Édition 2006-03-01 (PDF document)
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Numéro 34 - mars - avril 2006 Les NOUVeLLes de ROUMANIe Décembre 1989 : plongé au cœur de la naissance d'une démocratie NOUVeLLes ROUMANIe Les Jean-Gabriel Barbin ou la vie qui bascule V 52 ingt deux décembre 1989. Ceausescu vient de disparaître de la scène et la Roumanie ouvre ses frontières. Jean-Gabriel Barbin participe à un conseil d'administration de "Médecins du monde" à Paris quand la nouvelle éclate. La poignée de "french doctors" présents à la réunion décident de partir sur le champ, frétant un avion. Les informations en provenance de Bucarest sont mauvaises: on dénombre des centaines de morts à la suite des combats de rue. Il faut des chirurgiens. Jean-Gabriel Barbin est de ceux-là. Il ne fait ni une, ni deux et embarque… sans valise et en complet veston. Il était venu ainsi de Nantes et comptait rejoindre dans la soirée le service de chirurgie digestive qu'il dirige. A 42 ans, alors qu'il vit séparé, son destin vient de basculer, mais il ne le sait pas encore. (nos photos: Jean-Gabriel Barbin, sa femme, Vali, Roumaine, au cours de missions humanitaires à travers le monde, dont la Moldavie). Le Nantais n'en est pas à son premier coup de tête. En 1982, alors que la France est plongée dans la grève du milieu médical, un de ses confrères, responsable à "Médecins du monde" lui confie: "J'ai besoin de quelqu'un pour l'Erythrée". "Jean-Gab" répond aussitôt présent, d'autant plus qu'il avait la furieuse envie de découvrir cette corne de l'Afrique dont l'avait fait rêver Rimbaud. Le voilà dans le coup de l'humanitaire. Au fil de ses congés, il enfilera ensuite les missions: Kurdistan, Yémen, etc… Qu'est-ce qui pousse donc aux aventures les plus risquées cet aîné d'une fratrie de huit garçons, partagés entre professions médicales et artistiques, issus d'un milieu bourgeois nantais et dont le père, médecin suivant la tradition familiale, est un illustre spécialiste de gastro-entérologie ? Sans-doute des aïeux briérons, ayant grandi dans les marais longeant l'océan, près du port de Saint-Nazaire, et dont plusieurs sont devenus marins au long-cours. Pourtant, après avoir hésité à faire Langues-orientales, le jeune Jean-Gabriel choisira classiquement de suivre la voie de son père, devenant médecin. Mais son passage au lycée catholique de Nantes l'a ouvert à l'action humanitaire, alors balbutiante. On y parle de la misère de l'Inde et le jeune homme monte une tournée théâtrale avec ses copains, interprétant "L'Alouette" d'Anouilh pour ramener des fonds. "On ne sort pas indemne d'une aventure avec la Roumanie" Pour l'heure, le voici plongé dans la révolution roumaine, partagé entre cauchemar, délire, enthousiasme, exaltation, effroi, opérant dans des conditions épouvantables, frappé d'hallucinations parfois comme lorsqu'il se retrouve à sabrer le champagne avec des révolutionnaires portant brassards, fêtant l'exécution du couple Ceausescu. Devant sa chambre du 18ème étage de l'hôtel Intercontinental, la queue n'en finit pas: les "french doctors" consultent gratuitement. Le Nantais prend les choses en main et devient responsable de l'antenne roumaine de "Médecins du monde, s'installant définitivement à Bucarest, se contentant de l'indemnité versée par son association aux volontaires, 400 € par mois… " suffisant pour vivre sur place", confie-t-il. Le chirurgien a compris qu'on ne sort pas indemne d'une aventure avec la Roumanie et s'est laissé ensorcelé, grandement aidé en la circonstance par Vali, artiste et journaliste, rencontrée pendant la folie révolutionnaire et devenue sa femme depuis. Il vit une expérience unique, au cœur d'évènements tumultueux appelés à devenir autant de pages d'histoire: la naissance d'une démocratie. Sa fonction l'amène à côtoyer le gotha de la nomenklatura roumaine, ministres, présidents, hommes d'affaires, et aussi les diplomates en place, d'y rencontrer l'imposture et de mesurer les difficultés de la transition. L'homme a horreur du politiquement correct, ce qui l'amène à dénoncer ce qui lui paraît inacceptable. Ce sera la raison de sa rupture avec "Médecins du monde" en 1996, refusant d'avaliser la politique suivie en matière d'adoptions internationales et ses dérives. Jean-Gabriel Barbin n'en a pas moins continué ses interventions médicales, doublé d'un volet "assistante sociale". Les Roumains sont toujours aussi nombreux à frapper à sa porte, assurés d'y trouver des soins gratuits, une aide pour obtenir des visas s'ils doivent se faire soigner à l'étranger. Les Français expatriés, un relais pour être hospitalisé au pays natal. Il s'est également investi dans la formation et s'efforce de faire aboutir un projet de perfectionnement des infirmières roumaines en France. Bien que se sentant "internationaliste", sans être installé quelque part, le Nantais, âgé aujourd'hui de 58 ans, a posé ses valises à Bucarest. Il s'est engagé sur place dans le développement de la Francophonie et a retrouvé la vocation artistique de ses frères et de sa femme. Il écrit des pièces en français, neuf déjà, traduites en roumain, interprétées à Bucarest et à l'affiche du Théâtre national de Moldavie, à Chisinau. de SOMMAIRE Lettre d’information bimestrielle Actualité Vie internationale Politique Economie Social Au pied du mur 2 3à6 7à9 10 et 11 Société Evénements Carnet Vie quotidienne Insolite Santé, Environnement Religion Photos Sports 12 à 14 15 16 à 18 19 20 à 23 24 25 26 Connaissance et découverte Cinéma Théâtre, Chanson Musique Peinture Livres Littérature Histoire, Destins Traditions, Echanges, Humour Tourisme Souvenirs Abonnement, Change Coup de coeur 27 28 et 29 30 à 32 33 34 et 35 36 et 37 38 à 41 42 et 43 44 à 47 48 à 50 51 52 L e sénat roumain a rendu un mauvais service à son pays en repoussant un projet d'ordonnance gouvernementale prévoyant en urgence l'institution d'un organisme chargé de démasquer la corruption dans les rangs des parlementaires et des ministres. Il s'agissait d'une des exigences, avec la réforme de la Justice, formulées par Bruxelles pour que Bucarest puisse adhérer à l'UE dès 2007. Autant dire que le mécontentement est vif au sein de l'Union Européenne, et même les parlementaires européens de Strasbourg, plutôt bien disposés à l'égard de la candidature roumaine, ont pris du recul. Le sentiment que celle-ci sera repoussée d'un an, ainsi que le prévoyait l'accord de pré-adhésion, grandit, alors que Bruxelles s'apprête à remettre son rapport sur la Roumanie et qu'une décision définitive doit être prise en avril. On ne peut que comprendre les réticences européennes si ce pays se refuse à adopter des réformes élémentaires, visant notamment à ce que les importantes contributions financières que l'UE s'engage à verser pour aider à sa modernisation et à sa restructuration ne soient pas détournées de leur objet. L'émotion a été grande aussi en Roumanie où l'ensemble des médias n'ont pas eu de mots assez durs pour condamner l'attitudes des sénateurs. Ce vote vulgaire d'une caste volant à son propre secours pour que personne ne puisse mettre le nez dans ses affaires nauséabondes n'a pas surpris outre-mesure les Roumains qui méprisent, à juste titre, leur classe politique. Il ne faut pas oublier que sénateurs et députés "cotisent" jusqu'à 300 000 euros pour figurer en position éligible sur les listes de leurs partis… les sommes étant avancées par de "généreux bienfaiteurs" - en général les affairistes qui ont pillé les richesses de leur pays après 1989 - qu'il s'agit de remercier ensuite par de "menus services". Signe qui ne trompe pas sur les mœurs et le degré universel de corruption parmi les parlementaires: le vote négatif des sénateurs l'a été grâce à la conjonction de celui des élus du PSD, le parti des post-communistes, volant au secours d'un de leur leader, l'ancien Premier ministre Adrian Nastase, impliqué dans de nombreuses affaires, faisant bloc avec les extrémistes de Vadim Tudor - lequel appelle pourtant à "nettoyer les écuries de la République" - et à l'abstention de nombreux sénateurs de la majorité dont plusieurs dirigeants étaient menacés par le projet. Il reste une ultime chance à Bucarest pour échapper à la sanction de Bruxelles de retarder d'un an son adhésion: que le Président Basescu, qui en a le pouvoir, fasse adopter en seconde lecture l'ordonnance repoussée. Mais le temps est compté et la Roumanie est au pied du mur. Henri Gillet Les NOUVeLLes de ROUMANIe Actualité Vie internationale SUCEAVA z z ORADEA z ARAD BAIA MARE z IASI z TARGU MURES CLUJ z z BACAU z VASLUI z z z TIMISOARA z SIBIU BRASOV GALATI z BRAILA PITESTI CRAIOVA z z z z SLOBOZIA TULCEA z CONSTANTA BUCAREST z Vote des immigrés : l'Espagne montre la voie 2 Si on estime à un demi-million, au minimum, le nombre de Roumains travaillant en Espagne, plus de 30 000 d'entre-eux y sont installés de manière définitive, dont au moins 18 000 dans la seule région de Castellone (province de Valence). Le président local du Parti Populaire, Carlos Fabra (droite, formation de l'ancien Premier ministre José-Maria Aznar), prenant en compte les réalités, a décidé de présenter un candidat de cette communauté sur sa liste aux prochaines élections municipales et régionales, se déclarant non seulement favorable au droit de vote des immigrés, mais souhaitant qu'ils puissent postuler à toutes les fonctions électives provinciales. Ce leader entend prendre les devants dans le cadre de l'adhésion prochaine de la Roumanie à l'UE et son parti s'était impliqué activement dans la campagne d'aide aux victimes des inondations qui ont touché ce pays, l'an passé. Président des associations de Roumains de Catalogne et du Levant, Daniel Ionitsa a souligné dans une interview au journal "El Pais" sa satisfaction de voir ses compatriotes appréciés dans la région, déclarant "Castellon est un des endroits d'Europe où les Roumains vivent le mieux" et attribuant la note dix sur dix aux autorités locales pour les relations qu'elles entretiennent avec eux. Un exemple à méditer pour les politiciens et administrations françaises. Bucarest incapable de dépenser l'argent de l'UE D e 2000 à 2004, la Roumanie n'a réussi à dépenser qu'un sixième des sommes allouées par l'Union Européenne au titre du programme ISPA, destinées à financer les travaux d'infrastructure et d'environnement, soit 228 M€ sur les 1,3 milliards attribués. La Bulgarie se trouve dans la même situation (100 M€ dépensés sur un fonds de 560 M€). Cette situation irrite profondément la Commission Européenne qui, à la suite d'un audit mettant en évidence de graves lacunes, a interrompu, fin 2004, ses versements aux agences roumaines chargées de l'application du programme. Parmi les reproches de Bruxelles, on trouve le nombre énorme d'appels d'offres qui échouent, l'incompétence du personnel, le manque de contrôle interne, une comptabilité défectueuse. L'UE a demandé à ses partenaires roumains d'améliorer la situation jugée critique de ses employés, aussi bien au niveau du salaire, de la formation, que des conditions de tra“Quant au niveau de vie nous sommes dans les choux... Oui, les choux de vail. Elle a averti que la situation actuelle pouBruxelles !” Caricature de Gazdaru vait menacer l'attribution des très importants fonds structurels et de cohésion promis aux deux pays, après leur adhésion. Parmi les travaux financés par l'ISPA, on note l'amélioration des voies ferrées, le contournement de Deva et d'Orastie sur le principal axe routier international du pays, le traitement des eaux usées de Bucarest. Plaintes à Strasbourg: la Roumanie troisième L Les NOUVeLLes de ROUMANIe a Cour Européenne des Droits messes des gouvernements qui se sont de l'Homme de Strasbourg a succédés depuis dix ans, ces derniers priindiqué dans son rapport vilégiant les intérêts de ceux qui en ont annuel que la Roumanie se trouve au profité, dont la nouvelle nomenklatura. La situation de la Russie est différen3ème rang des pays dont elle reçoit des te: elle y marque plaintes de l'aggravation des citoyens qui n'ont manquements à l'épas obtenu justice tat de Droit du chez eux et au prepouvoir actuel. mier des pays Strasbourg reçoit membres de l'UE chaque semaine ou y entrant. Avec 300 dossiers en 12 % des dossiers, provenance de ce elle se situe derrièpays et en a enrere la Russie (17 %) gistré déjà 9000. et la Turquie (13 Parmi les plai%), devançant de La Cour Européenne des Droits de l’Homme de Strasbourg. gnants, on trouve, peu la Pologne (11 pêle-mêle,aussibien les noms du magnat %). A eux quatre, ces pays totalisent plus du géant pétrolier, Hodorkovski, que l'ande la moitié des 44 000 dossiers en inscien champion du monde d'échecs Gari tance, sur les 80 000 plaintes déposées. Cet afflux de plaintes roumaines Kasparov, mais aussi les parents des vic(près de 10 000) est essentiellement dû times de la prise d'otages du théâtre de aux problèmes de restitutions des biens Moscou, en octobre 2002, et des marins confisqués par le régime communiste qui ont perdu la vie dans le naufrage du dont le règlement n'a jamais été mis sous-marin nucléaire Kursk, en août sérieusement en route malgré les pro- 2000. Infos pratiques ABONNEMENT CHANGE* (en lei et nouveaux lei) Euro Franc suisse Dollar Forint hongrois *Au 36 525 = 3,52 NL (1 NL =0,35 €) 22 630 = 2,26 NL 29 700 = 2,97 NL 140 = 0,014 NL (1 € = 250 forints) 17 février 2006 Les NOUVeLLes de ROUMANIe Numéro 34, mars-avril 2006 Lettre d'information bimestrielle sur abonnement éditée par ADICA (Association pour le Développement International, la Culture et l’Amitié) association loi 1901 Siège social, rédaction : 8 Chemin de la Sécherie 44 300 Nantes, France Tel. : 02 40 49 79 94 E-mail : [email protected] Directeur de la publication Henri Gillet Rédactrice en chef Dolores Sîrbu-Ghiran Ont participé à ce numéro : Karin Humbert, Natalia Comerzan, Bernard Camboulives, Martine et Jean Bovon-Dumoulin, Ovidiu Gorea, Alain Chotil-Fany, Claude Aubé, Fabrice Dubesset, Paula Romanescu. Autres sources : agences de presse et presse roumaines, françaises et francophones, télévisions roumaines, sites internet, fonds de documentation ADICA. Impression : Helio Graphic 11, rue Louis Armand 44 980 Sainte-Luce Numéro de Commission paritaire: 1107 G 80172 ISSN 1624-4699 Dépôt légal: à parution Prochain numéro: mai 2006 Abonnement aux Nouvelles de Roumanie, lettre d'information bimestrielle, pour un an / 6 numéros, port compris Entreprises, administrations : 100 € TTC / an Associations et particuliers : 80 € TTC / an Multi-abonnement Abonnez vos amis et gagnez ensemble jusqu'à 50 % sur le prix de l'abonnement. Le système en est simple: vous vous abonnez, devenez ainsi "abonné principal", et un de vos proches reçoit également à son domicile "Les Nouvelles". Vous bénéficiez tous les deux de 25 % de réduction, l'abonnement passant ainsi de 80 € à 61 € par personne (Multi-abonnement Formule 2, 122 €). Si vous êtes trois, (Multi-Abonnement Formule 3, 150 €), la réduction est de 40 % (tarif de l'abonnement par personne: 50 €). Et si vous êtes quatre, (Multi-abonnement Formule 4, 170 €) elle passe à 50 % (tarif de l'abonnement par personne: 42,5 €). Ce tarif est valable dans la limite de quatre personnes et ne peut être souscrit par les associations que dans un cadre strictement interne (Vous ne pouvez pas abonner un membre d'une autre association, même dans le cadre d'une fédération). Seule règle à respecter: le règlement global est effectué par une seule personne, l'abonné principal, avec un chèque ou virement unique, en mentionnant les coordonnées (adresse, téléphone, fax et e-mail) des autres abonnés. Abonnez vos amis roumains de Roumanie pour 30 € Chaque abonné (abonnement simple ou collectif) peut abonner un ou plusieurs amis roumains, demeurant en Roumanie. La revue leur sera expédiée directement. Le prix est de 30 € par abonnement annuel souscrit, à ajouter à celui de votre propre abonnement ou réabonnement (un lecteur ayant un abonnement normal, à 80 €, qui veut abonner un ami roumain, à 30 €, paiera donc 110 €). Nom:………………………………………………………………………… Adresse:…………………………………………………………………….. Code postal:.......................Ville…………………….................................... Pays:.................................Tel:………………........ Fax:…………………… E-mail:……………………………………. Cachet, signature : Paiement France: chèque bancaire ou postal joint à l'ordre de ADICA ou virement. R.I.B : Crédit Lyonnais, agence Saint-Pierre, Nantes 44 000. Code banque: 30 002. Code guichet : 07 437. N° de compte: 00000794 30 H. Clé RIB: 11. Belgique et zone euro: virement bancaire sans frais. transmettre à votre banque les coordonnées ci-dessus et les codes suivants: Code IBAN: FR 92 3000 2074 3700 0007 9430 H 11; Code BIC: CRLYFRPP Suisse et Etranger: chèque d’une banque française ou mandat-poste interna tional. Pas de virements bancaires (commission de 20 euros). Coupon à retourner avec les coordonnées de tous les abonnés à: Les Nouvelles de Roumanie - ADICA, 8 chemin de la Sécherie, 44 300 NANTES - France. 51 Les NOUVeLLes de ROUMANIe Connaissance et découverte Soviétiché ! ORADEA z z TARGU MURES CLUJ z z z z TIMISOARA SUCEAVA z VARSAND ARAD z BAIA MARE z z z BRASOV PITESTI z IASI GALATI z SIBIU CRAIOVA BACAU z BRAILA z z TULCEA z BUCAREST CONSTANTA z Emotions à la frontière 50 Un jour, le contrôle des billets fit l'objet d'un drame. Un contrôleur hongrois infligea une amende à une dame roumaine, montée à Munich, pour excès de bagages (elle avait aussi un mini-vélo avec elle). Pas sympathique, le contrôleur. Ses collègues allemand et autrichien avaient été moins regardants. Malgré ses protestations véhémentes, la brave dame dût s'exécuter. Avec le recul, et ayant appris les mœurs qui régnaient dans les démocraties populaires - et qui perdurent encore aujourd'hui -, je me demande maintenant si l'amende n'est pas allée directement dans la poche du contrôleur. A Curtici, dernier point frontière du périple et porte d'entrée en Roumanie, le passage de la douane s'effectuait sans difficulté particulière. Une chose remarquable: le personnel des postes frontières, policiers, douaniers ou agents de change, parlait souvent un très bon français Le wagon était fouillé aussi méthodiquement qu'à la frontière hongroise. En revanche, les valises faisaient l'objet d'un contrôle relativement sommaire. J’en étais très surpris mais je n’étais pas alors encore familier avec la pratique du bakchish. Lors de ma première entrée en Roumanie, j'eus une petite émotion au contrôle des passeports: le policier me fit remarquer qu'il y avait une erreur sur la date de délivrance de mon visa. Il y avait une inversion dans les chiffres de l'année. 1972 avait été écrit 1927. Je fis un geste d'incompréhension. Le passeport me fut rendu dûment estampillé mais je garde encore la bizarre sensation que le flic me tenait pour responsable de cette erreur. 4 septembre 1972. J'ai été accueilli par mes hôtes roumains - ma famille invitante -qui m'attendaient à la gare de Timisoara, avec un gros bouquet de fleurs de bienvenue. A 6 heures du matin, les abords du bâtiment étaient très animés. Première vision de la ville après une trentaine d'heures de train : une foule empressée sur le parvis se dirigeait vers les arrêts de bus et de tram et une vaste avenue face à la gare bordée d'immeubles récents. Autre surprise: des Renault 8 et 12 comme en France. J'ai vite appris qu'en Roumanie, elles ne s'appelaient pas Renault mais Dacia 1100, produite à partir de 1968, et Dacia 1300 fabriquée à partir de 1969, symboles de la coopération industrielle franco-roumaine. Le taxi que nous avons pris, mes hôtes et moi, à Timisoara était une Volga de fabrication soviétique réservant une expérience intéressante de transition du confort occidental au réalisme socialiste. Dans la périphérie de la ville, les rues étaient très mal entretenues voire, pour certaines, complètement défoncées, sans revêtement asphalté. Les amortisseurs de la Volga avaient vécus. Nous étions brinquebalés dans tous les sens. Le chauffeur se mit à jurer. Le ton de sa voix était sans équivoque. A l'époque, je ne parlais pas un mot de roumain mais j'attrapais un seul mot au vol : "Sovietiché". Aucun doute : il avait une dent contre l'industrie automobile soviétique. Plus occidental que moi, tu meurs ! J'avais apporté quelques cadeaux pour mes hôtes. Ma situation faisait que je n'avais pas beaucoup d'argent mais, surtout, je n'avais pas trop su quoi leur offrir. D'ailleurs, je ne me souviens même plus précisément ce que j'avais apporté. Des gadgets je crois, du type calendrier perpétuel, un flacon de cognac… Fourvoiement vite réparé. Les fois suivantes, puisqu'il y en a eu, je sus ce qu'il fallait offrir: des savonnettes Lux ou Palmolive, Dans les années 70, Yves Lelong a découvert une Roumanie où l’on savait être heureux, le charme de la campagne... et des Roumaines. du café, des lames de rasoir, des disques, des cigarettes… Ah ! Les cigarettes. Le comble du snobisme, dans la Roumanie de Ceausescu, c'était de fumer des Kent. Pourquoi des Kent et pas des Camel ou des Marlboro ? Personne n'a jamais été capable de me l'expliquer. En tout cas, l'attirance pour tout ce qui venait d'Occident était indéniable. Les vêtements - les jeans notamment - étaient très recherchés. J'ai donné une paire de mes chaussures au cours de mon premier séjour en Roumanie. Snobisme ? Mauvaise qualité des produits "socialistes" ? Désir de posséder un objet qui permettait de se distinguer ? Je me demande si ce n'était pas aussi une forme de résistance passive et inconsciente contre le régime en place. Mais c'était le côté un peu pénible de cette époque: plus occidental que moi, tu meurs ! Aujourd'hui, les Kent sont passées de mode. La "révolution" est passée par là. Avec l'ouverture du pays au monde occidental, elles ont été remplacées, entre autres, par les cartes bancaires internationales. Le fin du fin est de s'afficher avec une carte VISA ou Mastercard pour régler sa note de restaurant ou son plein d'essence. Mais la démarche est différente: aujourd'hui, on étale sa réussite sociale. (Lire la suite dans le prochain numéro) Les NOUVeLLes de ROUMANIe Actualité A 73 ans, Matei Barbu, simple paysan d'un modeste village, est devenu le conseiller écouté du ministre de l'agriculture Politique La Roumanie confrontée à ses petites exploitations qui font vivre près de cinq millions de familles L 'homme se penche sur une liasse de papiers, remplis d'annotations : la loi sur les terres agricoles. Il a 73 ans et peine à intégrer les subtilités d'un texte dont le but est de lui rendre justice, seize ans après la chute du régime communiste roumain. Dans sa maison de Lunguletu, petit village situé à une cinquantaine de kilomètres au nord de Bucarest, Matei Barbu (notre photo) s'efforce de comprendre les nouvelles règles qui gèrent la propriété foncière et qui concernent 38 % des 22 millions de Roumains vivant en milieu rural. L'enjeu est très important pour ce paysan car, dans un an, son pays devrait adhérer à l'Union européenne. Depuis décembre 2004, lorsque la Roumanie a changé de cap politique, Matei Barbu s'est retrouvé, malgré lui, conseiller du ministre de l'agriculture, ainsi que le rapporte Mirel Bran, correspondant du journal "Le Monde" à Bucarest . Le matin au ministère l'après-midi dans ses champs "Je l'ai croisé par hasard en pleine campagne électorale", déclare le ministre libéral de l'agriculture, Gheorghe Flutur : "je me suis arrêté dans son village, je lui ai demandé son avis sur la réforme de l'agriculture, et ses opinions m'ont laissé perplexe". Et il ajoute: "Lorsque j'ai été nommé ministre, je me suis retrouvé entouré de jeunes conseillers spécialistes dans ce domaine. J'avais besoin d'avoir à mes côtés quelqu'un qui vienne du monde réel, une sorte de courroie de transmission du monde paysan. J'ai tout de suite pensé à lui et je lui ai proposé de devenir mon conseiller. Il est toujours aussi têtu, mais c'est la qualité que j'apprécie le plus chez lui" Depuis, la vie de Matei Barbu a basculé. Son programme quotidien aussi : réveil à 5 heures, départ pour Bucarest en bus ou en auto-stop, car il a refusé une voiture de service, réunions et débats au ministère et retour à Lunguletu où il travaille ses terres pour produire les pommes de terre qui font vivre sa famille. "Les communistes ont confisqué mes 5 hectares de terres, mais je les ai récupérés après la chute de Nicolae Ceausescu", affirme-t-il. "Cela n'a pas été facile et le problème de la propriété foncière n'est toujours pas réglé en Roumanie. Nous devons tout reconstruire avant que notre pays soit intégré à l'Union européenne." Créer d'urgence une classe moyenne agricole En effet, tout est à revoir dans le monde agricole roumain, qui entend s'adapter rapidement aux nouvelles règles de l'UE. "La Roumanie compte 4,5 millions de petites fermes, dont 2,3 millions sont des exploitations de subsistance avec environ 2,5 hectares de terre", explique Jonathan Scheele, chef de la délégation de la Commission européenne à Bucarest. "Même si la Roumanie ne devait pas entrer dans l'Union européenne, elle serait obligée de trouver une solution pour intégrer ses exploitations dans le circuit du marché. Entre ces petites exploitations agricoles et une minorité (0,5 %) de fermiers disposant de grandes surfaces qui permettent la mise en place d'une agriculture mécanisée, il n'y a rien. Ce pays a besoin de créer d'urgence une classe moyenne dans le monde agricole." La mission est difficile, car le temps presse. A partir du 1er janvier 2006, les paysans qui atteignent l'âge de la retraite sont encouragés à vendre leurs terres aux jeunes afin qu'ils puissent aménager des surfaces assez grandes pour une meilleure exploitation. Pour chaque hectare de terre, les paysans recevront une rente viagère de 100 euros par an et par hectare. "Nous avons aussi besoin de créer un vrai marché des produits agricoles car, pour l'instant, les paysans se font escroquer par les spéculateurs", explique le ministre de l'agriculture. "Nous avons également réorienté les investissements afin d'encourager la productivité et diminué les subventions qui profitaient à certains réseaux connectés aux milieux politiques." "Les Roumains ont un complexe d'infériorité" Avant 2007, la Roumanie devra aussi résoudre le problème du cadastre, la restitution intégrale des terres à leurs anciens propriétaires, la création d'une Bourse des produits agricoles et la mise en place de structures capables de gérer les fonds européens, qui s'élèveront à environ un milliard d'euros par an. Selon les spécialistes, le retard accumulé ces quinze dernières années en matière de réforme agricole rend la mission du gouvernement des plus difficiles, aspect que reflète le rapport d'évaluation que la Commission européenne a rendu public fin octobre. Pourtant, fiers des diplômes obtenus en Europe occidentale, les jeunes conseillers du ministère se montrent plutôt confiants. "Les Roumains ont un complexe d'infériorité face à l'agriculture occidentale", explique le conseiller Dacian Ciolos. "Le modèle d'agriculture extensive qu'on pratique en Occident depuis les années 1960 est maintenant victime de son propre succès. Je crois plus aux fermes familiales que nous essayons de mettre en place en Roumanie et qui pourraient conserver un tissu paysan dont les Européens de l'Ouest ont la nostalgie". "Un pari qui reste à gagner", conclut Mirel Bran. 3 Les NOUVeLLes de ROUMANIe Actualité La lutte contre Politique z z BAIA MARE ORADEA CLUJ ARAD z z z z z z RESITA z BRASOV z z PITESTI z BACAU GALATI z SIBIU CRAIOVA IASI TARGU MURES z TIMISOARA Menaces sérieuses sur l'entrée z SUCEAVA TÂRGOVISTE z TULCEA z BUCAREST Nationaliste pour l'éternité Gheorghe Funar, l'ancien maire de Cluj, a eu la désagréable surprise de découvrir sa tombe profanée, le jour de Noël. Elle avait été peinte en bleu-jaune-rouge, les couleurs du drapeau national. 4 Conformément à une tradition assez respectée en Roumanie, le leader ultra-nationaliste, sénateur du Parti de la Grande Roumanie (PRM), et compagnon de route de Corneliu Vadim Tudor, avait préparé sa dernière demeure pour lui-même et sa famille, faisant ériger une tombe de marbre rose dans le carré des personnalités du cimetière des Héros de la Révolution de Cluj, et venant s'y recueillir. On peut y lire l'inscription suivante: "Ici repose Funar Gheorghe, né en 1949, décédé en ****, docteur en économie, maire de Cluj-Napoca entre 1992 et 2004". L'élu n'a pas porté plainte et, du coup, aucune enquête n'a été diligentée. Lorsqu'il était maire, Gheorghe Funar, outre sa phobie des Hongrois et des Tsiganes, s'était fait remarquer en faisant peindre aux couleurs nationales les trottoirs et les bancs publics du centre de sa ville. C 'est un sale coup contre leur pays auquel se sont livrés les sénateurs roumains. Le 9 février, ils ont rejeté une ordonnance d'urgence prise par le gouvernement en septembre 2005 pour se donner les moyens de lutter contre la corruption de haut niveau en instituant un département spécial chargé d'enquêter sur celle-ci parmi les parlementaires et les ministres. Un comportement bien révélateur des Adrian Nastase mœurs politiciennes roumaines, mais qui en compagnie de sa femme Dana, fille d’un ancien dignitaire de Ceausescu. s'explique: plusieurs d'entre-eux sont impliqués dans des "affaires", dont Adrian Nastase, président de la Chambre des députés, L'ancien premier ministre Adrian Nastase A h ! Quel malheur d'avoir un gendre"… La presse de l'époque brocardait ainsi le président de la République Jules Grévy, dont le gendre, Daniel Wilson, s'était livré à un commerce et trafic fructueux d'attribution de Légions d'honneur, le contraignant à la démission en 1887. Cette fois, l'histoire concernant Adrian Nastase est un peu différente mais a fait aussi les choux gras de la presse roumaine. La femme de l'ancien Premier ministre s'est découverte subitement seule héritière d'une tante, "Matusa Tamara", décédée l'an passé à 97 ans, quasiment inconnue d'elle jusqu'ici. Cette tante, ancienne professeur de langues (retraite de l'ordre de 100 €) était devenue très riche sur ses vieux jours en vendant ses bijoux pour une somme de 400 000 € à Alexandru Bittner, l'homme lige et partenaire en affaires du couple Nastase. La somme avait été déposée en D "Ah ! Quel malheur 1999 sur un compte au nom de Dana Nastase où elle pouvait puiser. A 93 ans, la vieille dame "s'était aussi lancée dans la spéculation immobilière" acquérant un immeuble de style brancovénesque de 700 m2 et 26 pièces, en face de l'ambassade de France, à Bucarest, pour quelques centaines de milliers d'euros, revendu l'année suivante 1,1 million d'euros et estimé aujourd'hui par son propriétaire à 2,5 M€. Cette "fable" avait attiré l'attention de la banque où l'argent avait été déposé, celle-ci avertissant l'Office national pour combattre et prévenir le lavage d'argent sale qui avait ouvert un dossier en avril 2000. Ce dernier a été opportunément perdu en 2001, quand Adrian Nastase est devenu Premier ministre. Il ne s'agit pas de la seule affaire où le couple Nastase est mis en cause. Il vient d'être officiellement inculpé dans le dossier Zambaccian, pour corruption et Les préfets ne peuvent epuis le 1er janvier dernier, le loi oblige les préfets à ne plus appartenir à un parti politique, à un syndicat et leur interdit de faire grève. Ces représentants de l'Etat perdent leur statut de "dignitaire" pour devenir hauts fonctionnaires. Sur les 42 préfets que compte la Roumanie, 39 ont choisi de renoncer à leurs fonctions politiques, dont la préfète de Bucarest, Mioara Mantale, membre du Parti Démocrate de Traian Basescu (notre photo). Trois, les préfets de Ilfov, (contours de Bucarest), Dimbovita (Târgoviste) et Caras Severin (Resistsa), ont préféré abandonner leur poste pour conserver leur position au sein du PNL (Parti National Libéral du premier ministre Tariceanu). Ce changement de statut des fonctionnaires était réclamé haut et fort par Bruxelles, afin que la Roumanie se dote d'un corps d'admi- Les NOUVeLLes de ROUMANIe Connaissance et découverte découvre la Roumanie en 1972. il nous conte ses souvenirs de Ceausescu à la "Révolution" pourquoi pas ? Au début des années 70, le train était le moyen le plus écolocomotives et le train soigneusement fouillé. Une partie du nomique et le moins fatiguant, à défaut d'être le plus rapide, plafond du couloir des voitures était démontée et l'espace compour se rendre en Roumanie. Du moins pour l'étudiant que j'épris sous le toit inspecté à la torche électrique. Même chose tais à l'époque. L'avion était hors de prix et il fallait trois jours pour le dessous des banquettes. de voiture pour rejoindre la Globalement, le passage des douanes honfrontière roumaine. groise et roumaine s'effectuait sans difficultés L'Orient-Express reliait notables, du moins pour ce qui me concerne, Paris à Bucarest. Il partait de la mais toujours avec une certaine appréhension. gare de l'Est à 22 h 15. Il arrivait à Bucarest le surlendemain au Les pensées du "chef" terme de 36 heures de voyage, via Strasbourg, Munich, Vienne Après le passage de la frontière roumaine, à et Budapest. Une voiture des Curtici, le train mettait un temps qui paraissait CFR (chemins de fer roumains) interminable pour rejoindre Arad. Au bout d'une faisait la liaison directe Parisheure, il ralentissait enfin à l'approche de la ville. Bucarest. C'était l'occasion Spécialité des gares roumaines: pas de pancarte idéale de faire connaissance annonciatrice de la ville sur les quais. Au cours “Vive le Parti Communiste Roumain et son de mes voyages en train, j'ai toujours eu la crainavec des Roumains qui rensecrétaire général, le camarade Ceausescu”. traient au pays après un séjour te de ne pas descendre à la bonne station. en France ou en Allemagne, le plus souvent dans la famille. Je garde, plus de 30 ans après, un souvenir extrêmement J'avais notamment sympathisé avec un médecin de Iasi avec précis de cette nuit du 3 au 4 septembre - la première que je lequel j'ai correspondu quelques temps. passais en Roumanie - dans la gare d'Arad, à attendre le train pour Timisoara. Les chiens qui aboyaient dans la nuit chaude Des bagages, des bagages, encore des bagages… et calme (il y a toujours des chiens qui aboient dans la nuit en Roumanie), le sifflet des locomotives, le vacarme des rares Le voyage se déroulait immanquablement au milieu des trains de marchandises tirés par de poussives locomotives diemonceaux de bagages qui, souvent, appartenaient à une seule sel, les trois ou quatre employés des chemins de fer qui déambulaient et s'apostrophaient sur le quai, tous vêtus d'une veste personne. Au fur et à mesure des arrêts en gare, les compartide bleu trop courte et rapiécée, un béret basque étriqué sur la ments, les couloirs, les plates-formes étaient envahis de valises, de sacs ou de cartons. Je me souviens d'un voyage en tête, le filet d'eau qui chuintait des robinets d'une fontaine de 1972, au moment des fêtes de Noël, dans un train pierre, sur le quai. bondé, entre Budapest et la frontière roumaine, Etait-ce les effets de la fatigue qui, après coincé au milieu des bagages, debout devant la ces 24 heures de voyaporte des toilettes et au milieu de courants d'air glage, distillaient en moi cials. Mémorable. cette indéfinissable Mais c'était, à l'époque, l'un des aspects de la sensation de vivre des réalité économique roumaine: un Roumain ne voyamoments d'une autre geait jamais léger au retour d'un voyage à l'étranger époque ? et revenait beaucoup plus chargé qu'à l'aller. Dans le hall de la Le "Check Point Charlie" hongrois gare, régnait une forte odeur de désinfectant. Et, surplombant les têtes des voyageurs, Hegyeshalom: c'est le lieu de passage ferroviaire de la s'étalait un gigantesque calicot rouge, frappé d'un slogan signé frontière hongroise, à quelques 60 kilomètres de Vienne. Je ne Nicolae Ceausescu d'où l'on pouvait comprendre facilement sais pas si, à l'époque, Check Point Charlie, le point d'entrée trois mots "Partidul Comunist Român". réservé aux Occidentaux à Berlin-Est, était plus folichon Les pensées du "chef" souhaitaient la bienvenue aux voyaqu'Hegyeshalom mais le souvenir que je garde de mon premier geurs. Les employés de la gare repéraient rapidement les étranpassage de la frontière hongroise reste assez sinistre. gers. Il y en avait toujours un prêt à porter les valises contre Ce premier contact avec le monde communiste fut comme quelques cigarettes occidentales. je l'attendais - je n'irai pas jusqu'à dire comme je l'espérais. Dès potron-minet, les quais de la grande gare d'Arad Tous les ingrédients des films d'espionnage étaient là. grouillaient de monde. Les gens embauchaient de bonne heure L'atmosphère pesante, les militaires positionnés tous les 10 à et vers cinq heures du matin, un train bondé partait vers 15 mètres le long des voies, les étoiles rouges au fronton des Timisoara. (Lire page suivante) 49 Les NOUVeLLes de ROUMANIe Connaissance et découverte Souvenirs Un jeune Français Marié à une Roumaine depuis près de 30 ans, z z ORADEA CURTIz z z z DEVA BACAU SIBIU TIMISOARA IASI z z z z SUCEAVA TARGU MURES CLUJ ARAD z GALATI z BRASOV z BRAILA PITESTI CRAIOVA z La Roumanie z SATU MARE z z TULCEA z BUCAREST CONSTANTA z Un destin franco-roumain 48 Yves Lelong, 54 ans, travaille dans un important réseau bancaire, à Tours. Il avait 21 ans lorsqu'il rencontra Doina, 20 ans, en septembre 1972, au cours d'un voyage en Roumanie, alors qu'il était encore étudiant. Trente trois années se sont écoulées depuis ce premier séjour, marquées par son mariage avec Doina, en 1978, la naissance de leurs deux filles, en 1980 et 1984, mais aussi par les nombreux séjours effectués en Roumanie. Tous l'ont été à titre personnel et familial. Ils constituent néanmoins une perception, un témoignage vécu, parfois de près, parfois de loin, sur ce que pouvait être la réalité quotidienne en Roumanie communiste, au sein d'une famille, sous l'ère Ceausescu. Nul doute que nombre de Francophones, Rien ne valait les premières Dacia Les premières Dacia fabriquées en Roumanie comportaient un certain nombre de pièces françaises, comme la boîte de vitesse. A tel point que ces modèles furent surcôtés par rapport aux Dacia qui, à partir de 1976, furent entièrement fabriqués sur place. L'un de nos proches eut la chance de gagner, à une tombola de la CEC (caisse d'épargne roumaine), au début des années 80, une Dacia 1300 flambante neuve. Il préféra la revendre pour conserver sa vieille Dacia de 1973 qui, elle, était équipée de pièces d'origine française. A titre anecdotique, cette voiture a aujourd'hui 32 ans et roule encore. Au fait, savez-vous que la première Renault 12 jamais montée sur une chaîne le fut à l'usine de Pitesti ? E n 1968, paraissait sous le titre Vacances en Roumanie un petit guide touristique édité dans la collection Marabout Flash. Certains se souviendront peut-être de cette sympathique collection de poche de petit format, très bon marché, se définissant comme étant "l'encyclopédie permanente de la vie quotidienne". On y trouvait une foule de thèmes, de la philatélie à la taille des rosiers en passant par l'apprentissage de langues (Notre photo: Yves Lelong, Doina et un ami). La Roumanie, pourquoi pas?. Par ces quatre mots et en 150 pages, ce Marabout Flash invitait ses lecteurs à partir à la découverte de "la sœur cadette de la France". C'est ainsi qu'à l'époque, on désignait fréquemment la Roumanie au même titre, d'ailleurs, que Bucarest avait été le petit Paris. Le petit Marabout fut pour moi l'instrument du début de ma découverte de la Roumanie. Même succinct, on y trouvait l'essentiel de ce qu'il fallait savoir sur le pays et il s'adaptait parfaitement aux budgets modestes. Une politique touristique très libérale A cette époque, du moins jusqu'en 1975, la Roumanie avait, contrairement à ses voisins, une politique touristique très libérale. "Le rideau de fer, vous ne vous apercevrez même pas que vous l'avez franchi", écrivait le petit guide Marabout. "Vous circulerez librement, comme chez vous et serez heureusement surpris par le respect de la liberté dont on fait preuve à l'égard du touriste pourvu que, comme ailleurs, il observe les règles du pays qui l'accueille". On se procurait les visas au consulat de Roumanie, rue de l'Exposition, à Paris, démarche qui s'est d'ailleurs prolongée au delà de 1990. Les formalités étaient assez simples. C'était plutôt rassurant mais l'appréhension pouvait venir d'ailleurs. La guerre froide était une réalité bien présente. La véritable nature des régimes communistes avait été révélée par la répression féroce des soulèvements hongrois de Budapest en 1956 et du "Printemps de Prague" en 1968. Des ouvrages comme L'Aveu d'Arthur London ou Une Journée d'Ivan Denissovitch d'Alexandre Solyenitsyne, des films comme Le Rideau déchiré d'Alfred Hitchcock ont marqué leur époque mais aussi les esprits. C'était l'époque où Ceausescu faisait souffler sur le pays un vent de "liberté" si tant est qu'il y en eût. Il s'était attiré les bonnes grâce des dirigeants occidentaux en refusant notamment de participer à l'invasion de la Tchécoslovaquie en 1968 et en en donnant l'illusion de s'émanciper de la tutelle de Moscou. Les chars du pacte de Varsovie avaient écrasé le printemps de Prague quatre ans auparavant et le président roumain se plaisait à jouer les trublions dans le bloc communiste. D'ailleurs, certains commentateurs affirmaient que la Roumanie était dans le collimateur de Brejnev et serait le prochain pays à être écrasé sous les chenilles des chars soviétiques. En revanche, la Hongrie était restée dans le rang. Les visas ne s'obtenait qu'après avoir rempli un formulaire sur lequel il fallait notamment coller sa photo, préciser le nom de jeune fille de sa mère et indiquer si les parents du demandeur avaient quitté la Hongrie - et si tel était le cas, en quelle année ? - etc. Il était évident que certains n'étaient pas les bienvenus en Hongrie. D'ailleurs, à l'instar de l'URSS, les touristes occidentaux qui circulaient en Hongrie devaient, à chacune de leurs étapes, aller se faire enregistrer au poste de police local. Les NOUVeLLes de ROUMANIe Actualité la corruption sabotée par le Sénat de la Roumanie dans l'UE au 1er janvier 2007 et George Copos, actuel ministre d'Etat du gouvernement Tariceanu. Grâce à un fort taux d'abstention de sénateurs appartenant aux partis de la majorité, le Parti Social Démocrate (post-communiste), au pouvoir jusqu'à fin 2004, allié au parti extrémiste de la Grande Roumanie (Vadim Tudor), a réussi à trouver une majorité pour bloquer une politique qui a entraîné ces derniers mois la mise en cause de nombreux dirigeants politiques. Parmi eux, Dinu Patriciu, patron du groupe pétrolier Rompetrol, un des principaux bailleurs de fonds du Parti National Libéral, poursuivi pour fraude, évasion fiscale et blanchiment d'argent, ami du Premier ministre Calin Tariceanu, lequel, sans se soucier de respecter le principe de séparation du pouvoir, lui a apporté son soutien à plusieurs reprises. Cela tombe très mal pour la Roumanie qui est dans le collimateur de la commission de Bruxelles, laquelle a exigé qu'elle mène une politique active contre la corruption et pour rendre la justice indépendante, sous peine de voir son adhésion à l'UE, prévue au 1er janvier prochain, retardée d'un an. Justement Bruxelles doit rendre son rapport définitif sur la Roumanie et la Bulgarie en avril: le délai qui reste au président Basescu pour réparer ce vote négatif et faire passer une seconde fois le projet d'ordonnance d'urgence devant le Parlement est donc très court. Mais le mal est déjà fait et des voix de plus en plus nombreuses s'élèvent au sein de l'UE, et jusqu'au Parlement européen, pourtant très favorable jusqu'ici à l'entrée de la Roumanie et de la Bulgarie dès 2007, afin de repousser cette échéance. et sa femme déconsidérés par plusieurs scandales financiers d'avoir une tante !" avoir reçu des dessous de table dans l'acquisition d'un terrain de 700 m2, situé strada Zambaccian en plein centre de la capitale, acquis en 1998 pour un prix 25 fois inférieur à celui du marché, auprès de la belle-mère de l'ancien député PSD, Gabriel Bivolaru, aujourd'hui derrière les barreaux pour avoir détourné 50 M€ auprès de la BRD (Banque Régionale de Développement-Société Générale). Sur ce terrain a poussé depuis un immeuble appartenant aux Nastase, au fils de Ion Tiriac (qui a recédé sa part au fils Nastase) et au frère de l'ancien maire de Bacau, Sechelariu. A la demande du nouveau gouvernement, un premier dossier judiciaire avait été ouvert en avril 2005 sur cette affaire par le PNA (Parquet National Anticorruption), mais celui-ci, encore aux ordres de l'ancien pouvoir, l'avait vite refermé. A la suite de la purge effectuée à la tête du PNA, il a été cependant réouvert et confié au Département National Anticorruption, chargé d'enquêter sur la corruption parmi les parlementaires et ministres. Mais le Sénat a voté opportunément contre l'ordonnance d'urgence instituant ce nouvel organisme. Par ailleurs, le bureau de la Chambre des députés, dont le président est Adrian Nastase a bloqué la demande de perquisition du domicile de celui-ci, formulée par la Justice. Contrairement aux usages, Adrian Nastase a pris part au vote le concernant, le faisant basculer en sa faveur. Il a dénoncé "une campagne politique menée contre lui" et "l'acharnement du pouvoir à vouloir le mettre en cause". En difficulté au sein du PSD Le nom de l'ancien Premier ministre et président de l'Assemblée nationale est souvent cité dans d'autres "affaires", le nom de sa femme, fille d'un ancien ministre de Ceausescu, servant de paravent. L'image du couple est en train de devenir celle du symbole de la corruption de haut niveau en Roumanie et Dana Nastase jouit auprès de la population d'une réputation qui rappelle celle d'Elena Ceausescu. Toutes ces péripéties ont toutefois sérieusement assombri l'avenir politique d'Adrian Nastase qui a été obligé de mettre en suspens sa fonction de président exécutif du PSD (Parti Social Démocrate post communiste), son rival et ancien ministre des Affaires Etrangères, Mircea Geoana, qui lui a ravi en mai dernier la présidence de ce parti et aimerait se débarrasser de cet encombrant tuteur, ne manquant pas les occasions d'appuyer là où çà fait mal. Réponse du berger à la bergère? Mircea Geoana a été mis en cause récemment dans une affaire d'acquisition de terrains… qu'il aurait hérités non pas d'une tante, mais d'un cousin ! plus faire de politique nistrateurs neutres et compétents, capables de faire prévaloir les intérêts de l'Etat sur ceux des partis et les combines politiciennes. Les dernières élections avaient été révélatrices d'une situation choquante, durant depuis la "Révolution": pendant plusieurs jours, les partis d'opposition vainqueurs s'étaient disputés comme des chiffonniers pour s'attribuer les fonctions administratives juteuses qu'ils espéraient obtenir dans chaque judet. Au moins, avec le PSD (Iliescu-Nastase), les choses étaient claires… ces anciens communistes raflaient tout et ne rendaient de comptes à personne ! Avec cette réforme, la Roumanie est toutefois loin de disposer de cette armée de grands commis de l'Etat, si nécessaire à son bon fonctionnement et qui lui fait cruellement défaut. Il faut qu'elle commence par les former, la France l'aidant dans cette tâche. Dans l'attente, les préfets confirmés "nouvelle version" devront faire oublier - sans rire - qu'ils sortent tout droit de leurs officines politiques, même s'ils ont rendu leurs cartes. 5 Les NOUVeLLes de ROUMANIe Actualité Pêcheurs et paysans de la réserve transformés en nouveaux serfs Politique Les NOUVeLLes de ROUMANIe Tourisme SUCEAVA z z ORADEA ARAD z z CLUJ z z SIBIU TIMISOARA PIATRA NEAMT z BACAU BRASOV z BRAILA z z z CHISINAU z PLOIESTI CRAIOVA z IASI TARGU MURES z Main basse sur le Delta z BAIA MARE z z z BUZAU BUCAREST CONSTANTA z Le roi Michel rappelé à ses engagements Les villageois de Birchis (Arad) espèrent que le roi Michel va renouveler son engagement… pris voici six décennies lorsque, en 1945, achetant 2630 hectares de terrains à la comtesse Ecaterina Teleki, il leur en avait attribué 290 pour que les habitants ne restent pas sans forêt communale. 6 Ces terres avaient été confisquées par les communistes et le Roi devrait les récupérer. Il revendique la restitution de 7252 ha de forêts dans le judet d'Arad, dont 4622 autour de sa propriété de Savarsin, qu'il a déjà récupérée, le reste se trouvant à Birchis. L e président Iliescu savait, mais n'a pas bougé. C'est la conclusion de son ancien conseiller Dan Moraru qui avait rédigé en mars 2003 un rapport explosif dans lequel il exposait le mécanisme mis au point par le gouvernement Nastase, son ministre de l'environnement, Petru Lificiu et le gouverneur du Delta de l'époque, Virgil Munteanu, afin de permettre à des proches de faire main basse sur la plus grande réserve biologique régénérable d'Europe, inscrite au Patrimoine mondial de l'UNESCO, et appelée à un avenir touristique considérable. D'après le projet, le Delta était menacé d'être transformé en système de concessions de plusieurs milliers d'hectares, dont certains en zone protégée, d'une durée de 50ans, donnant ainsi toute latitude d'exploitation à leurs bénéficiaires. Dan Moraru réclamait l'intervention présidentielle pour empêcher la naissance d'un état dans l'Etat, mais Ion Iliescu n'avait rien fait. L'opération a été menée à bien, cinq mois plus tard, dans des conditions illégales et immorales et de manière coercitive. Les autorités l'ont justifiée hypocritement en mettant en cause "le surbraconnage auquel se livraient les pêcheurs", contrevenant aux recommandations environnementales de l'UNESCO. L'adjudication des concessions s'est faite en dehors de toutes règles, décidée parfois quelques heures avant, empêchant ainsi pêcheurs et paysans de postuler. Cela n'avait d'ailleurs guère d'importance, puisque les lots avaient été attribués tacitement auparavant à des proches du pouvoir, parmi lesquels Alexandru Bitner, dont on retrouve le nom lié aux affaires concernant Adrian Nastase, Ion Tiriac, le prince Sturdza et le député PSD local, Dan Verbina, devenu un véritable boyard dans son fief. Le leu sort renforcé de 2005 Signal d’alarme tiré en vain Le nouveau leu - équivalent à 10 000 anciens lei - adopté le 1er juillet dernier, est aussi une monnaie plus forte. Tout au long de 2005, il s'est raffermi, après avoir atteint son niveau le plus bas en février (1 € = 42 000 lei), pour se stabiliser aux environs de 36 500 lei pour un euro, à la fin de l'année et avoir fait descendre la monnaie européenne à près de 34 000 lei, à l'automne. Le leu s'est donc renchéri de 10 %, et, en fait, de près de 20 %, si on tient compte de l'inflation (+ 8,5 %). Son gain est quasiment équivalent face au dollar (moyenne 2005 : un dollar = 29 500 lei). Dans son rapport, Dan Moraru citait tous ces noms mais aussi s'alarmait des graves conséquences à venir qui, malheureusement, se sont presque toutes réalisées: la perte de confiance de la population locale dans les autorités et les institutions de l'Etat de Droit; l'instauration d'un sentiment de peur, d'insécurité et d'injustice parmi les gens simples. De fait, les pêcheurs ne peuvent plus tendre leurs filets où bon leur semble, comme autrefois, mais dépendent des autorisation des concessionnaires auxquels ils doivent vendre les produits de leur pêche, dont les prix ont été depuis divisés par deux. Il en est de même pour les paysans. Le retour à une société féodale où la population est transformée en serfs, tremblant devant leurs maîtres… ce qui est devenu une réalité ("Les Nouvelles de Roumanie" n° 29, supplément Delta du Danube). Le rapporteur dénonce également le risque de détérioration du sentiment national et de perte d'audience du PSD auprès d'un électorat local tenté de se tourner vers des partis extrémistes (ce dernier point ne s'est pas vérifié lors des dernières élections). Il est à noter que le représentant permanent de l'UE à Bucarest, Jonathan Scheele, qui suivait de près le problème avait été constamment désinformé par le ministre Petru Lificiu, lequel l'avait assuré que seulement 3 % de la population locale était hostile au projet, alors que ce pourcentage était déjà de 50 %. Connaissance et découverte Sâmbata de Sus, au pied des superbes monts Fagaras, parmi les éleveurs de buffles I Breaza, à 8 km au Nord-Est, abrite les ruines d'une fortedéalement situé au pied des Monts Fagaras, le village resse du 13ème siècle. Les murs d'une fortification dace y de Sâmbata de Sus, proche du plus grand axe de furent découverts sous les fondations. Transylvanie, mais loin de son bruit, est intéressant pour les amateurs de tranquillité, de sports de montagne Les Fagaras, à pied, et aussi de sports équestres. Ses en charrette ou en 4 x 4 habitants sont essentiellement agriculteurs, arboriculteurs ou C'est précisément à Breaza éleveurs de buffles entre que s'organisent des dizaines autres. d'excursions dans les Monts Sâmbata de sus fait partie Fagaras. En 4x4, charrette ou à de la commune de Voïla, dans pied, vous pouvez découvrir laquelle plusieurs des villages des paysages grandioses: les ont des particularités intéreschutes et le lac glaciaire de santes, et est située sur l'axe Bâlea, la vallée du lac artificiel Brasov-Sibiu (E 68), 12 km de Vidraru, que l'on atteint par après Fagaras; à Sâmbata de la route N7C appelée la Jos prendre à gauche, Sâmbata Le magnifique monastère Brancoveanu a été construit en 1700 et Transfagaras, en véhicule norson musée possède une collection rare d’icônes en verre et sur bois. de Sus est à 6 km. mal, mais seulement en été car en hiver, elle est fermée. Des cabanes permettent de passer des nuits près du ciel en Recueillement au monastère Brancoveanu et compagnie des bergers. Le camping sauvage, la natation, la fiers Lippizans de l'école d'équitation de Vienne plongée, le parapente, tout est possible avec votre matériel, tant que vous respectez la nature. Sâmbata de sus (sus = en haut) est très connue en Pour les plus aguerris, et en prenant la précation d’avoir Roumanie grâce au monastère Brâncoveanu. Monastère de recours à des guides expérimentés, vous pouvez escalader les moines, celui-ci est situé à 5 minutes de voiture, en direction points culminants de Roumanie: le Negoiu, 2535m et le de la montagne. Il fut construit en 1700 par C. Brancoveanu Moldoveanu, 2544m. Allez-y, vous en garderez de merqui laissa son nom à "L'art Brâncovean", expression architecveilleux souvenirs. turale qui essaima à la fin du 17ème siècle en Transylvanie. Sa Pour ceux que la montagne n'attire pas, la visite de la ville situation en pleine nature, lui confère une atmosphère propice de Fagaras et de son château fortifié entouré de douves dont au recueillement. De plus, il est reconnu pour son musée qui l'origine remonte au 12ème siècle, est une alternative. C'est au possède une rare collection d'icônes sur verre, et moindre 17ème siécle qu'il a été reconstruit et son enceinte à été refaid'icônes sur bois. te selon le modèle des forteresses de l'architecte français, De belles balades peuvent être entreprises sur les contreVauban. forts tous proches des Monts Fagaras. Au village de Sâmbata de Jos (jos = en bas), se trouve le A proximité également, vous pouvez entreprendre le cirharas dans lequel sont élevés 300 chevaux "Lipitani" cuit des église fortifiées saxes. (Lipizzans). Preuve du savoir faire de ces éleveurs, ce sont les descendants des juments de Sâmbata qui aujourd'hui font les Accueil bon enfant beaux jours de la fameuse Ecole d'équitation de Vienne. Des leçons d'apprentissage à la monte à cheval sont proposées, L'accueil est très souriant, bon enfant, toute la famille où ainsi que la location de chevaux pour les plus expérimentés et vous serez logé se mettra en quatre pour vous satisfaire. des promenades en calèche à travers le grand parc du haras. Dernier-né du réseau OVR, nous avons rencontré des responDes randonnées à cheval sont aussi possibles. Pour une somme sables enthousiastes, prêts à apprendre. Plus ils recevront de modique, on peut également visiter le haras et faire des photos. touristes, plus leur savoir-faire se peaufinera. Il n'existe pas A Dragus, 3 km à l'ouest de Sâmbata, on trouve le centre encore d'activités précises proposées aux voyageurs mais cela ethnographique et folklorique de la région, réputé en particuviendra. lier pour ses danses populaires. Martine et Jean Bovon-Dumoulin Pour en savoir plus, retrouvez les bonnes adresses de Martine et Jean Bovon-Dumoulin en commandant le guide OVR Retea Turistica Au pays des Villages roumains qui permet de partir à la découverte d'une Roumanie authentique à l'aide de fiches en couleurs. Commandes à adresser à Martine Bovon-Dumoulin, Borgeaud, 35, 1196 Gland, CH Suisse. Joindre un chèque de 23,10 € (port compris) à son ordre. 47 Les NOUVeLLes de ROUMANIe Connaissance et découverte Une loi permissive qui permettait d'être dispensé d'impôts pendant dix ans z z ORADEA z ARAD z CLUJ TURDA z BRASOV z BACAU z SÂMBATA DE SUS PITESTI CRAIOVA z z z z z TIMISOARA IASI BRAILA z z TULCEA z BUCAREST CONSTANTA z L'ANTREC : 3600 membres 46 L'ANTREC compte 3.600 membres. Chaque propriétaire de pension paie une cotisation de 20 € par année pour chacune de ses chambres. Avec une moyenne de six chambres, cela fait 120 € pour l'année. Si on multiplie ce chiffre par 3.600, on obtient 432.000 € par an. Ajoutons pour chaque pension, 10 €, pour la parution de son adresse dans le guide ANTREC et 18 € pour l'abonnement à la revue "La vie à la campagne" éditée à 5.0000 exemplaires. Il ne faut pas oublier la contre valeur, toujours variable, des cours de gestion d'agro-tourisme dispensés par des employés d'ANTREC sans lesquels on ne peut pas ouvrir une pension… Et on obtient là le portrait financier à peine esquissé d'ANTREC, association "ne devant pas faire de bénéfices", dans son rôle d'arbitre devant veiller au respect des normes définies. Un arbitre qui encaisse des sommes énormes, non pas dues aux prestations dispensées à ses membres, mais à leur nombre. Plus encore, le rôle d'arbitre se confond avec celui de juge, à travers la société de tourisme "Bran Imex", dirigée par la présidente même d'ANTREC, Maria Stoian. Si l'ANTREC respectait les véritables critères de l'agrotourisme, le nombre de cotisants diminuerait sérieusement. En outre, il est reproché à cette association de ne promouvoir véritablement que la région de BranMoeciu. Lorsque viennent des journalistes, il faut passer par là absolument. "Pourquoi ce déséquilibre énorme au niveau de la promotion avec tout le reste du pays?" se demandent les professionnels. Personne ne s'élève contre cette interprétation "industrielle" de l'agrotourisme. Mais qui devrait veiller au respect de sa frontière avec toute autre forme de tourisme? Il existe des commissions dispensant les autorisations, dont font partie les représentants de l'Autorité Nationale pour le Tourisme (anciennement Ministère du Tourisme), l'un représentant la mairie, l'autre l'ANTREC, la seule association touristique autorisée. En théorie, une pension est contrôlée tous les trois ans, mais jusqu'à maintenant on n'a jamais vu un établissement disqualifié pour non respect des normes. La dernière loi adoptée en 2002, sur proposition de l'ANTREC, est extrêmement permissive, précisant par exemple que seuls 20 % des aliments servis doivent provenir de la production propre à l'établissement. Ainsi, n'importe quel motel pouvait, jusqu'il y a quelques mois, s'intituler "agro-touristique" et par là être dispensé d'impôts sur le bénéfice durant 10 ans. Pour quelle raison l'ANTREC, qui se dit "association ne faisant pas de bénéfices" ne tient-elle pas à créer et à respecter les normes propres à l'agrotourisme, alors que l'une de ses fonctions est de "contrôler la qualité des produits standards"? Tout simplement, parce que, selon les observateurs, son rôle officiel d'arbitre neutre, n'est qu'un prétexte permettant de réaliser des affaires juteuses. A Sibiu, on redonne son sens au tourisme à la campagne Heureusement, pour le tourisme roumain, cette interprétation de l'agrotourisme n'est pas générale, et certains s'en inspirent pour justement ne pas tomber dans les mêmes pièges. C'est le cas de la ville de Sibiu, ou est née une association régionale de tourisme, comptant 47 pensions membres, portant le nom "d'Association de Tourisme Rural de Transylvanie" (ATRT). De la même façon que d'autres associations existant en Bucovine, Maramures ou Apuseni, l'ATRT essaie d'imposer à ses membres des normes plus sévères que celles de sa rivale. Le nombre maximum de chambres est de 6. "Notre chance est justement le fait que nous nous soyons développés plus lentement" dit Dumitru Campean, professeur d'histoire et propriétaire d'une pension de 4 chambres à Gura Riului. (La Source du Ruisseau). "Ceci nous permet de tirer les leçons des erreurs de ceux qui ont converti l'agrotourisme en industrie". Dumitru et son épouse Chivuta, ont modifié la maison héritée de leurs parents, afin de lui donner un aspect plus typique. "Ma mère regrette que nous ayons remis des poutres et des poêles en L’agro-tourisme, au contact avec la vie rurale traditionnelle, terre cuite, comme en 1900" se rappelle Chivuta. est très apprécié des Occidentaux. Pour les repas elle prépare de la sauce aigre de veau, du rôti à la sauce de groseilles, de la topsa (mamaliga ou polenta) aux œufs et à la crème, et fabrique son propre cascaval (fromage). Son concurrent le plus proche se trouve à l'autre extrémité de Marginea Sibiului, dans la Vallée d'Argent de la rivière Cisnadioara; c'est la Pension Salistean. Bebe Salistean, un médecin vétérinaire, gère cet établissement de 4 chambres. On trouve dans la cour de sa ferme tout ce qui peut être rôti dans un four, et sa cuisine sent bon la sarriette. Il possède des chiens de traîneau, des cochons, de jeunes veaux qu'on peut caresser. Il vient même d'acheter un âne, non pas qu'il en ait besoin, mais parce que ça fait bien dans le paysage. Ces entrepreneurs roumains ont compris que les touristes viennent chercher justement ce qu'ils trouvent difficilement dans leurs pays: le respect des traditions, un contact véritable avec la nature, une façon de vivre indifférente aux avancées de la technique et surtout la chaleur de relations sincères entre les êtres, la soif de connaître l'autre et l'envie de lui donner le meilleur de soi-même. Actualité La Roumanie compte dix sept aéroports mais seuls quatre d'entre eux ont un avenir assuré Economie L'ombre du marché unique aérien se profile z SUCEAVA TARGU MURES z SIBIU z SIGHET BAIA MARE Les NOUVeLLes de ROUMANIe L 'entrée de la Roumanie dans l'UE devrait ouvrir de bonnes perspectives aux aéroports roumains, sous réserve que des campagnes promotionnelles pour attirer les compagnies aériennes soient menées par les acteurs concernés" estime Alina Oana dans la lettre de la Mission économique française de Bucarest. "Les administrations des aéroports sont conscientes des opportunités qui apparaîtront à partir de 2007 lorsque les compagnies aériennes de l'UE pourront voler sans restrictions à l'intérieur de l'espace aérien du marché unique. Néanmoins, faute de financement ou d'implication de la part des Conseils départementaux qui gèrent 13 des 17 aéroports du pays, seuls quelques uns auront des chances réelles d'attirer du nouveau trafic, voire de survivre". Myair, Blue Air, Alpi Eagles. Les besoins en investissements de cet aéroport sont de 25 M€ pour la réhabilitation complète de la piste". Timisoara, second aéroport du pays "Seuls Otopeni et Baneasa arrivent à financer leurs dépenses d'entretien par les bénéfices d'exploitation. La plupart des autres aéroports du pays se trouvent dans une situation contradictoire: d'une part, ils ne peuvent attirer les compagnies aériennes à cause d'infrastructures obsolètes, d'autre part les moyens pour investir manquent, les sommes allouées par les Conseils départementaux étant insuffisantes. L'aéroport de Timisoara est le deuxième aéroport du pays en terme de trafic de passagers. La proximité de la frontière Vers les trois millions de passagers hongroise et le grand nombre d'investisseurs étrangers ont fait annuels pour Otopeni-Coanda de Bucarest-Timisoara la ligne domestique la plus rentable, "L'avenir semble bien assuré pour les quatre principaux opérée par Tarom (la compagnie aérienne nationale). aéroports du pays disposant d'un emplacement stratégique et L'investissement de 2 M€ réalisé au cours des deux dernières dépendant du Ministère des Transport - Otopeni-Coanda et années a généré une augmentation du trafic de 12%. Baneasa (Bucarest), Constanta et A l'opposé, se situe l'aéroTimisoara -, qui ont déjà réalisé port de Suceava, dont le trafic a connu une baisse importante. d'importants investissements de Depuis le mois de mars il commodernisation. mence à fonctionner en régime L'aéroport Otopeni-Coanda d'aéroport international en a bénéficié dans les dix dernières misant sur les 300 000 personnes années de 265 M€ d'investissede la région qui travaillent à l'éments pour l'agrandissement de tranger. sa capacité et de la surface de son L'aéroport de Tulcea présenterminal passager, un financete des perspectives importantes ment complémentaire de 86 M€ grâce à la proximité du Delta du étant destiné à la modernisation Danube. Des investissements des installations jusqu'en 2008. L’aéroport international Otopeni de Bucarest, après sa modernisation. d'environ 2 M€ y ont été réaCes investissements qui, pour moitié, proviennent de ses ressources propres, commencent à lisés, les lignes vers Bucarest, Timisoara, Târgu-Mures, porter leurs fruits: l'année passée le trafic d'Otopeni-Coanda a Suceava et Iasi seront réactivées. augmenté de 13%, soit 2,6 millions de passagers, un chiffre Une solution pour le financement des aéroports serait la record. Pour 2005, les estimations de progression se situent au privatisation, schéma qui est pris en compte actuellement pour même niveau et la barre des trois millions pourrait être approl'aéroport de Târgu-Mures, au centre du pays. La future autochée. route Transilvania (Bucarest-Brasov-Cluj-Oradea) et la La hausse la plus spectaculaire a été enregistrée par le construction d'un parc industriel à coté de l'aéroport de Târgu2ème aéroport de la capitale, Baneasa (lignes intérieures du Mures sont des prémices qui devraient assurer son avenir, pays), le trafic ayant quintuplé par rapport à 2002, suite prinespèrent les autorités locales qui estiment les investissements cipalement à l'entrée sur le marché des compagnies low-cost nécessaires à sa modernisation à 16 M€ environ". Un nouvel hôtel Ibis à Bucarest L e groupe français Accord et les Hôtels Continental ont ouvert, fin septembre, le 3ème hôtel Ibis de Roumanie et le second de Bucarest, après celui situé près de la Gare du Nord. L'Ibis Bucuresti Parlement se trouve à proximité du Palais de Ceausescu, devenu siège du Parlement roumain, dans le centre de la capitale. Classé trois étoiles, il dispose de 161 chambres, tout confort, d'un restaurant de spécialités méditerranéennes, d'un bar ouvert en per- manence, et de six salles de conférences d'une capacité maximum de 140 places. Managé par le groupe Accord, cet ancien hôtel Continental a été rénové pour 8,5 M€. Les tarifs des chambres sont de 74 € en semaine et de 54 €, le week-end. 7 Les NOUVeLLes de ROUMANIe Actualité Economie z z z z ORADEA ZALAU z z ARAD DEVA z BAIA MARE SATU MARE SUCEAVA z BISTRITA TARGU MURES IASI z z SIBIU TIMISOARA z z SF. GHEORGHE BRASOV PITESTI CRAIOVA BRAILA z z TULCEA z BUCAREST CONSTANTA z La BCR attribuée à une banque autrichienne 8 Les investissements étrangers ont baissé de 20 % en 2005 z z z Plus grosse privatisation restant à effectuer, la BCR (Banque Commerciale Roumaine), plus grande banque du pays, a été cédée à la banque autrichienne Erste Bank, qui en a pris le contrôle majoritaire pour la somme de 3,75 milliards d'euros. Jusqu'ici la BCR était détenue par l'Etat roumain (37 % des parts), la BERD (Banque Européenne pour la Reconstruction et le Développement) et l'IFC (filiale de la Banque Mondiale) étant ses deux autres grands actionnaires. Les chemins de fer ont perdu 10 % de leurs passagers Année noir pour la CFR (Chemin de Fer Roumains) qui comptait atteindre les 100 millions de passagers en 2005. La compagnie a du se contenter de 90 millions, soit 10 % en moins sur les prévisions. Raisons invoquées: les vingt jours de grève qu'elle a connues et les inondations qui ont fortement perturbé le trafic au cours du printemps et de l'été. 60 milliards d'euros pour le développement entre 2007 et 2013 Le Plan National de Développement (PND) pour la période 20072013, a été estimé à près de 60 milliards d'euros, dont 43 % seront financés par l'UE. Il devrait permettre de réduire de 10 % l'écart enregistré entre le PIB roumain et celui de la moyenne des 25 états membres de l'UE, le premier ne représentant actuellement que 31 % du second. De grosses opportunités d'installation ont été gâchées, relevant nombre de carences, administratives et humaines L 'Agence Roumaine pour les Investissements Etrangers (ARIS) estime ceux-ci entre 3,2 et 3,8 milliards d'euros en 2005, soit une baisse de 20 % et un manque à gagner de 800 M€ par rapport à 2004. Plusieurs "couacs" ont illustré les carences roumaines dans ce domaine tout au long de l'année passé, que l'on peut résumer à des réglementations inadaptées, un manque de terrains et de zones viabilisés, et des comportements manquant de réactivité. L'exemple le plus frappant, qui a conduit à une enquête demandée par le Premier ministre, concerne l'implantation ratée à Cluj de la firme française Montupet, spécialisé dans les composants automobiles, qui prévoyait un investissement de 120 M€. Après avoir été lanternée pendant cinq mois par le Conseil du Judet (équivalent du Conseil général) pour l'acquisition d'un terrain, que celui-ci ait mégoté les avantages octroyés pour l'installation de la société et fait tarder ses propositions, cette dernière a finalement choisi de s'installer à Ruse, sur les bords du Danube… mais côté bulgare. Autre "loupé" avec le constructeur de camions allemand MAN, prêt à investir 40 M€, à la recherche désespérée d'un terrain équipé de 150 hectares que personne n'a pu lui proposer en Roumanie, sauf Arad… où le problème s'est révélé autre: la firme voulait être sûre de pouvoir engager 3000 personnes, ce que ne pouvait lui garantir les autorités, invoquant le taux de chômage bas de la région. MAN a finalement pris le chemin de la Pologne. Le fabricant d'électroménager français Elcobrandts a également choisi ce pays qui faisait des propositions supérieures à celles de Bucarest pour l'installation d'une usine initialement pressentie à Dragomiresti, dans la banlieue de la capitale. L'investissement prévu était de 23 M€, devait aboutir à la création de 800 emplois et à la production annuelle de 350 000 machines à laver. Quand au polonais Barlinek, désireux d'ouvrir en Roumanie une grosse unité de fabrication de parquet stratifié, son projet se trouve dans l'impasse, Romsilva (organisme chargé de gérer la production de bois roumaine) tardant à lui apporter des assurances sur la fourniture pendant dix ans des 160 000 m3 dont il aura besoin annuellement. Avec ses seuls quatre contrats qui lui passent, ou risquent de lui passer, sous le nez, la Roumanie a perdu près de 250 M€ d'investissements. Profits à pas de géant pour l'éleveur… d'escargots F rancisc Lascu, 40 ans, avait teurs italiens - Italiens, Espagnols et décidé d'ouvrir une ferme bien Français sont les principaux consommaque ne teurs d'escargots connaissant rien à du continent - qui l'agriculture. Cet lui ont fourni ingénieur de la équipement, région de Craiova conseils et surtout (Dolj) a donc cherdébouchés. Franché une spécialité cis Lascu a acquis peu développée en six hectares de Roumanie et, terrain près de après avoir lonUne ferme d’élevage d’escargots: Craiova qui lui une pratique jusqu’ici inconnue en Roumanie. guement consulté permettent de Internet et s'y être documenté, a opté pour récolter dix tonnes à l'hectare (15-20 l'élevage d'escargots, pratiquement escargots au mètre carré), vendus 4,2 € inconnu en Roumanie. Le Doljean a réus- le kilo en Italie. Son profit net a été ainsi si à entrer en contact avec des produc- de 40 % dès la première année, en 2004. Les NOUVeLLes de ROUMANIe Connaissance et découverte 300 pensions, certaines gigantesques, ont poussé comme des champignons en train de tuer l'agrotourisme ? Malheureusement, l'agrotourisme tend à devenir une vériL'hôtesse, Nicoleta Preda, est dans sa cuisine. Une femme table industrie. Un de ses hauts lieux se trouve dans la région entre deux âges, ne quittant pas des yeux les ouvriers qui terminent une deuxième salle à manger de 60 places, dans laquelde Bran et de Moeciu, deux communes se trouvant à une trenle les touristes fêteront le Réveillon de fin d'année. Par comtaine de kilomètres de Brasov. Des citadins prospères y ont paraison, la salle actuelle avec ses 35 places ressemble à la construit des grappes de maisons de quatre étages, le paradis, petite cantine d'une entreprise d'état. selon eux, d'une fin de semaine réussie à la montagne. Ancienne cantinière de l'armée, Nicoleta Preda a comQuelque 10.000 touristes y viennent par mois attirés par mencé en investissant l'argent qu'un atelier de mécanique avait l'air pur de la montagne et les promesses des agences de tourapporté à son mari. Elle disporisme. C'est ici qu'est né en 1994 sait alors de trois chambres. La l'ANTREC (Agence Nationale décoration révèle ses goûts, elle de Tourisme Rural, Ecologique qui avait rêvé toute sa vie d'habiet Culturel), la plus importante ter en ville: des termopans, bien entité juridique de promotion du sûr, des teintures en plastique tourisme rural roumain. orange, des carreaux en faïence Durant ces dernières années partout, de la moquette couvrant Moeciu a vu se construire 500 le sol, des tableaux de champs de maisons de vacances et Bran foire. Dans presque toutes les quelque 200. S'y ajoutent 200 maisons de Moeciu de Sus, les pensions à Moeciu et une centaimêmes draperies, toujours en ne à Bran. Des maisons giganplastique orange montent la tesques, de plus de 15 chambres, garde devant les termopans, aux baptisées "pensions agro-touriscôtés des chaises en inox, aux tiques". Il existe aussi, heureuA Moeciu de Sus, près de Brasov, la Pensiunea Nicoleta, dossiers en imitation de fourrure. avec ses 21 chambres et sa cantine de 60 places, sement, des pensions de 4 à 5 est le contre-exemple du véritable agro-tourisme. chambres, dans lesquelles on Quant à la cuisine normalement élaborée avec les produits de la ferme, Nicoleta avoue: "Selon retrouve le véritable agrotourisme. Toutes les maisons en cours le nombre de personnes qui arrivent, je cours des fois jusqu'à" de construction incarnent par leur taille, la négation même du METRO "pour acheter un poulet". Mais elle jure qu'elle a le principe d'intimité. La Pension Maria Clinciu, 18 chambres, la temps de s'occuper de tous les touristes, même lorsque la maiPension Ioana Monte Carlo, 20 chambres, la Pension Luminita, 24 chambres, se disent toutes "d'agrotourisme". son est pleine. "Nous faisons de l'agrotourisme ici… Quoi d'autre?", dit-elle, visiblement dérangée par la question. Hôte et non client L'agrotourisme est la branche la plus noble du tourisme rural. Du tourisme rural, c'est aussi ce que fait n'importe que hôtel, par le simple fait d'être situé à la campagne. A Moeciu, le Complexe "Cheile Dimboviciorei" (les Gorges de la rivière Dambovicioara) sont une copie réussie d'une bâtisse bavaroise, comprenant des dizaines de chambres, mais personne ici n'a la prétention de faire de l'agrotourisme. L'agrotourisme se pratique dans une maison de tout au plus six chambres. Quatre aspects en font la différence avec toute autre forme de tourisme. Il doit s'agir d'une habitation rurale; on y sert les aliments provenant de sa propre production; on propose aux invités des activités telles que traire la vache ou faire les foins, car de cette façon, les relations d'amitié naissent facilement entre l'hôte et ses invités à la différence de celles d'un hôtelier avec ses clients. Le degré de confort se compte en marguerites et non pas en étoiles comme dans les hôtels. On retrouve ces particularités dans le Manuel de gestion d'agrotourisme de Maria Stoian, responsable de l'ANTREC, qui devrait faire du touriste un hôte et non pas un client. Sauna et jacuzzi… mais même pas un œuf dur La Villa Bucegi, à laquelle l'ancien ministre du Tourisme, Agathon, avait accordé cinq marguerites, est une bâtisse sévère, arborant les mêmes draperies, des fenêtres termopan et beaucoup d'inox pour la décoration. Baptisée "villa" afin de pouvoir dépasser le nombre de chambres autorisé pour une pension, elle s'est intitulée "pension agro-touristique" alors qu'on n'y trouve rien à manger, pas même un œuf dur. Par contre elle est équipée d'un sauna et d'un jacuzzi. A Bran, près d'un supermarché, de nombreuses indications encouragent le touriste à faire halte à "Stâna traditionala" (la Bergerie traditionnelles), un complexe de villas portant le nom de la commune. Il comprend quatre bâtisses de 9 chambres chacune - le maximum autorisé par la loi confie une fonctionnaire installée derrière un bureau surmonté de l'écriteau "Réception" - un restaurant de 40 places, aux pieds d'une colline, et plus haut, une autre auberge proposant 75 places. En y accédant, on peut caresser, à travers les mailles d'un grillage, un cerf, une biche et un poney, qui donnent à l'endroit une touche "nature". Si on souhaite prendre en photo le berger trayant ses moutons, il faudra faire partie d'un groupe constitué, et avoir téléphoné au préalable. (Lire page suivante) 45 Les NOUVeLLes de ROUMANIe Connaissance et découverte Tourisme z ORADEA ARAD z CLUJ z SUCEAVA z BISTRITA IASI z z z z SIBIU TIMISOARA TARGU MURES GALATI z BRASOV z BRAILA PITESTI CRAIOVA z z z TULCEA z BUCAREST CONSTANTA z Cinq principes pour un véritable agro-tourisme 44 Economie Les Roumains sont-ils z BAIA MARE z Dans les vallées de Bran et Moeciu, Les NOUVeLLes de ROUMANIe Maria Stoian, présidente de l'ANTREC, confie qu'un certain nombre de pensions ont été exclues de son association pour ne pas avoir respecté les réservations ou pour avoir augmenté leurs prix au moment où le client se présentait pour prendre possession de sa chambre. Mais elle ne se souvient d'aucun exemple de pension exclue pour ne pas avoir respecté les règles de l'agro-tourisme. Quelles sont ces règles ? Cinq principes distinguent le véritable agrotourisme: 1 - le nombre de chambres ne peut être supérieur à six, et l'architecture doit être représentative de la région; 2 - la nourriture se veut traditionnelle et 60 % des produits proviendront de la récolte propre de l'établissement; 3 - l'accueil doit être amical et le touriste traité comme un invité; 4 - on proposera aux hôtes d'assister à des activités spécifiques à l'endroit: travaux des champs, repas des animaux, travail du bois, mariage, baptême, danses à la faveur des fêtes; 5 - l'agrotourisme est d'autant plus véritable lorsque les pensions sont peu nombreuses dans une même région. L orsqu'on demande à un étranger ayant séjourné souvent en Roumanie, quelle est la meilleure façon de s'y loger, la réponse est invariablement: "chez l'habitant". En effet, les hôtels roumains, sauf de rares exceptions, peuvent être classés en trois catégories: les uns, bâtis entre les deux guerres mondiales, imposants de beauté, mais aux équipements vieillots et peu confortables, gérés le plus souvent par des personnes n'ayant pas vraiment de compétences en matière d'hôtellerie, les autres, construits durant la période communiste, aux immenses salles grandioses et glaciales, tout comme l'accueil qu'on vous y réserve, pratiquant des prix exorbitants, et puis les nouveaux palaces, gratte-ciels jurant dans le paysage, impersonnels, servant une nourriture aussi universelle que dénuée de goût, plus chers souvent que ceux proposés par l'hôtellerie française. Chez l'habitant, par contre, les amoureux de la Roumanie ont tous connu des séjours de rêve où dans une maison campagnarde toute simple, et pas forcément confortable, leurs hôtes se mettaient en quatre pour leur faire plaisir. Ils y ont fait leur toilette au robinet de la cour, ou bien dans une baignoire installée récemment mais dans laquelle on jetait des seaux d'eau chauffés sur le poêle à bois. Ils gardent le souvenir ému de petits déjeuners mémorables et gargantuesques ainsi que ceux de soirées passées dans le jardin, entourés par les voisins, buvant de la tsuica et mangeant des pâtisseries faites par la maîtresse de maison. Ils y ont chanté à tue tête jusqu'au petit matin, des chansons à boire françaises, dont les plus âgés de leurs hôtes connaissaient mieux les paroles qu'eux-mêmes. Mais tout évolue très vite en Roumanie. D'une année à l'autre les traditions laissent le pas à une copie, pas toujours réussie de ce qu'on trouve en Occident et surtout à ce qui rapporte le plus d'argent. Dans certaines régions, le nombre de pensions dépassent de très loin la demande. C'est le cas en Bucovine où l'agrotourisme apparaît comme un Eldorado et où les pensions poussent comme des champignons. Des familles se ruinent pour entreprendre des travaux d'aménagement dans leur maison; il arrive même qu'on ne puisse plus payer les médicaments lorsqu'on est malade, à cause de l'endettement. Pour attirer l'attention des touristes, on construit au bord même des grandes routes, sans comprendre qu'ils sont avant tout à la recherche du calme et de l'authenticité. L'agrotourisme devient alors un miroir aux alouettes. Mais peut-on reprocher à quiconque de chercher à mieux vivre? Des salles à manger de 60 places Né, voici plus d'une décennie, l'agrotourisme roumain atteint l'âge de la puberté, mais il grandit de façon étrange, moitié homme, moitié termopan, ces fenêtres à double vitrage, réalisées dans des matériaux modernes et isolants, et très à la mode. La maladie qui le ronge de l'intérieur est due à ses propres initiateurs qui en ont fait une industrie. Dans une rue de Moeciu de Sus (Brasov) se bousculent des dizaines de maisons dans lesquelles se précipitent en fin de semaine les habitants de la capitale, lesquels en rentrant chez eux, racontent à qui voudra les croire qu'ils ont fait de l'agrotourisme. Voici la pension "Nicoleta": deux corps de bâtiment, l'un comprenant 7 chambres, l'autre 14, une énorme terrasse, une salle à manger garnie de tables à dix places Des ouvriers y travaillent pour agrandir encore cette maison-mamouth. Actualité La privatisation de SIDEX Galati: une affaire… en acier pour son repreneur Q consommateurs mondiaux par le biais de son réseau. Les deux uand, en novembre 2001, SIDEX Galati a été tiers de sa production sont exportés et le groupe détient 90-95 repris par le géant mondial du secteur de l'acier, le % des parts du marché roumain. groupe anglo-indien Mittal Steel, le combinat Par étapes, qui viennent de s'achever, le personnel a été sidérurgique perdait un million de dollars par jour. Trois ans réduit de 30 000 à 18 000 salariés. Les employés après, il a dégagé un profit de 450 millions de licenciés ont reçu une prime d'environ 4000 € et dollars, sur la seule année 2004 et est devenu la une indemnité mensuelle de 60 € pendant un an première compagnie privée de Roumanie avec maximum. un chiffre d'affaires annuel de 2,1 milliards de Le groupe, qui est présent dans 14 pays et dollars, contre 880 millions, lors de sa privatisasur 4 continents, réalisant un chiffre d'affaires de tion. Dans le même laps de temps, sa production 22 milliards de dollars en 2004 pour une proest passée de 3,7 millions de tonnes à 5 millions. duction de 70 millions de tonnes, a surtout bénéEn état de faillite, le combinat avait été ficié d'une conjoncture mondiale exceptionnelle, racheté pour une bouchée de pain - 70 millions le prix de la tonne d'acier passant de 200 dollars de dollars - par son nouveau propriétaire, un la tonne, en 2003, à 600 dollars, un an plus tard. anglo-indien, notamment grâce aux pressions de Cette situation pourrait ne pas durer et des Tony Blair sur le gouvernement Nastase et analystes estiment que Mittal Steel pourrait quelques sombres arrangements, incluant, selon Le puissant patron Lakshmi Mittal. mettre la clé sous la porte à Galati, si le groupe la presse britannique, pots de vins et versements n'y dégageait plus de bénéfices, la privatisation ayant été faite aux fonds électoraux du Labour Party… provoquant le dépit sans qu'aucun garde-fou n'ait été prévu. du français Usinor, qui a vu l'affaire lui passer sous le nez. Le groupe anglo-indien détient aussi des combinés à Iasi, Le repreneur s'était engagé à investir 350 millions de dolRoman et Hunedoara et vient d'acquérir le combinat bulgare lars pour le moderniser, ce qu'il n'a pas fait de façon significade Kremikovtzi. Il a également porté de 11 à 89 % sa particitive jusqu'ici, redressant les comptes par une meilleure gestion. pation dans Romportmet, l'opérateur du port de Galati, dont il Ainsi les intermédiaires ont été supprimés, Mittal Steel se était le principal client. chargeant lui-même de vendre son acier auprès des grands L es Roumains aiment les glaces. La profession a établi le profil de ses amateurs et leurs goûts. Bien sûr, les enfants de moins de seize ans arrivent en tête, mais sont suivis par les personnes âgées et celles appartenant à des familles ayant des petits revenus ou moyens, les glaces étant un produit peu coûteux. En tête des préférences des Roumain vient la glace au chocolat, et particulièrement en Moldavie; suivent les glaces à la vanille et au cappuccino, notamment appréciées par les Bucarestois. Les Transylvains aiment les produits plus sophistiqués: glaces aux fruits des bois, Les Roumains friands de glaces au chocolat aux griottes…Pour les fabricants, la meilleur saison se situe au printemps et en automne. En effet, l'été ils sont obligés de restreindre leuractivité, beaucoup de détaillants n'étant pas suffisamment équipés pour conserver leur stock à l'abri de la chaleur. Plus de soixante firmes se partagent le marché, certaines ayant de petites capacités de production, de l'ordre de 3 tonnes quotidiennement, d'autres pouvant dépasser les 50 tonnes. Le numéro un est Nestlé Roumanie, suivi d'European Food. La marge de développement des fabricants est encore grande, les professionnels estimant que le marché ne devrait arriver à saturation que dans un an ou deux. La Roumanie a exporté 800 tonnes de glace pour une valeur de 1,5 M€ (10 MF), l'an passé, en premier lieu vers la Hongrie (600 tonnes), et aussi vers la République Tchèque, la Slovaquie, l'Ukraine, la Moldova, la Bulgarie et la Croatie. En sens inverse, elle en a importé 270 tonnes, pour un coût de 550 000 € (3,6 MF), principalement en provenance de Turquie, qui pratique des prix défiant toute concurrence, faisant crier au "dumping" les firmes roumaines, mais également de France (32 tonnes). Premiers bénéfices pour Renault-Dacia A près cinq exercices déficitaires, Renault-Dacia a enregistré ses premiers bénéfices en 2005, grâce à l'explosion des ventes (+ 85 %), due au phénomène de la Logan. Le constructeur a même dépassé son objectif qui était d'atteindre un chiffre d'affaires de un milliards d'euros, réalisant 1,1 milliards, soit cinq fois plus qu'en 1999, année de sa reprise par Renault, lequel a apporté depuis 650 M€ d'investissements. La firme de Pitesti entre ainsi dans le club très fermé des quatre sociétés réalisant un chiffre d'affaires annuel en Roumanie supérieur à un milliard d'euros (dans l'ordre, Petrom, Sidex, Petromioda et Métro). Elles n'étaient que deux en 2003 (Petrom et Sidex), mais pourraient bientôt être rejointes par un sixième larron, RomTelecom (800 M€ de CA en 2004). 9 Les NOUVeLLes de ROUMANIe Actualité Social L Tara Oasului z ORADEA z BAIA MARE z z TARGU MURES ARAD BRASOV z z z IASI z DEVA z z SUCEAVA CLUJ GALATI z SIBIU TIMISOARA z BRAILA PITESTI CRAIOVA z z z BUCAREST CONSTANTA z Le marché porteur de la traduction séduit près de 10 000 jeunes 10 France ou Roumanie : En Roumanie, de nombreux jeunes, ne comptant que sur euxmêmes face à une situation économique difficile, sont hantés par une obsession: monter leur propre affaire. Actuellement, une opportunité est à saisir: la traduction autorisée, un marché très porteur. La demande est en constante augmentation et l'investissement initial est vite amorti. Deux points noirs néanmoins: pour l'Etat, un important manque à gagner puisque la majorité des établissements ne déclarent pas leur activité et pour le client, l'obligation de faire le tri parmi des traducteurs plus ou moins consciencieux. D'une année sur l'autre, ce secteur d'activité enregistre une croissance de 20 à 30 %. Et le marché n'est pas prêt de s'essouffler puisque les investisseurs étrangers- donc des futurs clients - sont de plus en plus nombreux et importants ainsi que la demande en produits électroménagers pour lesquels la traduction des modes d'emploi est obligatoire. Pour un entrepreneur modeste, l'investissement initial s'élève à environ 1500 € (10 000 F) : quelques ordinateurs, une imprimante et des équipements de bureau. Pour les plus ambitieux, visant déjà les grandes compagnies étrangères, l'investissement sera plus élevé, autour de 3000 € (20 000 F): dotation des bureaux, location du lieu de travail, voitures de fonction, salaires des employés... Mais le jeu semble en valoir la chandelle: selon le niveau des investissements, la somme de départ s'amortit en un à cinq ans. es causes de la pauvreté sont les mêmes en France, qu'en Grande-Bretagne, en Espagne, au Portugal, en Roumanie, en Pologne et en Russie, malgré les différences historiques, économiques et sociales entre ces sept pays, indique une étude de l'Insee parue fin décembre. "Partout, le bas de la hiérarchie socio-économique est composé de familles avec plusieurs enfants à charge ou de parents isolés, de ménages comportant des personnes handicapées ou des chômeurs, de foyers dont le chef ayant un emploi est peu qualifié", écrit l'Insee dans "Les approches de la pauvreté à l'épreuve des comparaisons internationales". Elle prend soin de préciser que "l'extrême dénuement est sans doute marginal dans l'Europe de 2000". Si le profil des pauvres est le même, "il n'en va pas de même de leurs modes de vie" (travail, dépenses, entraide)". "En Roumanie", illustre l'Insee, "l'alimentation est de loin le premier poste du budget des ménages les plus pauvres et obère toutes les autres dépenses. En France, au contraire, les ménages les plus pauvres ne consacrent que "4 % de leur budget en plus" à l'alimentation par rapport à la structure médiane Réveillon des "pauvres" M ettant en avant la fibre sociale de son parti, Marian Vanghelie, maire du 5ème secteur de Bucarest et seul élu de la capitale à ce niveau du PSD (Parti Social Démocrate d'Adrian Nastase et Ion Iliescu) a organisé un réveillon des "pauvres" à l'occasion du Nouvel an, destiné aux retraités et baptisé "Réveillon des seniors". Un millier de places leur étaient réservées dans les halls de Rom Expo, le pavillon des expositions, sur les 6500 prévues. Toutefois les bénéficiaires devaient acquitter 11 €, soit près d'un quart d'un salaire minimum ou d'une pension des plus démunis, au lieu des 34 € exigés des autres convives. Dès la mise en vente des billets, délivrés sur présentation de la carte d'identité, ce fut une véritable bousculade, 3000 personnes se pressant pour essayer d'en obtenir. Pour beaucoup, cela représentait un sacrifice mais aussi un moment de bonheur espéré et devenu rare, où de vieux messieurs pouvaient danser avec leur femme sur des airs de musique populaire, comme autrefois. Beaucoup ouvraient de grands yeux en découvrant le menu : dindon en gelée, vol au vent Marshall ("Mais qu'est ce que c'est que çà?" entendait-on), saumon fumé, œuf garni aux queues d'écrevisses, salade Waldorf, roulade diplomate… et coupe de champagne roumain. L'ambiance était assurée par des groupes réputés: le taraf de Clejani, qui se produit dans le monde entier, l'ensemble "florile Izei" du Maramures, les Haiducs de Vâlcea, Gheorghe Turda, Petrica Matu Stoian et le chanteur italien Zucherro. Tara Oasului fournit 40 % A quatorze ans… D e plus en plus d'enfants de 14 ans ou moins quittent la Roumanie pour aller mendier, voler, se prostituer à l'étranger, révèle une enquête menée par la Fondation Roumaine pour les Enfants, les Communautés et les Familles, une institution soutenue par l'UNICEF. Et si, plus d'un quart des mineurs qui arrivent devant le juge des enfants de Paris sont Roumains, 40 % d'entre-eux proviennent de la même région, quatre communes qui forment la Tara Oasului, dans le Maramures. Sur place, l'enfant qui arrive à 14 ans est considéré comme un adulte. On attend qu'il ramène de l'argent, même si cela signifie pour sa famille de le laisser partir. Et le départ n'est pas difficile: dès cet âge, l'enfant a le droit à un passeport personnel, avec l'accord de ses parents, le document devant être simplement légalisé devant le notaire. Il suffit ensuite de le faire accompagner par un adulte pour passer la frontière rou- Les NOUVeLLes de ROUMANIe Echanges Connaissance et découverte Saint-Leu-Izvoru: une amitié qui réchauffe les cœurs... et amène un dispensaire tout neuf I zvoru-Berheciului revit. La commune très démunie, située en Moldavie, à quelques kilomètres de Bacau, se sentait bien à l'écart du monde moderne. Comme ses voisines, avec ses six villages, on n'y trouve guère plus qu'une population âgée et des enfants, les adultes partant travailler à l'étranger. Pourtant les habitants se réchauffent à l'amitié que leur procure leur relation avec Saint-Leu la Forêt (Val d'Oise) dans la région parisienne et qui se concrétise de façon spectaculaire par l'ouverture cette année d'un dispensaire tout neuf chargé de remplacer celui qui existait mais était en état de délabrement. Il s'agit de la première maison rurale construite aux normes européennes, dans le secteur, avec eau courante, chauffage central, double vitrage. D'utilité publique évidente pour la population, le bâtiment comprend un cabinet médical, un cabinet dentaire, des salles de soins et un appartement de fonction pour les médecins. Un "luxe" dont on n'aurait jamais rêvé sur place et qui change déjà la façon d'y voir la vie. L'affaire n'a pas été simple à mener. Il a fallu l'opiniâtreté de l'association "Amitié Roumaine Saint-Leu-Izvoru-Berheciului" et de sa présidente, Raluca Moulinier, de son représentant sur place, Dinu Apostu, de l'association partenaire hollandaise Betania et le soutien de la mairie d'Izvoru pour que le projet aboutisse. Lancés en mai 2004, les travaux aboutissent seulement maintenant, retardés par les intempéries mais aussi par des raisons locales d'ordre administratif et politique qui, dans d'autres endroits, ont découragé les bonnes volontés. L'ouverture du dispensaire a été précédée, l'été dernier, par celle d'un point de distribution de produits pharmaceutiques qui faisait cruellement défaut, installé dans l'ancien cabinet dentaire. La population a grandement apprécié ce geste de l'association d'amitié qui lui a permis d'aborder l'hiver en étant assurée de disposer d'un minimum de médicaments. Les relations entre les deux communes ne se limitent pas toutefois aux seuls aspects humanitaires. Des échanges d'étudiants et d'enseignants ont déjà eu lieu dans les deux sens, et les écoles primaires et maternelles d'Izvoru ont reçu des livres et du matériel pédagogique. Enfin, à Noël dernier, "Amitié Roumaine" a soutenu l'organisation d'un spectacle folklorique présenté pour les adultes et les enfants par la troupe d'élèves du collège Cancicov de Bacau. Une première à Izvoru, qui a réchauffé les cœurs. Blagues à la roumaine Humour Cri du corps Cornel rentre préoccupé chez lui et interpelle sa femme : - Dis donc, j'ai appris que l'administrateur de l'immeuble a couché avec toutes les femmes de notre bloc sauf une… Tu es au courant ? - Oui, oui, chéri, c'est la voisine du dessous. Retrouvailles Un violoniste tsigane est chargé d'animer une soirée de nouveaux riches d'après la "Révolution". Au cours de la fête, un invité le questionne devant toute l'assemblée: -Dis moi, Tsigane, tu as joué autrefois aussi pour le Parti -Eh oui, patron, -Mauvais mon gars, mauvais… -Pour la Securitate, aussi ? -Fallait bien, patron, qu'est-ce que je pouvais faire ? -Et pour la nomenklatura ? -J'étais bien obligé. Le pauvre musicien rentre chez lui sous les regards chargés de reproches des néo-millionnaires et raconte sa mésaventure à sa femme : -Mais tu ne pouvais pas leur répondre que tu n'y avais jamais mis les pieds ? -Ils ne m'auraient pas cru … Ils y étaient tous ! Contraception Adriana explique à sa grand-mère qu'elle prend la pilule et lui demande : - De ton temps, vous ne connaissiez pas çà ? - Comment ? Bien sûr que si ! On avait l'aspirine… - ???? - … Le pope nous disait d'en mettre une entre les genoux et de les garder bien serrés. Mesures sociales Après avoir lancé son programme "Laptele si cornul" (du lait et un croissant) destiné à assurer un vrai petit-déjeuner aux élèves des écoles, afin qu'ils travaillent sans avoir le ventre vide, Adrian Nastase va visiter un asile de fous où les 52 pensionnaires se prennent pour lui. C'est un choc pour le Premier ministre, tant leur ressemblance est frappante: joues roses, double menton, ventre naissant… Mais il se fait traiter tout de suite d'imposteur par ses doublures et une mêlée s'engage. Le directeur de l'asile a du mal à séparer les protagonistes et surtout à reconnaître le vrai Nastase. Finalement, il se décide, en choisit un et le ramène à son chauffeur. Une semaine plus tard, le gouvernement annonce le deuxième volet de ses mesures sociales, afin de donner de l'énergie aux travailleurs dans leurs entreprises, "Tsuica et cozonac" (Tsuica et brioche). 43 Les NOUVeLLes de ROUMANIe Connaissance et découverte Traditions z z BAIA MARE ORADEA z z ARAD z z TARGU MURES z z SIBIU GALATI z COMARNIC z z BRAILA z PITESTI CRAIOVA VASLUI BRASOV z TIMISOARA IASI z CLUJ DEVA z SUCEAVA z z TULCEA z BUCAREST CONSTANTA z Mise à l'écart par les communistes 42 Après la guerre, sous le régime communiste, Mariana Dragescu obtient un poste d'instructeur de pilotes à Brasov, puis est brutalement congédiée en 1957. Elle travaillera alors comme secrétaire dans une clinique, touchant un salaire très faible. L'heure de la retraite venue, l'administration ne reconnaîtra pas ses états de services, ce qui lui aurait permis de doubler sa pension de misère. Après la "Révolution", certains Roumains se rappelleront de la formidable épopée de "l'Escadrille blanche" et Mariana sortira de l'oubli. Elle a 78 ans. On la fait lieutenantcolonel de réserve et elle reçoit l'"Etoile de Roumanie", avec le grade de chevalier. L'Armée se préoccupe de son sort, lui fait parvenir à manger deux fois par semaine, depuis la popote, et lui procure un médecin militaire. "Mais je n'en ai pas eu besoin… je n'ai jamais été malade" précise-t-elle. En France, dans les années 80-90, la pilote roumaine est également honorée, recevant le diplôme de reconnaissance des "Vieilles Tiges", association qui regroupe les pilotes vétérans français. Dans son ouvrage Femmes de l'air, chronique d'une conquête, paru aux éditions FranceEmpire en 1993, Marie-Josèphe de Beauregard lui consacre un épisode. Sans-doute le destin de Mariana Dragescu aurait-il réservé de fabuleuses surprises si, à l'âge de 35 ans, les communistes n'y avaient mis un terme. La très vieille dame le regretteelle? "Je suis fière d'être restée féminine dans un univers et un métier d'homme” se contente-t-elle de répondre. Des fromages roumains au goût de trop peu S i les habitudes culinaires des Roumains proposent le fromage à chaque repas, il est bien difficile de trouver de la variété" remarque notre confrère "Regard franco-roumain", publié à Bucarest, dans un article signé Luculus. "Lors de la fête nationale française, le 14 juillet dernier à la résidence de l'ambassade de France, le Président Iliescu, interviewé sur les fromages français, avait cité la phrase du Général de Gaulle (NDLR: attribuée aussi à Churchill): "un peuple ayant plus de trois cents variétés de fromages est ingouvernable". On peut se demander si, à l'inverse, un peuple avec si peu de fromages est gouvernable ! La fabrication des fromages roumains - les ancêtres des Roumains, au temps des Daces déjà, étaient des agriculteurs et des bergers - exprime une longue tradition. D'ailleurs le mot "brânza" (fromage) fait partie du fonds lexical dace qui nous a été transmis, un fonds très restreint, mais qui donne une idée du mode de vie des ancêtres des Roumains. Les bergers, à travers le processus de la transhumance, jouent un rôle déterminant dans l'unité des trois provinces roumaines de la Valachie, de la Transylvanie et de la Moldavie. Il s'agit là d'unité de langue, mais aussi de culture, de traditions, de coutumes. Les recettes de fabrication des fromages roumains sont gardées précieusement et transmises de père en fils, et l'on peut ainsi constater qu'elles n'ont pratiquement pas varié au fil des siècles. Lait de vache, de brebis et de bufflonne Les fromages roumains sont préparés à partir de lait de vache, de brebis ou de bufflonne - le buffle est présent dans plusieurs endroits de la Transylvanie (les régions de Brasov, de Sibiu, de Salaj). Cette production s'articule autour de la telemea - le type de fromage le plus répandu préparé avec de la présure, égoutté et coupé en gros cubes. La telemea est ensuite salée, conservée dans la saumure et connaît plusieurs stades de maturation. - Le fromage frais (branza proaspata) est généralement préparé à partir de lait de vache, c'est pourquoi il est appelé aussi "branza de vaci" et il n'est pas salé du tout. - L'urda est un fromage très riche en protéine et pratiquement sans graisse et qui, en dehors de la Roumanie, n'est plus fabriqué qu'en Corse (style Bruccio) et en Italie (le "Ricota"). - Le cas est préparé à partir du lait de brebis; c'est un fromage frais, pas salé ou légèrement salé. - Le brânza de burduf s'affine dans des outres ou bien est enrobé dans des écorces de sapin. - Le cascaval est un fromage dont l'origine du mot indique un rapport très étroit avec l'histoire. D'origine aroumaine, il est fait de - Cas "fromage" et de caval "cheval" - parce que ce type de fromage était transporté à dos de cheval à travers les montagnes par les bergers aroumains (populations qui avec les Megleno-roumains et les Istroroumains ont constitué des îlots de latinité au sud du Danube et qui sont aujourd'hui dispersées surtout dans les Balkans du sud du Danube). Ce type de fromage est une pâte cuite, il en existe plusieurs sortes, à partir du lait de vache ou de brebis, frais ou fumé, de fabrication industrielle ou artisanale au nord de la Valachie ". Les NOUVeLLes de ROUMANIe Actualité les pauvres ont des profils similaires en Europe Autre exemple, sur la base d'une comparaison entre deux pays: "En France et au Royaume-Uni, la dissolution du couple n'expose pas de la même façon les hommes et les femmes." Après une séparation, "le risque de pauvreté est du même ordre de grandeur chez les hommes et les femmes en France, mais il est plus grand du quart chez les femmes au RoyaumeUni. Pour les femmes seules sans enfant à charge, ce risque est deux fois plus important". Les auteurs rappellent que la pauvreté peut se mesurer à partir de trois critères: pauvreté monétaire, conditions de vie, mesures "subjectives" (retard dans les factures...). "Les standards des conditions de vie ne sont pas les mêmes d'un pays à l'autre", soulignent-ils. "L'environnement pollué, bruyant, vandalisé, est un critère en France, en Espagne et en Pologne, mais ne figure pas dans la liste établie pour la Russie urbaine ou la Roumanie." Autre exemple: "Pas de voiture et pas de téléphone sont des privations seulement pour les pays riches: France, Espagne, ou Pologne. Elles ne figurent pas en Russie urbaine ou en Roumanie, pour ne s'en tenir qu'à l'Europe." La France occupe "une position médiane" en Europe dans le domaine des inégalités, entre la Grande-Bretagne, l'Espagne et le Portugal (pays plus inégalitaires) et les pays du Nord (pays moins inégalitaires). Il laissera cependant sceptique les habitués de la Roumanie qui constatent que mieux vaut être pauvre en France que dans ce pays, si l'on compare le niveau et la diversité des aides sociales accordées, les "pauvres roumains " étant totalement démunis et ne pouvant guère compter que sur eux-mêmes mais aussi sur une certaine solidarité de leurs proches, dans une société ayant encore conservé ses racines rurales.. pour les retraités de Bucarest Sur les coups de minuit, un groupe en costumes folkloriques est venu servir une tsuica fierta (tsuica chaude), dont les Roumains raffolent en hiver, puis les convives les plus solides ont pu effectuer quelques tours de valses. Fête populaire dans le centre de la capitale Les jeunes de 18 à 35 ans, eux, avaient leur propre réveillon, toujours organisé par la mairie du 5ème, au Palais des enfants, et dénommé "Réveillon Béton 2006". Il leur en coûtait 50 €, une somme qui le réservait à une classe bien déterminée, illustrant une évolution marquée ces dernières années, particulièrement à Bucarest : cela fait chic de se faire voir dans les lieux en le Nouvel an avec leurs compatriotes se sont retrouvés Place de la Révolution, où les jeunes pouvaient assister à une succession de concerts gratuits des meilleurs groupes du pays, à l'appel de radio Pro FM, ou Place de l'Université, conviés par la mairie générale de la capitale. Là aussi un spectacle musical était assuré mais la vedette de la soirée était assurément le président Traian Basescu, venu présenter ses vœux à ses concitoyens. Contrairement à l'année passée, “Voisine, je parie que tu ne te rends au moment fatidique, il ne s'est pas même pas compte si je vais ou si je reviens de faire mes achats pour le réveillon”. emparé d'une bouteille de chamCaricature de Vali. pagne pour boire au goulot, mais des menus de réveillon dépassait parfois s'est fait servir élégamment une coupe les 300 €. Les Bucarestois ordinaires qui qu'il a levée à la santé du public. Un an de n'avaient pas les moyens, ni même l'idée, formation dans les ors des palais préside s'offrir ces fantaisies et voulaient fêter dentiels laisse des traces… vogue, les plus recherchés étant les hôtels et restaurants de Poiana Brasov où le prix des mineurs conduits devant le juge des enfants de Paris on doit gagner sa vie maine qui n'est distante que d'une centaine de kilomètres il continue ensuite le voyage seul. L'enquête note aussi que de plus en plus de parents laissent leurs enfants seuls pour partir travailler à l'étranger, ce phénomène s'étendant à l'ensemble du pays. A 12 ou 13 ans, ceux-ci se retrouvent devant des responsabilité d'adultes: s'occuper de la maison, des frères et sœurs plus jeunes, assurer les travaux agricoles, y compris les plus pénibles… Les abandons scolaires sont devenus, dans ces conditions, largement répandus et les enseignants baissent les bras. Il a toujours existé à Tara Oasului une tradition de migration, mais elle était jusqu'à présent interne. Elle fournissait la main d'œuvre saisonnière des mines, des travaux forestiers, des travaux publics… Tout ce qui pouvait amener un meilleur salaire. Aujourd'hui, la population émigre, utilisant pour cela les services des proches se trouvant déjà à l'étranger. Plus de la moitié des habitants interrogés par la Fondation connaissaient des enfants, ou avaient un enfant, partis travailler dans l'UE. L'enquête s'est révélée cependant particulièrement difficile à mener, se heurtant à "la loi du silence" d'une population n'ayant confiance ni dans les autorités, ni dans les étrangers aux villages. Certains enquêteurs ont été même chassés et il a fallu avoir recours à des personnes du crû pour la mener à bien, tout en montrant beaucoup de patience. 11 Les NOUVeLLes de ROUMANIe Société Evénement BOTOSANI z CLUJ ARAD z z z z z z z SIBIU TIMISOARA BACAU SIGHISOARA GALATI z z BRASOV BRAILA PITESTI CRAIOVA z IASI TARGU MURES z ALBA I. z z z TULCEA z BUCAREST CONSTANTA z Ariel Sharon a été marié à deux Roumaines 12 L'ancien Premier ministre israélien Ariel Sharon a été marié, successivement, à deux Roumaines d'origine juive. En premières noces, il avait épousé en 1950 Margolit Zimmerman, de Brasov, qui avait émigré avec sa famille, des commerçants, en Israël, en 1949, fuyant le communisme. Celle-ci était décédée dans un accident de voitures, en 1962, à l’âge de 32 ans. Ariel Sharon s'était remarié ensuite avec sa sœur cadette, Lily, une artiste qui a été le grand amour de sa vie. U n Roumain sur deux vit officiellement avec moins de 150 euros par mois, mais le boom du marché automobile et les queues interminables devant les caisses des hypermarchés pourrait donner l'illusion du contraire. Avec quelque 200.000 voitures neuves immatriculées en 2005, les ventes automobiles ont pour la première fois dépassé les 2,5 milliards d'euros. "2005 a été de loin la meilleure année pour le marché automobile roumain depuis 1990, marquée par une progression record de près de 50% des ventes", se félicite un responsable de l'association des importateurs de voitures, Mircea Tudor. Pris d'assaut par des dizaines de milliers de clients, les grands distributeurs font pour leur part état d'une année "exceptionnelle", où ils ont vu leurs ventes s'envoler de 25% en moyenne. Des produits de beauté aux chocolats, en passant par l'électroménager, tout s'arrachait à la veille des fêtes de fin d'année, contraignant les employés des grandes surfaces à un difficile slalom parmi les chariots débordant de marchandises pour remplir plusieurs fois par jour les étalages. "Cette explosion de la consommation intervient après de nombreuses années de privations", explique le sociologue Mircea Kivu. Selon lui, l'inflation galopante des années 1990, qui grignotait leurs maigres économies, a contraint les Roumains de reporter de plusieurs années l'achat d'une machine à laver ou d'un nouveau réfrigérateur. "Or, la hausse du salaire moyen, l'accès facile aux crédits et le ralentissement de l'inflation aiguisent de plus en plus l'appétit --jusqu'ici réprimé-- pour la consommation", estime-t-il. Les chèques des proches travaillant à l'étranger Ariel Sharon s’est remarié avec Lili (notre photo), soeur de Margolit, décédée dans un accident, en 1962. Lily avait ainsi respecté la tradition juive qui veut qu’une fille s’occupe des enfants de ses frères et soeurs en cas de décès et s’était installée dans la maison d’Ariel, l’épousant un an plus tard. Le couple avait visité Brasov et sa région en 1988, à la recherche de familles et parents juifs, mais ceux-ci avaient presque tous quitté le pays ou avaient disparu. Lily Sharon est décédée en mars 2000 et est enterrée dans la ferme de l'ancien Premier ministre. En outre, souligne M. Kivu, les statistiques officielles ne prennent pas en compte les revenus provenant de l'économie informelle et surtout les sommes d'argent envoyées à leurs familles par les Roumains travaillant à l'étranger et qui se sont élevées, selon la banque nationale (BNR), à 3 milliards d'euros en 2005. "Nous estimons qu'environ 1,5 million de Roumains travaillent actuellement en Italie, en Espagne et en Allemagne. Si chacun d'entre eux envoie à sa famille un chèque de 300 euros en moyenne pour les fêtes de fin d'année, nous arrivons à un chiffre total de 450 millions d'euros", indique Petre Dandea, vice-président du Cartel Alfa, l'une des principales confédérations syndicales du pays. "Cet argent va entièrement à la consommation. Sinon, avec les seuls salaires, encore très bas, il serait impossible d'expliquer la fièvre acheteuse qui s'est emparée du pays", ajoute-t-il. Mais alors que l'essentiel des biens de consommation, notamment l'électroménager, sont importés, cette explosion a entraîné un creusement sans précédent du déficit commercial, qui risquait de dépasser pour la première fois en 2005 le niveau record de 10 milliards d'euros. Soucieuse de préserver un équilibre macroéconomique déjà fragile, la BNR a multiplié ces derniers temps les mesures visant à décourager la consommation, en rendant plus difficile l'accès des particuliers aux crédits. Selon le président de l'Association des banques de Roumanie Radu Gratian Ghetea toutefois, les prêts à la consommation et hypothécaire, qui ont atteint 2,4 milliards d'euros en 2005, vont augmenter de 30% l'année prochaine, en dépit des restrictions de la BNR. "Les Roumains sont tellement avides d'améliorer leurs conditions de vie, que rien ne pourra les empêcher de s'en donner à cœur joie, même si pour cela ils doivent s'endetter lourdement", prédit-il. Ce qui n'empêchera pas de laisser à plus de la moitié de la population la seule possibilité de faire du lèche-vitrine, en guise de consommation. Connaissance et découverte A 93 ans, l'une des premières femmes pilote roumaine se rappelle de l'épopée de l'"Escadrille blanche" Aux commandes de son avion, Mariana Dragescu a sauvé des centaines de blessés pendant la guerre La fièvre acheteuse de 2005 SUCEAVA BAIA MARE Destins z z z ORADEA Les ventes de voitures et les emplettes de fin d'année ont explosé Les NOUVeLLes de ROUMANIe T oute petite, Mariana Dragescu était fascinée par les avions. Sa première rencontre avec eux n'avait pourtant rien d'engageant. Elle faisait du lèchevitrine avec sa mère dans le centre de Bucarest quand, tout à coup, l'aviation militaire allemande faisait son apparition dans le ciel et bombardait la capitale, obligeant les passants à se réfugier là où ils le pouvaient. C'était en 1916, pendant la Première guerre mondiale et la fillette avait tout juste quatre ans. Aujourd'hui, à 93 ans accomplis, héroïne et l'une des toutes premières pilotes de l'histoire de l'aviation roumaine, Mariana Dragescu se souvient fort bien des balbutiements de celle-ci. Suivant ses parents de garnison en garnison à travers le pays - son père était militaire de carrière - la jeune fille se passionne pour ces "merveilleuses machines volantes" et ne manque pas une occasion d'aller les découvrir. Faisant preuve d'esprit d'aventure, elle se rend seule à Bucarest pour assister à des meetings aériens, des courses de voitures, et pratique l'équitation. Quand Mariana apprend l'existence d'une école de pilotage pour civils, l'une des toutes premières de Roumanie, créée par le prince Ion Cantacuzino, elle s'y inscrit sans hésiter et en est la seule fille parmi les sept élèves. Sa mère, elle-même originale et moderne, la soutiendra dans sa démarche, provoquant seulement les haussements d'épaule de son mari. Mariana fait son apprentissage sur les deux avions ramenés d'Allemagne par le fondateur de l'école, Mircea Cantacuzino, qui se tuera un peu plus tard. Rencontre avec Saint-Exupéry En 1935, à 23 ans, la jeune femme obtient son brevet de pilote et est engagée, un an plus tard, par l'Aéroclub Royal de Roumanie. Avec sa solde, elle s'achètera son propre avion, un Messerschmitt Sport, l'Etat en payant la moitié. Sa vie a alors basculé du rêve à l'accomplissement. Mariana Dragescu côtoie les noms les plus célèbres de l'aviation de l'époque, le colonel Brocard, commandant de l'escadrille française de la Grande Guerre, René Foncq, l'as de l'aviation française, et Antoine de Saint-Exupéry. L'écrivain est pratiquement au sommet de sa gloire. "Il était grand et timide" se souvient la Roumaine. La jeune pilote effectue de nombreux vols, parfois dans des conditions difficiles, sans visibilité, au cours desquels elle emmène ses deux amies, Lady Hoar, femme de l'ambassadeur de Grande-Bretagne à Bucarest, et Smaranda Braescu, aussi casse-cou qu'elle et qu'on appelle "la reine des hauteurs" depuis qu'elle est devenue la première femme parachutiste de Roumanie. Sur les fronts de l'Est, de l'Ouest et à Stalingrad Survient alors sa rencontre avec Marina Stirbei, nièce de l'ancien Premier ministre Barbu Stirbei, elle-même pilote, qui lui parle de son idée de créer une escadrille sanitaire, composée uniquement de femmes. Alors que les bruits de bottes se font de plus en plus entendre sur le Vieux Continent, le projet est approuvé par le gouvernement et celle-ci voit le jour en 1938. Marina Stirbei en devient le pilote n° 1 et Mariana, le n° 2. Dotés de trois avions peints en blanc et pilotés par des femmes en combinaison blanche, cette unité va vite être connue et demeurée dans l'histoire sous le nom d'"Escadrille blanche". Les aviatrices ont tout juste le temps de s'exercer à leur nouvelle mission, transportant des enfants malades, apprenant à atterrir dans toutes les conditions et sur n'importe quel terrain, qu'éclate la guerre. Elles font vite leurs preuves et, du front de l'Est contre les Russes,au front de l'Ouest, à la fin de la guerre, contre les Allemands, sauveront 1500 blessés. Pour sa première mission de guerre, Mariana Dragescu, volant très bas pour échapper à la chasse ennemie, se pose près d'Odessa, dans une tranchée anti-tank. Quand elle s'extrait de son cockpit, elle enjambe des cadavres d'espions qui viennent d'être exécutés et se heurte à des amoncellements d'autres corps. Elle doit se débrouiller avec les blessés qu'elle doit évacuer vers l'hôpital de Tiraspol, à 25 minutes de vol. Certains ont des membres arrachés, d'autres sont défigurés. Elle les cale tant bien que mal contre son siège, les allonge à ses pieds. Et repart pour une autre rotation. Parfois ses passagers vomissent sur elle. L'un s'agrippe à son bras, ne la laissant piloter que de l'autre. Au fil des mois, tout cela devient de la routine. Surmontant sa fatigue, Mariana Dragescu, est l'une des trois pilotes qui résisteront au découragement, participant à la terrible bataille de Stalingrad, avec tous les risques que cela comportait si elle avait été faite prisonnière par les Soviétiques. Les vols à effectuer font plus de deux mille kilomètres. A la chaleur épouvantable du début, succède le froid terrible de l'hiver russe. L'eau manque, la nourriture, il n'y a pas de latrines, les infections et les épidémies menacent… Tour cela sous le bruit assourdissant, incessant et menaçant de la canonnade ennemie. (Lire page suivante) 41 Les NOUVeLLes de ROUMANIe Connaissance et découverte Un leu par jour et par enfant abandonné z z BAIA MARE ORADEA z ARAD z CLUJ z SIBIU z z PITESTI z z z SINAIA CRAIOVA z IASI P. NEAMT z BACAU BRASOV TIMISOARA z z SUCEAVA TARGU MURES FOCSANI z BRAILA z z TULCEA z BUCAREST CONSTANTA z Les malheurs d'André Glucksman 40 Sur place, "Médecins du monde" ne limita pas son intervention à l'humanitaire. L'association redoutait que les portes de la liberté si vite ouvertes ne se referment rapidement et décida de porter aussi son effort sur la culture et la communication. Grâce à Jean-François Bizot, le directeur de la revue "Actuel", qui avait amené un émetteur très puissant, la première radio libre roumaine, Radio Nova, vit le jour dès Noël, transformée en Nova 22 (en référence à la date de la chute de Ceausescu) avec l'aide de "Médecins du Monde", et émettant sur la bande FM, très peu utilisée alors, jusqu'en Bulgarie. Le 31 décembre, un charter de personnalités françaises, artistes, écrivains, hommes politiques, sportifs, débarquait à Bucarest pour passer le réveillon avec leurs homologues roumains, afin de leur montrer qu'ils n'étaient plus seuls et pouvaient compter sur leur solidarité. Dans la soute de l'avion, avait été embarqué tout ce qu'il fallait pour passer la soirée. Dès son arrivée, le 22 décembre, l'équipe de "Médecins du monde" s'était installée à l'Hôtel Intercontinental qui était devenu une “rédaction mondiale" où se cotoyaient télévisions, journalistes, humanitaires, tous bénéficiant de chambres gratuites. Mais ce ne fut pas sans mal. Son "philosophe", André Glucksman fut pris à partie par la foule et malmené, ses cheveux longs - mode inconnue en Roumanie - le faisant confondre avec un terroriste. Quelques instants plus tard, après avoir donné une interview à la télévision roumaine, il ressortit de l'hôtel et fut porté en triomphe par ceux-là même qui l'avaient tabassé ! Il y a un "turnover" important car il s'agit de volontaires qui prennent sur leurs vacances ou demandent des congés sans solde. Des antennes se créent à Timisoara, Arad. En fait le nombre d'intervenants est plus important, du personnel médical vient en franc-tireur des trois pays francophones, des CHU (Bordeaux, Toulouse, Grenoble, etc.) entament d'euxmêmes des collaborations avec des services hospitaliers roumains, les prenant en charge. La première mission de Jean-Gabriel Barbin, qui va avoir en charge également la Moldavie, la Macédoine et la Serbie, est de faire l'état des lieux et de poser un diagnostic sur le système de santé roumain. Il s'ensuit des enquêtes sanitaires, des visites de polycliniques, d'hôpitaux. Une des plus grandes craintes est vite balayée : contrairement à l'URSS, la Roumanie n'a pas transformé ses hôpitaux psychiatriques en goulags pour ses dissidents (le régime était tellement policier qu'il n'y avait pas beauAndré Glucksman a vécu des moments coup de dissidents non plus). Les psychiatres envoyés de mouvementés à Bucarest. France constatent qu'il n'avait pas existé de volonté organisée de les faire disparaître de cette façon Mais c'est une autre réalité, terrible, que découvrent les "french doctors" : ces établissements psychiatriques sont de vrais mouroirs, comme les "camin", ces orphelinats où se retrouvent les enfants abandonnés. Les uns comme les autres ne disposent que d'un budget d'un leu d'alors (0,05 €) par jour pour chacun de leurs patients. Comme aucun proche ne s'occupe d'eux, il n'y a personne pour "bakchicher" auprès du personnel, ainsi que cela se fait dans les hôpitaux, afin d'améliorer leur ordinaire. Alors, ils dépérissent, sans qu'on puisse mettre en cause employés et médecins, condamnés à l'impuissance par leurs maigres salaires. "Médecins du monde" trouvera même souvent des cas de dévouement exemplaires ou d'initiatives menés sans moyen, comme à Brasov, où les médecins psychiatres occupaient leurs malades en leur faisant faire des petits travaux, du jardinage… Des fonds importants ont été fournis par l'UE pour tenter de remettre en route le système de santé. "L'argent ne manquait pas, mais il était dépensé de façon ridicule" peste Jean-Gabriel Barbin. "Les fonctionnaires de Bruxelles interdisaient de faire des dépenses supérieures à 30 000 F (4500 €), leur réglementation ne le permettant pas. Ainsi, on pouvait acheter des pansements par tonnes, en faisant plusieurs commandes… mais pas le matériel médical lourd dont on avait cruellement besoin !". Adoptions : l'occasion manquée de 1991 Outre son action d'assistance, " Médecins du monde " s'attela à d'autres tâches et, en premier lieu au suivi de l'épidémie de SIDA pédiatrique. L'association créa aussi l'Institut International de la Mère et de la Famille, remit en état les structures d'enfants du judet d'Hunedoara, mis en route la formation de formateurs pour la petite enfance, organisa le premier congrès international de Psychiatrie à Bucarest, particulièrement apprécié des professionnels roumains dont les connaissances avaient été encadrées par le régime pendant des décennies. Elle oeuvra aussi pour la restructuration du processus d'adoption et le moraliser. Hélas, alors que le Premier ministre Petre Roman s'apprêtait à signer le décret allant dans ce sens, il fut renversé par la "minériade" de 1991. Son successeur, Theodor Stolojan, refusa de le faire. C'était la porte ouverte à tous les problèmes, dérives et trafics qu'allaient connaître par la suite les adoptions. Cet épisode marqua une rupture à "Médecins du monde", entraînant le départ de Jean-Gabriel Barbin, en 1996. L'association a cessé ses activités en Roumanie à la fin des années 90. Seules interviennent sur place aujourd'hui "Médecins du monde" de Suisse et "Doctors of the world", américain. Henri Gillet Les NOUVeLLes de ROUMANIe Evénement Société Devenu richissime, le Roumain émigré a donné cent millions de dollars pour créer un prix annuel à son nom Dan David, rival de Nobel J 'ai envie de redonner au monde, ce qu'il m'a apporté". Dan David, richissime homme d'affaires juif d'origine roumaine de 75 ans explique ainsi sa décision de créer un prix annuel de cinq millions de dollars (30 MF) destiné à récompenser des institutions ou des personnes ayant contribué à mieux connaître le passé, comprendre le présent et influencer l'avenir. Concurrent direct du Prix Nobel, le Prix Dan David, fondé en 2000, est décerné en début d'année par un jury de l'Université de Tel-Aviv, à cinq lauréats, lesquels empochent chacun un million d'euros, à charge pour eux d'en consacrer 100 000 à l'attribution de bourses pour de jeunes chercheurs, étudiants, voire lycéens prometteurs. Pour sa première version, le prix a distingué notamment deux chercheurs sur le génome humain… que le Nobel récompensait six mois plus tard. Cette année, ce sont trois savants, spécialistes du cerveau humain, qui ont été primés et qui sont également nobelisables. Le Prix Dan David se veut cependant plus éclectique et plus flexible que le Nobel, couvrant l'ensemble des activités et de la civilisation humaine. En 2003, les lauréats ont été le paléoantropologue français Michel Brunet, pour sa découverte montrant que l'ancêtre de l'Homme remontait à 7 millions d'années et non à 3,5 millions, l'astrophysicien John Bachcall pour ses recherches sur l'intérieur du soleil, le documentariste Frederik Wiseman, le photographe de guerre James Natchway et la journaliste Oriana Fallaci, dont le récent livre a été considéré par certains comme un pamphlet anti-islamiste. Dan David se défend cependant de toute influence juive ou sioniste dans le choix des lauréats, faisant remarquer que sur les vingt déjà retenus, un seul était de confession juive. L'homme d'affaires, qui a versé cent millions de dollars à la Fondation décernant son prix, lors de sa création, estime avoir assuré sa pérennité. "Je n'ampute pas le capital de mes actionnaires" indique-t-il, "ne prenant que sur les bénéfices de la société". Aidant au départ de 15 000 Juifs roumains vers Israël Dan David est né en 1929 à Bucarest. Enfant, il admet avoir assez peu souffert de sa condition de Juif sous le régime du dictateur Antonescu. "Tout ce que j'avais à faire l'hiver, quand j'étais lycéen, c'était de déblayer la neige pendant quelques jours et l'été de cueillir des plantes médicinales… rien à voir avec ce qu'ont connu les Juifs de Pologne, Allemagne, France, Hongrie, Transnistrie et Bucovine". Au lendemain de la Guerre, l'adolescent devient membre d'une organisation de jeunes sionistes. Cette activité, autorisée au début par les communistes, le conduit à organiser en 1947 le départ de l'un des sept trains qui vont transporter 15 000 Juifs jusqu'au port de Varna (Bulgarie), où ils embarqueront dans deux bateaux à destination d'Israël. Mais, à la fin de cette année, le régime arrête cette émigration légale. Jeune marié, empêché de rejoindre sa femme Dan David a alors 18 ans et s'inscrit à l'Institut de Sciences Economiques de Bucarest, tout en se passionnant pour le photo-reportage. Il se marie en 1950 avec son amour d'enfance. Sa toute jeune femme, Juive également, réussit à quitter la Roumanie, avant que la possibilité d'émigrer ne soit définitivement interrompue en 1952. Lui n'obtient pas de visa de sortie malgré ses nombreuses demandes. Elles sont refusées car il est étudiant, "l'Etat devant récupérer son investissement pour son éducation". Quelques mois plus tard, sa femme lui enverra une lettre, lui demandant l'autorisation de divorcer pour refaire sa vie. Alors qu'il travaillait dans une revue comme photographe, celle-ci envisage en 1958 de l'envoyer en reportage en Allemagne de l'Ouest. Mais on découvre qu'il a fait partie d'une organisation juive. Il est convoqué devant toute la rédaction, traité de "serpent", de traître et mis immédiatement à la porte. Le jeune homme se recasera en 1961 dans une autre revue, publiée en Roumanie, mais destinée à l'étranger et aux pays francophones, "La Roumanie d'aujourd'hui". Cependant, sa mésaventure lui a ouvert les portes de l'émigration, ce dont il profite, quittant définitivement son pays en 1962, avec sa mère, deux grands parents, 40 kg de bagages et pas un sou. Numéro un de la photo d'identité au Japon Arrivé en Angleterre, Dan David change de voie et entre dans une petite entreprise de photos d'identité, "Photo Me", que ses actionnaires, habitués des milieux boursiers ont fait entrer au Stock Exchange, mais n'ont aucune idée sur la manière de la développer. Le Roumain les convainc de tenter de percer sur le marché étranger, emprunte 200 000 dollars à un cousin vivant en France, contre promesse de le faire entrer dans le capital, si les affaires marchent, et se lance dans l'aventure. Aujourd'hui, "Photo Me" est présent sur tous les continents, fait partie des 250 premières entreprises cotées à Londres, a développé la technologie de la photo d'identité, introduisant notamment la couleur, et est numéro un au Japon, pourtant considéré comme l'empire très fermé de la photographie, avec 3500 machines installées et un chiffre d'affaires de 8 milliards de yen. Entré au conseil d'administration de "Photo Me" dès 1968, Dan David en est devenu le PDG en 1992 et est archi-milliardaire. Sa seconde épouse est décédée. Il s'est marié une troisième fois, déclarant vivre aujourd'hui très heureux. Et le Roumain de déclarer "vouloir remercier et remettre une médaille à celui qui l'avait dénoncé à la Securitate quand il avait été chassé de son journal"… 13 Les NOUVeLLes de ROUMANIe Société Evénement SUCEAVA BAIA MARE z ARAD z z z ORADEA CLUJ z IASI TARGU MURES z z TIMISOARA z ALBA IULIA z HUNEDOARA z z z SF. GHEORGHE SIBIU z z GALATI BRASOV BUZAU z PLOIESTI CRAIOVA z VASLUI z BUCAREST z SULINA z z TULCEA CONSTANTA z Les Roumains ont grandi de 8 cm en 30 ans 14 Selon une étude de l'Institut de Recherche Anthropologique Francisc Rainer de Bucarest, les Roumains ont grandi de 8 cm en 30 ans, les chercheurs expliquant ce phénomène, qui se retrouve au niveau mondial, par une modification de l'alimentation, les changements climatiques et la pratique du sport. Cette croissance est cependant inégale suivant les catégories de population. Ainsi la taille moyenne des hommes est-elle de 1 m 72 et correspond à celle des citadins, plus grands que les ruraux. Chez ces derniers, ce sont les habitants de Dobroudja (Constantsa) qui sont les plus grands, avec 1 m 69, devant ceux du Banat (Timisoara), 1 m 68, et les Transylvains, 1 m 67. La région de Moldavie n'a pas été prise en compte, l'étude la concernant devant paraître à la fin de l'année. Les Roumaines mesurent en moyenne 1 m 57 et on ne note pas de différence notoire suivant les régions. La Roumanie a eu son géant du XXème siècle avec Gogea Mitu, né en 1914 près de Craiova, qui mesurait 2 m 42 et pesait 183 kg à 20 ans. Il est décédé deux ans plus tard, des suites de maladies. Actuellement le plus grand Roumain est le basketteur de Cluj Ghita Muresan, 35 ans, 2 m 30, 143 kg, qui est le plus grand joueur opérant dans le championnat américain de basket NBA et de toute l'histoire de celui-ci. Le plus petit nain a été Gherasim Cornescu, 1 m 14, qui, en 1914 n'était classé que 16ème au rang mondial, le "record" revenant au Polonais Borwilawsky, 0,78 m. Le massacre de Balc: Ion Tiriac récidive M algré le scandale déclenché l'an passé par le "massacre de Balc", la propriété de chasse de 11 500 hectares, dans la région d'Oradea, que Ion Tiriac avait obtenu en concession de l'Etat pour… un loyer annuel de 240 €, le milliardaire a récidivé en janvier. Celui-ci, dont la concession a été reconduite pour dix ans, après un modeste ajustement du loyer, y a organisé un nouveau week-end de chasse. Une centaine d'invités étaient présents dont des Allemands, Autrichiens, Espagnols, Américains, acheminés par charters jusqu'à l'aéroport d'Oradea. Parmi eux l'ancien footballeur Klaus Fischer et le Prince Sturdza, dont le nom est mêlé à celui de Ion Tiriac dans la liste des grands bénéficiaires de la mise en concession du Delta du Danube, dont ont profité des proches de l'ancien Premier ministre Adrian Nastase. Ces chasseurs n'ont pas été déçus: le carnage annoncé a bien eu lieu. En 2005, en deux jours, ils avaient abattu 185 sangliers sur les 550 que compte la réserve, soit six fois plus que le quota annuel autorisé. Avec 23 animaux à son tableau de chasse, Adrian Nastase avait été couronné meilleure gâchette. Cette fois-ci, pour le seul samedi, ce sont deux cents sangliers qui ont été tués, trois parties de chasse étant organisées, au total, pendant le week-end. Ce serait cependant faire une grossière erreur d'imaginer que ces bêtes avaient affaire avec des tueurs sans pitié. Au contraire… ceux-ci ont montré qu'ils avaient un cœur "gros comme çà": les carcasses ont été sorties de la forêt en charrettes et acheminées vers un orphelinat de la région de Brasov que Tiriac finance, pour améliorer l'ordinaire des enfants. Huit cents réfugiés politiques Roumanie O n dénombre actuellement 800 réfugiés politiques en Roumanie, dont 33 % proviennent d'Irak, 10 % d'Inde, 8 % d'Iran, 8 % de Chine, le reste venant de Somalie, Turquie, Afghanistan, Palestine et Pakistan. Le Haut Commissariat aux Réfugiés, dépendant de l'ONU, s'attend à un accroissement assez sensible de leur nombre, après l'adhésion de la Roumanie à l'UE, en 2007, qui leur facilitera l'entrée dans l'espace européen. Ce phénomène a été constaté dans les dix pays d'Europe Centrale qui ont rejoint l'UE, l'an passé. Au cours du premier semestre 2004, ceux-ci ont enregistré 15 000 demandes d'asile. Pendant les six mois de l'examen de leur demande, les réfugiés en Roumanie perçoivent une allocation quotidienne de 25 000 lei (0,65 €), leur permettant d'acheter un pain et un litre de lait. Cette somme représente la moitié du minimum que l'Etat assure pour la nourriture des indigents hospitalisés. Bucarest: trop de trous… pour des bus trop bien L a mairie de Bucarest vient de passer commande de 500 bus ultra-modernes pour renouveler sa flotte vieillissante, le premier devant être livré en juin et le dernier en décembre 2007. Ce contrat de 188 M€ (soit 376 000 € ou 2,5 MF le bus) a été passé avec la firme représentant Mercedes en Roumanie qui l'a emporté sur son concurrent italien, Iveco, après un appel d'offres,. Toutefois une inquiétude est apparue. Ces autobus très longs et articulés ne pourront pas circuler dans les rues pleines de trous de la capitale et devront se limiter à la desserte du centre dont les axes ont été refaits, ou rester au garage. Il faudra donc rajouter à l'addition finale, le coût de la rénovation du réseau de voies de Bucarest. Les NOUVeLLes de ROUMANIe Connaissance et découverte "Révolution", les médecins humanitaires découvrent l'effroyable réalité des hôpitaux roumains les "french doctors" débarquent à Bucarest Le convoi prit alors la route de Bucarest, distante de 60 km, dans une ambiance frisant le délire. La nouvelle s'était vite répandue: "Les french doctors" arrivent. Ils étaient les premiers sur place, avec leurs confrère de "Médecins sans Frontières" et "Handicap International", lesquels formaient avec "Médecins du monde" les trois principales associations humanitaires française de l'époque. Les gens s'agglutinaient autour du car, frappaient aux vitres, voulaient leur toucher la main, des femmes pleuraient. Psychose des terroristes et peur de l'eau empoisonnée Dans la capitale, le convoi se dirigea vers l'hôpital d'urgence, alors qu'on entendait tirer sporadiquement. A son entrée, l'équipe fut d'emblée soumise à la psychose ambiante: la Securitate se cache dans les immeubles en face et s'apprête à donner l'assaut. Même désarroi chez le directeur: "On va être attaqué d'un instant à l'autre; je ne peux pas assurer votre sécurité; partez-vite !". "Un véritable cirque" se rappellent les témoins de l'époque. Devant le refus obstiné de "Médecins du monde" de quitter les lieux, et l'anarchie ambiante - plus personne ne commandait - le directeur fut bien contraint d'installer l'équipe dans une salle commune, au 5ème étage, pour qu'elle intervienne aussitôt. Un tour à la morgue lui permit de dénombrer déjà 90 cadavres, tombés sous les balles. Le bilan officiel des affrontements à Bucarest est de 543 morts. la Protection civile emmenée par un colonel, son avion acheminant du matériel d'urgence. Il fallait cependant prendre la mesure de la situation. Le système de santé roumain était en ruine, manquait de tout, de bistouris, d'électrocardiogrammes, d'appareils de réanimation, d'anesthésie. Les "french doctors" s'attendaient à se trouver transplantés sur un front de guerre, où il existe des moyens, apportant leurs compétences et leur bénévolat ainsi que le matériel adéquat. Ils se trouvaient en fait confrontés à un désastre, l'absence d'équipements lourds handicapant sérieusement leurs actions et se rendirent compte que tout était à faire. Transfert des blessés graves en France par avions militaires De tout le pays, affluent les demandes d'intervention. Premiers et seuls sur place - les Américains arriveront bien plus tard - les médecins français ont un impact énorme; on fait la queue pendant des heures pour les consulter. Parfois, ils sont appelés à tort, comme à Brasov où une équipe est envoyée car l'hôpital aurait brûlé, des massacres y ayant été perpétrés: une rumeur de plus, heureusement fausse. De son côté, la délégation militaire de l'ambassade de France, en concertation avec les "french doctors", organise le transfert par avions de l'Armée des blessés graves sur les hôpitaux français. Vite sur place, les radios-amateurs belges se montrent d'une efficacité redoutable et décisive, établissant les communications alors que le réseau téléphonique L’hôtel Intercontinental, où les “French "C'est pire qu'à Addis-Abeba" doctors” avaient établi leur siège, était ne fonctionne presque pas, ce qui est “assiégé” par la ferveur révolutionnaire. essentiel… et irritant profondément poliLes médecins français vécurent là leur plus grand choc: ce roumaine et Securitate car leur matériel, bien plus sophistiqué, perturbe leurs liaisons. l'effroyable misère du système hospitalier roumain, à laquelle Les premiers convois d'OVR, Belgique, France, Suisse, ils ne s'attendaient pas dans un pays "socialiste". Les guenilles arrivent, soulevant un énorme espoir dans la population qui servaient de pansements, les chirurgiens, sans aucun matériel, réalise alors que la liberté est en marche et qu'elle n'est pas opéraient pratiquement les mains nues. abandonnée. Jamais la Francophonie n'aura été autant au zéniBlindés par ce qu'ils avaient déjà vu à travers le monde, th… malheureusement, cela s'estompera. certains "french doctors"confièrent: "c'est pire qu'à AddisAbeba". Ils se mirent au travail dans la même atmosphère de panique. Médecins roumains et jeunes policiers tremblaient de La crainte démentie de trouver peur, refusaient de boire de l'eau, s'attendaient à voir des terdes "goulags" psychiatriques roristes débarquer à tout instant dans les salles de soin. Certains priaient pour que les Soviétiques viennent mettre de Début janvier 90, le "coup de chaud" de la "Révolution" l'ordre, Gorbatchev apparaissant comme un messie. passé, "Médecins du monde" décide de rester et laisse sur La situation se détendit finalement, au fil des heures et les place une petite équipe, animée par le chirurgien nantais Jeanmédecins français purent intervenir plus sereinement, d'autant Gabriel Barbin. Elle s'étoffera au fil des mois, faisant interveplus que Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat aux affaires nir directement jusqu'à 50 personnes, médecins, dont des humanitaires dans le gouvernement de Michel Rocard, débarFranco-Roumains, infirmières, autres personnels et bénévoles qua à Bucarest le lendemain 23 décembre, avec une équipe de en tous genres. (lire suite page 40) 39 Les NOUVeLLes de ROUMANIe Connaissance et découverte Histoire BAIA MARE z ARAD SUCEAVA z BISTRITA z z CLUJ z z SIBIU z IASI TARGU MURES z TIMISOARA PITESTI CRAIOVA L GALATI z BRASOV z BRAILA z Le 22 décembre 1989 : z z ORADEA z z CONSTANTA BUCAREST z Des signes précurseurs 38 Premiers sur place, en pleine reçoivent un accueil délirant et Sans imaginer que les évènements iraient aussi vite, "Médecins du monde" s'attendait à ce que la situation bouge en Roumanie, en cette fin d'année 1989. Bizarrement, six mois plus tôt, Jacques Lebas, son président, avait été autorisé à se rendre dans ce pays. Entretenant des relations privilégiées avec la fille et le gendre français de Doina Cornea, fixés en France dans la région de Limoges, il avait été reçu par la célèbre dissidente qui vivait recluse dans sa petite maison de Cluj, surveillée nuit et jour par la Securitate. Comment un régime aussi policier a-t-il pu permettre une telle rencontre, se demanda-t-il ? Doina Cornea Avec le recul, il en déduira que la chute de Ceausescu se préparait déjà dans l'ombre et que cela faisait partie des signes envoyés à l'extérieur par ceux qui oeuvraient dans ce sens. De la même façon, le médecin avait pu visiter un hôpital, ce qui était inconcevable jusqu'ici, avant d'être expulsé pour s'être montré trop curieux… sans-doute pour faire bonne mesure. Quelque chose se tramait donc dans le dernier pion qui résistait au changement, au cours de cette folle année 1989 qui avait vu tous les régimes satellites de l'URSS emportés par le vent de la liberté. e 22 décembre 1989, "Médecins du monde" est en pleine effervescence. L'association tient à Paris un conseil d'administration dont la Roumanie est le sujet principal. Devant les prémices d'une révolution qui s'annonce, une équipe est déjà partie vers le 19-20 décembre et s'est installée à une trentaine de kilomètres de la frontière roumaine, à Szeged, en Hongrie, pays qui s'est libéré du communisme quelques mois plus tôt, et se tient prête à intervenir. Les portes de la Roumanie restent, bien sûr, fermées. L'ordre du jour du CA de "Médecins du monde" fut subitement chamboulé par une dépêche venant de tomber: Ceausescu venait d'être chassé du pouvoir et la Roumanie ouvrait immédiatement ses frontières. L'équipe de Szeged prenait aussitôt la route de Timisoara, distante de 60 km, se trouvant sur place deux heures plus tard. Elle était la première à pénétrer en Roumanie. Otopeni fermé, l'avion est détourné sur Varna A Paris, l'association interrompait ses délibérations et décidait de fréter un avion le jour même. Elle battait le rappel des médecins disponibles, au total une dizaine, dont 3-4 généralistes, 3 chirurgiens, 3 anesthésistes, certains d'origine roumaine. Rompue aux situations d'urgence, "Médecins du monde" disposait de matériel prêt qu'il suffisait d'embarquer. L'équipe montait à bord, certains de ses membres en complet veston et chaussures de ville, sans bagages, n'ayant pas eu le temps de faire leur valise. Plusieurs amis journalistes furent rameutés, dont Jean-François Bizot, le directeur et propriétaire d' "Actuel"… ainsi que l'inévitable philosophe de service pour ce genre d'expédition, André Gluscksman, Pierre-Heny Lévy et Arielle Dombasle étant sans-doute retenus pour le réveillon qui s'annonçait. L'avion humanitaire devait se poser à Otopeni, l'aéroport international de Bucarest, mais on annonça pendant le vol qu'il venait d'être fermé et, finalement il atterrit à Varna, en Bulgarie, pays qui avait "viré sa cuti" quelques semaines auparavant. Très coopératifs, les Bulgares ne demandèrent pas de présenter les visas… que personne n'avait et chargèrent aussitôt le matériel dans des camions militaires, fournissant un car pour transporter l'équipe, forte d'une trentaine de personnes, jusqu'à la frontière roumaine de Giurgiu. Ils la mirent aussi fortement en garde, colportant les rumeurs se répandant aussi bien en Roumanie qu'à l'étranger: des terroristes se cachaient dans le pays et avaient empoisonné l'eau de la capitale. Une équipe du GIGN bloquée à la frontière bulgare A la frontière, les Français découvrirent des compatriotes bien particuliers : une unité du GIGN, envoyé par le ministère de l'Intérieur français pour aider les nouvelles autorités à mettre justement hors d'état de nuire ces terroristes que l'on disaient Syriens, Lybiens, Africains, Palestiniens, Coréens, et qui avaient séjourné dans le pays au titre d'étudiants de pays frères… Mais ces militaires n'avaient pas reçu l'autorisation de pénétrer en Roumanie, peut-être pour éviter que ces professionnels de la lutte anti-terroriste ne découvrent le pot aux roses… à savoir qu'il n'y en avait pas l'ombre d'un sur le territoire, seule l'armée, et non la Securitate, ayant procédé aux massacres ayant entraîné, officiellement, la mort de 1104 personnes, mais sans-doute davantage. On convient aujourd'hui qu'il faut y rajouter tous les règlements de compte qui ont pu avoir lieu à cette occasion, personnels ou autres, desquels il faut rapprocher cette coïncidence bizarre : autour de chaque siège du Comité central du Parti communiste roumain des grandes villes, on a relevé une trentaine de cadavres. Avant de franchir la frontière, l'équipe de TV 5 reçut l'ordre de sa direction de descendre du car et de revenir à Paris: elle venait d'apprendre la mort de son reporter-photographe Jean-Louis Calderon, écrasé par un char. Les NOUVeLLes de ROUMANIe Société Demi-frère du Roi Michel, Carol-Mircea de Roumanie est décédé à Londres à l'âge de 86 ans Carnet C Une vie d'exil jusqu’à la tombe arol Mircea-Grigore de Roumanie, fils aîné du Roi Carol II et demi-frère du Roi Michel, est décédé à Londres, en janvier, à l'âge de 86 ans, où il a été enterré. Il avait exprimé le vœu de reposer auprès de son père à Curtea de Arges, mais ce désir ne semble pas avoir été pris en considération par la famille royale de Roumanie. Le prince était né en 1920 de l'union de Carol, alors prince héritier, et de sa maîtresse de l'époque, Zizi Lambrino, issue d'une famille de l'aristocratie roumaine. Le mariage secret de Carol, en 1918, avait fait scandale. Commandant un bataillon de la garnison de Târgu Neamt, en pleine guerre contre les Austro-allemands, le prince avait déserté pour aller convoler à Odessa, en Ukraine, déguisé en officier russe et muni d'un faux passeport… ce qui aurait dû lui valoir la cour martiale et le peloton d'exécution. Cette union religieuse avait mis hors d'eux ses parents, le roi Ferdinand et la reine Marie, qui l'avaient fait annuler par le tribunal d'Ilfov, en 1919. L'ordre de succession prévoyait que le prince héritier ne pouvait se marier qu'avec l'accord des souverains, du Premier ministre et du Patriarche de l'église orthodoxe, sa future femme devant obligatoirement appartenir au même rang que lui, issue d'une famille royale européenne. A la suite de l'annulation de son mariage, Zizi Lambrino était partie en exil avec son fils, lequel avait été reconnu par son père et enregistré sous le nom de Mircea-Grigore Lambrino. L'origine royale du prince avait été confirmée à la suite de deux procès qu'il avait gagnés, au Portugal et en France. Après la "Révolution" de décembre 1989, celui-ci a engagé une procédure en Roumanie pour y faire reconnaître ces deux décisions, mais ce procès est toujours à l'instruction. Toutefois, en 2004, un pas avait été fait, la mairie de Bucarest lui délivrant un certificat de naissance établissant sa filiation directe avec Carol II. Un élément important en vue du partage des biens de l'ancien souverain encore en possession de l'Etat roumain, avec son demifrère Michel. La rencontre impossible Carol Mircea de Roumanie a vécu toute son existence en exil; d'abord en France, puis en Angleterre, dans la dernière partie de sa vie. Il n'était retourné en Roumanie qu'à deux occasions: lors de l'enterrement de sa grand-mère, la reine Marie, en 1938, puis l'an passé, 67 ans plus tard, lors d'une visite privée. Il a eu deux fils: le prince Paul de Roumanie, qui revendique l'héritage royal de son père, et le prince Alexandru, lequel vit aux USA. Le fils aîné de Carol II n'a jamais pu rencontrer son demi-frère, le Roi Michel - son cadet d'un an, âgé de 85 ans - celui-ci s'opposant formellement à cette reconnaissance, malgré les tentatives infructueuses de rapprochement faites par plusieurs maisons royales européennes. Ludovic Spiess: une grande voix s'est éteinte L e ténor Ludovic Spiess est décédé, début janvier, à l'âge de 67 ans, des suites d'un infarctus, au cours d'une partie de chasse dans le judet de Teleorman. Dans les années 60, il avait été considéré comme l'un des plus grands ténors du monde, se produisant sur les scènes de Milan, Vienne, New-York, Tokyo, etc., obtenant de nombreuses distinctions dans les concours internationaux (Toulouse, 1964, Rio de Janeiro, 1965, Amsterdam, 1966). Sa carrière n'avait duré que 14 ans car, en 1976, à l'âge de 38 ans, il avait dû être opéré de nodules sur les cordes vocales, ce qui lui avait fait perdre sa voix. Le chanteur avait d'ailleurs pris sa retraite pour maladie professionnelle à 46 ans. Natif de Cluj, ouvrier aux usines “Tractorul”, Ludovic Spiess avait commencé sa carrière par hasard, à l'âge de 19 ans. Un de ses collègues l'avait emmené assister à un concert de la philharmonie de Brasov et, stupéfait, il avait découvert l'existence de la musique d'opéra. Il avait rejoint immédiatement les chœurs de son usine, puis, pendant son service militaire, s'était inscrit aux chœurs de l'armée roumaine. Il suivait ensuite les cours de l'é- cole populaire d'art de Brasov, malgré l'opposition de professeurs qui trouvaient qu'il n'avait aucune disposition musicale. A 24 ans, Ludovic Spiess faisait ses premiers pas sur la scène du théâtre musical de Brasov. C'était le début d'une prodigieuse carrière qui allait le conduire à l'opéra de Bucarest et de Vienne. D'origine allemande, bien que ne parlant pas cette langue, le ténor avait changé un temps son nom en Liviu Spinu, à une époque où le régime communiste inspirait une politique déconsidérant cette communauté. L'une des distinctions les plus appréciées du chanteur aura été son titre de docteur honoris causa décerné par l'université de musique de Bucarest, lui qui n'avait suivi que sept classes, entre primaire et collège technique. En 1991, Ludovic Spiess était devenu ministre de la culture du gouvernement PSD de Teodor Stolojan. On lui doit notamment la transformation du château royal de Peles, à Sinaia, en musée. Puis, en 2001, après le retour du PSD au pouvoir, il avait été nommé directeur de l'Opéra de Bucarest, fonction qu'il a occupé jusqu'en 2005. La brutalité de son comportement était souvent dénoncée ainsi que ses abus de fonction et le harcèlement exercé auprès de ballerines. Mais sa notoriété et sa popularité lui avaient permis de surmonter les critiques. 15 Les NOUVeLLes de ROUMANIe Société Vie quotidienne BAIA MARE BISTRITA z z ORADEA z ARAD LAPUS z z CLUJ TARGU MURES z z IASI BACAU GALATI z SIBIU TIMISOARA z BRAILA PITESTI CRAIOVA z D z BRASOV z z SUCEAVA z z z z TULCEA z BUCAREST CONSTANTA z La Roumanie "scannée" par les experts des Nations Unies 16 22 Szeged, la hongroise, brille Un tiers des Roumains pauvres, selon les critères internationaux, un autre tiers se considère pauvre Dans leur rapport sur le développement humain, les experts des Nations Unies ont fait une radiographie de la société roumaine, notant qu'elle était de plus en plus divisée entre riches et pauvres. La pauvreté, la corruption et le chômage, sont ses problèmes majeurs. La première touche en priorité les personnes âgées, la seconde, les jeunes. Un pour cent des Roumains vivent avec moins d'un dollar par jour, ce qui, d'après les normes internationales, est considéré comme de la pauvreté extrême; 12 % sont affectés de pauvreté "sévère" (besoins importants non satisfaits, empêchant une vie normale dans la société), 17 % de pauvreté (manque de ressources par rapport aux standards minima d'une vie décente). A ce premier tiers de la population, il faut en ajouter un second, concerné par ce que l'ONU qualifie de pauvreté "relative" (personnes en difficultés économiques à la suite du processus de la transition). Le rapport note que 7 Roumains sur dix ont été affectés directement par la transition, qui dure depuis 15 ans. Pour 43 % de la population qui avait entre 18 et 65 ans en 1989, cela a signifié licenciement, chômage et mise à la retraite anticipée, ce pourcentage étant le plus fort (53 %) en Dobroudja (Constantsa); 10 % affirment que rien n'a changé pour eux, et 7 % sont devenus patrons. (suite page 18) ans les jours précédents Noël, plus de 25 000 Roumains faisaient la queue quotidiennement aux différents postes frontières avec la Hongrie, proches des deux grandes villes du Banat, Timisoara et Arad, afin d'aller faire leurs emplettes à Sezged. La cité magyare n'est qu'à une heure de distance en voiture. Comptant 180 000 habitants, elle n'est pourtant pas plus grande que ses deux voisines roumaines, mais elle a déjà un air européen que cellesci lui envient, avec ses nombreux super-marchés, galeries commerciales jalonnées de boutiques élégantes où l'on trouve les plus grandes marques et des produits de qualité. Venus pour la journée, les frontaliers roumains entendent bien remplir leur coffre car l'autre avantage de la Hongrie ce sont les prix. Tout y est moins cher, le coca-cola, l'huile, le fromage, le salami, les saucisses piquantes, les détergents, la margarine, le sucre et même le pain. Près de 20 radars automatiques sur la DN1, R âleur parmi les râleurs, l'automobiliste français trouvera le paradis, lui permettant de libérer totalement son courroux, sur la DN 1 (Nationale 1) reliant la capitale à Brasov. Entre Bucarest et Azuga (140 km), à l'entrée du judet de Brasov, on dénombre pas moins de 59 caméras vidéo jouant le rôle de radars automatiques, disposées dans les deux sens, en 19 points différents. Elles ont été installées début décembre et peuvent être changées de place. La vitesse, limitée à 100 km en rase campagne, tombe fréquemment à 50 km sur cet axe traversant des agglomérations à touche-touche, sans qu'on puisse bien discerner leurs limites. Au seul point de contrôle de Baneasa, on dresse 700 PV par jour et les sanctions peuvent être lourdes: 60-80 lei (15-20 €) pour un dépassement de la vitesse légale de moins de 30 km/h, 100-300 lei (28 à 85 €), entre 30 et 50 km/h, 200-800 lei (56225 €) au-delà, avec retrait du permis. Un "vitezomane" (comme le roumain, langue qui s'adapte à toutes les situations, le désigne) pourrait ainsi être taxé de 15 200 lei, soit 4000 € s'il se faisait prendre à grande vitesse à tous les points de contrôle… Et, à priori, pas question de compter sur les bakchichs nécessaires à la récupération de son permis, les contraventions étant envoyées par la poste, mais traitées, au préalable, Les Roumains I ntroduite à la fin des années 90, l'agriculture biologique gagne de plus en plus de terrain dans le pays. Réglementée suivant les normes européennes, elle voit croître le nombre de producteurs, le premier ayant obtenu sa certification, en 2000, étant un jeune agriculteur de Lupusel (Maramures), Mircea Burde. Au début, cette agriculture ne concernait que les céréales, mais aujourd'hui on produit des fraises, du raisin pour le vin, des radis, des épinards, des poivrons, des condiments, du fromage, des produits laitiers, des conserves et même des glaces. Des restaurants spécialisés et des boutiques s'ouvrent, alors que les grandes surfaces commencent à lui consacrer des rayons spécialisés. En 2000, les surfaces cultivées biologiquement ne représentaient qu'un peu plus de 17 000 hectares. Cette superficie est passée à 73 000 ha en 2004 et devait atteindre 104 000 ha, fin 2005. Dans la même période, la production bondissait de 13 500 tonnes à plus de 100 000 tonnes en 2004. Les NOUVeLLes de ROUMANIe Connaissance et découverte d'Istrati grâce à la réédition complète de son œuvre Suivent des saisons de grande âpreté. En janvier 1921, à tantôt acteur d'une fresque bouillonnante qui embrasse des Nice, à bout de forces et "dépité de vingt-cinq ans de luttes dizaines de destins, incorpore la légende balkanique à l'autoavec la vie", il tente de se suicider en se tranchant la gorge. biographie et aux faits historiques. Ceux qui l'ont sauvé in extremis ont trouvé sur lui une lettre En référence centrale à cette épopée flamboyante, les haïadressée à Romain Rolland. Elle est expédiée. L'auteur de Audoucs, ces hordes de cavaliers justiciers du temps des occupadessus de la mêlée, bouleversé, lui répond et l'incite rudement: tions turque et grecque en Roumanie. Fils du vent ou "amantes "Je n'attends pas de vous des lettres exaltées. J'attends de la forêt" en lutte sanglante contre les oppresseurs, dont l'œuvre! Réalisez l'œuvre, plus essentielle que vous, plus Zograffi et ses semblables sont les dignes héritiers. De ses durable que vous, dont vous êtes mille et une vies, Panaït Istrati la gousse." a extrait la matière de mille et Et c'est ainsi que Panaït un récits mis en abyme au fil Istrati est né écrivain, à près de desquels le lecteur se perd avec 40 ans (son premier récit, Kyra délices, poussé au galop d'un Kyralina, conçu à Paris chez son périple foisonnant, écrit dans ami le bottier Georges Ionesco, une langue puissamment est publié en 1923, et c'est en visuelle et sonore. Tantôt profait le deuxième qu'il écrit, pulsée dans un lyrisme étoilé, après Oncle Anghel, paru en tantôt ciselée à la pointe sèche. 1924). Ode à la nature et à la liberté C'est ainsi que prend corps où l'abjection fraye avec le Adrien Zograffi, alter ego Le port de Braila tel que l’a connu le jeune Panaït Istrati. sublime. d'Istrati l'idéaliste. Linda Lê en La délicatesse du verbe et reprend la source dans un texte de 1929: "Ma nature, trop peu du cœur avec l'ordure. Le désespoir le plus intense avec l'éfaite pour l'étude livresque, me poussait avec force vers la merveillement enfantin. Un chapelet de romans d'apprentissaconnaissance de l'homme tel que je le voyais dans la rue: il ge, de vies sauvages et vaillantes dédiées à la défense des aimait et souffrait comme moi, c'est à lui que je dois aller; il opprimés, et où chacun éprouve que "ce que l'amour crée avec est le A et le Z de la vie." difficulté, la haine le détruit en un instant". Du désespoir à l'émerveillement Au fil des cycles narratifs, ce double est tantôt témoin, ŒUVRES de Panaït Istrati. Edition préparée et présentée par Linda Lê. Phébus, "Libretto". Volume 1, 928 p., 14,90 euros. Les volumes 2 et 3 des oeuvres de Panaït Istrati sont parus ou paraissent en librairie le 17 février et le 13 mars. avait subjugué Romain Rolland Vingt ans de vie errante, d'extraordinaires aventures, de travaux exténuants, de flâneries et de peines, brûlé par le soleil, trempé par la pluie, sans gîte et traqué par les gardes de nuit, affamé, malade, possédé de passions et crevant de misère." Trompant sa faim en lisant voracement "Il fait tous les métiers: garçon de cabaret, pâtissier, serrurier, chaudronnier, mécanicien, manœuvre, terrassier, déchargeur, domestique, homme-sandwich, peintre d'enseignes, peintre en bâtiment, journalise, photographe. Il se mêle pendant un temps aux mouvements révolutionnaires. Il parcourt l'Egypte, la Syrie, Jaffa, Beyrouth, Damas et le Liban, l'Orient et la Grèce, l'Italie, fréquemment sans un sou, et se cachant par- fois sur un bateau où on le découvre en route, et d'où on le jette sur la côte, à la première escale." "Il est dénué de tout, mais il emmagasine un monde de souvenirs et souvent trompe sa faim en lisant voracement, surtout les maîtres russes et les écrivains d'Occident." "Il est conteur-né, un conteur d'Orient, qui s'enchante et s'émeut de ses propres récits, et si bien s'y laisse prendre qu'une fois l'histoire commencée, nul ne sait, ni lui-même, si elle durera une heure, ou bien mille et une nuits. Le Danube et ses méandres… Ce génie de conteur est si irrésistible que, dans la lettre écrite à la veille de son suicide, par deux fois il interrompt ses plaintes désespérées pour narrer deux histoires humoristiques ayant trait à sa vie passée". "Je l'ai décidé à noter une partie de ses récits; et il s'est engagé dans une oeuvre de longue haleine, dont deux volumes sont actuellement écrits. C'est une évocation de sa vie; et l'œuvre, comme sa vie, pourrait être dédiée à l'Amitié: car elle est, en cet homme, une passion sacrée ". "Tout le long de sa route, il s'arrête, au souvenir des figures rencontrées; chacune a l'énigme de sa destinée, qu'il cherche à pénétrer. Et chaque chapitre du roman forme comme une nouvelle. Trois ou quatre de ces nouvelles, dont les volumes que je connais sont dignes des maîtres russes. Il en diffère par le tempérament et la lumière, la décision d'esprit, une gaîté tragique, cette joie du conteur qui délivre l'âme oppressée. On voudra bien se souvenir que l'homme qui a écrit ces pages si alertes a appris seul le français, il y a sept ans, en lisant nos classiques ". 37 Les NOUVeLLes de ROUMANIe Connaissance et découverte Littérature z BAIA MARE ORADEA ARAD z z z IASI z CLUJ BRASOV z z SIBIU TIMISOARA GALATI z z BRAILA PLOIESTI CRAIOVA z E z SUCEAVA TARGU MURES z z BUCAREST z Les mille et une vies z TULCEA CONSTANTA z st-ce parce que le romantisme révolutionnaire dont son oeuvre est imprégnée est devenu obsolète, ou parce qu'il a usé de la langue de Voltaire pour y rouler des accents et des rythmes orientaux que le Roumain Panaït Istrati (1884-1935) est, par deux fois, tombé dans l'oubli? Dans un article du "Monde", Valérie Cadet rappelle qu'à la fin des années 1960, à l'incitation de Joseph Kessel, Roger Grenier sauvait une première fois du purgatoire "le Gorki des Balkans" en rachetant les droits de tous ses récits, dispersés ou épuisés, recueillis alors en quatre volumes chez Gallimard. Ce corpus de référence, à son tour épuisé, a servi de fil conducteur à celui (échelonné en trois forts volumes) que propose aujourd'hui Phébus, dans une édition établie et présentée avec une belle acuité par l'écrivain Linda Lê. S'y ajoutent un ensemble de textes parus en revue ainsi que Vers l'autre flamme (1929), chronique désillusionnée et prophétique de seize mois de voyage à travers l'URSS, qui vaudra à son auteur l'incompréhension et le rejet criminel de ses pairs ou admirateurs. Marquée au sceau d'une apologie de l'homme libre, l'œuvre de Panaït Istrati n'a guère d'équivalent. Sans doute parce qu'elle est inextricablement mêlée à cette vie de vagabondage qui fut la sienne depuis l'âge de 12 ans. Fils naturel d'une lavandière de Braïla (port danubien) et d'un contrebandier grec tué par des gardes-côtes quand l'enfant n'avait pas encore 9 mois, cet autodidacte n'a cessé d'ouvrir plus grand son horizon. Se jouant des frontières, pratiquant les métiers les plus divers et prenant part aux luttes sociales. Cent fois livré au désespoir et à la tentation du renoncement, cent fois reprenant courage pour d'autres rencontres, de nouvelles façons d'éprouver le monde. Les NOUVeLLes de ROUMANIe de mille feux aux yeux des habitants de Timisoara et d'Arad Les prix peuvent être inférieurs de moitié et cela concerne aussi les achats de Noël: cadeaux, jeux, parfums, cosmétiques, chocolats, confiserie, etc. Metro, Praktiker, le Mall (galerie commerciale à étages) Szeged Plaza sont les lieux les plus fréquentés, mais c'est l'hypermarché Cora qui attire le plus cette nouvelle clientèle. Ses dirigeants ont compris l'enjeu et assurent l'apprentissage du roumain à leurs caissières. "Ici, tout est moins cher, de bien meilleure qualité et le choix est plus grand" Le même leitmotiv revient incessamment: "Ici, tout est moins cher, de bien meilleure qualité et le choix est plus grand". Depuis la "Révolution", les habitants du Banat ont ainsi pris le pli de se précipiter chaque fin d'année à Szeged; mais ils font aussi le trajet le reste de l'année, souvent une fois par mois, n'oubliant pas de s'arrêter aux "Duty free shops" des postes frontières, dévalisés au moment des fêtes : on y trouve le litre de vodka "Absolut", la plus prisée, à 8 € au lieu de 14. par les policiers. 36 Près de dix ans avant Gide et son fameux Retour de l'URSS Panaït Istrati, militant syndical et conteur visionnaire, avait découvert, au cours d'un voyage à Moscou, les tares qui minaient l'utopie communiste et les avaient dénoncées, tentant de convaincre ses camarades qu'il ne pouvait y avoir de socialisme sans la liberté. Cette prise de position allait lui attirer la colère de la gauche de l'époque et le désaveu de Romain Rolland. Considéré par les uns comme un dangereux bolchevique, par les autres comme un traite à la classe ouvrière, Panaït Istrati est mort seul et abandonné, en 1935, dans une Roumanie où déjà le fascisme et l'antisémitisme, ses ennemis de toujours, consolidaient leur emprise au sein d'une classe politique hésitante et désorientée. Honnête, refusant l'aveuglement, l'écrivain s'était retrouvé seul face à une intelligentsia française partagée entre les deux idéologies monstrueuses du XXème siècle. Dans une Autobiographie publiée dans la revue Europe en août 1923, il lâche à jets serrés le récit de ses pérégrinations à travers les Balkans, l'Egypte et l'Europe, scandé par une antienne qui pourrait se résumer à ceci: "Misère, famine, manque d'abri, poux, mégots." Pendant la première guerre mondiale, atteint par cette tuberculose qui l'emportera en 1935, il décide d'apprendre le français et découvre les grands classiques. Rechute en 1919. Année noire où il perd également sa mère; année de rédemption par la lecture éblouie du Jean-Christophe de Romain Rolland. Le "Gorki" des Balkans P anaït Istrati est disparu prématurément au printemps 1935, à l'âge de 51 ans. L'écrivain roumain avait connu une notoriété mondiale foudroyante avec son roman Kyra Kyralina , "un récit aérien et lumineux comme un vol de papillons au soleil, coloré comme une troupe de bohémiens en marche, mélancolique et tendre comme une chanson de route qui n'a jamais de fin" commentera Joseph Kessel. L'auteur, qui s'était imposé à Paris, écrivant en français, avait ouvert la voie à une pléiade de prodigieux intellectuels roumains qui s'installeront en France: Emil Cioran, Mathila Ghica, Mircea Eliade, Eugen Ionesco, Tristan Tzara… Dans la préface de Kyra Kyralina, en 1924, Romain Rolland avait dressé le portrait saisissant de cet inconnu qui était devenu par la suite son ami, retraçant Les étudiants s'y fournissent en cartouches de cigarettes qu'ils revendent au noir sur le campus de Timisoara. Le mouvement devrait encore s'accélérer dans les mois qui viennent avec le prolongement de l'autoroute BudapestSzeged jusqu'à la frontière roumaine, réduisant cette dernière distance à vingt minutes. D'ailleurs, certains Roumains se dirigent déjà directement vers la capitale hongroise qui n'est plus qu'à deux heures et s'offrent, pour le prix d'une vignette d'autoroute (5 €), l'accès aux grands magasins d'une métropole européenne. Les achats importants sont également moins chers. Le même aragaz (gazinière), vaut 25 % de moins, côté hongrois, et on peut, en outre, se faire reverser la TVA à la douane, divisant ainsi son prix pratiquement par deux. Avant la "Révolution", les échanges existaient… mais plutôt dans l'autre sens: les Roumains passaient la frontière pour y proposer des produits de leur fabrication à des prix défiant toute concurrence. Mais depuis la chute du rideau de fer, les Hongrois ont pris le goût des articles occidentaux et s'en sont détournés, le commerce n'étant plus qu'à sens unique. entre Bucarest et Brasov… soit un tous les sept kilomètres Né écrivain à près de quarante ans Dénonçant Moscou bien avant Gide Société mieux que quiconque ce que fût son destin: "Dans les premiers jours de janvier 1921, une lettre me fût transmise, de l'hôpital de Nice. Elle avait été trouvée sur le corps d'un désespéré, qui venait de se trancher la gorge. On avait peu d'espoirs qu'il survécût à sa blessure. Je lus, et je fus saisi du tumulte du génie. Un vent brûlant sur la plaine... C'était la confession d'un nouveau Gorki des pays balkaniques. On réussit à le sauver. Je voulus le connaître. Une correspondance s'engagea. Nous devînmes amis." "Il se nomme Istrati. Il est né à Braïla", en 1884, d'un contrebandier grec, qu'il n' a point connu, et d'une paysanne roumaine, une admirable femme, dont la vie de travail sans relâche lui fût vouée. Malgré son affection pour elle, à douze ans il la quitte, poussé par un démon de vagabondage, ou plutôt par le besoin dévorant de connaître et d'aimer. Spray invisible miracle Mais les Roumains ont d'autres moyens pour déjouer les pièges de la police routière. De l'avis même de celleci, les plaques d'immatriculation sales ne permettent pas de bien identifier les contrevenants. De même, rouler avec les rayons rasants du coucher ou du lever du soleil perturbe l'enregistrement des clichés établissant la faute. Certains conducteurs ramènent également de l'étranger des dispositifs (illégaux) leur permettant de détecter un ou deux kilomètres à l'avance la présence des radars (n'est-ce pas L… qui se reconnaîtra !), ou se les font envoyer d'Amérique par leurs proches qui y sont établis. Enfin, on trouve à faire livrer par Internet des feuilles de protection transparentes qui se collent en moins de cinq minutes sur les plaques avant et arrière et ne permettent de les photographier que de face, alors que les radars ont un angle de prise de vue d'environ 30°. Il en coûte 50 €. Leur emploi est interdit et on peut se faire verbaliser. Qu'à cela ne tienne… un spray invisible miracle, "Photoshopper", pro- duit le même effet et se révèle particulièrement efficace la nuit, face aux flashs. Il suffit de l'appliquer une fois et le flacon, utilisable pour six véhicules, ne coûte que 20 €. Avantage supplémentaire: dans l'attente d'une modification de la réglementation, ce n'est pas - encore - répréhensible aux yeux de la loi, car il ne s'agit pas d'un dispositif supplémentaire. L'ensemble de ces moyens permettent à 10 % des contrevenants d'échapper aux sanctions ! se mettent à l'agriculture biologique Spécificité roumaine: celle-ci était en bonne partie écoulée sur les marchés par des petits agriculteurs exploitant une ferme familiale et vendant leurs produits guère plus cher que les autres. Il faut souligner qu'une bonne partie de la production assurée par ces petites unités est naturellement biologique, même si elle n'est pas homologuée, les paysans roumains n'ayant ni l'habitude, ni les moyens d'utiliser des engrais chimiques. D'après les professionnels du secteur, ces produits sont vendus dans les magasins spécialisés à une classe sociale qui dispose de plus de 500 € de revenus mensuels et peut s'offrir un kilo de fraises à 2 ou 3 €, le producteur les mettant sur le marché à un euro. Ils sont aussi exportés à l'étranger, notam- ment en Grèce, où leur prix double. Les conserves ou fabrications à bases de légumes et fruits biologiques se développent également, ayant atteint 50 000 tonnes l'an passé; on trouve des haricots, des cornichons, des macédoines, des jus de poivron et de tomate. Une firme britannique s'est installée à Rupea, près de Brasov et le prince Charles lui-même a acquis une ferme dans la région pour se consacrer à l'agriculture biologique. Elle a investi 5 M€ et prévoit de produire dès 2006 une sorte de roquefort, de la mozzarella, des yaourts, des glaces avec des fruits des bois, utilisant pour tous ses produits laitiers du lait de buffle, particulièrement apprécié en Occident parce qu'il contient 40 % de moins de cholestérol. 17 Les NOUVeLLes de ROUMANIe Société Un maire du Maramures en guerre ouverte avec les "manele" Vie quotidienne z z SATU MARE z ARAD z ORADEA CLUJ IASI z z z BRASOV TIMISOARA z TARGU MURES z z ALBA I. BOTOSANI z SUCEAVA z z BAIA MARE z PITESTI z SF. GHEORGHE z RESITA CRAIOVA M. CIUC GALATI z BRAILA z TULCEA z BUCAREST GIURGIU z CONSTANTA z z Disparités régionales (suite) 18 Les experts des Nations Unies ont aussi relevé de grandes disparités régionales, les Moldaves ayant un niveau de vie quatre fois inférieur à celui des Bucarestois, bien que la région reçoive quatre fois plus de fonds d'Etat que la capitale. La Moldavie est devenue la principale terre d'émigration du pays, avec les judets d'Alba Iulia et de Vâlcea, caractéristique qui affectait autrefois les judets de Satu Mare, Bihor (Oradea), Caras-Severin (Resita), Dolj (Craiova), Constantsa, Harghita (Miercurea Ciuc) et Covasna (Sfântu Gheorghe), où la situation s'est retournée, au moins sur ce plan. Une gouvernance mise en question Le rapport rappelle que l'indice de perception de la corruption par la population place la Roumanie au 87ème rang sur 146 pays classés. Il souligne l'inéquité de la répartition des fonds d'Etat au niveau local, souvent attribués sur des critères politiques. Ainsi, en 2002, le judet de Bacau avait reçu 5 fois plus de fonds pour refaire ses routes que celui de Giurgiu. Enfin, il reprend une étude de la Banque Mondiale sur la bonne gouvernance qui met en lumière tous les manquements de la Roumanie. Que ce soit sur les chapitres de la responsabilisation et de l'implication des citoyens, de la stabilité politique, de l'efficacité des pouvoirs publics, de la qualité de la réglementation, de la lutte contre la corruption, la Roumanie obtient seulement la moitié des points attribués à la Hongrie et est devancée par la Bulgarie. L es "manele", airs balkano-tsiganes vulgaires, ont envahi l'espace musical roumain depuis maintenant près de cinq années. Populaires auprès des jeunes, déversés à longueur de journée par les radios, envahissant les discothèques, ils irritent au plus haut point les adultes. C'est le cas de Anton Ardelean, maire de Tautii Magheraus, dans la banlieue de Baia Mare, dans le Nord du pays, qui s'emporte contre ce "fléau sudiste". Depuis 2003, l'élu ne supportait plus d'entendre sortir ces effluves sonores agressives des endroits où se réunissaient les jeunes pour s'enivrer à longueur de soirée. Au début, le maire a tenté de les convaincre qu'ils abîmaient leurs oreilles et leur foie, mais rien n'y a fait. Alors Anton Ardelean a décidé d'employer les grands moyens, interdisant les "manele" dans les lieux publics et s'entendant avec le directeur de la maison de la culture locale pour organiser des fêtes gratuites, où le jus d'orange remplace la bière et le rap, la house, le pop et le rock, la musique criarde honnie. Il a même fait glisser dans les programmes des valses et des tangos pour que les jeunes découvrent la danse "civilisée" en couple, et que leurs aînés puissent se joindre à eux. Mais comme ces mesures ne se révélaient pas suffisantes, le maire a menacé les propriétaires des trois discothèques de la ville de faire descendre chez eux la redoutable Garde Financière (le fisc) pour vérifier leur comptabilité ainsi que le contrôle de l'Environnement, pour le respect des mesures de sécurité. Ce chantage s'est révélé plus efficace, et même si certains jeunes de Tautii Magheraus traitent le maire de "dictateur" et de "raciste", on n'entend guère plus les "manele" qu'en sourdine, à la sauvette, tard dans la nuit. Les 137 commerces et 36 lieux publics de la commune où ces airs de "sauvage" régnaient jusque là en maître ne passent plus que de la musique civilisée, à savoir les Rolling Stones, Bonnie M, Queen et leur fameux "We are the champions", Freddy Mercury… Anton Ardelean a une philosophie bien à lui. Quand il était médecin vétérinaire, il avait introduit la diffusion d'airs d'opéras dans les étables de la ferme bovine qu'il dirigeait et se félicitait que les vaches donnent 15 à 20 % de lait supplémentaire. Alors le maire se pose cette question : "ce que j'ai réussi avec les vaches… pour quoi cela ne marcherait-il pas avec nos enfants, si on leur donne de la bonne musique ?". L'élu s'attendait à être sanctionné par les mécontents lors des dernières municipales. Il a été reconduit à son poste avec 82 % des suffrages… soit le deuxième meilleur score de Roumanie, après le maire de Sibiu ! Les voitures sans permis arrivent en Roumanie L es voitures sans permis viennent de faire leur apparition en Roumanie, importées de France par la firme Reva Romania qui commercialise deux modèles du fabricant Microcar. Ces voiturettes sont équipés de moteurs diesel, consommant 3,5 litres au 100 kilomètres, ont une longueur de 2 m 80 pour une largeur d'1m 50 et un poids de 350 kg. Leur vitesse maximum est de 45 km/h, ils disposent de freins à disque, d'un airbag pour le conducteur. Leur prix varie entre 9000 et 10 000 €, hors taxes. Ces voitures n'ont pas besoin d'immatriculation et peuvent être conduites à partir de 16 ans. L'importateur espère en vendre 12 par trimestre. Il vise particulièrement la clientèle féminine, les Roumaines étant beaucoup plus nombreuses que les hommes à ne pas posséder le permis de conduire, mais aussi la "jeunesse dorée" de 16 à 18 ans, et ceux qui n'arrivent pas à décrocher le permis. Contrairement à la France, il n'espère pas toucher le créneau du troisième âge, vue la faiblesse des revenus de cette catégorie de population. Les NOUVeLLes de ROUMANIe Livres S Connaissance et découverte "Solitude et destin", écrits de jeunesse d'Emil Cioran Le talent et l'anti-conformisme du philosophe au service d'une entreprise de camouflage ? ous le titre Un Cioran très politiquement correct, Alexandra Laignel-Lavastine analysait dans une critique parue dans le Monde des Livres du 1/07/2004 le dernier ouvrage rassemblant les écrits de jeunesse du philosophe Emil Cioran. Voici quatre ans, en publiant Cioran, Eliade, Ionesco: l'oubli du fascisme (Voir "Les Nouvelles de Roumanie", n° 12, p. 28 et 29), l'historienne française avait déclenché une véritable tempête parmi les intellectuels roumains, relayée par la presse, qui n'acceptaient pas que l'on mette en cause le passé de ces "monstres sacrés" de la littérature et de la pensée roumaine, la vérité historique ayant bien du mal à s'accommoder de l'exaspération du sentiment national. Avec son dernier article (lire cidessous), gageons qu'Alexandra Laignel-Lavastine ne se fera pas de nouveaux amis en Roumanie… Emil Cioran "Comment ne pas se réjouir de la parution de Solitude et destin, un ouvrage qui rassemble près de 80 articles publiés en Roumanie par le jeune Cioran entre 1931 et 1943 ? D'autant que depuis leur publication à Bucarest, les amoureux non roumanophones de l'écrivain auront dû attendre... treize ans avant d'y accéder. Mais à quoi accèdent-ils ici au juste ? Précisons-le d'emblée puisque cette édition française n'en dit rien: ce recueil est le fruit d'un choix opéré par Cioran lui-même en 1990, qui préféra en sortir l'ensemble de ses écrits trop ouvertement politiques de la période. Comme sa série d'articles envoyés du Reich en 1933-1934, preuves de sa fascination pour le nazisme; ou ceux de 1935-1940, témoins de son ralliement à la Garde de fer, organisation fasciste et antisémite parmi les plus violentes de l'entre-deux-guerres. Ce parti pris que rien n'indique ni n'éclaire - ni avant-propos, ni postface, ni appareil critique - prive le lecteur de l'intelligence d'un chapitre crucial de l'histoire intellectuelle des années 1920 et 1930, dont Cioran reste une figure emblématique. Ce moment où, d'un bout à l'autre du Vieux Continent, apparaît une nouvelle génération en révolte, soudée par le mot d'ordre de "révolution spirituelle". Certains s'y tiendront; d'autres, dont Cioran, glisseront après 1933 vers la "révolution nationale". Dans un style flamboyant, Solitude et destin restitue bien les ingrédients de cette humeur d'abord contestataire : aversion pour les "vieillards", haine du parlementarisme et de la démo- L cratie, rejet de la morale humaniste et de "l'esprit français". Ce qu'il leur oppose ? "Le culte de la force" et de l'authenticité, l'exaltation de l'irrationnel et de l'élan vital. Bref, la matrice même de son engagement politique. Une seule face de la médaille Pour autant, le lecteur français en sortira comblé: il croira y retrouver, un zeste de mal-pensance en plus, son Cioran de toujours, certes anticonformiste, mais déjà si talentueux. Le problème, c'est qu'on ne lui montre dans ces pages qu'une face de la médaille. Il se laissera bercer par cette correspondance de Munich, publiée dans "Vremea" en mai 1934 et joliment intitulée Eloge de la prophétie. Ce qu'il ignore, c'est qu'en novembre 1933 et dans le même journal, l'auteur saluait dans le nationalsocialisme une salutaire "barbarie créatrice". Il ne sait pas non plus que deux mois plus tard, le 15 juillet 1934, le sens de ladite prophétie s'éclairait grâce à "Hitler dans la conscience allemande": Cioran nous assure en effet dans cet article-là (et dans beaucoup d'autres) qu'"il n'existe Alexandra Laignel-Lavastine pas d'homme politique qui m'inspire une sympathie et une admiration plus grande qu'Hitler". Et l'on pourrait multiplier les exemples. Cette entreprise de camouflage a aujourd'hui, quelque chose d'absurde. La publication du Journal de Drieu La Rochelle a-t-elle jamais empêché quiconque de lire et relire l'écrivain ? Alors pourquoi ces quatrièmes de couverture agrémentées des mêmes poncifs dès qu'il s'agit des écrits roumains de Cioran ? Ainsi de son "pessimisme". Pessimiste, vraiment, son plaidoyer d'alors en faveur d'une Roumanie fanatisée dans la "mystique d'un effort collectif de la nation"? Ou encore de ses éternels "vingt ans". En 1940, Cioran allait tout de même vers la trentaine... ". Alexandra Laignel-Lavastine (Le Monde, 1er juillet 2004) E.-M. Cioran, Solitude et Destin (Singuratate si Destin), de Traduit du roumain par Alain Paruit, Gallimard, "Arcades", 426 p., 15 € (100 F). Alexandra Laignel-Lavastine, Cioran, Eliade, Ionesco: l'oubli du fascisme, PUF (Presse Universitaire de France), Perspectives critiques, avril 2002, 552 pages, 29 € (190 F). Herta Muller, prix de littérature européenne 'écrivaine d'origine roumaine Herta Muller a reçu, à Stuttgart, le prix Wurth de littérature européenne, doté de 25 000 €, décerné tous les deux ans et dont la création remonte à 1998. Agée de 53 ans, Herta Muller a émigré en Allemagne en 1987 et vit désormais à Berlin. Elle est devenue l'une des plus importants écrivains allemands actuels. 35 Les NOUVeLLes de ROUMANIe Connaissance et découverte "Le Paradis des poules": le regard truculent et caustique de Dan Lungu sur la Roumanie populaire Les NOUVeLLes de ROUMANIe Livres BOTOSANI BAIA MARE z ORADEA z CLUJ z ARAD z ALBA IULIA z z z SUCEAVA TARGU MURES z TIMISOARA IASI FOCSANI z z z z z GALATI SIBIU BRASOV z BRAILA PITESTI CRAIOVA z z BUCAREST z z TULCEA CONSTANTA z "Moi, c'est à l'usine que je me suis habitué au café" 34 Dans son roman, Dan Lungu explique, à sa manière narquoise, l'importance prise par le café sous le communisme et le rythme de travail observé dans les usines roumaines: "…Moi, c'est à l'usine que je me suis habitué au café. Là-bas, il y en avait sans arrêt, de ces temps morts; jusqu'à l'arrivée de la matière première, on attendait, mais au lieu d'attendre, on buvait un petit café bouilli sur le réchaud. Quand la matière première arrivait, on nous coupait le courant. Qu'est-ce qu'on faisait ? On buvait un petit café. Quand le courant revenait, c'était la pause du déjeuner. On mangeait, et puis après, hop ! un petit café. Après la pause, la machine tombait en panne. Qu'est-ce que vous voulez ? Elle était vieille, c'était comme çà. Jusqu'à l'arrivée du mécanicien chargé de l'entretien, qui arrivait en prenant son temps, on en reprenait un. Quand il l'avait réparée, on restait avec le mécanicien autour d'une goutte et d'un café, si on en pouvait encore, pour qu'il nous raconte ce que la machine avait. Et ainsi de suite. Moi, je crois que c'était pour çà que le café était tellement recherché; avant, tout le monde avait de ces moments là sans rien faire. Il fallait tuer le temps d'une manière ou d'une autre. Et c'est comme çà qu'on s'est habitués… Maint'nant, tu peux pas faire un enterrement sans finir par un petit café avec la coliva* ". * Plat sucré, servi froid, préparé avec des germes de blé bouillis avec des noix concassées, de la cannelle, du sucre, et que l'on distribue lors des enterrements. A l'occasion des "Belles Etrangères", les éditions Jacqueline Chambon ont publié un roman de Dan Lungu, "Le paradis des poules", traduit par Laure Hinckel, dont il faut saluer le remarquable travail dans un genre littéraire particulier. Dan Lungu, fin observateur de ses contemporains, plonge sa plume panoramique dans les jardins et les maisons qui bordent la rue des Acacias. On y découvre l'incroyable rumeur qui prend forme le jour où Mme Milica passe le seuil de la maison du colonel afin d'utiliser son téléphone… Elle va ensuite raconter encore et encore, de porte en porte, son expérience. Et la pauvre connaîtra les affres de la célébrité dans sa rue ("incroyable, on n'avait jamais d'huile dans le placard, les poules ne voulaient plus pondre et le sucre vanillé était introuvable") puis le retour, douloureux, à l'anonymat le plus cruel: "plus personne soudain n'avait besoin de son huile, des œufs de ses poules, du sucre vanillé dont elle avait des réserves…". Au café du "Tracteur chiffonné", où se retrouvent les hommes de la rue des Acacias, les commentaires vont bon train devant un verre de tsuica distillé dans le bistrot même, sur le "bon vieux temps de Ceausescu", ce qui provoque des disputes, sur la transition et la "nouvelle économie", le "dieu dollar". Chaque événement qui se Dan Lungu a été l’un des invités passe dans la rue, est disséqué, sujet à controverroumains des “Belles Etrangères”. se et donne une image d'une Roumanie quotidienne qui se cherche sans jamais se trouver On est loin de la langue de bois des années communistes. Le langage populaire de Dan Lungu fait rire. La truculence est au rendez-vous. Les situations sont tragicomiques. On fait aussi connaissance avec un petit monde qui porte sur nous, "Occidentaux", un curieux regard. Dan Lungu est né à Botosani le 15 septembre 1969. Il est actuellement maître de conférences à la chaire de sociologie de l'Université Al. I. Cuza de Iasi. Rédacteur en chef pendant plusieurs années de la revue culturelle "Timpul", il a publié plusieurs volumes de poésie, de prose et des essais, et reçu plusieurs prix. Il a été un des douze écrivains roumains invités en France lors des "Belles Etrangères". Dan Jungu, Le Paradis des poules, Editions Jacqueline Chambon, collection "Metro", 224 pages, 18 €. Un nouveau lycée français à Bucarest H ervé Bolot, ambassadeur de France en Roumanie, a confirmé la mise en chantier, dès ce printemps, d'un nouveau lycée français à Bucarest, l'actuel lycée Ana de Noailles, situé près de l'ambassade, s'avérant trop petit pour faire face à la demande. Les travaux devraient durer un an et l'établissement être prêt pour la rentrée 2007. Ils coûteront 7,8 M€, le quart étant à la charge de l'Etat français, le reste à celle de l'association des parents d'élèves. Jacques Chirac devrait poser la première pierre symbolique du lycée, fin septembre prochain, à l'occasion du sommet des chefs d'Etats francophones qui doit se tenir dans la capitale roumaine. Par ailleurs, l'ambassadeur a annoncé le projet de la France de créer une université francophone européenne dont le centre se trouverait à Bucarest. Il a également indiqué que les autorités françaises négociaient un accord avec le ministère de l'Education et de la Recherche roumain en vue de développer l'enseignement franco-roumain. Insolite Société A Aiud, le paradis commence… en enfer J oseph effectue dix-sept années pour crime passionnel, les rois mages, trois ans pour vol qualifié et dix ans pour coups ayant entraîné la mort, un ange, cinq ans pour escroquerie, un berger, sept ans pour violences aggravées… Depuis 1999, quatorze des mille détenus de la prison de haute sécurité de Aiud (Alba), sélectionnés par le prêtre de l'établissement, interprètent la scène de la Nativité, la nuit de Noël, devant 300 de leurs jeunes co-détenus, regroupés dans la chapelle du pénitencier, transformée en théâtre pour la circonstance. Le spectacle est retransmis par circuit interne de télévision dans toute la prison, notamment à l'intention des 33 femmes incarcérées que les gardiens ont jugé plus prudent de tenir à l'écart. Le récitant, un vénérable prisonnier, purge vingt ans pour avoir tué, par jalousie, son meilleur ami. Un ensemble de dix choristes interprète des “colinde” (cantiques de Noël), emmené par son chef, condamné à trois ans pour récidive de vol de téléphone portable. Il n'a pas eu de chance: sa seconde victime, un banquier, disposait du système GPS, ce qui a permis de le localiser immédiatement. A Aiud, la vie des détenus s'est améliorée ces dernières années. Ils reçoivent des cours, disposent d'une bibliothèque, de la télévision par câble. Certains travaillent ; chaque mois de labeur raccourcit leur peine d'une semaine et leur rapporte un pécule de 12 €. Au milieu des années 90, une équipe de trois d'entre eux avait été retenue pour peindre la chapelle de la prison. L'un, condamné à une très longue peine, avait travaillé avec d'autant plus d'acharnement et de talent que la direction et le prêtre lui avaient promis qu'il serait libéré de façon anticipée, à l'occasion de Noël 1996, mais le président Iliescu a refusé sa grâce. Dix ans après, il chante toujours des colinde dans la chapelle qu'il a décorée. Réconfort P our apporter un réconfort moral aux malades et aux blessés de son judet, le directeur du service des ambulances d'Arges (Pitesti) a décidé d'engager quatre prêtres qui accompagneront les secours. Se succédant par tranches de huit heures, y compris la nuit et le dimanche, ils les suivront dans un véhicule à part, et devront prévoir d'emmener les saintes huiles pour l'extrême onction. Ce sont les médecins qui décideront de leur intervention, suivant la gravité des cas… ce qui ne manquera pas de rassurer ceux qui les verront arriver !Jugeant l'initiative sympathique, l'Eglise a donné son feu vert et désignera les officiants. 19 Retour du marché, cochons vendus... A faire dresser les cheveux sur la tête des féministes ! "Soûl comme un Polonais" C haque jour, le "déssoûloir" de Varsovie accueille 110 à 130 personnes arrêtées par la police. La plus jeune jusqu'ici enregistrée n'avait que onze ans et l'on peut y croiser de temps en temps des octogénaires. Dernièrement, l'établissement a été équipé de nouveaux alcootests, conformes aux normes européennes. Malheureusement, les policiers ne peuvent pas les utiliser et sont obligés de se servir des anciens. Les nouveaux appareils ne mesurent en effet pas les taux dépassant quatre grammes d'alcool… "ce qui est assez fréquent dans ces lieux" s'est plaint un médecin. Q Le Père Noël veut des villes propres uelques jours avant Noël, plusieurs dizaines d'enfants des maternelles ont défilé dans le centre de Pitesti et fait une présentation de mode au théâtre Aschiuta dans des tenues fabriqués à partir de rebuts de papier et de bouteilles en plastique. Il s'agissait, à l'initiative des autorités locales, de signifier aux adultes qui continuent à jeter n'importe où leurs détritus, malgré l'installation de conteneurs prévus à cet effet, que le Père Noël ne pouvait pas venir déposer ces cadeaux dans un lieu envahi par les ordures. Pitesti est pourtant considérée comme une des villes les plus propres du pays. Distillerie clandestine L es gardiens de la prison de haute sécurité de Botosani, intervenant dans une cellule où une bagarre générale avait éclaté entre la dizaine de détenus qui y étaient enfermés, ont eu la surprise de constater qu'ils étaient tous dans un état d'ébriété avancée, bien que la consommation d'alcool soit interdite dans l'établissement. Entreprenant des recherches, ils ont découvert une mini-distillerie clandestine qui fonctionnait déjà depuis un moment. Les autorités essaient maintenant de déterminer de quelle manière les ingrédients nécessaires à la fabrication de cette tsuica fabriquée derrière les barreaux ont pu entrer dans ce lieu très surveillé, sans attirer l'attention. Les NOUVeLLes de ROUMANIe Société Santé SATU MARE z SUCEAVA z IASI z TARGU MURES ARAD BACAU z z z VASLUI z z z TIMISOARA z HUNEDOARA z SLATINA z z CRAIOVA BRAILA z BRASOV PITESTI RESITA z z TULCEA z TARGOVISTE z SLOBOZIA BUCAREST z CONSTANTA Les Roumains ont mal au foie 20 Les premiers cas ont été détectés grâce Peinture SIDA pédiatrique: un chirurgien z ORADEA Les NOUVeLLes de ROUMANIe Les maladies du foie sont une des affections qui ont le triste privilège de placer les Roumains en tête, en Europe, avec la tuberculose, les maladies du cœur et le Sida des enfants. On estime à environ 10 % de la population les personnes touchées par l'hépatite B ou C, la fréquence de la première étant particulièrement élevée chez les enfants, les jeunes de moins de dix-huit ans et les hommes. L'alcool en est la première cause, suivie par une alimentation laissant à désirer, la transmission sexuelle et des négligences au niveau des soins dentaires. Un an d'attente pour se faire opérer Les patients qui doivent de faire opérer sont très souvent obligés d'attendre un an, voire plus, tant les listes d'attente sont surchargées, les hôpitaux n'ayant pas les moyens financiers de faire face. Certains, tout bonnement, manquent de sang. A Bucarest, seulement un patient sur dix nécessitant une intervention compliquée au niveau cardiaque arrive sur la table d'opération. La situation est identique pour les patients qui ont besoin d'une prothèse. Ainsi à Resita, Timofte Florica, 63 ans, a patienté un an avant d'avoir accès à un chirurgien car il n'y avait pas de fonds pour financer l'achat de sa prothèse de la hanche, d'un coût de 1000 €. Mais au moment de l'opérer, le praticien n'a pas trouvé cet appareillage bien qu'il ait joint tous ces collègues du pays. Après l'avoir maintenue hospitalisée en vain plusieurs semaines, il a dû renvoyé sa patiente chez elle. L 'épidémie de SIDA pédiatrique de Roumanie a été un des évènements les plus médiatisés de ces vingt dernières années, nuisant considérablement à l'image de ce pays tout en révélant une réalité effroyable. Comment a-t-elle été déclenchée et mise à jour ? Respon-sable de l'équipe de "Médecins du monde" sur place, arrivé à Bucarest en pleine "Révolution", dès le 22 décembre 1989, et où il demeure toujours, le chirurgien nantais Jean-Gabriel Barbin est celui qui l'a découverte et en a informé les autorités compétentes. En exclusivité pour les lecteurs des "Nouvelles de Roumanie" et pour la première fois, il évoque ce moment d'histoire qui n'a encore jamais été rendu public, répondant aux questions d'Henri Gillet. Il n'existait qu'un cas officiel en Roumanie Henri Gillet: En débarquant à Bucarest avec vos confrères, avez-vous imaginé que la Roumanie était aux prises avec ce fléau du SIDA ? Jean-Gabriel Barbin: Pas le moins du monde ; notre préoccupation première était de soigner les victimes des évènements. A cette époque, il faut dire que, même en France, le SIDA apparaissait encore comme une maladie émergente, touchant surtout les homosexuels. "Médecins du monde" était impliqué au plan mondial dans cette lutte, mais c'était une affaire de spécialistes. En Roumanie, il n'existait qu'un seul cas officiel: celui d'un steward de train international qui, aux dires de la propagande, l'aurait contracté en Occident. D'ailleurs, début janvier 90, une délégation de l'Organisation Mondiale de la Santé, en visite à Bucarest, n'a rien décelé… pas plus que l'épidémie de tuberculose, pourtant déjà très préoccupante. La confidence d'un vieux médecin victime d'un infarctus H.G.: Comment avez-vous découvert l'existence de l'épidémie ? J.G.B: Fin janvier, je me trouvais avec un vieux médecin roumain dans une polyclinique de Bucarest dont je voulais faire l'évaluation. Au cours de notre visite, il a fait un pré-infarctus; je l'ai fait immédiatement hospitaliser, sa famille est venue. Il m'a demandé de m'approcher et m'a confié: "Je ne veux pas mourir comme çà. Il faut que vous vous rendiez à l'Institut Victor Babes. C'est un véritable scandale". Il y avait deux établissements à ce nom; finalement j'ai trouvé le bon. Accompagné d'un interprète, j'ai pu pénétrer, non sans résistance et difficulté, dans le service des maladies tropicales et d'infectiologie, et je suis tombé sur le professeur Paun qui m'a emmené dans l'unité des enfants. Le choc a été terrible. Je n'étais pas face à des petits mômes, mais à de véritables zombies, totalement décharnés. Je n'avais jamais vu çà… même pendant la famine en Ethiopie. C'était ahurissant. Paun était visiblement dépassé, confiant qu'il ne savait pas de quoi il s'agissait. L'idée du SIDA ne lui était même pas venue à l'esprit et il continuait à renvoyer mourir vers leurs orphelinats ou institutions les enfants qu'on lui envoyait pour procéder à des analyses, sans se poser plus de questions. Cela ne l'a pas empêché d'être nommé par la suite responsable de la lutte contre le SIDA en Roumanie, par l'OMS. Il m'a toutefois donné l'adresse d'un institut de virologie où des vétérinaires utilisaient des test de rétro-virus Elisa pour dépister des infections dans le bétail, mais identiques à ceux employés dans le cas du SIDA. J'y ai rencontré des médecins alarmés de trouver de plus en plus de bébés victimes de pneumonies, suivies d'une importante perte de poids et d'un décès rapide. Comme les cas se multipliaient, on pouvait presque parler d'épidémie. Plusieurs de ces jeunes praticiens ont suspecté l'existence du SIDA et se sont retournés vers le directeur de l'Institut vétérinaire, le professeur Cajal, un académicien réputé, qui leur a fourni 600 tests vétérinaires. Ils se sont tous révélés positifs ! Connaissance et découverte L'aquarelliste Iulia Halaucescu rend compte de la construction du premier grand barrage de Roumanie au musée de Bicaz Une vallée martyrisée qui pourrait retrouver son lustre I ulia Halaucescu a aujourd'hui 82 ans et vit à Piatra Neamt. Mais c'est à Tarcau (son village natal) et à Bicaz, dans ce même département de Neamt, que peut se voir sa peinture. A Tarcau, un musée vient d'être inauguré à son nom et possède une grande partie de son œuvre d'aquarelliste. A Bicaz (distant de quelques kilomètres seulement de Tarcau) sont exposées plus spécifiquement les œuvres en rapport avec la construction du barrage de cette petite ville. L'histoire (roumaine) n'a retenu de cet immense chantier des années 50 (le barrage est devenu opérationnel en 1960), que l'avancée prodigieuse qu'il a représentée pour le pays. Premier de ce genre en Roumanie (depuis, il y a eu celui des Portes de Fer), le barrage de Bicaz illustrait alors à merveille l'entrée du pays dans la technologie moderne et dans l'industrialisation. La propagande d'Etat ne manqua pas, bien sûr, de faire jouer ses rouages à plein régime. L'enthousiasme devait être général. Quatre à cinq communes englouties Aujourd'hui, un regard libre sur ce passé indique que telle ne fut pas l'absolue vérité. Certes, la réalisation technique que représente cette construction ne se discute apparemment pas. Le barrage de Bicaz a la réputation d'être un solide édifice bien conçu. Il a reçu 1625 millions de mètres cubes de béton pour une hauteur de 127 mètres et une longueur de 435 mètres. La retenue d'eau qu'il occasionne ainsi est d'une longueur de 35 à 40 kilomètres. C'est désormais le lac de Bicaz alimenté par la rivière Bistritsa. A l'occasion de sa mise en eau, il a provoqué l'engloutissement de 4 à 5 communes de plusieurs villages. Les expropriés, volontaires ou non (c'est-à-dire indemnisés ou non), furent relogés sur Bicaz dans des blocs et se virent attribués des petits lopins. Bicaz changea alors de visage. D'un village, elle devint ville. D'un centre agro-touristique traditionnel (le roi, par exemple, possédait là un domaine pour ses vacances d'été), elle devint une ville sans âme marquée par la présence d'une cimenterie à ses portes et par de multiples blocs en son sein. Les Plutash disparurent, eux qui transportaient sur la Bistritsa le bois sur des radeaux depuis des générations. L'oubli le plus net toutefois sur cette construction est relatif aux populations qui travaillèrent là. Si sur la rive droite se trouvaient des civils et des appelés du contingent militaire (désarmés), sur la rive gauche étaient employés des détenus politiques qui étaient installés, hors travail, dans un camp fortifié situé entre la sortie de Bicaz et le barrage. De l'aveu même d'un ancien habitant de Bicaz, la mortalité sur cette rive gauche était de 10 % plus forte environ que sur l'autre. Un manque d'enthousiasme bien loin de la propagande La représentation par Iulia Halaucescu de cette épisode de l'histoire locale (et nationale) n'échappe pas, par certains aspects, à l'engouement voulu par le régime d'alors. Installée sur les abords du chantier, l'artiste laisse transparaître en peignant son admiration pour un tel gigantisme. Difficile probablement, à ce moment-là, d'échapper à un réel sentiment de fierté face à cette entreprise monumentale de modernisation. La Roumanie n'avait, après tout, pas tant d'expérience que cela en la matière. Ainsi, quelques tableaux évoquent ce sentiment d'un progrès en marche tel ceux, par exemple, représentant la cimenterie et ses gigantesques tuyaux ou ceux montrant le chantier avec ses murs colossaux en construction. Les tableaux qui touchent le plus sont ceux montrant les ouvriers au travail. Pas de visages particuliers dans cette peinture mais des corps voûtés sur la machine ou pelle en main. Des hommes sans identité propre, tous en chemise rouge, pour travailler le long d'une table roulante. L'artiste rend compte ainsi (volontairement ou non, peu importe !) que, quelque part sur ce chantier, l'enthousiasme faisait défaut loin de la volonté affichée par la dictature. Scènes fluviales de l'ancien temps Par ailleurs, les aquarelles de Iulia Halaucescu évoquent un monde en transition, certes, mais un monde poétique. Le charme est certain dans les peintures qui représentent aussi bien les scènes fluviales de l'ancien temps que celles qui évoquent les promeneurs et les mariniers sur le barrage par temps de pluie ou sur le lac. Un amour certain du lieu transparaît au détour de ces quelques salles consacrées à Iulia Halaucescu et, par voie de conséquence, elles ne sont pas sans laisser insensible le visiteur qui les parcourt. Au total donc, heureuse visite que celle-ci au musée de Bicaz. Un Bicaz certes martyrisé par l'histoire des hommes mais aussi porteur d'avenir. Situé au carrefour de voies importantes entre Transylvanie et Moldavie et positionné aussi en situation de carrefour historique, Bicaz ne manque finalement pas de potentiel pour (re)devenir un lieu stratégique tant du point touristique qu'économique. Le tout dans un bel écrin naturel que lui offre sa localisation de porte d'entrée (ou de sortie) dans les Carpates orientales. Bernard Camboulives 33 Les NOUVeLLes de ROUMANIe Connaissance et découverte Mise en musique des grands mythes de la cuture roumaine SUCEAVA BAIA MARE z z z ORADEA ARAD CLUJ z z z IASI TARGU MURES z BICAZ z z z z BACAU DEVA z TIMISOARA BRASOV PITESTI CRAIOVA z z z BRAILA PLOIESTI BUCAREST z z TULCEA CONSTANTA z Un concours à son nom 32 B.C: Depuis quand le lycée de Deva porte-t-il ce nom ? A.F: Depuis 1997 mais il existe depuis 1958. C'est un établissement scolaire qui regroupe des élèves de la maternelle au baccalauréat. Nous avons actuellement plus de 800 élèves et quelque 40 professeurs de musique. Mais nous enseignons également les Beaux-arts et l'architecture. Les élèves font un choix dès l'âge de 6-7 ans mais cette option n'est évidemment pas définitive. Elle les occupe de 5 à 13 heures par semaine selon le niveau et l'engagement de l'élève. Le temps hebdomadaire d'enseignement reste à 32-33 heures. Après obtention du baccalauréat, l'élève peut poursuivre son option à la faculté ou changer totalement de voie (l'économie, par exemple). Nous souhaitons fortement ouvrir le lycée sur l'extérieur. Ainsi, nous avons déjà été en contact avec des lycéens et des groupes musicaux en Allemagne, en Slovaquie. Nous avons également des contacts en France (Strasbourg, Paris, Belfort...) par le biais de concours, de festivals, etc. Enfin, chaque année nous essayons de mettre nous-mêmes en place un concours international en hommage à Sigismund Toduta. Les candidats sont notamment invités durant leur séjour à Deva à visiter la commune où est né notre musicien et où il est également enterré. Ce lieu se trouve à Simeria tout près de Deva. Propos recueillis par Bernard Camboulives Site Internet : www.sigismundtoduta.org Comme créateur, Sigismund Toduta s'est inspiré de trois sources musicales. La première lui vient d'Italie où il a terminé avant-guerre (1936-1938) ses études à l'Institut pontifical de musique sacrée de Rome. Il sera d'ailleurs le premier docteur roumain en musicologie. Là, tout en perfectionnant son apprentissage du piano et de la composition initié à Cluj, il côtoie l'orgue et la musique religieuse. Pour ce qui est de l'art vocal, il s'initie à la musique de Palestrina qui laissera une trace profonde en lui. Bach est la deuxième grande source à l'œuvre dans sa création. Sur la musique du Cantor de Leipzig, il effectue des recherches importantes afin d'en dégager les formes musicales du baroque (il publie à ce sujet trois volumes entre 1969 et 1978). Enfin, sa troisième source musicale réside bien entendu dans la musique traditionnelle roumaine. Il s'initie Sigismund Toduta directement sur le terrain au folklore roumain et utilise les thèmes roumains pour ses compositions personnelles. Les grands mythes de la culture roumaine sont ainsi mis en musique par Toduta. Maître Manole fait l'objet d'un opéra oratorio tout comme Mioritsa. La poésie de nos grands poètes Eminescu, Blaga, Blandiana est également mise en musique et donne des lieder de toute beauté. Mais Sigismund Toduta ne s'en tient pas à notre seule poésie roumaine. Il compose également des lieder sur des textes de Baudelaire, de Rilke, etc. Un musicologue acharné et un grand pédagogue B.C: Ses sources et son inspiration poétique, tout comme d'ailleurs sa formation, ne sont donc pas seulement roumaines mais européennes ? A.F: Toduta a incontestablement assimilé les plus importantes techniques de musique occidentale et sa musique puise autant dans le répertoire textuel religieux que profane... Sigismund Toduta fut aussi un musicologue acharné. Ses travaux, études, conférences sont innombrables. En plus de livres sur la musique de Bach, il a effectué des recherches sur manuscrits religieux. Il a également écrit des articles sur Haendel, sur Georges Enesco, sur Claude Debussy. Il n'a en rien laissé la musique contemporaine à l'écart puisqu'il a étudié également la musique d'Anton Webern. Pour ce qui est de son apport de pédagogue, je le considère personnellement comme très important. Je vous ai déjà dit quel était son niveau d'exigence. Certains de ses élèves sont devenus des musiciens de renom comme, par exemple, le hongrois Gyorgy Orban ou le roumain Hans Peter Turk. Pendant de très longues années Sigismund Toduta a enseigné au Conservatoire de musique de Cluj la théorie, le solfège, la dictée, le contrepoint, la fugue et la composition. Après quoi, peu avant sa retraite survenue en 1973, il a dirigé la Philharmonique de Cluj (1971-1974). A Deva, 800 élèves fréquentent le lycée artistique portant son nom B.C: Votre émotion en évoquant ce personnage est tout à fait palpable. L'avezvous rencontré personnellement ? A.F: - Je n'ai pas été son élève car il était déjà en retraite lorsque j'ai fait mes études de piano. Mais je le voyais tout de même fréquemment car il était resté professeur consultant au Conservatoire. Je l'ai toutefois abordé directement peu après la révolution roumaine et peu avant sa mort. Je lui ai rendu visite chez lui dans le but de faire un film pour la télévision roumaine. Le film a bien été réalisé mais il n'est jamais passé à la télé. Il a disparu dans la mouvance de l'époque. Je garde de Sigismund Toduta l'image d'un homme très digne, à la fois d'une grande humanité et d’une grande simplicité mais toujours rigoureux. C'est tout cet ensemble de qualités que je souhaite voir appliqué dans l'établissement que j'ai l'honneur de diriger actuellement. Les NOUVeLLes de ROUMANIe Société à des tests vétérinaires pratiqués par de jeunes médecins roumains nantais déclenche l’alerte fin janvier 1990 D'abord sceptique, Paris envoie un spécialiste qui confirme les 600 cas décelés "Médecins du monde", venu spécialement à Bucarest a dévoilé, au cours d'une conférence de presse l'existence de l'épidémie, ç'a été l'horreur. Les chaînes américaines, CNN en H.G.: Quelle a été la réaction de vos confrères de tête, japonaises, etc, se sont déchaînées. Pourtant le même "Médecins du monde", à Paris, problème existait ailleurs, dans la lorsque vous les avez alertés? banlieue de Moscou, par exemple. J.G.B: Ils n'y ont pas cru. D'ailleurs les Russes, très inté"Qu'est-ce que c'est çà ? C'est ressés, ont envoyé des équipes encore un bobard. Ce chirurgien pour venir voir comment çà se n'y connaît rien". A leur décharpassait… mais personne n'en a ge, je dirais qu'on était en plein parlé. scandale de la fausse rumeur des Ce fut le début de l'engrenage charniers de Timisoara. Tout ce qui fait cette image de la qui venait de Roumanie était sujet Roumanie aujourd'hui: les charà caution. Mais j'ai insisté et niers de Timisoara, l'exécution des j'avais à faire quand même à des Ceaucescu, le SIDA des enfants, gens sérieux. Paris a donc décidé les orphelinats. Sous le déferled'envoyer sur place un virologue ment médiatique, la réaction a été de haute volée, Dublanchet. affective: c'était la Roumanie Pendant quatre jours, celui-ci "mauvaise mère". a testé la chaîne d'examen d'Elisa, Je dois dire que j'en suis encone relevant aucune erreur méthoJean-Gabriel Barbin a découvert l’épidémie de SIDA re meurtri et que cela me tarabuspédiatrique, fin janvier 1990, se heurtant au scepticisme. te, comme si j'y avais une part de dologique, ce qui commença déjà fortement à l'inquiéter. Puis, il est retourné à Paris, emportant responsabilité. les 600 sérums qui avaient servi aux tests pour les analyser dans son laboratoire. Son verdict est tombé quelques jours plus Principalement à Bucarest et Constantsa tard: 599 tests étaient positifs, un douteux. Il existait bien une épidémie de SIDA pédiatrique en Roumanie. H.G.: D'où vient cette épidémie ? J.G.B.: Il y a plusieurs facteurs. Il n'existait aucun contrôH.G.: Les autorités roumaines étaient-elles au courant ? le des sangs transfusés. Faute de moyens, le manque d'hygièJ.G.B: Non, elles ont découvert le problème quand j'ai ne était total, avec réutilisation des seringues, des pansements. alerté le Premier ministre Petre Roman, lorsque l'épidémie a Et puis, dans le cas des enfants, le recours à une pratiques antéété avérée, fin mars. Même Ceausescu n'était sûrement pas au diluvienne, utilisée en Afrique ou dans la France des années courant. Elles n'y étaient pour rien, mais je les ai sérieusement 30, la micro-transfusion pour ceux qui étaient faibles. Les mises en garde sur le déferlement médiatique qui allait suivre. risques étaient multipliés, car, avec un même donneur, on en On était en pleine période électorale. Les première élections faisait plusieurs et, en outre, on les répétait souvent. Par ailleurs, on contaminait le matériel. libres du pays devaient avoir lieu quelques semaines plus tard et Bucarest était redevenu le centre d'attraction du monde H.G.: Quelle a été la riposte ? entier. Tous les jours débarquaient des équipes de télévision, J.G.B.: Tout d'abord, on a procédé à un dépistage dans des fournées de journalistes. toutes les institutions (camin, orphelinats), ce qui a permis de L'enfer médiatique constater que le gros des problèmes se situait à Bucarest et à Constantsa. A Bucarest, parce qu'il y avait beaucoup d'étuH.G.: Quelle a été l'attitude des médias ? diants africains et qu'une des souches du VIH la plus répandue J.G.B.: Le délire; ç'à été l'enfer. J'ai tenté de prendre les que l'on ait trouvée est celle du virus présent en Afrique. A devants, en prévenant quelques journalistes amis d'Antenne 2 Constantsa, parce que c'est un port, avec ses marins qui vienet de l'AFP. "Les gars, j'ai un truc énorme à vous annoncer… nent du monde entier et ses prostituées. mais pédale douce, cela peut faire de gros dégâts". Ils ont eu Ensuite, il a fallu former le personnel qui avait une peur panique du SIDA, penser à la scolarisation de tous ces enfants en priorité l'information et ont été “réglo", ne trahissant pas qui grandissaient malgré les progrès de la maladie, et vaincre ma confiance, rendant compte de ce terrible problème sans les réticences des enseignants. Je dois dire que l'accompagnefard mais avec sobriété. D'eux-mêmes, ils n'ont pas publié ou ment et l'aide apportés par les organismes internationaux a été diffusé les photos et les images les plus affreuses, qui sont touénorme. jours dans leurs tiroirs. Propos recueillis par Henri Gillet Par contre, dès que Jacques Lebas, le président de 21 Les NOUVeLLes de ROUMANIe Société Santé SUCEAVA z z ORADEA z ARAD z z z IASI z z z SIBIU BRASOV GALATI PITESTI CRAIOVA BACAU z z z z TARGU MURES CLUJ DEVA TIMISOARA BAIA MARE z BUZAU BUCAREST z z z TULCEA CONSTANTA z Entrée en vigueur d'un Traité protégeant la région des Carpates 22 La Convention des Carpates, signée en mai 2003 pour protéger l'environnement dans cette région est-européenne, est entrée en vigueur début janvier, a annoncé l'ONU dans un communiqué à Vienne. La Hongrie a en effet ratifié, après la République tchèque, la Slovaquie et l'Ukraine ce traité devant protéger la faune et la flore locales, exceptionnelles en Europe, selon un communiqué du Programme des Nations unies pour l'environnement (PNUE). Hommes d'affaires allemands et italiens, mais aussi Roumains de l'étranger viennent s'y faire soigner Tourisme dentaire dans les cliniques spécialisées de Timisoara L es cliniques de Timisoara, spécialisées dans les traitements dentaires, ont été débordées en fin d'année. Nombre de Roumains fixés à l'étranger et rentrés à l'occasion des fêtes, en ont profité pour se faire soigner et un rush du même genre est attendu à l'occasion de Pâques. Dans ces établissements souvent neufs, disposant de matériel moderne et de personnel compétent, les prix sont de quatre à cinq fois inférieurs à ceux pratiqués en Occident, à qualité de soins égale. Ainsi un plombage y revient à 20 € au lieu de 100 € en Allemagne, une dent en céramique et sa pose à 80 € au lieu de 400 €, un implant dentaire à 500 € (2500 €), un traitement d'orthodontie à 500-1000 € (4000 €). Autre avantage: les délais. Le plombage se fait immédiatement, en une séance, couronnes et prothèses sont réalisées en moins d'une semaine. Les hommes d'affaires italiens et allemands, nombreux dans la région, ont vite compris l'intérêt de ces cliniques stomatologiques qu'ils fréquentent de plus en plus et qui ont doté leurs salles d'attente d'ordinateurs avec Internet. On trouve leurs coordonnées et tout le descriptif de leurs services, avec tarifs, sur leurs sites Internet, à partir desquels on peut programmer les interventions. La Roumanie emprunte ainsi la voie du tourisme dentaire, initiée voici environ cinq ans en Hongrie, mais en proposant des prix plus avantageux… qui baissent encore si l'on va à l'intérieur du pays. Un de nos lecteurs s'est ainsi fait poser à Târgu Jiu cinq prothèses en céramique, de la meilleur qualité, pour 300 €, somme comprenant d'autres soins, le tout en dix jours, appréciant particulièrement l'accueil, la "douceur" de l'intervention et le professionnalisme manifesté. Il faut préciser qu'il avait choisi sa clinique à l'avance, sur recommandation d'amis roumains. En France, le devis se montait à 4000 €, dont moins de 500 remboursés. Les lunettes aussi La convention couvre aussi le territoire de trois autres pays, Roumanie, Pologne et Serbie-Monténégro. La région des Carpates contient la plus grande réserve de forêts à l'état sauvage d'Europe et l'on y trouve des animaux devenus rares tels que l'ours brun, le loup, le bison, le lynx et l'aigle. Le programme de travail sera décidé lors d'une première rencontre des pays membres de la Convention en juin 2006. Une agence de tourisme de Bucarest se spécialise d'ailleurs dans le tourisme médical, proposant des soins esthétiques (liposuccion, seins au silicone…), traitements gériatriques, interventions ophtalmologiques, stomatologiques. Elle se charge de la réservation des billets d'avion, du transfert depuis l'aéroport, de l'hébergement, du programme d'intervention médicale… et des excursions touristiques pour meubler les moments libres. Autre opportunité très intéressante en Roumanie: l'opticien. Pour 40 €, on vous fabrique une paire de lunettes avec des verres normaux, en un quart d'heure, après avoir mesuré sur place votre vue… et sans avoir à prendre un rendez-vous chez le spécialiste six mois à l'avance. Les montures sont très présentables, mais il ne faut pas bien sûr choisir celles portant des griffes étrangères. Aux prix pratiqués en France, on comprend pourquoi Afflelou offre si généreusement sa seconde paire gratuitement ! D 2000 patients ont besoin d'une greffe 'après le président de l'Agence Nationale pour les transplantations, deux millepatients sont inscrits sur des listes d'attente en vue d'une greffe du cœur, du foie ou des reins. Victor Zota souhaite la mise en place d'un registre unifié, respectant les proto- coles internationaux pour la sélection des patients, copié sur le modèle britannique où les listes d'attente sont scrupuleusement respectées, ce qui évite de faire la queue chez les médecins. Un des problèmes rencontrés réside dans le financement des interventions, les hôpitaux manquant de fonds. Les NOUVeLLes de ROUMANIe Connaissance et découverte romantiques musique classique de leur pays Quand en 1888 l'on lui présenta ce jeune garçon si doué nommé George Enescu, Eduard Caudella eut la clairvoyance de recommander le jeune prodige à Vienne, estimant qu'il n'aurait rien à lui apprendre. Enescu et Caudella restèrent en contact dorénavant, manifestant une sincère et désintéressée estime réciproque. Caudella composa pour Enescu son premier Concerto pour violon en 1915; Enescu dédia à son ancien professeur ses Impressions d'Enfance pour violon et piano. En musicologue cultivé, Eduard Caudella n'ignorait pas les Ecoles Nationales qui fleurissaient en Europe. Son œuvre, influencée Ciprian Porumbescu par le premier romantisme, révèle un métier accompli et influencé par le folklore, mais guère novateur. Il est difficile de croire que ses dernières compositions, d'un romantisme très classique, sont contemporaines de la maturité créatrice de compositeurs comme Bartok, Schönberg ou Stravinsky. Cela mis à part, le charme indéniable de sa musique symphonique, les rythmes de danses populaires bien proches, à bien des égards, des Rhapsodies roumaines d'Enescu, font des partitions de Caudella autant d'œuvres qui méritent l'attention des mélomanes et des interprètes. Ciprian Porumbescu (1853 - 1883): instrumentalisé par le régime communiste Alors que Caudella et Stephanescu vécurent bien au-delà du XIXème siècle et atteignirent tous deux les 80 ans, Ciprian Porumbescu satisfit davantage aux stéréotypes romantiques en disparaissant, tuberculeux, dans sa trentième année, ce qui rend son image mythique. Cet éternel jeune homme, farouche défenseur de la patrie roumaine, nationaliste exacerbé aux déclarations enflammées, dont les excès le menèrent en prison, n'a cependant laissé qu'une poignée d'œuvres, agréables mais sans grande profondeur. Ainsi son opérette Crai Nou (la nouvelle lune), exploite avec bonheur des rythmes de Transylvanie. Sa rhapsodie roumaine pour piano suit sans surprise le modèle lizstien, encore que la version orchestrale (qui n'est pas de la plume de Porumbescu) trouve davantage matière à secouer les auditeurs, même non patriotes, à grands renforts de grosse caisse et de cymbales. Quant à la Ballade pour violon et piano, elle est depuis longtemps adoptée par les Roumains en raison de sa ferveur tranquille. Il est aujourd'hui étonnant de constater à quel point le régime communiste a essayé de faire de Porumbescu un symbole national. En l'absence de grand compositeur national romantique, le pouvoir communiste roumain a visiblement tenté de convaincre qu'en Porumbescu, la Roumanie possédait l'équivalent d'un Liszt ou d'un Dvorak. La visite du musée Porumbescu, dans la campagne moldave, a quelque chose de déconcertant. Rien n'y a changé depuis la fin de Ceausescu. Des articles d'anciens musicologues officiels fustigent toujours "l'ancien régime bourgeois" qui a tenté de minimiser l'apport de Porumbescu à l'art romantique. Une statue sévère, à l'entrée du musée, nous rappelle que ce jeune homme, mort avant d'avoir pu aborder les grandes formes musicales, était avant tout un nationaliste en bois brut, tout entier dévoué à l'amour de son pays qui lui doit, d'ailleurs, des hymnes patriotiques. Alain Chotil-Fani Sigismund Toduta (1908-1991), est un compositeur malheureusement méconnu, même dans son pays Inspiré par la musique sacrée, Bach et le folklore roumain A na Fodor n'est pas seulement la directrice du Lycée de musique et d'arts plastiques Sigismund Toduta (prononcez Todutsa) de Deva mais elle est aussi une fervente adepte de la musique et de la personnalité de celui qui porte le nom de "son" lycée. Pour avoir fréquenté le conservatoire de musique de Cluj en Transylvanie, où officia comme professeur Sigismund Toduta durant de longues années après-guerre (1946-1973), elle garde un souvenir ému et reconnaissant pour ce maître très digne et très exigeant, pour cette haute person- nalité de la culture roumaine du XXème siècle. En l'interviewant, Bernard Camboulives est parti à la découverte de ce grand musicien roumain méconnu. Premier docteur roumain en musicologie Bernard Camboulives: Qui était Sigismund Toduta que nous ne connaissons pas du tout en France ? Ana Fodor: Malheureusement, il ne l'est pas beaucoup non plus en Roumanie même car il n'a pas fait de démarches par- ticulières pour accéder à la célébrité. Il a reçu de nombreux prix mais ses enregistrements ne se trouvent pas facilement aujourd'hui bien qu'il y ait désormais une Fondation Toduta à Cluj qui possède un site Internet. Il faut dire aussi que sa musique est très élaborée et très exigeante. Je situe l'action et l'apport de Toduta à la musique roumaine sur trois plans. Il fut tout à la fois un créateur de musique vocale symphonique, un musicologue passionné et un pédagogue créateur d'une école de musicologues de très haut niveau. (Lire page suivante) 31 Les NOUVeLLes de ROUMANIe Connaissance et découverte Musique SUCEAVA z z ORADEA z ARAD BAIA MARE z IASI z TARGU MURES CLUJ BACAU z z z z z z z SIBIU TIMISOARA BRASOV z SINAIA ORAVITA PITESTI CRAIOVA z GALATI BRAILA z z z TULCEA z BUCAREST CONSTANTA z Humour Histoires vraies "Traître" à la classe ouvrière… qui mange des huîtres 30 Adrian s'est mis rapidement aux huîtres quand il est arrivé sur la côte Atlantique, s'y installant. Jusque là, il n'en avait vu que dans des livres. En Roumanie, elles passaient pour un luxe d'Occidentaux et on imaginait que seul Ceausescu en mangeait. Invitant un jour un ami français à sa table, celui-ci eut la surprise de le voir donner systématiquement à son chat les plus belles, d'un vert vif rappelant et sentant l'océan. S'en étonnant, il s'entendit dire: "Mais tu ne vois pas qu'elles sont pourries". Son père venu lui rendre visite dans sa jeunesse fervent communiste, ce dont il était revenu tout en gardant sa conscience ouvrière - ne se fit pas prier pour goûter avec beaucoup d'appétit ce mets que l'on disait réservé aux capitalistes… ce qui lui valut le regard sombre de sa femme et cette flèche terrible "Traître!". Au cours de son séjour, le vieil homme se fit très bien à la société occidentale. A la grande surprise de son fils, il n'hésitait pas à aller seul acheter le pain, bien que ne parlant pas un mot de français. Un jour, il décida de se rendre à la pharmacie, ce qui était plus compliqué, et refusa la proposition d'Adrian de l'accompagner. Il revint en effet avec les médicaments dont il avait besoin et, tout fier, lança à son fils, stupéfait : "tu oublies qu'il n'y a pas que le roumain que je parle, il y a aussi le hongrois ". Bien sûr, en Bretagne, çà allait de soi… Trois compositeurs roumains précurseurs de la S i vous demandez à un mélomane, même éclairé, de vous citer un compositeur romantique roumain, il y a fort à parier qu'il se grattera le crâne et finira par avouer son ignorance. S'il est vrai que les œuvres de jeunesse du grand George Enescu sont empreintes d'un romantisme proche de Brahms, il n'est cependant pas l'initiateur du romantisme national de son pays natal. Ce mouvement est en effet incarné par des compositeurs aujourd'hui méconnus mais ayant joué un rôle non négligeable dans l'éveil de la nation musicale roumaine. Alain Chotil-Fani, mélomane passionné de musique roumaine - il lui consacre un remarquable site Internet, www.souvenirs des carpates - se penche sur la destinée et la carrière de trois d'entre-eux. George Stephanescu (1843 - 1925): l'éveil du nationalisme musical roumain George Stephanescu fait partie de la prolifique génération de romantiques nés dans les années 1840, comme Tchaikovsky, Dvorak, Saint-Saëns ou Bizet. Professeur de chant, chef lyrique, compositeur d'innombrables œuvres pour la scène, il a poursuivi toute sa vie l'ambition de faire de l'Opéra de Bucarest un théâtre de renommée internationale. Infatigable promoteur de la musique de son pays - comme le sera, un demi-siècle plus tard, George Enescu - George Stephanescu, à l'instar du composteur Bedrich Smetana en Bohême, consacre toute son existence à l'éveil du nationalisme musical roumain. Paradoxalement, l'une des seules œuvres aujourd'hui accessibles au disque de Stephanescu est une symphonie de jeunesse en la majeur. Cette pièce plaisante, d'un jeune homme de 26 ans, alors étudiant au Conservatoire de Paris, a connu le même sort que d'autres de ses prestigieuses consœurs (les premières symphonies de Bizet, Dvorak ou Bruckner) puisqu'elle ne fut jamais jouée du vivant de son auteur. Elle ne sera créée qu'en 1959, pour la radio roumaine. Classiquement en quatre mouvements, la Symphonie de Stephanescu, résolument optimiste, respire une certaine joie de vivre et utilise déjà des éléments folkloriques roumains dans son final. Les deux mouvements médians - le Larghetto, en forme de lied, et surtout le bondissant Scherzo Allegretto assai - sont cependant plus intéressants, construits avec un métier déjà sûr. Cette symphonie, d'une manière générale, ne cache pas ses influences multiples, de Ludwig van Beethoven, Franz Schubert et Félix Mendelssohn. Elle souffre cependant et regrettablement, de la faiblesse de son ultime mouvement, ce qui peut expliquer la rareté au disque mais aussi dans les salles de concert de la "première symphonie roumaine". Eduard Caudella (1841 - 1924): mentor du jeune George Enescu Exact contemporain de George Stephanescu, Eduard Caudella jouit encore de nos jours d'une excellent réputation de pédagogue. Professeur respecté au conservatoire de Iasi, ville située à l'est de la Roumanie et renommée pour sa dimension culturelle, Caudella fut aussi un musicien accompli, virtuose du violon (il a étudié avec Henri Vieuxtemps), chef d'orchestre et critique musical. Né dans une famille de musiciens - son grand-père était déjà compositeur et professeur de musique, son père violoncelliste et l'un de ses cousins chanteur à l'Opéra Impérial de Vienne - Eduard Caudella a composé de nombreuses œuvres musicales dans de multiples genres. Particulièrement attaché à sa terre natale, où il s'est établi définitivement après ses tournées européennes, Caudella a mis en valeur la richesse musicale populaire roumaine dans ses œuvres classiques. Les NOUVeLLes de ROUMANIe Santé Société Les faux-dentistes italiens demandent qu'on leur rembourse les dessous de table versés L 'affaire avait fait grand bruit en 2000 et causé le plus grand scandale jamais enregistré jusqu'alors dans l'enseignement roumain, mettant en relief ses dérives qui n'ont fait que s'accentuer depuis sous l'effet d'une corruption galopante et d'une autonomie des universités permettant tous les abus. 63 ressortissants italiens avaient obtenu leurs faux diplômes de dentistes auprès de l'Université de Médecine et de Pharmacie de Iasi, entre 1997 et 2000, certains ayant ensuite exercé comme stomatologues en Roumanie. C'est lorsque plusieurs de ces pseudo-diplômés avaient demandé la reconnaissance de leurs titres que l'ambassade d'Italie en Roumanie avait découvert le pot aux roses. Bakchich à l'appui, les " étudiants " italiens avaient obtenu des autorités universitaires de Iasi d'y passer leur examen de licence, après avoir suivi les cours d'une université italienne non accréditée et avoir été inscrits à l'Université Privée Ecologique de Bucarest, grâce à de faux titres, comme le baccalauréat, leur en autorisant l'accès. Le ministre de l'Education nationale de l'époque avait décidé de révoquer les recteurs en cause et d'annuler les diplômes. Estimant qu'ils ont été spoliés par cette décision qui les empêche d'exercer, 24 de ces faux-dentistes ont entamé un procès. Déboutés, cinq d'entre-eux ont fait appel, réclamant chacun 50 000 € de dédommagements pour le remboursement de leurs frais d'études - ils ont passé en tout et pour tout quinze jours à Iasi - les voyages effectués entre l'Italie et la Roumanie… et les pourboires versés! Les universités concernées, et complices à l'époque des faits, s'en renvoient chacune la responsabilité. En 2000, le scandale ne s'était pas arrêté là. Le Conseil National d'Evaluation Académique et d'Accréditation (CNEAA) avait également démarré une enquête sur des titres de doctorats obtenus par des étudiants israéliens. Une firme de ce pays avait proposé à l'Université de Bucarest un "arrangement" pour organiser des programmes dans ce sens, ce qu'elle avait refusé… à la surprise du demandeur qui lui avait indiqué que cela se pratiquait avec d'autres universités roumaines. Certains diplômes avaient été délivrés en échange de sommes pouvant atteindre 50 000 €. Les Roumains vont se faire soigner mieux et moins cher en Hongrie C e ne sont pas seulement les commerces, mieux achalandés et moins chers, qui attirent les Roumains en Hongrie. Pour des raisons équivalentes, ceux-ci se rendent de plus en plus fréquemment dans le pays voisin pour s'y faire soigner, les hôpitaux de Sezged et Budapest ayant la réputation de prodiguer une médecine de bien meilleure qualité, dans des établissements propres et pour un coût moins élevé. Les habitants du Banat (Timisoara et Arad) sont devenus les patients étrangers les plus nombreux des cliniques de Szeged, ville située à moins d'une demiheure de la frontière. Ils sont attirés par la réputation des médecins locaux qui excellent dans les domaines de l'orthopédie, de l'ophtalmologie et de la gynécologie, entreprenant notamment des opérations qui ne s'effectuent pas encore en Roumanie. Autre avantage, les patients sont assurés d'être opérés dans la semaine alors que chez eux ils doivent attendre des mois et parfois jusqu'à un an. Ils trouvent également des établissements où la propreté est une règle absolue. Les murs sont fraîchement repeints, le carrelage régulièrement lavé, les toilettes impeccables, le mobilier neuf. Il est interdit de fumer, contrairement à la Roumanie, règle qui s'applique aussi aux médecins. Le coût d'une hospitalisation est l'autre élément décisif. En Roumanie, théoriquement, les soins sont gratuits pour les assurés… mais il en va tout autrement dans la réalité. Il faut sans arrêt rajouter des bakchichs… au chirurgien, à l'anesthésiste, au médecin de garde, aux infirmières, aux femmes de service, pour avoir un examen, pour acheter ses médicaments, pour utiliser du matériel moderne, pour se faire livrer de quoi manger à sa faim… Dans le meilleur des cas, au total cela représentera une centaine d'euros, mais ce coût peut se multiplier par dix, voire plus, les familles se mobilisant pour trouver les sommes nécessaires. Bakchich légalisé mais limité Ainsi, pour l'implantation d'une valve cardiaque on doit, au minimum, verser 1000 € au chirurgien, auxquels il faudra ajouter plusieurs centaines d'autres pour le matériel, 100 € pour l'anesthésiste et ainsi de suite. Les per- sonnels médicaux justifient ces pourboires par les salaires misérables qu'ils reçoivent. En Hongrie, la même intervention coûtera 1100 €, tout compris ; à savoir 1000 € pour l'opération (prise en charge pour les Hongrois)… et 100 € maximum de bakchich, à l'initiative du malade. Ce pays, reconnaissant qu'il ne pouvait pas payer un juste prix ses médecins et autres personnels a légalisé le système des pourboires, dans les années 50, tout en le réglementant. S'il est content de l'intervention, le patient peut manifester sa gratitude en versant une somme qui ne doit pas dépasser au total 100 €; ce geste n'est pas obligatoire, mais en général pratiqué, et ne peut en aucun cas être fait avant l'opération, seulement à la fin de l'hospitalisation. Certes les médecins hongrois gagnent nettement plus que leurs confrères roumains (1000 € au lieu de 200), lesquels sont méprisés par un système de santé corrompu, où l'argent des assurés est détourné, mais le résultat est là: les Roumains préfèrent encore payer leurs soins plutôt que d’avoir recours à une médecine soi-disant gratuite. Encore faut-il en avoir les moyens. 23 Les NOUVeLLes de ROUMANIe Société Religion z ORADEA z CLUJ ARAD z z z z IASI VASLUI z z Le "Postul mare" de Pâques est de plus en plus observé z TARGU MURES ROSIA M. TIMISOARA SUCEAVA SATU MARE z FAGARAS z SIBIU z z BRASOV GALATI BRAILA z z z TULCEA CRAIOVA z BUCAREST CONSTANTA z 182 jours de jeûne, soit la moitié de l'année 24 Jeûne, parfois noir, abstinence et continence pendant sept semaines L'Eglise orthodoxe a défini les périodes de jeûne, pendant lesquelles elle ne pratique également aucun mariage religieux, de la façon suivante: Jeûnes hebdomadaires réguliers: le mercredi et le vendredi Jeûnes d'un jour: le 5 janvier, Boboteaza (baptême du Christ), le 29 août (décapitation de Saint Jean Baptiste), le 14 septembre (élévation de la Sainte Croix) Jeûnes précédant les grandes fêtes religieuses: sept semaines avant Pâques, deux semaines avant l'Assomption (le 15 août), une période variable pour les saints apostoliques, et six semaines avant Noël. Au total, cela fait 182 jours… soit la moitié de l'année ! Réalisé à l'occasion de Pâques 2005, un sondage a permis d'en savoir plus sur les Roumains et les fêtes religieuses. 72 % sont allés à la messe de Pâques, les Transylvains étant les plus nombreux (72 %), la Dobroudja (Constantsa) se classant en queue (61 %). 17 % des paysans ont observé le "post", et seulement 12 % des habitants des villes. 97 % des provinciaux ont fabriqué leur "cozonac" (brioche) et peint leurs oeufs à la maison, ce qui n'est le cas que de 56 % des Bucarestois. Trois quarts des Moldaves préparent le repas de Pâques à la maison, les sarmale y trônant en roi sur la table, tout comme en Transylvanie, mais étant également servis dans toutes les régions. L'agneau pascal est le plus apprécié des Oltènes (Craiova), dans le Banat (Timisoara) et la région d'Oradea, étant servi huit fois sur dix. S ept semaines avant Pâques, les croyants orthodoxes commencent une période de jeune particulièrement rigoureuse appelée "Postul mare" ("Le grand jeûne"). Beaucoup plus strict que le jeûne des catholiques qui permet de consommer du poisson, des œufs et des produits laitiers, celui-ci interdit tout aliment de nature animale (viandes, charcuterie, œufs, lait, beurre, fromage, autres produits laitiers), proscrit le vin, l'huile… et les relations sexuelles. Les fidèles doivent entièrement se consacrer à la purification de leur corps, à la méditation, à la prière. Seuls sont dispensés de cette ascèse, les personnes âgées, les enfants, les malades, les voyageurs, les militaires et les détenus. Pendant pratiquement cinquante jours, les fidèles vont se partager entre les jours où ils ne mangeront et ne boiront absolument rien ("Postul negru", "Jeûne noir"), ceux où ils absorberont seulement une soupe et des légumes cuits, le soir, une entorse étant autorisée le samedi où ils peuvent consommer des aliments secs et un peu de vin, ainsi que les jours de fêtes religieuses, le 25 mars, jour de l'Annonce faite à Marie et le dimanche précédant Pâques, appelé "Florii" ("Rameaux"), correspondant à l'entrée de Jésus dans Jérusalem, où le poisson est permis. Le regain de pratique du "Post" s'est manifesté dès la "Révolution" de décembre 1989. Malgré tous les obstacles mis par les communistes, les Roumains restaient un peuple profondément religieux - on affirme même qu'il est le plus croyant d'Europe bien que seulement 18 % d'entre eux continuent à aller à la messe le dimanche. Mais son observance est surtout le fait des personnes âgées, des femmes, et des jeunes de moins de vingt cinq ans, la classe d'âge moyen ayant plutôt fait sien le matérialisme de l'époque communiste, considérant qu'il s'agit d'une coutume d'un autre temps, liée aux mœurs rurales. Un phénomène de mode joue aussi dans son observance, car, le "post" permet de suivre un régime diététique et végétarien recommandé par les nutritionnistes. Un créneau pour les magasins d'alimentation et les restaurants Les professions de l'alimentation ont compris qu'elles disposaient là d'un créneau et les rayons où figurent les préparations et produits spéciaux pour cette période se sont multipliés dans les magasins. On y propose des "cozonacii (brioches) de Post", confectionnées sans œufs, ni lait, de la charcuterie ou des sarmale à base de soja, graminée dont la consommation se développe beaucoup, des pâtés de champignons, de la mayonnaise, des fromages et des saucissons végétaux… De plus en plus de restaurants s'y mettent, avec des menus appropriés, où figurent en bonne place soupes de légumes et salades… même si l'endroit n'est pas très indiqué pour une période sensée être dévolue au recueillement. Etonnement, la vente des autres catégories de produits alimentaires (viandes, œufs…) ne baisse pas pendant cette période. Si elles sont les premières à observer le "Post", les maîtresses de maison, chargées généralement des courses, sont bien obligées de composer avec les exigences de leur mari et la santé de leurs enfants. Les NOUVeLLes de ROUMANIe Théâtre Connaissance et découverte La pièce de la jeune dramaturge Gianina Carbunariu reprise en France Trois Roumains dans le noir L e théâtre contemporain roumain existe et s'exporte même, comme l'a constaté Brigitte Salino, dans le Monde, dans une critique consacrée à "Stop the tempo", une pièce de Gianina Carbunariu, reprise au Théâtre-Studio d'Alfortville, dans la banlieue parisienne, fin 2005, et mise en scène par Christian Benedetti. "Et si on débranchait tout ? On l'a rêvé, Christian Benedetti le fait dans son beau théâtre-studio d'Alfortville: après avoir mis à fond la caisse une musique de boîte de nuit, il éteint tout, faisant éprouver le silence et l'obscurité pendant plusieurs minutes. C'est Stop the Tempo !, la pièce d'une jeune Roumaine de 28 ans que l'on découvre en France, Gianina Carbunariu. Une pièce qui cogne: désespérée et radicale. Soit donc trois jeunes gens, Maria, Paula et Rolando, dans la Roumanie d'aujourd'hui. Et, visiblement, il ne fait pas bon vivre dans l'ex-royaume du Père Ubu-Ceausescu, devenu celui de la consommation à outrance et de la dérégulation effrénée. De quoi péter les plombs: les trois jeunes gens de Stop the Tempo!, eux, décident de les faire sauter : terroristes Chanson S d'un nouveau genre, ils débranchent l'électricité de tous ces lieux qui font leur beurre sur le bonheur en plastique. Gianina Carbunariu (notre photo), la plume trempée dans le vitriol, érafle au passage cette injonction contemporaine qui veut que l'on soit toujours "cool", que l'on "s'éclate". La jeune dramaturge roumaine fait exploser les codes mêmes de la représentation théâtrale: sa pièce est destinée à être jouée dans le noir, ses trois interprètes seulement éclairés par des lampes torches. Et c'est ce que font Christian Benedetti et ses jeunes - et très justes - acteurs, donnant à la représentation une force et une étrangeté qui ramènent à un rôle très ancien du théâtre. Ce théâtre-là dit la rage et le désarroi d'une jeunesse, ici roumaine, aspirée par le vide, qui parvient pourtant, ici, à dépasser cette déréliction dans l'invention d'une forme de communauté. Il faut saluer la démarche de Christian Benedetti, qui s'obstine, avec peu de moyens, à offrir un théâtre engagé dans le contemporain, sans concessions, mais sans prendre de haut le spectateur". Stefan Hrusca ramène dans les maisons des Roumains expatriés le parfum sacré de leurs fêtes traditionnelles tefan Hrusca, l'un des plus grands chanteurs roumains actuels, a vu le jour au Maramures, le 8 décembre 1957. Jusqu'en 1981 il a été enseignant à Borsa, dans le même judet. C'est à cette époque qu'il est découvert par les promoteurs du mouvement artistique Cenaclul Flacara et change alors complètement de direction. En trois ans, de 1981 à 1984, le jeune artiste donne plus de mille concerts à travers le pays, son talent exceptionnel étant reconnu par l'attribution du Grand Prix de la musique folk et du Prix de Création musicale. Stefan Hrusca quitte Cenaclul Flacara en 1984 et poursuit sa carrière artistique comme chanteur solo ou, encore, en compagnie des chanteurs Vasile Seicaru et Victor Socaciu. Ses albums solo "Prière pour les parents" (1984), "Souhait aux amoureux" (1986), ainsi que celui sorti en collaboration avec Vasile Seicaru, intitulé "Voyageurs rêveurs" (1988) connaissent un succès retentissant. A partir de1990, au lendemain de la "Révolution", Stefan Hrusca se lance dans la redécouverte des cantiques de Noël qu'il interprète dans un style unique, original. Ses disques connaissent un succès énorme en Roumanie, il enregistre des records de vente avec les albums "Cantiques de Noël" (1990), "À la fin du monde" (1993), "Noël avec Hrusca" (2000), "Sainte nuit de Noël" (2001). Établi au Canada, proche de Toronto, depuis 1991, Stefan Hrusca fait le tour du monde et ses chansons résonnent partout dans les communautés roumaines. Mais le chanteur retourne chaque année en Roumanie où il est toujours aussi populaire. D'ailleurs le Disque d'or remis par la maison de disque Electrecord ainsi que le Prix de l'Union des Artistes en témoignent. Sa conversion aux chants religieux ne l'ont cependant pas fait abandonner pour autant le style folk. En 1996, Stefan Hrusca a sorti l'album folk "Amours passés" et organisé le festival de musique folk "Mesterul Manole" ("Maître Manole", célèbre légende roumaine), en qualité de directeur artistique. En 2001, un nouvel album "20 ans" compilait quelques uns des grands succès de sa carrière, comme "Feuilles", "Prière pour les parents", "Un arbre fleuri", "Tes yeux". La musique de Stefan Hrusca touche profondément l'âme roumaine partout dans le monde et ramène dans les maisons des Roumains expatriés le parfum sacré de leurs fêtes traditionnelles. 29 Les NOUVeLLes de ROUMANIe Connaissance et découverte Thêatre z BAIA MARE z z z z z ORADEA z z z SIBIU BICAZ BACAU z GALATI BRAILA z z z z TULCEA z CRAIOVA z BRASOV PITESTI BUCAREST CONSTANTA z Sibiu prépare 2007 28 Sibiu prépare dans la fièvre l'année 2007 qui va voir la ville devenir capitale européenne de la culture en même temps que sa partenaire Luxembourg. Son festival international de Théâtre, qui en était à sa douzième édition l'an passé sert, pendant dix jours fin mai, de répétition générale à l'évènement. L'association Sibiu 2007 s'est fixée comme objectif de changer l'image de la Roumanie en Europe. Les organisateurs veulent présenter un calendrier culturel exceptionnel mais doivent aussi résoudre de multiples problèmes d'infrastructures et de logistique. Ils ont déjà réalisé un guide du développement de la ville en mettant à contribution un millier de ses habitants pour déterminer les mauvais et les bons points qui la caractérise. L'offre des services publics sera ainsi améliorée. La grande place se trouve en pleine rénovation. La mairie vient d'être déplacée dans un grand bâtiment, riche en ornementations. Des statues sont en cours d'installation. Sibiu entend être prête à l'heure dite. Société Retour de Moldavie et Transnistrie L'intégrisme religieux n'épargne pas la Roumanie z TARGU MURES DEVA TIMISOARA IASI BORSA z ARAD BOTOSANI SUCEAVA z Orthodoxes en tête, les églises chrétiennes tentent de faire interdire la pièce "Les Evangélistes" Les NOUVeLLes de ROUMANIe L 'intégrisme et ses débordements n'affectent pas seulement le monde musulman, comme le montrent les réactions provoquées par une pièce de Théâtre en Roumanie et présentée à Iasi, ainsi que le rapporte le correspondant du "Monde" à Bucarest, Mirel Bran. La pièce a pour titre Les Evangélistes. Le metteur en scène, Benoît Vitse, Français, 58 ans, directeur du Théâtre Athénée d'Iasi, résume la situation: "Les églises veulent faire interdire le spectacle, explique-t-il. Les prêtres demandent à leurs fidèles de ne pas venir voir la pièce. Le maire déclare que c'est à cause de gens comme moi qu'il y a eu des émeutes dans les banlieues de France. Pendant les représentations, des étudiants en théologie ont prié à genoux devant l'entrée du théâtre, bougie à la main. J'ai reçu un couteau dans une enveloppe et je suis traité d'homosexuel, de pédophile, de juif et d'alcoolique. Vadim Tudor, le Le Pen roumain, affirme à la télévision qu'à cause de cette pièce il y a eu un tremblement de terre dans le département voisin." Toute la Roumanie tremble depuis la première de la pièce, en décembre 2005. Ecrits par Alina Mungiu-Pippidi (notre photo), 42 ans, ancienne médecin, journaliste et politologue, Les Evangélistes racontent l'histoire d'un Jésus sans transcendance, personnage un peu paumé dans un monde plutôt violent et qui voudrait ressusciter à travers ce que chacun pourrait faire en son nom. La bataille est délicate, car il se fait tuer par l'apôtre Paul, misogyne, colporteur et manipulateur. En dépit de leur énorme succès, Les Evangélistes n'ont été joués qu'à Iasi et une seule fois à Bucarest, dans la plus grande discrétion, afin de ne pas provoquer des manifestations. Après une pause, la pièce est donnée depuis le 18 janvier une fois par semaine aux risques et périls des acteurs et du metteur en scène. "Avant nous étions tous communistes, aujourd'hui nous sommes tous orthodoxes" "Je m'attendais à une réaction violente, mais j'aurais préféré que ma pièce ne soit pas le révélateur du primitivisme de notre société, témoigne Alina Mungiu-Pippidi. Nous vivons dans une société hypocrite comme au temps du dictateur Ceausescu. A l'époque, nous étions tous des communistes; aujourd'hui, nous sommes tous des orthodoxes. Notre christianisme de vitrine cache un incroyable retardement." Ce n'est pas un discours pour se faire aimer dans un pays à 87 % orthodoxe, où l'Eglise officielle est l'institution à laquelle les Roumains font le plus confiance. "Cette pièce est une insulte à notre Eglise", s'insurge Teoctist, le patriarche de l'Eglise orthodoxe de Roumanie, lequel est souvent apparu comme une marionnette de l'ancien régime, le servant apparemment sans montrer d'état d'âme particulier.. "C'est un blasphème contre notre vie et notre foi", ajoute l'archevêque catholique Ioan Robu. L'onde de choc du scandale est arrivée aux USA, où une association de Roumains a écrit à la présidence pour lui demander d'interdire ce spectacle au motif qu'il "rend la Roumanie vulnérable et menace la sécurité nationale". A quelques rares exceptions près, la presse roumaine s'est déchaînée contre l'auteur et le metteur en scène français a été déclaré persona non grata. "J'ai peur pour les jeunes acteurs, qui prennent beaucoup de risques, affirme Benoît Vitse. Je bénéficie d'une protection de la police." Les menaces sont loin d'être théoriques. Gigi Becali, patron d'un club de football, a appelé les supporteurs de son équipe, réputés pour leur violence, à donner une leçon aux acteurs. Quant à Alina Mungiu-Pippidi, elle veut continuer, sans gardes du corps, à bousculer la société. "Je ne suis pas théologienne, mais écrivaine. Je n'ai aucune intention de dénigrer Jésus. J'écris pour poser des questions, non pour y répondre. C'est ce que j'appelle une pièce de théâtre." 25 Les NOUVeLLes de ROUMANIe Société Andrei Pavel : l'arbre qui cache le désert du tennis roumain Sports BAIA MARE z CLUJ ARAD z z ORADEA ALBA I. z SIBIU z PITESTI CRAIOVA z z z BACAU z BRASOV CARANSEBES RESITA z z M. CIUC z z IASI VASLUI z z z TIMISOARA z SUCEAVA TARGU MURES GALATI z z BUZAU BUCAREST z z TULCEA CONSTANTA z Religion Les Roumains de Serbie de la vallée de Timoc auront un second lieu de culte 26 Depuis 1833, les Roumains de la vallée de Timoc, en Serbie du NordEst, voyaient leur existence culturelle et linguistique niée, dans une région qui a compté jusqu'à 87 églises et 17 monastères orthodoxes roumains. Le processus de libéralisation dans ce pays semble porter ses fruits puisque les autorités serbes ont accepté la construction d'une seconde église dans le village de Isacova, après celle reconstruite en 2003 à Malainita. L 'équipe roumaine de tennis s'est incliné 4-1 devant celle des Etats-Unis, en match qualificatif de la coupe Davis, à Bucarest, et devra disputer les barrages pour figurer dans le groupe mondial, l'an prochain. La seule satisfaction de cette rencontre réside dans la victoire du vétéran Andrei Pavel, 67ème mondial, sur Andy Roddick, n° 3 mondial, en cinq sets. Le tennis roumain peut se poser des questions sur le fait de voir son niveau végéter dans la médiocrité et se limiter aux seules performances de Pavel, alors qu'il avait atteint le sommet de la hiérarchie mondiale au début des années 70, disputant deux finales de la coupe Davis - toujours contre les USA - emmené par le redoutable duo de l'époque, Ilie Nastase-Ion Tiriac. Pourtant la Roumanie ne manque pas de jeunes talents mais, apparemment, elle ne sait pas les faire éclore. Ainsi en est-il de la paire Tecau-Mergea qui dominait voici trois ans le double du tennis mondial junior. En 2003, Florin Mergea s'était qualifié pour la finale junior de l'Open d'Australie, s'inclinant devant un Cypriote inconnu, Marcos Bagdadatis… lequel vient de disputer la finale du même tournoi, mais senior cette fois, battu par le n° 1 mondial Roger Federer. Cette même année 2003, Florea s'était qualifié pour les demi-finales de l'US Open junior et avait remporté le tournoi junior de Wimbledon. Depuis, Florea est rentré dans l'anonymat, disparaissant dès les premiers tours des tournois internationaux alors que des joueurs qu'il avait dominé auparavant, comme l'Australien Chris Guccionne, a qualifié son pays pour le tour suivant de la coupe Davis en venant à bout du redoutable Suisse Michaël Lammer. Il en est de même pour Horia Tecau ou pour Razvan Sabau, autre étoile éteinte, un des meilleurs juniors mondiaux, voici douze ou treize ans, qui avait également remporté Wimbledon. Les joueurs et leur entourage sont certainement fautifs pour ce manque de constance et ces espoirs déçus, mais la Fédération Roumaine de Tennis a aussi sa large part de responsabilité pour ne pas savoir encadrer le passage de ces jeunes vers le tennis adulte et ne pas manifester la volonté de les aider. Championnat d'Europe de football: la Roumanie retrouve les Pays-Bas sur son chemin Les leaders de la communauté roumaine de la vallée de Timoc, en Serbie, annoncent la bonne nouvelle. Les offices s'y dérouleront dans la langue maternelle roumaine et deux prêtres ont été consacrés récemment pour s'occuper de ces paroisses. L'église sera construite sur un terrain de deux hectares donné par une famille d'origine roumaine pour édifier un centre culturel, linguistique et religieux roumain. L a Roumanie aura les Pays-Bas comme principal adversaire, lors de la phase de qualification des prochains championnats d'Europe de football, qui doivent se dérouler en 2008 en Autriche et Suisse, et qui débutera dès septembre prochain. Pour se qualifier, les joueurs du sélectionneur Victor Piturca (notre photo) devront terminer au moins deuxième de leur groupe G qui comprend, outre les Hollandais, qui leur ont déjà barré la route de la coupe du monde en Allemagne: la Bulgarie, la Slovénie, l'Albanie, le Belarus, le Luxembourg. La dernière participation de la Roumanie à la phase finale du championnat d'Europe remonte à 2000, en Belgique-Hollande, et en coupe du monde, en 1998, en France. Les NOUVeLLes de ROUMANIe Cinéma Connaissance et découverte Une belle histoire franco-roumaine qui fait monter les larmes aux yeux… tout en faisant beaucoup rire "Je vous trouve très beau": une petite merveille de film à ne pas manquer P our son premier long métrage, Isabelle Mergault, La jeune comédienne a mené également de front une carscénariste, comédienne et partenaire de Laurent rière au cinéma, avec une vingtaine de films… jouant pour la Ruquier au théâtre, a réalisé une petite merveille première fois à l'âge de trois ans ! A six ans, elle interprétait le avec Je vous trouve très beau. Le succès est tel que, six rôle de Mirabela dans Maria Mirabela de Gopo, (réalisateur semaines après sa sortie, le film figure encore au top des primé par la palme d'or à Cannes en 1959), qui la fit connaître meilleures entrées en France avec deux millions de spectaet apprécié du grand public roumain. A onze ans elle recevait teurs, bien qu'il n'ait le prix de la meilleure actrice décernée par bénéficié que de la l'Association du Cinéma Roumain. Afin de la seule publicité du récompenser pour sa jeune mais riche carrière, elle "bouche à oreille". La a reçu en 2004 la prestigieuse "Etoile Roumaine" performance est d'aupour mérite culturel. Ne parlant pas français, elle a tant plus à saluer que la appris notre langue en trois mois, avant de tourner réalisatrice a écrit ellele film. Il lui reste à persévérer dans cette voie, tant même le scénario. elle a séduit le public français qui espère la revoir Le sujet remonte bientôt dans un autre rôle. jusqu'à la tradition d'un Il ne faut pas oublier non plus les seconds rôles cinéma pittoresque du film qui contribuent à son charme, dressant une cher à Pagnol. On rit, galerie de portraits croquignolets et contribuent on pleure, tant le ton est Michel Blanc et Medeea Marinescu, en compagnie de grandement à son succès. la réalisatrice du film, Isabelle Mergault (à gauche). juste; une belle réussite pour ce film qui parvient tout doucement à nous faire monter "Je vous trouve très beau", film français d'Isabelle les larmes aux yeux sans qu'on s'en rende compte vraiment. Mergault avec Michel Blanc, Medeea Marinescu, Wladimir Nombre de "franco-roumains" y reconnaîtront une partie de Yordanoff. Genre: Comédie dramatique - Durée: 1 h 37 mn leur histoire et, enfin et surtout, la Roumanie présentée échapAymé Pigrenet (Michel Blanc) vient de perdre sa femme, pe aux clichés, la réalisatrice en donnant une image à la fois électrocutée par une trayeuse électrique défectueuse. Il n'est authentique et délicate. pas submergé par le Quand aux deux principaux interprètes, ils sont chagrin, mais tout simplement prodigieux. On y découvre un anéanti par le travail Michel Blanc comme on a rarement eu l'occasion de qu'il va devoir rencontrer, profond et tendre en paysan bourru qui désormais effectuer apprend à s'aimer en découvrant l'amour qu'il n'avait tout seul à la ferme. jamais connu. Bien loin des pitreries de son Jean Très vite, Aymé Claude Dus des "Bronzés”, il réussit à nous toucher s'aperçoit qu'il ne au cœur de son regard d'âme perdu qui aime pour la peut pas s'en sortir : première fois, en râleur maladroit, jaloux et étonl'intendance de la nant de justesse et d'humanité. maison, le travail au poulailler, les bêtes à s'occuper… Il doit Medeea Marinescu meilleure impérativement trouver une autre femme. Mais dans ce villaactrice roumaine à l'âge de onze ans ! ge de la Drôme (Valence), la chose n'est pas facile. Aymé déciQuant à Medeea Marinescu, elle est délicieuse, pleine de de alors de faire appel à une agence matrimoniale. charme, de naturel et de sensibilité. L'actrice roumaine est Contrairement aux autres "clients ", il ne recherche pas lumineuse, "un soleil", et on comprend que tout le monde en l'âme sœur mais seulement une femme solide, bien plantée sur tombe amoureux. ses deux jambes, susceptible de le seconder. Comprenant qu'il Née à Bucarest le 27 mai 1974, Medeea Marinescu, 32 ans ne recherche pas l'affectif mais l'utile, la directrice de l'agence a suivi une double formation: musicale, dans un lycée de propose à Aymé de se rendre en Roumanie où il va rencontrer musique de Bucarest puis dans une école de jazz, mais surtout Elena (Medeea Marinescu). théâtrale, dans la prestigieuse Académie de Théâtre et de Elena lui plaît, elle a l'air robuste, en bonne santé et parFilms de Bucarest. Employée pendant 7 ans au théâtre faitement capable d'assurer un travail à la ferme. De son côté, National de la ville, elle s'est illustrée dans un grand nombre Elena est prête à suivre cet homme qui ne lui plaît pas pour que de pièces, en Roumanie mais aussi en Angleterre. sa fille de six ans ne connaisse pas la même vie difficile. 27 Les NOUVeLLes de ROUMANIe Société Andrei Pavel : l'arbre qui cache le désert du tennis roumain Sports BAIA MARE z CLUJ ARAD z z ORADEA ALBA I. z SIBIU z PITESTI CRAIOVA z z z BACAU z BRASOV CARANSEBES RESITA z z M. CIUC z z IASI VASLUI z z z TIMISOARA z SUCEAVA TARGU MURES GALATI z z BUZAU BUCAREST z z TULCEA CONSTANTA z Religion Les Roumains de Serbie de la vallée de Timoc auront un second lieu de culte 26 Depuis 1833, les Roumains de la vallée de Timoc, en Serbie du NordEst, voyaient leur existence culturelle et linguistique niée, dans une région qui a compté jusqu'à 87 églises et 17 monastères orthodoxes roumains. Le processus de libéralisation dans ce pays semble porter ses fruits puisque les autorités serbes ont accepté la construction d'une seconde église dans le village de Isacova, après celle reconstruite en 2003 à Malainita. L 'équipe roumaine de tennis s'est incliné 4-1 devant celle des Etats-Unis, en match qualificatif de la coupe Davis, à Bucarest, et devra disputer les barrages pour figurer dans le groupe mondial, l'an prochain. La seule satisfaction de cette rencontre réside dans la victoire du vétéran Andrei Pavel, 67ème mondial, sur Andy Roddick, n° 3 mondial, en cinq sets. Le tennis roumain peut se poser des questions sur le fait de voir son niveau végéter dans la médiocrité et se limiter aux seules performances de Pavel, alors qu'il avait atteint le sommet de la hiérarchie mondiale au début des années 70, disputant deux finales de la coupe Davis - toujours contre les USA - emmené par le redoutable duo de l'époque, Ilie Nastase-Ion Tiriac. Pourtant la Roumanie ne manque pas de jeunes talents mais, apparemment, elle ne sait pas les faire éclore. Ainsi en est-il de la paire Tecau-Mergea qui dominait voici trois ans le double du tennis mondial junior. En 2003, Florin Mergea s'était qualifié pour la finale junior de l'Open d'Australie, s'inclinant devant un Cypriote inconnu, Marcos Bagdadatis… lequel vient de disputer la finale du même tournoi, mais senior cette fois, battu par le n° 1 mondial Roger Federer. Cette même année 2003, Florea s'était qualifié pour les demi-finales de l'US Open junior et avait remporté le tournoi junior de Wimbledon. Depuis, Florea est rentré dans l'anonymat, disparaissant dès les premiers tours des tournois internationaux alors que des joueurs qu'il avait dominé auparavant, comme l'Australien Chris Guccionne, a qualifié son pays pour le tour suivant de la coupe Davis en venant à bout du redoutable Suisse Michaël Lammer. Il en est de même pour Horia Tecau ou pour Razvan Sabau, autre étoile éteinte, un des meilleurs juniors mondiaux, voici douze ou treize ans, qui avait également remporté Wimbledon. Les joueurs et leur entourage sont certainement fautifs pour ce manque de constance et ces espoirs déçus, mais la Fédération Roumaine de Tennis a aussi sa large part de responsabilité pour ne pas savoir encadrer le passage de ces jeunes vers le tennis adulte et ne pas manifester la volonté de les aider. Championnat d'Europe de football: la Roumanie retrouve les Pays-Bas sur son chemin Les leaders de la communauté roumaine de la vallée de Timoc, en Serbie, annoncent la bonne nouvelle. Les offices s'y dérouleront dans la langue maternelle roumaine et deux prêtres ont été consacrés récemment pour s'occuper de ces paroisses. L'église sera construite sur un terrain de deux hectares donné par une famille d'origine roumaine pour édifier un centre culturel, linguistique et religieux roumain. L a Roumanie aura les Pays-Bas comme principal adversaire, lors de la phase de qualification des prochains championnats d'Europe de football, qui doivent se dérouler en 2008 en Autriche et Suisse, et qui débutera dès septembre prochain. Pour se qualifier, les joueurs du sélectionneur Victor Piturca (notre photo) devront terminer au moins deuxième de leur groupe G qui comprend, outre les Hollandais, qui leur ont déjà barré la route de la coupe du monde en Allemagne: la Bulgarie, la Slovénie, l'Albanie, le Belarus, le Luxembourg. La dernière participation de la Roumanie à la phase finale du championnat d'Europe remonte à 2000, en Belgique-Hollande, et en coupe du monde, en 1998, en France. Les NOUVeLLes de ROUMANIe Cinéma Connaissance et découverte Une belle histoire franco-roumaine qui fait monter les larmes aux yeux… tout en faisant beaucoup rire "Je vous trouve très beau": une petite merveille de film à ne pas manquer P our son premier long métrage, Isabelle Mergault, La jeune comédienne a mené également de front une carscénariste, comédienne et partenaire de Laurent rière au cinéma, avec une vingtaine de films… jouant pour la Ruquier au théâtre, a réalisé une petite merveille première fois à l'âge de trois ans ! A six ans, elle interprétait le avec Je vous trouve très beau. Le succès est tel que, six rôle de Mirabela dans Maria Mirabela de Gopo, (réalisateur semaines après sa sortie, le film figure encore au top des primé par la palme d'or à Cannes en 1959), qui la fit connaître meilleures entrées en France avec deux millions de spectaet apprécié du grand public roumain. A onze ans elle recevait teurs, bien qu'il n'ait le prix de la meilleure actrice décernée par bénéficié que de la l'Association du Cinéma Roumain. Afin de la seule publicité du récompenser pour sa jeune mais riche carrière, elle "bouche à oreille". La a reçu en 2004 la prestigieuse "Etoile Roumaine" performance est d'aupour mérite culturel. Ne parlant pas français, elle a tant plus à saluer que la appris notre langue en trois mois, avant de tourner réalisatrice a écrit ellele film. Il lui reste à persévérer dans cette voie, tant même le scénario. elle a séduit le public français qui espère la revoir Le sujet remonte bientôt dans un autre rôle. jusqu'à la tradition d'un Il ne faut pas oublier non plus les seconds rôles cinéma pittoresque du film qui contribuent à son charme, dressant une cher à Pagnol. On rit, galerie de portraits croquignolets et contribuent on pleure, tant le ton est Michel Blanc et Medeea Marinescu, en compagnie de grandement à son succès. la réalisatrice du film, Isabelle Mergault (à gauche). juste; une belle réussite pour ce film qui parvient tout doucement à nous faire monter "Je vous trouve très beau", film français d'Isabelle les larmes aux yeux sans qu'on s'en rende compte vraiment. Mergault avec Michel Blanc, Medeea Marinescu, Wladimir Nombre de "franco-roumains" y reconnaîtront une partie de Yordanoff. Genre: Comédie dramatique - Durée: 1 h 37 mn leur histoire et, enfin et surtout, la Roumanie présentée échapAymé Pigrenet (Michel Blanc) vient de perdre sa femme, pe aux clichés, la réalisatrice en donnant une image à la fois électrocutée par une trayeuse électrique défectueuse. Il n'est authentique et délicate. pas submergé par le Quand aux deux principaux interprètes, ils sont chagrin, mais tout simplement prodigieux. On y découvre un anéanti par le travail Michel Blanc comme on a rarement eu l'occasion de qu'il va devoir rencontrer, profond et tendre en paysan bourru qui désormais effectuer apprend à s'aimer en découvrant l'amour qu'il n'avait tout seul à la ferme. jamais connu. Bien loin des pitreries de son Jean Très vite, Aymé Claude Dus des "Bronzés”, il réussit à nous toucher s'aperçoit qu'il ne au cœur de son regard d'âme perdu qui aime pour la peut pas s'en sortir : première fois, en râleur maladroit, jaloux et étonl'intendance de la nant de justesse et d'humanité. maison, le travail au poulailler, les bêtes à s'occuper… Il doit Medeea Marinescu meilleure impérativement trouver une autre femme. Mais dans ce villaactrice roumaine à l'âge de onze ans ! ge de la Drôme (Valence), la chose n'est pas facile. Aymé déciQuant à Medeea Marinescu, elle est délicieuse, pleine de de alors de faire appel à une agence matrimoniale. charme, de naturel et de sensibilité. L'actrice roumaine est Contrairement aux autres "clients ", il ne recherche pas lumineuse, "un soleil", et on comprend que tout le monde en l'âme sœur mais seulement une femme solide, bien plantée sur tombe amoureux. ses deux jambes, susceptible de le seconder. Comprenant qu'il Née à Bucarest le 27 mai 1974, Medeea Marinescu, 32 ans ne recherche pas l'affectif mais l'utile, la directrice de l'agence a suivi une double formation: musicale, dans un lycée de propose à Aymé de se rendre en Roumanie où il va rencontrer musique de Bucarest puis dans une école de jazz, mais surtout Elena (Medeea Marinescu). théâtrale, dans la prestigieuse Académie de Théâtre et de Elena lui plaît, elle a l'air robuste, en bonne santé et parFilms de Bucarest. Employée pendant 7 ans au théâtre faitement capable d'assurer un travail à la ferme. De son côté, National de la ville, elle s'est illustrée dans un grand nombre Elena est prête à suivre cet homme qui ne lui plaît pas pour que de pièces, en Roumanie mais aussi en Angleterre. sa fille de six ans ne connaisse pas la même vie difficile. 27 Les NOUVeLLes de ROUMANIe Connaissance et découverte Thêatre z BAIA MARE z z z z z ORADEA z z z SIBIU BICAZ BACAU z GALATI BRAILA z z z z TULCEA z CRAIOVA z BRASOV PITESTI BUCAREST CONSTANTA z Sibiu prépare 2007 28 Sibiu prépare dans la fièvre l'année 2007 qui va voir la ville devenir capitale européenne de la culture en même temps que sa partenaire Luxembourg. Son festival international de Théâtre, qui en était à sa douzième édition l'an passé sert, pendant dix jours fin mai, de répétition générale à l'évènement. L'association Sibiu 2007 s'est fixée comme objectif de changer l'image de la Roumanie en Europe. Les organisateurs veulent présenter un calendrier culturel exceptionnel mais doivent aussi résoudre de multiples problèmes d'infrastructures et de logistique. Ils ont déjà réalisé un guide du développement de la ville en mettant à contribution un millier de ses habitants pour déterminer les mauvais et les bons points qui la caractérise. L'offre des services publics sera ainsi améliorée. La grande place se trouve en pleine rénovation. La mairie vient d'être déplacée dans un grand bâtiment, riche en ornementations. Des statues sont en cours d'installation. Sibiu entend être prête à l'heure dite. Société Retour de Moldavie et Transnistrie L'intégrisme religieux n'épargne pas la Roumanie z TARGU MURES DEVA TIMISOARA IASI BORSA z ARAD BOTOSANI SUCEAVA z Orthodoxes en tête, les églises chrétiennes tentent de faire interdire la pièce "Les Evangélistes" Les NOUVeLLes de ROUMANIe L 'intégrisme et ses débordements n'affectent pas seulement le monde musulman, comme le montrent les réactions provoquées par une pièce de Théâtre en Roumanie et présentée à Iasi, ainsi que le rapporte le correspondant du "Monde" à Bucarest, Mirel Bran. La pièce a pour titre Les Evangélistes. Le metteur en scène, Benoît Vitse, Français, 58 ans, directeur du Théâtre Athénée d'Iasi, résume la situation: "Les églises veulent faire interdire le spectacle, explique-t-il. Les prêtres demandent à leurs fidèles de ne pas venir voir la pièce. Le maire déclare que c'est à cause de gens comme moi qu'il y a eu des émeutes dans les banlieues de France. Pendant les représentations, des étudiants en théologie ont prié à genoux devant l'entrée du théâtre, bougie à la main. J'ai reçu un couteau dans une enveloppe et je suis traité d'homosexuel, de pédophile, de juif et d'alcoolique. Vadim Tudor, le Le Pen roumain, affirme à la télévision qu'à cause de cette pièce il y a eu un tremblement de terre dans le département voisin." Toute la Roumanie tremble depuis la première de la pièce, en décembre 2005. Ecrits par Alina Mungiu-Pippidi (notre photo), 42 ans, ancienne médecin, journaliste et politologue, Les Evangélistes racontent l'histoire d'un Jésus sans transcendance, personnage un peu paumé dans un monde plutôt violent et qui voudrait ressusciter à travers ce que chacun pourrait faire en son nom. La bataille est délicate, car il se fait tuer par l'apôtre Paul, misogyne, colporteur et manipulateur. En dépit de leur énorme succès, Les Evangélistes n'ont été joués qu'à Iasi et une seule fois à Bucarest, dans la plus grande discrétion, afin de ne pas provoquer des manifestations. Après une pause, la pièce est donnée depuis le 18 janvier une fois par semaine aux risques et périls des acteurs et du metteur en scène. "Avant nous étions tous communistes, aujourd'hui nous sommes tous orthodoxes" "Je m'attendais à une réaction violente, mais j'aurais préféré que ma pièce ne soit pas le révélateur du primitivisme de notre société, témoigne Alina Mungiu-Pippidi. Nous vivons dans une société hypocrite comme au temps du dictateur Ceausescu. A l'époque, nous étions tous des communistes; aujourd'hui, nous sommes tous des orthodoxes. Notre christianisme de vitrine cache un incroyable retardement." Ce n'est pas un discours pour se faire aimer dans un pays à 87 % orthodoxe, où l'Eglise officielle est l'institution à laquelle les Roumains font le plus confiance. "Cette pièce est une insulte à notre Eglise", s'insurge Teoctist, le patriarche de l'Eglise orthodoxe de Roumanie, lequel est souvent apparu comme une marionnette de l'ancien régime, le servant apparemment sans montrer d'état d'âme particulier.. "C'est un blasphème contre notre vie et notre foi", ajoute l'archevêque catholique Ioan Robu. L'onde de choc du scandale est arrivée aux USA, où une association de Roumains a écrit à la présidence pour lui demander d'interdire ce spectacle au motif qu'il "rend la Roumanie vulnérable et menace la sécurité nationale". A quelques rares exceptions près, la presse roumaine s'est déchaînée contre l'auteur et le metteur en scène français a été déclaré persona non grata. "J'ai peur pour les jeunes acteurs, qui prennent beaucoup de risques, affirme Benoît Vitse. Je bénéficie d'une protection de la police." Les menaces sont loin d'être théoriques. Gigi Becali, patron d'un club de football, a appelé les supporteurs de son équipe, réputés pour leur violence, à donner une leçon aux acteurs. Quant à Alina Mungiu-Pippidi, elle veut continuer, sans gardes du corps, à bousculer la société. "Je ne suis pas théologienne, mais écrivaine. Je n'ai aucune intention de dénigrer Jésus. J'écris pour poser des questions, non pour y répondre. C'est ce que j'appelle une pièce de théâtre." 25 Les NOUVeLLes de ROUMANIe Société Religion z ORADEA z CLUJ ARAD z z z z IASI VASLUI z z Le "Postul mare" de Pâques est de plus en plus observé z TARGU MURES ROSIA M. TIMISOARA SUCEAVA SATU MARE z FAGARAS z SIBIU z z BRASOV GALATI BRAILA z z z TULCEA CRAIOVA z BUCAREST CONSTANTA z 182 jours de jeûne, soit la moitié de l'année 24 Jeûne, parfois noir, abstinence et continence pendant sept semaines L'Eglise orthodoxe a défini les périodes de jeûne, pendant lesquelles elle ne pratique également aucun mariage religieux, de la façon suivante: Jeûnes hebdomadaires réguliers: le mercredi et le vendredi Jeûnes d'un jour: le 5 janvier, Boboteaza (baptême du Christ), le 29 août (décapitation de Saint Jean Baptiste), le 14 septembre (élévation de la Sainte Croix) Jeûnes précédant les grandes fêtes religieuses: sept semaines avant Pâques, deux semaines avant l'Assomption (le 15 août), une période variable pour les saints apostoliques, et six semaines avant Noël. Au total, cela fait 182 jours… soit la moitié de l'année ! Réalisé à l'occasion de Pâques 2005, un sondage a permis d'en savoir plus sur les Roumains et les fêtes religieuses. 72 % sont allés à la messe de Pâques, les Transylvains étant les plus nombreux (72 %), la Dobroudja (Constantsa) se classant en queue (61 %). 17 % des paysans ont observé le "post", et seulement 12 % des habitants des villes. 97 % des provinciaux ont fabriqué leur "cozonac" (brioche) et peint leurs oeufs à la maison, ce qui n'est le cas que de 56 % des Bucarestois. Trois quarts des Moldaves préparent le repas de Pâques à la maison, les sarmale y trônant en roi sur la table, tout comme en Transylvanie, mais étant également servis dans toutes les régions. L'agneau pascal est le plus apprécié des Oltènes (Craiova), dans le Banat (Timisoara) et la région d'Oradea, étant servi huit fois sur dix. S ept semaines avant Pâques, les croyants orthodoxes commencent une période de jeune particulièrement rigoureuse appelée "Postul mare" ("Le grand jeûne"). Beaucoup plus strict que le jeûne des catholiques qui permet de consommer du poisson, des œufs et des produits laitiers, celui-ci interdit tout aliment de nature animale (viandes, charcuterie, œufs, lait, beurre, fromage, autres produits laitiers), proscrit le vin, l'huile… et les relations sexuelles. Les fidèles doivent entièrement se consacrer à la purification de leur corps, à la méditation, à la prière. Seuls sont dispensés de cette ascèse, les personnes âgées, les enfants, les malades, les voyageurs, les militaires et les détenus. Pendant pratiquement cinquante jours, les fidèles vont se partager entre les jours où ils ne mangeront et ne boiront absolument rien ("Postul negru", "Jeûne noir"), ceux où ils absorberont seulement une soupe et des légumes cuits, le soir, une entorse étant autorisée le samedi où ils peuvent consommer des aliments secs et un peu de vin, ainsi que les jours de fêtes religieuses, le 25 mars, jour de l'Annonce faite à Marie et le dimanche précédant Pâques, appelé "Florii" ("Rameaux"), correspondant à l'entrée de Jésus dans Jérusalem, où le poisson est permis. Le regain de pratique du "Post" s'est manifesté dès la "Révolution" de décembre 1989. Malgré tous les obstacles mis par les communistes, les Roumains restaient un peuple profondément religieux - on affirme même qu'il est le plus croyant d'Europe bien que seulement 18 % d'entre eux continuent à aller à la messe le dimanche. Mais son observance est surtout le fait des personnes âgées, des femmes, et des jeunes de moins de vingt cinq ans, la classe d'âge moyen ayant plutôt fait sien le matérialisme de l'époque communiste, considérant qu'il s'agit d'une coutume d'un autre temps, liée aux mœurs rurales. Un phénomène de mode joue aussi dans son observance, car, le "post" permet de suivre un régime diététique et végétarien recommandé par les nutritionnistes. Un créneau pour les magasins d'alimentation et les restaurants Les professions de l'alimentation ont compris qu'elles disposaient là d'un créneau et les rayons où figurent les préparations et produits spéciaux pour cette période se sont multipliés dans les magasins. On y propose des "cozonacii (brioches) de Post", confectionnées sans œufs, ni lait, de la charcuterie ou des sarmale à base de soja, graminée dont la consommation se développe beaucoup, des pâtés de champignons, de la mayonnaise, des fromages et des saucissons végétaux… De plus en plus de restaurants s'y mettent, avec des menus appropriés, où figurent en bonne place soupes de légumes et salades… même si l'endroit n'est pas très indiqué pour une période sensée être dévolue au recueillement. Etonnement, la vente des autres catégories de produits alimentaires (viandes, œufs…) ne baisse pas pendant cette période. Si elles sont les premières à observer le "Post", les maîtresses de maison, chargées généralement des courses, sont bien obligées de composer avec les exigences de leur mari et la santé de leurs enfants. Les NOUVeLLes de ROUMANIe Théâtre Connaissance et découverte La pièce de la jeune dramaturge Gianina Carbunariu reprise en France Trois Roumains dans le noir L e théâtre contemporain roumain existe et s'exporte même, comme l'a constaté Brigitte Salino, dans le Monde, dans une critique consacrée à "Stop the tempo", une pièce de Gianina Carbunariu, reprise au Théâtre-Studio d'Alfortville, dans la banlieue parisienne, fin 2005, et mise en scène par Christian Benedetti. "Et si on débranchait tout ? On l'a rêvé, Christian Benedetti le fait dans son beau théâtre-studio d'Alfortville: après avoir mis à fond la caisse une musique de boîte de nuit, il éteint tout, faisant éprouver le silence et l'obscurité pendant plusieurs minutes. C'est Stop the Tempo !, la pièce d'une jeune Roumaine de 28 ans que l'on découvre en France, Gianina Carbunariu. Une pièce qui cogne: désespérée et radicale. Soit donc trois jeunes gens, Maria, Paula et Rolando, dans la Roumanie d'aujourd'hui. Et, visiblement, il ne fait pas bon vivre dans l'ex-royaume du Père Ubu-Ceausescu, devenu celui de la consommation à outrance et de la dérégulation effrénée. De quoi péter les plombs: les trois jeunes gens de Stop the Tempo!, eux, décident de les faire sauter : terroristes Chanson S d'un nouveau genre, ils débranchent l'électricité de tous ces lieux qui font leur beurre sur le bonheur en plastique. Gianina Carbunariu (notre photo), la plume trempée dans le vitriol, érafle au passage cette injonction contemporaine qui veut que l'on soit toujours "cool", que l'on "s'éclate". La jeune dramaturge roumaine fait exploser les codes mêmes de la représentation théâtrale: sa pièce est destinée à être jouée dans le noir, ses trois interprètes seulement éclairés par des lampes torches. Et c'est ce que font Christian Benedetti et ses jeunes - et très justes - acteurs, donnant à la représentation une force et une étrangeté qui ramènent à un rôle très ancien du théâtre. Ce théâtre-là dit la rage et le désarroi d'une jeunesse, ici roumaine, aspirée par le vide, qui parvient pourtant, ici, à dépasser cette déréliction dans l'invention d'une forme de communauté. Il faut saluer la démarche de Christian Benedetti, qui s'obstine, avec peu de moyens, à offrir un théâtre engagé dans le contemporain, sans concessions, mais sans prendre de haut le spectateur". Stefan Hrusca ramène dans les maisons des Roumains expatriés le parfum sacré de leurs fêtes traditionnelles tefan Hrusca, l'un des plus grands chanteurs roumains actuels, a vu le jour au Maramures, le 8 décembre 1957. Jusqu'en 1981 il a été enseignant à Borsa, dans le même judet. C'est à cette époque qu'il est découvert par les promoteurs du mouvement artistique Cenaclul Flacara et change alors complètement de direction. En trois ans, de 1981 à 1984, le jeune artiste donne plus de mille concerts à travers le pays, son talent exceptionnel étant reconnu par l'attribution du Grand Prix de la musique folk et du Prix de Création musicale. Stefan Hrusca quitte Cenaclul Flacara en 1984 et poursuit sa carrière artistique comme chanteur solo ou, encore, en compagnie des chanteurs Vasile Seicaru et Victor Socaciu. Ses albums solo "Prière pour les parents" (1984), "Souhait aux amoureux" (1986), ainsi que celui sorti en collaboration avec Vasile Seicaru, intitulé "Voyageurs rêveurs" (1988) connaissent un succès retentissant. A partir de1990, au lendemain de la "Révolution", Stefan Hrusca se lance dans la redécouverte des cantiques de Noël qu'il interprète dans un style unique, original. Ses disques connaissent un succès énorme en Roumanie, il enregistre des records de vente avec les albums "Cantiques de Noël" (1990), "À la fin du monde" (1993), "Noël avec Hrusca" (2000), "Sainte nuit de Noël" (2001). Établi au Canada, proche de Toronto, depuis 1991, Stefan Hrusca fait le tour du monde et ses chansons résonnent partout dans les communautés roumaines. Mais le chanteur retourne chaque année en Roumanie où il est toujours aussi populaire. D'ailleurs le Disque d'or remis par la maison de disque Electrecord ainsi que le Prix de l'Union des Artistes en témoignent. Sa conversion aux chants religieux ne l'ont cependant pas fait abandonner pour autant le style folk. En 1996, Stefan Hrusca a sorti l'album folk "Amours passés" et organisé le festival de musique folk "Mesterul Manole" ("Maître Manole", célèbre légende roumaine), en qualité de directeur artistique. En 2001, un nouvel album "20 ans" compilait quelques uns des grands succès de sa carrière, comme "Feuilles", "Prière pour les parents", "Un arbre fleuri", "Tes yeux". La musique de Stefan Hrusca touche profondément l'âme roumaine partout dans le monde et ramène dans les maisons des Roumains expatriés le parfum sacré de leurs fêtes traditionnelles. 29 Les NOUVeLLes de ROUMANIe Connaissance et découverte Musique SUCEAVA z z ORADEA z ARAD BAIA MARE z IASI z TARGU MURES CLUJ BACAU z z z z z z z SIBIU TIMISOARA BRASOV z SINAIA ORAVITA PITESTI CRAIOVA z GALATI BRAILA z z z TULCEA z BUCAREST CONSTANTA z Humour Histoires vraies "Traître" à la classe ouvrière… qui mange des huîtres 30 Adrian s'est mis rapidement aux huîtres quand il est arrivé sur la côte Atlantique, s'y installant. Jusque là, il n'en avait vu que dans des livres. En Roumanie, elles passaient pour un luxe d'Occidentaux et on imaginait que seul Ceausescu en mangeait. Invitant un jour un ami français à sa table, celui-ci eut la surprise de le voir donner systématiquement à son chat les plus belles, d'un vert vif rappelant et sentant l'océan. S'en étonnant, il s'entendit dire: "Mais tu ne vois pas qu'elles sont pourries". Son père venu lui rendre visite dans sa jeunesse fervent communiste, ce dont il était revenu tout en gardant sa conscience ouvrière - ne se fit pas prier pour goûter avec beaucoup d'appétit ce mets que l'on disait réservé aux capitalistes… ce qui lui valut le regard sombre de sa femme et cette flèche terrible "Traître!". Au cours de son séjour, le vieil homme se fit très bien à la société occidentale. A la grande surprise de son fils, il n'hésitait pas à aller seul acheter le pain, bien que ne parlant pas un mot de français. Un jour, il décida de se rendre à la pharmacie, ce qui était plus compliqué, et refusa la proposition d'Adrian de l'accompagner. Il revint en effet avec les médicaments dont il avait besoin et, tout fier, lança à son fils, stupéfait : "tu oublies qu'il n'y a pas que le roumain que je parle, il y a aussi le hongrois ". Bien sûr, en Bretagne, çà allait de soi… Trois compositeurs roumains précurseurs de la S i vous demandez à un mélomane, même éclairé, de vous citer un compositeur romantique roumain, il y a fort à parier qu'il se grattera le crâne et finira par avouer son ignorance. S'il est vrai que les œuvres de jeunesse du grand George Enescu sont empreintes d'un romantisme proche de Brahms, il n'est cependant pas l'initiateur du romantisme national de son pays natal. Ce mouvement est en effet incarné par des compositeurs aujourd'hui méconnus mais ayant joué un rôle non négligeable dans l'éveil de la nation musicale roumaine. Alain Chotil-Fani, mélomane passionné de musique roumaine - il lui consacre un remarquable site Internet, www.souvenirs des carpates - se penche sur la destinée et la carrière de trois d'entre-eux. George Stephanescu (1843 - 1925): l'éveil du nationalisme musical roumain George Stephanescu fait partie de la prolifique génération de romantiques nés dans les années 1840, comme Tchaikovsky, Dvorak, Saint-Saëns ou Bizet. Professeur de chant, chef lyrique, compositeur d'innombrables œuvres pour la scène, il a poursuivi toute sa vie l'ambition de faire de l'Opéra de Bucarest un théâtre de renommée internationale. Infatigable promoteur de la musique de son pays - comme le sera, un demi-siècle plus tard, George Enescu - George Stephanescu, à l'instar du composteur Bedrich Smetana en Bohême, consacre toute son existence à l'éveil du nationalisme musical roumain. Paradoxalement, l'une des seules œuvres aujourd'hui accessibles au disque de Stephanescu est une symphonie de jeunesse en la majeur. Cette pièce plaisante, d'un jeune homme de 26 ans, alors étudiant au Conservatoire de Paris, a connu le même sort que d'autres de ses prestigieuses consœurs (les premières symphonies de Bizet, Dvorak ou Bruckner) puisqu'elle ne fut jamais jouée du vivant de son auteur. Elle ne sera créée qu'en 1959, pour la radio roumaine. Classiquement en quatre mouvements, la Symphonie de Stephanescu, résolument optimiste, respire une certaine joie de vivre et utilise déjà des éléments folkloriques roumains dans son final. Les deux mouvements médians - le Larghetto, en forme de lied, et surtout le bondissant Scherzo Allegretto assai - sont cependant plus intéressants, construits avec un métier déjà sûr. Cette symphonie, d'une manière générale, ne cache pas ses influences multiples, de Ludwig van Beethoven, Franz Schubert et Félix Mendelssohn. Elle souffre cependant et regrettablement, de la faiblesse de son ultime mouvement, ce qui peut expliquer la rareté au disque mais aussi dans les salles de concert de la "première symphonie roumaine". Eduard Caudella (1841 - 1924): mentor du jeune George Enescu Exact contemporain de George Stephanescu, Eduard Caudella jouit encore de nos jours d'une excellent réputation de pédagogue. Professeur respecté au conservatoire de Iasi, ville située à l'est de la Roumanie et renommée pour sa dimension culturelle, Caudella fut aussi un musicien accompli, virtuose du violon (il a étudié avec Henri Vieuxtemps), chef d'orchestre et critique musical. Né dans une famille de musiciens - son grand-père était déjà compositeur et professeur de musique, son père violoncelliste et l'un de ses cousins chanteur à l'Opéra Impérial de Vienne - Eduard Caudella a composé de nombreuses œuvres musicales dans de multiples genres. Particulièrement attaché à sa terre natale, où il s'est établi définitivement après ses tournées européennes, Caudella a mis en valeur la richesse musicale populaire roumaine dans ses œuvres classiques. Les NOUVeLLes de ROUMANIe Santé Société Les faux-dentistes italiens demandent qu'on leur rembourse les dessous de table versés L 'affaire avait fait grand bruit en 2000 et causé le plus grand scandale jamais enregistré jusqu'alors dans l'enseignement roumain, mettant en relief ses dérives qui n'ont fait que s'accentuer depuis sous l'effet d'une corruption galopante et d'une autonomie des universités permettant tous les abus. 63 ressortissants italiens avaient obtenu leurs faux diplômes de dentistes auprès de l'Université de Médecine et de Pharmacie de Iasi, entre 1997 et 2000, certains ayant ensuite exercé comme stomatologues en Roumanie. C'est lorsque plusieurs de ces pseudo-diplômés avaient demandé la reconnaissance de leurs titres que l'ambassade d'Italie en Roumanie avait découvert le pot aux roses. Bakchich à l'appui, les " étudiants " italiens avaient obtenu des autorités universitaires de Iasi d'y passer leur examen de licence, après avoir suivi les cours d'une université italienne non accréditée et avoir été inscrits à l'Université Privée Ecologique de Bucarest, grâce à de faux titres, comme le baccalauréat, leur en autorisant l'accès. Le ministre de l'Education nationale de l'époque avait décidé de révoquer les recteurs en cause et d'annuler les diplômes. Estimant qu'ils ont été spoliés par cette décision qui les empêche d'exercer, 24 de ces faux-dentistes ont entamé un procès. Déboutés, cinq d'entre-eux ont fait appel, réclamant chacun 50 000 € de dédommagements pour le remboursement de leurs frais d'études - ils ont passé en tout et pour tout quinze jours à Iasi - les voyages effectués entre l'Italie et la Roumanie… et les pourboires versés! Les universités concernées, et complices à l'époque des faits, s'en renvoient chacune la responsabilité. En 2000, le scandale ne s'était pas arrêté là. Le Conseil National d'Evaluation Académique et d'Accréditation (CNEAA) avait également démarré une enquête sur des titres de doctorats obtenus par des étudiants israéliens. Une firme de ce pays avait proposé à l'Université de Bucarest un "arrangement" pour organiser des programmes dans ce sens, ce qu'elle avait refusé… à la surprise du demandeur qui lui avait indiqué que cela se pratiquait avec d'autres universités roumaines. Certains diplômes avaient été délivrés en échange de sommes pouvant atteindre 50 000 €. Les Roumains vont se faire soigner mieux et moins cher en Hongrie C e ne sont pas seulement les commerces, mieux achalandés et moins chers, qui attirent les Roumains en Hongrie. Pour des raisons équivalentes, ceux-ci se rendent de plus en plus fréquemment dans le pays voisin pour s'y faire soigner, les hôpitaux de Sezged et Budapest ayant la réputation de prodiguer une médecine de bien meilleure qualité, dans des établissements propres et pour un coût moins élevé. Les habitants du Banat (Timisoara et Arad) sont devenus les patients étrangers les plus nombreux des cliniques de Szeged, ville située à moins d'une demiheure de la frontière. Ils sont attirés par la réputation des médecins locaux qui excellent dans les domaines de l'orthopédie, de l'ophtalmologie et de la gynécologie, entreprenant notamment des opérations qui ne s'effectuent pas encore en Roumanie. Autre avantage, les patients sont assurés d'être opérés dans la semaine alors que chez eux ils doivent attendre des mois et parfois jusqu'à un an. Ils trouvent également des établissements où la propreté est une règle absolue. Les murs sont fraîchement repeints, le carrelage régulièrement lavé, les toilettes impeccables, le mobilier neuf. Il est interdit de fumer, contrairement à la Roumanie, règle qui s'applique aussi aux médecins. Le coût d'une hospitalisation est l'autre élément décisif. En Roumanie, théoriquement, les soins sont gratuits pour les assurés… mais il en va tout autrement dans la réalité. Il faut sans arrêt rajouter des bakchichs… au chirurgien, à l'anesthésiste, au médecin de garde, aux infirmières, aux femmes de service, pour avoir un examen, pour acheter ses médicaments, pour utiliser du matériel moderne, pour se faire livrer de quoi manger à sa faim… Dans le meilleur des cas, au total cela représentera une centaine d'euros, mais ce coût peut se multiplier par dix, voire plus, les familles se mobilisant pour trouver les sommes nécessaires. Bakchich légalisé mais limité Ainsi, pour l'implantation d'une valve cardiaque on doit, au minimum, verser 1000 € au chirurgien, auxquels il faudra ajouter plusieurs centaines d'autres pour le matériel, 100 € pour l'anesthésiste et ainsi de suite. Les per- sonnels médicaux justifient ces pourboires par les salaires misérables qu'ils reçoivent. En Hongrie, la même intervention coûtera 1100 €, tout compris ; à savoir 1000 € pour l'opération (prise en charge pour les Hongrois)… et 100 € maximum de bakchich, à l'initiative du malade. Ce pays, reconnaissant qu'il ne pouvait pas payer un juste prix ses médecins et autres personnels a légalisé le système des pourboires, dans les années 50, tout en le réglementant. S'il est content de l'intervention, le patient peut manifester sa gratitude en versant une somme qui ne doit pas dépasser au total 100 €; ce geste n'est pas obligatoire, mais en général pratiqué, et ne peut en aucun cas être fait avant l'opération, seulement à la fin de l'hospitalisation. Certes les médecins hongrois gagnent nettement plus que leurs confrères roumains (1000 € au lieu de 200), lesquels sont méprisés par un système de santé corrompu, où l'argent des assurés est détourné, mais le résultat est là: les Roumains préfèrent encore payer leurs soins plutôt que d’avoir recours à une médecine soi-disant gratuite. Encore faut-il en avoir les moyens. 23 Les NOUVeLLes de ROUMANIe Société Santé SUCEAVA z z ORADEA z ARAD z z z IASI z z z SIBIU BRASOV GALATI PITESTI CRAIOVA BACAU z z z z TARGU MURES CLUJ DEVA TIMISOARA BAIA MARE z BUZAU BUCAREST z z z TULCEA CONSTANTA z Entrée en vigueur d'un Traité protégeant la région des Carpates 22 La Convention des Carpates, signée en mai 2003 pour protéger l'environnement dans cette région est-européenne, est entrée en vigueur début janvier, a annoncé l'ONU dans un communiqué à Vienne. La Hongrie a en effet ratifié, après la République tchèque, la Slovaquie et l'Ukraine ce traité devant protéger la faune et la flore locales, exceptionnelles en Europe, selon un communiqué du Programme des Nations unies pour l'environnement (PNUE). Hommes d'affaires allemands et italiens, mais aussi Roumains de l'étranger viennent s'y faire soigner Tourisme dentaire dans les cliniques spécialisées de Timisoara L es cliniques de Timisoara, spécialisées dans les traitements dentaires, ont été débordées en fin d'année. Nombre de Roumains fixés à l'étranger et rentrés à l'occasion des fêtes, en ont profité pour se faire soigner et un rush du même genre est attendu à l'occasion de Pâques. Dans ces établissements souvent neufs, disposant de matériel moderne et de personnel compétent, les prix sont de quatre à cinq fois inférieurs à ceux pratiqués en Occident, à qualité de soins égale. Ainsi un plombage y revient à 20 € au lieu de 100 € en Allemagne, une dent en céramique et sa pose à 80 € au lieu de 400 €, un implant dentaire à 500 € (2500 €), un traitement d'orthodontie à 500-1000 € (4000 €). Autre avantage: les délais. Le plombage se fait immédiatement, en une séance, couronnes et prothèses sont réalisées en moins d'une semaine. Les hommes d'affaires italiens et allemands, nombreux dans la région, ont vite compris l'intérêt de ces cliniques stomatologiques qu'ils fréquentent de plus en plus et qui ont doté leurs salles d'attente d'ordinateurs avec Internet. On trouve leurs coordonnées et tout le descriptif de leurs services, avec tarifs, sur leurs sites Internet, à partir desquels on peut programmer les interventions. La Roumanie emprunte ainsi la voie du tourisme dentaire, initiée voici environ cinq ans en Hongrie, mais en proposant des prix plus avantageux… qui baissent encore si l'on va à l'intérieur du pays. Un de nos lecteurs s'est ainsi fait poser à Târgu Jiu cinq prothèses en céramique, de la meilleur qualité, pour 300 €, somme comprenant d'autres soins, le tout en dix jours, appréciant particulièrement l'accueil, la "douceur" de l'intervention et le professionnalisme manifesté. Il faut préciser qu'il avait choisi sa clinique à l'avance, sur recommandation d'amis roumains. En France, le devis se montait à 4000 €, dont moins de 500 remboursés. Les lunettes aussi La convention couvre aussi le territoire de trois autres pays, Roumanie, Pologne et Serbie-Monténégro. La région des Carpates contient la plus grande réserve de forêts à l'état sauvage d'Europe et l'on y trouve des animaux devenus rares tels que l'ours brun, le loup, le bison, le lynx et l'aigle. Le programme de travail sera décidé lors d'une première rencontre des pays membres de la Convention en juin 2006. Une agence de tourisme de Bucarest se spécialise d'ailleurs dans le tourisme médical, proposant des soins esthétiques (liposuccion, seins au silicone…), traitements gériatriques, interventions ophtalmologiques, stomatologiques. Elle se charge de la réservation des billets d'avion, du transfert depuis l'aéroport, de l'hébergement, du programme d'intervention médicale… et des excursions touristiques pour meubler les moments libres. Autre opportunité très intéressante en Roumanie: l'opticien. Pour 40 €, on vous fabrique une paire de lunettes avec des verres normaux, en un quart d'heure, après avoir mesuré sur place votre vue… et sans avoir à prendre un rendez-vous chez le spécialiste six mois à l'avance. Les montures sont très présentables, mais il ne faut pas bien sûr choisir celles portant des griffes étrangères. Aux prix pratiqués en France, on comprend pourquoi Afflelou offre si généreusement sa seconde paire gratuitement ! D 2000 patients ont besoin d'une greffe 'après le président de l'Agence Nationale pour les transplantations, deux millepatients sont inscrits sur des listes d'attente en vue d'une greffe du cœur, du foie ou des reins. Victor Zota souhaite la mise en place d'un registre unifié, respectant les proto- coles internationaux pour la sélection des patients, copié sur le modèle britannique où les listes d'attente sont scrupuleusement respectées, ce qui évite de faire la queue chez les médecins. Un des problèmes rencontrés réside dans le financement des interventions, les hôpitaux manquant de fonds. Les NOUVeLLes de ROUMANIe Connaissance et découverte romantiques musique classique de leur pays Quand en 1888 l'on lui présenta ce jeune garçon si doué nommé George Enescu, Eduard Caudella eut la clairvoyance de recommander le jeune prodige à Vienne, estimant qu'il n'aurait rien à lui apprendre. Enescu et Caudella restèrent en contact dorénavant, manifestant une sincère et désintéressée estime réciproque. Caudella composa pour Enescu son premier Concerto pour violon en 1915; Enescu dédia à son ancien professeur ses Impressions d'Enfance pour violon et piano. En musicologue cultivé, Eduard Caudella n'ignorait pas les Ecoles Nationales qui fleurissaient en Europe. Son œuvre, influencée Ciprian Porumbescu par le premier romantisme, révèle un métier accompli et influencé par le folklore, mais guère novateur. Il est difficile de croire que ses dernières compositions, d'un romantisme très classique, sont contemporaines de la maturité créatrice de compositeurs comme Bartok, Schönberg ou Stravinsky. Cela mis à part, le charme indéniable de sa musique symphonique, les rythmes de danses populaires bien proches, à bien des égards, des Rhapsodies roumaines d'Enescu, font des partitions de Caudella autant d'œuvres qui méritent l'attention des mélomanes et des interprètes. Ciprian Porumbescu (1853 - 1883): instrumentalisé par le régime communiste Alors que Caudella et Stephanescu vécurent bien au-delà du XIXème siècle et atteignirent tous deux les 80 ans, Ciprian Porumbescu satisfit davantage aux stéréotypes romantiques en disparaissant, tuberculeux, dans sa trentième année, ce qui rend son image mythique. Cet éternel jeune homme, farouche défenseur de la patrie roumaine, nationaliste exacerbé aux déclarations enflammées, dont les excès le menèrent en prison, n'a cependant laissé qu'une poignée d'œuvres, agréables mais sans grande profondeur. Ainsi son opérette Crai Nou (la nouvelle lune), exploite avec bonheur des rythmes de Transylvanie. Sa rhapsodie roumaine pour piano suit sans surprise le modèle lizstien, encore que la version orchestrale (qui n'est pas de la plume de Porumbescu) trouve davantage matière à secouer les auditeurs, même non patriotes, à grands renforts de grosse caisse et de cymbales. Quant à la Ballade pour violon et piano, elle est depuis longtemps adoptée par les Roumains en raison de sa ferveur tranquille. Il est aujourd'hui étonnant de constater à quel point le régime communiste a essayé de faire de Porumbescu un symbole national. En l'absence de grand compositeur national romantique, le pouvoir communiste roumain a visiblement tenté de convaincre qu'en Porumbescu, la Roumanie possédait l'équivalent d'un Liszt ou d'un Dvorak. La visite du musée Porumbescu, dans la campagne moldave, a quelque chose de déconcertant. Rien n'y a changé depuis la fin de Ceausescu. Des articles d'anciens musicologues officiels fustigent toujours "l'ancien régime bourgeois" qui a tenté de minimiser l'apport de Porumbescu à l'art romantique. Une statue sévère, à l'entrée du musée, nous rappelle que ce jeune homme, mort avant d'avoir pu aborder les grandes formes musicales, était avant tout un nationaliste en bois brut, tout entier dévoué à l'amour de son pays qui lui doit, d'ailleurs, des hymnes patriotiques. Alain Chotil-Fani Sigismund Toduta (1908-1991), est un compositeur malheureusement méconnu, même dans son pays Inspiré par la musique sacrée, Bach et le folklore roumain A na Fodor n'est pas seulement la directrice du Lycée de musique et d'arts plastiques Sigismund Toduta (prononcez Todutsa) de Deva mais elle est aussi une fervente adepte de la musique et de la personnalité de celui qui porte le nom de "son" lycée. Pour avoir fréquenté le conservatoire de musique de Cluj en Transylvanie, où officia comme professeur Sigismund Toduta durant de longues années après-guerre (1946-1973), elle garde un souvenir ému et reconnaissant pour ce maître très digne et très exigeant, pour cette haute person- nalité de la culture roumaine du XXème siècle. En l'interviewant, Bernard Camboulives est parti à la découverte de ce grand musicien roumain méconnu. Premier docteur roumain en musicologie Bernard Camboulives: Qui était Sigismund Toduta que nous ne connaissons pas du tout en France ? Ana Fodor: Malheureusement, il ne l'est pas beaucoup non plus en Roumanie même car il n'a pas fait de démarches par- ticulières pour accéder à la célébrité. Il a reçu de nombreux prix mais ses enregistrements ne se trouvent pas facilement aujourd'hui bien qu'il y ait désormais une Fondation Toduta à Cluj qui possède un site Internet. Il faut dire aussi que sa musique est très élaborée et très exigeante. Je situe l'action et l'apport de Toduta à la musique roumaine sur trois plans. Il fut tout à la fois un créateur de musique vocale symphonique, un musicologue passionné et un pédagogue créateur d'une école de musicologues de très haut niveau. (Lire page suivante) 31 Les NOUVeLLes de ROUMANIe Connaissance et découverte Mise en musique des grands mythes de la cuture roumaine SUCEAVA BAIA MARE z z z ORADEA ARAD CLUJ z z z IASI TARGU MURES z BICAZ z z z z BACAU DEVA z TIMISOARA BRASOV PITESTI CRAIOVA z z z BRAILA PLOIESTI BUCAREST z z TULCEA CONSTANTA z Un concours à son nom 32 B.C: Depuis quand le lycée de Deva porte-t-il ce nom ? A.F: Depuis 1997 mais il existe depuis 1958. C'est un établissement scolaire qui regroupe des élèves de la maternelle au baccalauréat. Nous avons actuellement plus de 800 élèves et quelque 40 professeurs de musique. Mais nous enseignons également les Beaux-arts et l'architecture. Les élèves font un choix dès l'âge de 6-7 ans mais cette option n'est évidemment pas définitive. Elle les occupe de 5 à 13 heures par semaine selon le niveau et l'engagement de l'élève. Le temps hebdomadaire d'enseignement reste à 32-33 heures. Après obtention du baccalauréat, l'élève peut poursuivre son option à la faculté ou changer totalement de voie (l'économie, par exemple). Nous souhaitons fortement ouvrir le lycée sur l'extérieur. Ainsi, nous avons déjà été en contact avec des lycéens et des groupes musicaux en Allemagne, en Slovaquie. Nous avons également des contacts en France (Strasbourg, Paris, Belfort...) par le biais de concours, de festivals, etc. Enfin, chaque année nous essayons de mettre nous-mêmes en place un concours international en hommage à Sigismund Toduta. Les candidats sont notamment invités durant leur séjour à Deva à visiter la commune où est né notre musicien et où il est également enterré. Ce lieu se trouve à Simeria tout près de Deva. Propos recueillis par Bernard Camboulives Site Internet : www.sigismundtoduta.org Comme créateur, Sigismund Toduta s'est inspiré de trois sources musicales. La première lui vient d'Italie où il a terminé avant-guerre (1936-1938) ses études à l'Institut pontifical de musique sacrée de Rome. Il sera d'ailleurs le premier docteur roumain en musicologie. Là, tout en perfectionnant son apprentissage du piano et de la composition initié à Cluj, il côtoie l'orgue et la musique religieuse. Pour ce qui est de l'art vocal, il s'initie à la musique de Palestrina qui laissera une trace profonde en lui. Bach est la deuxième grande source à l'œuvre dans sa création. Sur la musique du Cantor de Leipzig, il effectue des recherches importantes afin d'en dégager les formes musicales du baroque (il publie à ce sujet trois volumes entre 1969 et 1978). Enfin, sa troisième source musicale réside bien entendu dans la musique traditionnelle roumaine. Il s'initie Sigismund Toduta directement sur le terrain au folklore roumain et utilise les thèmes roumains pour ses compositions personnelles. Les grands mythes de la culture roumaine sont ainsi mis en musique par Toduta. Maître Manole fait l'objet d'un opéra oratorio tout comme Mioritsa. La poésie de nos grands poètes Eminescu, Blaga, Blandiana est également mise en musique et donne des lieder de toute beauté. Mais Sigismund Toduta ne s'en tient pas à notre seule poésie roumaine. Il compose également des lieder sur des textes de Baudelaire, de Rilke, etc. Un musicologue acharné et un grand pédagogue B.C: Ses sources et son inspiration poétique, tout comme d'ailleurs sa formation, ne sont donc pas seulement roumaines mais européennes ? A.F: Toduta a incontestablement assimilé les plus importantes techniques de musique occidentale et sa musique puise autant dans le répertoire textuel religieux que profane... Sigismund Toduta fut aussi un musicologue acharné. Ses travaux, études, conférences sont innombrables. En plus de livres sur la musique de Bach, il a effectué des recherches sur manuscrits religieux. Il a également écrit des articles sur Haendel, sur Georges Enesco, sur Claude Debussy. Il n'a en rien laissé la musique contemporaine à l'écart puisqu'il a étudié également la musique d'Anton Webern. Pour ce qui est de son apport de pédagogue, je le considère personnellement comme très important. Je vous ai déjà dit quel était son niveau d'exigence. Certains de ses élèves sont devenus des musiciens de renom comme, par exemple, le hongrois Gyorgy Orban ou le roumain Hans Peter Turk. Pendant de très longues années Sigismund Toduta a enseigné au Conservatoire de musique de Cluj la théorie, le solfège, la dictée, le contrepoint, la fugue et la composition. Après quoi, peu avant sa retraite survenue en 1973, il a dirigé la Philharmonique de Cluj (1971-1974). A Deva, 800 élèves fréquentent le lycée artistique portant son nom B.C: Votre émotion en évoquant ce personnage est tout à fait palpable. L'avezvous rencontré personnellement ? A.F: - Je n'ai pas été son élève car il était déjà en retraite lorsque j'ai fait mes études de piano. Mais je le voyais tout de même fréquemment car il était resté professeur consultant au Conservatoire. Je l'ai toutefois abordé directement peu après la révolution roumaine et peu avant sa mort. Je lui ai rendu visite chez lui dans le but de faire un film pour la télévision roumaine. Le film a bien été réalisé mais il n'est jamais passé à la télé. Il a disparu dans la mouvance de l'époque. Je garde de Sigismund Toduta l'image d'un homme très digne, à la fois d'une grande humanité et d’une grande simplicité mais toujours rigoureux. C'est tout cet ensemble de qualités que je souhaite voir appliqué dans l'établissement que j'ai l'honneur de diriger actuellement. Les NOUVeLLes de ROUMANIe Société à des tests vétérinaires pratiqués par de jeunes médecins roumains nantais déclenche l’alerte fin janvier 1990 D'abord sceptique, Paris envoie un spécialiste qui confirme les 600 cas décelés "Médecins du monde", venu spécialement à Bucarest a dévoilé, au cours d'une conférence de presse l'existence de l'épidémie, ç'a été l'horreur. Les chaînes américaines, CNN en H.G.: Quelle a été la réaction de vos confrères de tête, japonaises, etc, se sont déchaînées. Pourtant le même "Médecins du monde", à Paris, problème existait ailleurs, dans la lorsque vous les avez alertés? banlieue de Moscou, par exemple. J.G.B: Ils n'y ont pas cru. D'ailleurs les Russes, très inté"Qu'est-ce que c'est çà ? C'est ressés, ont envoyé des équipes encore un bobard. Ce chirurgien pour venir voir comment çà se n'y connaît rien". A leur décharpassait… mais personne n'en a ge, je dirais qu'on était en plein parlé. scandale de la fausse rumeur des Ce fut le début de l'engrenage charniers de Timisoara. Tout ce qui fait cette image de la qui venait de Roumanie était sujet Roumanie aujourd'hui: les charà caution. Mais j'ai insisté et niers de Timisoara, l'exécution des j'avais à faire quand même à des Ceaucescu, le SIDA des enfants, gens sérieux. Paris a donc décidé les orphelinats. Sous le déferled'envoyer sur place un virologue ment médiatique, la réaction a été de haute volée, Dublanchet. affective: c'était la Roumanie Pendant quatre jours, celui-ci "mauvaise mère". a testé la chaîne d'examen d'Elisa, Je dois dire que j'en suis encone relevant aucune erreur méthoJean-Gabriel Barbin a découvert l’épidémie de SIDA re meurtri et que cela me tarabuspédiatrique, fin janvier 1990, se heurtant au scepticisme. te, comme si j'y avais une part de dologique, ce qui commença déjà fortement à l'inquiéter. Puis, il est retourné à Paris, emportant responsabilité. les 600 sérums qui avaient servi aux tests pour les analyser dans son laboratoire. Son verdict est tombé quelques jours plus Principalement à Bucarest et Constantsa tard: 599 tests étaient positifs, un douteux. Il existait bien une épidémie de SIDA pédiatrique en Roumanie. H.G.: D'où vient cette épidémie ? J.G.B.: Il y a plusieurs facteurs. Il n'existait aucun contrôH.G.: Les autorités roumaines étaient-elles au courant ? le des sangs transfusés. Faute de moyens, le manque d'hygièJ.G.B: Non, elles ont découvert le problème quand j'ai ne était total, avec réutilisation des seringues, des pansements. alerté le Premier ministre Petre Roman, lorsque l'épidémie a Et puis, dans le cas des enfants, le recours à une pratiques antéété avérée, fin mars. Même Ceausescu n'était sûrement pas au diluvienne, utilisée en Afrique ou dans la France des années courant. Elles n'y étaient pour rien, mais je les ai sérieusement 30, la micro-transfusion pour ceux qui étaient faibles. Les mises en garde sur le déferlement médiatique qui allait suivre. risques étaient multipliés, car, avec un même donneur, on en On était en pleine période électorale. Les première élections faisait plusieurs et, en outre, on les répétait souvent. Par ailleurs, on contaminait le matériel. libres du pays devaient avoir lieu quelques semaines plus tard et Bucarest était redevenu le centre d'attraction du monde H.G.: Quelle a été la riposte ? entier. Tous les jours débarquaient des équipes de télévision, J.G.B.: Tout d'abord, on a procédé à un dépistage dans des fournées de journalistes. toutes les institutions (camin, orphelinats), ce qui a permis de L'enfer médiatique constater que le gros des problèmes se situait à Bucarest et à Constantsa. A Bucarest, parce qu'il y avait beaucoup d'étuH.G.: Quelle a été l'attitude des médias ? diants africains et qu'une des souches du VIH la plus répandue J.G.B.: Le délire; ç'à été l'enfer. J'ai tenté de prendre les que l'on ait trouvée est celle du virus présent en Afrique. A devants, en prévenant quelques journalistes amis d'Antenne 2 Constantsa, parce que c'est un port, avec ses marins qui vienet de l'AFP. "Les gars, j'ai un truc énorme à vous annoncer… nent du monde entier et ses prostituées. mais pédale douce, cela peut faire de gros dégâts". Ils ont eu Ensuite, il a fallu former le personnel qui avait une peur panique du SIDA, penser à la scolarisation de tous ces enfants en priorité l'information et ont été “réglo", ne trahissant pas qui grandissaient malgré les progrès de la maladie, et vaincre ma confiance, rendant compte de ce terrible problème sans les réticences des enseignants. Je dois dire que l'accompagnefard mais avec sobriété. D'eux-mêmes, ils n'ont pas publié ou ment et l'aide apportés par les organismes internationaux a été diffusé les photos et les images les plus affreuses, qui sont touénorme. jours dans leurs tiroirs. Propos recueillis par Henri Gillet Par contre, dès que Jacques Lebas, le président de 21 Les NOUVeLLes de ROUMANIe Société Santé SATU MARE z SUCEAVA z IASI z TARGU MURES ARAD BACAU z z z VASLUI z z z TIMISOARA z HUNEDOARA z SLATINA z z CRAIOVA BRAILA z BRASOV PITESTI RESITA z z TULCEA z TARGOVISTE z SLOBOZIA BUCAREST z CONSTANTA Les Roumains ont mal au foie 20 Les premiers cas ont été détectés grâce Peinture SIDA pédiatrique: un chirurgien z ORADEA Les NOUVeLLes de ROUMANIe Les maladies du foie sont une des affections qui ont le triste privilège de placer les Roumains en tête, en Europe, avec la tuberculose, les maladies du cœur et le Sida des enfants. On estime à environ 10 % de la population les personnes touchées par l'hépatite B ou C, la fréquence de la première étant particulièrement élevée chez les enfants, les jeunes de moins de dix-huit ans et les hommes. L'alcool en est la première cause, suivie par une alimentation laissant à désirer, la transmission sexuelle et des négligences au niveau des soins dentaires. Un an d'attente pour se faire opérer Les patients qui doivent de faire opérer sont très souvent obligés d'attendre un an, voire plus, tant les listes d'attente sont surchargées, les hôpitaux n'ayant pas les moyens financiers de faire face. Certains, tout bonnement, manquent de sang. A Bucarest, seulement un patient sur dix nécessitant une intervention compliquée au niveau cardiaque arrive sur la table d'opération. La situation est identique pour les patients qui ont besoin d'une prothèse. Ainsi à Resita, Timofte Florica, 63 ans, a patienté un an avant d'avoir accès à un chirurgien car il n'y avait pas de fonds pour financer l'achat de sa prothèse de la hanche, d'un coût de 1000 €. Mais au moment de l'opérer, le praticien n'a pas trouvé cet appareillage bien qu'il ait joint tous ces collègues du pays. Après l'avoir maintenue hospitalisée en vain plusieurs semaines, il a dû renvoyé sa patiente chez elle. L 'épidémie de SIDA pédiatrique de Roumanie a été un des évènements les plus médiatisés de ces vingt dernières années, nuisant considérablement à l'image de ce pays tout en révélant une réalité effroyable. Comment a-t-elle été déclenchée et mise à jour ? Respon-sable de l'équipe de "Médecins du monde" sur place, arrivé à Bucarest en pleine "Révolution", dès le 22 décembre 1989, et où il demeure toujours, le chirurgien nantais Jean-Gabriel Barbin est celui qui l'a découverte et en a informé les autorités compétentes. En exclusivité pour les lecteurs des "Nouvelles de Roumanie" et pour la première fois, il évoque ce moment d'histoire qui n'a encore jamais été rendu public, répondant aux questions d'Henri Gillet. Il n'existait qu'un cas officiel en Roumanie Henri Gillet: En débarquant à Bucarest avec vos confrères, avez-vous imaginé que la Roumanie était aux prises avec ce fléau du SIDA ? Jean-Gabriel Barbin: Pas le moins du monde ; notre préoccupation première était de soigner les victimes des évènements. A cette époque, il faut dire que, même en France, le SIDA apparaissait encore comme une maladie émergente, touchant surtout les homosexuels. "Médecins du monde" était impliqué au plan mondial dans cette lutte, mais c'était une affaire de spécialistes. En Roumanie, il n'existait qu'un seul cas officiel: celui d'un steward de train international qui, aux dires de la propagande, l'aurait contracté en Occident. D'ailleurs, début janvier 90, une délégation de l'Organisation Mondiale de la Santé, en visite à Bucarest, n'a rien décelé… pas plus que l'épidémie de tuberculose, pourtant déjà très préoccupante. La confidence d'un vieux médecin victime d'un infarctus H.G.: Comment avez-vous découvert l'existence de l'épidémie ? J.G.B: Fin janvier, je me trouvais avec un vieux médecin roumain dans une polyclinique de Bucarest dont je voulais faire l'évaluation. Au cours de notre visite, il a fait un pré-infarctus; je l'ai fait immédiatement hospitaliser, sa famille est venue. Il m'a demandé de m'approcher et m'a confié: "Je ne veux pas mourir comme çà. Il faut que vous vous rendiez à l'Institut Victor Babes. C'est un véritable scandale". Il y avait deux établissements à ce nom; finalement j'ai trouvé le bon. Accompagné d'un interprète, j'ai pu pénétrer, non sans résistance et difficulté, dans le service des maladies tropicales et d'infectiologie, et je suis tombé sur le professeur Paun qui m'a emmené dans l'unité des enfants. Le choc a été terrible. Je n'étais pas face à des petits mômes, mais à de véritables zombies, totalement décharnés. Je n'avais jamais vu çà… même pendant la famine en Ethiopie. C'était ahurissant. Paun était visiblement dépassé, confiant qu'il ne savait pas de quoi il s'agissait. L'idée du SIDA ne lui était même pas venue à l'esprit et il continuait à renvoyer mourir vers leurs orphelinats ou institutions les enfants qu'on lui envoyait pour procéder à des analyses, sans se poser plus de questions. Cela ne l'a pas empêché d'être nommé par la suite responsable de la lutte contre le SIDA en Roumanie, par l'OMS. Il m'a toutefois donné l'adresse d'un institut de virologie où des vétérinaires utilisaient des test de rétro-virus Elisa pour dépister des infections dans le bétail, mais identiques à ceux employés dans le cas du SIDA. J'y ai rencontré des médecins alarmés de trouver de plus en plus de bébés victimes de pneumonies, suivies d'une importante perte de poids et d'un décès rapide. Comme les cas se multipliaient, on pouvait presque parler d'épidémie. Plusieurs de ces jeunes praticiens ont suspecté l'existence du SIDA et se sont retournés vers le directeur de l'Institut vétérinaire, le professeur Cajal, un académicien réputé, qui leur a fourni 600 tests vétérinaires. Ils se sont tous révélés positifs ! Connaissance et découverte L'aquarelliste Iulia Halaucescu rend compte de la construction du premier grand barrage de Roumanie au musée de Bicaz Une vallée martyrisée qui pourrait retrouver son lustre I ulia Halaucescu a aujourd'hui 82 ans et vit à Piatra Neamt. Mais c'est à Tarcau (son village natal) et à Bicaz, dans ce même département de Neamt, que peut se voir sa peinture. A Tarcau, un musée vient d'être inauguré à son nom et possède une grande partie de son œuvre d'aquarelliste. A Bicaz (distant de quelques kilomètres seulement de Tarcau) sont exposées plus spécifiquement les œuvres en rapport avec la construction du barrage de cette petite ville. L'histoire (roumaine) n'a retenu de cet immense chantier des années 50 (le barrage est devenu opérationnel en 1960), que l'avancée prodigieuse qu'il a représentée pour le pays. Premier de ce genre en Roumanie (depuis, il y a eu celui des Portes de Fer), le barrage de Bicaz illustrait alors à merveille l'entrée du pays dans la technologie moderne et dans l'industrialisation. La propagande d'Etat ne manqua pas, bien sûr, de faire jouer ses rouages à plein régime. L'enthousiasme devait être général. Quatre à cinq communes englouties Aujourd'hui, un regard libre sur ce passé indique que telle ne fut pas l'absolue vérité. Certes, la réalisation technique que représente cette construction ne se discute apparemment pas. Le barrage de Bicaz a la réputation d'être un solide édifice bien conçu. Il a reçu 1625 millions de mètres cubes de béton pour une hauteur de 127 mètres et une longueur de 435 mètres. La retenue d'eau qu'il occasionne ainsi est d'une longueur de 35 à 40 kilomètres. C'est désormais le lac de Bicaz alimenté par la rivière Bistritsa. A l'occasion de sa mise en eau, il a provoqué l'engloutissement de 4 à 5 communes de plusieurs villages. Les expropriés, volontaires ou non (c'est-à-dire indemnisés ou non), furent relogés sur Bicaz dans des blocs et se virent attribués des petits lopins. Bicaz changea alors de visage. D'un village, elle devint ville. D'un centre agro-touristique traditionnel (le roi, par exemple, possédait là un domaine pour ses vacances d'été), elle devint une ville sans âme marquée par la présence d'une cimenterie à ses portes et par de multiples blocs en son sein. Les Plutash disparurent, eux qui transportaient sur la Bistritsa le bois sur des radeaux depuis des générations. L'oubli le plus net toutefois sur cette construction est relatif aux populations qui travaillèrent là. Si sur la rive droite se trouvaient des civils et des appelés du contingent militaire (désarmés), sur la rive gauche étaient employés des détenus politiques qui étaient installés, hors travail, dans un camp fortifié situé entre la sortie de Bicaz et le barrage. De l'aveu même d'un ancien habitant de Bicaz, la mortalité sur cette rive gauche était de 10 % plus forte environ que sur l'autre. Un manque d'enthousiasme bien loin de la propagande La représentation par Iulia Halaucescu de cette épisode de l'histoire locale (et nationale) n'échappe pas, par certains aspects, à l'engouement voulu par le régime d'alors. Installée sur les abords du chantier, l'artiste laisse transparaître en peignant son admiration pour un tel gigantisme. Difficile probablement, à ce moment-là, d'échapper à un réel sentiment de fierté face à cette entreprise monumentale de modernisation. La Roumanie n'avait, après tout, pas tant d'expérience que cela en la matière. Ainsi, quelques tableaux évoquent ce sentiment d'un progrès en marche tel ceux, par exemple, représentant la cimenterie et ses gigantesques tuyaux ou ceux montrant le chantier avec ses murs colossaux en construction. Les tableaux qui touchent le plus sont ceux montrant les ouvriers au travail. Pas de visages particuliers dans cette peinture mais des corps voûtés sur la machine ou pelle en main. Des hommes sans identité propre, tous en chemise rouge, pour travailler le long d'une table roulante. L'artiste rend compte ainsi (volontairement ou non, peu importe !) que, quelque part sur ce chantier, l'enthousiasme faisait défaut loin de la volonté affichée par la dictature. Scènes fluviales de l'ancien temps Par ailleurs, les aquarelles de Iulia Halaucescu évoquent un monde en transition, certes, mais un monde poétique. Le charme est certain dans les peintures qui représentent aussi bien les scènes fluviales de l'ancien temps que celles qui évoquent les promeneurs et les mariniers sur le barrage par temps de pluie ou sur le lac. Un amour certain du lieu transparaît au détour de ces quelques salles consacrées à Iulia Halaucescu et, par voie de conséquence, elles ne sont pas sans laisser insensible le visiteur qui les parcourt. Au total donc, heureuse visite que celle-ci au musée de Bicaz. Un Bicaz certes martyrisé par l'histoire des hommes mais aussi porteur d'avenir. Situé au carrefour de voies importantes entre Transylvanie et Moldavie et positionné aussi en situation de carrefour historique, Bicaz ne manque finalement pas de potentiel pour (re)devenir un lieu stratégique tant du point touristique qu'économique. Le tout dans un bel écrin naturel que lui offre sa localisation de porte d'entrée (ou de sortie) dans les Carpates orientales. Bernard Camboulives 33 Les NOUVeLLes de ROUMANIe Connaissance et découverte "Le Paradis des poules": le regard truculent et caustique de Dan Lungu sur la Roumanie populaire Les NOUVeLLes de ROUMANIe Livres BOTOSANI BAIA MARE z ORADEA z CLUJ z ARAD z ALBA IULIA z z z SUCEAVA TARGU MURES z TIMISOARA IASI FOCSANI z z z z z GALATI SIBIU BRASOV z BRAILA PITESTI CRAIOVA z z BUCAREST z z TULCEA CONSTANTA z "Moi, c'est à l'usine que je me suis habitué au café" 34 Dans son roman, Dan Lungu explique, à sa manière narquoise, l'importance prise par le café sous le communisme et le rythme de travail observé dans les usines roumaines: "…Moi, c'est à l'usine que je me suis habitué au café. Là-bas, il y en avait sans arrêt, de ces temps morts; jusqu'à l'arrivée de la matière première, on attendait, mais au lieu d'attendre, on buvait un petit café bouilli sur le réchaud. Quand la matière première arrivait, on nous coupait le courant. Qu'est-ce qu'on faisait ? On buvait un petit café. Quand le courant revenait, c'était la pause du déjeuner. On mangeait, et puis après, hop ! un petit café. Après la pause, la machine tombait en panne. Qu'est-ce que vous voulez ? Elle était vieille, c'était comme çà. Jusqu'à l'arrivée du mécanicien chargé de l'entretien, qui arrivait en prenant son temps, on en reprenait un. Quand il l'avait réparée, on restait avec le mécanicien autour d'une goutte et d'un café, si on en pouvait encore, pour qu'il nous raconte ce que la machine avait. Et ainsi de suite. Moi, je crois que c'était pour çà que le café était tellement recherché; avant, tout le monde avait de ces moments là sans rien faire. Il fallait tuer le temps d'une manière ou d'une autre. Et c'est comme çà qu'on s'est habitués… Maint'nant, tu peux pas faire un enterrement sans finir par un petit café avec la coliva* ". * Plat sucré, servi froid, préparé avec des germes de blé bouillis avec des noix concassées, de la cannelle, du sucre, et que l'on distribue lors des enterrements. A l'occasion des "Belles Etrangères", les éditions Jacqueline Chambon ont publié un roman de Dan Lungu, "Le paradis des poules", traduit par Laure Hinckel, dont il faut saluer le remarquable travail dans un genre littéraire particulier. Dan Lungu, fin observateur de ses contemporains, plonge sa plume panoramique dans les jardins et les maisons qui bordent la rue des Acacias. On y découvre l'incroyable rumeur qui prend forme le jour où Mme Milica passe le seuil de la maison du colonel afin d'utiliser son téléphone… Elle va ensuite raconter encore et encore, de porte en porte, son expérience. Et la pauvre connaîtra les affres de la célébrité dans sa rue ("incroyable, on n'avait jamais d'huile dans le placard, les poules ne voulaient plus pondre et le sucre vanillé était introuvable") puis le retour, douloureux, à l'anonymat le plus cruel: "plus personne soudain n'avait besoin de son huile, des œufs de ses poules, du sucre vanillé dont elle avait des réserves…". Au café du "Tracteur chiffonné", où se retrouvent les hommes de la rue des Acacias, les commentaires vont bon train devant un verre de tsuica distillé dans le bistrot même, sur le "bon vieux temps de Ceausescu", ce qui provoque des disputes, sur la transition et la "nouvelle économie", le "dieu dollar". Chaque événement qui se Dan Lungu a été l’un des invités passe dans la rue, est disséqué, sujet à controverroumains des “Belles Etrangères”. se et donne une image d'une Roumanie quotidienne qui se cherche sans jamais se trouver On est loin de la langue de bois des années communistes. Le langage populaire de Dan Lungu fait rire. La truculence est au rendez-vous. Les situations sont tragicomiques. On fait aussi connaissance avec un petit monde qui porte sur nous, "Occidentaux", un curieux regard. Dan Lungu est né à Botosani le 15 septembre 1969. Il est actuellement maître de conférences à la chaire de sociologie de l'Université Al. I. Cuza de Iasi. Rédacteur en chef pendant plusieurs années de la revue culturelle "Timpul", il a publié plusieurs volumes de poésie, de prose et des essais, et reçu plusieurs prix. Il a été un des douze écrivains roumains invités en France lors des "Belles Etrangères". Dan Jungu, Le Paradis des poules, Editions Jacqueline Chambon, collection "Metro", 224 pages, 18 €. Un nouveau lycée français à Bucarest H ervé Bolot, ambassadeur de France en Roumanie, a confirmé la mise en chantier, dès ce printemps, d'un nouveau lycée français à Bucarest, l'actuel lycée Ana de Noailles, situé près de l'ambassade, s'avérant trop petit pour faire face à la demande. Les travaux devraient durer un an et l'établissement être prêt pour la rentrée 2007. Ils coûteront 7,8 M€, le quart étant à la charge de l'Etat français, le reste à celle de l'association des parents d'élèves. Jacques Chirac devrait poser la première pierre symbolique du lycée, fin septembre prochain, à l'occasion du sommet des chefs d'Etats francophones qui doit se tenir dans la capitale roumaine. Par ailleurs, l'ambassadeur a annoncé le projet de la France de créer une université francophone européenne dont le centre se trouverait à Bucarest. Il a également indiqué que les autorités françaises négociaient un accord avec le ministère de l'Education et de la Recherche roumain en vue de développer l'enseignement franco-roumain. Insolite Société A Aiud, le paradis commence… en enfer J oseph effectue dix-sept années pour crime passionnel, les rois mages, trois ans pour vol qualifié et dix ans pour coups ayant entraîné la mort, un ange, cinq ans pour escroquerie, un berger, sept ans pour violences aggravées… Depuis 1999, quatorze des mille détenus de la prison de haute sécurité de Aiud (Alba), sélectionnés par le prêtre de l'établissement, interprètent la scène de la Nativité, la nuit de Noël, devant 300 de leurs jeunes co-détenus, regroupés dans la chapelle du pénitencier, transformée en théâtre pour la circonstance. Le spectacle est retransmis par circuit interne de télévision dans toute la prison, notamment à l'intention des 33 femmes incarcérées que les gardiens ont jugé plus prudent de tenir à l'écart. Le récitant, un vénérable prisonnier, purge vingt ans pour avoir tué, par jalousie, son meilleur ami. Un ensemble de dix choristes interprète des “colinde” (cantiques de Noël), emmené par son chef, condamné à trois ans pour récidive de vol de téléphone portable. Il n'a pas eu de chance: sa seconde victime, un banquier, disposait du système GPS, ce qui a permis de le localiser immédiatement. A Aiud, la vie des détenus s'est améliorée ces dernières années. Ils reçoivent des cours, disposent d'une bibliothèque, de la télévision par câble. Certains travaillent ; chaque mois de labeur raccourcit leur peine d'une semaine et leur rapporte un pécule de 12 €. Au milieu des années 90, une équipe de trois d'entre eux avait été retenue pour peindre la chapelle de la prison. L'un, condamné à une très longue peine, avait travaillé avec d'autant plus d'acharnement et de talent que la direction et le prêtre lui avaient promis qu'il serait libéré de façon anticipée, à l'occasion de Noël 1996, mais le président Iliescu a refusé sa grâce. Dix ans après, il chante toujours des colinde dans la chapelle qu'il a décorée. Réconfort P our apporter un réconfort moral aux malades et aux blessés de son judet, le directeur du service des ambulances d'Arges (Pitesti) a décidé d'engager quatre prêtres qui accompagneront les secours. Se succédant par tranches de huit heures, y compris la nuit et le dimanche, ils les suivront dans un véhicule à part, et devront prévoir d'emmener les saintes huiles pour l'extrême onction. Ce sont les médecins qui décideront de leur intervention, suivant la gravité des cas… ce qui ne manquera pas de rassurer ceux qui les verront arriver !Jugeant l'initiative sympathique, l'Eglise a donné son feu vert et désignera les officiants. 19 Retour du marché, cochons vendus... A faire dresser les cheveux sur la tête des féministes ! "Soûl comme un Polonais" C haque jour, le "déssoûloir" de Varsovie accueille 110 à 130 personnes arrêtées par la police. La plus jeune jusqu'ici enregistrée n'avait que onze ans et l'on peut y croiser de temps en temps des octogénaires. Dernièrement, l'établissement a été équipé de nouveaux alcootests, conformes aux normes européennes. Malheureusement, les policiers ne peuvent pas les utiliser et sont obligés de se servir des anciens. Les nouveaux appareils ne mesurent en effet pas les taux dépassant quatre grammes d'alcool… "ce qui est assez fréquent dans ces lieux" s'est plaint un médecin. Q Le Père Noël veut des villes propres uelques jours avant Noël, plusieurs dizaines d'enfants des maternelles ont défilé dans le centre de Pitesti et fait une présentation de mode au théâtre Aschiuta dans des tenues fabriqués à partir de rebuts de papier et de bouteilles en plastique. Il s'agissait, à l'initiative des autorités locales, de signifier aux adultes qui continuent à jeter n'importe où leurs détritus, malgré l'installation de conteneurs prévus à cet effet, que le Père Noël ne pouvait pas venir déposer ces cadeaux dans un lieu envahi par les ordures. Pitesti est pourtant considérée comme une des villes les plus propres du pays. Distillerie clandestine L es gardiens de la prison de haute sécurité de Botosani, intervenant dans une cellule où une bagarre générale avait éclaté entre la dizaine de détenus qui y étaient enfermés, ont eu la surprise de constater qu'ils étaient tous dans un état d'ébriété avancée, bien que la consommation d'alcool soit interdite dans l'établissement. Entreprenant des recherches, ils ont découvert une mini-distillerie clandestine qui fonctionnait déjà depuis un moment. Les autorités essaient maintenant de déterminer de quelle manière les ingrédients nécessaires à la fabrication de cette tsuica fabriquée derrière les barreaux ont pu entrer dans ce lieu très surveillé, sans attirer l'attention. Les NOUVeLLes de ROUMANIe Société Un maire du Maramures en guerre ouverte avec les "manele" Vie quotidienne z z SATU MARE z ARAD z ORADEA CLUJ IASI z z z BRASOV TIMISOARA z TARGU MURES z z ALBA I. BOTOSANI z SUCEAVA z z BAIA MARE z PITESTI z SF. GHEORGHE z RESITA CRAIOVA M. CIUC GALATI z BRAILA z TULCEA z BUCAREST GIURGIU z CONSTANTA z z Disparités régionales (suite) 18 Les experts des Nations Unies ont aussi relevé de grandes disparités régionales, les Moldaves ayant un niveau de vie quatre fois inférieur à celui des Bucarestois, bien que la région reçoive quatre fois plus de fonds d'Etat que la capitale. La Moldavie est devenue la principale terre d'émigration du pays, avec les judets d'Alba Iulia et de Vâlcea, caractéristique qui affectait autrefois les judets de Satu Mare, Bihor (Oradea), Caras-Severin (Resita), Dolj (Craiova), Constantsa, Harghita (Miercurea Ciuc) et Covasna (Sfântu Gheorghe), où la situation s'est retournée, au moins sur ce plan. Une gouvernance mise en question Le rapport rappelle que l'indice de perception de la corruption par la population place la Roumanie au 87ème rang sur 146 pays classés. Il souligne l'inéquité de la répartition des fonds d'Etat au niveau local, souvent attribués sur des critères politiques. Ainsi, en 2002, le judet de Bacau avait reçu 5 fois plus de fonds pour refaire ses routes que celui de Giurgiu. Enfin, il reprend une étude de la Banque Mondiale sur la bonne gouvernance qui met en lumière tous les manquements de la Roumanie. Que ce soit sur les chapitres de la responsabilisation et de l'implication des citoyens, de la stabilité politique, de l'efficacité des pouvoirs publics, de la qualité de la réglementation, de la lutte contre la corruption, la Roumanie obtient seulement la moitié des points attribués à la Hongrie et est devancée par la Bulgarie. L es "manele", airs balkano-tsiganes vulgaires, ont envahi l'espace musical roumain depuis maintenant près de cinq années. Populaires auprès des jeunes, déversés à longueur de journée par les radios, envahissant les discothèques, ils irritent au plus haut point les adultes. C'est le cas de Anton Ardelean, maire de Tautii Magheraus, dans la banlieue de Baia Mare, dans le Nord du pays, qui s'emporte contre ce "fléau sudiste". Depuis 2003, l'élu ne supportait plus d'entendre sortir ces effluves sonores agressives des endroits où se réunissaient les jeunes pour s'enivrer à longueur de soirée. Au début, le maire a tenté de les convaincre qu'ils abîmaient leurs oreilles et leur foie, mais rien n'y a fait. Alors Anton Ardelean a décidé d'employer les grands moyens, interdisant les "manele" dans les lieux publics et s'entendant avec le directeur de la maison de la culture locale pour organiser des fêtes gratuites, où le jus d'orange remplace la bière et le rap, la house, le pop et le rock, la musique criarde honnie. Il a même fait glisser dans les programmes des valses et des tangos pour que les jeunes découvrent la danse "civilisée" en couple, et que leurs aînés puissent se joindre à eux. Mais comme ces mesures ne se révélaient pas suffisantes, le maire a menacé les propriétaires des trois discothèques de la ville de faire descendre chez eux la redoutable Garde Financière (le fisc) pour vérifier leur comptabilité ainsi que le contrôle de l'Environnement, pour le respect des mesures de sécurité. Ce chantage s'est révélé plus efficace, et même si certains jeunes de Tautii Magheraus traitent le maire de "dictateur" et de "raciste", on n'entend guère plus les "manele" qu'en sourdine, à la sauvette, tard dans la nuit. Les 137 commerces et 36 lieux publics de la commune où ces airs de "sauvage" régnaient jusque là en maître ne passent plus que de la musique civilisée, à savoir les Rolling Stones, Bonnie M, Queen et leur fameux "We are the champions", Freddy Mercury… Anton Ardelean a une philosophie bien à lui. Quand il était médecin vétérinaire, il avait introduit la diffusion d'airs d'opéras dans les étables de la ferme bovine qu'il dirigeait et se félicitait que les vaches donnent 15 à 20 % de lait supplémentaire. Alors le maire se pose cette question : "ce que j'ai réussi avec les vaches… pour quoi cela ne marcherait-il pas avec nos enfants, si on leur donne de la bonne musique ?". L'élu s'attendait à être sanctionné par les mécontents lors des dernières municipales. Il a été reconduit à son poste avec 82 % des suffrages… soit le deuxième meilleur score de Roumanie, après le maire de Sibiu ! Les voitures sans permis arrivent en Roumanie L es voitures sans permis viennent de faire leur apparition en Roumanie, importées de France par la firme Reva Romania qui commercialise deux modèles du fabricant Microcar. Ces voiturettes sont équipés de moteurs diesel, consommant 3,5 litres au 100 kilomètres, ont une longueur de 2 m 80 pour une largeur d'1m 50 et un poids de 350 kg. Leur vitesse maximum est de 45 km/h, ils disposent de freins à disque, d'un airbag pour le conducteur. Leur prix varie entre 9000 et 10 000 €, hors taxes. Ces voitures n'ont pas besoin d'immatriculation et peuvent être conduites à partir de 16 ans. L'importateur espère en vendre 12 par trimestre. Il vise particulièrement la clientèle féminine, les Roumaines étant beaucoup plus nombreuses que les hommes à ne pas posséder le permis de conduire, mais aussi la "jeunesse dorée" de 16 à 18 ans, et ceux qui n'arrivent pas à décrocher le permis. Contrairement à la France, il n'espère pas toucher le créneau du troisième âge, vue la faiblesse des revenus de cette catégorie de population. Les NOUVeLLes de ROUMANIe Livres S Connaissance et découverte "Solitude et destin", écrits de jeunesse d'Emil Cioran Le talent et l'anti-conformisme du philosophe au service d'une entreprise de camouflage ? ous le titre Un Cioran très politiquement correct, Alexandra Laignel-Lavastine analysait dans une critique parue dans le Monde des Livres du 1/07/2004 le dernier ouvrage rassemblant les écrits de jeunesse du philosophe Emil Cioran. Voici quatre ans, en publiant Cioran, Eliade, Ionesco: l'oubli du fascisme (Voir "Les Nouvelles de Roumanie", n° 12, p. 28 et 29), l'historienne française avait déclenché une véritable tempête parmi les intellectuels roumains, relayée par la presse, qui n'acceptaient pas que l'on mette en cause le passé de ces "monstres sacrés" de la littérature et de la pensée roumaine, la vérité historique ayant bien du mal à s'accommoder de l'exaspération du sentiment national. Avec son dernier article (lire cidessous), gageons qu'Alexandra Laignel-Lavastine ne se fera pas de nouveaux amis en Roumanie… Emil Cioran "Comment ne pas se réjouir de la parution de Solitude et destin, un ouvrage qui rassemble près de 80 articles publiés en Roumanie par le jeune Cioran entre 1931 et 1943 ? D'autant que depuis leur publication à Bucarest, les amoureux non roumanophones de l'écrivain auront dû attendre... treize ans avant d'y accéder. Mais à quoi accèdent-ils ici au juste ? Précisons-le d'emblée puisque cette édition française n'en dit rien: ce recueil est le fruit d'un choix opéré par Cioran lui-même en 1990, qui préféra en sortir l'ensemble de ses écrits trop ouvertement politiques de la période. Comme sa série d'articles envoyés du Reich en 1933-1934, preuves de sa fascination pour le nazisme; ou ceux de 1935-1940, témoins de son ralliement à la Garde de fer, organisation fasciste et antisémite parmi les plus violentes de l'entre-deux-guerres. Ce parti pris que rien n'indique ni n'éclaire - ni avant-propos, ni postface, ni appareil critique - prive le lecteur de l'intelligence d'un chapitre crucial de l'histoire intellectuelle des années 1920 et 1930, dont Cioran reste une figure emblématique. Ce moment où, d'un bout à l'autre du Vieux Continent, apparaît une nouvelle génération en révolte, soudée par le mot d'ordre de "révolution spirituelle". Certains s'y tiendront; d'autres, dont Cioran, glisseront après 1933 vers la "révolution nationale". Dans un style flamboyant, Solitude et destin restitue bien les ingrédients de cette humeur d'abord contestataire : aversion pour les "vieillards", haine du parlementarisme et de la démo- L cratie, rejet de la morale humaniste et de "l'esprit français". Ce qu'il leur oppose ? "Le culte de la force" et de l'authenticité, l'exaltation de l'irrationnel et de l'élan vital. Bref, la matrice même de son engagement politique. Une seule face de la médaille Pour autant, le lecteur français en sortira comblé: il croira y retrouver, un zeste de mal-pensance en plus, son Cioran de toujours, certes anticonformiste, mais déjà si talentueux. Le problème, c'est qu'on ne lui montre dans ces pages qu'une face de la médaille. Il se laissera bercer par cette correspondance de Munich, publiée dans "Vremea" en mai 1934 et joliment intitulée Eloge de la prophétie. Ce qu'il ignore, c'est qu'en novembre 1933 et dans le même journal, l'auteur saluait dans le nationalsocialisme une salutaire "barbarie créatrice". Il ne sait pas non plus que deux mois plus tard, le 15 juillet 1934, le sens de ladite prophétie s'éclairait grâce à "Hitler dans la conscience allemande": Cioran nous assure en effet dans cet article-là (et dans beaucoup d'autres) qu'"il n'existe Alexandra Laignel-Lavastine pas d'homme politique qui m'inspire une sympathie et une admiration plus grande qu'Hitler". Et l'on pourrait multiplier les exemples. Cette entreprise de camouflage a aujourd'hui, quelque chose d'absurde. La publication du Journal de Drieu La Rochelle a-t-elle jamais empêché quiconque de lire et relire l'écrivain ? Alors pourquoi ces quatrièmes de couverture agrémentées des mêmes poncifs dès qu'il s'agit des écrits roumains de Cioran ? Ainsi de son "pessimisme". Pessimiste, vraiment, son plaidoyer d'alors en faveur d'une Roumanie fanatisée dans la "mystique d'un effort collectif de la nation"? Ou encore de ses éternels "vingt ans". En 1940, Cioran allait tout de même vers la trentaine... ". Alexandra Laignel-Lavastine (Le Monde, 1er juillet 2004) E.-M. Cioran, Solitude et Destin (Singuratate si Destin), de Traduit du roumain par Alain Paruit, Gallimard, "Arcades", 426 p., 15 € (100 F). Alexandra Laignel-Lavastine, Cioran, Eliade, Ionesco: l'oubli du fascisme, PUF (Presse Universitaire de France), Perspectives critiques, avril 2002, 552 pages, 29 € (190 F). Herta Muller, prix de littérature européenne 'écrivaine d'origine roumaine Herta Muller a reçu, à Stuttgart, le prix Wurth de littérature européenne, doté de 25 000 €, décerné tous les deux ans et dont la création remonte à 1998. Agée de 53 ans, Herta Muller a émigré en Allemagne en 1987 et vit désormais à Berlin. Elle est devenue l'une des plus importants écrivains allemands actuels. 35 Les NOUVeLLes de ROUMANIe Connaissance et découverte Littérature z BAIA MARE ORADEA ARAD z z z IASI z CLUJ BRASOV z z SIBIU TIMISOARA GALATI z z BRAILA PLOIESTI CRAIOVA z E z SUCEAVA TARGU MURES z z BUCAREST z Les mille et une vies z TULCEA CONSTANTA z st-ce parce que le romantisme révolutionnaire dont son oeuvre est imprégnée est devenu obsolète, ou parce qu'il a usé de la langue de Voltaire pour y rouler des accents et des rythmes orientaux que le Roumain Panaït Istrati (1884-1935) est, par deux fois, tombé dans l'oubli? Dans un article du "Monde", Valérie Cadet rappelle qu'à la fin des années 1960, à l'incitation de Joseph Kessel, Roger Grenier sauvait une première fois du purgatoire "le Gorki des Balkans" en rachetant les droits de tous ses récits, dispersés ou épuisés, recueillis alors en quatre volumes chez Gallimard. Ce corpus de référence, à son tour épuisé, a servi de fil conducteur à celui (échelonné en trois forts volumes) que propose aujourd'hui Phébus, dans une édition établie et présentée avec une belle acuité par l'écrivain Linda Lê. S'y ajoutent un ensemble de textes parus en revue ainsi que Vers l'autre flamme (1929), chronique désillusionnée et prophétique de seize mois de voyage à travers l'URSS, qui vaudra à son auteur l'incompréhension et le rejet criminel de ses pairs ou admirateurs. Marquée au sceau d'une apologie de l'homme libre, l'œuvre de Panaït Istrati n'a guère d'équivalent. Sans doute parce qu'elle est inextricablement mêlée à cette vie de vagabondage qui fut la sienne depuis l'âge de 12 ans. Fils naturel d'une lavandière de Braïla (port danubien) et d'un contrebandier grec tué par des gardes-côtes quand l'enfant n'avait pas encore 9 mois, cet autodidacte n'a cessé d'ouvrir plus grand son horizon. Se jouant des frontières, pratiquant les métiers les plus divers et prenant part aux luttes sociales. Cent fois livré au désespoir et à la tentation du renoncement, cent fois reprenant courage pour d'autres rencontres, de nouvelles façons d'éprouver le monde. Les NOUVeLLes de ROUMANIe de mille feux aux yeux des habitants de Timisoara et d'Arad Les prix peuvent être inférieurs de moitié et cela concerne aussi les achats de Noël: cadeaux, jeux, parfums, cosmétiques, chocolats, confiserie, etc. Metro, Praktiker, le Mall (galerie commerciale à étages) Szeged Plaza sont les lieux les plus fréquentés, mais c'est l'hypermarché Cora qui attire le plus cette nouvelle clientèle. Ses dirigeants ont compris l'enjeu et assurent l'apprentissage du roumain à leurs caissières. "Ici, tout est moins cher, de bien meilleure qualité et le choix est plus grand" Le même leitmotiv revient incessamment: "Ici, tout est moins cher, de bien meilleure qualité et le choix est plus grand". Depuis la "Révolution", les habitants du Banat ont ainsi pris le pli de se précipiter chaque fin d'année à Szeged; mais ils font aussi le trajet le reste de l'année, souvent une fois par mois, n'oubliant pas de s'arrêter aux "Duty free shops" des postes frontières, dévalisés au moment des fêtes : on y trouve le litre de vodka "Absolut", la plus prisée, à 8 € au lieu de 14. par les policiers. 36 Près de dix ans avant Gide et son fameux Retour de l'URSS Panaït Istrati, militant syndical et conteur visionnaire, avait découvert, au cours d'un voyage à Moscou, les tares qui minaient l'utopie communiste et les avaient dénoncées, tentant de convaincre ses camarades qu'il ne pouvait y avoir de socialisme sans la liberté. Cette prise de position allait lui attirer la colère de la gauche de l'époque et le désaveu de Romain Rolland. Considéré par les uns comme un dangereux bolchevique, par les autres comme un traite à la classe ouvrière, Panaït Istrati est mort seul et abandonné, en 1935, dans une Roumanie où déjà le fascisme et l'antisémitisme, ses ennemis de toujours, consolidaient leur emprise au sein d'une classe politique hésitante et désorientée. Honnête, refusant l'aveuglement, l'écrivain s'était retrouvé seul face à une intelligentsia française partagée entre les deux idéologies monstrueuses du XXème siècle. Dans une Autobiographie publiée dans la revue Europe en août 1923, il lâche à jets serrés le récit de ses pérégrinations à travers les Balkans, l'Egypte et l'Europe, scandé par une antienne qui pourrait se résumer à ceci: "Misère, famine, manque d'abri, poux, mégots." Pendant la première guerre mondiale, atteint par cette tuberculose qui l'emportera en 1935, il décide d'apprendre le français et découvre les grands classiques. Rechute en 1919. Année noire où il perd également sa mère; année de rédemption par la lecture éblouie du Jean-Christophe de Romain Rolland. Le "Gorki" des Balkans P anaït Istrati est disparu prématurément au printemps 1935, à l'âge de 51 ans. L'écrivain roumain avait connu une notoriété mondiale foudroyante avec son roman Kyra Kyralina , "un récit aérien et lumineux comme un vol de papillons au soleil, coloré comme une troupe de bohémiens en marche, mélancolique et tendre comme une chanson de route qui n'a jamais de fin" commentera Joseph Kessel. L'auteur, qui s'était imposé à Paris, écrivant en français, avait ouvert la voie à une pléiade de prodigieux intellectuels roumains qui s'installeront en France: Emil Cioran, Mathila Ghica, Mircea Eliade, Eugen Ionesco, Tristan Tzara… Dans la préface de Kyra Kyralina, en 1924, Romain Rolland avait dressé le portrait saisissant de cet inconnu qui était devenu par la suite son ami, retraçant Les étudiants s'y fournissent en cartouches de cigarettes qu'ils revendent au noir sur le campus de Timisoara. Le mouvement devrait encore s'accélérer dans les mois qui viennent avec le prolongement de l'autoroute BudapestSzeged jusqu'à la frontière roumaine, réduisant cette dernière distance à vingt minutes. D'ailleurs, certains Roumains se dirigent déjà directement vers la capitale hongroise qui n'est plus qu'à deux heures et s'offrent, pour le prix d'une vignette d'autoroute (5 €), l'accès aux grands magasins d'une métropole européenne. Les achats importants sont également moins chers. Le même aragaz (gazinière), vaut 25 % de moins, côté hongrois, et on peut, en outre, se faire reverser la TVA à la douane, divisant ainsi son prix pratiquement par deux. Avant la "Révolution", les échanges existaient… mais plutôt dans l'autre sens: les Roumains passaient la frontière pour y proposer des produits de leur fabrication à des prix défiant toute concurrence. Mais depuis la chute du rideau de fer, les Hongrois ont pris le goût des articles occidentaux et s'en sont détournés, le commerce n'étant plus qu'à sens unique. entre Bucarest et Brasov… soit un tous les sept kilomètres Né écrivain à près de quarante ans Dénonçant Moscou bien avant Gide Société mieux que quiconque ce que fût son destin: "Dans les premiers jours de janvier 1921, une lettre me fût transmise, de l'hôpital de Nice. Elle avait été trouvée sur le corps d'un désespéré, qui venait de se trancher la gorge. On avait peu d'espoirs qu'il survécût à sa blessure. Je lus, et je fus saisi du tumulte du génie. Un vent brûlant sur la plaine... C'était la confession d'un nouveau Gorki des pays balkaniques. On réussit à le sauver. Je voulus le connaître. Une correspondance s'engagea. Nous devînmes amis." "Il se nomme Istrati. Il est né à Braïla", en 1884, d'un contrebandier grec, qu'il n' a point connu, et d'une paysanne roumaine, une admirable femme, dont la vie de travail sans relâche lui fût vouée. Malgré son affection pour elle, à douze ans il la quitte, poussé par un démon de vagabondage, ou plutôt par le besoin dévorant de connaître et d'aimer. Spray invisible miracle Mais les Roumains ont d'autres moyens pour déjouer les pièges de la police routière. De l'avis même de celleci, les plaques d'immatriculation sales ne permettent pas de bien identifier les contrevenants. De même, rouler avec les rayons rasants du coucher ou du lever du soleil perturbe l'enregistrement des clichés établissant la faute. Certains conducteurs ramènent également de l'étranger des dispositifs (illégaux) leur permettant de détecter un ou deux kilomètres à l'avance la présence des radars (n'est-ce pas L… qui se reconnaîtra !), ou se les font envoyer d'Amérique par leurs proches qui y sont établis. Enfin, on trouve à faire livrer par Internet des feuilles de protection transparentes qui se collent en moins de cinq minutes sur les plaques avant et arrière et ne permettent de les photographier que de face, alors que les radars ont un angle de prise de vue d'environ 30°. Il en coûte 50 €. Leur emploi est interdit et on peut se faire verbaliser. Qu'à cela ne tienne… un spray invisible miracle, "Photoshopper", pro- duit le même effet et se révèle particulièrement efficace la nuit, face aux flashs. Il suffit de l'appliquer une fois et le flacon, utilisable pour six véhicules, ne coûte que 20 €. Avantage supplémentaire: dans l'attente d'une modification de la réglementation, ce n'est pas - encore - répréhensible aux yeux de la loi, car il ne s'agit pas d'un dispositif supplémentaire. L'ensemble de ces moyens permettent à 10 % des contrevenants d'échapper aux sanctions ! se mettent à l'agriculture biologique Spécificité roumaine: celle-ci était en bonne partie écoulée sur les marchés par des petits agriculteurs exploitant une ferme familiale et vendant leurs produits guère plus cher que les autres. Il faut souligner qu'une bonne partie de la production assurée par ces petites unités est naturellement biologique, même si elle n'est pas homologuée, les paysans roumains n'ayant ni l'habitude, ni les moyens d'utiliser des engrais chimiques. D'après les professionnels du secteur, ces produits sont vendus dans les magasins spécialisés à une classe sociale qui dispose de plus de 500 € de revenus mensuels et peut s'offrir un kilo de fraises à 2 ou 3 €, le producteur les mettant sur le marché à un euro. Ils sont aussi exportés à l'étranger, notam- ment en Grèce, où leur prix double. Les conserves ou fabrications à bases de légumes et fruits biologiques se développent également, ayant atteint 50 000 tonnes l'an passé; on trouve des haricots, des cornichons, des macédoines, des jus de poivron et de tomate. Une firme britannique s'est installée à Rupea, près de Brasov et le prince Charles lui-même a acquis une ferme dans la région pour se consacrer à l'agriculture biologique. Elle a investi 5 M€ et prévoit de produire dès 2006 une sorte de roquefort, de la mozzarella, des yaourts, des glaces avec des fruits des bois, utilisant pour tous ses produits laitiers du lait de buffle, particulièrement apprécié en Occident parce qu'il contient 40 % de moins de cholestérol. 17 Les NOUVeLLes de ROUMANIe Société Vie quotidienne BAIA MARE BISTRITA z z ORADEA z ARAD LAPUS z z CLUJ TARGU MURES z z IASI BACAU GALATI z SIBIU TIMISOARA z BRAILA PITESTI CRAIOVA z D z BRASOV z z SUCEAVA z z z z TULCEA z BUCAREST CONSTANTA z La Roumanie "scannée" par les experts des Nations Unies 16 22 Szeged, la hongroise, brille Un tiers des Roumains pauvres, selon les critères internationaux, un autre tiers se considère pauvre Dans leur rapport sur le développement humain, les experts des Nations Unies ont fait une radiographie de la société roumaine, notant qu'elle était de plus en plus divisée entre riches et pauvres. La pauvreté, la corruption et le chômage, sont ses problèmes majeurs. La première touche en priorité les personnes âgées, la seconde, les jeunes. Un pour cent des Roumains vivent avec moins d'un dollar par jour, ce qui, d'après les normes internationales, est considéré comme de la pauvreté extrême; 12 % sont affectés de pauvreté "sévère" (besoins importants non satisfaits, empêchant une vie normale dans la société), 17 % de pauvreté (manque de ressources par rapport aux standards minima d'une vie décente). A ce premier tiers de la population, il faut en ajouter un second, concerné par ce que l'ONU qualifie de pauvreté "relative" (personnes en difficultés économiques à la suite du processus de la transition). Le rapport note que 7 Roumains sur dix ont été affectés directement par la transition, qui dure depuis 15 ans. Pour 43 % de la population qui avait entre 18 et 65 ans en 1989, cela a signifié licenciement, chômage et mise à la retraite anticipée, ce pourcentage étant le plus fort (53 %) en Dobroudja (Constantsa); 10 % affirment que rien n'a changé pour eux, et 7 % sont devenus patrons. (suite page 18) ans les jours précédents Noël, plus de 25 000 Roumains faisaient la queue quotidiennement aux différents postes frontières avec la Hongrie, proches des deux grandes villes du Banat, Timisoara et Arad, afin d'aller faire leurs emplettes à Sezged. La cité magyare n'est qu'à une heure de distance en voiture. Comptant 180 000 habitants, elle n'est pourtant pas plus grande que ses deux voisines roumaines, mais elle a déjà un air européen que cellesci lui envient, avec ses nombreux super-marchés, galeries commerciales jalonnées de boutiques élégantes où l'on trouve les plus grandes marques et des produits de qualité. Venus pour la journée, les frontaliers roumains entendent bien remplir leur coffre car l'autre avantage de la Hongrie ce sont les prix. Tout y est moins cher, le coca-cola, l'huile, le fromage, le salami, les saucisses piquantes, les détergents, la margarine, le sucre et même le pain. Près de 20 radars automatiques sur la DN1, R âleur parmi les râleurs, l'automobiliste français trouvera le paradis, lui permettant de libérer totalement son courroux, sur la DN 1 (Nationale 1) reliant la capitale à Brasov. Entre Bucarest et Azuga (140 km), à l'entrée du judet de Brasov, on dénombre pas moins de 59 caméras vidéo jouant le rôle de radars automatiques, disposées dans les deux sens, en 19 points différents. Elles ont été installées début décembre et peuvent être changées de place. La vitesse, limitée à 100 km en rase campagne, tombe fréquemment à 50 km sur cet axe traversant des agglomérations à touche-touche, sans qu'on puisse bien discerner leurs limites. Au seul point de contrôle de Baneasa, on dresse 700 PV par jour et les sanctions peuvent être lourdes: 60-80 lei (15-20 €) pour un dépassement de la vitesse légale de moins de 30 km/h, 100-300 lei (28 à 85 €), entre 30 et 50 km/h, 200-800 lei (56225 €) au-delà, avec retrait du permis. Un "vitezomane" (comme le roumain, langue qui s'adapte à toutes les situations, le désigne) pourrait ainsi être taxé de 15 200 lei, soit 4000 € s'il se faisait prendre à grande vitesse à tous les points de contrôle… Et, à priori, pas question de compter sur les bakchichs nécessaires à la récupération de son permis, les contraventions étant envoyées par la poste, mais traitées, au préalable, Les Roumains I ntroduite à la fin des années 90, l'agriculture biologique gagne de plus en plus de terrain dans le pays. Réglementée suivant les normes européennes, elle voit croître le nombre de producteurs, le premier ayant obtenu sa certification, en 2000, étant un jeune agriculteur de Lupusel (Maramures), Mircea Burde. Au début, cette agriculture ne concernait que les céréales, mais aujourd'hui on produit des fraises, du raisin pour le vin, des radis, des épinards, des poivrons, des condiments, du fromage, des produits laitiers, des conserves et même des glaces. Des restaurants spécialisés et des boutiques s'ouvrent, alors que les grandes surfaces commencent à lui consacrer des rayons spécialisés. En 2000, les surfaces cultivées biologiquement ne représentaient qu'un peu plus de 17 000 hectares. Cette superficie est passée à 73 000 ha en 2004 et devait atteindre 104 000 ha, fin 2005. Dans la même période, la production bondissait de 13 500 tonnes à plus de 100 000 tonnes en 2004. Les NOUVeLLes de ROUMANIe Connaissance et découverte d'Istrati grâce à la réédition complète de son œuvre Suivent des saisons de grande âpreté. En janvier 1921, à tantôt acteur d'une fresque bouillonnante qui embrasse des Nice, à bout de forces et "dépité de vingt-cinq ans de luttes dizaines de destins, incorpore la légende balkanique à l'autoavec la vie", il tente de se suicider en se tranchant la gorge. biographie et aux faits historiques. Ceux qui l'ont sauvé in extremis ont trouvé sur lui une lettre En référence centrale à cette épopée flamboyante, les haïadressée à Romain Rolland. Elle est expédiée. L'auteur de Audoucs, ces hordes de cavaliers justiciers du temps des occupadessus de la mêlée, bouleversé, lui répond et l'incite rudement: tions turque et grecque en Roumanie. Fils du vent ou "amantes "Je n'attends pas de vous des lettres exaltées. J'attends de la forêt" en lutte sanglante contre les oppresseurs, dont l'œuvre! Réalisez l'œuvre, plus essentielle que vous, plus Zograffi et ses semblables sont les dignes héritiers. De ses durable que vous, dont vous êtes mille et une vies, Panaït Istrati la gousse." a extrait la matière de mille et Et c'est ainsi que Panaït un récits mis en abyme au fil Istrati est né écrivain, à près de desquels le lecteur se perd avec 40 ans (son premier récit, Kyra délices, poussé au galop d'un Kyralina, conçu à Paris chez son périple foisonnant, écrit dans ami le bottier Georges Ionesco, une langue puissamment est publié en 1923, et c'est en visuelle et sonore. Tantôt profait le deuxième qu'il écrit, pulsée dans un lyrisme étoilé, après Oncle Anghel, paru en tantôt ciselée à la pointe sèche. 1924). Ode à la nature et à la liberté C'est ainsi que prend corps où l'abjection fraye avec le Adrien Zograffi, alter ego Le port de Braila tel que l’a connu le jeune Panaït Istrati. sublime. d'Istrati l'idéaliste. Linda Lê en La délicatesse du verbe et reprend la source dans un texte de 1929: "Ma nature, trop peu du cœur avec l'ordure. Le désespoir le plus intense avec l'éfaite pour l'étude livresque, me poussait avec force vers la merveillement enfantin. Un chapelet de romans d'apprentissaconnaissance de l'homme tel que je le voyais dans la rue: il ge, de vies sauvages et vaillantes dédiées à la défense des aimait et souffrait comme moi, c'est à lui que je dois aller; il opprimés, et où chacun éprouve que "ce que l'amour crée avec est le A et le Z de la vie." difficulté, la haine le détruit en un instant". Du désespoir à l'émerveillement Au fil des cycles narratifs, ce double est tantôt témoin, ŒUVRES de Panaït Istrati. Edition préparée et présentée par Linda Lê. Phébus, "Libretto". Volume 1, 928 p., 14,90 euros. Les volumes 2 et 3 des oeuvres de Panaït Istrati sont parus ou paraissent en librairie le 17 février et le 13 mars. avait subjugué Romain Rolland Vingt ans de vie errante, d'extraordinaires aventures, de travaux exténuants, de flâneries et de peines, brûlé par le soleil, trempé par la pluie, sans gîte et traqué par les gardes de nuit, affamé, malade, possédé de passions et crevant de misère." Trompant sa faim en lisant voracement "Il fait tous les métiers: garçon de cabaret, pâtissier, serrurier, chaudronnier, mécanicien, manœuvre, terrassier, déchargeur, domestique, homme-sandwich, peintre d'enseignes, peintre en bâtiment, journalise, photographe. Il se mêle pendant un temps aux mouvements révolutionnaires. Il parcourt l'Egypte, la Syrie, Jaffa, Beyrouth, Damas et le Liban, l'Orient et la Grèce, l'Italie, fréquemment sans un sou, et se cachant par- fois sur un bateau où on le découvre en route, et d'où on le jette sur la côte, à la première escale." "Il est dénué de tout, mais il emmagasine un monde de souvenirs et souvent trompe sa faim en lisant voracement, surtout les maîtres russes et les écrivains d'Occident." "Il est conteur-né, un conteur d'Orient, qui s'enchante et s'émeut de ses propres récits, et si bien s'y laisse prendre qu'une fois l'histoire commencée, nul ne sait, ni lui-même, si elle durera une heure, ou bien mille et une nuits. Le Danube et ses méandres… Ce génie de conteur est si irrésistible que, dans la lettre écrite à la veille de son suicide, par deux fois il interrompt ses plaintes désespérées pour narrer deux histoires humoristiques ayant trait à sa vie passée". "Je l'ai décidé à noter une partie de ses récits; et il s'est engagé dans une oeuvre de longue haleine, dont deux volumes sont actuellement écrits. C'est une évocation de sa vie; et l'œuvre, comme sa vie, pourrait être dédiée à l'Amitié: car elle est, en cet homme, une passion sacrée ". "Tout le long de sa route, il s'arrête, au souvenir des figures rencontrées; chacune a l'énigme de sa destinée, qu'il cherche à pénétrer. Et chaque chapitre du roman forme comme une nouvelle. Trois ou quatre de ces nouvelles, dont les volumes que je connais sont dignes des maîtres russes. Il en diffère par le tempérament et la lumière, la décision d'esprit, une gaîté tragique, cette joie du conteur qui délivre l'âme oppressée. On voudra bien se souvenir que l'homme qui a écrit ces pages si alertes a appris seul le français, il y a sept ans, en lisant nos classiques ". 37 Les NOUVeLLes de ROUMANIe Connaissance et découverte Histoire BAIA MARE z ARAD SUCEAVA z BISTRITA z z CLUJ z z SIBIU z IASI TARGU MURES z TIMISOARA PITESTI CRAIOVA L GALATI z BRASOV z BRAILA z Le 22 décembre 1989 : z z ORADEA z z CONSTANTA BUCAREST z Des signes précurseurs 38 Premiers sur place, en pleine reçoivent un accueil délirant et Sans imaginer que les évènements iraient aussi vite, "Médecins du monde" s'attendait à ce que la situation bouge en Roumanie, en cette fin d'année 1989. Bizarrement, six mois plus tôt, Jacques Lebas, son président, avait été autorisé à se rendre dans ce pays. Entretenant des relations privilégiées avec la fille et le gendre français de Doina Cornea, fixés en France dans la région de Limoges, il avait été reçu par la célèbre dissidente qui vivait recluse dans sa petite maison de Cluj, surveillée nuit et jour par la Securitate. Comment un régime aussi policier a-t-il pu permettre une telle rencontre, se demanda-t-il ? Doina Cornea Avec le recul, il en déduira que la chute de Ceausescu se préparait déjà dans l'ombre et que cela faisait partie des signes envoyés à l'extérieur par ceux qui oeuvraient dans ce sens. De la même façon, le médecin avait pu visiter un hôpital, ce qui était inconcevable jusqu'ici, avant d'être expulsé pour s'être montré trop curieux… sans-doute pour faire bonne mesure. Quelque chose se tramait donc dans le dernier pion qui résistait au changement, au cours de cette folle année 1989 qui avait vu tous les régimes satellites de l'URSS emportés par le vent de la liberté. e 22 décembre 1989, "Médecins du monde" est en pleine effervescence. L'association tient à Paris un conseil d'administration dont la Roumanie est le sujet principal. Devant les prémices d'une révolution qui s'annonce, une équipe est déjà partie vers le 19-20 décembre et s'est installée à une trentaine de kilomètres de la frontière roumaine, à Szeged, en Hongrie, pays qui s'est libéré du communisme quelques mois plus tôt, et se tient prête à intervenir. Les portes de la Roumanie restent, bien sûr, fermées. L'ordre du jour du CA de "Médecins du monde" fut subitement chamboulé par une dépêche venant de tomber: Ceausescu venait d'être chassé du pouvoir et la Roumanie ouvrait immédiatement ses frontières. L'équipe de Szeged prenait aussitôt la route de Timisoara, distante de 60 km, se trouvant sur place deux heures plus tard. Elle était la première à pénétrer en Roumanie. Otopeni fermé, l'avion est détourné sur Varna A Paris, l'association interrompait ses délibérations et décidait de fréter un avion le jour même. Elle battait le rappel des médecins disponibles, au total une dizaine, dont 3-4 généralistes, 3 chirurgiens, 3 anesthésistes, certains d'origine roumaine. Rompue aux situations d'urgence, "Médecins du monde" disposait de matériel prêt qu'il suffisait d'embarquer. L'équipe montait à bord, certains de ses membres en complet veston et chaussures de ville, sans bagages, n'ayant pas eu le temps de faire leur valise. Plusieurs amis journalistes furent rameutés, dont Jean-François Bizot, le directeur et propriétaire d' "Actuel"… ainsi que l'inévitable philosophe de service pour ce genre d'expédition, André Gluscksman, Pierre-Heny Lévy et Arielle Dombasle étant sans-doute retenus pour le réveillon qui s'annonçait. L'avion humanitaire devait se poser à Otopeni, l'aéroport international de Bucarest, mais on annonça pendant le vol qu'il venait d'être fermé et, finalement il atterrit à Varna, en Bulgarie, pays qui avait "viré sa cuti" quelques semaines auparavant. Très coopératifs, les Bulgares ne demandèrent pas de présenter les visas… que personne n'avait et chargèrent aussitôt le matériel dans des camions militaires, fournissant un car pour transporter l'équipe, forte d'une trentaine de personnes, jusqu'à la frontière roumaine de Giurgiu. Ils la mirent aussi fortement en garde, colportant les rumeurs se répandant aussi bien en Roumanie qu'à l'étranger: des terroristes se cachaient dans le pays et avaient empoisonné l'eau de la capitale. Une équipe du GIGN bloquée à la frontière bulgare A la frontière, les Français découvrirent des compatriotes bien particuliers : une unité du GIGN, envoyé par le ministère de l'Intérieur français pour aider les nouvelles autorités à mettre justement hors d'état de nuire ces terroristes que l'on disaient Syriens, Lybiens, Africains, Palestiniens, Coréens, et qui avaient séjourné dans le pays au titre d'étudiants de pays frères… Mais ces militaires n'avaient pas reçu l'autorisation de pénétrer en Roumanie, peut-être pour éviter que ces professionnels de la lutte anti-terroriste ne découvrent le pot aux roses… à savoir qu'il n'y en avait pas l'ombre d'un sur le territoire, seule l'armée, et non la Securitate, ayant procédé aux massacres ayant entraîné, officiellement, la mort de 1104 personnes, mais sans-doute davantage. On convient aujourd'hui qu'il faut y rajouter tous les règlements de compte qui ont pu avoir lieu à cette occasion, personnels ou autres, desquels il faut rapprocher cette coïncidence bizarre : autour de chaque siège du Comité central du Parti communiste roumain des grandes villes, on a relevé une trentaine de cadavres. Avant de franchir la frontière, l'équipe de TV 5 reçut l'ordre de sa direction de descendre du car et de revenir à Paris: elle venait d'apprendre la mort de son reporter-photographe Jean-Louis Calderon, écrasé par un char. Les NOUVeLLes de ROUMANIe Société Demi-frère du Roi Michel, Carol-Mircea de Roumanie est décédé à Londres à l'âge de 86 ans Carnet C Une vie d'exil jusqu’à la tombe arol Mircea-Grigore de Roumanie, fils aîné du Roi Carol II et demi-frère du Roi Michel, est décédé à Londres, en janvier, à l'âge de 86 ans, où il a été enterré. Il avait exprimé le vœu de reposer auprès de son père à Curtea de Arges, mais ce désir ne semble pas avoir été pris en considération par la famille royale de Roumanie. Le prince était né en 1920 de l'union de Carol, alors prince héritier, et de sa maîtresse de l'époque, Zizi Lambrino, issue d'une famille de l'aristocratie roumaine. Le mariage secret de Carol, en 1918, avait fait scandale. Commandant un bataillon de la garnison de Târgu Neamt, en pleine guerre contre les Austro-allemands, le prince avait déserté pour aller convoler à Odessa, en Ukraine, déguisé en officier russe et muni d'un faux passeport… ce qui aurait dû lui valoir la cour martiale et le peloton d'exécution. Cette union religieuse avait mis hors d'eux ses parents, le roi Ferdinand et la reine Marie, qui l'avaient fait annuler par le tribunal d'Ilfov, en 1919. L'ordre de succession prévoyait que le prince héritier ne pouvait se marier qu'avec l'accord des souverains, du Premier ministre et du Patriarche de l'église orthodoxe, sa future femme devant obligatoirement appartenir au même rang que lui, issue d'une famille royale européenne. A la suite de l'annulation de son mariage, Zizi Lambrino était partie en exil avec son fils, lequel avait été reconnu par son père et enregistré sous le nom de Mircea-Grigore Lambrino. L'origine royale du prince avait été confirmée à la suite de deux procès qu'il avait gagnés, au Portugal et en France. Après la "Révolution" de décembre 1989, celui-ci a engagé une procédure en Roumanie pour y faire reconnaître ces deux décisions, mais ce procès est toujours à l'instruction. Toutefois, en 2004, un pas avait été fait, la mairie de Bucarest lui délivrant un certificat de naissance établissant sa filiation directe avec Carol II. Un élément important en vue du partage des biens de l'ancien souverain encore en possession de l'Etat roumain, avec son demifrère Michel. La rencontre impossible Carol Mircea de Roumanie a vécu toute son existence en exil; d'abord en France, puis en Angleterre, dans la dernière partie de sa vie. Il n'était retourné en Roumanie qu'à deux occasions: lors de l'enterrement de sa grand-mère, la reine Marie, en 1938, puis l'an passé, 67 ans plus tard, lors d'une visite privée. Il a eu deux fils: le prince Paul de Roumanie, qui revendique l'héritage royal de son père, et le prince Alexandru, lequel vit aux USA. Le fils aîné de Carol II n'a jamais pu rencontrer son demi-frère, le Roi Michel - son cadet d'un an, âgé de 85 ans - celui-ci s'opposant formellement à cette reconnaissance, malgré les tentatives infructueuses de rapprochement faites par plusieurs maisons royales européennes. Ludovic Spiess: une grande voix s'est éteinte L e ténor Ludovic Spiess est décédé, début janvier, à l'âge de 67 ans, des suites d'un infarctus, au cours d'une partie de chasse dans le judet de Teleorman. Dans les années 60, il avait été considéré comme l'un des plus grands ténors du monde, se produisant sur les scènes de Milan, Vienne, New-York, Tokyo, etc., obtenant de nombreuses distinctions dans les concours internationaux (Toulouse, 1964, Rio de Janeiro, 1965, Amsterdam, 1966). Sa carrière n'avait duré que 14 ans car, en 1976, à l'âge de 38 ans, il avait dû être opéré de nodules sur les cordes vocales, ce qui lui avait fait perdre sa voix. Le chanteur avait d'ailleurs pris sa retraite pour maladie professionnelle à 46 ans. Natif de Cluj, ouvrier aux usines “Tractorul”, Ludovic Spiess avait commencé sa carrière par hasard, à l'âge de 19 ans. Un de ses collègues l'avait emmené assister à un concert de la philharmonie de Brasov et, stupéfait, il avait découvert l'existence de la musique d'opéra. Il avait rejoint immédiatement les chœurs de son usine, puis, pendant son service militaire, s'était inscrit aux chœurs de l'armée roumaine. Il suivait ensuite les cours de l'é- cole populaire d'art de Brasov, malgré l'opposition de professeurs qui trouvaient qu'il n'avait aucune disposition musicale. A 24 ans, Ludovic Spiess faisait ses premiers pas sur la scène du théâtre musical de Brasov. C'était le début d'une prodigieuse carrière qui allait le conduire à l'opéra de Bucarest et de Vienne. D'origine allemande, bien que ne parlant pas cette langue, le ténor avait changé un temps son nom en Liviu Spinu, à une époque où le régime communiste inspirait une politique déconsidérant cette communauté. L'une des distinctions les plus appréciées du chanteur aura été son titre de docteur honoris causa décerné par l'université de musique de Bucarest, lui qui n'avait suivi que sept classes, entre primaire et collège technique. En 1991, Ludovic Spiess était devenu ministre de la culture du gouvernement PSD de Teodor Stolojan. On lui doit notamment la transformation du château royal de Peles, à Sinaia, en musée. Puis, en 2001, après le retour du PSD au pouvoir, il avait été nommé directeur de l'Opéra de Bucarest, fonction qu'il a occupé jusqu'en 2005. La brutalité de son comportement était souvent dénoncée ainsi que ses abus de fonction et le harcèlement exercé auprès de ballerines. Mais sa notoriété et sa popularité lui avaient permis de surmonter les critiques. 15 Les NOUVeLLes de ROUMANIe Société Evénement SUCEAVA BAIA MARE z ARAD z z z ORADEA CLUJ z IASI TARGU MURES z z TIMISOARA z ALBA IULIA z HUNEDOARA z z z SF. GHEORGHE SIBIU z z GALATI BRASOV BUZAU z PLOIESTI CRAIOVA z VASLUI z BUCAREST z SULINA z z TULCEA CONSTANTA z Les Roumains ont grandi de 8 cm en 30 ans 14 Selon une étude de l'Institut de Recherche Anthropologique Francisc Rainer de Bucarest, les Roumains ont grandi de 8 cm en 30 ans, les chercheurs expliquant ce phénomène, qui se retrouve au niveau mondial, par une modification de l'alimentation, les changements climatiques et la pratique du sport. Cette croissance est cependant inégale suivant les catégories de population. Ainsi la taille moyenne des hommes est-elle de 1 m 72 et correspond à celle des citadins, plus grands que les ruraux. Chez ces derniers, ce sont les habitants de Dobroudja (Constantsa) qui sont les plus grands, avec 1 m 69, devant ceux du Banat (Timisoara), 1 m 68, et les Transylvains, 1 m 67. La région de Moldavie n'a pas été prise en compte, l'étude la concernant devant paraître à la fin de l'année. Les Roumaines mesurent en moyenne 1 m 57 et on ne note pas de différence notoire suivant les régions. La Roumanie a eu son géant du XXème siècle avec Gogea Mitu, né en 1914 près de Craiova, qui mesurait 2 m 42 et pesait 183 kg à 20 ans. Il est décédé deux ans plus tard, des suites de maladies. Actuellement le plus grand Roumain est le basketteur de Cluj Ghita Muresan, 35 ans, 2 m 30, 143 kg, qui est le plus grand joueur opérant dans le championnat américain de basket NBA et de toute l'histoire de celui-ci. Le plus petit nain a été Gherasim Cornescu, 1 m 14, qui, en 1914 n'était classé que 16ème au rang mondial, le "record" revenant au Polonais Borwilawsky, 0,78 m. Le massacre de Balc: Ion Tiriac récidive M algré le scandale déclenché l'an passé par le "massacre de Balc", la propriété de chasse de 11 500 hectares, dans la région d'Oradea, que Ion Tiriac avait obtenu en concession de l'Etat pour… un loyer annuel de 240 €, le milliardaire a récidivé en janvier. Celui-ci, dont la concession a été reconduite pour dix ans, après un modeste ajustement du loyer, y a organisé un nouveau week-end de chasse. Une centaine d'invités étaient présents dont des Allemands, Autrichiens, Espagnols, Américains, acheminés par charters jusqu'à l'aéroport d'Oradea. Parmi eux l'ancien footballeur Klaus Fischer et le Prince Sturdza, dont le nom est mêlé à celui de Ion Tiriac dans la liste des grands bénéficiaires de la mise en concession du Delta du Danube, dont ont profité des proches de l'ancien Premier ministre Adrian Nastase. Ces chasseurs n'ont pas été déçus: le carnage annoncé a bien eu lieu. En 2005, en deux jours, ils avaient abattu 185 sangliers sur les 550 que compte la réserve, soit six fois plus que le quota annuel autorisé. Avec 23 animaux à son tableau de chasse, Adrian Nastase avait été couronné meilleure gâchette. Cette fois-ci, pour le seul samedi, ce sont deux cents sangliers qui ont été tués, trois parties de chasse étant organisées, au total, pendant le week-end. Ce serait cependant faire une grossière erreur d'imaginer que ces bêtes avaient affaire avec des tueurs sans pitié. Au contraire… ceux-ci ont montré qu'ils avaient un cœur "gros comme çà": les carcasses ont été sorties de la forêt en charrettes et acheminées vers un orphelinat de la région de Brasov que Tiriac finance, pour améliorer l'ordinaire des enfants. Huit cents réfugiés politiques Roumanie O n dénombre actuellement 800 réfugiés politiques en Roumanie, dont 33 % proviennent d'Irak, 10 % d'Inde, 8 % d'Iran, 8 % de Chine, le reste venant de Somalie, Turquie, Afghanistan, Palestine et Pakistan. Le Haut Commissariat aux Réfugiés, dépendant de l'ONU, s'attend à un accroissement assez sensible de leur nombre, après l'adhésion de la Roumanie à l'UE, en 2007, qui leur facilitera l'entrée dans l'espace européen. Ce phénomène a été constaté dans les dix pays d'Europe Centrale qui ont rejoint l'UE, l'an passé. Au cours du premier semestre 2004, ceux-ci ont enregistré 15 000 demandes d'asile. Pendant les six mois de l'examen de leur demande, les réfugiés en Roumanie perçoivent une allocation quotidienne de 25 000 lei (0,65 €), leur permettant d'acheter un pain et un litre de lait. Cette somme représente la moitié du minimum que l'Etat assure pour la nourriture des indigents hospitalisés. Bucarest: trop de trous… pour des bus trop bien L a mairie de Bucarest vient de passer commande de 500 bus ultra-modernes pour renouveler sa flotte vieillissante, le premier devant être livré en juin et le dernier en décembre 2007. Ce contrat de 188 M€ (soit 376 000 € ou 2,5 MF le bus) a été passé avec la firme représentant Mercedes en Roumanie qui l'a emporté sur son concurrent italien, Iveco, après un appel d'offres,. Toutefois une inquiétude est apparue. Ces autobus très longs et articulés ne pourront pas circuler dans les rues pleines de trous de la capitale et devront se limiter à la desserte du centre dont les axes ont été refaits, ou rester au garage. Il faudra donc rajouter à l'addition finale, le coût de la rénovation du réseau de voies de Bucarest. Les NOUVeLLes de ROUMANIe Connaissance et découverte "Révolution", les médecins humanitaires découvrent l'effroyable réalité des hôpitaux roumains les "french doctors" débarquent à Bucarest Le convoi prit alors la route de Bucarest, distante de 60 km, dans une ambiance frisant le délire. La nouvelle s'était vite répandue: "Les french doctors" arrivent. Ils étaient les premiers sur place, avec leurs confrère de "Médecins sans Frontières" et "Handicap International", lesquels formaient avec "Médecins du monde" les trois principales associations humanitaires française de l'époque. Les gens s'agglutinaient autour du car, frappaient aux vitres, voulaient leur toucher la main, des femmes pleuraient. Psychose des terroristes et peur de l'eau empoisonnée Dans la capitale, le convoi se dirigea vers l'hôpital d'urgence, alors qu'on entendait tirer sporadiquement. A son entrée, l'équipe fut d'emblée soumise à la psychose ambiante: la Securitate se cache dans les immeubles en face et s'apprête à donner l'assaut. Même désarroi chez le directeur: "On va être attaqué d'un instant à l'autre; je ne peux pas assurer votre sécurité; partez-vite !". "Un véritable cirque" se rappellent les témoins de l'époque. Devant le refus obstiné de "Médecins du monde" de quitter les lieux, et l'anarchie ambiante - plus personne ne commandait - le directeur fut bien contraint d'installer l'équipe dans une salle commune, au 5ème étage, pour qu'elle intervienne aussitôt. Un tour à la morgue lui permit de dénombrer déjà 90 cadavres, tombés sous les balles. Le bilan officiel des affrontements à Bucarest est de 543 morts. la Protection civile emmenée par un colonel, son avion acheminant du matériel d'urgence. Il fallait cependant prendre la mesure de la situation. Le système de santé roumain était en ruine, manquait de tout, de bistouris, d'électrocardiogrammes, d'appareils de réanimation, d'anesthésie. Les "french doctors" s'attendaient à se trouver transplantés sur un front de guerre, où il existe des moyens, apportant leurs compétences et leur bénévolat ainsi que le matériel adéquat. Ils se trouvaient en fait confrontés à un désastre, l'absence d'équipements lourds handicapant sérieusement leurs actions et se rendirent compte que tout était à faire. Transfert des blessés graves en France par avions militaires De tout le pays, affluent les demandes d'intervention. Premiers et seuls sur place - les Américains arriveront bien plus tard - les médecins français ont un impact énorme; on fait la queue pendant des heures pour les consulter. Parfois, ils sont appelés à tort, comme à Brasov où une équipe est envoyée car l'hôpital aurait brûlé, des massacres y ayant été perpétrés: une rumeur de plus, heureusement fausse. De son côté, la délégation militaire de l'ambassade de France, en concertation avec les "french doctors", organise le transfert par avions de l'Armée des blessés graves sur les hôpitaux français. Vite sur place, les radios-amateurs belges se montrent d'une efficacité redoutable et décisive, établissant les communications alors que le réseau téléphonique L’hôtel Intercontinental, où les “French "C'est pire qu'à Addis-Abeba" doctors” avaient établi leur siège, était ne fonctionne presque pas, ce qui est “assiégé” par la ferveur révolutionnaire. essentiel… et irritant profondément poliLes médecins français vécurent là leur plus grand choc: ce roumaine et Securitate car leur matériel, bien plus sophistiqué, perturbe leurs liaisons. l'effroyable misère du système hospitalier roumain, à laquelle Les premiers convois d'OVR, Belgique, France, Suisse, ils ne s'attendaient pas dans un pays "socialiste". Les guenilles arrivent, soulevant un énorme espoir dans la population qui servaient de pansements, les chirurgiens, sans aucun matériel, réalise alors que la liberté est en marche et qu'elle n'est pas opéraient pratiquement les mains nues. abandonnée. Jamais la Francophonie n'aura été autant au zéniBlindés par ce qu'ils avaient déjà vu à travers le monde, th… malheureusement, cela s'estompera. certains "french doctors"confièrent: "c'est pire qu'à AddisAbeba". Ils se mirent au travail dans la même atmosphère de panique. Médecins roumains et jeunes policiers tremblaient de La crainte démentie de trouver peur, refusaient de boire de l'eau, s'attendaient à voir des terdes "goulags" psychiatriques roristes débarquer à tout instant dans les salles de soin. Certains priaient pour que les Soviétiques viennent mettre de Début janvier 90, le "coup de chaud" de la "Révolution" l'ordre, Gorbatchev apparaissant comme un messie. passé, "Médecins du monde" décide de rester et laisse sur La situation se détendit finalement, au fil des heures et les place une petite équipe, animée par le chirurgien nantais Jeanmédecins français purent intervenir plus sereinement, d'autant Gabriel Barbin. Elle s'étoffera au fil des mois, faisant interveplus que Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat aux affaires nir directement jusqu'à 50 personnes, médecins, dont des humanitaires dans le gouvernement de Michel Rocard, débarFranco-Roumains, infirmières, autres personnels et bénévoles qua à Bucarest le lendemain 23 décembre, avec une équipe de en tous genres. (lire suite page 40) 39 Les NOUVeLLes de ROUMANIe Connaissance et découverte Un leu par jour et par enfant abandonné z z BAIA MARE ORADEA z ARAD z CLUJ z SIBIU z z PITESTI z z z SINAIA CRAIOVA z IASI P. NEAMT z BACAU BRASOV TIMISOARA z z SUCEAVA TARGU MURES FOCSANI z BRAILA z z TULCEA z BUCAREST CONSTANTA z Les malheurs d'André Glucksman 40 Sur place, "Médecins du monde" ne limita pas son intervention à l'humanitaire. L'association redoutait que les portes de la liberté si vite ouvertes ne se referment rapidement et décida de porter aussi son effort sur la culture et la communication. Grâce à Jean-François Bizot, le directeur de la revue "Actuel", qui avait amené un émetteur très puissant, la première radio libre roumaine, Radio Nova, vit le jour dès Noël, transformée en Nova 22 (en référence à la date de la chute de Ceausescu) avec l'aide de "Médecins du Monde", et émettant sur la bande FM, très peu utilisée alors, jusqu'en Bulgarie. Le 31 décembre, un charter de personnalités françaises, artistes, écrivains, hommes politiques, sportifs, débarquait à Bucarest pour passer le réveillon avec leurs homologues roumains, afin de leur montrer qu'ils n'étaient plus seuls et pouvaient compter sur leur solidarité. Dans la soute de l'avion, avait été embarqué tout ce qu'il fallait pour passer la soirée. Dès son arrivée, le 22 décembre, l'équipe de "Médecins du monde" s'était installée à l'Hôtel Intercontinental qui était devenu une “rédaction mondiale" où se cotoyaient télévisions, journalistes, humanitaires, tous bénéficiant de chambres gratuites. Mais ce ne fut pas sans mal. Son "philosophe", André Glucksman fut pris à partie par la foule et malmené, ses cheveux longs - mode inconnue en Roumanie - le faisant confondre avec un terroriste. Quelques instants plus tard, après avoir donné une interview à la télévision roumaine, il ressortit de l'hôtel et fut porté en triomphe par ceux-là même qui l'avaient tabassé ! Il y a un "turnover" important car il s'agit de volontaires qui prennent sur leurs vacances ou demandent des congés sans solde. Des antennes se créent à Timisoara, Arad. En fait le nombre d'intervenants est plus important, du personnel médical vient en franc-tireur des trois pays francophones, des CHU (Bordeaux, Toulouse, Grenoble, etc.) entament d'euxmêmes des collaborations avec des services hospitaliers roumains, les prenant en charge. La première mission de Jean-Gabriel Barbin, qui va avoir en charge également la Moldavie, la Macédoine et la Serbie, est de faire l'état des lieux et de poser un diagnostic sur le système de santé roumain. Il s'ensuit des enquêtes sanitaires, des visites de polycliniques, d'hôpitaux. Une des plus grandes craintes est vite balayée : contrairement à l'URSS, la Roumanie n'a pas transformé ses hôpitaux psychiatriques en goulags pour ses dissidents (le régime était tellement policier qu'il n'y avait pas beauAndré Glucksman a vécu des moments coup de dissidents non plus). Les psychiatres envoyés de mouvementés à Bucarest. France constatent qu'il n'avait pas existé de volonté organisée de les faire disparaître de cette façon Mais c'est une autre réalité, terrible, que découvrent les "french doctors" : ces établissements psychiatriques sont de vrais mouroirs, comme les "camin", ces orphelinats où se retrouvent les enfants abandonnés. Les uns comme les autres ne disposent que d'un budget d'un leu d'alors (0,05 €) par jour pour chacun de leurs patients. Comme aucun proche ne s'occupe d'eux, il n'y a personne pour "bakchicher" auprès du personnel, ainsi que cela se fait dans les hôpitaux, afin d'améliorer leur ordinaire. Alors, ils dépérissent, sans qu'on puisse mettre en cause employés et médecins, condamnés à l'impuissance par leurs maigres salaires. "Médecins du monde" trouvera même souvent des cas de dévouement exemplaires ou d'initiatives menés sans moyen, comme à Brasov, où les médecins psychiatres occupaient leurs malades en leur faisant faire des petits travaux, du jardinage… Des fonds importants ont été fournis par l'UE pour tenter de remettre en route le système de santé. "L'argent ne manquait pas, mais il était dépensé de façon ridicule" peste Jean-Gabriel Barbin. "Les fonctionnaires de Bruxelles interdisaient de faire des dépenses supérieures à 30 000 F (4500 €), leur réglementation ne le permettant pas. Ainsi, on pouvait acheter des pansements par tonnes, en faisant plusieurs commandes… mais pas le matériel médical lourd dont on avait cruellement besoin !". Adoptions : l'occasion manquée de 1991 Outre son action d'assistance, " Médecins du monde " s'attela à d'autres tâches et, en premier lieu au suivi de l'épidémie de SIDA pédiatrique. L'association créa aussi l'Institut International de la Mère et de la Famille, remit en état les structures d'enfants du judet d'Hunedoara, mis en route la formation de formateurs pour la petite enfance, organisa le premier congrès international de Psychiatrie à Bucarest, particulièrement apprécié des professionnels roumains dont les connaissances avaient été encadrées par le régime pendant des décennies. Elle oeuvra aussi pour la restructuration du processus d'adoption et le moraliser. Hélas, alors que le Premier ministre Petre Roman s'apprêtait à signer le décret allant dans ce sens, il fut renversé par la "minériade" de 1991. Son successeur, Theodor Stolojan, refusa de le faire. C'était la porte ouverte à tous les problèmes, dérives et trafics qu'allaient connaître par la suite les adoptions. Cet épisode marqua une rupture à "Médecins du monde", entraînant le départ de Jean-Gabriel Barbin, en 1996. L'association a cessé ses activités en Roumanie à la fin des années 90. Seules interviennent sur place aujourd'hui "Médecins du monde" de Suisse et "Doctors of the world", américain. Henri Gillet Les NOUVeLLes de ROUMANIe Evénement Société Devenu richissime, le Roumain émigré a donné cent millions de dollars pour créer un prix annuel à son nom Dan David, rival de Nobel J 'ai envie de redonner au monde, ce qu'il m'a apporté". Dan David, richissime homme d'affaires juif d'origine roumaine de 75 ans explique ainsi sa décision de créer un prix annuel de cinq millions de dollars (30 MF) destiné à récompenser des institutions ou des personnes ayant contribué à mieux connaître le passé, comprendre le présent et influencer l'avenir. Concurrent direct du Prix Nobel, le Prix Dan David, fondé en 2000, est décerné en début d'année par un jury de l'Université de Tel-Aviv, à cinq lauréats, lesquels empochent chacun un million d'euros, à charge pour eux d'en consacrer 100 000 à l'attribution de bourses pour de jeunes chercheurs, étudiants, voire lycéens prometteurs. Pour sa première version, le prix a distingué notamment deux chercheurs sur le génome humain… que le Nobel récompensait six mois plus tard. Cette année, ce sont trois savants, spécialistes du cerveau humain, qui ont été primés et qui sont également nobelisables. Le Prix Dan David se veut cependant plus éclectique et plus flexible que le Nobel, couvrant l'ensemble des activités et de la civilisation humaine. En 2003, les lauréats ont été le paléoantropologue français Michel Brunet, pour sa découverte montrant que l'ancêtre de l'Homme remontait à 7 millions d'années et non à 3,5 millions, l'astrophysicien John Bachcall pour ses recherches sur l'intérieur du soleil, le documentariste Frederik Wiseman, le photographe de guerre James Natchway et la journaliste Oriana Fallaci, dont le récent livre a été considéré par certains comme un pamphlet anti-islamiste. Dan David se défend cependant de toute influence juive ou sioniste dans le choix des lauréats, faisant remarquer que sur les vingt déjà retenus, un seul était de confession juive. L'homme d'affaires, qui a versé cent millions de dollars à la Fondation décernant son prix, lors de sa création, estime avoir assuré sa pérennité. "Je n'ampute pas le capital de mes actionnaires" indique-t-il, "ne prenant que sur les bénéfices de la société". Aidant au départ de 15 000 Juifs roumains vers Israël Dan David est né en 1929 à Bucarest. Enfant, il admet avoir assez peu souffert de sa condition de Juif sous le régime du dictateur Antonescu. "Tout ce que j'avais à faire l'hiver, quand j'étais lycéen, c'était de déblayer la neige pendant quelques jours et l'été de cueillir des plantes médicinales… rien à voir avec ce qu'ont connu les Juifs de Pologne, Allemagne, France, Hongrie, Transnistrie et Bucovine". Au lendemain de la Guerre, l'adolescent devient membre d'une organisation de jeunes sionistes. Cette activité, autorisée au début par les communistes, le conduit à organiser en 1947 le départ de l'un des sept trains qui vont transporter 15 000 Juifs jusqu'au port de Varna (Bulgarie), où ils embarqueront dans deux bateaux à destination d'Israël. Mais, à la fin de cette année, le régime arrête cette émigration légale. Jeune marié, empêché de rejoindre sa femme Dan David a alors 18 ans et s'inscrit à l'Institut de Sciences Economiques de Bucarest, tout en se passionnant pour le photo-reportage. Il se marie en 1950 avec son amour d'enfance. Sa toute jeune femme, Juive également, réussit à quitter la Roumanie, avant que la possibilité d'émigrer ne soit définitivement interrompue en 1952. Lui n'obtient pas de visa de sortie malgré ses nombreuses demandes. Elles sont refusées car il est étudiant, "l'Etat devant récupérer son investissement pour son éducation". Quelques mois plus tard, sa femme lui enverra une lettre, lui demandant l'autorisation de divorcer pour refaire sa vie. Alors qu'il travaillait dans une revue comme photographe, celle-ci envisage en 1958 de l'envoyer en reportage en Allemagne de l'Ouest. Mais on découvre qu'il a fait partie d'une organisation juive. Il est convoqué devant toute la rédaction, traité de "serpent", de traître et mis immédiatement à la porte. Le jeune homme se recasera en 1961 dans une autre revue, publiée en Roumanie, mais destinée à l'étranger et aux pays francophones, "La Roumanie d'aujourd'hui". Cependant, sa mésaventure lui a ouvert les portes de l'émigration, ce dont il profite, quittant définitivement son pays en 1962, avec sa mère, deux grands parents, 40 kg de bagages et pas un sou. Numéro un de la photo d'identité au Japon Arrivé en Angleterre, Dan David change de voie et entre dans une petite entreprise de photos d'identité, "Photo Me", que ses actionnaires, habitués des milieux boursiers ont fait entrer au Stock Exchange, mais n'ont aucune idée sur la manière de la développer. Le Roumain les convainc de tenter de percer sur le marché étranger, emprunte 200 000 dollars à un cousin vivant en France, contre promesse de le faire entrer dans le capital, si les affaires marchent, et se lance dans l'aventure. Aujourd'hui, "Photo Me" est présent sur tous les continents, fait partie des 250 premières entreprises cotées à Londres, a développé la technologie de la photo d'identité, introduisant notamment la couleur, et est numéro un au Japon, pourtant considéré comme l'empire très fermé de la photographie, avec 3500 machines installées et un chiffre d'affaires de 8 milliards de yen. Entré au conseil d'administration de "Photo Me" dès 1968, Dan David en est devenu le PDG en 1992 et est archi-milliardaire. Sa seconde épouse est décédée. Il s'est marié une troisième fois, déclarant vivre aujourd'hui très heureux. Et le Roumain de déclarer "vouloir remercier et remettre une médaille à celui qui l'avait dénoncé à la Securitate quand il avait été chassé de son journal"… 13 Les NOUVeLLes de ROUMANIe Société Evénement BOTOSANI z CLUJ ARAD z z z z z z z SIBIU TIMISOARA BACAU SIGHISOARA GALATI z z BRASOV BRAILA PITESTI CRAIOVA z IASI TARGU MURES z ALBA I. z z z TULCEA z BUCAREST CONSTANTA z Ariel Sharon a été marié à deux Roumaines 12 L'ancien Premier ministre israélien Ariel Sharon a été marié, successivement, à deux Roumaines d'origine juive. En premières noces, il avait épousé en 1950 Margolit Zimmerman, de Brasov, qui avait émigré avec sa famille, des commerçants, en Israël, en 1949, fuyant le communisme. Celle-ci était décédée dans un accident de voitures, en 1962, à l’âge de 32 ans. Ariel Sharon s'était remarié ensuite avec sa sœur cadette, Lily, une artiste qui a été le grand amour de sa vie. U n Roumain sur deux vit officiellement avec moins de 150 euros par mois, mais le boom du marché automobile et les queues interminables devant les caisses des hypermarchés pourrait donner l'illusion du contraire. Avec quelque 200.000 voitures neuves immatriculées en 2005, les ventes automobiles ont pour la première fois dépassé les 2,5 milliards d'euros. "2005 a été de loin la meilleure année pour le marché automobile roumain depuis 1990, marquée par une progression record de près de 50% des ventes", se félicite un responsable de l'association des importateurs de voitures, Mircea Tudor. Pris d'assaut par des dizaines de milliers de clients, les grands distributeurs font pour leur part état d'une année "exceptionnelle", où ils ont vu leurs ventes s'envoler de 25% en moyenne. Des produits de beauté aux chocolats, en passant par l'électroménager, tout s'arrachait à la veille des fêtes de fin d'année, contraignant les employés des grandes surfaces à un difficile slalom parmi les chariots débordant de marchandises pour remplir plusieurs fois par jour les étalages. "Cette explosion de la consommation intervient après de nombreuses années de privations", explique le sociologue Mircea Kivu. Selon lui, l'inflation galopante des années 1990, qui grignotait leurs maigres économies, a contraint les Roumains de reporter de plusieurs années l'achat d'une machine à laver ou d'un nouveau réfrigérateur. "Or, la hausse du salaire moyen, l'accès facile aux crédits et le ralentissement de l'inflation aiguisent de plus en plus l'appétit --jusqu'ici réprimé-- pour la consommation", estime-t-il. Les chèques des proches travaillant à l'étranger Ariel Sharon s’est remarié avec Lili (notre photo), soeur de Margolit, décédée dans un accident, en 1962. Lily avait ainsi respecté la tradition juive qui veut qu’une fille s’occupe des enfants de ses frères et soeurs en cas de décès et s’était installée dans la maison d’Ariel, l’épousant un an plus tard. Le couple avait visité Brasov et sa région en 1988, à la recherche de familles et parents juifs, mais ceux-ci avaient presque tous quitté le pays ou avaient disparu. Lily Sharon est décédée en mars 2000 et est enterrée dans la ferme de l'ancien Premier ministre. En outre, souligne M. Kivu, les statistiques officielles ne prennent pas en compte les revenus provenant de l'économie informelle et surtout les sommes d'argent envoyées à leurs familles par les Roumains travaillant à l'étranger et qui se sont élevées, selon la banque nationale (BNR), à 3 milliards d'euros en 2005. "Nous estimons qu'environ 1,5 million de Roumains travaillent actuellement en Italie, en Espagne et en Allemagne. Si chacun d'entre eux envoie à sa famille un chèque de 300 euros en moyenne pour les fêtes de fin d'année, nous arrivons à un chiffre total de 450 millions d'euros", indique Petre Dandea, vice-président du Cartel Alfa, l'une des principales confédérations syndicales du pays. "Cet argent va entièrement à la consommation. Sinon, avec les seuls salaires, encore très bas, il serait impossible d'expliquer la fièvre acheteuse qui s'est emparée du pays", ajoute-t-il. Mais alors que l'essentiel des biens de consommation, notamment l'électroménager, sont importés, cette explosion a entraîné un creusement sans précédent du déficit commercial, qui risquait de dépasser pour la première fois en 2005 le niveau record de 10 milliards d'euros. Soucieuse de préserver un équilibre macroéconomique déjà fragile, la BNR a multiplié ces derniers temps les mesures visant à décourager la consommation, en rendant plus difficile l'accès des particuliers aux crédits. Selon le président de l'Association des banques de Roumanie Radu Gratian Ghetea toutefois, les prêts à la consommation et hypothécaire, qui ont atteint 2,4 milliards d'euros en 2005, vont augmenter de 30% l'année prochaine, en dépit des restrictions de la BNR. "Les Roumains sont tellement avides d'améliorer leurs conditions de vie, que rien ne pourra les empêcher de s'en donner à cœur joie, même si pour cela ils doivent s'endetter lourdement", prédit-il. Ce qui n'empêchera pas de laisser à plus de la moitié de la population la seule possibilité de faire du lèche-vitrine, en guise de consommation. Connaissance et découverte A 93 ans, l'une des premières femmes pilote roumaine se rappelle de l'épopée de l'"Escadrille blanche" Aux commandes de son avion, Mariana Dragescu a sauvé des centaines de blessés pendant la guerre La fièvre acheteuse de 2005 SUCEAVA BAIA MARE Destins z z z ORADEA Les ventes de voitures et les emplettes de fin d'année ont explosé Les NOUVeLLes de ROUMANIe T oute petite, Mariana Dragescu était fascinée par les avions. Sa première rencontre avec eux n'avait pourtant rien d'engageant. Elle faisait du lèchevitrine avec sa mère dans le centre de Bucarest quand, tout à coup, l'aviation militaire allemande faisait son apparition dans le ciel et bombardait la capitale, obligeant les passants à se réfugier là où ils le pouvaient. C'était en 1916, pendant la Première guerre mondiale et la fillette avait tout juste quatre ans. Aujourd'hui, à 93 ans accomplis, héroïne et l'une des toutes premières pilotes de l'histoire de l'aviation roumaine, Mariana Dragescu se souvient fort bien des balbutiements de celle-ci. Suivant ses parents de garnison en garnison à travers le pays - son père était militaire de carrière - la jeune fille se passionne pour ces "merveilleuses machines volantes" et ne manque pas une occasion d'aller les découvrir. Faisant preuve d'esprit d'aventure, elle se rend seule à Bucarest pour assister à des meetings aériens, des courses de voitures, et pratique l'équitation. Quand Mariana apprend l'existence d'une école de pilotage pour civils, l'une des toutes premières de Roumanie, créée par le prince Ion Cantacuzino, elle s'y inscrit sans hésiter et en est la seule fille parmi les sept élèves. Sa mère, elle-même originale et moderne, la soutiendra dans sa démarche, provoquant seulement les haussements d'épaule de son mari. Mariana fait son apprentissage sur les deux avions ramenés d'Allemagne par le fondateur de l'école, Mircea Cantacuzino, qui se tuera un peu plus tard. Rencontre avec Saint-Exupéry En 1935, à 23 ans, la jeune femme obtient son brevet de pilote et est engagée, un an plus tard, par l'Aéroclub Royal de Roumanie. Avec sa solde, elle s'achètera son propre avion, un Messerschmitt Sport, l'Etat en payant la moitié. Sa vie a alors basculé du rêve à l'accomplissement. Mariana Dragescu côtoie les noms les plus célèbres de l'aviation de l'époque, le colonel Brocard, commandant de l'escadrille française de la Grande Guerre, René Foncq, l'as de l'aviation française, et Antoine de Saint-Exupéry. L'écrivain est pratiquement au sommet de sa gloire. "Il était grand et timide" se souvient la Roumaine. La jeune pilote effectue de nombreux vols, parfois dans des conditions difficiles, sans visibilité, au cours desquels elle emmène ses deux amies, Lady Hoar, femme de l'ambassadeur de Grande-Bretagne à Bucarest, et Smaranda Braescu, aussi casse-cou qu'elle et qu'on appelle "la reine des hauteurs" depuis qu'elle est devenue la première femme parachutiste de Roumanie. Sur les fronts de l'Est, de l'Ouest et à Stalingrad Survient alors sa rencontre avec Marina Stirbei, nièce de l'ancien Premier ministre Barbu Stirbei, elle-même pilote, qui lui parle de son idée de créer une escadrille sanitaire, composée uniquement de femmes. Alors que les bruits de bottes se font de plus en plus entendre sur le Vieux Continent, le projet est approuvé par le gouvernement et celle-ci voit le jour en 1938. Marina Stirbei en devient le pilote n° 1 et Mariana, le n° 2. Dotés de trois avions peints en blanc et pilotés par des femmes en combinaison blanche, cette unité va vite être connue et demeurée dans l'histoire sous le nom d'"Escadrille blanche". Les aviatrices ont tout juste le temps de s'exercer à leur nouvelle mission, transportant des enfants malades, apprenant à atterrir dans toutes les conditions et sur n'importe quel terrain, qu'éclate la guerre. Elles font vite leurs preuves et, du front de l'Est contre les Russes,au front de l'Ouest, à la fin de la guerre, contre les Allemands, sauveront 1500 blessés. Pour sa première mission de guerre, Mariana Dragescu, volant très bas pour échapper à la chasse ennemie, se pose près d'Odessa, dans une tranchée anti-tank. Quand elle s'extrait de son cockpit, elle enjambe des cadavres d'espions qui viennent d'être exécutés et se heurte à des amoncellements d'autres corps. Elle doit se débrouiller avec les blessés qu'elle doit évacuer vers l'hôpital de Tiraspol, à 25 minutes de vol. Certains ont des membres arrachés, d'autres sont défigurés. Elle les cale tant bien que mal contre son siège, les allonge à ses pieds. Et repart pour une autre rotation. Parfois ses passagers vomissent sur elle. L'un s'agrippe à son bras, ne la laissant piloter que de l'autre. Au fil des mois, tout cela devient de la routine. Surmontant sa fatigue, Mariana Dragescu, est l'une des trois pilotes qui résisteront au découragement, participant à la terrible bataille de Stalingrad, avec tous les risques que cela comportait si elle avait été faite prisonnière par les Soviétiques. Les vols à effectuer font plus de deux mille kilomètres. A la chaleur épouvantable du début, succède le froid terrible de l'hiver russe. L'eau manque, la nourriture, il n'y a pas de latrines, les infections et les épidémies menacent… Tour cela sous le bruit assourdissant, incessant et menaçant de la canonnade ennemie. (Lire page suivante) 41 Les NOUVeLLes de ROUMANIe Connaissance et découverte Traditions z z BAIA MARE ORADEA z z ARAD z z TARGU MURES z z SIBIU GALATI z COMARNIC z z BRAILA z PITESTI CRAIOVA VASLUI BRASOV z TIMISOARA IASI z CLUJ DEVA z SUCEAVA z z TULCEA z BUCAREST CONSTANTA z Mise à l'écart par les communistes 42 Après la guerre, sous le régime communiste, Mariana Dragescu obtient un poste d'instructeur de pilotes à Brasov, puis est brutalement congédiée en 1957. Elle travaillera alors comme secrétaire dans une clinique, touchant un salaire très faible. L'heure de la retraite venue, l'administration ne reconnaîtra pas ses états de services, ce qui lui aurait permis de doubler sa pension de misère. Après la "Révolution", certains Roumains se rappelleront de la formidable épopée de "l'Escadrille blanche" et Mariana sortira de l'oubli. Elle a 78 ans. On la fait lieutenantcolonel de réserve et elle reçoit l'"Etoile de Roumanie", avec le grade de chevalier. L'Armée se préoccupe de son sort, lui fait parvenir à manger deux fois par semaine, depuis la popote, et lui procure un médecin militaire. "Mais je n'en ai pas eu besoin… je n'ai jamais été malade" précise-t-elle. En France, dans les années 80-90, la pilote roumaine est également honorée, recevant le diplôme de reconnaissance des "Vieilles Tiges", association qui regroupe les pilotes vétérans français. Dans son ouvrage Femmes de l'air, chronique d'une conquête, paru aux éditions FranceEmpire en 1993, Marie-Josèphe de Beauregard lui consacre un épisode. Sans-doute le destin de Mariana Dragescu aurait-il réservé de fabuleuses surprises si, à l'âge de 35 ans, les communistes n'y avaient mis un terme. La très vieille dame le regretteelle? "Je suis fière d'être restée féminine dans un univers et un métier d'homme” se contente-t-elle de répondre. Des fromages roumains au goût de trop peu S i les habitudes culinaires des Roumains proposent le fromage à chaque repas, il est bien difficile de trouver de la variété" remarque notre confrère "Regard franco-roumain", publié à Bucarest, dans un article signé Luculus. "Lors de la fête nationale française, le 14 juillet dernier à la résidence de l'ambassade de France, le Président Iliescu, interviewé sur les fromages français, avait cité la phrase du Général de Gaulle (NDLR: attribuée aussi à Churchill): "un peuple ayant plus de trois cents variétés de fromages est ingouvernable". On peut se demander si, à l'inverse, un peuple avec si peu de fromages est gouvernable ! La fabrication des fromages roumains - les ancêtres des Roumains, au temps des Daces déjà, étaient des agriculteurs et des bergers - exprime une longue tradition. D'ailleurs le mot "brânza" (fromage) fait partie du fonds lexical dace qui nous a été transmis, un fonds très restreint, mais qui donne une idée du mode de vie des ancêtres des Roumains. Les bergers, à travers le processus de la transhumance, jouent un rôle déterminant dans l'unité des trois provinces roumaines de la Valachie, de la Transylvanie et de la Moldavie. Il s'agit là d'unité de langue, mais aussi de culture, de traditions, de coutumes. Les recettes de fabrication des fromages roumains sont gardées précieusement et transmises de père en fils, et l'on peut ainsi constater qu'elles n'ont pratiquement pas varié au fil des siècles. Lait de vache, de brebis et de bufflonne Les fromages roumains sont préparés à partir de lait de vache, de brebis ou de bufflonne - le buffle est présent dans plusieurs endroits de la Transylvanie (les régions de Brasov, de Sibiu, de Salaj). Cette production s'articule autour de la telemea - le type de fromage le plus répandu préparé avec de la présure, égoutté et coupé en gros cubes. La telemea est ensuite salée, conservée dans la saumure et connaît plusieurs stades de maturation. - Le fromage frais (branza proaspata) est généralement préparé à partir de lait de vache, c'est pourquoi il est appelé aussi "branza de vaci" et il n'est pas salé du tout. - L'urda est un fromage très riche en protéine et pratiquement sans graisse et qui, en dehors de la Roumanie, n'est plus fabriqué qu'en Corse (style Bruccio) et en Italie (le "Ricota"). - Le cas est préparé à partir du lait de brebis; c'est un fromage frais, pas salé ou légèrement salé. - Le brânza de burduf s'affine dans des outres ou bien est enrobé dans des écorces de sapin. - Le cascaval est un fromage dont l'origine du mot indique un rapport très étroit avec l'histoire. D'origine aroumaine, il est fait de - Cas "fromage" et de caval "cheval" - parce que ce type de fromage était transporté à dos de cheval à travers les montagnes par les bergers aroumains (populations qui avec les Megleno-roumains et les Istroroumains ont constitué des îlots de latinité au sud du Danube et qui sont aujourd'hui dispersées surtout dans les Balkans du sud du Danube). Ce type de fromage est une pâte cuite, il en existe plusieurs sortes, à partir du lait de vache ou de brebis, frais ou fumé, de fabrication industrielle ou artisanale au nord de la Valachie ". Les NOUVeLLes de ROUMANIe Actualité les pauvres ont des profils similaires en Europe Autre exemple, sur la base d'une comparaison entre deux pays: "En France et au Royaume-Uni, la dissolution du couple n'expose pas de la même façon les hommes et les femmes." Après une séparation, "le risque de pauvreté est du même ordre de grandeur chez les hommes et les femmes en France, mais il est plus grand du quart chez les femmes au RoyaumeUni. Pour les femmes seules sans enfant à charge, ce risque est deux fois plus important". Les auteurs rappellent que la pauvreté peut se mesurer à partir de trois critères: pauvreté monétaire, conditions de vie, mesures "subjectives" (retard dans les factures...). "Les standards des conditions de vie ne sont pas les mêmes d'un pays à l'autre", soulignent-ils. "L'environnement pollué, bruyant, vandalisé, est un critère en France, en Espagne et en Pologne, mais ne figure pas dans la liste établie pour la Russie urbaine ou la Roumanie." Autre exemple: "Pas de voiture et pas de téléphone sont des privations seulement pour les pays riches: France, Espagne, ou Pologne. Elles ne figurent pas en Russie urbaine ou en Roumanie, pour ne s'en tenir qu'à l'Europe." La France occupe "une position médiane" en Europe dans le domaine des inégalités, entre la Grande-Bretagne, l'Espagne et le Portugal (pays plus inégalitaires) et les pays du Nord (pays moins inégalitaires). Il laissera cependant sceptique les habitués de la Roumanie qui constatent que mieux vaut être pauvre en France que dans ce pays, si l'on compare le niveau et la diversité des aides sociales accordées, les "pauvres roumains " étant totalement démunis et ne pouvant guère compter que sur eux-mêmes mais aussi sur une certaine solidarité de leurs proches, dans une société ayant encore conservé ses racines rurales.. pour les retraités de Bucarest Sur les coups de minuit, un groupe en costumes folkloriques est venu servir une tsuica fierta (tsuica chaude), dont les Roumains raffolent en hiver, puis les convives les plus solides ont pu effectuer quelques tours de valses. Fête populaire dans le centre de la capitale Les jeunes de 18 à 35 ans, eux, avaient leur propre réveillon, toujours organisé par la mairie du 5ème, au Palais des enfants, et dénommé "Réveillon Béton 2006". Il leur en coûtait 50 €, une somme qui le réservait à une classe bien déterminée, illustrant une évolution marquée ces dernières années, particulièrement à Bucarest : cela fait chic de se faire voir dans les lieux en le Nouvel an avec leurs compatriotes se sont retrouvés Place de la Révolution, où les jeunes pouvaient assister à une succession de concerts gratuits des meilleurs groupes du pays, à l'appel de radio Pro FM, ou Place de l'Université, conviés par la mairie générale de la capitale. Là aussi un spectacle musical était assuré mais la vedette de la soirée était assurément le président Traian Basescu, venu présenter ses vœux à ses concitoyens. Contrairement à l'année passée, “Voisine, je parie que tu ne te rends au moment fatidique, il ne s'est pas même pas compte si je vais ou si je reviens de faire mes achats pour le réveillon”. emparé d'une bouteille de chamCaricature de Vali. pagne pour boire au goulot, mais des menus de réveillon dépassait parfois s'est fait servir élégamment une coupe les 300 €. Les Bucarestois ordinaires qui qu'il a levée à la santé du public. Un an de n'avaient pas les moyens, ni même l'idée, formation dans les ors des palais préside s'offrir ces fantaisies et voulaient fêter dentiels laisse des traces… vogue, les plus recherchés étant les hôtels et restaurants de Poiana Brasov où le prix des mineurs conduits devant le juge des enfants de Paris on doit gagner sa vie maine qui n'est distante que d'une centaine de kilomètres il continue ensuite le voyage seul. L'enquête note aussi que de plus en plus de parents laissent leurs enfants seuls pour partir travailler à l'étranger, ce phénomène s'étendant à l'ensemble du pays. A 12 ou 13 ans, ceux-ci se retrouvent devant des responsabilité d'adultes: s'occuper de la maison, des frères et sœurs plus jeunes, assurer les travaux agricoles, y compris les plus pénibles… Les abandons scolaires sont devenus, dans ces conditions, largement répandus et les enseignants baissent les bras. Il a toujours existé à Tara Oasului une tradition de migration, mais elle était jusqu'à présent interne. Elle fournissait la main d'œuvre saisonnière des mines, des travaux forestiers, des travaux publics… Tout ce qui pouvait amener un meilleur salaire. Aujourd'hui, la population émigre, utilisant pour cela les services des proches se trouvant déjà à l'étranger. Plus de la moitié des habitants interrogés par la Fondation connaissaient des enfants, ou avaient un enfant, partis travailler dans l'UE. L'enquête s'est révélée cependant particulièrement difficile à mener, se heurtant à "la loi du silence" d'une population n'ayant confiance ni dans les autorités, ni dans les étrangers aux villages. Certains enquêteurs ont été même chassés et il a fallu avoir recours à des personnes du crû pour la mener à bien, tout en montrant beaucoup de patience. 11 Les NOUVeLLes de ROUMANIe Actualité Social L Tara Oasului z ORADEA z BAIA MARE z z TARGU MURES ARAD BRASOV z z z IASI z DEVA z z SUCEAVA CLUJ GALATI z SIBIU TIMISOARA z BRAILA PITESTI CRAIOVA z z z BUCAREST CONSTANTA z Le marché porteur de la traduction séduit près de 10 000 jeunes 10 France ou Roumanie : En Roumanie, de nombreux jeunes, ne comptant que sur euxmêmes face à une situation économique difficile, sont hantés par une obsession: monter leur propre affaire. Actuellement, une opportunité est à saisir: la traduction autorisée, un marché très porteur. La demande est en constante augmentation et l'investissement initial est vite amorti. Deux points noirs néanmoins: pour l'Etat, un important manque à gagner puisque la majorité des établissements ne déclarent pas leur activité et pour le client, l'obligation de faire le tri parmi des traducteurs plus ou moins consciencieux. D'une année sur l'autre, ce secteur d'activité enregistre une croissance de 20 à 30 %. Et le marché n'est pas prêt de s'essouffler puisque les investisseurs étrangers- donc des futurs clients - sont de plus en plus nombreux et importants ainsi que la demande en produits électroménagers pour lesquels la traduction des modes d'emploi est obligatoire. Pour un entrepreneur modeste, l'investissement initial s'élève à environ 1500 € (10 000 F) : quelques ordinateurs, une imprimante et des équipements de bureau. Pour les plus ambitieux, visant déjà les grandes compagnies étrangères, l'investissement sera plus élevé, autour de 3000 € (20 000 F): dotation des bureaux, location du lieu de travail, voitures de fonction, salaires des employés... Mais le jeu semble en valoir la chandelle: selon le niveau des investissements, la somme de départ s'amortit en un à cinq ans. es causes de la pauvreté sont les mêmes en France, qu'en Grande-Bretagne, en Espagne, au Portugal, en Roumanie, en Pologne et en Russie, malgré les différences historiques, économiques et sociales entre ces sept pays, indique une étude de l'Insee parue fin décembre. "Partout, le bas de la hiérarchie socio-économique est composé de familles avec plusieurs enfants à charge ou de parents isolés, de ménages comportant des personnes handicapées ou des chômeurs, de foyers dont le chef ayant un emploi est peu qualifié", écrit l'Insee dans "Les approches de la pauvreté à l'épreuve des comparaisons internationales". Elle prend soin de préciser que "l'extrême dénuement est sans doute marginal dans l'Europe de 2000". Si le profil des pauvres est le même, "il n'en va pas de même de leurs modes de vie" (travail, dépenses, entraide)". "En Roumanie", illustre l'Insee, "l'alimentation est de loin le premier poste du budget des ménages les plus pauvres et obère toutes les autres dépenses. En France, au contraire, les ménages les plus pauvres ne consacrent que "4 % de leur budget en plus" à l'alimentation par rapport à la structure médiane Réveillon des "pauvres" M ettant en avant la fibre sociale de son parti, Marian Vanghelie, maire du 5ème secteur de Bucarest et seul élu de la capitale à ce niveau du PSD (Parti Social Démocrate d'Adrian Nastase et Ion Iliescu) a organisé un réveillon des "pauvres" à l'occasion du Nouvel an, destiné aux retraités et baptisé "Réveillon des seniors". Un millier de places leur étaient réservées dans les halls de Rom Expo, le pavillon des expositions, sur les 6500 prévues. Toutefois les bénéficiaires devaient acquitter 11 €, soit près d'un quart d'un salaire minimum ou d'une pension des plus démunis, au lieu des 34 € exigés des autres convives. Dès la mise en vente des billets, délivrés sur présentation de la carte d'identité, ce fut une véritable bousculade, 3000 personnes se pressant pour essayer d'en obtenir. Pour beaucoup, cela représentait un sacrifice mais aussi un moment de bonheur espéré et devenu rare, où de vieux messieurs pouvaient danser avec leur femme sur des airs de musique populaire, comme autrefois. Beaucoup ouvraient de grands yeux en découvrant le menu : dindon en gelée, vol au vent Marshall ("Mais qu'est ce que c'est que çà?" entendait-on), saumon fumé, œuf garni aux queues d'écrevisses, salade Waldorf, roulade diplomate… et coupe de champagne roumain. L'ambiance était assurée par des groupes réputés: le taraf de Clejani, qui se produit dans le monde entier, l'ensemble "florile Izei" du Maramures, les Haiducs de Vâlcea, Gheorghe Turda, Petrica Matu Stoian et le chanteur italien Zucherro. Tara Oasului fournit 40 % A quatorze ans… D e plus en plus d'enfants de 14 ans ou moins quittent la Roumanie pour aller mendier, voler, se prostituer à l'étranger, révèle une enquête menée par la Fondation Roumaine pour les Enfants, les Communautés et les Familles, une institution soutenue par l'UNICEF. Et si, plus d'un quart des mineurs qui arrivent devant le juge des enfants de Paris sont Roumains, 40 % d'entre-eux proviennent de la même région, quatre communes qui forment la Tara Oasului, dans le Maramures. Sur place, l'enfant qui arrive à 14 ans est considéré comme un adulte. On attend qu'il ramène de l'argent, même si cela signifie pour sa famille de le laisser partir. Et le départ n'est pas difficile: dès cet âge, l'enfant a le droit à un passeport personnel, avec l'accord de ses parents, le document devant être simplement légalisé devant le notaire. Il suffit ensuite de le faire accompagner par un adulte pour passer la frontière rou- Les NOUVeLLes de ROUMANIe Echanges Connaissance et découverte Saint-Leu-Izvoru: une amitié qui réchauffe les cœurs... et amène un dispensaire tout neuf I zvoru-Berheciului revit. La commune très démunie, située en Moldavie, à quelques kilomètres de Bacau, se sentait bien à l'écart du monde moderne. Comme ses voisines, avec ses six villages, on n'y trouve guère plus qu'une population âgée et des enfants, les adultes partant travailler à l'étranger. Pourtant les habitants se réchauffent à l'amitié que leur procure leur relation avec Saint-Leu la Forêt (Val d'Oise) dans la région parisienne et qui se concrétise de façon spectaculaire par l'ouverture cette année d'un dispensaire tout neuf chargé de remplacer celui qui existait mais était en état de délabrement. Il s'agit de la première maison rurale construite aux normes européennes, dans le secteur, avec eau courante, chauffage central, double vitrage. D'utilité publique évidente pour la population, le bâtiment comprend un cabinet médical, un cabinet dentaire, des salles de soins et un appartement de fonction pour les médecins. Un "luxe" dont on n'aurait jamais rêvé sur place et qui change déjà la façon d'y voir la vie. L'affaire n'a pas été simple à mener. Il a fallu l'opiniâtreté de l'association "Amitié Roumaine Saint-Leu-Izvoru-Berheciului" et de sa présidente, Raluca Moulinier, de son représentant sur place, Dinu Apostu, de l'association partenaire hollandaise Betania et le soutien de la mairie d'Izvoru pour que le projet aboutisse. Lancés en mai 2004, les travaux aboutissent seulement maintenant, retardés par les intempéries mais aussi par des raisons locales d'ordre administratif et politique qui, dans d'autres endroits, ont découragé les bonnes volontés. L'ouverture du dispensaire a été précédée, l'été dernier, par celle d'un point de distribution de produits pharmaceutiques qui faisait cruellement défaut, installé dans l'ancien cabinet dentaire. La population a grandement apprécié ce geste de l'association d'amitié qui lui a permis d'aborder l'hiver en étant assurée de disposer d'un minimum de médicaments. Les relations entre les deux communes ne se limitent pas toutefois aux seuls aspects humanitaires. Des échanges d'étudiants et d'enseignants ont déjà eu lieu dans les deux sens, et les écoles primaires et maternelles d'Izvoru ont reçu des livres et du matériel pédagogique. Enfin, à Noël dernier, "Amitié Roumaine" a soutenu l'organisation d'un spectacle folklorique présenté pour les adultes et les enfants par la troupe d'élèves du collège Cancicov de Bacau. Une première à Izvoru, qui a réchauffé les cœurs. Blagues à la roumaine Humour Cri du corps Cornel rentre préoccupé chez lui et interpelle sa femme : - Dis donc, j'ai appris que l'administrateur de l'immeuble a couché avec toutes les femmes de notre bloc sauf une… Tu es au courant ? - Oui, oui, chéri, c'est la voisine du dessous. Retrouvailles Un violoniste tsigane est chargé d'animer une soirée de nouveaux riches d'après la "Révolution". Au cours de la fête, un invité le questionne devant toute l'assemblée: -Dis moi, Tsigane, tu as joué autrefois aussi pour le Parti -Eh oui, patron, -Mauvais mon gars, mauvais… -Pour la Securitate, aussi ? -Fallait bien, patron, qu'est-ce que je pouvais faire ? -Et pour la nomenklatura ? -J'étais bien obligé. Le pauvre musicien rentre chez lui sous les regards chargés de reproches des néo-millionnaires et raconte sa mésaventure à sa femme : -Mais tu ne pouvais pas leur répondre que tu n'y avais jamais mis les pieds ? -Ils ne m'auraient pas cru … Ils y étaient tous ! Contraception Adriana explique à sa grand-mère qu'elle prend la pilule et lui demande : - De ton temps, vous ne connaissiez pas çà ? - Comment ? Bien sûr que si ! On avait l'aspirine… - ???? - … Le pope nous disait d'en mettre une entre les genoux et de les garder bien serrés. Mesures sociales Après avoir lancé son programme "Laptele si cornul" (du lait et un croissant) destiné à assurer un vrai petit-déjeuner aux élèves des écoles, afin qu'ils travaillent sans avoir le ventre vide, Adrian Nastase va visiter un asile de fous où les 52 pensionnaires se prennent pour lui. C'est un choc pour le Premier ministre, tant leur ressemblance est frappante: joues roses, double menton, ventre naissant… Mais il se fait traiter tout de suite d'imposteur par ses doublures et une mêlée s'engage. Le directeur de l'asile a du mal à séparer les protagonistes et surtout à reconnaître le vrai Nastase. Finalement, il se décide, en choisit un et le ramène à son chauffeur. Une semaine plus tard, le gouvernement annonce le deuxième volet de ses mesures sociales, afin de donner de l'énergie aux travailleurs dans leurs entreprises, "Tsuica et cozonac" (Tsuica et brioche). 43 Les NOUVeLLes de ROUMANIe Connaissance et découverte Tourisme z ORADEA ARAD z CLUJ z SUCEAVA z BISTRITA IASI z z z z SIBIU TIMISOARA TARGU MURES GALATI z BRASOV z BRAILA PITESTI CRAIOVA z z z TULCEA z BUCAREST CONSTANTA z Cinq principes pour un véritable agro-tourisme 44 Economie Les Roumains sont-ils z BAIA MARE z Dans les vallées de Bran et Moeciu, Les NOUVeLLes de ROUMANIe Maria Stoian, présidente de l'ANTREC, confie qu'un certain nombre de pensions ont été exclues de son association pour ne pas avoir respecté les réservations ou pour avoir augmenté leurs prix au moment où le client se présentait pour prendre possession de sa chambre. Mais elle ne se souvient d'aucun exemple de pension exclue pour ne pas avoir respecté les règles de l'agro-tourisme. Quelles sont ces règles ? Cinq principes distinguent le véritable agrotourisme: 1 - le nombre de chambres ne peut être supérieur à six, et l'architecture doit être représentative de la région; 2 - la nourriture se veut traditionnelle et 60 % des produits proviendront de la récolte propre de l'établissement; 3 - l'accueil doit être amical et le touriste traité comme un invité; 4 - on proposera aux hôtes d'assister à des activités spécifiques à l'endroit: travaux des champs, repas des animaux, travail du bois, mariage, baptême, danses à la faveur des fêtes; 5 - l'agrotourisme est d'autant plus véritable lorsque les pensions sont peu nombreuses dans une même région. L orsqu'on demande à un étranger ayant séjourné souvent en Roumanie, quelle est la meilleure façon de s'y loger, la réponse est invariablement: "chez l'habitant". En effet, les hôtels roumains, sauf de rares exceptions, peuvent être classés en trois catégories: les uns, bâtis entre les deux guerres mondiales, imposants de beauté, mais aux équipements vieillots et peu confortables, gérés le plus souvent par des personnes n'ayant pas vraiment de compétences en matière d'hôtellerie, les autres, construits durant la période communiste, aux immenses salles grandioses et glaciales, tout comme l'accueil qu'on vous y réserve, pratiquant des prix exorbitants, et puis les nouveaux palaces, gratte-ciels jurant dans le paysage, impersonnels, servant une nourriture aussi universelle que dénuée de goût, plus chers souvent que ceux proposés par l'hôtellerie française. Chez l'habitant, par contre, les amoureux de la Roumanie ont tous connu des séjours de rêve où dans une maison campagnarde toute simple, et pas forcément confortable, leurs hôtes se mettaient en quatre pour leur faire plaisir. Ils y ont fait leur toilette au robinet de la cour, ou bien dans une baignoire installée récemment mais dans laquelle on jetait des seaux d'eau chauffés sur le poêle à bois. Ils gardent le souvenir ému de petits déjeuners mémorables et gargantuesques ainsi que ceux de soirées passées dans le jardin, entourés par les voisins, buvant de la tsuica et mangeant des pâtisseries faites par la maîtresse de maison. Ils y ont chanté à tue tête jusqu'au petit matin, des chansons à boire françaises, dont les plus âgés de leurs hôtes connaissaient mieux les paroles qu'eux-mêmes. Mais tout évolue très vite en Roumanie. D'une année à l'autre les traditions laissent le pas à une copie, pas toujours réussie de ce qu'on trouve en Occident et surtout à ce qui rapporte le plus d'argent. Dans certaines régions, le nombre de pensions dépassent de très loin la demande. C'est le cas en Bucovine où l'agrotourisme apparaît comme un Eldorado et où les pensions poussent comme des champignons. Des familles se ruinent pour entreprendre des travaux d'aménagement dans leur maison; il arrive même qu'on ne puisse plus payer les médicaments lorsqu'on est malade, à cause de l'endettement. Pour attirer l'attention des touristes, on construit au bord même des grandes routes, sans comprendre qu'ils sont avant tout à la recherche du calme et de l'authenticité. L'agrotourisme devient alors un miroir aux alouettes. Mais peut-on reprocher à quiconque de chercher à mieux vivre? Des salles à manger de 60 places Né, voici plus d'une décennie, l'agrotourisme roumain atteint l'âge de la puberté, mais il grandit de façon étrange, moitié homme, moitié termopan, ces fenêtres à double vitrage, réalisées dans des matériaux modernes et isolants, et très à la mode. La maladie qui le ronge de l'intérieur est due à ses propres initiateurs qui en ont fait une industrie. Dans une rue de Moeciu de Sus (Brasov) se bousculent des dizaines de maisons dans lesquelles se précipitent en fin de semaine les habitants de la capitale, lesquels en rentrant chez eux, racontent à qui voudra les croire qu'ils ont fait de l'agrotourisme. Voici la pension "Nicoleta": deux corps de bâtiment, l'un comprenant 7 chambres, l'autre 14, une énorme terrasse, une salle à manger garnie de tables à dix places Des ouvriers y travaillent pour agrandir encore cette maison-mamouth. Actualité La privatisation de SIDEX Galati: une affaire… en acier pour son repreneur Q consommateurs mondiaux par le biais de son réseau. Les deux uand, en novembre 2001, SIDEX Galati a été tiers de sa production sont exportés et le groupe détient 90-95 repris par le géant mondial du secteur de l'acier, le % des parts du marché roumain. groupe anglo-indien Mittal Steel, le combinat Par étapes, qui viennent de s'achever, le personnel a été sidérurgique perdait un million de dollars par jour. Trois ans réduit de 30 000 à 18 000 salariés. Les employés après, il a dégagé un profit de 450 millions de licenciés ont reçu une prime d'environ 4000 € et dollars, sur la seule année 2004 et est devenu la une indemnité mensuelle de 60 € pendant un an première compagnie privée de Roumanie avec maximum. un chiffre d'affaires annuel de 2,1 milliards de Le groupe, qui est présent dans 14 pays et dollars, contre 880 millions, lors de sa privatisasur 4 continents, réalisant un chiffre d'affaires de tion. Dans le même laps de temps, sa production 22 milliards de dollars en 2004 pour une proest passée de 3,7 millions de tonnes à 5 millions. duction de 70 millions de tonnes, a surtout bénéEn état de faillite, le combinat avait été ficié d'une conjoncture mondiale exceptionnelle, racheté pour une bouchée de pain - 70 millions le prix de la tonne d'acier passant de 200 dollars de dollars - par son nouveau propriétaire, un la tonne, en 2003, à 600 dollars, un an plus tard. anglo-indien, notamment grâce aux pressions de Cette situation pourrait ne pas durer et des Tony Blair sur le gouvernement Nastase et analystes estiment que Mittal Steel pourrait quelques sombres arrangements, incluant, selon Le puissant patron Lakshmi Mittal. mettre la clé sous la porte à Galati, si le groupe la presse britannique, pots de vins et versements n'y dégageait plus de bénéfices, la privatisation ayant été faite aux fonds électoraux du Labour Party… provoquant le dépit sans qu'aucun garde-fou n'ait été prévu. du français Usinor, qui a vu l'affaire lui passer sous le nez. Le groupe anglo-indien détient aussi des combinés à Iasi, Le repreneur s'était engagé à investir 350 millions de dolRoman et Hunedoara et vient d'acquérir le combinat bulgare lars pour le moderniser, ce qu'il n'a pas fait de façon significade Kremikovtzi. Il a également porté de 11 à 89 % sa particitive jusqu'ici, redressant les comptes par une meilleure gestion. pation dans Romportmet, l'opérateur du port de Galati, dont il Ainsi les intermédiaires ont été supprimés, Mittal Steel se était le principal client. chargeant lui-même de vendre son acier auprès des grands L es Roumains aiment les glaces. La profession a établi le profil de ses amateurs et leurs goûts. Bien sûr, les enfants de moins de seize ans arrivent en tête, mais sont suivis par les personnes âgées et celles appartenant à des familles ayant des petits revenus ou moyens, les glaces étant un produit peu coûteux. En tête des préférences des Roumain vient la glace au chocolat, et particulièrement en Moldavie; suivent les glaces à la vanille et au cappuccino, notamment appréciées par les Bucarestois. Les Transylvains aiment les produits plus sophistiqués: glaces aux fruits des bois, Les Roumains friands de glaces au chocolat aux griottes…Pour les fabricants, la meilleur saison se situe au printemps et en automne. En effet, l'été ils sont obligés de restreindre leuractivité, beaucoup de détaillants n'étant pas suffisamment équipés pour conserver leur stock à l'abri de la chaleur. Plus de soixante firmes se partagent le marché, certaines ayant de petites capacités de production, de l'ordre de 3 tonnes quotidiennement, d'autres pouvant dépasser les 50 tonnes. Le numéro un est Nestlé Roumanie, suivi d'European Food. La marge de développement des fabricants est encore grande, les professionnels estimant que le marché ne devrait arriver à saturation que dans un an ou deux. La Roumanie a exporté 800 tonnes de glace pour une valeur de 1,5 M€ (10 MF), l'an passé, en premier lieu vers la Hongrie (600 tonnes), et aussi vers la République Tchèque, la Slovaquie, l'Ukraine, la Moldova, la Bulgarie et la Croatie. En sens inverse, elle en a importé 270 tonnes, pour un coût de 550 000 € (3,6 MF), principalement en provenance de Turquie, qui pratique des prix défiant toute concurrence, faisant crier au "dumping" les firmes roumaines, mais également de France (32 tonnes). Premiers bénéfices pour Renault-Dacia A près cinq exercices déficitaires, Renault-Dacia a enregistré ses premiers bénéfices en 2005, grâce à l'explosion des ventes (+ 85 %), due au phénomène de la Logan. Le constructeur a même dépassé son objectif qui était d'atteindre un chiffre d'affaires de un milliards d'euros, réalisant 1,1 milliards, soit cinq fois plus qu'en 1999, année de sa reprise par Renault, lequel a apporté depuis 650 M€ d'investissements. La firme de Pitesti entre ainsi dans le club très fermé des quatre sociétés réalisant un chiffre d'affaires annuel en Roumanie supérieur à un milliard d'euros (dans l'ordre, Petrom, Sidex, Petromioda et Métro). Elles n'étaient que deux en 2003 (Petrom et Sidex), mais pourraient bientôt être rejointes par un sixième larron, RomTelecom (800 M€ de CA en 2004). 9 Les NOUVeLLes de ROUMANIe Actualité Economie z z z z ORADEA ZALAU z z ARAD DEVA z BAIA MARE SATU MARE SUCEAVA z BISTRITA TARGU MURES IASI z z SIBIU TIMISOARA z z SF. GHEORGHE BRASOV PITESTI CRAIOVA BRAILA z z TULCEA z BUCAREST CONSTANTA z La BCR attribuée à une banque autrichienne 8 Les investissements étrangers ont baissé de 20 % en 2005 z z z Plus grosse privatisation restant à effectuer, la BCR (Banque Commerciale Roumaine), plus grande banque du pays, a été cédée à la banque autrichienne Erste Bank, qui en a pris le contrôle majoritaire pour la somme de 3,75 milliards d'euros. Jusqu'ici la BCR était détenue par l'Etat roumain (37 % des parts), la BERD (Banque Européenne pour la Reconstruction et le Développement) et l'IFC (filiale de la Banque Mondiale) étant ses deux autres grands actionnaires. Les chemins de fer ont perdu 10 % de leurs passagers Année noir pour la CFR (Chemin de Fer Roumains) qui comptait atteindre les 100 millions de passagers en 2005. La compagnie a du se contenter de 90 millions, soit 10 % en moins sur les prévisions. Raisons invoquées: les vingt jours de grève qu'elle a connues et les inondations qui ont fortement perturbé le trafic au cours du printemps et de l'été. 60 milliards d'euros pour le développement entre 2007 et 2013 Le Plan National de Développement (PND) pour la période 20072013, a été estimé à près de 60 milliards d'euros, dont 43 % seront financés par l'UE. Il devrait permettre de réduire de 10 % l'écart enregistré entre le PIB roumain et celui de la moyenne des 25 états membres de l'UE, le premier ne représentant actuellement que 31 % du second. De grosses opportunités d'installation ont été gâchées, relevant nombre de carences, administratives et humaines L 'Agence Roumaine pour les Investissements Etrangers (ARIS) estime ceux-ci entre 3,2 et 3,8 milliards d'euros en 2005, soit une baisse de 20 % et un manque à gagner de 800 M€ par rapport à 2004. Plusieurs "couacs" ont illustré les carences roumaines dans ce domaine tout au long de l'année passé, que l'on peut résumer à des réglementations inadaptées, un manque de terrains et de zones viabilisés, et des comportements manquant de réactivité. L'exemple le plus frappant, qui a conduit à une enquête demandée par le Premier ministre, concerne l'implantation ratée à Cluj de la firme française Montupet, spécialisé dans les composants automobiles, qui prévoyait un investissement de 120 M€. Après avoir été lanternée pendant cinq mois par le Conseil du Judet (équivalent du Conseil général) pour l'acquisition d'un terrain, que celui-ci ait mégoté les avantages octroyés pour l'installation de la société et fait tarder ses propositions, cette dernière a finalement choisi de s'installer à Ruse, sur les bords du Danube… mais côté bulgare. Autre "loupé" avec le constructeur de camions allemand MAN, prêt à investir 40 M€, à la recherche désespérée d'un terrain équipé de 150 hectares que personne n'a pu lui proposer en Roumanie, sauf Arad… où le problème s'est révélé autre: la firme voulait être sûre de pouvoir engager 3000 personnes, ce que ne pouvait lui garantir les autorités, invoquant le taux de chômage bas de la région. MAN a finalement pris le chemin de la Pologne. Le fabricant d'électroménager français Elcobrandts a également choisi ce pays qui faisait des propositions supérieures à celles de Bucarest pour l'installation d'une usine initialement pressentie à Dragomiresti, dans la banlieue de la capitale. L'investissement prévu était de 23 M€, devait aboutir à la création de 800 emplois et à la production annuelle de 350 000 machines à laver. Quand au polonais Barlinek, désireux d'ouvrir en Roumanie une grosse unité de fabrication de parquet stratifié, son projet se trouve dans l'impasse, Romsilva (organisme chargé de gérer la production de bois roumaine) tardant à lui apporter des assurances sur la fourniture pendant dix ans des 160 000 m3 dont il aura besoin annuellement. Avec ses seuls quatre contrats qui lui passent, ou risquent de lui passer, sous le nez, la Roumanie a perdu près de 250 M€ d'investissements. Profits à pas de géant pour l'éleveur… d'escargots F rancisc Lascu, 40 ans, avait teurs italiens - Italiens, Espagnols et décidé d'ouvrir une ferme bien Français sont les principaux consommaque ne teurs d'escargots connaissant rien à du continent - qui l'agriculture. Cet lui ont fourni ingénieur de la équipement, région de Craiova conseils et surtout (Dolj) a donc cherdébouchés. Franché une spécialité cis Lascu a acquis peu développée en six hectares de Roumanie et, terrain près de après avoir lonUne ferme d’élevage d’escargots: Craiova qui lui une pratique jusqu’ici inconnue en Roumanie. guement consulté permettent de Internet et s'y être documenté, a opté pour récolter dix tonnes à l'hectare (15-20 l'élevage d'escargots, pratiquement escargots au mètre carré), vendus 4,2 € inconnu en Roumanie. Le Doljean a réus- le kilo en Italie. Son profit net a été ainsi si à entrer en contact avec des produc- de 40 % dès la première année, en 2004. Les NOUVeLLes de ROUMANIe Connaissance et découverte 300 pensions, certaines gigantesques, ont poussé comme des champignons en train de tuer l'agrotourisme ? Malheureusement, l'agrotourisme tend à devenir une vériL'hôtesse, Nicoleta Preda, est dans sa cuisine. Une femme table industrie. Un de ses hauts lieux se trouve dans la région entre deux âges, ne quittant pas des yeux les ouvriers qui terminent une deuxième salle à manger de 60 places, dans laquelde Bran et de Moeciu, deux communes se trouvant à une trenle les touristes fêteront le Réveillon de fin d'année. Par comtaine de kilomètres de Brasov. Des citadins prospères y ont paraison, la salle actuelle avec ses 35 places ressemble à la construit des grappes de maisons de quatre étages, le paradis, petite cantine d'une entreprise d'état. selon eux, d'une fin de semaine réussie à la montagne. Ancienne cantinière de l'armée, Nicoleta Preda a comQuelque 10.000 touristes y viennent par mois attirés par mencé en investissant l'argent qu'un atelier de mécanique avait l'air pur de la montagne et les promesses des agences de tourapporté à son mari. Elle disporisme. C'est ici qu'est né en 1994 sait alors de trois chambres. La l'ANTREC (Agence Nationale décoration révèle ses goûts, elle de Tourisme Rural, Ecologique qui avait rêvé toute sa vie d'habiet Culturel), la plus importante ter en ville: des termopans, bien entité juridique de promotion du sûr, des teintures en plastique tourisme rural roumain. orange, des carreaux en faïence Durant ces dernières années partout, de la moquette couvrant Moeciu a vu se construire 500 le sol, des tableaux de champs de maisons de vacances et Bran foire. Dans presque toutes les quelque 200. S'y ajoutent 200 maisons de Moeciu de Sus, les pensions à Moeciu et une centaimêmes draperies, toujours en ne à Bran. Des maisons giganplastique orange montent la tesques, de plus de 15 chambres, garde devant les termopans, aux baptisées "pensions agro-touriscôtés des chaises en inox, aux tiques". Il existe aussi, heureuA Moeciu de Sus, près de Brasov, la Pensiunea Nicoleta, dossiers en imitation de fourrure. avec ses 21 chambres et sa cantine de 60 places, sement, des pensions de 4 à 5 est le contre-exemple du véritable agro-tourisme. chambres, dans lesquelles on Quant à la cuisine normalement élaborée avec les produits de la ferme, Nicoleta avoue: "Selon retrouve le véritable agrotourisme. Toutes les maisons en cours le nombre de personnes qui arrivent, je cours des fois jusqu'à" de construction incarnent par leur taille, la négation même du METRO "pour acheter un poulet". Mais elle jure qu'elle a le principe d'intimité. La Pension Maria Clinciu, 18 chambres, la temps de s'occuper de tous les touristes, même lorsque la maiPension Ioana Monte Carlo, 20 chambres, la Pension Luminita, 24 chambres, se disent toutes "d'agrotourisme". son est pleine. "Nous faisons de l'agrotourisme ici… Quoi d'autre?", dit-elle, visiblement dérangée par la question. Hôte et non client L'agrotourisme est la branche la plus noble du tourisme rural. Du tourisme rural, c'est aussi ce que fait n'importe que hôtel, par le simple fait d'être situé à la campagne. A Moeciu, le Complexe "Cheile Dimboviciorei" (les Gorges de la rivière Dambovicioara) sont une copie réussie d'une bâtisse bavaroise, comprenant des dizaines de chambres, mais personne ici n'a la prétention de faire de l'agrotourisme. L'agrotourisme se pratique dans une maison de tout au plus six chambres. Quatre aspects en font la différence avec toute autre forme de tourisme. Il doit s'agir d'une habitation rurale; on y sert les aliments provenant de sa propre production; on propose aux invités des activités telles que traire la vache ou faire les foins, car de cette façon, les relations d'amitié naissent facilement entre l'hôte et ses invités à la différence de celles d'un hôtelier avec ses clients. Le degré de confort se compte en marguerites et non pas en étoiles comme dans les hôtels. On retrouve ces particularités dans le Manuel de gestion d'agrotourisme de Maria Stoian, responsable de l'ANTREC, qui devrait faire du touriste un hôte et non pas un client. Sauna et jacuzzi… mais même pas un œuf dur La Villa Bucegi, à laquelle l'ancien ministre du Tourisme, Agathon, avait accordé cinq marguerites, est une bâtisse sévère, arborant les mêmes draperies, des fenêtres termopan et beaucoup d'inox pour la décoration. Baptisée "villa" afin de pouvoir dépasser le nombre de chambres autorisé pour une pension, elle s'est intitulée "pension agro-touristique" alors qu'on n'y trouve rien à manger, pas même un œuf dur. Par contre elle est équipée d'un sauna et d'un jacuzzi. A Bran, près d'un supermarché, de nombreuses indications encouragent le touriste à faire halte à "Stâna traditionala" (la Bergerie traditionnelles), un complexe de villas portant le nom de la commune. Il comprend quatre bâtisses de 9 chambres chacune - le maximum autorisé par la loi confie une fonctionnaire installée derrière un bureau surmonté de l'écriteau "Réception" - un restaurant de 40 places, aux pieds d'une colline, et plus haut, une autre auberge proposant 75 places. En y accédant, on peut caresser, à travers les mailles d'un grillage, un cerf, une biche et un poney, qui donnent à l'endroit une touche "nature". Si on souhaite prendre en photo le berger trayant ses moutons, il faudra faire partie d'un groupe constitué, et avoir téléphoné au préalable. (Lire page suivante) 45 Les NOUVeLLes de ROUMANIe Connaissance et découverte Une loi permissive qui permettait d'être dispensé d'impôts pendant dix ans z z ORADEA z ARAD z CLUJ TURDA z BRASOV z BACAU z SÂMBATA DE SUS PITESTI CRAIOVA z z z z z TIMISOARA IASI BRAILA z z TULCEA z BUCAREST CONSTANTA z L'ANTREC : 3600 membres 46 L'ANTREC compte 3.600 membres. Chaque propriétaire de pension paie une cotisation de 20 € par année pour chacune de ses chambres. Avec une moyenne de six chambres, cela fait 120 € pour l'année. Si on multiplie ce chiffre par 3.600, on obtient 432.000 € par an. Ajoutons pour chaque pension, 10 €, pour la parution de son adresse dans le guide ANTREC et 18 € pour l'abonnement à la revue "La vie à la campagne" éditée à 5.0000 exemplaires. Il ne faut pas oublier la contre valeur, toujours variable, des cours de gestion d'agro-tourisme dispensés par des employés d'ANTREC sans lesquels on ne peut pas ouvrir une pension… Et on obtient là le portrait financier à peine esquissé d'ANTREC, association "ne devant pas faire de bénéfices", dans son rôle d'arbitre devant veiller au respect des normes définies. Un arbitre qui encaisse des sommes énormes, non pas dues aux prestations dispensées à ses membres, mais à leur nombre. Plus encore, le rôle d'arbitre se confond avec celui de juge, à travers la société de tourisme "Bran Imex", dirigée par la présidente même d'ANTREC, Maria Stoian. Si l'ANTREC respectait les véritables critères de l'agrotourisme, le nombre de cotisants diminuerait sérieusement. En outre, il est reproché à cette association de ne promouvoir véritablement que la région de BranMoeciu. Lorsque viennent des journalistes, il faut passer par là absolument. "Pourquoi ce déséquilibre énorme au niveau de la promotion avec tout le reste du pays?" se demandent les professionnels. Personne ne s'élève contre cette interprétation "industrielle" de l'agrotourisme. Mais qui devrait veiller au respect de sa frontière avec toute autre forme de tourisme? Il existe des commissions dispensant les autorisations, dont font partie les représentants de l'Autorité Nationale pour le Tourisme (anciennement Ministère du Tourisme), l'un représentant la mairie, l'autre l'ANTREC, la seule association touristique autorisée. En théorie, une pension est contrôlée tous les trois ans, mais jusqu'à maintenant on n'a jamais vu un établissement disqualifié pour non respect des normes. La dernière loi adoptée en 2002, sur proposition de l'ANTREC, est extrêmement permissive, précisant par exemple que seuls 20 % des aliments servis doivent provenir de la production propre à l'établissement. Ainsi, n'importe quel motel pouvait, jusqu'il y a quelques mois, s'intituler "agro-touristique" et par là être dispensé d'impôts sur le bénéfice durant 10 ans. Pour quelle raison l'ANTREC, qui se dit "association ne faisant pas de bénéfices" ne tient-elle pas à créer et à respecter les normes propres à l'agrotourisme, alors que l'une de ses fonctions est de "contrôler la qualité des produits standards"? Tout simplement, parce que, selon les observateurs, son rôle officiel d'arbitre neutre, n'est qu'un prétexte permettant de réaliser des affaires juteuses. A Sibiu, on redonne son sens au tourisme à la campagne Heureusement, pour le tourisme roumain, cette interprétation de l'agrotourisme n'est pas générale, et certains s'en inspirent pour justement ne pas tomber dans les mêmes pièges. C'est le cas de la ville de Sibiu, ou est née une association régionale de tourisme, comptant 47 pensions membres, portant le nom "d'Association de Tourisme Rural de Transylvanie" (ATRT). De la même façon que d'autres associations existant en Bucovine, Maramures ou Apuseni, l'ATRT essaie d'imposer à ses membres des normes plus sévères que celles de sa rivale. Le nombre maximum de chambres est de 6. "Notre chance est justement le fait que nous nous soyons développés plus lentement" dit Dumitru Campean, professeur d'histoire et propriétaire d'une pension de 4 chambres à Gura Riului. (La Source du Ruisseau). "Ceci nous permet de tirer les leçons des erreurs de ceux qui ont converti l'agrotourisme en industrie". Dumitru et son épouse Chivuta, ont modifié la maison héritée de leurs parents, afin de lui donner un aspect plus typique. "Ma mère regrette que nous ayons remis des poutres et des poêles en L’agro-tourisme, au contact avec la vie rurale traditionnelle, terre cuite, comme en 1900" se rappelle Chivuta. est très apprécié des Occidentaux. Pour les repas elle prépare de la sauce aigre de veau, du rôti à la sauce de groseilles, de la topsa (mamaliga ou polenta) aux œufs et à la crème, et fabrique son propre cascaval (fromage). Son concurrent le plus proche se trouve à l'autre extrémité de Marginea Sibiului, dans la Vallée d'Argent de la rivière Cisnadioara; c'est la Pension Salistean. Bebe Salistean, un médecin vétérinaire, gère cet établissement de 4 chambres. On trouve dans la cour de sa ferme tout ce qui peut être rôti dans un four, et sa cuisine sent bon la sarriette. Il possède des chiens de traîneau, des cochons, de jeunes veaux qu'on peut caresser. Il vient même d'acheter un âne, non pas qu'il en ait besoin, mais parce que ça fait bien dans le paysage. Ces entrepreneurs roumains ont compris que les touristes viennent chercher justement ce qu'ils trouvent difficilement dans leurs pays: le respect des traditions, un contact véritable avec la nature, une façon de vivre indifférente aux avancées de la technique et surtout la chaleur de relations sincères entre les êtres, la soif de connaître l'autre et l'envie de lui donner le meilleur de soi-même. Actualité La Roumanie compte dix sept aéroports mais seuls quatre d'entre eux ont un avenir assuré Economie L'ombre du marché unique aérien se profile z SUCEAVA TARGU MURES z SIBIU z SIGHET BAIA MARE Les NOUVeLLes de ROUMANIe L 'entrée de la Roumanie dans l'UE devrait ouvrir de bonnes perspectives aux aéroports roumains, sous réserve que des campagnes promotionnelles pour attirer les compagnies aériennes soient menées par les acteurs concernés" estime Alina Oana dans la lettre de la Mission économique française de Bucarest. "Les administrations des aéroports sont conscientes des opportunités qui apparaîtront à partir de 2007 lorsque les compagnies aériennes de l'UE pourront voler sans restrictions à l'intérieur de l'espace aérien du marché unique. Néanmoins, faute de financement ou d'implication de la part des Conseils départementaux qui gèrent 13 des 17 aéroports du pays, seuls quelques uns auront des chances réelles d'attirer du nouveau trafic, voire de survivre". Myair, Blue Air, Alpi Eagles. Les besoins en investissements de cet aéroport sont de 25 M€ pour la réhabilitation complète de la piste". Timisoara, second aéroport du pays "Seuls Otopeni et Baneasa arrivent à financer leurs dépenses d'entretien par les bénéfices d'exploitation. La plupart des autres aéroports du pays se trouvent dans une situation contradictoire: d'une part, ils ne peuvent attirer les compagnies aériennes à cause d'infrastructures obsolètes, d'autre part les moyens pour investir manquent, les sommes allouées par les Conseils départementaux étant insuffisantes. L'aéroport de Timisoara est le deuxième aéroport du pays en terme de trafic de passagers. La proximité de la frontière Vers les trois millions de passagers hongroise et le grand nombre d'investisseurs étrangers ont fait annuels pour Otopeni-Coanda de Bucarest-Timisoara la ligne domestique la plus rentable, "L'avenir semble bien assuré pour les quatre principaux opérée par Tarom (la compagnie aérienne nationale). aéroports du pays disposant d'un emplacement stratégique et L'investissement de 2 M€ réalisé au cours des deux dernières dépendant du Ministère des Transport - Otopeni-Coanda et années a généré une augmentation du trafic de 12%. Baneasa (Bucarest), Constanta et A l'opposé, se situe l'aéroTimisoara -, qui ont déjà réalisé port de Suceava, dont le trafic a connu une baisse importante. d'importants investissements de Depuis le mois de mars il commodernisation. mence à fonctionner en régime L'aéroport Otopeni-Coanda d'aéroport international en a bénéficié dans les dix dernières misant sur les 300 000 personnes années de 265 M€ d'investissede la région qui travaillent à l'éments pour l'agrandissement de tranger. sa capacité et de la surface de son L'aéroport de Tulcea présenterminal passager, un financete des perspectives importantes ment complémentaire de 86 M€ grâce à la proximité du Delta du étant destiné à la modernisation Danube. Des investissements des installations jusqu'en 2008. L’aéroport international Otopeni de Bucarest, après sa modernisation. d'environ 2 M€ y ont été réaCes investissements qui, pour moitié, proviennent de ses ressources propres, commencent à lisés, les lignes vers Bucarest, Timisoara, Târgu-Mures, porter leurs fruits: l'année passée le trafic d'Otopeni-Coanda a Suceava et Iasi seront réactivées. augmenté de 13%, soit 2,6 millions de passagers, un chiffre Une solution pour le financement des aéroports serait la record. Pour 2005, les estimations de progression se situent au privatisation, schéma qui est pris en compte actuellement pour même niveau et la barre des trois millions pourrait être approl'aéroport de Târgu-Mures, au centre du pays. La future autochée. route Transilvania (Bucarest-Brasov-Cluj-Oradea) et la La hausse la plus spectaculaire a été enregistrée par le construction d'un parc industriel à coté de l'aéroport de Târgu2ème aéroport de la capitale, Baneasa (lignes intérieures du Mures sont des prémices qui devraient assurer son avenir, pays), le trafic ayant quintuplé par rapport à 2002, suite prinespèrent les autorités locales qui estiment les investissements cipalement à l'entrée sur le marché des compagnies low-cost nécessaires à sa modernisation à 16 M€ environ". Un nouvel hôtel Ibis à Bucarest L e groupe français Accord et les Hôtels Continental ont ouvert, fin septembre, le 3ème hôtel Ibis de Roumanie et le second de Bucarest, après celui situé près de la Gare du Nord. L'Ibis Bucuresti Parlement se trouve à proximité du Palais de Ceausescu, devenu siège du Parlement roumain, dans le centre de la capitale. Classé trois étoiles, il dispose de 161 chambres, tout confort, d'un restaurant de spécialités méditerranéennes, d'un bar ouvert en per- manence, et de six salles de conférences d'une capacité maximum de 140 places. Managé par le groupe Accord, cet ancien hôtel Continental a été rénové pour 8,5 M€. Les tarifs des chambres sont de 74 € en semaine et de 54 €, le week-end. 7 Les NOUVeLLes de ROUMANIe Actualité Pêcheurs et paysans de la réserve transformés en nouveaux serfs Politique Les NOUVeLLes de ROUMANIe Tourisme SUCEAVA z z ORADEA ARAD z z CLUJ z z SIBIU TIMISOARA PIATRA NEAMT z BACAU BRASOV z BRAILA z z z CHISINAU z PLOIESTI CRAIOVA z IASI TARGU MURES z Main basse sur le Delta z BAIA MARE z z z BUZAU BUCAREST CONSTANTA z Le roi Michel rappelé à ses engagements Les villageois de Birchis (Arad) espèrent que le roi Michel va renouveler son engagement… pris voici six décennies lorsque, en 1945, achetant 2630 hectares de terrains à la comtesse Ecaterina Teleki, il leur en avait attribué 290 pour que les habitants ne restent pas sans forêt communale. 6 Ces terres avaient été confisquées par les communistes et le Roi devrait les récupérer. Il revendique la restitution de 7252 ha de forêts dans le judet d'Arad, dont 4622 autour de sa propriété de Savarsin, qu'il a déjà récupérée, le reste se trouvant à Birchis. L e président Iliescu savait, mais n'a pas bougé. C'est la conclusion de son ancien conseiller Dan Moraru qui avait rédigé en mars 2003 un rapport explosif dans lequel il exposait le mécanisme mis au point par le gouvernement Nastase, son ministre de l'environnement, Petru Lificiu et le gouverneur du Delta de l'époque, Virgil Munteanu, afin de permettre à des proches de faire main basse sur la plus grande réserve biologique régénérable d'Europe, inscrite au Patrimoine mondial de l'UNESCO, et appelée à un avenir touristique considérable. D'après le projet, le Delta était menacé d'être transformé en système de concessions de plusieurs milliers d'hectares, dont certains en zone protégée, d'une durée de 50ans, donnant ainsi toute latitude d'exploitation à leurs bénéficiaires. Dan Moraru réclamait l'intervention présidentielle pour empêcher la naissance d'un état dans l'Etat, mais Ion Iliescu n'avait rien fait. L'opération a été menée à bien, cinq mois plus tard, dans des conditions illégales et immorales et de manière coercitive. Les autorités l'ont justifiée hypocritement en mettant en cause "le surbraconnage auquel se livraient les pêcheurs", contrevenant aux recommandations environnementales de l'UNESCO. L'adjudication des concessions s'est faite en dehors de toutes règles, décidée parfois quelques heures avant, empêchant ainsi pêcheurs et paysans de postuler. Cela n'avait d'ailleurs guère d'importance, puisque les lots avaient été attribués tacitement auparavant à des proches du pouvoir, parmi lesquels Alexandru Bitner, dont on retrouve le nom lié aux affaires concernant Adrian Nastase, Ion Tiriac, le prince Sturdza et le député PSD local, Dan Verbina, devenu un véritable boyard dans son fief. Le leu sort renforcé de 2005 Signal d’alarme tiré en vain Le nouveau leu - équivalent à 10 000 anciens lei - adopté le 1er juillet dernier, est aussi une monnaie plus forte. Tout au long de 2005, il s'est raffermi, après avoir atteint son niveau le plus bas en février (1 € = 42 000 lei), pour se stabiliser aux environs de 36 500 lei pour un euro, à la fin de l'année et avoir fait descendre la monnaie européenne à près de 34 000 lei, à l'automne. Le leu s'est donc renchéri de 10 %, et, en fait, de près de 20 %, si on tient compte de l'inflation (+ 8,5 %). Son gain est quasiment équivalent face au dollar (moyenne 2005 : un dollar = 29 500 lei). Dans son rapport, Dan Moraru citait tous ces noms mais aussi s'alarmait des graves conséquences à venir qui, malheureusement, se sont presque toutes réalisées: la perte de confiance de la population locale dans les autorités et les institutions de l'Etat de Droit; l'instauration d'un sentiment de peur, d'insécurité et d'injustice parmi les gens simples. De fait, les pêcheurs ne peuvent plus tendre leurs filets où bon leur semble, comme autrefois, mais dépendent des autorisation des concessionnaires auxquels ils doivent vendre les produits de leur pêche, dont les prix ont été depuis divisés par deux. Il en est de même pour les paysans. Le retour à une société féodale où la population est transformée en serfs, tremblant devant leurs maîtres… ce qui est devenu une réalité ("Les Nouvelles de Roumanie" n° 29, supplément Delta du Danube). Le rapporteur dénonce également le risque de détérioration du sentiment national et de perte d'audience du PSD auprès d'un électorat local tenté de se tourner vers des partis extrémistes (ce dernier point ne s'est pas vérifié lors des dernières élections). Il est à noter que le représentant permanent de l'UE à Bucarest, Jonathan Scheele, qui suivait de près le problème avait été constamment désinformé par le ministre Petru Lificiu, lequel l'avait assuré que seulement 3 % de la population locale était hostile au projet, alors que ce pourcentage était déjà de 50 %. Connaissance et découverte Sâmbata de Sus, au pied des superbes monts Fagaras, parmi les éleveurs de buffles I Breaza, à 8 km au Nord-Est, abrite les ruines d'une fortedéalement situé au pied des Monts Fagaras, le village resse du 13ème siècle. Les murs d'une fortification dace y de Sâmbata de Sus, proche du plus grand axe de furent découverts sous les fondations. Transylvanie, mais loin de son bruit, est intéressant pour les amateurs de tranquillité, de sports de montagne Les Fagaras, à pied, et aussi de sports équestres. Ses en charrette ou en 4 x 4 habitants sont essentiellement agriculteurs, arboriculteurs ou C'est précisément à Breaza éleveurs de buffles entre que s'organisent des dizaines autres. d'excursions dans les Monts Sâmbata de sus fait partie Fagaras. En 4x4, charrette ou à de la commune de Voïla, dans pied, vous pouvez découvrir laquelle plusieurs des villages des paysages grandioses: les ont des particularités intéreschutes et le lac glaciaire de santes, et est située sur l'axe Bâlea, la vallée du lac artificiel Brasov-Sibiu (E 68), 12 km de Vidraru, que l'on atteint par après Fagaras; à Sâmbata de la route N7C appelée la Jos prendre à gauche, Sâmbata Le magnifique monastère Brancoveanu a été construit en 1700 et Transfagaras, en véhicule norson musée possède une collection rare d’icônes en verre et sur bois. de Sus est à 6 km. mal, mais seulement en été car en hiver, elle est fermée. Des cabanes permettent de passer des nuits près du ciel en Recueillement au monastère Brancoveanu et compagnie des bergers. Le camping sauvage, la natation, la fiers Lippizans de l'école d'équitation de Vienne plongée, le parapente, tout est possible avec votre matériel, tant que vous respectez la nature. Sâmbata de sus (sus = en haut) est très connue en Pour les plus aguerris, et en prenant la précation d’avoir Roumanie grâce au monastère Brâncoveanu. Monastère de recours à des guides expérimentés, vous pouvez escalader les moines, celui-ci est situé à 5 minutes de voiture, en direction points culminants de Roumanie: le Negoiu, 2535m et le de la montagne. Il fut construit en 1700 par C. Brancoveanu Moldoveanu, 2544m. Allez-y, vous en garderez de merqui laissa son nom à "L'art Brâncovean", expression architecveilleux souvenirs. turale qui essaima à la fin du 17ème siècle en Transylvanie. Sa Pour ceux que la montagne n'attire pas, la visite de la ville situation en pleine nature, lui confère une atmosphère propice de Fagaras et de son château fortifié entouré de douves dont au recueillement. De plus, il est reconnu pour son musée qui l'origine remonte au 12ème siècle, est une alternative. C'est au possède une rare collection d'icônes sur verre, et moindre 17ème siécle qu'il a été reconstruit et son enceinte à été refaid'icônes sur bois. te selon le modèle des forteresses de l'architecte français, De belles balades peuvent être entreprises sur les contreVauban. forts tous proches des Monts Fagaras. Au village de Sâmbata de Jos (jos = en bas), se trouve le A proximité également, vous pouvez entreprendre le cirharas dans lequel sont élevés 300 chevaux "Lipitani" cuit des église fortifiées saxes. (Lipizzans). Preuve du savoir faire de ces éleveurs, ce sont les descendants des juments de Sâmbata qui aujourd'hui font les Accueil bon enfant beaux jours de la fameuse Ecole d'équitation de Vienne. Des leçons d'apprentissage à la monte à cheval sont proposées, L'accueil est très souriant, bon enfant, toute la famille où ainsi que la location de chevaux pour les plus expérimentés et vous serez logé se mettra en quatre pour vous satisfaire. des promenades en calèche à travers le grand parc du haras. Dernier-né du réseau OVR, nous avons rencontré des responDes randonnées à cheval sont aussi possibles. Pour une somme sables enthousiastes, prêts à apprendre. Plus ils recevront de modique, on peut également visiter le haras et faire des photos. touristes, plus leur savoir-faire se peaufinera. Il n'existe pas A Dragus, 3 km à l'ouest de Sâmbata, on trouve le centre encore d'activités précises proposées aux voyageurs mais cela ethnographique et folklorique de la région, réputé en particuviendra. lier pour ses danses populaires. Martine et Jean Bovon-Dumoulin Pour en savoir plus, retrouvez les bonnes adresses de Martine et Jean Bovon-Dumoulin en commandant le guide OVR Retea Turistica Au pays des Villages roumains qui permet de partir à la découverte d'une Roumanie authentique à l'aide de fiches en couleurs. Commandes à adresser à Martine Bovon-Dumoulin, Borgeaud, 35, 1196 Gland, CH Suisse. Joindre un chèque de 23,10 € (port compris) à son ordre. 47 Les NOUVeLLes de ROUMANIe Connaissance et découverte Souvenirs Un jeune Français Marié à une Roumaine depuis près de 30 ans, z z ORADEA CURTIz z z z DEVA BACAU SIBIU TIMISOARA IASI z z z z SUCEAVA TARGU MURES CLUJ ARAD z GALATI z BRASOV z BRAILA PITESTI CRAIOVA z La Roumanie z SATU MARE z z TULCEA z BUCAREST CONSTANTA z Un destin franco-roumain 48 Yves Lelong, 54 ans, travaille dans un important réseau bancaire, à Tours. Il avait 21 ans lorsqu'il rencontra Doina, 20 ans, en septembre 1972, au cours d'un voyage en Roumanie, alors qu'il était encore étudiant. Trente trois années se sont écoulées depuis ce premier séjour, marquées par son mariage avec Doina, en 1978, la naissance de leurs deux filles, en 1980 et 1984, mais aussi par les nombreux séjours effectués en Roumanie. Tous l'ont été à titre personnel et familial. Ils constituent néanmoins une perception, un témoignage vécu, parfois de près, parfois de loin, sur ce que pouvait être la réalité quotidienne en Roumanie communiste, au sein d'une famille, sous l'ère Ceausescu. Nul doute que nombre de Francophones, Rien ne valait les premières Dacia Les premières Dacia fabriquées en Roumanie comportaient un certain nombre de pièces françaises, comme la boîte de vitesse. A tel point que ces modèles furent surcôtés par rapport aux Dacia qui, à partir de 1976, furent entièrement fabriqués sur place. L'un de nos proches eut la chance de gagner, à une tombola de la CEC (caisse d'épargne roumaine), au début des années 80, une Dacia 1300 flambante neuve. Il préféra la revendre pour conserver sa vieille Dacia de 1973 qui, elle, était équipée de pièces d'origine française. A titre anecdotique, cette voiture a aujourd'hui 32 ans et roule encore. Au fait, savez-vous que la première Renault 12 jamais montée sur une chaîne le fut à l'usine de Pitesti ? E n 1968, paraissait sous le titre Vacances en Roumanie un petit guide touristique édité dans la collection Marabout Flash. Certains se souviendront peut-être de cette sympathique collection de poche de petit format, très bon marché, se définissant comme étant "l'encyclopédie permanente de la vie quotidienne". On y trouvait une foule de thèmes, de la philatélie à la taille des rosiers en passant par l'apprentissage de langues (Notre photo: Yves Lelong, Doina et un ami). La Roumanie, pourquoi pas?. Par ces quatre mots et en 150 pages, ce Marabout Flash invitait ses lecteurs à partir à la découverte de "la sœur cadette de la France". C'est ainsi qu'à l'époque, on désignait fréquemment la Roumanie au même titre, d'ailleurs, que Bucarest avait été le petit Paris. Le petit Marabout fut pour moi l'instrument du début de ma découverte de la Roumanie. Même succinct, on y trouvait l'essentiel de ce qu'il fallait savoir sur le pays et il s'adaptait parfaitement aux budgets modestes. Une politique touristique très libérale A cette époque, du moins jusqu'en 1975, la Roumanie avait, contrairement à ses voisins, une politique touristique très libérale. "Le rideau de fer, vous ne vous apercevrez même pas que vous l'avez franchi", écrivait le petit guide Marabout. "Vous circulerez librement, comme chez vous et serez heureusement surpris par le respect de la liberté dont on fait preuve à l'égard du touriste pourvu que, comme ailleurs, il observe les règles du pays qui l'accueille". On se procurait les visas au consulat de Roumanie, rue de l'Exposition, à Paris, démarche qui s'est d'ailleurs prolongée au delà de 1990. Les formalités étaient assez simples. C'était plutôt rassurant mais l'appréhension pouvait venir d'ailleurs. La guerre froide était une réalité bien présente. La véritable nature des régimes communistes avait été révélée par la répression féroce des soulèvements hongrois de Budapest en 1956 et du "Printemps de Prague" en 1968. Des ouvrages comme L'Aveu d'Arthur London ou Une Journée d'Ivan Denissovitch d'Alexandre Solyenitsyne, des films comme Le Rideau déchiré d'Alfred Hitchcock ont marqué leur époque mais aussi les esprits. C'était l'époque où Ceausescu faisait souffler sur le pays un vent de "liberté" si tant est qu'il y en eût. Il s'était attiré les bonnes grâce des dirigeants occidentaux en refusant notamment de participer à l'invasion de la Tchécoslovaquie en 1968 et en en donnant l'illusion de s'émanciper de la tutelle de Moscou. Les chars du pacte de Varsovie avaient écrasé le printemps de Prague quatre ans auparavant et le président roumain se plaisait à jouer les trublions dans le bloc communiste. D'ailleurs, certains commentateurs affirmaient que la Roumanie était dans le collimateur de Brejnev et serait le prochain pays à être écrasé sous les chenilles des chars soviétiques. En revanche, la Hongrie était restée dans le rang. Les visas ne s'obtenait qu'après avoir rempli un formulaire sur lequel il fallait notamment coller sa photo, préciser le nom de jeune fille de sa mère et indiquer si les parents du demandeur avaient quitté la Hongrie - et si tel était le cas, en quelle année ? - etc. Il était évident que certains n'étaient pas les bienvenus en Hongrie. D'ailleurs, à l'instar de l'URSS, les touristes occidentaux qui circulaient en Hongrie devaient, à chacune de leurs étapes, aller se faire enregistrer au poste de police local. Les NOUVeLLes de ROUMANIe Actualité la corruption sabotée par le Sénat de la Roumanie dans l'UE au 1er janvier 2007 et George Copos, actuel ministre d'Etat du gouvernement Tariceanu. Grâce à un fort taux d'abstention de sénateurs appartenant aux partis de la majorité, le Parti Social Démocrate (post-communiste), au pouvoir jusqu'à fin 2004, allié au parti extrémiste de la Grande Roumanie (Vadim Tudor), a réussi à trouver une majorité pour bloquer une politique qui a entraîné ces derniers mois la mise en cause de nombreux dirigeants politiques. Parmi eux, Dinu Patriciu, patron du groupe pétrolier Rompetrol, un des principaux bailleurs de fonds du Parti National Libéral, poursuivi pour fraude, évasion fiscale et blanchiment d'argent, ami du Premier ministre Calin Tariceanu, lequel, sans se soucier de respecter le principe de séparation du pouvoir, lui a apporté son soutien à plusieurs reprises. Cela tombe très mal pour la Roumanie qui est dans le collimateur de la commission de Bruxelles, laquelle a exigé qu'elle mène une politique active contre la corruption et pour rendre la justice indépendante, sous peine de voir son adhésion à l'UE, prévue au 1er janvier prochain, retardée d'un an. Justement Bruxelles doit rendre son rapport définitif sur la Roumanie et la Bulgarie en avril: le délai qui reste au président Basescu pour réparer ce vote négatif et faire passer une seconde fois le projet d'ordonnance d'urgence devant le Parlement est donc très court. Mais le mal est déjà fait et des voix de plus en plus nombreuses s'élèvent au sein de l'UE, et jusqu'au Parlement européen, pourtant très favorable jusqu'ici à l'entrée de la Roumanie et de la Bulgarie dès 2007, afin de repousser cette échéance. et sa femme déconsidérés par plusieurs scandales financiers d'avoir une tante !" avoir reçu des dessous de table dans l'acquisition d'un terrain de 700 m2, situé strada Zambaccian en plein centre de la capitale, acquis en 1998 pour un prix 25 fois inférieur à celui du marché, auprès de la belle-mère de l'ancien député PSD, Gabriel Bivolaru, aujourd'hui derrière les barreaux pour avoir détourné 50 M€ auprès de la BRD (Banque Régionale de Développement-Société Générale). Sur ce terrain a poussé depuis un immeuble appartenant aux Nastase, au fils de Ion Tiriac (qui a recédé sa part au fils Nastase) et au frère de l'ancien maire de Bacau, Sechelariu. A la demande du nouveau gouvernement, un premier dossier judiciaire avait été ouvert en avril 2005 sur cette affaire par le PNA (Parquet National Anticorruption), mais celui-ci, encore aux ordres de l'ancien pouvoir, l'avait vite refermé. A la suite de la purge effectuée à la tête du PNA, il a été cependant réouvert et confié au Département National Anticorruption, chargé d'enquêter sur la corruption parmi les parlementaires et ministres. Mais le Sénat a voté opportunément contre l'ordonnance d'urgence instituant ce nouvel organisme. Par ailleurs, le bureau de la Chambre des députés, dont le président est Adrian Nastase a bloqué la demande de perquisition du domicile de celui-ci, formulée par la Justice. Contrairement aux usages, Adrian Nastase a pris part au vote le concernant, le faisant basculer en sa faveur. Il a dénoncé "une campagne politique menée contre lui" et "l'acharnement du pouvoir à vouloir le mettre en cause". En difficulté au sein du PSD Le nom de l'ancien Premier ministre et président de l'Assemblée nationale est souvent cité dans d'autres "affaires", le nom de sa femme, fille d'un ancien ministre de Ceausescu, servant de paravent. L'image du couple est en train de devenir celle du symbole de la corruption de haut niveau en Roumanie et Dana Nastase jouit auprès de la population d'une réputation qui rappelle celle d'Elena Ceausescu. Toutes ces péripéties ont toutefois sérieusement assombri l'avenir politique d'Adrian Nastase qui a été obligé de mettre en suspens sa fonction de président exécutif du PSD (Parti Social Démocrate post communiste), son rival et ancien ministre des Affaires Etrangères, Mircea Geoana, qui lui a ravi en mai dernier la présidence de ce parti et aimerait se débarrasser de cet encombrant tuteur, ne manquant pas les occasions d'appuyer là où çà fait mal. Réponse du berger à la bergère? Mircea Geoana a été mis en cause récemment dans une affaire d'acquisition de terrains… qu'il aurait hérités non pas d'une tante, mais d'un cousin ! plus faire de politique nistrateurs neutres et compétents, capables de faire prévaloir les intérêts de l'Etat sur ceux des partis et les combines politiciennes. Les dernières élections avaient été révélatrices d'une situation choquante, durant depuis la "Révolution": pendant plusieurs jours, les partis d'opposition vainqueurs s'étaient disputés comme des chiffonniers pour s'attribuer les fonctions administratives juteuses qu'ils espéraient obtenir dans chaque judet. Au moins, avec le PSD (Iliescu-Nastase), les choses étaient claires… ces anciens communistes raflaient tout et ne rendaient de comptes à personne ! Avec cette réforme, la Roumanie est toutefois loin de disposer de cette armée de grands commis de l'Etat, si nécessaire à son bon fonctionnement et qui lui fait cruellement défaut. Il faut qu'elle commence par les former, la France l'aidant dans cette tâche. Dans l'attente, les préfets confirmés "nouvelle version" devront faire oublier - sans rire - qu'ils sortent tout droit de leurs officines politiques, même s'ils ont rendu leurs cartes. 5 Les NOUVeLLes de ROUMANIe Actualité La lutte contre Politique z z BAIA MARE ORADEA CLUJ ARAD z z z z z z RESITA z BRASOV z z PITESTI z BACAU GALATI z SIBIU CRAIOVA IASI TARGU MURES z TIMISOARA Menaces sérieuses sur l'entrée z SUCEAVA TÂRGOVISTE z TULCEA z BUCAREST Nationaliste pour l'éternité Gheorghe Funar, l'ancien maire de Cluj, a eu la désagréable surprise de découvrir sa tombe profanée, le jour de Noël. Elle avait été peinte en bleu-jaune-rouge, les couleurs du drapeau national. 4 Conformément à une tradition assez respectée en Roumanie, le leader ultra-nationaliste, sénateur du Parti de la Grande Roumanie (PRM), et compagnon de route de Corneliu Vadim Tudor, avait préparé sa dernière demeure pour lui-même et sa famille, faisant ériger une tombe de marbre rose dans le carré des personnalités du cimetière des Héros de la Révolution de Cluj, et venant s'y recueillir. On peut y lire l'inscription suivante: "Ici repose Funar Gheorghe, né en 1949, décédé en ****, docteur en économie, maire de Cluj-Napoca entre 1992 et 2004". L'élu n'a pas porté plainte et, du coup, aucune enquête n'a été diligentée. Lorsqu'il était maire, Gheorghe Funar, outre sa phobie des Hongrois et des Tsiganes, s'était fait remarquer en faisant peindre aux couleurs nationales les trottoirs et les bancs publics du centre de sa ville. C 'est un sale coup contre leur pays auquel se sont livrés les sénateurs roumains. Le 9 février, ils ont rejeté une ordonnance d'urgence prise par le gouvernement en septembre 2005 pour se donner les moyens de lutter contre la corruption de haut niveau en instituant un département spécial chargé d'enquêter sur celle-ci parmi les parlementaires et les ministres. Un comportement bien révélateur des Adrian Nastase mœurs politiciennes roumaines, mais qui en compagnie de sa femme Dana, fille d’un ancien dignitaire de Ceausescu. s'explique: plusieurs d'entre-eux sont impliqués dans des "affaires", dont Adrian Nastase, président de la Chambre des députés, L'ancien premier ministre Adrian Nastase A h ! Quel malheur d'avoir un gendre"… La presse de l'époque brocardait ainsi le président de la République Jules Grévy, dont le gendre, Daniel Wilson, s'était livré à un commerce et trafic fructueux d'attribution de Légions d'honneur, le contraignant à la démission en 1887. Cette fois, l'histoire concernant Adrian Nastase est un peu différente mais a fait aussi les choux gras de la presse roumaine. La femme de l'ancien Premier ministre s'est découverte subitement seule héritière d'une tante, "Matusa Tamara", décédée l'an passé à 97 ans, quasiment inconnue d'elle jusqu'ici. Cette tante, ancienne professeur de langues (retraite de l'ordre de 100 €) était devenue très riche sur ses vieux jours en vendant ses bijoux pour une somme de 400 000 € à Alexandru Bittner, l'homme lige et partenaire en affaires du couple Nastase. La somme avait été déposée en D "Ah ! Quel malheur 1999 sur un compte au nom de Dana Nastase où elle pouvait puiser. A 93 ans, la vieille dame "s'était aussi lancée dans la spéculation immobilière" acquérant un immeuble de style brancovénesque de 700 m2 et 26 pièces, en face de l'ambassade de France, à Bucarest, pour quelques centaines de milliers d'euros, revendu l'année suivante 1,1 million d'euros et estimé aujourd'hui par son propriétaire à 2,5 M€. Cette "fable" avait attiré l'attention de la banque où l'argent avait été déposé, celle-ci avertissant l'Office national pour combattre et prévenir le lavage d'argent sale qui avait ouvert un dossier en avril 2000. Ce dernier a été opportunément perdu en 2001, quand Adrian Nastase est devenu Premier ministre. Il ne s'agit pas de la seule affaire où le couple Nastase est mis en cause. Il vient d'être officiellement inculpé dans le dossier Zambaccian, pour corruption et Les préfets ne peuvent epuis le 1er janvier dernier, le loi oblige les préfets à ne plus appartenir à un parti politique, à un syndicat et leur interdit de faire grève. Ces représentants de l'Etat perdent leur statut de "dignitaire" pour devenir hauts fonctionnaires. Sur les 42 préfets que compte la Roumanie, 39 ont choisi de renoncer à leurs fonctions politiques, dont la préfète de Bucarest, Mioara Mantale, membre du Parti Démocrate de Traian Basescu (notre photo). Trois, les préfets de Ilfov, (contours de Bucarest), Dimbovita (Târgoviste) et Caras Severin (Resistsa), ont préféré abandonner leur poste pour conserver leur position au sein du PNL (Parti National Libéral du premier ministre Tariceanu). Ce changement de statut des fonctionnaires était réclamé haut et fort par Bruxelles, afin que la Roumanie se dote d'un corps d'admi- Les NOUVeLLes de ROUMANIe Connaissance et découverte découvre la Roumanie en 1972. il nous conte ses souvenirs de Ceausescu à la "Révolution" pourquoi pas ? Au début des années 70, le train était le moyen le plus écolocomotives et le train soigneusement fouillé. Une partie du nomique et le moins fatiguant, à défaut d'être le plus rapide, plafond du couloir des voitures était démontée et l'espace compour se rendre en Roumanie. Du moins pour l'étudiant que j'épris sous le toit inspecté à la torche électrique. Même chose tais à l'époque. L'avion était hors de prix et il fallait trois jours pour le dessous des banquettes. de voiture pour rejoindre la Globalement, le passage des douanes honfrontière roumaine. groise et roumaine s'effectuait sans difficultés L'Orient-Express reliait notables, du moins pour ce qui me concerne, Paris à Bucarest. Il partait de la mais toujours avec une certaine appréhension. gare de l'Est à 22 h 15. Il arrivait à Bucarest le surlendemain au Les pensées du "chef" terme de 36 heures de voyage, via Strasbourg, Munich, Vienne Après le passage de la frontière roumaine, à et Budapest. Une voiture des Curtici, le train mettait un temps qui paraissait CFR (chemins de fer roumains) interminable pour rejoindre Arad. Au bout d'une faisait la liaison directe Parisheure, il ralentissait enfin à l'approche de la ville. Bucarest. C'était l'occasion Spécialité des gares roumaines: pas de pancarte idéale de faire connaissance annonciatrice de la ville sur les quais. Au cours “Vive le Parti Communiste Roumain et son de mes voyages en train, j'ai toujours eu la crainavec des Roumains qui rensecrétaire général, le camarade Ceausescu”. traient au pays après un séjour te de ne pas descendre à la bonne station. en France ou en Allemagne, le plus souvent dans la famille. Je garde, plus de 30 ans après, un souvenir extrêmement J'avais notamment sympathisé avec un médecin de Iasi avec précis de cette nuit du 3 au 4 septembre - la première que je lequel j'ai correspondu quelques temps. passais en Roumanie - dans la gare d'Arad, à attendre le train pour Timisoara. Les chiens qui aboyaient dans la nuit chaude Des bagages, des bagages, encore des bagages… et calme (il y a toujours des chiens qui aboient dans la nuit en Roumanie), le sifflet des locomotives, le vacarme des rares Le voyage se déroulait immanquablement au milieu des trains de marchandises tirés par de poussives locomotives diemonceaux de bagages qui, souvent, appartenaient à une seule sel, les trois ou quatre employés des chemins de fer qui déambulaient et s'apostrophaient sur le quai, tous vêtus d'une veste personne. Au fur et à mesure des arrêts en gare, les compartide bleu trop courte et rapiécée, un béret basque étriqué sur la ments, les couloirs, les plates-formes étaient envahis de valises, de sacs ou de cartons. Je me souviens d'un voyage en tête, le filet d'eau qui chuintait des robinets d'une fontaine de 1972, au moment des fêtes de Noël, dans un train pierre, sur le quai. bondé, entre Budapest et la frontière roumaine, Etait-ce les effets de la fatigue qui, après coincé au milieu des bagages, debout devant la ces 24 heures de voyaporte des toilettes et au milieu de courants d'air glage, distillaient en moi cials. Mémorable. cette indéfinissable Mais c'était, à l'époque, l'un des aspects de la sensation de vivre des réalité économique roumaine: un Roumain ne voyamoments d'une autre geait jamais léger au retour d'un voyage à l'étranger époque ? et revenait beaucoup plus chargé qu'à l'aller. Dans le hall de la Le "Check Point Charlie" hongrois gare, régnait une forte odeur de désinfectant. Et, surplombant les têtes des voyageurs, Hegyeshalom: c'est le lieu de passage ferroviaire de la s'étalait un gigantesque calicot rouge, frappé d'un slogan signé frontière hongroise, à quelques 60 kilomètres de Vienne. Je ne Nicolae Ceausescu d'où l'on pouvait comprendre facilement sais pas si, à l'époque, Check Point Charlie, le point d'entrée trois mots "Partidul Comunist Român". réservé aux Occidentaux à Berlin-Est, était plus folichon Les pensées du "chef" souhaitaient la bienvenue aux voyaqu'Hegyeshalom mais le souvenir que je garde de mon premier geurs. Les employés de la gare repéraient rapidement les étranpassage de la frontière hongroise reste assez sinistre. gers. Il y en avait toujours un prêt à porter les valises contre Ce premier contact avec le monde communiste fut comme quelques cigarettes occidentales. je l'attendais - je n'irai pas jusqu'à dire comme je l'espérais. Dès potron-minet, les quais de la grande gare d'Arad Tous les ingrédients des films d'espionnage étaient là. grouillaient de monde. Les gens embauchaient de bonne heure L'atmosphère pesante, les militaires positionnés tous les 10 à et vers cinq heures du matin, un train bondé partait vers 15 mètres le long des voies, les étoiles rouges au fronton des Timisoara. (Lire page suivante) 49 Les NOUVeLLes de ROUMANIe Connaissance et découverte Soviétiché ! ORADEA z z TARGU MURES CLUJ z z z z TIMISOARA SUCEAVA z VARSAND ARAD z BAIA MARE z z z BRASOV PITESTI z IASI GALATI z SIBIU CRAIOVA BACAU z BRAILA z z TULCEA z BUCAREST CONSTANTA z Emotions à la frontière 50 Un jour, le contrôle des billets fit l'objet d'un drame. Un contrôleur hongrois infligea une amende à une dame roumaine, montée à Munich, pour excès de bagages (elle avait aussi un mini-vélo avec elle). Pas sympathique, le contrôleur. Ses collègues allemand et autrichien avaient été moins regardants. Malgré ses protestations véhémentes, la brave dame dût s'exécuter. Avec le recul, et ayant appris les mœurs qui régnaient dans les démocraties populaires - et qui perdurent encore aujourd'hui -, je me demande maintenant si l'amende n'est pas allée directement dans la poche du contrôleur. A Curtici, dernier point frontière du périple et porte d'entrée en Roumanie, le passage de la douane s'effectuait sans difficulté particulière. Une chose remarquable: le personnel des postes frontières, policiers, douaniers ou agents de change, parlait souvent un très bon français Le wagon était fouillé aussi méthodiquement qu'à la frontière hongroise. En revanche, les valises faisaient l'objet d'un contrôle relativement sommaire. J’en étais très surpris mais je n’étais pas alors encore familier avec la pratique du bakchish. Lors de ma première entrée en Roumanie, j'eus une petite émotion au contrôle des passeports: le policier me fit remarquer qu'il y avait une erreur sur la date de délivrance de mon visa. Il y avait une inversion dans les chiffres de l'année. 1972 avait été écrit 1927. Je fis un geste d'incompréhension. Le passeport me fut rendu dûment estampillé mais je garde encore la bizarre sensation que le flic me tenait pour responsable de cette erreur. 4 septembre 1972. J'ai été accueilli par mes hôtes roumains - ma famille invitante -qui m'attendaient à la gare de Timisoara, avec un gros bouquet de fleurs de bienvenue. A 6 heures du matin, les abords du bâtiment étaient très animés. Première vision de la ville après une trentaine d'heures de train : une foule empressée sur le parvis se dirigeait vers les arrêts de bus et de tram et une vaste avenue face à la gare bordée d'immeubles récents. Autre surprise: des Renault 8 et 12 comme en France. J'ai vite appris qu'en Roumanie, elles ne s'appelaient pas Renault mais Dacia 1100, produite à partir de 1968, et Dacia 1300 fabriquée à partir de 1969, symboles de la coopération industrielle franco-roumaine. Le taxi que nous avons pris, mes hôtes et moi, à Timisoara était une Volga de fabrication soviétique réservant une expérience intéressante de transition du confort occidental au réalisme socialiste. Dans la périphérie de la ville, les rues étaient très mal entretenues voire, pour certaines, complètement défoncées, sans revêtement asphalté. Les amortisseurs de la Volga avaient vécus. Nous étions brinquebalés dans tous les sens. Le chauffeur se mit à jurer. Le ton de sa voix était sans équivoque. A l'époque, je ne parlais pas un mot de roumain mais j'attrapais un seul mot au vol : "Sovietiché". Aucun doute : il avait une dent contre l'industrie automobile soviétique. Plus occidental que moi, tu meurs ! J'avais apporté quelques cadeaux pour mes hôtes. Ma situation faisait que je n'avais pas beaucoup d'argent mais, surtout, je n'avais pas trop su quoi leur offrir. D'ailleurs, je ne me souviens même plus précisément ce que j'avais apporté. Des gadgets je crois, du type calendrier perpétuel, un flacon de cognac… Fourvoiement vite réparé. Les fois suivantes, puisqu'il y en a eu, je sus ce qu'il fallait offrir: des savonnettes Lux ou Palmolive, Dans les années 70, Yves Lelong a découvert une Roumanie où l’on savait être heureux, le charme de la campagne... et des Roumaines. du café, des lames de rasoir, des disques, des cigarettes… Ah ! Les cigarettes. Le comble du snobisme, dans la Roumanie de Ceausescu, c'était de fumer des Kent. Pourquoi des Kent et pas des Camel ou des Marlboro ? Personne n'a jamais été capable de me l'expliquer. En tout cas, l'attirance pour tout ce qui venait d'Occident était indéniable. Les vêtements - les jeans notamment - étaient très recherchés. J'ai donné une paire de mes chaussures au cours de mon premier séjour en Roumanie. Snobisme ? Mauvaise qualité des produits "socialistes" ? Désir de posséder un objet qui permettait de se distinguer ? Je me demande si ce n'était pas aussi une forme de résistance passive et inconsciente contre le régime en place. Mais c'était le côté un peu pénible de cette époque: plus occidental que moi, tu meurs ! Aujourd'hui, les Kent sont passées de mode. La "révolution" est passée par là. Avec l'ouverture du pays au monde occidental, elles ont été remplacées, entre autres, par les cartes bancaires internationales. Le fin du fin est de s'afficher avec une carte VISA ou Mastercard pour régler sa note de restaurant ou son plein d'essence. Mais la démarche est différente: aujourd'hui, on étale sa réussite sociale. (Lire la suite dans le prochain numéro) Les NOUVeLLes de ROUMANIe Actualité A 73 ans, Matei Barbu, simple paysan d'un modeste village, est devenu le conseiller écouté du ministre de l'agriculture Politique La Roumanie confrontée à ses petites exploitations qui font vivre près de cinq millions de familles L 'homme se penche sur une liasse de papiers, remplis d'annotations : la loi sur les terres agricoles. Il a 73 ans et peine à intégrer les subtilités d'un texte dont le but est de lui rendre justice, seize ans après la chute du régime communiste roumain. Dans sa maison de Lunguletu, petit village situé à une cinquantaine de kilomètres au nord de Bucarest, Matei Barbu (notre photo) s'efforce de comprendre les nouvelles règles qui gèrent la propriété foncière et qui concernent 38 % des 22 millions de Roumains vivant en milieu rural. L'enjeu est très important pour ce paysan car, dans un an, son pays devrait adhérer à l'Union européenne. Depuis décembre 2004, lorsque la Roumanie a changé de cap politique, Matei Barbu s'est retrouvé, malgré lui, conseiller du ministre de l'agriculture, ainsi que le rapporte Mirel Bran, correspondant du journal "Le Monde" à Bucarest . Le matin au ministère l'après-midi dans ses champs "Je l'ai croisé par hasard en pleine campagne électorale", déclare le ministre libéral de l'agriculture, Gheorghe Flutur : "je me suis arrêté dans son village, je lui ai demandé son avis sur la réforme de l'agriculture, et ses opinions m'ont laissé perplexe". Et il ajoute: "Lorsque j'ai été nommé ministre, je me suis retrouvé entouré de jeunes conseillers spécialistes dans ce domaine. J'avais besoin d'avoir à mes côtés quelqu'un qui vienne du monde réel, une sorte de courroie de transmission du monde paysan. J'ai tout de suite pensé à lui et je lui ai proposé de devenir mon conseiller. Il est toujours aussi têtu, mais c'est la qualité que j'apprécie le plus chez lui" Depuis, la vie de Matei Barbu a basculé. Son programme quotidien aussi : réveil à 5 heures, départ pour Bucarest en bus ou en auto-stop, car il a refusé une voiture de service, réunions et débats au ministère et retour à Lunguletu où il travaille ses terres pour produire les pommes de terre qui font vivre sa famille. "Les communistes ont confisqué mes 5 hectares de terres, mais je les ai récupérés après la chute de Nicolae Ceausescu", affirme-t-il. "Cela n'a pas été facile et le problème de la propriété foncière n'est toujours pas réglé en Roumanie. Nous devons tout reconstruire avant que notre pays soit intégré à l'Union européenne." Créer d'urgence une classe moyenne agricole En effet, tout est à revoir dans le monde agricole roumain, qui entend s'adapter rapidement aux nouvelles règles de l'UE. "La Roumanie compte 4,5 millions de petites fermes, dont 2,3 millions sont des exploitations de subsistance avec environ 2,5 hectares de terre", explique Jonathan Scheele, chef de la délégation de la Commission européenne à Bucarest. "Même si la Roumanie ne devait pas entrer dans l'Union européenne, elle serait obligée de trouver une solution pour intégrer ses exploitations dans le circuit du marché. Entre ces petites exploitations agricoles et une minorité (0,5 %) de fermiers disposant de grandes surfaces qui permettent la mise en place d'une agriculture mécanisée, il n'y a rien. Ce pays a besoin de créer d'urgence une classe moyenne dans le monde agricole." La mission est difficile, car le temps presse. A partir du 1er janvier 2006, les paysans qui atteignent l'âge de la retraite sont encouragés à vendre leurs terres aux jeunes afin qu'ils puissent aménager des surfaces assez grandes pour une meilleure exploitation. Pour chaque hectare de terre, les paysans recevront une rente viagère de 100 euros par an et par hectare. "Nous avons aussi besoin de créer un vrai marché des produits agricoles car, pour l'instant, les paysans se font escroquer par les spéculateurs", explique le ministre de l'agriculture. "Nous avons également réorienté les investissements afin d'encourager la productivité et diminué les subventions qui profitaient à certains réseaux connectés aux milieux politiques." "Les Roumains ont un complexe d'infériorité" Avant 2007, la Roumanie devra aussi résoudre le problème du cadastre, la restitution intégrale des terres à leurs anciens propriétaires, la création d'une Bourse des produits agricoles et la mise en place de structures capables de gérer les fonds européens, qui s'élèveront à environ un milliard d'euros par an. Selon les spécialistes, le retard accumulé ces quinze dernières années en matière de réforme agricole rend la mission du gouvernement des plus difficiles, aspect que reflète le rapport d'évaluation que la Commission européenne a rendu public fin octobre. Pourtant, fiers des diplômes obtenus en Europe occidentale, les jeunes conseillers du ministère se montrent plutôt confiants. "Les Roumains ont un complexe d'infériorité face à l'agriculture occidentale", explique le conseiller Dacian Ciolos. "Le modèle d'agriculture extensive qu'on pratique en Occident depuis les années 1960 est maintenant victime de son propre succès. Je crois plus aux fermes familiales que nous essayons de mettre en place en Roumanie et qui pourraient conserver un tissu paysan dont les Européens de l'Ouest ont la nostalgie". "Un pari qui reste à gagner", conclut Mirel Bran. 3 Les NOUVeLLes de ROUMANIe Actualité Vie internationale SUCEAVA z z ORADEA z ARAD BAIA MARE z IASI z TARGU MURES CLUJ z z BACAU z VASLUI z z z TIMISOARA z SIBIU BRASOV GALATI z BRAILA PITESTI CRAIOVA z z z z SLOBOZIA TULCEA z CONSTANTA BUCAREST z Vote des immigrés : l'Espagne montre la voie 2 Si on estime à un demi-million, au minimum, le nombre de Roumains travaillant en Espagne, plus de 30 000 d'entre-eux y sont installés de manière définitive, dont au moins 18 000 dans la seule région de Castellone (province de Valence). Le président local du Parti Populaire, Carlos Fabra (droite, formation de l'ancien Premier ministre José-Maria Aznar), prenant en compte les réalités, a décidé de présenter un candidat de cette communauté sur sa liste aux prochaines élections municipales et régionales, se déclarant non seulement favorable au droit de vote des immigrés, mais souhaitant qu'ils puissent postuler à toutes les fonctions électives provinciales. Ce leader entend prendre les devants dans le cadre de l'adhésion prochaine de la Roumanie à l'UE et son parti s'était impliqué activement dans la campagne d'aide aux victimes des inondations qui ont touché ce pays, l'an passé. Président des associations de Roumains de Catalogne et du Levant, Daniel Ionitsa a souligné dans une interview au journal "El Pais" sa satisfaction de voir ses compatriotes appréciés dans la région, déclarant "Castellon est un des endroits d'Europe où les Roumains vivent le mieux" et attribuant la note dix sur dix aux autorités locales pour les relations qu'elles entretiennent avec eux. Un exemple à méditer pour les politiciens et administrations françaises. Bucarest incapable de dépenser l'argent de l'UE D e 2000 à 2004, la Roumanie n'a réussi à dépenser qu'un sixième des sommes allouées par l'Union Européenne au titre du programme ISPA, destinées à financer les travaux d'infrastructure et d'environnement, soit 228 M€ sur les 1,3 milliards attribués. La Bulgarie se trouve dans la même situation (100 M€ dépensés sur un fonds de 560 M€). Cette situation irrite profondément la Commission Européenne qui, à la suite d'un audit mettant en évidence de graves lacunes, a interrompu, fin 2004, ses versements aux agences roumaines chargées de l'application du programme. Parmi les reproches de Bruxelles, on trouve le nombre énorme d'appels d'offres qui échouent, l'incompétence du personnel, le manque de contrôle interne, une comptabilité défectueuse. L'UE a demandé à ses partenaires roumains d'améliorer la situation jugée critique de ses employés, aussi bien au niveau du salaire, de la formation, que des conditions de tra“Quant au niveau de vie nous sommes dans les choux... Oui, les choux de vail. Elle a averti que la situation actuelle pouBruxelles !” Caricature de Gazdaru vait menacer l'attribution des très importants fonds structurels et de cohésion promis aux deux pays, après leur adhésion. Parmi les travaux financés par l'ISPA, on note l'amélioration des voies ferrées, le contournement de Deva et d'Orastie sur le principal axe routier international du pays, le traitement des eaux usées de Bucarest. Plaintes à Strasbourg: la Roumanie troisième L Les NOUVeLLes de ROUMANIe a Cour Européenne des Droits messes des gouvernements qui se sont de l'Homme de Strasbourg a succédés depuis dix ans, ces derniers priindiqué dans son rapport vilégiant les intérêts de ceux qui en ont annuel que la Roumanie se trouve au profité, dont la nouvelle nomenklatura. La situation de la Russie est différen3ème rang des pays dont elle reçoit des te: elle y marque plaintes de l'aggravation des citoyens qui n'ont manquements à l'épas obtenu justice tat de Droit du chez eux et au prepouvoir actuel. mier des pays Strasbourg reçoit membres de l'UE chaque semaine ou y entrant. Avec 300 dossiers en 12 % des dossiers, provenance de ce elle se situe derrièpays et en a enrere la Russie (17 %) gistré déjà 9000. et la Turquie (13 Parmi les plai%), devançant de La Cour Européenne des Droits de l’Homme de Strasbourg. gnants, on trouve, peu la Pologne (11 pêle-mêle,aussibien les noms du magnat %). A eux quatre, ces pays totalisent plus du géant pétrolier, Hodorkovski, que l'ande la moitié des 44 000 dossiers en inscien champion du monde d'échecs Gari tance, sur les 80 000 plaintes déposées. Cet afflux de plaintes roumaines Kasparov, mais aussi les parents des vic(près de 10 000) est essentiellement dû times de la prise d'otages du théâtre de aux problèmes de restitutions des biens Moscou, en octobre 2002, et des marins confisqués par le régime communiste qui ont perdu la vie dans le naufrage du dont le règlement n'a jamais été mis sous-marin nucléaire Kursk, en août sérieusement en route malgré les pro- 2000. Infos pratiques ABONNEMENT CHANGE* (en lei et nouveaux lei) Euro Franc suisse Dollar Forint hongrois *Au 36 525 = 3,52 NL (1 NL =0,35 €) 22 630 = 2,26 NL 29 700 = 2,97 NL 140 = 0,014 NL (1 € = 250 forints) 17 février 2006 Les NOUVeLLes de ROUMANIe Numéro 34, mars-avril 2006 Lettre d'information bimestrielle sur abonnement éditée par ADICA (Association pour le Développement International, la Culture et l’Amitié) association loi 1901 Siège social, rédaction : 8 Chemin de la Sécherie 44 300 Nantes, France Tel. : 02 40 49 79 94 E-mail : [email protected] Directeur de la publication Henri Gillet Rédactrice en chef Dolores Sîrbu-Ghiran Ont participé à ce numéro : Karin Humbert, Natalia Comerzan, Bernard Camboulives, Martine et Jean Bovon-Dumoulin, Ovidiu Gorea, Alain Chotil-Fany, Claude Aubé, Fabrice Dubesset, Paula Romanescu. Autres sources : agences de presse et presse roumaines, françaises et francophones, télévisions roumaines, sites internet, fonds de documentation ADICA. Impression : Helio Graphic 11, rue Louis Armand 44 980 Sainte-Luce Numéro de Commission paritaire: 1107 G 80172 ISSN 1624-4699 Dépôt légal: à parution Prochain numéro: mai 2006 Abonnement aux Nouvelles de Roumanie, lettre d'information bimestrielle, pour un an / 6 numéros, port compris Entreprises, administrations : 100 € TTC / an Associations et particuliers : 80 € TTC / an Multi-abonnement Abonnez vos amis et gagnez ensemble jusqu'à 50 % sur le prix de l'abonnement. Le système en est simple: vous vous abonnez, devenez ainsi "abonné principal", et un de vos proches reçoit également à son domicile "Les Nouvelles". Vous bénéficiez tous les deux de 25 % de réduction, l'abonnement passant ainsi de 80 € à 61 € par personne (Multi-abonnement Formule 2, 122 €). Si vous êtes trois, (Multi-Abonnement Formule 3, 150 €), la réduction est de 40 % (tarif de l'abonnement par personne: 50 €). Et si vous êtes quatre, (Multi-abonnement Formule 4, 170 €) elle passe à 50 % (tarif de l'abonnement par personne: 42,5 €). Ce tarif est valable dans la limite de quatre personnes et ne peut être souscrit par les associations que dans un cadre strictement interne (Vous ne pouvez pas abonner un membre d'une autre association, même dans le cadre d'une fédération). Seule règle à respecter: le règlement global est effectué par une seule personne, l'abonné principal, avec un chèque ou virement unique, en mentionnant les coordonnées (adresse, téléphone, fax et e-mail) des autres abonnés. Abonnez vos amis roumains de Roumanie pour 30 € Chaque abonné (abonnement simple ou collectif) peut abonner un ou plusieurs amis roumains, demeurant en Roumanie. La revue leur sera expédiée directement. Le prix est de 30 € par abonnement annuel souscrit, à ajouter à celui de votre propre abonnement ou réabonnement (un lecteur ayant un abonnement normal, à 80 €, qui veut abonner un ami roumain, à 30 €, paiera donc 110 €). Nom:………………………………………………………………………… Adresse:…………………………………………………………………….. Code postal:.......................Ville…………………….................................... Pays:.................................Tel:………………........ Fax:…………………… E-mail:……………………………………. Cachet, signature : Paiement France: chèque bancaire ou postal joint à l'ordre de ADICA ou virement. R.I.B : Crédit Lyonnais, agence Saint-Pierre, Nantes 44 000. Code banque: 30 002. Code guichet : 07 437. N° de compte: 00000794 30 H. Clé RIB: 11. Belgique et zone euro: virement bancaire sans frais. transmettre à votre banque les coordonnées ci-dessus et les codes suivants: Code IBAN: FR 92 3000 2074 3700 0007 9430 H 11; Code BIC: CRLYFRPP Suisse et Etranger: chèque d’une banque française ou mandat-poste interna tional. Pas de virements bancaires (commission de 20 euros). Coupon à retourner avec les coordonnées de tous les abonnés à: Les Nouvelles de Roumanie - ADICA, 8 chemin de la Sécherie, 44 300 NANTES - France. 51 Numéro 34 - mars - avril 2006 Les NOUVeLLes de ROUMANIe Décembre 1989 : plongé au cœur de la naissance d'une démocratie NOUVeLLes ROUMANIe Les Jean-Gabriel Barbin ou la vie qui bascule V 52 ingt deux décembre 1989. Ceausescu vient de disparaître de la scène et la Roumanie ouvre ses frontières. Jean-Gabriel Barbin participe à un conseil d'administration de "Médecins du monde" à Paris quand la nouvelle éclate. La poignée de "french doctors" présents à la réunion décident de partir sur le champ, frétant un avion. Les informations en provenance de Bucarest sont mauvaises: on dénombre des centaines de morts à la suite des combats de rue. Il faut des chirurgiens. Jean-Gabriel Barbin est de ceux-là. Il ne fait ni une, ni deux et embarque… sans valise et en complet veston. Il était venu ainsi de Nantes et comptait rejoindre dans la soirée le service de chirurgie digestive qu'il dirige. A 42 ans, alors qu'il vit séparé, son destin vient de basculer, mais il ne le sait pas encore. (nos photos: Jean-Gabriel Barbin, sa femme, Vali, Roumaine, au cours de missions humanitaires à travers le monde, dont la Moldavie). Le Nantais n'en est pas à son premier coup de tête. En 1982, alors que la France est plongée dans la grève du milieu médical, un de ses confrères, responsable à "Médecins du monde" lui confie: "J'ai besoin de quelqu'un pour l'Erythrée". "Jean-Gab" répond aussitôt présent, d'autant plus qu'il avait la furieuse envie de découvrir cette corne de l'Afrique dont l'avait fait rêver Rimbaud. Le voilà dans le coup de l'humanitaire. Au fil de ses congés, il enfilera ensuite les missions: Kurdistan, Yémen, etc… Qu'est-ce qui pousse donc aux aventures les plus risquées cet aîné d'une fratrie de huit garçons, partagés entre professions médicales et artistiques, issus d'un milieu bourgeois nantais et dont le père, médecin suivant la tradition familiale, est un illustre spécialiste de gastro-entérologie ? Sans-doute des aïeux briérons, ayant grandi dans les marais longeant l'océan, près du port de Saint-Nazaire, et dont plusieurs sont devenus marins au long-cours. Pourtant, après avoir hésité à faire Langues-orientales, le jeune Jean-Gabriel choisira classiquement de suivre la voie de son père, devenant médecin. Mais son passage au lycée catholique de Nantes l'a ouvert à l'action humanitaire, alors balbutiante. On y parle de la misère de l'Inde et le jeune homme monte une tournée théâtrale avec ses copains, interprétant "L'Alouette" d'Anouilh pour ramener des fonds. "On ne sort pas indemne d'une aventure avec la Roumanie" Pour l'heure, le voici plongé dans la révolution roumaine, partagé entre cauchemar, délire, enthousiasme, exaltation, effroi, opérant dans des conditions épouvantables, frappé d'hallucinations parfois comme lorsqu'il se retrouve à sabrer le champagne avec des révolutionnaires portant brassards, fêtant l'exécution du couple Ceausescu. Devant sa chambre du 18ème étage de l'hôtel Intercontinental, la queue n'en finit pas: les "french doctors" consultent gratuitement. Le Nantais prend les choses en main et devient responsable de l'antenne roumaine de "Médecins du monde, s'installant définitivement à Bucarest, se contentant de l'indemnité versée par son association aux volontaires, 400 € par mois… " suffisant pour vivre sur place", confie-t-il. Le chirurgien a compris qu'on ne sort pas indemne d'une aventure avec la Roumanie et s'est laissé ensorcelé, grandement aidé en la circonstance par Vali, artiste et journaliste, rencontrée pendant la folie révolutionnaire et devenue sa femme depuis. Il vit une expérience unique, au cœur d'évènements tumultueux appelés à devenir autant de pages d'histoire: la naissance d'une démocratie. Sa fonction l'amène à côtoyer le gotha de la nomenklatura roumaine, ministres, présidents, hommes d'affaires, et aussi les diplomates en place, d'y rencontrer l'imposture et de mesurer les difficultés de la transition. L'homme a horreur du politiquement correct, ce qui l'amène à dénoncer ce qui lui paraît inacceptable. Ce sera la raison de sa rupture avec "Médecins du monde" en 1996, refusant d'avaliser la politique suivie en matière d'adoptions internationales et ses dérives. Jean-Gabriel Barbin n'en a pas moins continué ses interventions médicales, doublé d'un volet "assistante sociale". Les Roumains sont toujours aussi nombreux à frapper à sa porte, assurés d'y trouver des soins gratuits, une aide pour obtenir des visas s'ils doivent se faire soigner à l'étranger. Les Français expatriés, un relais pour être hospitalisé au pays natal. Il s'est également investi dans la formation et s'efforce de faire aboutir un projet de perfectionnement des infirmières roumaines en France. Bien que se sentant "internationaliste", sans être installé quelque part, le Nantais, âgé aujourd'hui de 58 ans, a posé ses valises à Bucarest. Il s'est engagé sur place dans le développement de la Francophonie et a retrouvé la vocation artistique de ses frères et de sa femme. Il écrit des pièces en français, neuf déjà, traduites en roumain, interprétées à Bucarest et à l'affiche du Théâtre national de Moldavie, à Chisinau. de SOMMAIRE Lettre d’information bimestrielle Actualité Vie internationale Politique Economie Social Au pied du mur 2 3à6 7à9 10 et 11 Société Evénements Carnet Vie quotidienne Insolite Santé, Environnement Religion Photos Sports 12 à 14 15 16 à 18 19 20 à 23 24 25 26 Connaissance et découverte Cinéma Théâtre, Chanson Musique Peinture Livres Littérature Histoire, Destins Traditions, Echanges, Humour Tourisme Souvenirs Abonnement, Change Coup de coeur 27 28 et 29 30 à 32 33 34 et 35 36 et 37 38 à 41 42 et 43 44 à 47 48 à 50 51 52 L e sénat roumain a rendu un mauvais service à son pays en repoussant un projet d'ordonnance gouvernementale prévoyant en urgence l'institution d'un organisme chargé de démasquer la corruption dans les rangs des parlementaires et des ministres. Il s'agissait d'une des exigences, avec la réforme de la Justice, formulées par Bruxelles pour que Bucarest puisse adhérer à l'UE dès 2007. Autant dire que le mécontentement est vif au sein de l'Union Européenne, et même les parlementaires européens de Strasbourg, plutôt bien disposés à l'égard de la candidature roumaine, ont pris du recul. Le sentiment que celle-ci sera repoussée d'un an, ainsi que le prévoyait l'accord de pré-adhésion, grandit, alors que Bruxelles s'apprête à remettre son rapport sur la Roumanie et qu'une décision définitive doit être prise en avril. On ne peut que comprendre les réticences européennes si ce pays se refuse à adopter des réformes élémentaires, visant notamment à ce que les importantes contributions financières que l'UE s'engage à verser pour aider à sa modernisation et à sa restructuration ne soient pas détournées de leur objet. L'émotion a été grande aussi en Roumanie où l'ensemble des médias n'ont pas eu de mots assez durs pour condamner l'attitudes des sénateurs. Ce vote vulgaire d'une caste volant à son propre secours pour que personne ne puisse mettre le nez dans ses affaires nauséabondes n'a pas surpris outre-mesure les Roumains qui méprisent, à juste titre, leur classe politique. Il ne faut pas oublier que sénateurs et députés "cotisent" jusqu'à 300 000 euros pour figurer en position éligible sur les listes de leurs partis… les sommes étant avancées par de "généreux bienfaiteurs" - en général les affairistes qui ont pillé les richesses de leur pays après 1989 - qu'il s'agit de remercier ensuite par de "menus services". Signe qui ne trompe pas sur les mœurs et le degré universel de corruption parmi les parlementaires: le vote négatif des sénateurs l'a été grâce à la conjonction de celui des élus du PSD, le parti des post-communistes, volant au secours d'un de leur leader, l'ancien Premier ministre Adrian Nastase, impliqué dans de nombreuses affaires, faisant bloc avec les extrémistes de Vadim Tudor - lequel appelle pourtant à "nettoyer les écuries de la République" - et à l'abstention de nombreux sénateurs de la majorité dont plusieurs dirigeants étaient menacés par le projet. Il reste une ultime chance à Bucarest pour échapper à la sanction de Bruxelles de retarder d'un an son adhésion: que le Président Basescu, qui en a le pouvoir, fasse adopter en seconde lecture l'ordonnance repoussée. Mais le temps est compté et la Roumanie est au pied du mur. Henri Gillet