généralement les fautes disciplinaires et les fautes professionnelles (qui constituent toutes deux des " fautes») - les premières constituent des manquements aux règles de discipline de l'entreprise (par exemple, nonrespect de l'horaire de travail ou des consignes de sécurité, absence sans autorisation, violences, ivresse, etc.) ; - les secondes consistent en l'inexécution fautive ou l'exécution volontairement défectueuse du travail (négligences, baisse volontaire de rendement, ;..), à la différence de l'inaptitude professionnelle ou l'insuffisance de résultats Le règlement intérieur peut également définir l'échelle des sanctions disciplinaires et les motifs de rupture du contrat de travail ; On rappellera l'interdiction des amendes et sanctions pécuniaires 3) Le règlement intérieur prévoit également les " droits de la défense des salariés" La procédure légale implique, des lors que la sanction peut avoir une incidence sur la situation du salarié la convocation à un entretien préalable...) Ces règles seront rappelées avec la procédure de sanction Le règlement intérieur doit également rappeler les dispositions relatives à l'abus d'autorité en matière sexuelle - interdiction de sanctionner un salarié qui a subi ou a refusé de subir des agissements de harcèlement sexuel - interdiction de sanctionner un salarié qui a relaté ou témoigné de tels agissements... Les généralités ayant été rappelées voyons : LE CONTENTIEUX DU REGLEMENT INTÉRIEUR a) le principe : LA LÉGALITÉ DU REGLEMENT INTÉRIEUR Le Code du travail précise que le règlement intérieur ne peut contenir 1°) de clause contraire aux lois et règlements 2°) Il ne peut imposer aux droits des personnes et libertés individuelles et collectives des restrictions qui ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche à accomplir ni proportionnées au but recherché. 3°) Il ne peut contenir des clauses discriminatoires L'appréciation de la légalité des dispositions se fait, par rapport aux textes de lois, de règlements en vigueur, mais aussi par rapport aux conventions et accords collectifs de travail qui constituent une source normative essentielle en droit du travail. Polycopie contentieux sociaux cours de PASCAL LABBEE année 2012-2013 page N°45 - CONFORMITÉ AUX TEXTES DE LOIS On verra ainsi quelques exemples de Jurisprudence : - possibilité pour le règlement intérieur de prévoir la convocation du salarié à un entretien préalable avant toute sanction disciplinaire, notamment en cas d'avertissement (- est licite la clause d'un règlement intérieur imposant aux salariés d'une banque l'obligation de secret professionnel. ; - n'est pas contraire aux lois et règlements la clause d'un règlement intérieur prévoyant que le personnel ne pourra refuser les modifications d'horaires décidées par la direction - l'interdiction faite au personnel, sous réserve des dispositions législatives, réglementaires et conventionnelles en vigueur, de quitter le travail sans autorisation, ne porte pas atteinte au droit de retrait reconnu aux salariés - l'obligation de respecter un préavis avant le déclenchement d'une grève n'est pas illégale, eu égard au caractère particulier de l'entreprise (usine à feu continu) et aux exigences de sécurité ; - est licite la clause rappelant l'obligation de discrétion et de non-divulgation de renseignements confidentiels ainsi que l'obligation de secret qui protège les secrets de fabrique d'une entreprise La clause du règlement intérieur qui impose à chaque salarié d'assurer sa sécurité personnelle au travail, n'est pas contraire aux textes car elle n'a pas pour effet d'exonérer l'employeur de sa responsabilité légale personnelle en cas d'accident du travail En revanche ont été estimées illégales - comme contraire au Droit de retrait des travailleurs la clause qui impose aux salariés de signaler par écrit l'existence d'une situation qu'ils estiment dangereuse - comme contraires aux règles sur la représentation du personnel (DP) les clauses obligeant les salariés à présenter leurs réclamations par la voie hiérarchique - sont illicites la clause validant l'ouverture du courrier (226-15 Code Pénal) - les clauses de " rupture automatique" du contrat de travail (nécessité d'une cause réelle et sérieuse) - les limites aux droits des salariés protégés (délit d’entrave) - les limites injustifiées au droit de grève - le contrôle des heures de délégation des représentants du personnel car il y a une présomption légale de bonne utilisation, 2°)" Il ne peut imposer aux droits des personnes et libertés individuelles et collectives des restrictions qui ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche " " L'inspecteur du travail doit veiller, sous le contrôle. du juge de l'excès de pouvoir, à ce que les restrictions apportées par le règlement intérieur aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives soient justifiées par la nature de la tâche à accomplir et proportionnées au but recherché." C'est la question classique des fouilles, alcootest ou restriction à telle ou telle liberté ...interdiction d'épouser une personne divorcée, de vivre en concubinage, de divorcer .de parler de siffler, de plaisanter, de porter des badges, de se coiffer, de porter un uniforme ...Sauf s'il y a justification par la nature de la tache et " proportionnalité" Absence également de CLAUSES DISCRIMININATOIRES b) LE CONTROLE ADMINISTRATIF DE LA LÉGALITÉ DU REGLEMENT INTÉRIEUR 1- LE ROLE DE L'INSPECTEUR DU TRAVAIL Polycopie contentieux sociaux cours de PASCAL LABBEE année 2012-2013 page N°46 Comme il a été indiqué l'inspecteur du travail est destinataire du règlement intérieur accompagné de l'avis des représentants du personnel, dès son élaboration Après cette transmission, il peut formuler des observations à l'employeur sur le contenu de ce règlement. Il a aussi, le pouvoir d'exiger, à tout moment, le retrait ou la modification des dispositions du règlement intérieur Logiquement le contrôle n'est que de Légalité... mais dans la mesure où son pouvoir d'appréciation est large on arrive presque à un pouvoir d'apprécier en opportunité. 1) Compétence L'inspecteur du travail territorialement compétent est celui dans le ressort duquel se situe le siège de l'entreprise dont le règlement intérieur est contrôlé. 2) Pouvoirs Le contrôle exercé par l'inspecteur du travail est un contrôle de légalité qui l'habilite à exiger le retrait ou la modification des dispositions. L'inspecteur du travail doit s'assurer que le règlement intérieur a un contenu qui n'excède pas le champ des matières limitativement fixé par la loi Il veille à ce que les clauses du règlement intérieur ne soient pas contraires aux lois, aux règlements et aux conventions et accords collectifs applicables dans l'entreprise. Il vérifie aussi que ces clauses n'apportent pas aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives des restrictions qui ne sont pas justifiées par la nature de la tâche à accomplir ni proportionnées au but recherché. L'inspecteur du travail ne peut davantage exiger de l'employeur qu'il ajoute des clauses ou des garanties supplémentaires dans le texte du règlement intérieur Le pouvoir de contrôle de l'inspecteur du travail est permanent car il s'exerce non seulement lors de la communication par l'employeur du règlement intérieur, mais aussi à tout moment, Aucun texte n'assigne à l'autorité administrative de délai pour opérer ce contrôle de légalité 3) Décisions La décision de l'inspecteur du travail est motivée, notifiée à l'employeur et communiquée, pour information, aux membres du comité d'entreprise ou, à défaut, aux délégués du personnel, ainsi qu'au CHSCT pour les matières qui relèvent de sa compétence. La décision de l'inspecteur du travail n'est soumise à aucun délai à partir de la communication du règlement intérieur faite par l'employeur. De sorte que la communication du règlement intérieur à l'inspecteur du travail ne débouche pas nécessairement sur une décision d'approbation implicite car aucun texte ne prévoit que le silence de l'administration vaut, dans ce cas, approbation tacite. LES RECOURS CONTRE LA DÉCISION DE L'INSPECTEUR DU TRAVAIL Les décisions de l'inspecteur du travail sont susceptibles de recours administratifs et contentieux. a) Les décisions de l'Inspection du Travail sont susceptibles d'un recours devant le DIRECTEUR RÉGIONAL DU TRAVAIL ET DE L'EMPLOI dans un délai de deux mois Le recours N'EST PAS SUSPENSIF La décision du DRTE est notifiée à l'employeur et est communiquée aux représentants du personnel Elle doit être motivée L'autorité hiérarchique n'a pas de délai pour statuer mais au bout de 4 mois le silence vaut rejet. Polycopie contentieux sociaux cours de PASCAL LABBEE année 2012-2013 page N°47 b) Possibilité de recours hiérarchique devant le Ministre du Travail et des affaires sociales. Les pouvoirs de contrôle du ministre sont les mêmes que ceux reconnus par la loi et la jurisprudence à l'inspecteur du travail et au directeur régional du travail. L'obligation de motivation est la même pour les actes pris par ces différentes autorités administratives (CE 9 oct. 1987, CE 23 juill. 1993,). 2) Recours contentieux Les litiges qui naissent à l'occasion du contrôle exercé par l'administration du travail sur la légalité de ces actes, et contre la décision prise sont de la compétence du juge administratif. Le contentieux est celui de l'excès de pouvoir Délai : DEUX MOIS La plénitude de compétence fait que le juge administratif n'est pas tenu d'opérer un renvoi préjudiciel au juge judiciaire de l'appréciation de la décision Ces décisions sont attaquables devant le tribunal administratif dans le ressort duquel se trouve l'établissement dont le règlement intérieur soulève un problème. Le juge administratif ne dispose que du pouvoir d'annuler tout ou partie des dispositions des décisions administratives qui lui sont déférées. Il ne saurait apporter de modifications au règlement intérieur ni enjoindre à l'employeur de modifier ou de compléter ce document. Nous allons voir également que dans le cadre d’un contentieux prud’homal peut etre soulevée l’exception « d’illégalité » du règlement intérieur … II) LE CONTENTIEUX DES NORMES DISCIPLINAIRES / LES LITIGES INDIVIDUELS La problématique du Droit disciplinaire doit être appréhendée également dans le cadre des relations individuelles qui amènent des règles de contentieux spécifiques. On notera que - de façon latente - le DROIT DISCIPLINAIRE en matière sociale s'inspire largement du CONTENTIEUX PÉNAL par un certain nombre d’aspects. ..Tout en restant spécifique... a) LES DROITS DE LA DÉFENSE - LE PROCESSUS DE PRISE DE SANCTION : En vue de garantir le salarié contre tout arbitraire la loi du 4 août 1982 a institué une procédure disciplinaire, et ce quelque soit la sanction prise .Toute sanction doit être notifiée par écrit et motivée, à peine de nullité ou d'inexistence. Le formalisme et les garanties sont plus forts en matière de sanction disciplinaire grave (procédure calquée sur le droit du licenciement), et plus allégés en matière de simple mesure disciplinaire n'ayant pas d'incidence sur la carrière la rémunération ou le statut de la personne dans l'entreprise... Cette procédure légale est MINIMALE , rien n'interdit à un employeur de donner des garanties supplémentaires dans le règlement intérieur , rien n'interdit non plus qu'une convention collective donne des garanties supérieures . La Cour de cassation considère aujourd'hui que lorsqu'une procédure conventionnelle ou statutaire de licenciement constitue pour le salarié une garantie de fond, le licenciement intervenu au mépris de cette procédure est sans cause réelle et sérieuse. " Cass. soc., 23 mars 1999 De même la Cour a énoncé que la consultation d'un organisme chargé, en vertu d'une disposition conventionnelle ou du règlement intérieur d'une entreprise, de donner un avis sur la mesure disciplinaire envisagée par l'employeur, constitue pour le salarié une garantie de fond. En conséquence, le licenciement prononcé est sans cause réelle et sérieuse."(Cass. soc. 28 mars 2000,) Polycopie contentieux sociaux cours de PASCAL LABBEE année 2012-2013 page N°48 PROCÉDURE DISCIPLINAIRE S'APPLIQUANT AUX " PETITES SANCTIONS" La sanction » mineure » est «...un avertissement ou une sanction de même nature qui n'a pas d'incidence, immédiate ou non, sur la présence dans l'entreprise, la fonction, la carrière ou la rémunération du salarié ». L'employeur qui entend prononcer une sanction mineure (autre que les observations verbales) est tenu au moment où il inflige cette sanction d'informer le salarié par écrit des griefs retenus contre lui. Cette notification doit être faite soit par lettre remise en mains propres contre décharge, soit par lettre recommandée avec AR En d'autres termes le FAIT justifiant la sanction doit être clairement décrit (c’est ce que l'on retrouve en procédure pénale, Pas de poursuites sinon sur un fait pénalement répréhensible et qualifié) Cette procédure " allégée" concernera donc l'avertissement ou le blâme voire toute lettre d'admonestation ou de critique, PROCÉDURE DISCIPLINAIRE S'APPLIQUANT AUX " SANCTIONS LOURDES" La sanction " lourde " est celle qui a incidence (immédiate ou non) sur la présence dans l'entreprise, la fonction, la carrière ou la rémunération du salarié, (mise à pied, une rétrogradation, mutation mais même des sanctions mineures " inscrite au casier" du salarié ...) Il y a lieu alors à procédure préalable a) la convocation : Lorsque l'employeur envisage de prendre une telle sanction il doit convoquer le salarié en lui indiquant l'objet de la convocation. La convocation doit être écrite et contenir les indications énumérées par le Code du travail : - L'objet de l'entretien Comme en matière de licenciement, la convocation ne doit pas préjuger de la décision qui sera prise après l'entretien ; elle ne doit donc pas se référer à une décision de sanction mais indiquer qu'une sanction est envisagée. - La date, l'heure et le lieu de l'entretien - le fait que le salarié peut se faire assister par une personne de son choix appartenant au personnel de l'entreprise Le salarié ne peut recourir à l'assistance d'un conseiller extérieur à l'entreprise, cette possibilité n'existant que pour l'entretien préalable à un licenciement mais non pas pour l'entretien préalable au prononcé d'une sanction disciplinaire. La convocation doit être remise en mains propres contre décharge ou adressée par lettre recommandée au salarié dans le délai de 2 mois à compter du jour où l'employeur a eu connaissance de la faute Si le salarié refuse de recevoir la convocation contre décharge, la procédure de la lettre recommandée doit être utilisée. b) Délai entre convocation et entretien Aucun délai n'est fixé par la loi entre la convocation et l'entretien. Il faut un délai raisonnable, permettant au salarié d'organiser sa défense, savoir de pouvoir se faire assister. c) l'Entretien L'entretien est une formalité substantielle qui doit être respectée, même si la convention collective applicable à l'entreprise ne l'a pas expressément prévue. Le salarié n'est pas obligé de se rendre à l'entretien mais, son absence n'empêchera pas la procédure de suivre son cours." INDICATION DES MOTIFS DE LA SANCTION ENVISAGÉE Polycopie contentieux sociaux cours de PASCAL LABBEE année 2012-2013 page N°49 On notera que le salarié n'a pas préalablement à l'entretien un accès à un quelconque dossier disciplinaire .En l'état il ne sait rien du motif amenant l'employeur à envisager la sanction. Cette motivation de sanction envisagée ne lui sera donnée que lors de cet entretien "Au cours de l'entretien, l'employeur est tenu d'indiquer le motif de la sanction envisagée et de recueillir les explications du salarié. Les droits de la DÉFENSE sont entendus de façon" modeste " le salarié donne " ses explications " et le tiers salarié de l'entreprise " l'assiste" Pas de PROCES VERBAUX de l'entretien ...La loi ne prévoit pas de rédaction d'un procès-verbal ou d'un compte rendu à l'issue de l'entretien ; d) Délai de réflexion de l'employeur La décision doit être prise et notifiée après respect d'un délai (minimal) d'un jour franc après l'entretien - et (maximal) d'un mois après le jour fixé pour l'entretien Le délai d'un mois fixé par le code pour notifier la sanction est une règle de fond. L'expiration de ce délai interdit à l'employeur aussi bien de convoquer le salarié à un nouvel entretien préalable pour les mêmes faits que de sanctionner disciplinairement ces faits. e) Notification de la sanction La sanction doit faire l'objet d'une notification motivée au salarié. La notification doit être faite soit en mains propres contre décharge, soit par lettre recommandée. f) Exécution de la sanction La loi n'a fixé aucun délai pour l'exécution de la sanction. Sauf abus de droit, l'employeur apprécie le moment où l'organisation du service permet l'exécution de la sanction. De même, la sanction peut être reportée en cas de maladie, b) SPÉCIFICITÉ : PAS DE DÉFINITION DE LA FAUTE DISCIPLINAIRE ... MAIS CONTROLE JUDICIAIRE DE L'EXISTENCE D'UNE FAUTE Pas de " NULLUM CRIMEN sine lege ..." Il n'y a pas de définition de la faute disciplinaire ; Et c'est à l'employeur de déterminer s'il y a faute, et le degré de gravité de celle-ci On sait que la faute peut être qualifiée, sous contrôle a posteriori du juge, en faute lourde - faute gravefaute justifiant la rupture de la relation de travail - faute justifiant une sanction disciplinaire Mais n'existe pas de "code pénal" établissant la liste des comportements justifiant la mise en œuvre de poursuites disciplinaires . De plus il est concevable que la responsabilité civile du salarié soit engagée en cas de faute lourde (intention de nuire) De même, si l'on sort de la relation de travail- l'on peut concevoir une mise en œuvre de la responsabilité délictuelle De la même façon encore la responsabilité pénale du salarié peut être engagée pour tout comportement qualifié par le Code pénal. L'employeur peut-il infliger une sanction non prévue par le règlement intérieur ? En imposant l'obligation de fixer par le règlement intérieur la loi du 4 août 1982 a-t-elle enlevé à l'employeur le droit d'infliger une sanction qui ne serait pas prévue par ce règlement intérieur ? Certains avaient soutenu que la liste établie par l'employeur détermine strictement les sanctions qui peuvent être prises par ce dernier ; elle l'employeur et, en conséquence, toute sanction prononcée doit être considérée comme illégale et à ce titre peut être annulée par le juge... Cette analyse était finalement inspirée des règles de Droit Pénal. Mais il a été objecté que l'article L. 122-34 du Code du travail ne précise pas que les sanctions sont déterminées exclusivement par le règlement intérieur ; Polycopie contentieux sociaux cours de PASCAL LABBEE année 2012-2013 page N°50 Et que l'employeur qui détient le pouvoir de direction de l'entreprise ne peut être limité par le règlement intérieur...Cet argument étant en lui même critiquable puisque l'employeur a le pouvoir normatif. La Cour de cassation avait tranché en indiquant que l'employeur est toujours libre de prononcer telle ou telle sanction de son choix non prévue par le règlement intérieur, à condition cependant que le recours à cette sanction ne soit pas interdit par une disposition expresse, soit du règlement intérieur lui-même, soit de la convention collective applicable (Cass. soc., 25 juin 1987), Si le règlement intérieur fixe une échelle des sanctions, l'employeur est libre de ne pas la respecter (Cass. soc., 20 avr. 1989,) cette jurisprudence est sans doute critiquable ; En revanche, l'employeur ne peut pas s'affranchir des limites qu'il s'est lui même imposées dans le règlement intérieur. (Exemple : si l'employeur a indiqué qu'aucun licenciement pour faute simple ne peut intervenir sans qu'il n'y ait eu par exemple deux sanctions disciplinaires antérieures) Mais depuis la Cour de Cassation est revenue sur sa jurisprudence et a par un arrêt du 26 octobre 2010, n° 09-42740 précisé qu'une sanction disciplinaire pouvait être annulée si elle n'était pas préalablement prévue par le règlement intérieur ou si elle y était prévue de façon incomplète. Non seulement doit figurer dans le règlement intérieur la nature exacte de la sanction disciplinaire, mais également les précisions de la sanction (par exemple la durée maximale de la mise à pied.). Des lors les juges doivent en principe annuler la sanction prononcée par l'employeur si elle ne figure pas sans le règlement intérieur - LA REGLE " NULLA POENA SINE LEGE" La règle est double : D'une part la faute alléguée, doit être portée dans la lettre de sanction A défaut d'une telle motivation, la sanction doit être annulée D'autre part les sanctions prises doivent ne pas être discriminatoires. S'il n'y a pas de " code pénal" du moins existe-t-il des interdits.On ne peut prendre n'importe quelle sanction : L'article L.122-45 du Code du travail interdit de fonder une sanction sur l'origine le sexe les mœurs la situation de famille l'appartenance raciale ou nationale, les opinions politiques , les convictions religieuses les activités syndicales ou mutualistes , de l'exercice normal du droit de grève , et sauf inaptitude constatée par la médecine du travail , en raison de l'état de santé ou du handicap " On ajoutera la prohibition des discriminations à l'égard des salariés ayant subi ou refusé de subir des agissements tendant à obtenir des faveurs en matière sexuelle ou qui en ont témoigné La sanction "ne doit pas constituer des amendes ou autres sanction pécuniaires" Amende = retenue sur salaire non justifiée par une période d'inactivité Sanction pécuniaire = supprimer une prime pour faute (et non pas supprimer une prime dont les conditions d'obtention ne sont pas réunies) Alors quelles peuvent être les sanctions ? La définition de la sanction donnée par le Code du travail (mesure pouvant avoir une incidence sur la présence la carrière ou la rémunération du salarié) a été précisée de la manière suivante par l'administration : - La sanction est tout d'abord une mesure prise par l'employeur - Cette mesure si elle est " sanction "lourde" est susceptible d'avoir des conséquences sur la relation contractuelle : - soit qu'elle la modifie immédiatement dans un sens défavorable au salarié ; Polycopie contentieux sociaux cours de PASCAL LABBEE année 2012-2013 page N°51 - soit qu'elle puisse à terme fonder une telle modification. Cette mesure doit enfin, être liée à un comportement que l'employeur considère comme fautif. - LA PRÉSOMPTION D'INNOCENCE Le salarié peut contester devant le Conseil des Prud'hommes la sanction dont il a été l'objet .La présomption d'innocence fait profiter le salarié du DOUTE Elle se traduit également par la CHARGE DE LA PREUVE De fait la règle ci dessus met à la charge de l'employeur la preuve du fait à l'origine de la sanction. Ceci étant l'employeur doit fournir au Conseil des Prud'hommes les éléments qu'il a retenu pour prendre la sanction - Le salarié fournit ses éléments " à l'appui de ses allégations" .Le Conseil des Prud'hommes peut pour former sa conviction ordonner toute mesure d'instruction utile Contrairement aux règles de Droit Pénal plus " libéral "dans les modes d'obtention de la preuve, les procédés de preuve doivent être obtenus de façon « loyale», sans atteinte à la vie privée ou aux libertés fondamentales Si l'employeur a le droit de contrôler et de surveiller l'activité de ses salariés pendant le temps de travail, tout enregistrement, quels qu'en soient les motifs, d’images ou de parole à leur insu, constitue un mode de preuve illicite (Cass Soc 20 Novembre 1991) Plus généralement l'employeur " ne peut mettre en œuvre un dispositif de contrôle qui n'a pas été porté préalablement à la connaissance des salariés ( cass 22 Mai 1995) (filature illicite - constat d'huissier sans que l'huissier n'ait donné son identité...) Le comité d'entreprise doit être informé sur les moyens de contrôle et des techniques permettant la surveillance du travail des salariés (art L.432-2 Code du Travail) On remarquera que la Jurisprudence de la Chambre Criminelle est différente (elle supposera que l'employeur ait porté plainte) "Aucune disposition légale ne permet aux juges répressifs d'écarter les moyens de preuve produits par les parties, au seul motif qu'ils auraient été obtenus de façon illicite ou déloyale...Il leur appartient simplement au regard de l'article 427 du CPP d'en apprécier la valeur probante (camera installée dans une pharmacie) Cass Crim 6 avril 1994 Le POUVOIR DU JUGE JUDICIAIRE D'ANNULATION DE LA SANCTION Le contrôle judiciaire est étendu sur le plan de l'appréciation mais limité quant à la portée (puisqu’il ne peut que prononcer la NULLITÉ de la sanction- sauf l'hypothèse du licenciement (et exception à l'exception : si le licenciement est fondé sur une discrimination) L'annulation peut être obtenue - si la sanction est illicite - si elle est disproportionnée - si la procédure de sanction, légale ou conventionnelle) n'a pas été respectée (irrégularité formelle (absence de convocation pour un entretien préalable, non respect des formes ou des délais absence d'entretien - notification de la sanction après respect d'un jour franc et au plus tard un mois après l'entretien - défaut de motifs... LA PRESCRIPTION - Prescription de la Faute Aucun agissements fautif ne peut à lui seul donner lieu a des poursuites disciplinaires plus de deux mois au delà de la date à laquelle l'employeur en a eu connaissance, sauf s'il a donné lieu dans le même délai à des poursuites pénales Mais la prescription ne joue pas en cas de répétition des fautes Polycopie contentieux sociaux cours de PASCAL LABBEE année 2012-2013 page N°52 Des termes mêmes employés par l'article L. 122-44, alinéa 1er (le fait fautif, à lui seul), on peut déduire que ce fait fautif, s'il ne peut plus donner lieu à l'engagement d'une procédure disciplinaire, peut par contre, passé le délai de deux mois, être pris en considération pour justifier une sanction en cas de faute ultérieure ; Le point de départ du délai est le jour de l'agissement fautif Mais l'exception existe d'un retard dans la connaissance du fait fautif. L'employeur peut par exemple connaître le fait à partir de la révélation faite par un tiers (ex : commissaire aux comptes) Et c'est à l'employeur qu'il incombe d'établir qu'il n'avait pas eu connaissance du fait avant cette révélation L'on rappellera que la poursuite pénale - dans le délai de deux mois suspend le cours de la prescription. C'est l'engagement de la procédure qui interrompt le délai de deux mois En d'autres termes c'est la convocation à l'entretien préalable qui marque l'engagement des poursuites disciplinaires (ou la notification de la sanction pour les sanctions sans procédure) .Ce délai n'est ni suspendu ni interrompu pendant une période de suspension du contrat de travail - Prescription de la SANCTION Aucune sanction antérieure de plus de trois ans ne peut être invoquée à l'appui d'une nouvelle sanction...C'est une sorte "d'amnistie" ou de prescription de la peine Comme pour la prescription des faits fautifs, le délai de trois ans court à compter de la date de la convocation du salarié à l'entretien UNE SANCTION ANNULABLE ET SOUMISE A RECOURS Un salarié sanctionné peut bien sur demander au Conseil des Prud'hommes l'annulation de la sanction (au fond et pas en référé) Si l'annulation est justifiée par le caractère illégitime, ou par le caractère injustifié de la sanction, cette dernière est annulée par le Conseil des Prud'hommes. Si l'annulation est prononcée pour cause de disproportion, ou en raison de l'irrégularité de la procédure de notification (mais pas la procédure préalable - convocation et entretien) l'employeur peut, pourvu qu'il agisse dans le mois de la notification de la sanction elle même, recommencer la procédure (arrêts divergents 4/3/93 - 18/1/95) ou notifier une sanction de moindre degré. NON BIS IN IDEM Une même faute ne peut donner lieu à deux sanctions successives .Un licenciement justifié par des faits déjà sanctionnées est illégitime .Le fait que la première sanction disciplinaire n'ait pas été suivie d'effet n'autorise pas l'employeur à appliquer une nouvelle sanction aux mêmes faits A défaut de grief nouveau, des faits déjà sanctionnés ne peuvent faire l'objet d'une seconde sanction, car l'employeur a alors épuisé son pouvoir disciplinaire à l'égard des faits déjà sanctionnés. Les avertissements constituent une sanction et les faits déjà sanctionnés par un avertissement ne peuvent faire l'objet d'une deuxième sanction en l'absence d'élément nouveau. La "PERSONNALITÉ DES PEINES" La sanction doit être proportionnalisée à la faute et les juges en assurent le contrôle Ceci n'interdit pas à l'employeur, dans l'intérêt de l'entreprise, et sous réserve de ne pratiquer aucune discrimination, de sanctionner différemment des salariés qui ont commis une même faute, compte tenu des anciennetés et comportements respectifs de chacun d'eux. De même, il est permis à l'employeur, dans l'intérêt de l'entreprise et dans l'exercice de son pouvoir d'individualisation des mesures disciplinaires, de sanctionner différemment des salariés qui ont participé à une même faute. Polycopie contentieux sociaux cours de PASCAL LABBEE année 2012-2013 page N°53 " L'employeur, qui n'est pas obligé de faire usage de son pouvoir disciplinaire, peut même choisir de sanctionner certains salariés seulement: Est ainsi justifié et non discriminatoire le licenciement pour faute lourde d'un seul des salariés ayant participé à un arrêt de travail collectif qualifié de grève illicite, en raison du rôle particulièrement actif de l'intéressé dans ce conflit. L'AUTORITÉ DE LA CHOSE JUGÉE AU PÉNAL SUR LA FAUTE DISCIPLINAIRE Lorsque le salarié a commis une faute qui peut être poursuivie devant les juridictions pénales la décision du juge pénal ne s'impose aux juridictions civiles qu'en ce qui concerne la réalité des faits et leur imputabilité au salarié Et dont le juge peut apprécier si la faute pénale constitue une cause réelle et sérieuse L'EXCEPTION D'ILLEGALITE A l'occasion d'un litige individuel portant sur l'application d'une clause disciplinaire d'un règlement intérieur le conseil des Prud'hommes peut être amené à écarter une clause qu'il estime illicite L'exception d'illégalité sera fondée sur la contrariété de la clause aux dispositions du Code du Travail. La sanction sera alors annulée. Une copie du jugement est alors adressée par le secrétariat Greffe du Conseil des Prud'hommes à l'inspecteur du travail et aux représentants du personnel. L'inspecteur du Travail appréciera s'il doit demander à l'employeur le retrait de la clause En d'autres termes le Conseil des Prud'hommes peut soulever même d'office une exception de nullité de la clause du règlement intérieur .Sa décision n'aura d'effet que dans le cadre du litige individuel. Il ne peut se livrer a priori à une telle analyse. Si un syndicat entend demander la nullité de la clause d'un règlement intérieur, en l'absence de toute décision de l'Inspection du Travail, il devrait a priori lui être possible de saisir le Tribunal de Grande Instance VOIES DE RECOURS CONTRE LE JUGEMENT DU CONSEIL DES PRUD'HOMMES L'appel est possible (il est admis que la demande d'annulation est " indéterminée -) ce qui rapproche encore de l'idée de faute disciplinaire assimilable à une sanction pénale (peu importe le quantum du préjudice - exemple : mise à pied) la demande d'annulation est " indéterminée " LES LOIS D'AMNISTIE On évoquera enfin - pour faire le parallèle entre la faute pénale et la faute disciplinaire - les lois d'amnistie qui de façon régulière prononcent amnistie soit des peines prononcées (annulation de la sanction) soit l'amnistie du fait pouvant être sanctionné