Édition 2012-07-01 (PDF document)

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Édition 2012-07-01 (PDF document)
Numéro 72 - juillet - août 2012
Les
NOUVELLEs
ROUMANIE
de
SOMMAIRE
Elections locales
Analyse, Portraits
Résultats
Lettre d’information bimestrielle
2 à 10
L
Actualité
Crise gouvernementale
Politique
Economie
Social
Moldavie
11 à 13
14
15
16 et 17
18 et 19
Société
Evénements, Carnet
Dossier Expatriés
Santé, Minorités
Sports, Insolite
Tour de Roumanie
20 et 21
22 à 25
26 et 27
28 et 29
30 à 40
Connaissance
et découverte
Cinéma, Musique
Littérature, Mémoire
Explorateurs roumains
Carnet de route
Tourisme, Patrimoine
Humeur
Humour
Abonnement
Coup de coeur
La Roumanie en pleine confusion
41
42 et 43
44 à 46
47 à 55
56 à 59
60 et 61
62
63
64
a Roumanie n'a pas échappé au cycle qui veut qu'en cette période de crise
les gouvernants en place soient écartés au profit de leurs adversaires. Mais,
si dans les autres pays de l'Union Européenne, ce changement s'opère dans
la foulée d'élections, en Roumanie, il s'est effectué par le biais d'une "révolution de
palais"… une motion de censure surprise adoptée après que quelques députés de la
majorité aient déserté leur camp, suivie de la nomination au poste de Premier ministre d'un des deux chefs de l'Opposition, le socialiste Victor Ponta, son complice libéral,
Crin Antonescu, visant le fauteuil suprême.
Non pas que ce vote du Parlement soit illégitime, représentant tout à fait l'état
d'une opinion à l'égard de ses anciens dirigeants, qui ont malmené le pays, imposant
sans discernement des mesures de rigueur appauvrissant encore davantage les plus
démunis, ne laissant aucun espoir aux autres et préservant les plus riches. Les élections
locales de juin, véritable référendum anti-Basescu, ont mesuré le gouffre qui sépare
désormais le chef de l'Etat de la population et celles à venir, à l'automne prochain,
concernant les parlementaires, ne peuvent que le creuser davantage.
Mais pour autant, le changement intervenu fin avril, n'a rien de rassurant.
Carriéristes, ambitieux, prétentieux, les nouveaux dirigeants sont aussi éloignés du
peuple que proches de la nomenklatura communiste - manière Iliescu - dont ils sont
issus. Leurs premières mesures, épuration de l'administration, mise sous tutelle des
intellectuels, laissent supposer leur intention de confisquer le pouvoir pour s'y installer durablement. La seule ligne politique tangible du duo Ponta-Antonescu repose sur
la haine inextinguible vouée au chef de l'Etat, le second rêvant de prendre sa place. Les
deux compères, qui se sont partagé les rôles, veulent le faire destituer d'ici la fin de
l'année par un référendum, entraînant les Roumains dans ce règlement de comptes.
Pour l'instant, ils dénient au président en place tout droit de représenter le pays à l'étranger, un véritable affront qui bafoue l'esprit de la constitution. Et ne parlons pas de
l'exemplarité dont le nouveau pouvoir entendait faire preuve: deux de ses ministres de
l'Enseignement pressentis ont été obligés de renoncer à leurs ambitions pour avoir plagié leur thèse de doctorat, Victor Ponta étant lui-même mis en cause à ce sujet.
A ce rythme, Traian Basescu a beau jeu de vouloir se refaire une santé. D'autant
plus que la Justice cédant aux pressions de plus en plus insistantes de l'UE, vient de
lui rendre un fier service en décidant de faire enfin emprisonner les "gros poissons" de
la corruption. Pris dans les mailles du filet, Adrian Nastase, l'ancien Premier ministre
d'Ion Iliescu, a tenté d'y échapper en se tirant une balle dans la tête. Réflex d'orgueil
ou simulacre ? En tous les cas, la classe politique roumaine nage en pleine confusion!
Henri Gillet
1
Elections locales du 10 juin
Les NOUVELLES de ROUMANIE
Analyse
l
l
ORADEA
CLUJ
l
BAIA MARE
ARAD
IASI
Une classe politique KO
CHISINAU
l
l
SIBIU
l
TIMISOARA
GALATI
l
BRASOV
PITESTI
CRAIOVA
l
l
l
l
TULCEA
n
BUCAREST
La déliquescence de la classe politique roumaine s'est accélérée au cours des
dernières semaines, laissant le pays désemparé. Renversement surprise du gouvernement Ungureanu, élections locales désastreuses pour le président Basescu, conflit
de pouvoir au sommet de l'Etat, faux pas répétés des nouveaux dirigeants… et pour
corser le tout, tentative de suicide de l'ancien Premier ministre Adrian Nastase, sur
fond de corruption.
T
La peur de la sanction
22
2
Basescu, nouvelle majorité sonnée par la tentative de suicide d’Adrian Nastase
debout incapable de gouverner un pays désemparé
l
l
l
l
SUCEAVA
TARGU
MURES
Défaite écrasante pour le Président
Elections locales du 10 juin
Les NOUVELLES de ROUMANIE
Adrian Nastase, 62 ans, ancien
Premier ministre de Ion Iliescu
(2000-2004), a essayé de se tirer
une balle dans la tête le mercredi
20 juin dans la nuit, alors que les
policiers étaient venus l'arrêter
pour le conduire en prison, afin de
purger sa peine. Intervenant à
temps, ils ont dévié le coup de feu,
la balle ne provoquant qu'une blessure légère à la gorge. Hospitalisé,
le Premier ministre a été opéré le
lendemain matin, avec comme
seule séquelle, une cicatrice.
Quelques heures auparavant, la
Cour Suprême de Bucarest avait
rendu définitive la condamnation
à deux ans de prison ferme à son
encontre, pour avoir récolté des
fonds illégalement lors de sa campagne électorale à l'élection présidentielle de 2004, où il avait été
battu par Traian Basescu. Son procès avait déjà été repoussé cinq
fois pour divers motifs et Adrian
Nastase est sous le coup d'autres
procédures pour corruption.
Ses avocats tentent de trouver
une porte de secours lui évitant
une incarcération: raisons médicales, recours en annulation, grâce
présidentielle, Cour Européenne
des Droits de l'Homme… alors que
ses détracteurs prelent d’une mascarade pour échapper à son sort.
out a commencé par le renversement du gouvernement de droite de MihaiRazvan Ungureanu, à la suite du vote surprise d'une motion de censure par
l'opposition, fin avril, trois mois seulement après sa nomination par Traian
Basescu. En remplaçant dans l'urgence, début février, le Premier ministre Emil Boc par
le jeune chef des services secrets roumains, le Président prenait acte alors de l'impopularité et de l'échec de la politique qu'il avait imposé depuis 2008 et s'était révélée insupportable pour une grande partie de la population, conduisant nombre de Roumains à
se révolter et descendre dans la rue au début de l'année. Les fonctionnaires avaient vu
leurs salaires baisser de 25 %, alors que la TVA augmentait de 19 % à 24 %.
Ces mesures drastiques étaient le prix que la Roumanie avait dû payer pour un
emprunt de plus de 20 milliards d'euros obtenu en mars 2009 auprès du FMI, de la
Banque mondiale et de l'UE. Appliquées sans discernement et sans aucun sens de justice
sociale, les classes possédantes étant épargnées, elles ont fait le lit d'une contestation à
travers toute la société roumaine que le nouveau Premier ministre n'a pas eu le temps
d'endiguer, la confiance des Roumains lui faisant irrémédiablement défaut.
L'alliance PSD-Libéraux a raflé la quasi-totalité des judets
En cette année électorale - élections locales en juin, parlementaires à venir en novembre - l'opposition a eu alors beau jeu de retourner quelques élus et de faire tomber le gouvernement, fin avril. Le Président Basescu, en fonction jusqu'à fin 2014, s'est immédiatement incliné, et a confié à ses opposants, farouches adversaires qui prônent sa destitution le plus tôt possible, les clés du pouvoir.
Non sans arrière-pensée. Mariage de la carpe et du lapin, la nouvelle majorité regroupe sous la bannière de l'USL (Union Sociale Libérale) les ex-communistes du PSD
(Iliescu) et les capitalistes du Parti national Libéral. En fait, à l'image de l'ensemble de la
classe politique roumaine, des carriéristes issus de la nomenklatura, dont les chefs, ambitieux, pressés et prétentieux jusqu'à la caricature, se sont déjà partagés les rôles, avant, un
jour, de se déchirer ? A Victor Ponta (PSD) la fonction actuelle de Premier ministre, à
Crin Antonescu (PNL) celle de futur Président… quand le duo se sera débarrassé de
Traian Basescu.
Le calcul des deux compères a bien fonctionné au niveau des élections locales.
Raflant la quasi-totalité des judets et la majorité des grandes villes, l'USL (50 % des suffrages) s'impose à nouveau comme la force politique dominante du pays. Elle contrôle
Bucarest, l'Est, l'Ouest, le Sud de la Roumanie et le Sud-Ouest de la Transylvanie, ne laissant que des miettes au PDL qui connaît un véritable désastre électoral (15 %), lequel ne
conserve que quelques fiefs en Transylvanie.
Un leitmotiv: destituer le président Basescu
Cette Bérézina risque bien de se transformer en Waterloo, lors des élections parlementaires de l'automne, le nouveau gouvernement Ponta s'efforçant de prolonger l'état de
grâce par des mesures populaires. Crin Antonescu se voit président et appelle déjà à un
référendum pour libérer le poste, ayant fait voter par le Parlement une loi permettant dans
l'avenir de destituer le chef de l'Etat si la moitié des votants en décident ainsi… même
s'ils ne sont que 10 % ! Pourtant, le tableau n'est pas aussi rose que cela pour les deux
hommes qui ont surtout fait preuve d'incompétence depuis qu'ils sont aux commandes.
Plusieurs des ministres qu'ils ont nommés, notamment
ceux chargés de l'Enseignement, ont été invalidés pour avoir
triché afin d'obtenir leurs diplômes universitaires. Victor Ponta
est lui-même mis en cause pour avoir copié sa thèse de doctorat. Il s’oppose désormais tà ce que le chef de l'Etat représente le pays à l'étranger, le faisant encadré par le ministre des
Affaires étrangères lors du sommet de l'OTAN à Chicago et lui
a dénié le droit de participer à celui de l'UE à Bruxelles.
Les "gros poissons" enfin inquiétés
Mais un coup de tonnerre… suivi d'un coup de feu a ravagé le paysage politique, rajoutant à la confusion. Après des
années de tergiversation, de nombreuses échappatoires, et sur
injonction d'une UE exaspérée, la Justice roumaine a enfin
décidé de mettre sous les verrous les "gros poissons" de la corruption. L'ancien premier ministre Adrian Nastase, condamné
définitivement à deux ans de prison, vient d'en faire les frais et
a tenté de se suicider en se tirant une balle dans la gorge, pour
éviter l'incarcération. Son geste a soulevé une grande émotion
dans le pays, non dénuée de scepticisme, certains y voyant là
une mise en scène pour retarder l'échéance dans l'attente d'une
grâce qu'un futur Président et ami pourrait lui accorder. Dans
la foulée, la Justice roumaine a également jeté en prison l'escroc Sorin Ovidiu Vântu, proche du PSD, condamné à de multiples reprises et toujours en liberté… pour raisons médicales.
Difficile dans ce contexte électoral, de ne pas y voir aussi
une tentative de Traian Basescu de reprendre la main, en rappelant les turpitudes de ses adversaires et montrer à son opinion qu'il peut laver plus blanc.
Les élections en chiffre
Participation: 57,46 %
Votants : 8.910.442, USL : 4 437 985 (49,8%), PDL:
1 362 797 (15,29%), PP-DD : 798 583 (8,96%)
Nombre de mairies: 3186
USL : 1322 (+ 378) PD-L: 498, UDMR: 203
Nombre de conseillers municipaux: 40 294 (PSD: 13
148, PDL: 6.354, PSD : 4.110, PNL: 3150, PP-DD: 3126)
Maires des capitales de judets:
- Le PDL compte 10 maires de préfectures de judets (- 5),
le PSD 18 (+ 6), le PNL 9 (+ 2), l'UDMR (Magyars) 2 (- 1),
le FGDR (Forum Démocrate des Allemands de Roumanie) 1
(idem), les Indépendants 1 (Bucarest, - 1)
- PD-L: Alba Iulia, Arad, Brasov, Cluj, Piatra Neamt,
Suceava, Targoviste, Târgu Mures, Tulcea, Turnu Severin
- PSD: Alexandria, Bistrita, Botosani, Buzau, Braila,
Constantsa, Craiova, Focsani, Giurgiu, Iasi, Pitesti, Ploiesti,
Resita, Satu Mare, Slatina, Slobozia, Târgu Jiu, Vaslui
- PNL: Bacau, Baia Mare, Calarasi, Deva, Oradea, Zalau,
Timisoara, Râmnicu Vâlcea, Galati
- UDMR: Miercurea Ciuc, Sfântu Gheorghe
- FDGR : Sibiu
- PC : Deva
- Indépendants : Bucarest
Présidents et conseils des judets
Le PSD obtient 22 présidences de conseils de judets (+ 4),
le PDL, 2 (-12), le PNL 13 (+ 8), l'UDMR, 2 (-2), le PC, 1
(+1), le FDGR, 0 (- 1)
PDL: Alba, Arad
PSD: Arges (Pitesti), Bacau, Bistrita-Nasaud, Braila,
Constanta, Dâmbovita (Târgoviste), Dolj (Craiova), Galati,
Gorj (Târgu Jiu), Ialomita (Slobozia), Mehedinti (Turnu
Severin), Olt (Slatina), Prahova (Ploiesti), Salaj (Zalau), Sibiu,
Suceava, Teleorman (Alexandria), Timis, Tulcea, Vâlcea,
Vaslui, Vrancea (Focsani)
PNL: Bihor (Oradea), Botosani, Brasov, Buzau, Calarasi,
Caras-Severin (Resita), Cluj, Giurgiu, Hunedoara (Deva), Iasi,
Ilfov (Bucarest), Mures, Satu Mare
UDMR: Covasna (Sfantu Gheorghe), Harghita (M. Ciuc)
Les principaux partis en lice
USL: Union Sociale Libérale, formée des trois partis suivants, qui se sont
présentés parfois aussi séparément:
-PSD (Parti Social-Démocrate):
héritier de la nomenklatura communiste
reconvertie; leaders: V. Ponta (Premier
ministre) Ion Iliescu, Adrian Nastase.
-PC (Parti Conservateur): issu
du PSD et regroupement des anciens de
la Securitate.
-PNL (Parti National Libéral):
héritier du grand parti libéral de l'EntreDeux Guerres; leader: Crin Antonescu.
PD-L (Parti Démocrate-Libéral):
parti soutenant le président Basescu.
Leader: Emil Boc, maire de Cluj qui
vient de démissionner de ses fonctions au
PDL, ainsi que toute la direction..
UDMR (Union Démocratique des
Magyars de Roumanie): présent dans les
judets hongrois. Leader: Marko Bela.
PCM (Parti Civique Magyar): issu
d'une scission de l'UDMR. Plus radical.
PP-DD (Parti du Peuple Dan
Diaconescu): parti ultra populiste du propriétaire de la chaîne de télévision OTV
Dan Diaconescu.
PRM (Parti de la Grande
Roumanie): parti ultra-nationaliste dirigé
par Corneliu Vadim Tudor, dont les membres sont issus de l'ancien Parti communiste et de la Securitate.
FDGR (Forum Démocrate des
Allemands de Roumanie): parti identitaire des Allemands. Présent à Sibiu.
UNPR (Union Nationale pour le
Progrès de la Roumanie) : parti du centre
gauche issu du PSD et du PNL, soutient
Traian Basescu.
22
3
Elections locales du 10 juin
Les NOUVELLES de ROUMANIE
Maires des grandes villes et conseils des judets
JUDET
MAIRE
ALBA
Alba-Iulia
ARAD
Arad
ARGES
Pitesti
BACAU
Bacau
RESULTATS
PRESIDENT CONSEIL de JUDET
Mircea Hava (PDL), maire sortant (ms), 49,61%
Catalin Potor (PNL) 36,32%
Gheorghe Falca (PD-L), ms
47,5%
Lia Ardelean (PC) 29,08%
Tudor Pendiuc (PSD), ms
69,25%
Daniel Dragomir (PDL) 17,18%
Romeo Stavarache (USL), ms
57,93%
Dumitru Sechelariu
(Indépendant) 14,09%
4
BIHOR
Oradea
BISTRITANASAUD
Bistrita
BOTOSANI
Botosani
BRASOV
Brasov
USL: PSD + PNL + PC
PSD (Parti Social-Démocrate)
PNL (Parti National Libéral)
PC (Parti Conservateur)
PDL (Parti Démocrate-Libéral)
Ilie Bolojan (PNL), ms, 66,8%
Cseke Attila (UDMR) 18,87%
Ovidiu Cretu (PSD), 47,83%
Vasile Moldovan (PDL) 29,38%
Ovidiu Portariuc ( (PSD)
47,27%
Catalin Flutur (PDL) ms,
39,99%
George Scripcaru (PDL), ms
44,29%
Catalin Leonte (PSD) 40,16%
UDMR (Union Dém des Magyars de Roum.)
PCM (Parti Civique Magyar)
PP-DD: Parti du Peuple-Dan Diaconescu
PRM (Parti de la Grande Roumanie)
FDGR (Forum Dém des Allemands Roum.)
Ion Dumitrel (PDL),
président sortant, 41,94%
Conseillers: PDL 15, USL
14, PPDD 3
Maires: PDl 45,USL 29
PNL 12, PSD 1, UDMPR 1
N. Iotcu (PDL), ps, 38 %
Cons.: USL 14, PDL 13
PPDD 3, UDMR 2
Maires: PDL 40,USL 22,
UDMR 5, PNL 5,Indep. 2
Constantin Nicolescu (USL)
59,56%
Cons.: USL 60,36%, PDL
19,44%, PPDD 11,22%
Maires: USL 65, PDL 24,
PSD 4
Dragos Benea ( ), ps, 56%
Cons.: USL 22, PDL 7
PPDD 5, PER 2
Cornel Popa (USL) 48,37%
Cons.: USL 18, UDMR 7,
PDL 7, PPDD 2
Maires: UDMR 24, PDL 23,
PNL 22, USl 18 PSD 12,
PPDD 1, PC 1
Emil Radu Moldovan
(PSD) 45,26%
Cons.: USL 44,33%,
PDL 37,58%, PPDD 6,25%
Maires: PDL 26, USL 16,
PSD 11
Florin Turcanu (USL)
51,62%
Cons.: USL 18, PDL 11,
PPDD 3
Maires: USL 50, PDL 28
Aristotel Cancescu (PNL)
ps, 46,15%
Cons.: USL 44,89, PDL
27,98, PPDD 6,35
Maires: PDL 18, PNL 11,
PSD 10
PNTCD (Parti National Paysan Chrétien
Démocrate)
PNG-CD (Parti de la Nouvelle GénérationChrétien Démocrate)
Ind (Indépendants)
Elections locales du 10 juin
Les NOUVELLES de ROUMANIE
JUDET
BRAILA
Braila
MAIRE
RESULTATS
Aurel Simionescu (USL), ms
51%
Simona Draghincescu (Indépendant) 17,3%
PRESIDENT
CONSEIL de JUDET
Bunea Stancu (USL), ps
46,49%
Cons.: USL 45,82%, PDL
21%, PPDD 18%
Maires: USL 21, PDL 13,
PSD 5
Marian Cristinel Bîgiu
(PNL), 43,70%
Cons.: USL 55,31%, PDL
23,51%, PPDD 10,30%
Maires: PSD 44, PNL 26,
PDL 14
Sorin Frunzaverde (PNL)
ps, 47,8%
Cons.: USL 50,4%, PDL
14%, PPDD 12,48%
Maires: USL 30, PNL 17,
PDL 17
Gh. Raducu Filipescu
(PNL), ps, 51,59%
Cons.: USL 50,9%, PDL
28,59%, PPDD 10,47%
Maires: USL 26, PDL 14,
PNL 9
BUZAU
Buzau
Constantin D. Boscodeala
(USL), ms, 47,97%
Paul Negoita (Indépendant)
30,5%
CARASSEVERIN
Resita
Mihai Stepanescu (USL) ms
64,25%
Valentin Blanariu (PP-DD)
16,57%
CALARASI
Calarasi
Daniel S,tefan Dragulin
(PNL), 56,45%
Nicolae Dragu (UNPR) ms,
30%
CLUJ
Cluj-Napoca
Emil Boc (PDL), ms
40,03%
Marius Nicoara (PNL) 38,97%
Horea Uioreanu (PNL),
37,43%
Cons.: USL 39,8%, PDL
31,16, UDMR 12,72
Maires: USL 33, PDL 26,
UDMR 8
CONSTANTA
Constanta
Radu Mazare (PSD), ms
62,76%
Cristian Gigi Chiru (PDL)
13,49%
Nicusor D. Constantinescu
(PSD), ps, 49,6%
Cons.: USL 26, PDL 7,
PPDD 3
COVASNA
Sf. Gheorghe
Antal Arpad (UDMR),
79,91%
Madalin Guruianu (PNL) 11%
Sandor Tamas (UDMR)
ps, 56,69%
Cons.: UDMR 54%, PPM
10,65%, PSD 9,31%Maires
UDMR 35, PSD 4, PPM 2
DÂMBOVITA
Târgoviste
Gabriel Boriga (PDL), ms
43,90%
Gabriel Grozavu (PNL)
40,93%
Adrian Tutuianu (USL)
52,78%
Cons.: USL 18, PDl 13,
PPDD 3Maires: PDL 38,
USl 31, PSD 19
DOLJ
Craiova
Lia Olguta Vasilescu (PSD)
45,6%
Antonie Solomon (UNPR) ms
40,8%
Ion Prioteasa (PSD), ps
59,20%
Cons.: USL 55,65%, PDL
20,14%, UNPR 12,17%,
Maires: PSD 38, PDL 28,
USL 23
22
5
Elections locales du 10 juin
Les NOUVELLES de ROUMANIE
JUDET
GALATI
Galati
GIURGIU
Giurgiu
GORJ
Târgu Jiu
HARGHITA
Miercurea Ciuc
6
HUNEDOARA
Deva
IALOMITA
Slobozia
IASI
Iasi
MARAMURES
Baia Mare
MEHEDINTI
Turnu Severin
MAIRE
RESULTATS
Marius Stan(PNL) 48,7%
Nicusor Ciumacenco
(Indépendant) 22,3%
Nicolae Barbu
(Indépendant), 60,3%
Lucian Iliescu (PNL) ms
32%
Florin Carciumaru (PSD)
ms, 72,23%
Gheorghe Pecingina
(PP-DD) 12,26%
Raduly Robert Kalman
(UDMR) ms, 64 %
Petru Marginean (PC)
52,3%
Dorin Gligor (PDL) 23%
PRESIDENT CONSEIL de JUDET
Nicolae Bacalbasa (USL)
58,3%
Cons.: USL 22, PDL 8, PPDD 4;
Maires : USL 37, PDL 10, PSD
9, PNL 4, PPDD 1,PRM 1, Parti
des Roms "Pro Europa" 1
Vasile Mustatea
55,68%
(PNL)
Cons.: USL 65,28%, PP-DD
13,95%, PDL 12,51%
Maires : PNL 22, USL 12, PSD 9
Ion Calinoiu (USL), ps
58,60%
Cons.: USL 58,8%, PDL
16,86%, PP-DD 13,12%
Maires: USL 55, PDL 8, PPDD 2, UNPR 2
Csaba Borboly (UDMR) ps,
64,91%
Cons.: UDMR 61,43%, Parti
Civique Maghiar 13,27%, Partidul
Popular Maghiar de Transylvanie
10,60%; Maires: UDMR 51,
PCM 4, USL 3
Mircea I. Molot (PNL), ps
44,24% Cons.:USL 45,65%, PDL
30,27%, PP-DD 11,28%
Maires: USL 47, USP 16, PNL 1,
PRM 1, PSD 1, Indépendants 3
Elections locales du 10 juin
Les NOUVELLES de ROUMANIE
JUDET
MAIRE
RESULTATS
PRESIDENT
CONSEIL de JUDET
MURES
Târgu Mures
Dorin Florea, (PDL), ms
50,07%
Gyorgy Frunda (UDMR)
37,26%
Ciprian Minodor Dobre
(PNL) 40,64%
NEAMT
Piatra Neamt
Gheorghe Stefan (PDL) ms
44,58%
Catalin Vasile Dragusanu
(PC) 38,68%
Culita Tarata (UNPR)
41,53%
OLT
Slatina
Darius Vilcov(PSD) ms
69,4%
Liviu Moisu (PP-DD) 11,7%
Paul Stanescu (PSD), ps
76,44%
Cons.: USL 22, PP-DD 4
PDL 4, UNPR 2
PRAHOVA
Ploiesti
Iulian Badescu (PSD)
45,13%
Andrei Volosevici (PDL)
43,64%
Mircea Cosma (USL), ps
47,66%
SATU MARE
Satu Mare
Dorel Coica (PSD), 48,28%
Iuliu Ilyes (UDMR) ms
37,43%
SALAJ
Zalau
Radu Capalnasiu (PNL)
58,15%, ms
Ioan Abrudan (PDL) 13,73%
Cons.: USL 35,27%, UDMR
33,34%, PDL16,59%, Maires:
USL 45, UDMR 38, PDL 10
Cons.: USL 15, PDL 14, PPDD 5
Maires: USL 40, PDL 36, PSD 6
Cons.: USL 19, PDL 13, PPDD 3
Maires: USL 59, PDL 41,
PP-DD 2, PER (écologistes) 1
Mihai Adrian Stef (PNL)
38,80%
Cons.: USL 37,9%, UDMR
34,19%, PDL 14,26%
Maires:USL 27,UDMR 19,
PDL 9
Tiberiu Marc (PSD), ps
41,81%
Alexandru Stoica (PSD)
45 %
Vasile Silvian Ciuperca
(PSD), ps, 65,27%
Cons.: USL 59,24%, PDL
19,4%, PP-DD 9,58%,Maires:
PSD 20, USL 20, PDL 15
Gheorghe Nichita (PSD)
ms, 59,4%
Tudor Ciuhodaru (UNPR)
14,3%
Cristian Adomnitei (USL)
Cons.: USL 25, PDL 7,
PPDD 4
SIBIU
Sibiu
Klaus Johannis (FDGR)
ms, 77,9%
Dragos Floarea (PC) 9,06%
Ioan Cindrea (PSD) 36,69%
Cons.: USL 13, FDGR 9
PDL 7, PP-DD 3
Maires: USL 39, PDL 21
FDGR 2, PP-DD 1
Catalin Chereches (USL),
86,03%
Stefan Pop (PDL) 5,41 %
Zamfir Ciceu (USL)
Cons.: USL 20, PDL + UNPR
9, PP-DD 3, UDMR - 2
SUCEAVA
Suceava
Ion Lungu (PDL) ms
45,09%
Alexandru Baisanu (PNL)
42,65%
Constantin Gherghe
(PDL), ms, 49,9%
Liviu Moisu (PP-DD)
11,7%
Adrian Duicu (USL) 45,20%
Cons.: USL 46,77%, PDL
39,84%, PPDD 5,84%
TELEORMAN
Alexandria
Victor Dragusin (PSD) ms
84,38%
Stelica Talpiga (PP-DD)
10,48%
Catalin Ioan Nechifor (PSD)
44,22%
Cons.: USL 37,9%, UDMR
34,19%, PDL 14,26%
Maires : PDL 59, USL 46,
PSD 4
Liviu Dragnea (USL), ps
64,94%
Cons.: USL 41,60%, UDMR
20,86%, PDL 19,45%
Maires: USL 18, UDMR 14,
PDL 12
Cons.: USL 63,68%,
PDL-PNTCD - 22,90%
PP-DD 7,23%
Maires : USL 63, PDL 22
PNL 5, PSD 4, PP-DD 2
7
Elections locales du 10 juin
Les NOUVELLES de ROUMANIE
JUDET
MAIRE
RESULTATS
TIMIS
Timisoara
Nicolae Robu (PNL) 49,76%
Adrian Orza (PNTCD) 23,39%
TULCEA
Tulcea
Constantin Hogea (PD-L) ms
52,95%
Trifon Belacurencu (PSD)
30,2%
VASLUI
Vaslui
Vasile Paval (PSD) ms, 79,3%
Marius Arcaleanu (PDL) 8%
VÂLCEA
Râmnicu
Vâlcea
Emilian Frâncu (PNL) 39,6%
Romeo Radulescu (PDL) 24,1%
PRESIDENT
ILFOV
Bucarest
Deux personnages, opposés à l'extrême, ont marqué les élections locales. L'un, Dan Nicusor, candidat indépendant à la mairie de Bucarest, un
peu rêveur mais opiniâtre, se bat depuis plusieurs années contre la corruption, la spéculation immobilière qui sévissent dans la capitale, avec
toutes les injustices qu'elles entraînent. L'autre, Dan Diaconescu, jeune
loup sans scrupules et aux dents longues, propriétaire d'une chaîne de
télévision à scandale, a patronné les candidats de son propre parti, le PP
DD (Parti du Peuple - Dan Diaconescu), ne se présentant pas lui-même, se
réservant pour les élections nationales. Ses propositions démagogues ont
dépassé tout ce que les Roumains avaient pu entendre jusqu'ici. Tous les
deux ont obtenu le même score: entre 8 et 9 % des suffrages.
Horia Teodorescu (USL)
Cons.: USL 16, PDL 11, PPDD 3
Maires: USL 29, PDL 17,
PSD 2
Dumitru Buzatu (PSD)
57,07%
Cons.: USL 37,9%, UDMR
34,19%, PDL 14,26%
Maires: USL 53, UNPR 11,
PSD 9
Ion Cîlea (PSD), ps
69,08%
Cons.: USL 22, PDL 6,
PPDD 3, UNPR 2
Maires: USL 77, PDL 8,
UNPR 2
Marian Oprisan (USL), ps
69,08%,
Cons.: USL 21, PDL 6, PPDD 4
Maires: USL 60, PDL 9,
Indépendants 4
Bacinschi Decebal Gabriel, ms
(USL) - 53,97 %
Alin Trasculescu (PDL) 21,26 %
Sorin Oprescu (indep., ms)
54,79%,
Silviu Prigoana (PNL) 17,12%
Marian Petrache (PNL)
67,27 %
Cons.: USL : 37, PDL, 11,
PP-DD 7
Sector 1
Sector 3
Sector 5
Andrei Chiliman
(PNL), ms
74,20%
USL: 19
PDL: 5
PP DD: 3
Robert Negoita
(USL), 56,53%
USL: 20
PDL: 7
PP DD: 4
Marian Vanghelie
(USL) ms
54,83%
USL: 18
PDL: 5
PP DD: 4
Sector 2
Sector 4
Sector 6
Neculai Ontanu
(UNPR), ms
47,21%
USL: 14
PDL: 5
UNPR: 5
PP DD: 3
Cristian Popescu
Piedone (USL) ms
80,69%
USL: 20
PDL: 5
PP DD: 4
Rares Manescu
(USL), 49,97%
USL 11 conseillers
PDL: 6
PP DD: 3
Elections locales du 10 juin
De la société juste à l'arnaque
Candidats
Titu Bojin (PSD) 47,61%
Cons.: USL 46,66%, PDL
25,76%, PP-DD 9,35%
Maires: USL 56, PDL 35,
UDMR 3, Union pour Timis
2, PP-DD 2
8
VRANCEA
Focsani
CONSEIL de JUDET
Les NOUVELLES de ROUMANIE
Don Quichotte à l'assaut des requins de l'immobilier de la capitale
S
es amis l'ont baptisé Don Quichotte. Un surnom qui
lui va comme un gant quand on le voit briser des
lances avec les requins de l'immobilier qui sévissent
à Bucarest, s'emparent de tous les emplacements où ils peuvent élever leurs buildings, les espaces verts et demeures classées passant à la trappe, enlaidissant encore plus une capitale
qui a déjà beaucoup souffert par le passé. Mais Dan Nicusor
n'est pas habité par la folie du héros de Cervantès. Son "petit
grain" à lui c'est son audace et son opiniâtreté. Ce qui l'a décidé à partir à l'assaut de la mairie de la capitale. Sans succès
puisqu'il n'a recueilli qu'un peu moins de 9% des voix, mais en
espérant avoir réveillé sa société civile.
Depuis 2006, quand Dan Nicusor est devenu la figure de
proue des "indignés" de la capitale, révoltés par le désastre
urbanistique qui la menace, ce mathématicien de 43 ans s'attaque à tous les "gros", affairistes, maires de secteurs, qui s'entendent comme
larrons en foire pour faire main basse
sur la ville. Il a été rejoint par des
architectes, des sociologues, des jeunes, constituant une amorce de société
civile au sein de l'association "Salvati
Bucaresti" ("Sauvez Bucarest").
En son nom, Dan Nicusor a entamé 67 procès contre la mairie ou des
projets défigurant la capitale. Il en a
gagné 23, perdu 7, les autres étant en
instance de jugement. Autant dire que
cet empêcheur de tourner en rond n'est
pas apprécié par les promoteurs et l'administration municipale, obligés de
refaire leurs plans.
Mais les résultats sont là.
"Salavati Bucurestiul" a empêché la
destruction de 7 hectares d'espaces
verts du parc Tineretului, d'édifices
classés chaussée Kissileff, fait stopper
la construction d'un immeuble de 13
étages du centre-ville qui menaçait une
vieille église. Sa plus belle victoire est cependant, en 2009,
d'avoir obtenu du parlement une réglementation de l'urbanisme qui ne permet plus de faire n'importe quoi et limitant la
hauteur des buildings… à la grande fureur de nombreux maires qui ont vu de juteuses affaires leur passer sous le nez.
Actuellement, l'association se bat pour empêcher que le
plus grand mall (centre commercial à l'américaine) d'Europe,
dévoreur d'espaces verts, ne voit le jour. Grâce à elle, les
Bucarestois ont découvert les mérites de l'action civique et,
dès qu'ils ont un problème relevant de son domaine, certains
n'hésitent pas à faire appel à ses services. D'ailleurs, ils peuvent lui être reconnaissants à un autre titre: en gagnant un procès contre des promoteurs, "Salvati Bucurestiul" a épargné à la
mairie de la capitale de leur verser 20 millions d'euros de dommages et intérêts à la suite de l'annulation de leurs projets.
Elève de l'Ecole Normale Supérieure
et docteur en mathématiques à Paris XIII
Dan Nicusor a basculé dans l'engagement civique à son retour de
France, en 1998. Ce natif de Fagaras,
ne parlant pratiquement pas un mot de
français, avait décroché, un peu par
hasard, une bourse pour l'Ecole
Normale Supérieure de Paris. Il restera six ans en France obtenant un doctorat en mathématiques à Paris XIII et
s'activant auprès de ses compatriotes
pour qu'ils s'investissent dans la vie
démocratique.
S'abstenant pendant plusieurs
années d'entrer dans le jeu politique,
pour se consacrer à sauvegarder le
cadre de vie de la capitale roumaine,
le mathématicien se rendra compte
finalement que les politiciens profitaient de sa naïveté, comme lors des
élections de 2008 où ils s'étaient tous
engagés à faire voter une réglementation de l'urbanisme à Bucarest, proDan Nicusor en campagne
messe non tenue bien sûr. Cette désillusion l'a amené à présenter sa candidature au poste de maire
général de la capitale, le 10 juin dernier, en tant que candidat
indépendant.
(suite page 10)
9
Les NOUVELLES de ROUMANIE
Elections locales du 10 juin
Candidats
l
SATU MARE
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IASI
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TARGU
MURES
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Dan Diaconescu n'a pas
l
SUCEAVA
ORADEA
BACAU
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BRASOV
TIMISOARA
PITESTI
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CRAIOVA
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TULCEA
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TARGOVISTE
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BUCAREST
GIURGIU
l
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CONSTANTA
(suite de la page 9)
Course contre la montre
10
Métro gratuit, 20 000 euros à tous
La démarche n'a pas été facile
car tout est fait dans le code électoral pour favoriser les grands partis.
Dan Nicusor devait recueillir 36 000
signatures dans les 40 jours précédant la clôture du dépôt des candidatures. A deux semaines de l'échéance, il lui en manquait encore 18 000.
La société civile, notamment les jeunes, se sont mobilisés. 16 formations
musicales ont organisé un concert
géant gratuit dans le parc Carol, un
samedi, réunissant 10 000 personnes et collectant 6000 signatures.
Le jeudi 26 avril, dernier jour autorisé, un ultime appel a permis d'en
recueillir 10 000 autres. D'immenses
queues se pressaient dans les points
de collecte. Du jamais vu… depuis
Ceausescu ! Au total, 53 000
Bucarestois se sont engagés pour
Dan Nicusor. Un mouvement civique
à la suite d'un combat électoral qui
prenait ainsi valeur pour l'avenir.
Même si, finalement, il n'a pas
réussi à enlever la mairie de
Bucarest, le candidat, élu conseiller
municipal devrait avoir désormais
accès aux dossiers de la mairie, s'étant toujours insurgé contre l'absence totale de transparence, permettant aux élus de "voler en toute
impunité". Jusqu'ici Dan Nicusor
devait acter en justice pour les
consulter. Mais, malgré son résultat,
on lui conteste ce droit en jouant sur
son statut de candidat indépendant… dont le score devrait être 2 à
3 fois plus élevés que celui de son
concurrent présenté par un parti. Un
nouveau procès en vue… et de nouvelles lances à briser pour Don
Quichotte ?
Fort de la propagande orchestrée par sa chaîne de télévision à scandale OTV et
d'une intense campagne à travers tout le pays, chaque commune étant bariolée de
ses banderoles, Dan Diaconescu - qui ne se présentait pas personnellement, se réservant pour les échéances nationales - et son parti, le PPDD (Parti du Peuple Dan
Diaconescu) espéraient terminer en troisième position, derrière les inaccessibles
PSD et PNL, mais devant le PDL de Basescu. Peu avant le scrutin, les intentions de
vote en leur faveur se situaient entre 12 et 14 %. La formation du charlatan, arrivée quatrième, a dû se contenter finalement de 9,21 % et 845 000 voix à travers le
pays, enregistrant cependant l'élection de 3126 conseillers municipaux.
S
'il n'existait pas déjà, il est certain que quelqu'un inventerait une formation
avec les aspirations et le profil du PPDD (Parti du Peuple -Dan Diconescu),
qui se déclare centriste, créé en 2011 par Dan Diaconescu. Cette formation
politique du patron d'OTV, chaîne de télévision privée, est très en vogue en Roumanie.
Mais qui sont les leaders du PPDD? Il s'agit essentiellement d'hommes d'affaires douteux, de fonctionnaires malhonnêtes, carriéristes notoires ou personnages mondains.
Tout à l'image de Diaconescu, qui a construit sa fortune à partir d'OTV, chaîne spécialisée dans le chantage, menaçant
contre espèces trébuchantes quiconque
a une dimension médiatique de révéler
ses turpitudes. Cela a marché et plait,
même si sa télé a été interdite de diffusion à dix jours des élections locales.
Son patron ne s'est pas présenté luimême, mais des banderoles vantant le
mérite de ses candidats barraient l'entrée de toutes les communes importantes du pays. Le "patron", lui, se réservait pour les élections générales de l'auAccusé de chantage auprès de personnalités,
en utilisant sa chaîne de télévision OTV, tomne pour se préserver par une immuDan Diaconescu a déjà été arrêté
pour 24 heures, se servant de cet épisode pour nité parlementaire de tous les procès
soigner sa popularité auprès des téléspectateurs. qui le menacent, et surtout en vue de la
présidentielle de fin 2014.
Comment expliquer toutefois l'ascension de son parti ? Pour répondre à cette question, il faut se souvenir des mots même de Dan Diaconescu. En 2009, dans une interview
accordée au quotidien Gandul, le patron d'OTV avait été prié d'expliquer le succès de son
émission: Oglinda TV (Miroir TV). Il affirmait que, en général, il essayait d'attirer des
gens qui font de l'Audimat. "Définissez ces gens...", a demandé le journaliste, "qui gesticulent, crient, parlent grossièrement et font des fautes, dans lesquels les téléspectateurs
se reconnaissent", a répondu Diaconescu, expliquant que "en général, ce sont ceux qui
gagnent les élections en Roumanie, ceux qui s'érigent en tant que leaders d'opinion ou
analystes, ceux qui ont prétendument quelque chose à dire dans ce pays”. Et il est vrai
que dans ce registre, au fil des années, le studio TV de Diaconescu a vu défiler des personnages de premier ordre, comme le président Traian Basescu, le maire de Bucarest,
Sorin Oprescu, Victor Ponta, le nouveau premier ministre, Silviu Prigoana (le candidat
PDL pour la mairie de la capitale) ou l'ancienne ministre du Tourisme, Elena Udrea.
Le fruit d'un électorat inculte, frustré… et de calculs politiques
Et, avec le temps, porté par l'amour public dont il a été entouré, tant par les téléspectateurs que par les invités, Dan Diaconescu s'est transformé en un monstre politique. Son
arrestation pour extorsion de fonds en 2010 ne fut qu'un épisode dans sa carrière, ce qui,
considéré avec recul, semble avoir eu comme seul effet de renforcer son image de martyr du peuple.
Elections locales du 10 juin
Les NOUVELLES de ROUMANIE
"pour refaire sa vie" et un logement offert à ceux qui n'en n'ont pas...
hésité à se payer la tête de ses concitoyens
Maintenant, Diaconescu ne peut plus être traité avec la
facilité avec laquelle il l'était quelques années auparavant. De
la tribune du "Parti du peuple" se déverse un nationalisme
dément, des vagues d'injures et de calomnies abjectes à l'adresse de ses adversaires réels ou imaginaires, mais tout cela, au
lieu de révolter, semble plaire à une bonne partie de la population. L'ascension de Diaconescu rappelle celle de Corneliu
Vadim Tudor (leader du Parti de la Grande Roumanie, "frère"
de Le Pen et aujourd'hui député européen) arrivé au second
tour de l'élection présidentielle en l'an 2000. Mais on ne peut
comparer entièrement les deux cas. Dan Diaconescu est en
même temps la création d'une partie importante de l'électorat,
généralement inculte et frustrée, mais aussi celle d'une classe
politique qui a encouragé le patron d'OTV, espérant récolter au
moins quelques miettes de son succès.
Lors des dernières élections, Dan Diaconescu a promis
tout à la fois une maison ou un appartement à tous ceux qui
n'ont pas de logement… commençant à en distribuer deux ou
trois, sur ses propres sous, devant les caméras de la télévision.
Chaque Roumain devait recevoir 20 000 euros, pris sur "les
richesses nationales" pour refaire sa vie… et, si son parti remportait le poste de maire de la capitale, les Bucarestois étaient
assurés, dès le lendemain matin d'utiliser gratuitement le
métro.
Le Premier ministre renversé par une motion de censure
Crise politique
Mihai Razvan Ungureanu : trois petits mois… et puis s'en va
A peine trois mois après la mise en place de son gouvernement, le Premier ministre Mihai Razvan Ungureanu a été
renversé par une motion de censure, fin avril. Le président Basescu a été contraint de faire appel à l'opposition pour le remplacer. C'est le jeune Victor Ponta, 39 ans, chef de file du PSD (socialistes) et vice-président de l'USL (alliance avec les libéraux de Crin Antonescu), qui a été appelé à lui succéder à quelques mois des élections législatives prévues en novembre.
F
in avril, 235 députés ont voté
la motion renversant le gouvernement Ungureanu, soit
quatre voix de plus que nécessaire.
L'opposition a reçu le renfort d'une dizaine de députés du PDL, (formation soutenant Traian Basescu), membres de la
coalition gouvernementale. Au-delà de
ces défections d'élus soucieux de s'assurer un nouveau mandat lors des élections
parlementaires de novembre prochain, le
fond du problème était la politique d'austérité menée par les autorités pour faire
face à la crise économique .
Si celle-ci a évité à la Roumanie un
scénario à la grecque, la bataille est loin
d'être gagnée, les socialistes roumains
ayant parlé de tout sauf de cette perspective. "Nous espérons que la Roumanie
respectera ses engagements vis-à-vis de
ses partenaires internationaux, a indiqué
le FMI dans un communiqué rendu
public après la chute du gouvernement
Ungureanu. Une politique macroéconomique prudente et des réformes structurelles restent essentielles pour assurer
une croissance économique à long
terme". Reste à savoir si le chef du nouveau gouvernement roumain entendra ces
avertissements.
Car la chute d'Ungureanu est intervenue en pleine mission d'évaluation du
Fonds monétaire international et de
l'Union européenne, alors que Bucarest
s'était engagé à privatiser plusieurs compagnies énergétiques afin d'attirer des
capitaux pour leur modernisation, des
réformes justement critiquées par Victor
Ponta et ses amis, alors dans l'opposition.
La motion de censure adoptée accusait le gouvernement d'avoir favorisé les
maires appartenant aux partis au pouvoir
dans l'allocation des fonds publics à l'approche des élections locales du 10 juin.
Elle critiquait également le "manque de
transparence" dans la concession de plusieurs périmètres au groupe américain
Chevron en vue d'exploiter des réserves
de gaz de schiste, ainsi que la gestion du
projet de privatisation d'une mine de cuivre.
Victor Ponta, nouveau Premier
ministre, ambitieux et pressé
Juriste de formation et procureur jusqu'en 2001, Victor Ponta (notre photo,
avec sa femme) a été l'un des plus jeunes
députés de Roumanie. Il a brièvement
occupé à deux reprises la fonction de
ministre, chargé du contrôle des programmes européens en 2004, puis des relations
avec le Parlement en 2008. En 2001,
Adrian Nastase alors Premier ministre,
11
Accusé
tage
condamné à deux ans de prison ferme en
janvier dernier pour corruption… lui
avait proposé le poste de chef du département anticorruption du gouvernement,
poste qu'il occupera pendant quatre ans.
Chef du parti social-démocrate
depuis deux ans, Victor Ponta a créé en
février 2011 l'Union sociale-libérale, une
alliance politique qui s'est donné comme
principal objectif de faire tomber le président Basescu, quitte à en passer par sa
destitution.
Admirateur de Che Guevara, Victor
Ponta, père de deux enfants, aime la
bonne chère, les vacances à Dubaï et les
rallyes, qui lui ont valu plusieurs scandales dans la presse locale. Considéré
comme un jeune loup de la politique, particulièrement ambitieux, il est marié avec
la fille d'un baron de l'ex PSD de Ion
Iliescu, Daciana Sîrbu, 35 ans, eurodéputée élevée dans le sérail.
Actualité
Les NOUVELLES de ROUMANIE
Crise politique
l
SATU MARE
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IASI
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TARGU
MURES
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Les ministres "copier-coller"
qui déconsidèrent l'enseignement
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SUCEAVA
ORADEA
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BRASOV
TIMISOARA
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TULCEA
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TARGOVISTE
n
BUCAREST
GIURGIU
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l
CONSTANTA
Sept ans de prison
pour l'ancien ministre
12
Deux démissions en moins d'un mois
L'ancien ministre de l'Agriculture,
Ioan Muresan, a été condamné à
sept ans de prison ferme par la
Haute cour de justice pour détournement d'argent public. Les cinq juges
en charge du procès ont ainsi confirmé en appel une condamnation prononcée en avril 2011. Membre du
gouvernement de centre-droit au
pouvoir entre 1996 et 2000, Muresan
avait été le premier ex-ministre postcommuniste condamné par la justice
roumaine en 2011 après huit ans de
procédures. Deux autres hauts fonctionnaires du ministère ont été
condamnés dans le même dossier.
Ils ont été accusés d'avoir provoqué
un préjudice d'environ 29,5 milliards
de lei à l'Etat, soit plus de 6,6
millions d'euros.
Présidentielles
françaises
en Roumanie
928 Français sur 1908 électeurs
inscrits (49,8 %) sur les listes électorales de l'ambassade de France en
Roumanie ont voté, lors du second
tour de la présidentielle française.
Suffrages exprimés: 908, Nicolas
Sarkozy: 580 (63,9 %), François
Hollande: 328 (36,1 %).
Au premier tour, les résultats
avaient été les suivants: 850 votants
(44,5 %)
Suffrages exprimés : 842,
1.Nicolas Sarkozy : 403, 2.François
Hollande : 178, 3.François Bayrou :
109, 4.Jean-Luc Mélenchon : 52,
5.Martine Le Pen: 46, 6.Eva Joly : 39,
7.Nicolas Dupont-Aignan : 7, 8.Philipe
Poutou : 4, 9.Jacques Cheminade : 3,
10.Nathalie Arthaud : 1.
Actualité
Les NOUVELLES de ROUMANIE
Le nouveau gouvernement
Politique
L
e gouvernement Ponta a été investi par le Parlement le 7 mai par 284 voix. Il comprend 20 membres dont 8 PSD (y
compris le Premier ministre), 9 PNL, 2 indépendants, 1 PC et, au total, 2 femmes. Il faut noter, qu'après la démission
en moins d'un mois, à la suite de scandales, de deux ministres de l'Education nationale, pressenti ou nommé, ce poste
est occupé provisoirement par Liviu Marian Pop, également ministre pour le dialogue social.
En moins d'un mois, une professeur émérite proposée au poste de ministre et
un ministre de l'Education ont été accusés de faux ou de plagiat. Ces accusations
au plus haut niveau jettent à nouveau le trouble sur l'ensemble du système d'enseignement. D’autant plus que le nouveau
Premier ministre, Victor Ponta, vient d’être
accusé à son tour de tricherie.
L
es ministres n'ont désormais qu'à
bien se tenir, leur CV sera systématiquement passé à la loupe. "Il semble qu'il y ait une chaise électrique au ministère de l'Education", déclarait le Premier ministre Victor Ponta le jour de la démission de son
ministre de l'Education, Ioan Mang, le mardi
15 mai. Accusé d'avoir plagié plusieurs articles
scientifiques, sa réputation de brillant universiIoan Mang, pris la main dans le sac,
a dû abandonner sa fonction
taire a été définitivement entachée par ces
de ministre de l'Enseignement.
suspicions. Celles-ci ont été confirmées par des
chercheurs japonais, taïwanais et israéliens spécialisés en informatique, qui ont confié
à la presse roumaine avoir reconnu des passages entiers de leurs travaux dans des articles publiés par Mang. Même s'il s'agit d'"attaque politique" pour le principal intéressé, le mal est fait. Mang est désormais surnommé le ministre "copier-coller".
Nommée par Victor Ponta dans sa première liste ministérielle puis écartée, Corina
Dumitrescu a elle aussi été montrée du doigt pour le même genre de "mauvais comportement". Recteur de l'université privée Dimitrie Cantemir et représentante de la société
civile auprès du Conseil supérieur de la magistrature, la presse a mis en relief des fautes d'orthographes dans son CV, et surtout un diplôme fictif de l'université de Stanford
- Corina Dumitrescu assurant de son côté qu'elle y a bien suivi des "cours". Avec son
mari, elle avait déjà été accusée de plagiat quelques années auparavant.
Victor Ponta
Premeir ministre
Florin Georgescu,
PSD, ministre des
Finances, vice
premier ministre, 59
ans, ancien ministre
sous Ion Iliescu.
Ioan Rus, PSD,
ministre de l'Intérieur,
57 ans, ancien
ministre
Victor Paul Dobre,
PNL, ministre de
l'Administration, 61
ans, ancien ministre
Daniel Chitoiu, PNL,
ministre de
l'Economie, 47 ans,
économiste
Corneliu Dobritoiu,
PNL, ministre de la
Défense, 57 ans,
ancien ministre
13
Mariana Câmpeanu,
PNL, ministre du
Travail, 64 ans,
ancien ministre
Liviu Marian Pop,
Indép., ministre pour
le dialogue social, et
ministre intérimaire
de l'Education
nationale, 38 ans.
Andrei Marga, PNL,
ministre des Affaires
étrangères, 66 ans,
ancien ministre
Titus Corlatean,
PSD, ministre de la
Justice, 44 ans,
juriste
Eduard Hellvig,
PNL, ministre du
Développement et
du Tourisme, 38 ans
Ovidiu Silaghi, PNL,
ministre des
Transports, 51 ans,
ancien ministre
Dan Nica, PSD,
ministre des
communications,
60 ans,
ancien ministre
Daniel Constantin,
PC, ministre de
l'Agriculture, 34 ans
Vasile Cepoi, PSD,
ministre de la Santé,
ancien ministre
Rovana Plumb, PSD,
ministre de l'environnement, 52 ans,
ancien ministre
Puiu Hasotti, PNL,
ministre de la
culture, 59 ans
Le Premier ministre à son tour soupçonné
Mais voilà, qu'à sont tour, le Premier ministre est lui aussi accusé par le journal
allemand Frankfurter Allgemeine ainsi que le magazine américain Nature d'avoir plagié près de la moitié des pages de son doctorat sur la Cour pénale internationale, publié
en 2003, empruntées aux professeurs de droit Dumitru Diaconu et Vasile Cretu. Ce que
l'intéressé dément, parlant d'une cabale politique montée par le Président Basescu. Mais
voilà qui la fiche plutôt mal.
Depuis 2003, neuf ministres se sont succédés au portefeuille de l'Education, un par an
en moyenne. L’'Education se trouve depuis quelques années dans une continuelle réforme. Chaque ministre souhaite modifier le système selon sa propre vision, imposant pratiquement tous les ans des changements profonds aux élèves. Et comme si cela ne suffisait pas, c'est aussi dans ce domaine que le problème du plagiat est le plus présent.
Il touche l'ensemble de l'éducation roumaine et particulièrement les "fabriques à
diplômes" que représentent beaucoup d'universités privées, estime le sociologue Mircea
Kivu: "En engageant de nombreux politiciens à professer dans leurs universités pour
obtenir les agréments nécessaires, et en leur offrant de gros salaires, les directeurs de
ces universités ont des soutiens au niveau politique et gardent un levier de pression".
A noter que selon l'Institut national de la statistique (INS), plus de 40% des étudiants roumains étaient inscrits dans des universités privées pendant l'année universitaire 2009-2010, les plus laxistes. Et cette proportion serait en augmentation.
Jonas Mercier (www.lepetitjournal.com/Bucarest)
Leonard Orban
(indép.): ministre
des Affaires Européennes (secrétaire
d'Etat sortant),
51 ans, né à Brasov
OTAN et UE : couac au sommet de l'Etat
S
Mircea Dusa, PSD,
ministre délégué aux
relations avec le
Parlement, 57 ans
Lucian Isar, PNL,
ministre délégués
aux affaires économiques, 35 ans
ur ordre de Victor Ponta, le nouveau ministre des Affaires étrangères,
Andrei Marga, a été envoyé aux côtés du Président Basescu au sommet de
l'OTAN de Chicago, à la mi-mai, pour l’encadrer. Le premier ministre a
fait ensuite voter dans la foulée, par le Parlement, une motion lui reconnaissant le
droit de représenter son pays à l’étranger et lors des sommets des chefs d’Etat et de
gouvernement, humiliant encore plus Traian Basescu, auquel il voue une haine féroce et qu’il espère bien faire destituer après les élections parlementaires de l’automne
prochain. Mi-juin, le Chef de l’Etat ne figurait toujours pas sur la liste de la délégation représentant la Roumanie au Conseil européen du 28 juin, envoyée à Bruxelles.
Actualité
Les NOUVELLES de ROUMANIE
Politique
l
SATU MARE
l
l
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Les candidats arrivés en tête rafleront tout
SUCEAVA
ORADEA
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IASI
JUCU
CLUJ BACAU
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VASLUI
ARAD
BRAILA
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BRASOV
TIMISOARA
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CRAIOVA
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TULCEA
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TARGOVISTE
n
BUCAREST
GIURGIU
l
l
CONSTANTA
Bucarest condamné
pour les Minériades
14
Instauration du système
de vote uninominal majoritaire à un tour
La Cour européenne des droits
de l'homme (CEDH) a condamné la
Roumanie à verser 60 000 euros en
dédommagement du préjudice moral
subi par les familles de deux jeunes,
tués lors des "minériades" de 1991.
Aurica Crainiceanu, 27 ans, et
Andrei Frumusanu, 24 ans, avaient
été tués par balles le 25 septembre
1991. Plus de vingt ans après les
faits, l'enquête n'a toujours pas été
finalisée, motif pour lequel la CEDH
a décidé de condamner la
Roumanie. En 2003, le Parquet militaire avait informé les familles des
deux victimes que les accusations à
l'encontre d'un major soupçonné d'avoir tiré sur les deux jeunes gens
étaient levées et le dossier refermé,
avant qu'il ne le rouvre fin 2011. La
Roumanie a également été condamnée par la CEDH pour la non-résolution des crimes de la révolution de
1989.
Liberté de la presse
laissant à désirer
Selon le rapport "Freedom of the
Press 2012 : A Global Survey of
Media Independence", la Roumanie
occupe la 86ème place sur 197 pays
analysés sur la liberté de la presse.
Au même niveau, plus ou moins, on
retrouve la République dominicaine,
l'Italie, la Bulgarie, la Serbie, la république de Moldavie et la Hongrie.
Selon cette étude, la Roumanie
occupe la treizième place dans le
classement des pays d'Europe centrale et de l'Est; l'Estonie, la
République Tchèque, la Slovaquie, la
Lituanie, la Pologne, la Slovénie et la
Lettonie étant considérés comme
ayant une presse libre.
Le parlement a adopté fin mai le projet de loi soutenu par la nouvelle majorité
pour la mise en place d'un système électoral uninominal. Mais cette loi, votée à six
mois des prochaines élections législatives, suscite bien des critiques de la part de la
société civile.
L
a loi prévoyant la mise en place du système de vote uninominal majoritaire à
un tour était voulue depuis longtemps par le Premier ministre Victor Ponta.
La Chambre des députés l'a adoptée à 180 votes "pour", 30 "contre" et 26
abstentions. Auparavant, les parlementaires étaient élus par un vote uninominal mixte,
soit un système électoral à la proportionnelle; les députés étaient choisis parmi tous les
partis ayant dépassé le seuil électoral de 5% du total des suffrages exprimés. Cette modification de la loi prévoit la suppression de ce seuil électoral, et c'est le candidat avec le
plus grand nombre de voix, par une majorité relative ou absolue, qui obtiendra tous les
mandats en jeu dans sa circonscription. Les autres candidats qui auront moins de votes
que lui ne seront pas représentés, même si leur nombre total de voix dépasse la moitié
"plus un" des suffrages exprimés.
L'UDMR (parti de la minorité hongroise) s'est quant à lui abstenu de voter ; pour son
président, Kelemen Hunor, "cette modification de la loi électorale va détruire le système politique et électoral". La nouvelle loi électorale prévoit également que les départements où les minorités nationales représentent plus de 7% de la population au dernier
recensement auront un représentant de plus à la Chambre des députés. Les députés ont
par ailleurs rejeté l'amendement proposé par le PDL (Parti démocrate libéral, opposition)
prévoyant la réduction du nombre de députés à 300.
Les grands partis avantagés
Lors du débat, des dizaines de représentants d'ONG dont Ecopolis, "Cere" ou APADOR-CH, ont manifesté sous le balcon du Parlement. "Nous voulons la démocratie réelle maintenant", "Nous serons
beaucoup dans notre grande
minorité", pouvait-on lire sur
leurs pancartes. En effet, certaines ONG sont préoccupées
des effets négatifs que pourrait
avoir cette loi, à savoir le
manque de représentation.
Selon Cristian Pârvulescu,
président de l'association Pro
Democratia, "l'article 62 de la
Constitution, indiquant que le
Parlement est représentatif du
peuple, est enfreint par la nouvelle loi. Ce système est inégal car ceux qui n'ont pas voté
pour le gagnant ne seront pas représentés. Les gens iront voter, ils choisiront quelqu'un
et puis au final ils ne seront pas représentés du tout". De son côté, Crin Antonescu, leader du Parti national libéral, a soutenu que la loi n'était en aucun cas anti-démocratique,
anti-constitutionnelle ou non représentative. Il a d'ailleurs pris l'exemple de la GrandeBretagne où "personne ne remet en doute la solidité de sa démocratie".
Néanmoins, cette loi serait surtout avantageuse pour les grands partis, à l'image précisément des dernières élections législatives britanniques de 2010 où le Parti conservateur a obtenu 36% des votes et a gagné 47% des mandats parlementaires. Quoi qu'il en
soit, en attendant les prochaines élections législatives d'automne, la loi doit être validée
par le Conseil constitutionnel et promulguée par le président.
Julia Beurq (www.lepetitjournal.com/Bucarest)
Actualité
Les NOUVELLES de ROUMANIE
Economie
Le traumatisme du départ de Nokia au Vietnam en passe d'être surmonté
Les paysans de Jucu voient revenir les investisseurs
Sur les routes défoncées, on croise encore des carrioles à cheval. Avec ses maisons modestes, le village de Jucu, au nordouest de la Roumanie, semble figé dans le temps. Pourtant, derrière l'image de ce patelin de la Roumanie profonde se joue
un véritable ballet de capitaux étrangers.
E
n 2008, le géant finlandais de la téléphonie mobile,
Nokia, a décidé de fermer l'usine allemande de
Bochum pour s'implanter à Jucu. Les paysans se
sont réjouis de cet investissement de 60 millions d'euros et des
2 000 emplois créés dans la région, alors que la chute du régime communiste en 1989 et la transition chaotique des années
1990 avaient anéanti le tissu industriel de la région. Mais dès
la fin 2011, Nokia pliait bagages pour déménager au Vietnam,
main-d'oeuvre moins chère oblige.
"Nokia a fait un gros coup, lance Vladimir Margineanu,
conseiller à la mairie de Jucu. Ils ont amassé un profit énorme et ils sont partis. C'est dommage"; Mais, depuis février, les
paysans de Jucu reprennent espoir.
Ils croyaient avoir tout perdu, persuadés que l'Asie, avec sa maind'oeuvre bon marché, allait continuer
à attirer les capitaux occidentaux.
Quelques mois après le départ de
Nokia, le village de Jucu a reçu une
bouffée d'oxygène inespérée. Le 25
janvier, l'entreprise italienne d'électroménager De'Longhi annonçait sa décision de récupérer la
fabrique de Nokia pour s'y implanter. "La future usine est la
clé de notre stratégie de développement dans une période de
croissance accélérée, assure un communiqué. Cette nouvelle
plate-forme permettra de ramener notre structure de production d'Extrême-Orient en Europe".
L'Asie intéressée par
les bas salaires de l'Europe de l'Est
De'Longhi s'apprête ainsi à investir 30 millions d'euros à
Jucu, et les autorités locales prévoient entre 600 et 1 000 nouveaux emplois. "De'Longhi aura besoin de plusieurs fournisseurs qu'on espère trouver dans notre région", affirme Viorel
Gavrea, directeur du parc industriel Tetarom qui a accueilli
l'ancienne usine de Nokia.
"En Roumanie, ces dernières années, les salaires ont stagné ou même baissé, explique l'analyste économique Mihai
Mindrutiu. En Chine par contre, ils continuent à augmenter.
La production de marchandises aussi loin ne se justifie plus. Il
est maintenant plus simple de produire au sein de l'Union
européenne".
L'implantation de De'Longhi à Jucu a donné des idées à
d'autres. Bosch a confirmé, lui aussi, sa décision de construire
une usine dans les champs de Jucu. L'entreprise allemande
négocie l'achat d'une surface de vingt hectares pour y construire une de ses futures usines. Un bon choix, car le prix du terrain en Roumanie (2 000 euros l'hectare) est actuellement le
plus bas de l'Union Européenne.
Bosch va investir 77 millions d'euros dans son entreprise
roumaine qui devrait créer plusieurs milliers d'emplois.
"L'arrivée de De'Longhi et de Bosch
n'est que le début. Nous sommes en
négociation avec d'autres entreprises
qui veulent investir dans notre
région", assure Victor Popa, porteparole du Conseil départemental de
Cluj, la ville voisine de Jucu.
Le nom de Tata Motors revient
sans cesse. Le constructeur automobile indien voudrait investir dans le futur pôle industriel de
Cluj, attiré par le bas niveau des salaires, à environ 200 euros.
De plus en plus d'entreprises asiatiques s'intéressent aux
marchés émergents de l'Europe de l'Est pour écouler leur production en Europe. C'est dans cette perspective qu'en février,
le constructeur automobile chinois Great Wall Motors a ouvert
une usine d'assemblage à Bahovitsa, un village au nord de la
Bulgarie voisine. "La Bulgarie est devenue notre base de production de voitures en Europe", a déclaré le PDG chinois
Wang Feng Ying lors de l'inauguration du site.
Dans la ville de Cluj, les autorités locales accélèrent la
modernisation des infrastructures locales pour attirer d'autres
investissements. Le petit aéroport met en place une nouvelle
piste pour accueillir les vols internationaux de plus en plus
nombreux. Une autoroute en construction devrait relier la ville
au réseau d'autoroutes européennes et faciliter le transport des
marchandises en direction de l'Europe de l'Ouest. A Jucu, les
paysans ont à nouveau le sourire.
Mirel Bran (Le Monde)
Le métro jusqu'à Otopeni en 2018
M
etrorex a annoncé la construction d'une sixième
ligne de métro, permettant
de rejoindre l'aéroport international Henri
Coanda d'Otopeni à Bucarest. Elle s'étendra sur 14 kilomètres et ses 12 stations
porteront le nom des grandes capitales
internationales. Sa première station sera
reliée à la ligne 4 qui joint la Gare du
Nord au quartier du 1er Mai.
L'appel d'offres aura lieu en septembre et les travaux d'une durée approximative de cinq ans commenceront en 2013.
La valeur estimée des investissements est
de 1,05 milliard d'euros. Ces travaux
seront financés par un crédit de
320 millions d'euros, accordé par le gouvernement japonais, par l'intermédiaire
de l'Agence japonaise de coopération
internationale (JICA) qui a réalisé l'étude
de faisabilité.
15
Actualité
Les NOUVELLES de ROUMANIE
Social
l
BAIA MARE
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CONSTANTA
BUCAREST
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Avec des si…
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Bogdan Hossu compte
qui a montré à l'Europe la voie de la révolte contre les injustices sera encore à la hauteur”
sur l'effet d'entraînement de la France d’après Sarkozy
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“J'espère bien que le peuple français
Actualité
Les NOUVELLES de ROUMANIE
Une absorption en proportion de
60% des fonds européens se traduirait
par une avancée annuelle de 3,6% du
Produit intérieur brut (PIB), selon le
Centre roumain des politiques européennes (CRPE) qui a calculé l'impact
des fonds structuraux sur l'économie
pour les années à venir. Si la
Roumanie absorbait intégralement les
fonds qui lui sont alloués, elle verrait
son PIB augmenter de 4%. Et si ce
scénario s'avérait, cela permettrait
également la création de 20 000
emplois par an. Mais sans les fonds
européens, la Roumanie ne peut
espérer une augmentation de son PIB
supérieure à 2%.
L'économie roumaine
officiellement
en récession
L'économie roumaine est retombée
en récession suite à une baisse de
0,1% de son Produit intérieur brut
(PIB) au premier trimestre, selon les
estimations publiées par l'Office national des statistiques (INS). Ce chiffre
fait suite à une précédente baisse de
0,2% au quatrième trimestre 2011.
Une récession se définit par deux trimestres consécutifs de baisse du PIB.
Après une croissance de 2,5% en
2011, Bucarest retrouve la situation de
2009 et 2010, quand le pays avait
subi une forte récession. Le recul de
l'économie pour le premier trimestre
2012 n'est toutefois pas aussi important que les prévisions des analystes,
qui s'attendaient à une décroissance
comprise entre 0,2 et 0,3%. Pour
2012, le Fonds monétaire international
(FMI) continue de prévoir une croissance de l'économie de 1,5%.
A quelques jours près, la Roumanie et la France ont connu deux changements
politiques majeurs, avec l'arrivée au pouvoir de dirigeants de gauche. Bogdan
Hossu, leader du syndicat de travailleurs Cartel Alfa et syndicaliste roumain le
plus influent, également membre du Bureau International du Travail, à Genève, a
évoqué au cours d'un entretien avec Henri Gillet, ce que lui inspire ces tournants
qui modifient l'aspect de l'Europe.
Henri Gillet : Qu'attendez-vous du gouvernement Ponta?
Bogdan Hossu : Qu'il rétablisse le dialogue social et, par des décrets d'urgence,
mette en application le code du travail négocié entre les cinq confédérations syndicales et les quatre syndicats d'employeurs. Le gouvernement Boc s'était employé à le
vider de sa substance que ce soit sur les contrats collectifs, le rôle du Conseil économique et social, les relations entre patrons et employés, etc.
H.G. : Quel prix ont dû payer les Roumains en cette période de crise ?
B.H. : Les Roumains gardent un souvenir amer de la potion libérale du gouvernement Boc. Ils ont beaucoup souffert. On a assisté
à une véritable dérive vers
le néo-libéralisme et on
s'est éloigné de l'Europe
sociale. La Roumanie est
le seul pays à avoir appliqué la totalité des cinq
mesures d'austérité préconisées par le FMI : réduction très forte des salaires
(25 %), des pensions (15 à
25 %), de l'assistance
sociale, augmentation de
la TVA à 24 %, réduction
des personnels et licenciements (350 000 postes
dans
la
fonction
publique). Même en
Grèce, en Espagne, au
Portugal, en Italie, on n'a
mis en place que 2 ou 3 de ces mesures. Cette médication a été terrible et est difficile
à comprendre. Elle est profondément injuste : ainsi le régime des retraites était équilibré jusqu'en 2008. Il n'y avait pas lieu de toucher aux pensions, mais le gouvernement
a baissé la participation des employeurs, créant un déficit.
"Sur 240 propositions faites par le patronat et les syndicats
pour relancer l'économie, le gouvernement Boc en a appliqué 3"
H.G. : Quel jugement portez-vous sur le gouvernement Boc ?
B.H. : La philosophie du gouvernement Boc était de compter sur la relance économique européenne pour qu'elle profite à la Roumanie, sans bouger, sans prendre de
mesures pour le développement. Depuis 2008, pratiquement aucune initiative n'a été
prise pour créer des emplois, booster l'économie. Patrons et syndicats ont fait 240 propositions en commun en ce sens. Le gouvernement Boc en a retenu 25…. et appliqué
3 ! Encore l'une d'elle, l'introduction du chômage technique quand une entreprise est en
difficulté, n'est-elle entrée en vigueur qu'en 2010. Entre temps, des entreprises qui
auraient pu survivre ont fermé leurs portes et leurs employés perdu leur travail. En
2008 et 2009, chaque année 35 000 emplois qui auraient pu être sauvés ont été détruits.
Quant à la gestion de ce gouvernement, elle a été calamiteuse. Le FMI nous avait accordé une aide de 13 milliards
d'euros, sous conditions. La Banque Nationale Roumaine,
sous l'impulsion de son gouverneur, Mugar Isarescu, et avec
l'assentiment du gouvernement et du FMI, a pris des mesures
en faveur des banques étrangères, les seules qui restaient pratiquement sur la place roumaine. Elles ont profité des dispositions préférentielles accordées pour rapatrier leurs fonds dans
leurs pays. En 9 mois, plus de 7 milliards de capitaux ont ainsi
quitté la Roumanie si bien que la Roumanie ne s'est finalement
retrouvée qu'avec un apport de 6 milliards d'euros du FMI
pour sortir de la crise. Cette fuite de capitaux a en outre renchéri l'euro et creusé le déficit, créant de graves difficultés
pour le budget de l'Etat. Celui-ci représente 30 % du PIB… et
la fraude fiscale dans le pays est estimée à 29,6 % du PIB
(pour moitié fraude sur le marché du travail avec les cotisations non payées, le travail au noir, pour l'autre moitié la fraude économique). C'est ainsi un budget entier qui ne rentre pas
dans les caisses de l'Etat chaque année.
H.G. : Quels sont les effets sur la population de la politique menée jusqu'ici ?
B.H. : On a vu apparaître une paupérisation très nette, et
pas seulement dans les campagnes. Elle touche aussi les élites,
les ingénieurs, les médecins, etc., obligés de s'expatrier. La
Roumanie compte actuellement 2,5 millions d'émigrés, partis
essentiellement en Italie, Espagne, Portugal et un peu dans les
pays scandinaves.
"Nos compatriotes exilés sont prêts à revenir
au pays, s'ils touchent des salaires au blanc"
H.G. : Assiste-t-on à un retour des travailleurs roumains
exilés avec la crise frappant l'Ouest ?
B.H. : Oui. Les syndicats roumains discutent avec les
pays d'émigration pour que ce retour se passe le mieux possible. Nos compatriotes sont prêts à revenir, car les salaires
qu'ils touchent ici se rapprochent de plus en plus de ceux perçus à l'étranger, si on prend en compte les frais supplémentaires provoqués par l'exil. Mais à deux conditions :
- qu'ils touchent des salaires "au blanc", c'est-à-dire entièrement déclarés, comme dans l'UE, et non pas au gris ou au
noir, comme trop souvent chez nous. Ils veulent pouvoir
compter sur leurs lendemains et faire des projets.
- bénéficier des mêmes commodités minimales qu'ils ont
connues pendant leur exil, avec des services publics existants
dans leurs communes et villages : écoles, dispensaire, poste,
etc.. Ils ont goûté à la vie occidentale.
H.G. : Comment ces travailleurs ont-ils vécu leur séjour
à l'étranger ?
B.H. : Pas toujours très bien. Il leur a fallu parfois compter avec la duplicité d'employeurs comptant sur leur méconnaissance du droit du travail, de la législation nationale. En
Espagne, certains de nos compatriotes ont été pratiquement
séquestrés dans des baraquements, leurs passeports retirés, les
salaires versés n'étaient pas ceux annoncés, on leur retirait le
coût de leur hébergement, contrairement aux engagements
pris. En Italie, nous avons entrepris une campagne d'information sur les droits de nos compatriotes par le biais d'affichettes
en roumain et italien dans les bus.
Quand ils reviennent chez eux, il faut bien constater qu'une rupture s'est faite avec leur ancien mode de vie. Avant, surtout à la campagne, on continuait de vivre auprès de parents,
on se faisait construire une maison à proximité. C'est oublié
aujourd'hui tout çà.
H.G. : Que pensez-vous de l'élection de François
Hollande en France ?
B.H. : C'est trop tôt pour le dire (ndlr : cette interview
s'est déroulée trois jours après l'élection présidentielle française). On va voir dans les six mois. Mais elle nous apporte de
l'espoir. J'espère que votre nouveau président va taper du
poing sur la table. Mettre à la raison les spéculateurs, réformer
les banques, arrêter ce scandale des parachutes dorés, une
insulte à l'égard de ceux qui ont tant de mal à subsister, bien
utiliser l'argent de l'Etat au profit de tous et non de quelques
uns. J'espère bien que le peuple français qui a montré si souvent la voie de la révolte contre les injustices sera encore à la
hauteur pour entraîner le reste de l'Europe !
Propos recueillis par Henri Gillet
Bucarest moins chère
L
a capitale roumaine est devenue cette année plus accessible qu'en
2011, selon une étude de la société de consultance Mercer. Sur une
liste des 214 villes les plus chères du monde, Bucarest se situe à la
176ème place. A en croire le classement réalisé par Mercer, le coût de la vie dans
la capitale roumaine a diminué en 2012. L'année dernière, Bucarest occupait la
152ème place dans cette même étude, soit 24 places de mieux. Cette tendance est
générale dans la région selon Mercer, notamment du fait de "la dévalorisation des
monnaies". Seules Sofia et Belgrade, qui se situent respectivement à la 181ème et
197ème place, sont dans la région moins chères que Bucarest. Cette étude, réalisée sur cinq continents, compare le coût de la vie en prenant compte de 200 critères différents, dont les transports, les aliments, les vêtements ou les produits de
consommation courante.
Energie renouvelable
L
a Roumanie est l'un des pays les
plus intéressants au monde pour
des investissements dans le
domaine de l'énergie renouvelable, selon
un rapport publié par la compagnie d'audit
et de consultance Ernst & Young. Dans une
analyse trimestrielle réalisée sur 40 pays, le
pays occupe la 14ème position, devant la
Pologne ou l'Irlande, et se place près de
pays comme le Japon, l'Australie ou la
Suède. Le leader de ce classement est la
Chine.
17
Actualité
Les NOUVELLES de ROUMANIE
La petite usine de déchets
du fermier moldave
Moldavie
"Initialement, je n'avais à fournir
que ma bouse de vache"
Un ingénieur vend à l'Etat moldave l'électricité fournie par son usine de production de gaz à partir de déchets organiques. Une première dans le pays.
L
18
e biogaz en soi n'est pas une nouveauté. Découvert par le physicien
Alessandro
Volta en 1776 et identifié sous le nom de méthane, c'est le proProduire
duit de la fermentation des matières organiques en l'absence d'oxygène. Il a
50 000 KW par mois
aussi fait l'objet de recherche en Chine depuis 1920. Mais, pour un Moldave, c'est
Actuellement, comme matière preaujourd'hui une source importante de revenus.
mière, Vasile Moraru utilise des
"Il n'existe pas de domaine d'activité qui n'ait besoin d'énergie", affirme Vasile
déchets organiques, des déjections,
Moraru. Suivant l'exemple de certains pays occidentaux et glanant ses informations sur
du fumier, des excréments, des eaux
Internet avec sa fille cadette comme traductrice, cet ingénieur électricien de formation a
usées provenant de l'industrie alimené à bien la construction de la première usine de production de biogaz en république
mentaire et de la zootechnie. Pour un
de Moldavie. Il est fier de sa réalisation, d'autant qu'il a commencé à vendre à l'Etat molfonctionnement optimal, il faut fournir
dave de l'électricité au prix de 1,73 leu (0,12 euro) le kilowatt.
quotidiennement environ 40 tonnes
L'idée de Vasile Moraru a germé dans les années 1999-2000, lorsqu'il a appris le
de matière première, constituée d'un
lancement en Moldavie d'un projet pilote néerlandais similaire. "Les Néerlandais nous
mélange de
ont apporté leur savoir-faire et la technologie. Notre rôle
12 % de
était la construction. Initialement, l'Etat devait me soutematières
nir et je n'avais qu'à fournir la bouse de vache", expliquesèches et
t-il. Mais tous les ministères ont finalement retiré leurs
88 % d'eau.
promesses d'aide. Il a alors commencé à chercher par luiUne petite
même des moyens pour mettre en pratique le projet. Une
installation
visite aux Pays-Bas, en compagnie de sa fille, et les encoude ce type
ragements reçus sur place, l'ont poussé à mettre l'affaire en
produit 85
marche. "L'entreprise a de l'avenir, comme toute installaKW par
tion de production d'énergie", lui auraient dit des spécialisheure, ce
tes du pays des tulipes.
qui permet
Le Moldave s'est endetté pour construire l'installation:
de tabler sur
Vasile Moraru: "Dans un pays agraire comme la Moldavie "Quand je pense à tous les obstacles que j'ai dû surmonter
le projet vaut son pesant d'or pour une entreprise agricole". !" s'exclame-t-il en regardant la bâtisse bleue qui produit
une production journade l'électricité et de la chaleur. "La technologie est néerlandaise et l'équipement vient de
lière de 2 000 KW par jour. Dans l'édivers pays: Allemagne, Italie, Belgique. Je suis content d'être allé de l'avant, même si
tat actuel de son installation, il vend
ç'a été laborieux. Depuis fin 2011, je vends enfin de l'électricité à l'Etat". Le fermier
environ 7 000 KW d'électricité
estime que "dans un pays agraire comme la Moldavie le projet vaut son pesant d'or pour
chaque mois à l'Etat, mais, à pleine
une entreprise agricole. Là où il y a des terres agricoles, il doit y avoir une ferme, et
capacité, l'usine pourrait atteindre
l'installation peut se caler entre les deux".
jusqu'à 35 000 à 50 000 KW par
Victoria Popa (Jurnal de Chisinau)
mois.
En lançant, en 2004, la production
de biogaz, Vasile Moraru a créé une
dizaine d'emplois. Et, depuis, il est
même devenu conseiller dans ce
domaine. Des gens intéressés par
son affaire viennent dans son usine
de Colonita afin de connaître ses
astuces. Selon l'ingénieux Moldave,
sans le soutien de l'Etat, qui s'est
engagé légalement à acheter l'énergie renouvelable produite dans le
pays avant d'en importer, il n'aurait
pas pu mener son projet à bien.
Dragon dace aux JO de Londres
L
a République de Moldavie a choisi le dragon
dace comme emblème pour les JO de Londres,
un symbole particulièrement fort de l'histoire de
la petite République qui la lie à celle de ses voisins et grands
frères roumains. Cet étendard, obligatoire pour le défilé des
délégations des JO, servira également à leurs éditions ultérieures. Le draco ou dragon dace, est un animal fantastique
dans la mythologie des Daces. Il est représenté avec un
corps de serpent et une tête de loup. Il servait dans les armées antiques, comme étendard et enseigne. Il est visible sur les représentation des guerriers daces de Decebal dans
les bas-relief illustrant les guerres daciques sur la colonne de Trajan à Rome.
Les NOUVELLES de ROUMANIE
Moldavie
Actualité
A 33 ans, Dorin Chirtoaca tient les rênes de Chisinau
Un jeune maire sans complexes face aux communistes
La renommée peut tenir à rien. A la précocité, par exemple. Dorin Chirtoaca, 33 ans, est le maire de Chisinau, la capitale moldave. Il a accédé à cette fonction à l'âge de 29 ans. Le pays était encore dirigé par le communiste Vladimir Voronine,
en ligne directe avec Moscou. Mais, en avril 2009, des dizaines de milliers de personnes ont protesté contre le résultat des
élections. L'étreinte du régime s'est desserrée, une coalition pro-européenne est arrivée au pouvoir.
P
et proroumaines. Le grand frère voisin semble toujours flotter
romis à un bel avenir, Dorin Chirtoaca a été réélu
au-dessus des débats politiques. Dorin Chirtoaca y est pour
d'un souffle, en juin 2011, face à un candidat comquelque chose. Dans les jours qui ont suivi sa première élecmuniste. A la tête d'une ville de 750 000 habitants
tion, il s'est rendu à Bucarest, à la fureur des communistes.
(le pays n'en compte que 3,5 millions), il incarne une nouvelle
La présence de drapeaux roumains, agités lors des rassemgénération prétendant aux plus hautes fonctions, polyglotte et
blements d'avril 2009, n'a fait que renforcer leur paranoïa sur
tournée vers l'Ouest. Avare de sourires, il essaie de convaincre
une éventuelle absorption de la Moldavie. "La menace est
son interlocuteur plutôt que de le charmer. En français, s'il
peut-être éloignée mais réelle, assure Inna Supac, députée du
vous plaît.
PC. Certaines forces politiques ne défen"Comment fait-on pour devenir
dent pas le sens de l'Etat en disant que
maire à 29 ans ?
c'est un héritage soviétique, qu'on est une
- La motivation.
nation roumaine. On tente de diffuser
- En politique, tout le monde est
l'esprit et l'idéologie de la "roumanité"".
motivé...
Sa "roumanité", le maire de Chisinau
- M. Sarkozy est bien devenu maire
la
revendique.
Sa famille a été très active
de Neuilly très jeune, non ?
dans
la
lutte
pour
la "libération nationa- De Neuilly, pas de Paris.
le".
Les
grands-parents,
côté paternel, ont
- C'est juste à côté. Nous, on est à
été
déportés
en
Sibérie
en
1949. Deux de
2 500 km de Paris."
ses
oncles
sont
des
personnalités
reconOn n'est pas sûr d'avoir saisi l'argunues.
Fondateur
du
Front
national
patrioment, mais après tout, le maire a raison de
tique, réclamant le détachement de
relativiser sa précocité. L'âge n'est ni une
l'Union Soviétique, Gheorghe Ghimpu a
circonstance atténuante ni une garantie de
été condamné à six ans de prison dans les
clairvoyance. En revanche, il autorise des
années 1970. Il est décédé en 2000. Mihal
audaces. Dorin Chirtoaca s'était lancé, à
Ghimpu, lui, est une figure de proue du
peine élu, dans la bataille des arbres de
Parti libéral. Après les élections de juillet
Noël. Il voulut en installer un pour le 25
Dorin
Chirtoaca
se
marie.
Un
gag
du
jeune
décembre devant le siège du gouverne- maire qui en 2007 a pris pour épouse la mairie 2009, il a occupé les postes de président
ment. Fureur du président communiste, de Chisinau, née en 1436, comme l'établit l'ac- du Parlement et celui de chef de l'Etat par
te de mariage dressé. Le marié a alors 31 ans.
intérim. "Une énergie s'est accumulée
Vladimir Voronine, qui s'accrochait au
dans
ma
famille
et
en
moi", explique le jeune maire.
calendrier de l'Eglise orthodoxe russe, qui fixe Noël au 7 janvier. Le chef de l'Etat a fait déplacer l'arbre.
L'incident a résumé, de façon caricaturale, la tension entre
Formé au collège franco-roumain
deux puissants courants en Moldavie : le premier, russophone,
alimenté par les médias diffusés en cette langue et piloté par le
Dorin Chirtoaca a fait ses études de droit à l'université de
Parti communiste, rassemble les habitants des zones rurales et
Bucarest, tout en fréquentant le Collège franco-roumain d'étules personnes âgées ; le second, urbain, défend la souveraineté
des européennes. En 2001, il commence à travailler à la télévimoldave, des liens étroits avec la Roumanie et l'intégration
sion, pour l'équivalent local de l'émission "Perdu de vue".
européenne. Une majorité de la population se trouve au milieu,
"C'était du journalisme d'investigation. Il fallait enquêter pour
moins sensible à l'embrigadement idéologique qu'au contenu
vérifier que les gens ne nous mentaient pas." Au bout de deux
du réfrigérateur. Avec consternation, elle a assisté à la paralyans, il revient au pays. Il s'engage au sein du Comité Helsinki,
sie du Parlement, incapable pendant plus de 900 jours de désien faveur des droits de l'homme.
gner un président, jusqu'au 16 mars 2012, où Nicolae Timofti
Le jeune homme entre en politique en 2005. Lorsqu'il
a été élu.
prend les rênes de la ville en 2007, Dorin Chirtoaca découvre
que l'administration précédente a laissé des trous béants dans
La politique : un gène familial
le budget. "Nous avons engagé une thérapie de choc pour
réduire nos dépenses de 30 %. On a fait des réformes impopuOutre sa fonction de maire, Dorin Chirtoaca est aussi vicelaires, en augmentant les tarifs pour l'eau, le chauffage, la proprésident de l'une des trois formations de la coalition au poupreté. J'ai aussi remplacé un tiers des cadres".
voir, le Parti libéral de Moldavie, aux positions conservatrices
(suite page 20)
19
Société
Les NOUVELLES de ROUMANIE
Evénements
l
SATU MARE
l
IASI
TARGU
MURES
l
A la gloire de Trajan…
ou des chiens errants ?
l
SUCEAVA
ORADEA
l
BACAU
l
l
l
VASLUI
ARAD
BRAILA
l
l
BRASOV
TIMISOARA
PITESTI
l
l
CRAIOVA
l
l
TULCEA
l
TARGOVISTE
n
BUCAREST
GIURGIU
l
l
CONSTANTA
(suite de la page 19)
Plus habile qu'efficace ?
20
Une statue fait polémique à Bucarest
Aujourd'hui, la mairie de Chisinau
ne reçoit plus d'argent de l'Etat ; au
contraire, c'est elle qui paie le salaire
des professeurs. Prochains objectifs:
la station d'épuration des eaux, l'achat de nouveaux trolleybus.
Toutefois, cette image de réformateur moderne est relativisée par
des observateurs. Ils lui reconnaissent plus d'habileté que d'efficacité.
"C'est un type bien, mais sans
marge de manoeuvre", estime
Ghenadie Brega, de l'ONG Hyde
Park, qui fut l'un des grands animateurs de la "révolution Twitter", en
2009. "On parle souvent de structures criminelles au sein de l'administration municipale, autour de fonctionnaires en poste depuis sept, huit
ans. Pourquoi cache-t-il cela ?".
"Seuls les froussards
paient leurs dettes !"
"Le maire est une énorme déception, assure Igor Botan, politologue
de renom. C'est un homme compétent mais pas concentré. Un administrateur doit être un chef, convoquant ses directeurs, fixant les
tâches, demandant des comptes".
Igor Botan ne reconnaît même pas
au maire le fait d'avoir comblé les
déficits. "En fait, les communistes
alors au pouvoir ont porté plainte
contre la mairie pour qu'elle rembourse ses dettes. Le tribunal a
contraint Chirtoaca à dégager de
l'argent dans le budget. Vous
connaissez cette blague: seuls les
froussards paient leurs dettes !".
Piotr Smolar (Le Monde)
U
ne statue de l'empereur romain Trajan nu avec une louve dans les bras, inaugurée devant le Musée national d'histoire à Bucarest, fait polémique en
Roumanie, un passant cité par la presse y voyant plutôt un "ivrogne portant
un chien errant chez le vétérinaire". La statue en bronze du sculpteur Vasile Gorduz
(1931-2008) se voulait une interprétation de la genèse du peuple roumain, issu d'une
symbiose entre les Romains et les Daces, deux peuples pour qui la louve représentait un
animal emblématique. Mais la posture
étrange et la nudité du personnage mâle,
ainsi que la rigidité de l'animal avec un
foulard autour du cou censé rappeler l'étendard des Daces ont suscité l'ironie des
passants comme des internautes, qui rivalisent d'imagination pour interpréter cette
œuvre d'art.
"Je n'ai jamais vu quelque chose de
plus grotesque, une louve avec une tête de
pitbull, une queue de lézard et une tumeur
à la gorge, portée par un individu visiblement embarrassé par sa nudité", commente une passante qui souhaite garder l'anonymat. Le directeur du Musée, Ernest
Oberlander Tarnoveanu, partage ces critiques et assure s'être opposé à ce que la
statue soit installée devant ce bâtiment
imposant du centre de Bucarest. "Je ne
suis ni pudibond ni conservateur, mais la
statue n'aurait jamais dû être installée ici en raison de sa qualité artistique discutable",
a-t-il déclaré à l'AFP, ajoutant: "Les gens de la mairie ont fait pression pour qu'on l'accepte mais je pense qu'ils se rendent compte déjà eux aussi qu'il s'agit d'une erreur".
Sur les sites internet, les lecteurs ne mâchent pas leurs mots à l'égard de ce que l'un
d'eux appelle une "monstruosité". "Faites-moi comprendre, le type ne porte pas de slip
mais le chien a bien un foulard, alors est-ce qu'il fait chaud ou il fait froid?", s'interroge un lecteur sur Hotnews.ro. "La mairie de Bucarest a inauguré le premier monument
dédié aux chiens errants de Roumanie, montrant l'empereur Trajan avec un superbe
exemplaire dans ses bras", s'esclaffe le site Times New Roman.
Le pope se fait pompier
C
atastrophé à la suite de l'impuissance des habitants de sa paroisse face
à un incendie ayant ravagé sept
habitations en 2011 - encore le sinistre avait-il
été limité par le passage fortuit d'un convoi de
pompiers hongrois - Puiu Florea, pope de
Cornu Luncii (jud Suceava), a décidé de prendre le taureau par les cornes. Il a décidé de vendre son tracteur personnel, consacrant les
2500 € obtenus à l'achat d'un camion de pompiers frappé par la limite d'âge (7 ans),
mais en parfait état, dans une commune française. Des prêtres français ont fait les intermédiaires, finançant le transfert vers la Roumanie qui a coûté 1500 €. Sur place, l'engin a été adapté aux normes locales avec l'aide des autorités compétentes qui s'efforcent
également de former des pompiers, Puiu Florea se montrant le plus assidu des élèves.
Société
Les NOUVELLES de ROUMANIE
Evénements
La Roumanie, cheval de Troie des OGM ?
De plus en plus d'agriculteurs occidentaux s'installent en Roumanie, occupant désormais une part non négligeable des
surfaces rurales exploitables du pays. Aidés financièrement par l'UE, ils apportent savoir-faire, modernisme et technologie, esprit d'entreprise et emplois à la clé, sur des terres laissées souvent en jachère… non sans provoquer un raidissement
parmi une population qui ne dispose pas de leurs moyens et les voit s'approprier leur territoire.
L
e phénomène s'est amplifié ces dernières années,
depuis l'entrée de la Roumanie dans l'UE. Quand
ces nouveaux paysans venus de l'Ouest, souvent
jeunes, ont choisi de venir mettre en application leur philosophie bio dans un pays qui recèle un immense potentiel dans ce
domaine… c'est tout bénéfice pour la Roumanie.
Mais d'autres, après être devenus détenteurs de centaines
ou milliers d'hectares, par le biais de baux emphytéotiques ou
de sociétés écrans, n'ont qu'en tête un accroissement exponentiel de leur production et ne reculent pas devant tous les
moyens, engrais chimiques en abondance, voire OGM. Dans
ce dernier domaine, la Roumanie est championne d'Europe,
avec l'appui tacite ou ouvertement déclaré de ses ministres de
l'Agriculture successifs.
Ni vu ni connu, le pays deviendrait un banc d'essai pour
les grosses multinationales de l'agro-alimentaire. L'île de
Braila, sur le Danube, est devenue ainsi l'objet d'interrogations. Culita Tarata, un milliardaire, autrefois sénateur PSD
(ex communistes), y a reçu, pour une poignée de lei, la concession de 60 000 ha, sur la terre la plus riche du pays, abondamment irriguée sans risque d'inondations. Considérée comme la
plus grande ferme d'Europe, elle était déjà le porte-drapeau de
l'agriculture roumaine sous le communisme.
Les grands noms de l'outillage agricole - Johnn Deere,
Mc Cormick, etc. - y procèdent aux essais de leur nouveau
matériel, ce qui est sans conséquence notoire sur l'environnement. Mais l'accès à l'endroit, rendu déjà difficile par son insularité, est totalement interdit aux personnes non autorisées.
Personne ne peut aller ainsi vérifier si on n'y procède pas à des
recherches sur les pesticides ou les OGM. La question n'est
pas fortuite.
Hécatombe de chevreuils dans le Sud-Ouest
Dans le sud-Ouest de la Roumanie, en janvier, on a assisté à l'hécatombe d'une centaine de chevreuils. Leur mort serait
due à l'emploi en surabondance de produits chimiques par des
agriculteurs occidentaux nouvellement installés.
L'utilisation de produits toxiques devient d'autant plus un
problème que, depuis un an, les investisseurs chinois envahissent le pays, dans tous les domaines de l'économie, y compris
l'agriculture, utilisant leurs propres produits, assurés par les
autorités qu'ils ne seraient pas dérangés par des contrôles
tatillons. Ce qui fait dire à certains : "Voici trois ans, la moitié
de nos terres étaient abandonnées… dans quinze ans, elles
seront toutes pourries".
Isaac Chiva (1925 - 2012) figure majeure de l'anthropologie
Figure majeure de l'anthropologie sociale de l'après-guerre, spécialiste du monde rural
européen, proche collaborateur de Claude Lévi-Strauss au Laboratoire d'anthropologie
sociale de 1960 à 1982, Isaac Chiva, d'origine roumaine, est décédé le 30 avril 2012. Rien
pourtant de par ses origines ne le prédestinait à occuper une telle position.
N
é en 1925 à Iasi, en
Roumanie dans une famille
juive de la petite bourgeoisie
commerçante, Isaac Chiva est obligé, dès
1935, avec l'avènement au pouvoir des
organisations nationalistes d'extrême
droite, fascistes et antisémites, d'interrompre le cours normal de ses études. La
situation de la communauté juive ne fit
qu'empirer avec l'entrée en guerre de la
Roumanie aux côté de l'Allemagne.
Les 28 et 30 juin 1941, Chiva, alors
âgé de 16 ans, vécut l'horreur d'une des
plus sauvages tueries de masse perpétrée
au début de la Deuxième Guerre mondiale. Il survécut par miracle, mais ce
pogrom qui vit le massacre des Juifs de sa
ville natale dont il fut le témoin terrorisé
et impuissant, le marquera au long de sa
vie avec une intensité telle qu'il ne pourra relater lui-même ses souvenirs par
écrit.
A la fin de la guerre, Isaac Chiva
décide de fuir la Roumanie alors que la
chape d'un autre régime totalitaire commence à s'abattre sur le pays. Il arrive en
France en 1948, à 23 ans, devient le plus
proche collaborateur de Claude LéviStrauss, puis son successeur.
Elu directeur d'études à l'EHESS
(Ecole des hautes études en sciences
sociales) en 1970, il anime un séminaire
dédié à "L'ethnologie des sociétés paysannes" qui devient le lieu de formation
de toute une génération de jeunes ethnologues de l'Europe. Avec Chiva, les
années 1980, constituèrent un des âges
d'or de l'ethnologie de la France.
L'illustration d'une conception
républicaine de la nation
La trajectoire de Chiva fut extraordinaire et exemplaire. Juif roumain, ayant
fui son pays d'origine il est devenu un des
meilleurs connaisseurs de l'ethnologie de
la France, de ses coutumes, de ses paysages, de ses usages, en bref de ce monde
rural européen dont l'accès lui était, dans
son propre pays, interdit.
Cette trajectoire illustre aussi ce que
devrait être une nation ouverte, une idée
qu'il défendait et incarnait. Au moment
où certains prônent le repli, l'exclusion, la
vie et l'œuvre de Chiva témoignent éloquemment de la pertinence d'une conception républicaine de la nation.
21
Les NOUVELLES de ROUMANIE
Société
Dossier expatriés
"Expat" temporaire
SUCEAVA
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TIMISOARA
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CRAIOVA
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TULCEA
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n
BUCAREST
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SLOBOZIA
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CONSTANTA
Entre nostalgie et rejet
de son pays natal
22
en Roumanie, deux millions dans le monde
ou émigré définitif ?
l
l
l
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l
TARGU
MURES
ALBA IULIA
Deux mille Français sont expatriés
Société
Les NOUVELLES de ROUMANIE
Julie, de Bangkok, parfaitement
bilingue en thaï, estime que "maîtriser la langue, c'est incontournable,
mais ça ne suffit pas pour s'intégrer: encore faut-il parler le même
'langage', notamment dans les pays
très différents du sien: se reconnaître dans les mêmes valeurs, avoir
grandi dans la même culture, avoir
partagé le même programme scolaire, tout cela compte aussi".
Entre nostalgie et rejet, que
garde-t-on de son pays d'origine
lorsque l'on est expatrié depuis
longtemps? Jean-Luc, en Espagne
depuis plus de 21 ans "5 ans
comme expatrié et 16 ans comme
immigré" a intégré de l'Espagne
"les horaires de déjeuner à partir de
14h qui permettent de faire plus de
choses durant la matinée, les tapas
qui permettent de se restaurer de
façon très pratique, une certaine
légèreté de la vie et de la fête, l'habitude de traiter d'abord avec des
personnes qui ont une fonction
dans une entreprise et non comme
en France avec des entreprises
représentées quasi anonymement
par des personnes, des mots espagnols francisés qui ponctuent
maintenant mon langage français…
Ce que j'ai gardé de la France c'est
avant tout la rigueur du français que
j'applique autant que faire se peut à
la langue de Cervantès plus riche et
descriptive, le goût pour la culture
francophone".
Zoltan, 20 ans de Maghreb, est
rentré en Hongrie: "Malgré mes
sympathies, je n'aurais jamais pu
être totalement intégré là-bas, et les
habitudes locales que j'ai adoptées
sont seulement culinaires..."
Comment se définissent les Français de l'étranger ? Difficile de qualifier d'un
seul mot une population somme toute très hétérogène. Expatrié, résident de longue
durée, voire émigré (ou immigré, c'est une question de point de vue), chacun aborde la problématique de l'intégration de façon différente. Environ 2000 Français
sont établis en Roumanie et une soixantaine en République de Moldavie.
P
lus de deux millions de Français résident à l'étranger. Ils ont quitté la France
pour du travail, un stage, un séjour de longue durée. On les appelle communément des expatriés. Dérivé du latin, ce mot signifie "hors de son pays natal".
La situation d'un expat est temporaire, il n'a pas quitté son pays pour de bon et compte
bien revenir vivre dans son pays d'origine un jour ou l'autre. L'immigration, elle, désigne
l'entrée d'une personne dans un pays étranger pour s'y installer.
Dan, du Laos, explique: "Je ne me suis jamais vraiment
considéré comme un "expat" car je n'ai jamais vécu au sein de
la communauté française. Si je suis parti si loin, ce n'est pas
pour vivre à la française, entourés de Français! Tous mes
amis, toutes mes relations de travail sont donc locales ou viennent d'autres pays. Je me suis donc toujours senti comme un
candidat à la résidence, un immigré essayant de s'intégrer le
plus possible dans cette nouvelle société".
Bruno, à Singapour depuis 12 ans, "évite les soirées mondaines "expat" si possible car je n'ai aucun point en commun
avec les Français de "passage" pour un an ou 2 qui continuent
à rester avec la mentalité française".
“Je n’ai aucun point en commun avec les
Français de passage pour un an ou deux”
Le 14 juillet à l'ambassade de France de Bucarest est un rendez-vous
incontournable pour nombre de Français établis en Roumanie.
Dans les faits, le mot expatrié confond souvent le salarié détaché par son employeur
à l'étranger, qui bénéficie d'assurances santé et retraites, de primes d'installation et de
scolarisation pour les enfants, avec celui qui organise lui-même son départ et son retour.
Une erreur, selon Jean-Luc, qui vit en Espagne, pour qui "l'expatriation est un terme qui
désigne exclusivement les personnes et leur familles qui sont envoyées par une entreprise française ou un organisme passer quelques années à l'étranger avec la sécurité de
retrouver son emploi de retour en France. L'immigré, lui, travaille à l'étranger avec un
contrat local sans autre sécurité que celle de son pays d'accueil, sans sécu française,
sans cotisations aux caisses françaises de retraites…etc. Mais c'est comme ça que va la
France: quand un Maghrébin vient travailler en France c'est forcément un immigré mais
les Français dans la même situation à l'étranger sont des expats…c'est plus chic !"
Pour Karen, en Chine depuis 9 ans: "Je me sens plus immigrée qu'expat puisque je
suis venue par mes propres moyens. Je n'ai pas été envoyée en mission par une entreprise. Je pense que c'est ça qui fait la différence." Emmanuel se considère comme un immigré: "je ne retournerai pas en France, et je fais tout pour rester dans le pays ou je me
suis installé, le Japon".
Expats dans leur bulle ou Français voulant s'intégrer ?
Les expatriés "nantis" n'échappent pas aux stéréotypes. Ils conserveraient malgré
eux, un regard de touristes paisibles et bon enfant sur leur nouveau pays, et évolueraient
presqu'exclusivement au sein de la communauté française, au contraire des Français de
l'étranger dans une situation plus précaire, devant fournir beaucoup plus d'efforts pour
s'intégrer. Ces deux populations aux préoccupations bien différentes coexistent sans toujours se rencontrer.
Idem pour Xavier, qui s'est installé à New York sans billet
retour pour la France. Il témoigne dans French morning sur
les difficultés rencontrées lors de l'installation d'une famille
expatriée sur son palier: "Je ne supporte pas la communauté
française et tous les expats qui vont avec ! En faisant les
efforts nécessaires pour m'immerger dans la société américaine, je suis devenu l'exemple type du parfait immigré. Mais
depuis que mes nouveaux voisins de palier se sont installés,
mes doutes sur mon identité et ce que je suis venu réaliser ici
ressurgissent. Ce couple d'expats français est si français que
j'ai l'impression de n'être jamais parti ! (…) Les expats, j'ai
parfois envie de les étrangler et en même temps j'ai de l'affection pour eux car, malgré nos différences, on se ressemble.
S'intégrer demande en effet beaucoup d'efforts, mais la
situation est différente selon les pays. Sophie, fréquente très
peu de Français à Milan, "et depuis quelques années seulement. Généralement je ne souffre pas du manque de contacts
français, les Italiens étant très sociables et accueillants. Mon
expérience à Prague était très différente, à l'époque on ne
trouvait quasiment pas de nourriture française, ou à prix d'or.
Les journaux français arrivaient avec des semaines de retard,
internet n'en était qu'a ses balbutiements, j'étais donc plus isolée. Je fréquentais davantage de Français, expatriés ou non".
Pour s'intégrer, il faut être deux
Dans l'intégration, il y a aussi la place que les habitants
veulent bien faire aux étrangers. Karen parle couramment le
chinois, "mais comme tous les étrangers installés ici, je ne suis
pas intégrée et ne le serai jamais. Ici, l'immigration est faible
et concerne surtout les citoyens des pays limitrophes. Je serai
toujours considérée par les locaux comme une laowai, une
'long nez'. Même si on adopte dans une certaine mesure bien
sûr certaines de leurs habitudes, on ne peut passer inaperçu.
Pour le moment, les personnes de race blanche sont plutôt
bien accueillies par la population locale, surtout dans les
grandes villes, mais cela ne durera pas". Et les efforts de Dan
pour s'intégrer sont souvent vains: "Pour la plupart des
locaux, le constat est simple: blanc = touriste".
Au bout de 5 ans, Claire n'a pas non plus l'impression d'être totalement intégrée au Chili : "il m'est difficile de me faire
des amis chiliens. En effet, en parlant avec d'autres étrangers,
nous arrivons tous à la même conclusion: les Chiliens sont
chaleureux, mais pas ouverts. Ils n'acceptent pas la différence
et croient que les immigrés devraient parler l'espagnol chilien
et comprendre tout, tout de suite. Ils nous disent "tu ne peux
pas comprendre parce que tu es Française". Du coup, je me
sens isolée dans un monde entre Chili et France. Pour ce qui
est des coutumes locales, j'ai aussi tenté d'apprendre... En
vain pour l'instant, mais j'ai de la bonne volonté. Au Chili par
exemple, il n'est pas rare que les invités arrivent avec 1 heure
de retard, qu'ils ne vous appellent pas pour prendre de vos
nouvelles, c'est très frustrant. (…) En fait, je me dis souvent
que mon immigration au Chili n'aurait pas été possible sans
mon fiancé, chilien, mais tellement Européen: lève-tôt, sportif,
et assez ponctuel ! C'est un pont entre le Chili et la France !".
"Les expats vivent avec beaucoup
de privilèges mais peu ou pas de droits"
Sur la couverture du livre de Frédéric Amat, La drôle de
vie des expatriés au Cambodge, John Burdett, célèbre auteur
de polars expatrié en Thaïlande, estime que "les expats vivent
avec beaucoup de privilèges mais peu ou pas de droits".
Frédéric Amat renchérit: "On a beau parler la langue, être
marié avec une personne du pays depuis des années, le seul
droit que nous avons est celui d'avoir nos papiers en règle. En
Thaïlande, il n'est pas possible d'ouvrir un business ou d'acheter un terrain en son nom. Il ne faut jamais oublier que nous
ne sommes ici que des immigrés même si le mot est moins exotique qu'expatrié. Le problème est que dans certains pays, l'expatrié a l'impression de jouir d'une grande liberté, d'être un
peu perpétuellement en vacances, de vivre dans un bouillonnement croissant où tout est possible, surtout au regard d'une
vie en Europe de plus en plus momifiée".
Autant de raisons poussent
au départ... ou à rester sur place
Il y a énormément de raisons différentes qui peuvent pousser au départ, et sûrement autant qui poussent à rester sur
place. Alors combien sont-ils, ces Français de l'étranger, toujours plus nombreux, à se transformer en véritables immigrants? Et quel est leur véritable degré d'intégration? Après
tout, le sentiment d'intégration varie surement en fonction des
uns et des autres. Expatrié, résident ou immigré, on peut se
sentir accepté tout en gardant sa différence. Pour Julie, "on
peut se sentir chez soi à l'étranger, avec un gros plus (une
vision enrichie des choses du fait d'avoir grandi ailleurs) et un
gros moins (ne pas tout comprendre parce que justement on a
grandi ailleurs)". L'important, c'est d'y être heureux.
MPP (www.lepetitjournal.com)
23
Société
Les NOUVELLES de ROUMANIE
Dossier expatriés
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ORADEA
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CLUJ
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SF. GHEORGHE
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TULCEA
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BUCAREST
GIURGIU
CONSTANTA
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Abandonné par les
autorités roumaines
24
Une leçon italienne
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BOTOSANI
TARGU
MURES
26 millions d'Italiens ont quitté
L'émigration italienne fut, des années 1870 aux années 1950, un phénomène de
masse qui toucha 26 millions de personnes, de toutes les catégories sociales. Elle
n'a pas empêché le développement d'un sentiment national qui dépasse les frontières. Même si l'époque a changé, avec l'Union Européenne, Internet, les facilités de
déplacement, la réussite de la "leçon italienne", telle que la rapporte Caroline
Douki dans la revue "L'Histoire" est à méditer avec profit par la Roumanie, autre
terre de grande émigration, si elle veut conserver des liens privilégiés avec sa
diaspora.
D
ans le Sud de l'Italie, l'émigration a bien constitué un exutoire pour les plus
pauvres, pour les paysans contraints à l'exil par la misère. Mais elle a touché également des régions et des strates de la société italienne qui, loin d'être arriérées, vivaient au contraire une modernisation économique. Deux dynamiques
différentes ont agi ici. Dans les campagnes du Nord, la modernisation capitaliste de l'économie agraire et l'extension des rapports salariaux a entraîné un phénomène classique
d'expropriation des paysans: la prolétarisation les a incités à partir pour l'étranger. Mais
ce ne sont pas uniquement les plus pauvres qui ont émigré, dans les campagnes et les
bourgades du Nord et du Centre. Ce sont aussi des paysans propriétaires qui recherchaient des revenus supplémentaires, des artisans ou des commerçants qui entendaient
se constituer à l'étranger une épargne leur permettant de consolider leur position, de
retour au village.
Dans pareils cas, l'émigration est moins une contrainte qu'un choix, visant à tirer
parti des possibilités qu'offre un marché du travail qui s'internationalise. Cela signifie
que le développement de l'émigration de masse peut aussi être interprété comme une
forme d'adaptation active aux conditions et aux contraintes nouvelles du monde environnant.
Quatre ans après le cas Crulic,
citoyen roumain mort dans une prison polonaise après une grève de la
faim en signe de protestation contre
son incarcération, un nouveau décès
soulève des interrogations sur la
diplomatie roumaine.
Lundi 14 mai, sur son lit d'hôpital
de la prison de Lecce, en Italie,
Virgil Cristian Pop est mort sans
pouvoir s'expliquer devant la justice.
Ce Roumain de 38 ans, en prison
depuis une année pour vol, a toujours clamé son innocence. Une cinquantaine de jours auparavant, il
avait entamé une grève de la faim
dans le but de faire pression sur la
L'Etat italien n'a pas ignoré ses émigrés
justice italienne et de s'entretenir avec un magistrat.
En dépit de l'importance des liens
"Il refusait catégoriqueconservés par les émigrants avec l'Italie,
ment de toucher à tout
une ample littérature, romanesque ou
type de nourriture, il voulait
polémique, a dès la fin du XIXe siècle
parler à un magistrat. Il
composé le tableau de foules d'émigrés
répétait toujours: "Le
abandonnés face à l'adversité et aux
magistrat doit m'écouter.
dangers de l'exil. D'inspiration tantôt
Lui pourra me faire libéhumaniste, tantôt nationaliste, ces écrits
rer"", a déclaré le médecin
soulignaient le désarroi incontestable de
du pénitencier de Lecce.
nombreux migrants aux prises avec les
Cette demande n'a jamais
difficultés matérielles du voyage transété écoutée. Espérant se
Depuis 2008, il existe une Ligue des Etudiants Roumains atlantique, ou avec diverses formes
à l'Etranger qui se propose de maintenir les liens entre ceux qui d'exploitation économique et de rejet
faire mieux entendre,
sont partis et conserver un attachement avec le pays natal.
Virgil Cristian Pop a arraxénophobe à l'étranger.
ché la perfusion qui le nourrissait.
Une partie de l'historiographie a souscrit à ce sombre tableau, incriminant l'inaction
Ce geste n'a fait qu'accélérer sa fin.
de l'État et en a proposé diverses explications: État coupé des masses et se désintéresLes médecins n'ont rien pu faire.
sant d'emblée de cette partie pauvre de la population; État cynique, utilisant l'émigra"Dans notre pénitencier, nous avons
tion comme une soupape de sécurité et un mal nécessaire; État inefficace, enfin. Au
de nombreux cas identiques, a inditotal, les émigrants ainsi abandonnés, n'auraient eu comme perspective que de glisser
qué cyniquement et sans préciser
alors dans un processus inéluctable de "dénationalisation" italienne.
leur nationalité, le directeur du péniLà encore, il faut se départir des représentations erronées. Non seulement les émitencier de Lecce, Giuseppe Renna.
grants italiens n'ont pas été abandonnés par l'État, mais, en dépit de l'éloignement, c'est
Actuellement, une quarantaine de
par l'expérience même de la mobilité qu'ils ont souvent connu un processus d'accultudétenus se trouvent en grève de la
ration nationale italienne, plus tangible et plus rapide que pour les populations rurales
faim".
(suite page 26)
restées dans la péninsule.
Société
Les NOUVELLES de ROUMANIE
leur sol natal en 80 ans, mais leur Etat ne les a jamais délaissés
à méditer par la Roumanie d'aujourd'hui
En effet, l'État italien a multiplié les efforts pour associer
les émigrants à la construction de leur nation, toute jeune
encore puisque fondée en 1861. Dès le début, il s'est appliqué
à défendre les intérêts, de ses ressortissants à l'étranger.
Lorsqu'ils reçoivent l'aide légale ou même matérielle des
consulats de leur pays d'origine, les émigrants expérimentent
leur appartenance à une communauté italienne plus
large que leur cercle local d'origine. La répétition des
contacts avec l'administration et les autorités consulaires, qu'a imposé la mobilité, a donc contribué à
familiariser les émigrants avec les institutions de leur
pays d'origine. Et davantage encore quand celui-ci
met en œuvre, à partir de 1901, une véritable politique d'encadrement de l'émigration: par-delà la classique protection diplomatique se met en place un
véritable dispositif de protection sociale et juridique
des émigrants, depuis leur départ jusqu'à leur installation à l'étranger.
Les jours de fêtes sont souvent l'occasion de déployer des
discours d'exaltation de la grandeur historique et mythique de
la culture italienne. On s'efforce aussi de diffuser ou d'entretenir la pratique de la langue italienne parmi les émigrés avec le
réseau des comités Dante Alighieri, et celui des écoles italiennes à l'étranger.
Créer ou consolider
un sentiment d'appartenance
L'institution de services administratifs dédiés
(inspecteurs d'émigration, médecins à bord des
paquebots transatlantiques) et d'un système d'aide
juridique spécifique (en cas de conflit avec des
transporteurs maritimes ou avec des employeurs
étrangers) peut donner un contenu concret, et une
signification positive aux yeux des émigrants, aux notions de
lien juridique national, de souveraineté, de contrôle mais aussi
de protection de ses ressortissants par l'État d'origine.
Dans le registre culturel, à l'effort de pédagogie nationale
déployé par l'État libéral à l'intérieur de la péninsule, correspond un effort identique en direction des émigrés. En fait,
sous couvert de lutter contre la "dénationalisation" des émigrés, il s'agit bel et bien d'inculquer une identité collective, de
créer ou de consolider un sentiment d'appartenance, de forger
par-delà les frontières une "italianité", véritable "communauté
imaginée", où se mêlent langue italienne, religion catholique,
références historiques et pratiques culturelles (comme la
sociabilité de la place publique).
N'oubliez pas que
vous êtes Italiens (Roumains)!
Les méthodes et les outils de cette politique d'acculturation nationale appliquée aux émigrés sont désormais bien
connus: au sein de structures d'assistance et d'associations
récréatives à base nationale, et non plus locales, en étroite relation avec les consulats, on multiplie les occasions de rencontres (réunions, banquets, conférences, spectacles), on fait écho
aux grands événements de la vie nationale italienne, on cherche à impliquer les émigrés dans la célébration des grandes
fêtes nationales ou les anniversaires de la famille royale.
25
La présence d'une communauté italienne
à New York remonte à plus de quatre siècles.
S'ils restent inégaux selon les pays de résidence, les résultats de cette pédagogie nationale ne sont pas négligeables. Une
familiarisation aux rituels et aux célébrations patriotiques, un
apprentissage progressif des éléments d'une culture nationale
se sont opérés peu à peu.
Il faut aussi prendre en compte les effets des épreuves
elles-mêmes: sous le regard de l'autre, des Français, des
Américains, qui durant toute la période ont stigmatisé et rejeté les émigrés italiens, ces derniers ont pu, en retour, s'ouvrir à
la propagande de leur pays d'origine et se réfugier dans une
identité nationale italienne, afin de retrouver un peu de fierté
et un semblant de sécurité.
La mobilité a ainsi été pour les émigrants une occasion de
transformer une culture d'origine le plus souvent rurale, encore fréquemment localiste, en une culture faisant plus de place
aux grandes instances et aux grands cadres politiques, comme
l'État ou la nation, qu'ils ont appris à connaître et dont ils ont
pu intérioriser les valeurs et les contraintes, à force de passer
les frontières, et de se confronter à des législations et des autorités différentes.
En fin de compte, aux Italiens qui ont quitté leur pays, l'émigration a fait traverser une double expérience apparemment
contradictoire: celle de la mobilité internationale en même
temps que celle de la nationalisation des consciences.
Caroline Douki, Maitre de conférences à Paris VII
(L'Histoire)
Les NOUVELLES de ROUMANIE
Société
Le docteur Stroiu a quitté
sans regrets la Roumanie
Santé
l
l
SATU
MARE
ORADEA
ARAD
SUCEAVA
TARGU
MURES
"Rien que pour la qualité de vie
j'aurais accepté de venir ici"
l
IASI
l
BACAU
l
l
l
FOCSANI
l
l
TIMISOARA
l
GALATI
HUNEDOARA
BRAILA
BUZAU
CRAIOVA
l
BUCAREST
GIURGIU
l
TULCEA
l
l
n
l
l
l
SLOBOZIA
l
CALARASI
(suite de la page 24)
Pas d'ambassadeur
depuis six mois
26
"Il n'avait pas d'antécédent pénal.
Sa situation aurait dû être surveillée
par notre ambassade, estime Eugen
Teteleac, président de l'Association
des Roumains d'Italie, cité par la
presse locale. Mais une institution
sans chef ne peut pas fonctionner".
Car la Roumanie ne dispose plus
d'ambassadeur en Italie depuis
décembre dernier. La "mission diplomatique" roumaine en Italie affirme,
par le biais du ministère des Affaires
étrangères, ne pas avoir été informée par les autorités italiennes du
cas Pop et leur demande aujourd'hui
des informations supplémentaires
sur cette affaire.
Virgil Pop n'est malheureusement
pas le premier Roumain à mourir
dans une prison de l'étranger en clamant son innocence. Son cas ressemble à s'y méprendre à celui de
Daniel Crulic qui est décédé dans
les mêmes circonstances dans une
prison polonaise, il y a quatre ans.
Lui aussi avait été arrêté pour vol, et
lui aussi clamait son innocence et
avait entamé une grève de la faim. A
l'époque, cet événement avait poussé le ministre roumain des Affaires
étrangères à démissionner.
Autre épreuve pour la famille de
Virgil Cristian Pop: elle n'a pas les
moyens de faire rapatrier son corps
et fait des efforts désespérés auprès
de la communauté roumaine en Italie
pour qu'elle lui apporte son aide.
L'Etat roumain a fait savoir qu'il ne
pouvait rien faire car il n'y avait pas
de cadre législatif existant pour ce
genre de situation.
Jonas Mercier
(www.lepetitjournal.com/Bucarest)
R
azvan Stroiu a quitté la Roumanie pour un village de Haute-Loire, Rosières,
et ne regrette rien car depuis il mène une vie moins stressante. Aucun médecin français n'avait voulu s'y installer. C'est un village de 1400 âmes de
Haute-Loire où un nouveau médecin généraliste a ouvert son cabinet il y a maintenant
un an et demi. Au vu de la démographie médicale de la région, cette
installation est exceptionnelle. Ce qui
l'est moins, c'est l'identité du nouvel
arrivant à Rosières: Razvan Stroiu
vient de Roumanie, un pays devenu
grand pourvoyeur de médecins pour
les campagnes françaises. Quelque
5000 praticiens roumains se sont
expatriés, dont le quart en France.
Razvan Stroiu exerçait déjà en
zone rurale dans son pays, avant d'être contacté par un cabinet de recrutement et la mairie de Rosières: "Je pense bien qu'ils
ont d'abord essayé de faire venir des médecins français, avance-t-il. Mais ceux-ci ne
veulent pas s'installer dans des petits villages et, souvent, ils ne veulent pas être en libéral. Ils préfèrent être salariés. Forcément, ici, ça n'est pas possible".
A Rosières, le docteur Stroiu a rejoint une maison de santé pluridisciplinaire regroupant un dentiste, plusieurs infirmières, une psychologue et un autre généraliste. Très
prisé par les politiques, qui veulent y voir une réponse à l'inégalité de l'accès aux soins,
ce type de structure présente l'avantage de mutualiser une offre médicale et de maintenir un service dans des déserts médicaux. A écouter Razvan Stroiu, la vie qu'il mène en
France est moins stressante qu'en Roumanie. Là-bas, il jonglait entre deux cabinets, et
faisait presque 200 kilomètres par jour. Il devait aussi assurer dix à quinze gardes par
mois, contre seulement cinq en France. "Je ne sais pas si vous allez me croire, mais avec
le même salaire, rien que pour la qualité de vie, j'aurais accepté de venir ici", assure-til. La municipalité lui a avancé plusieurs mois de loyer, et l'a aidé dans certaines démarches. L'autre généraliste de la commune a aussi joué le jeu, et dirigé vers lui certains de
ses patients.
Visiblement, la greffe a bien pris. Le docteur Stroiu reçoit aujourd'hui près de quinze visites par jour, contre à peine cinq ou six le premier mois. "Je pense que pas mal de
patients ont fait une visite test, pour voir comment il est, ce médecin qui vient de l'étranger", s'en amuse-t-il.
Lulica poupée peu commune
L
a particularité de Lulica est d'être rom, et cette poupée a été conçue pour combattre les discriminations
dont sont l'objet les Roms en Roumanie. Le concept
a été lancé le 8 mai dernier, lors de la journée internationale
des Roms, et depuis, le stock des 500 poupées Lulica est épuisé. Aux yeux de son concepteur, Florin Cioaba, le roi des Roms, "cette poupée, avec
laquelle les enfants vont jouer, permettra à terme de casser le mur des discriminations
et des préjugés négatifs à l'encontre de notre communauté". Lulica a les traits et le costume d'une Rom, et est inspirée de la grand-mère de son concepteur. Elle est vendue dans
le premier magasin rom de Roumanie à Sibiu, qui propose aussi des produits spécifiques
à cette minorité. La poupée coûte entre 80 et 150 lei (20 et 40 €), en fonction de son
habillement, qui est confectionné manuellement dans ce magasin servant également d'atelier. Barculica, le partenaire de Lulica, est attendu pour cet automne.
Société
Les NOUVELLES de ROUMANIE
Une scolarisation inadaptée au mode vie des Tsiganes
Minorités
L'échec de l'ascenseur social de la République
Chacun en est persuadé, l'intégration des communautés tsiganes passe par la scolarisation. Mais, c'est plus facile à dire
qu'à faire. Dans un document* dont suivent ci-dessous des extraits, l'Institut de Coopération avec l'Europe Orientale
(ICEO) de Montpellier fait le point sur la question.
O
n sait depuis longtemps que les peuples et les cultures nomades cohabitent difficilement avec les
cultures sédentaires. Les éleveurs et les agriculteurs ne développent leurs activités parallèles de façon non
conflictuelle que lorsque l'espace disponible leur permet d'éviter la concurrence. On sait depuis La Fontaine que les cigales
et les fourmis ont une philosophie de la vie différente.
A partir des années 80, dans plusieurs grandes villes, les
populations roms en voie de sédentarisation, qui vivaient dans
des campements insalubres, furent relogées. A Montpellier par
exemple, ceux qui vivaient dans des caravanes, dans une cité
à l'extérieur de la ville, purent notamment emménager dans les
coquettes maisons d'un lotissement spécialement aménagé
pour eux. Grâce aux APL (Aides personnalisées au logement)
les locataires furent logés gratuitement. Certains bénéficièrent
même temporairement d'une aide financière supérieure au
loyer demandé.
Cette opération fut l'occasion d'une prise de conscience
par les élus et les services sociaux de la ville de l'extrême complexité de l'exercice. Elle nécessita une longue préparation et
une très longue concertation avec les familles concernées. Il
fallut, au cas par cas, essayer de répondre à deux exigences
contradictoires ; éviter le regroupement de tous les relogés au
risque de former des ghettos et éviter l'impensable (pour les
relogés) éclatement des familles.
Des projets éducatifs pourtant généreux
La plupart des grandes villes qui ont mis en œuvre des
programmes de relogement identiques ont pu rapidement faire
le même constat, malgré d'infinies précautions prises, les relogements donnèrent lieu à l'apparition de
quartiers homogènes. La mixité sociale
et culturelle souhaitée n'ayant pu perdurer les écoles des quartiers correspondants devinrent rapidement des écoles
aux projets éducatifs de moins en moins
ambitieux, désertées de ce fait par les
élèves qui venaient traditionnellement.
Après plus de vingt ans d'expérience, la conclusion s'impose: bien que
sédentarisées dans des conditions matérielles favorables, les populations de culture générique rom ont
les plus grandes difficultés à faire monter leurs enfants dans
l'ascenseur social que la République essaye de mettre à leur
disposition, à travers les projets éducatifs les plus généreux
possibles.
De multiples études tentent de rechercher les raisons de ce
qu'il faut bien appeler un échec. Dans les très nombreux travaux sociologiques publiés sur les Roms, on retrouve l'impor-
tance de la scolarisation ou plus exactement de leur non scolarisation. Quels que soient les pays étudiés, l'école des Gadjé
est mal adaptée aux Roms, bien sûr quand ils sont nomades
mais aussi quand ils sont sédentarisés.
Dans l'école actuelle, les relations d'autorité maître élèves
et les modes d'apprentissages sont antinomiques avec la culture et les valeurs roms. En Europe, l'école traditionnelle s'adresse aux élèves comme à des individus. Elle les invite à un
apprentissage et à un travail personnel, le seul ayant une valeur
à ses yeux. Pour la majorité des Roms le travail et l'apprentissage sont des tâches collectives que l'on effectue à son rythme
et dans la longue durée.
La résignation a peu à peu gagné
les enseignants les mieux intentionnés
Cette méthode, parfaitement inadaptée aux systèmes scolaires imposés par les Gadjé, a permis à des générations de
Roms de devenir des virtuoses de la musique. Certes, leur virtuosité est individuelle, mais leur apprentissage a été essentiellement collectif. Les musiciens tsiganes jouent le plus souvent
dans des groupes formés dès leur plus tendre enfance. Sans
connaître le solfège, ils sont capables de rejouer la totalité du
répertoire qu'ils ont acquis en répétant ensemble.
En raison de la complexité et de la persistance des problèmes liés à la scolarisation des Roms, la résignation a peu à peu
gagné le monde de l'éducation, même parmi les enseignants
les mieux intentionnés. Jusqu'à maintenant, que ce soit dans
les pays de l'UE en général ou en France en particulier, les
résultats des politiques mises en œuvre ne poussent pas à l'optimiste. Qu'ils soient nomades ou sédentarisés, les Roms souffrent globalement d'une sous scolarisation. Celle-ci pénalise gravement leur
insertion professionnelle, même dans
leur pays d'origine. Quand ils vivent
dans un pays dont ils ne connaissent ni
la langue ni les principaux codes culturels, leur insertion est encore plus problématique. C'est donc dans les pays
d'origine que l'indispensable scolarisation devrait s'effectuer prioritairement.
Malheureusement dans les pays dont
sont originaires massivement les Roms la priorité n'est pas à
l'amélioration de leurs conditions de vie.
*Cette étude a été réalisée par Pierre Chevallet (ICEO
Montpellier), Nevana Dobreva (correspondante d'ICEO à Sofia),
Michel Labonne (ICEO Montpellier), Ionut Popescu (correspondant
d'ICEO à Bucarest). Elle a été présentée à Sofia par Pierre Chevallet
en octobre 2010 au colloque du New Policy Forum "Europe looks
East", présidé par Mikhaïl Gorbatchev.
27
Société
Les NOUVELLES de ROUMANIE
25 000 Espagnols
au National Arena
Sports
SUCEAVA
l
l
BAIA
MARE
ORADEA
CAMPULUNG
BISTRITA
TARGU
MURES
ARAD
BRASOV
l
TIMISOARA
S
l
l
l
l
l
l
FOCSANI
l
l
SIBIU
GALATI
PITESTI
l
l
BUZAU
l
CRAIOVA
l
n
BUCAREST
CONSTANTA
l
Cluj encore champion
28
Deux ans après son dernier titre, le
CFR Cluj, club des cheminots a remporté sur le fil le titre de champion de
Roumanie de Ligue 1 et disputera
directement la Ligue des Champions.
Le classement :
1. CFR Cluj 71 pts (Ligue des
Champions)
2. FC Vaslui 70 pts (qualification
Ligue des Champions)
3. Steaua Bucarest 66 pts (Coupe
UEFA)
4. Rapid Bucarest 64 pts (Coupe
UEFA)
5. Dinamo Bucarest 62 pts (UEFA)
6. Otelul Galati 52 pts
7. Universitate Cluj 47 pts
8. Panduri Târgu Jiu 47 pts
9. FC Brasov 45 pts
10. Concordia Chiagna 45 pts
11. Ceahlaul Piatra Neamt 42 pts
12. Astra Ploiesti 41 pts
13. Gaz Metan Medias 41 pts
14. Petrolul Ploiesti 39 pts
15. Târgu Mures 35 pts (relégué en
Ligue 2)
16. Sibiu 32 pts (relégué en Ligue 2)
17. Sportul Studentesc Bucarest 30 pts
(relégué en Ligue 2)
18. CS Mioveni-Pitesti 12 pts (relégué
en Ligue 2)
Finale de la coupe de Roumanie
Dinamo Bucarest 1 (Coupe UEFA) Rapid Bucarest (0)
Ligue 2
Groupe A :
1. Viitorul Constantsa 61 pts (promu en
Ligue 1)
2. CSM Iasi 61 pts (promu en Ligue 1)
Groupe B :
1. Poli Timisoara 65 pts (promu en
Ligue 1)
2. Gloria Bistritsa 65 pts (promu en
Ligue 1)
elon la Fédération du patronat du tourisme roumain (FPTR), la finale de
la coupe de l'UEFA - disputée le mardi 8 mai au stade National Arena de
Bucarest et gagnée 3 à 0 par l'Atletico de Madrid contre l'Athletic Bilbao
- a généré des revenus dans le secteur touristique d'à peu près 10 millions d'euros.
Les hôtels de la capitale (capacité d'accueil, environ 22 000 places) étaient pleins à
95%. Au total, plus de 10 000 touristes espagnols ont séjourné dans les hôtels de
Bucarest, et 10 000 Roumains de province sont venus à Bucarest pour l'événement.
Ces supporters y ont séjourné pour une durée moyenne de 2,5 nuits, dépensant 3
millions d'euros dans le logement. 15 000 autres Espagnols ont rejoint Bucarest pour
une période de moins de 24 heures. Chacun de ces touristes a dépensé en moyenne
150 euros par jour - hors nuit d'hôtel - générant des revenus de 6 millions d'euros.
52 347 spectateurs ont assisté à cette finale qui s'est déroulée au National Arena.
Ils auraient même pu être davantage, mais plusieurs dizaines d'entre eux se sont arrêtés à Budapest, confondant les deux villes !
Un derby très chaud
L
e derby de Cluj entre
l'Universitatea et le CFR
(club des cheminots) a été
suspendu après la 27e minute de jeu, le 6
mai dernier. Alors que Cadu, joueur du
CFR, chambrait les supporteurs de
l'Universitatea pour fêter le but qu'il
venait d'inscrire sur pénalty (litigieux,
selon les sources rapportant l'affaire),
Mircea Bornescu, le gardien adverse,
énervé, a sauté par-dessus les panneaux
publicitaires, partant à sa poursuite, le
frappant violemment et le faisant rouler
à terre. C'est que le gardien n'aime pas
qu'on prenne ses supporteurs pour des
billes ! L'ambiance est logiquement
devenue délétère sur le terrain, et la rencontre a été suspendue.
Mais ce n'était pas tout. Dans le tunnel ramenant les deux équipes à leurs
vestiaires, la masseuse d'Universitatea ,
entrée dans une colère noire, s'en est
également pris à Cadu l'insolent, lui
envoyant un coup de pied dans des parties jugées généralement par les observateurs comme étant délicates…
Les gymnastes roumaines font le plein
de médailles européennes
C
ela faisait quatre ans que les gymnastes roumaines n'avaient pas remporté de titre européen par équipe. Mais, à Bruxelles, à la mimai, tout comme en 2008 à Clermont-Ferrand, elles ont
dominé la Russie, leur principal adversaire. Catalina
Ponor, Sandra Izbasa et Larisa Iordache ont ramené aussi
trois autres médailles d'or. Au total, les filles entrainées
par le couple mythique Mariana Bitang et Octavian Belu, qui les préparent également pour les Jeux Olympiques de Londres de cet été, ont raflé 6 médailles.
Coup (de poing) dur pour Lucian Bute
L
a roue a tourné pour le Roumain-Canadien Lucian Bute, 32 ans, champion du monde des super-moyens (version IBF), dont le palmarès ne comportait jusqu'ici aucune défaite et 30 victoires, dont 24 par ko: le boxeur
originaire de Galati, a perdu sa couronne à Londres face au Britannique Carl Froch,
34 ans, qui a ainsi conquis son troisième titre. Toujours dominé par son adversaire,
acculé dans les cordes, Bute - humiliation suprême - a été mis ko technique au 5ème
round. Bien qu'il ait droit à un match revanche, il n'a pas indiqué pour l'instant quelle suite il entendait donner à sa carrière.
Société
Les NOUVELLES de ROUMANIE
Insolite
C
Les Roumains ont la plus grande
espérance de vie… après la mort
ommentant une statistique de Bruxelles qui plaçait
l'espérance de vie des Roumains au dernier rang de
l'UE, avec 74 ans, le Patriarche Daniel a exhorté
les fidèles roumains à ne pas s'en offusquer… leur assurant que
leur espérance de vie après la mort étant beaucoup plus longue,
notamment pour les femmes, confinant à l'éternité, car ils
étaient les plus croyants du continent. Le chef de l'Eglise
orthodoxe roumaine a aussi rappelé que, dans certains pays
dont le niveau de la foi était proche de zéro, l'espérance de vie
après la mort était également nulle.
Daniel s'est également félicité que les statistiques de l'UE
montrant le degré de religiosité des Roumains indiquent qu'ils
sont non seulement assurés d'une vie au-delà du trépas mais
que celle-ci sera aussi de grande qualité car ils iront droit au
paradis pourvu qu'ils se confessent au moins à Noël et Pâques
et qu'ils se fassent pardonner leurs péchés avant de mourir,
concluant "même les statistiques de Bruxelles sont capables
d'annoncer des miracles".
Moyens coupés
G
abriel Serban n'en peut plus. Le maire de
Campulung Moldovenesc (Jud Suceava) est
harcelé par une de ses administrées qui le
rend responsable de la disparition de ses cinq pots de
fleurs et d'une balance voici quatre ans, entreposés dans
un immeuble en cours de rénovation. La retraitée mène
depuis une campagne sans relâche contre l'élu, utilisant
les médias locaux, se répandant en accusations dans les
commerces, etc. "Je n'en dors plus" se plaint le maire qui
a entamé une action en justice demandant 100 000 euros
de dommages et intérêts pour atteinte à son image
publique… et à l'équilibre de sa vie familiale. Gabriel
Serban confie qu'il est tellement épuisé qu'il ne peut plus
remplir son "devoir conjugal" et tente en vain depuis
quatre ans de faire un enfant à sa femme, le premier du
couple. Le maire affirme d'ailleurs que s'il gagne son procès, l'argent ira intégralement à un orphelinat.
Nue à vélo… mais verbalisée
pour non-port de casque
D
ébut mai, un couple se baladait à moto dans la
campagne roumaine avec un détail faisant
toute la différence: la passagère était entièrement nue. Bien évidemment, lorsque ce couple motard a
croisé la police, il s'est tout de suite fait arrêté. Mais le
plus surprenant, c'est l'amende dont la jeune femme a
écopé. Elle n'a pas pris une contravention pour atteinte à
la pudeur ou exhibitionnisme, mais pour non port du
casque... tout simplement parce qu'il n'y aucune article du
code de la route qui prohibe cette conduite. Les motards
peuvent donc rouler sans rien tant qu'ils portent un casque.
Par contre, attention aux gravillons en cas de chute.
A
29
Pas de privilège de l'âge
M
ariana Pisu, 50 ans, de Brasov, est considérée comme la
plus vieille prostituée en exercice de Roumanie, mais
le privilège de l'âge n'a pas pour autant attendri les
autorités locales qui lui réclament 35 000 € d'arriérés de contraventions non payées pour racolage sur la voie publique, au cours de ces
vingt dernières années. Elle a en outre été condamnée à 120 heures de
travaux d'intérêt général qu'elle devra employer à planter des fleurs
sur les espaces publics de la ville. La contrevenante profite cependant
de l'exécution de sa peine au vu et au su de tout le monde pour continuer son métier. En 2011, elle avait été verbalisée à 90 reprises.
Mariana, qui est mariée et a un fils a cependant des principes bien
ancrés: elle ne travaille pas le jour du Seigneur, lors des fêtes religieuses ou quant il pleut, n'accepte que 2 ou 3 clients par jour, et n'exerce qu'entre 9 et 17 h, rentrant ensuite chez elle pour s'occuper de sa
famille. Elle prévoit de prendre sa retraite l'an prochain.
Statue pour le prince Rainier
lors que la municipalité de Bistrita a décidé d'ériger une statue du leader chinois Deng Xiaoping, Bucarest a programmé celle du Prince Rainier de Monaco qui sera réalisée en bronze pour un montant de 200 000 euros… en pleine crise
frappant plus de la moitié de sa population ! La municipalité de la capitale n'a avancé aucune explication à cette décision, indiquant seulement que le souverain monégasque faisait partie d'un programme d'hommages à des personnalités ayant marqué leur époque ou la Roumanie, comprenant aussi cinq autres statues dédiées à l'acteur Gheorghe Dinica, aux philosophes Mircea
Eliade et Emil Cioran, à la romancière Hortensia Papadat-Bengescu et au révolutionnaire Avram Iancu, le choix ayant été arrêté
par le Conseil scientifique consultatif de l'administration des monuments. Sans-doute s'agit de rendre hommage aux casinos qui
ont fleuri dans la capitale ?
Reportage
Les NOUVELLES de ROUMANIE
Tour de Roumanie
"La petite Boucle"
SUCEAVA
l
ORADEA
l
BAIA
MARE
IASI
l
TARGU
MARGHITA MURES
ARAD
SIBIU
l
l
l
l
l
TIMISOARA
FOCSANI
l
l
GALATI
PITESTI
T. SEVERIN
l
l
l
BUZAU
l
l
CRAIOVA
l
n
BUCAREST
CONSTANTA
l
Pas de problème !
30
de Roumanie a toujours rêvé de son grand modèle… le Tour de France
doit manger encore beaucoup de soupe !
CHISINAU
l
BRASOV
Ignoré par son propre public, le Tour
Reportage
Les NOUVELLES de ROUMANIE
Samedi 2 juin. - "En roue" pour le
Tour cycliste de Roumanie dont le
départ est donné ce jour à Constantsa
pour un prologue de 8 km. Ici, rien du
gigantisme de la grande sœur française. Tout se fait à la bonne franquette… mais non sans sueurs froides. Je
m'y suis pris dès janvier pour demander mon accréditation et mes e-mails
ou coups de téléphone restant sans
réponse, je me suis présenté à la
Fédération Roumaine de Cyclisme, le
9 mai, dès mon arrivée
à Bucarest. "Pas de problème" m'a-t-on répondu, "rendez-vous à
Mamaia à l'hôtel Flora".
A l'accueil de l'hôtel,
aucune réservation ne
figure à mon nom…
mais la réceptionniste
me donne une chambre
immédiatement, sans
autre cérémonie, et me
montrant la salle où se
tient le comité d'organisation me souhaite "succes !"… ce qui ne manque
pas de m'inquiéter.
Le lendemain matin en entendant
dans les couloirs de l'hôtel des femmes de service partant faire le ménage se souhaitant la même réussite,
j'en déduis qu'il ne faut pas interpréter
au second degré ce vœu. D'ailleurs,
preuve m'est donnée dans la foulée
de l'efficacité de cette organisation "à
la roumaine". Mon nom ne figure pas
non plus dans la liste des journalistes
embarqués dans les voitures de la
course. Qu'à cela ne tienne… le
responsable de la presse me fait monter dans la sienne, entassant des collègues roumains sur la banquette
arrière. Après tout, je suis venu ici
pour l'aventure !
Les bergers et leurs troupeaux divaguant sur les hauteurs des Carpates doivent certainement se demander ce que peuvent bien chercher ces étranges créatures pliées en deux sur leurs drôles de machines montées sur deux roues, poursuivies par une horde d'engins klaxonnant à tout va, feux allumés en plein jour…
et qui s'entête à ne jamais les rattraper. Ils ne sont pas les seuls… les cigognes perchées sur les toits des maisons saxonnes de Transylvanie, les chevaux courant
dans les plaines de Bucovine, les vaches broutant dans les pâturages verdoyants
des vallées de l'Olt et du Mures se posent la même question: qu'ont-ils donc tous
à se faire la course en long et en large à travers toute la Roumanie. Justement, ils
font le Tour de Roumanie… "La Mica Bucla" comme on l'appelle sur place, en
référence à "La Grande Boucle" ! Justement, les deux épreuves s'apprêtent à fêter
respectivement l'an prochain leur 50ème et 100ème édition. Pour bien saisir leurs
similitudes et différences, Henri Gillet a suivi l'épreuve roumaine pendant toute
sa durée, huit jours, début juin !
L
a Fontaine prendrait sans-doute plaisir à conter dans une de ses fables ces
étranges scènes où les hommes partagent l'incrédulité des animaux au passage de la caravane. Femmes tsiganes aux tenues chamarrées qui se rangent
effrayées sur le bas-côté de la route, charrettes de paysans qui se poussent vite-fait.
Tous écarquillent des yeux devant ce tintamarre qui dure le temps d'un éclair pour
disparaître vers d'autres horizons, les boucles du
Danube, la plaine de la Dobroudja, les confins de
l'Ukraine et de la Moldavie. Car, il faut le dire tout
haut… même si le Tour de Roumanie est ignoré de
la quasi-totalité des Roumains - guère plus de 20 30 000 personnes se pressent, au total, sur ses routes - c'est une belle épreuve qui mériterait une
autre audience.
Mais la "Petite Boucle", comme l'aiment à
l'appeler ses promoteurs, doit manger encore beaucoup de soupe pour un jour espérer tourner son
regard vers l'inaccessible grande sœur française.
Ici, la "Grande Boucle" est la référence suprême et
le rêve nourri par tous les participants est, pour les
plus fous, de s'aligner un jour à son départ, pour les plus raisonnables, d'assister à une
de ses étapes. Quatre Roumains seulement ont participé à un Tour de France. C'étant
avant-guerre et ils ont abandonné dès les premières étapes. Francophilie aidant, le
cyclisme roumain a toujours été à l'école de la France, depuis ses débuts.
Budget: un écart parfois
de un à 500 ou 1000 avec "La Grande Boucle"
L'ancêtre du Tour de Roumanie, le Tour de Munténie, est né voici un siècle, inspiré alors par le tout jeune Tour de France, apparu en 1903. Aujourd'hui, son organisation est calquée sur l'épreuve reine: voiture balais pour les abandons, radio-Tour pour
donner les consignes et informations, ambulances, commissaires et directeur de course, véhicules techniques, de contrôle anti-dopage, voitures de presse, et même un hélicoptère sponsorisé par Neptun TV, une chaîne de Constantsa qui, pour la deuxième
année, assurait une retransmission d'une heure en différé chaque soir, de 23 h à minuit.
Maillot jaune, de grimpeur, de meilleur espoir, par équipes: les trophées portent la
même couleur ou la même appellation, sauf pour celui qui distingue le meilleur sprinteur, revêtu de rouge et non de vert. Bien sûr, la comparaison s'arrête là: la caravane du
Tour de France compte 2400 véhicules et peut s'étendre sur 70 km, sa petite sœur, 70
s'étalant au maximum sur 3 km.
Mais pour autant, l'organisation est rigoureuse et les ratés
aussi le "networking". Mission réussie, car celui-ci ne se fit
quasi-inexistants. La Fédération roumaine de cyclisme qui
pas prier, assuré d'avoir sa photo dans les journaux locaux à
s'en charge a d'ailleurs bien du mérite, devant compter avec les
trois jours des élections municipales.
innombrables aléas auxquels on est confronté en Roumanie,
Le financement apparaît donc comme le nœud central d'un
dont le moindre n'est pas celui de l'état des routes. D'ailleurs,
véritable démarrage d'un Tour dont on s'accorde à reconnaître
si les étapes sont relativement courtes - autour de 150 km sa valeur sportive. Si la BRD-Société Générale, principal
c'est pour ménager les organismes durement mis à l'épreuve,
sponsor, supprimait sa subvention de 40 000 €, l'épreuve s'arcar le circuit emprunte rarement les meilleures chaussées, celrêterait net. Mais si la Fédération Roumaine de Cyclisme ne
les des routes européennes, pour ne pas se mettre à dos les
trouve pas d'autres ressources, elle continuera à végéter.
Fédérations de transporteurs. La "Petite Boucle" n'a pas le bras
Les détracteurs de l'équipe dirigeante lui reprochent son
aussi long que son aînée…
immobilisme. Pourtant la course progresse. Quatorze motos
Cette différence saute aux yeux lorsqu'il est question de
l'encadraient cette année. On en comptait une seule en 2005.
budget. Celui du Tour de France est estimé à 100 millions
Quinze coureurs roumains se sont alignés au départ, ainsi que
d'euros, en Roumanie, il se situe entre 100 000 et 200 000 €.
6-7 Moldaves, et la Roumanie chapeautait 4 équipes, dont
Un écart parfois de un à 500 ou à 1000. Encore faut-il inclure
celle, Tusnad, d'où est sorti le vainqueur… un Croate, il est
dans cette enveloppe tout l'hébergement pris en charge par les
vrai. L'UCI (Union Cycliste Internationale) a reconnu la
villes étapes… et, contrairement au Tour de France, ces derFédération en 2009 et délègue maintenant un observateur,
nières ne se bousculent pas pour accueillir l'épreuve. Ainsi, les
chargé de veiller à l'application des règlements. Cette année, il
organisateurs en sont-ils réduits à multiplier les transferts
était Slovène.
d'une arrivée à un départ le lendemain matin, une centaine de
Comme dans toutes les instances, les ambitions et égos se
kilomètres plus loin, histoire de racler une subvention dans les
frictionnent lorsqu'il s'agit de renouveler le bureau. Les dirifonds de tiroirs des mairies. A ce petit jeu, les coureurs du Tour
geants sont alors régulièrement accusés de se payer (5000 €)
2012 ont effectué 1500 km dans des voitures… et un peu plus
par an… à ne rien faire. Dans la presse, on a fait des gorges
de 1100 sur leur vélo. Cette année, le sprint final avait lieu à
chaudes du chargement d'un camion de bouteilles d'eau minéMarghita, ville proche d'Oradea, à 700 km de Bucarest, qui
rale destiné aux concurrents qui aurait disparu en route. Une
avait bien voulu mettre la main à la poche, la capitale étant
fois, les élections passées, les passions se calment. (suite p.32)
boudée, s'étant montrée trop ladre.
TOUR DE ROUMANIE 2012
TOUR DE FRANCE 2012
Mégoter des sponsors
jusqu'à la dernière minute
Même l'épreuve lancée, les organisateurs continuent à chercher des sponsors
pour mettre un peu de beurre dans les épinards. A Iasi, ville de départ d'étape, l'un
d'eux avait pris un peu d'avance sur la
caravane… pour aller mégoter la fourniture de deux ou trois maillots auprès du
maire, usant d'un sport national, la "pila"
ou piston… que les Américains appellent
Nombre d'équipes : 14 de 6 coureurs
Nombre de partants : 83
Longueur du parcours : 1184 km
Nombre d'étapes : 8 + prologue
22 de 9 coureurs
198
3479 km
20 + prologue
Budget : entre 100 0000 et 200 000 euros
Budget par équipe :
Total des prix : 24 000 euros
Vainqueur : 3000 euros
Vainqueur d'étapes : 700 euros
100 millions d'euros
entre 7 et 15 millions d'euros
3,5 M€ dont 2 M€ de primes
450 000 euros
8000 euros
Caravane : 80 voitures, 200 personnes
Longueur de la caravane : 500 m à 2,5 km
Intendance (techniciens et accompagnateurs): 80
2400 voitures, 4500 personnes
12 km à 70 km
2100
Spectateurs : entre 15 000 et 50 000
Médias : 40 journalistes et assimilés
Diffusion TV à l'étranger : aucune
Nombre de licenciés :
Catalin Cirnu, officier de presse, et Valeriu
Andoniu, directeur de la course, deux hommes-clé du 49ème Tour de Roumanie.
12 millions
2500 journalistes et assimilés
186 pays, direct dans 60 pays
112 000
Dans ce tableau, il s'agit d'estimations ou de moyennes. Il ne faut pas confondre la
disparité énorme entre les moyens dont disposent l'une et l'autre compétition, parfois
de 1… à 1000 et leur valeur sportive qui, en fonction de la durée, la longueur et la
dureté de l'épreuve, le niveau des concurrents, est beaucoup plus proche, de l'ordre de
1 à 3, ce qui est plutôt un bon point pour le Tour de Roumanie.
31
Reportage
Les NOUVELLES de ROUMANIE
(suite de la page 30)
l
l
l
IASI
ORADEA
l
l
TARGU
MURES
ARAD
l
l
Dopage: le jeu en vaut-il la chandelle ?
SUCEAVA
SATU
MARE
VASLUI
BACAU
SF. GHEORGHE
l
l
l
l
TIMISOARA
BRASOV
URZICENI
CRAIOVA
l
GALATI
BRAILA
l
n
BUCAREST
l
l
l
TULCEA
CONSTANTA
l
Pas besoin
de bon de sortie
32
Quant au dopage, personne n'en parle. Un véhicule et une équipe médicale lui sont
affectés pour respecter les exigences de l'UCI. Régulièrement, lors de la remise des
bouquets aux vainqueurs, le speaker annonce que le gagnant de l'étape ne peut pas
monter sur l'estrade, étant parti satisfaire au contrôle. Le jeu en vaut-il vraiment la
peine, vue l'importance modeste de l'épreuve? De temps en temps, la Fédération révèle avec un certain décalage, un dépistage positif. Ce fut le cas pur un Ukrainien en
2007.
Avec un sourire amusé, les Roumains soulignent que les équipes qui dominent le
Tour de France ne sont pas-celles qui ont les meilleurs coureurs ou entraîneurs ou sponsors… mais celles qui ont déniché les meilleurs médecins. Toutefois on peut remarquer
que, quinze jours après le Tour de Roumanie 2011, le seul Français a y avoir participé,
le professionnel Guillaume Pont, 31 ans, avait été contrôlé positif à l'EPO, lors des
championnats de France sur Route. Suspendu pour quatre ans, l'équipier de la formation grecque Tableware, très présente dans les compétitions en Espagne et habituée de
la "Mica Bucla", pouvait considérer sa carrière terminée.
Dimanche 3 juin.- Le Tour a vraiment du mal à se faire connaître. Déjà
la veille, la présentation des équipes,
le spectacle qui avait suivi, le prologue
contre la montre, n'avaient attiré qu'une dizaine de spectateurs en dehors
de la caravane. Les concurrents rouLe pied pour les bénévoles qui vivent une semaine folle
mains qui passent devant chez eux,
n'ont pas besoin de demander un bon
La véritable question pour la Fédération porte sur la dimension à donner à l'épreude sortie au peloton pour passer détave. Les dirigeants en place ont choisi de privilégier le volet amateurs. Sur les quatre
ché… il n'y a personne pour les
équipes roumaines engagées, une seule, Tusnad, avait un statut lui permettant de dispuapplaudir !
ter des épreuves à l'étranger, les autres doivent rester à la maison. Sans le Tour de
Je m'attendais à une organisation
Roumanie, leur bicyclette ne leur servirait à rien, plaident-ils.
"à la roumaine", dont je connais les
Les cyclistes roumains ne peuvent pas vivre de ce sport soutiennent-ils aussi. Ils
mécanismes de puis un certain temps:
n'ont aucun moyen et ce sont des passionnés, ravis de pouvoir rouler sur des vélos
on part avec en tête un plan
d'une valeur de 4-5000 € fournis
bien défini, mais rarement
par les clubs ou les sponsors, qu'ils
réalisé, compte tenu des
ne pourraient jamais s'offrir autrealéas liés à la nature du
ment.
pays… Alors, dans la derLes accompagnateurs sont
nière ligne droite, on imprologés à la même enseigne. Des
vise, trouvant une solution
bénévoles, fous de vélo, souvent
sur le fil. En exagérant, on
anciens cyclistes eux-mêmes, parpourrait dire que rien ne
fois de père en fils, qui prennent sur
marche comme prévu…
leurs congés pour se joindre à l'émais que finalement tout
preuve. Pendant une semaine, ils
finit par s'arranger. C'est
sont à la fête. Certains viennent
bien le principal et, si on
avec leur propre voiture ou leur
prend çà avec un peu de
moto, embarquent les journalistes,
philosophie, c'est même pluse transforment en arbitres, ouvrent
Andrei Nechita, terminant 5ème, n'a pu rééditer son exploit de l'an la course et la route, roulent à toute
tôt sympathique ! Mais non !
passé et ramener une deuxième victoire finale à la Roumanie.
Loin des clichés, ce Tour me
berzingue, remontent les files de
paraît parfaitement organisé et les
véhicules, s'engouffrent sur la voie de gauche. Pour ces motards, c'est le pied. Ils n'auétapes à venir ne le démentiront pas.
raient jamais eu l'occasion de passer une semaine à plein gaz comme celle-ci… et avec
Finalement, j'atterris dans le combi
la bénédiction de la police et de la gendarmerie qui assure la protection de l'épreuve.
Mercedes d'un des directeurs de la
Mais ne nous y trompons pas, tout est fait avec le plus grand sérieux. Leur récompencourse, délégué de l'Agence Nationale
se? La Fédération leur rembourse l'essence et assure leur hébergement. L'un d'entredes Sports, un bon vivant qui se
eux avait pris des congés pour venir du Koweït où il travaille.
délecte à donner des consignes à son
Et les organisateurs d'ajouter que le saut exigé par l'UCI pour pouvoir s'exprimer
chauffeur… rien moins qu'un colonel
à un niveau de compétition supérieure est hors de portée, actuellement: une garantie
de gendarmerie, non moins ravi d'obancaire conséquente, pouvant dépasser la centaine de millier d'euros, un accueil dans
béir les deux doigts sur la couture du
des hôtels de meilleure qualité (actuellement, il s'agit de 3 étoiles, très corrects), des
pantalon aux injonctions… à ne rien
routes en meilleur état, des émissions en direct à la télévision…
respecter du code de la route !
(suite page 34)
Reportage
Les NOUVELLES de ROUMANIE
La course
Le Croate Matja Kvasina au-dessus du lot
Le Croate Matja Kvasina, 31 ans, membre de l'équipe roumaine
Tusnad, a remporté la 49ème édition du tour de Roumanie au terme
d'une épreuve sans grand suspense. La "Petite boucle" avait réuni 83
concurrents au départ, donné à Constantsa sur les bords de la Mer
Noire, répartis entre 14 équipes. Seulement 67 ont franchi la ligne
d'arrivée à Marghita, près de la Hongrie.
L
'Ukraine était apparue comme la grande favorite du Tour de
Roumanie. Venus en force, avec deux équipes, dont une nationale, les Ukrainiens ont certes imposé leur domination collective tout au long de l'épreuve, remportant quatre étapes dont trois revenant
à leur sprinter Andriy Kulyk, plaçant leur deux formations en tête du classement par équipes… mais ils sont repartis sans avoir
réussi à endosser les maillots les plus prestigieux, le jaune, bien sûr, le rouge, équivalent du maillot vert consacrant le meilleur
sprinter, et le blanc attribué au meilleur grimpeur.
Le Grec Tamouridis s'était promis de prendre sa revanche sur l'année précédente, où il avait terminé deuxième, ratant la victoire finale dans des conditions jugées particulières. Il s'était incliné sur le fil devant l'enfant du pays, le Roumain Andrei Nichita
qui avait dominé l'épreuve grâce à une échappée lui donnant un quart d'heure d'avance, laquelle se réduisait à une peau de chagrin
avant la dernière étape décisive de montagne, domaine où il ne brille pas particulièrement. En passe de perdre son maillot jaune au
profit du Grec, le Roumain l'avait sauvé de justesse grâce à la complicité des coureurs italiens, pays où il s'entraîne, qui l'avait ramené sur les échappés… et à celle d'une météo défavorable, conduisant les organisateurs à écourter de dix kilomètres la montée, les
plus difficiles. Pas rancunier, Ioannis Tamouridis est revenu pour l'édition 2012. S'il ne s'est finalement pas imposé, il a cependant
remporté trois victoires d'étapes, a porté le maillot jaune pendant deux d'entre elles et finalement endossé le maillot rouge de la victoire aux points. Il a eu aussi la satisfaction de voir son coéquipier espagnol Gonzales de la Parte, terminé second de l'épreuve, à
quelques dizaines de secondes du vainqueur final, Matia Kvasina qu'il n'avait visiblement pas les moyens de surclasser. Grand seigneur, le Croate, qui avait pris le maillot jaune dès la 3ème étape, lui a d'ailleurs laissé la victoire de la prestigieuse Transalpina,
l'Alpe d'Huez du Tour de Roumanie, avec une arrivée au pic Papusa, à 2094 mètres. Après trente kilomètres d'une montée avec des
côtes à 16 % et une vingtaine de lacets dans la dernière partie, les deux hommes ont terminé roue dans la roue.
Décidément fâché avec la montagne, concédant quatre minutes dans la Transalpina, et relégué à la cinquième place du général, alors que la veille il était encore second à deux secondes, Andrei Nichita n'a pu rééditer son exploit de l'année précédente. Il se
consolera en représentant pour la première fois la Roumanie aux Jeux Olympiques de Londres.
Le Palmarès
Classement général individuel :
1. Matja Kvasina (Croatie, Tusnad Cycling Team), les 1173
km en 26 h 54 mn 48 sec. (moyenne : 43,58 km/h)
2. Victor De la Parte Gonzales (Espagne, Tableware) à 23
secondes
3. Johannes Heider (Allemagne, Univega) à 2 mn 51
4. Denis Karnulin (Ukraine, ISD Lampre) à 4 mn 03
5. Andrei Nechita (équipe nationale de Roumanie) à 4 mn 16
6. Berger Henrich (Allemagne, C.S. Mazicon) à 5 mn 45
7. Iurii Leontenko (Ukraine) à 6 mn 36
8. Maksym Vasilyev (Ukraine, ISD - Lampre) à 7 mn 34
9. Enrico Franzoi (Italie, Cycling Team Friulli) à 7 mn 43
10.Martin Grashev (Bulgarie, Nessebar Shockblaze) à 8 mn 02
… 17 coureurs sur 83 au départ ont abandonné
Les vainqueurs d'étapes :
2 juin: Prologue contre la montre individuel à Constantsa sur
8 km: Ioannis Tamouridis (Grèce, SP Tableware)
Demi-étape Giurgieni-Galati (142 km) : Andriy Kulyk
(Ukraine)
3 juin: Galati-Vaslui via Tecuci (180 km) : Maksym Vasilyev
(Ukraine)
4 juin: Iasi-Botosani (117 km) : Andriy Kulyk (Ukraine)
5 juin: Siret-Suceava via Gura Humorului (161 km) : Matja
Kvasina (Croatie, Tusnad Cycling Team)
6 juin: Poiana Largului-Târgu Mures via Târgu Neamt (168
km): Andriy Kulyk (Ukraine)
7 juin: Agnita-Râmnicu Vâlcea via Sighisoara (156 km):
Ioannis Tamouridis (Grèce, SP Tableware)
8 juin: Râmnicu Vâlcea-Pasul Urdele (Transalpina) via Rânca,
(126 km) : Victor De La Parte (Espagne, SP Tableware)
9 juin : Deva-Marghita via Stei (113 km) : Ioannis Tamouridis
(Grèce, SP Tableware).
Classement général par équipes:
1. Equipe nationale d'Ukraine
2. ISD Lampre (Ukraine)
3. Tusnad CT (Roumanie)
Les maillots:
Jaune (classement général) - Matja Kvasina (Croatie, Tusnad
CT)
Blanc (combativité) - Ioannis Tamuridis (Grèce, Tableware),
déjà 2ème l’an passé
Vert (montagne) - Johannes Heider ( Allemagne, Univega)
Rouge (sprinters) - Oleksandr Golovas (Ukraine)
Bleu (meilleur Roumain) - Andrei Nechita (équipe nationale
de Roumanie), vainqueur l’an passé
Tricolore (meilleur espoir roumain) - Valentin Plesea
(Otopeni)
33
Reportage
Les NOUVELLES de ROUMANIE
(suite de la page 32)
l
l
IASI
ORADEA
l
l
l
BRASOV
l
TIMISOARA
FOCSANI
l
l
SIBIU
l
GALATI
BRAILA
R. VÂLCEA
CRAIOVA
l
BUZAU
l
l
l
l
n
BUCAREST
l
l
T. MAGURELE CONSTANTA
Au régime…
comme les coureurs !
34
Reportage
50ème édition l'an prochain…
et centième pour le Tour de France
l
TARGU
MURES
A. IULIA
ARAD
l
Historique
"On ne peut pas suivre"
SUCEAVA
SATU
MARE
Les NOUVELLES de ROUMANIE
Ce pilote expérimenté zigzague
dans le peloton, remonte le long de la
caravane, rampe d'urgence et tous
phares allumés, coups de sirène hululant, roulant sur la file de gauche,
salué par les policiers en faction le
long de l'itinéraire. Parfois notre véhicule prend de l'avance. Les voitures
venant en face nous signalent que la
route est truffée de contrôles. Notre
colonel rigolard les remercie d'un
salut amical de cette prévenance !
D'autres fois, il se rebiffe face aux
ordres de son patron qui lui cloue le
bec d'un impératif "Ce am spus, am
spus" ("Ce que j'ai dit, je l'ai dit !")…
répété trois-quatre fois avant d'être
suivi d'effet. Un jeu entre les deux
compères.
Lundi 4 juin.- Me voilà soumis au
régime sportif. Le serveur de l'hôtel
me rabroue lorsque je lui demande un
café au petit-déjeuner. Ce sera un
thé, comme les coureurs. Hier soir,
c'était des pâtes et de l'eau plate.
Heureusement, un organisateur avait
eu la bonne idée d'apporter une bouteille d'Evian… remplie d'une innocente tsuica de fabrication maison. Et
dans les voitures de la caravane, si
on cherche bien du pied sous les sièges, il n'est pas rare de tomber sur
des packs de bière fraîche.
A l'entrée des villes étapes, les
rues sont constellées d'autant de banderoles que les arrivées du tour de
France, mais là ce sont les portraits
et les slogans des candidats aux
élections municipales et départementales qui ont lieu le dimanche suivant
qui y figurent. Le Tour a d'ailleurs été
raccourci d'une journée pour ne pas
se télescoper avec le scrutin.
"On ne peut pas suivre, faute de sponsors" soupire-t-on à la Fédération. Ce à quoi,
les opposants rétorquent que pour les séduire, il faut d'abord se faire connaître, regrettant qu'aucune publicité digne de ce nom ne soit faite pour attirer le public, les routes
et les arrivées d'étapes restant désertes. Et d'y voir une volonté délibérée des dirigeants
de ne pas attirer l'attention pour rester tranquillement entre eux, avançant le refus qui a
été opposé à un manager italien réputé de prendre le Tour en main pour lui donner l'envergure qu'il mérite, à l'instar des tours de Pologne et de Turquie dont la notoriété a
beaucoup progressé ces dernières années.
L'éclaircie viendra-t-elle d'ailleurs ? La Fédération ne compte guère que 300 licenciés, contre 110 000 en France, ce qui montre à l'envi que ce sport n'y bénéficie pas de
la même popularité. Pourtant, de nouvelles courses ont vu le jour ces derniers temps ou
se sont renforcées: le Tour de la Dobroudja qui précède de quelques semaines celui de
Roumanie, le Tour de Sibiu, disputé sur 3 jours à la mi-juillet, et le Tinul Secuiesc,
épreuve qui a un goût de souffre car organisée par les Hongrois du judet de Covasna.
Deux mille participants à "La Première Echappée"
Pour pouvoir se dérouler, ces compétitions doivent impérativement recevoir l'agrément de la Fédération qui a la haute main sur le cyclisme. Une toute nouvelle équipe,
le CS Otopeni aimerait faire bouger les
choses plus vite.
Emmenée par le
sprinter Alexandru
Ciocan, en fin de
carrière, elle pense
qu'on peut professionnaliser la discipline. "Mais il faudra du temps pour
faire changer les
mentalités, sansdoute dix ans" estime celui qui est
aussi devenu depuis
Embarqué dans un combi - Mercedes, dont on voit ici l'équipage au l’an passé commencomplet, Henri Gillet (au centre) a suivi pendant huit jours
le Tour de Roumanie, son véhicule étant conduit par tateur à Eurosport.
un colonel de gendarmerie (avec casquette)
Le
véritable
placé "sous le commandement" d'un émissaire de
l'Agence Nationale des Sports (2ème à partir de la droite). essor que connaît le
VTT est à la fois plus prometteur et significatif. Organisée depuis 3-4 ans, le 2ème
samedi de mai, "La Prima Evadare" ("La Première Echappée") a réuni 2000 participants entre Bucarest et Snagov, sa banlieue chic, lors de sa récente édition. Des benjamins jusqu'aux vétérans, chacun pouvait s'engager dans la catégorie adéquate contre
une contribution de 10 €. Des rallyes de mountain Bike voient également le jour. Les
ventes de vélos progressent régulièrement, des magasins de cycles apparaissent, un
fabriquant roumain, First Bike, est même présent sur le marché. Finalement, le vélo
revient un peu en grâce par l'intermédiaire de la société civile qui ne tient pas plus que
çà à voir ses activités "encadrées" pour une pratique qu'elle veut ludique et individuelle. Quelque soit l'évolution du cyclisme en Roumanie, le Tour 2013 s'annonce comme
un grand crû. Il pourrait partir de Chisinau en Moldavie et faire étape en Hongrie, faisant ainsi des incursions en terre étrangère, afin de célébrer avec éclat sa cinquantième
édition… alors que le Tour de France, lui, fêtera sa centième édition. Décidément, entre
la Roumanie et la France… c'est une histoire en boucle !
Henri Gillet
L
'influence de la France sur la Roumanie du début du
L'épreuve comporte aussi un classement par équipes, soit
XXème siècle peut se mesurer au cyclisme. Alors
nationales ou regroupant des coureurs de différents pays quand
que le 1er Tour de France date de 1903, organisé
ils ne sont pas assez nombreux.
par le journal L'Auto (qui deviendra l'Equipe) et remporté par
le Français Maurice Garin, l'ancêtre du Tour de Roumanie,
70 villes-étapes à travers le pays
appelé le circuit de la Munténie (La
Transylvanie fait alors encore partie de
Le cyclisme a bien évolué depuis l'él'Empire austro-hongrois), de déroule dès
poque pionnière d'Avant-Guerre. En 1974,
août 1910. Organisé à l'initiative… de la
l'étape Pitesti-Bucarest (109 km) a été
Revista Automobila, revue illustrée consaremportée à la moyenne de 52,516 km…
crée à l'ensemble des sports, il ne compte
alors que la moyenne générale de l'édition
que 18 participants et sera remporté par
inaugurale de 1934 avait été de 24 km/h !
l'Italien Mario Sallo.
Il faut noter que plus de la moitié des
Il faudra attendre 1934 pour que le 1er
quelques 470 étapes disputées depuis l'oritour de Roumanie voit le jour, cette fois-ci
gine l'ont été à plus de 40 km/h… la
organisé par le Journal "Sportul Zilnic",
moyenne générale étant cependant de
quotidien qui est le pendant roumain de
35 km/h.
L'Equipe, avec le concours de la Fédération
Avec 1400 km, le parcours 2012 se
Roumaine de Cyclisme. La Roumanie est
situe tout à fait dans la moyenne, le tour le
alors le 7ème pays à disposer d'un tour
plus long ayant été celui gagné par Pierre
cycliste national amateur ou profesionnel,
Gallien (2242 km), lors de sa 3ème édiaprès la Belgique (1906), Les Pays Bas
tion, le plus court se déroulant sur 430 km
(1909), la Bulgarie (1924), la Hongrie
en 1991. Cette année-là le record de
Vainqueur de la 3ème édition du Tour de
(1925) et la Pologne (1928).
Roumanie en 1936 et seul Français à moyenne horaire - toujours inégalé - de
avoir remporté l'épreuve, Pierre Gallien,
Le premier Tour est remporté par le
né en 1911 à Paris et mort en 2009 à 42,2 km/h sera pulvérisé.
Barcelone, à l'âge de 97 ans, a été un
Bulgare Nicoloff, le Polonais Daniel s'impoAu total, 70 villes roumaines ont
coureur cycliste français professionnel de
1935 à 1939. Il a remporté une étape du accueilli des étapes, Bucarest, évitée cette
sant en 1935, et Pierre Gallien, l'année suiTour de France 1939. Il était le plus vieux
vante. Il sera le seul Français vainqueur de la
vainqueur d'étape du Tour de France année, venant très largement en tête (41
encore en vie en 2009. fois), suivie de Sibiu (28), Cluj (25),
compétition. Le départ de l'épreuve était
donné traditionnellement de la place du Théâtre national à
Brasov et Buzau (23), Târgu Mures (22), Oradea et Bacau
Bucarest.
(18), Vatra Dornei (13), Timisoara et Deva (12), Focsani et Iasi
L'an prochain, le Tour de Roumanie célèbrera sa 50ème
(11).
édition… alors que sa grande sœur en sera à la centième. Une
3300 coureurs ont participé à l'épreuve depuis sa création,
coïncidence qui accentue sa filliation.
avec une moyenne de 65-70 s'alignant au départ de chaque édition, 45-50 franchissant la ligne d'arrivée, soit une moyenne
28 victoires finales pour les Roumains
d'abandons de 27 % (un peu plus de 900 depuis 1934), les premières éditions enregistrant une véritable hécatombe (1934: 61
Avec 28 victoires finales, les Roumains se taillent la part
coureurs au départ, 19 à l'arrivée, 1935: 98-30, 1936: 77-18).
du lion, laissant loin derrière ses premiers suivants, les
Bulgares (4 victoires), et les Ukrainiens (3 victoires). A noter
Deux triplés
qu'un Moldave, Igor Bonciucov, a remporté l'épreuve en 1998.
En 78 années, la "Mica bucla" connaîtra 29 années d'interCertains participants ont acquis une certaine notoriété,
ruption, de 1936 à 1946, puis par intermittence, notamment
comme Constantin Dumitrescu et Mircea Romascanu, vainentre 1974 et 1983, reprenant alors sans discontinuer jusqu'à
queur à 3 reprises ou Ion Cosma et Walter Zigler, 2 victoires
nos jours, sauf en 1996.
finales. Marin Niculescu, bien que n'ayant remporté l'épreuve
Au total, 25 nations ou leurs ressortissants ont participé au
qu'une seule fois, est sans-doute un des cyclistes roumains les
Tour de Roumanie depuis sa création, dont 14 de l'ancienne
plus connus, forgeant son image grâce à ses 14 victoires d'étasphère d'influence soviétique: Roumanie, Bulgarie, Hongrie,
pes en 6 tours disputés, dont 5 au cours d'une seule édition. Il
Pologne, Albanie, Tchécoslovaquie, Yougoslavie, Allemagne
est suivi par Gabriel Moiceanu (13 victoires d'étapes, 1 victoide l'Est, URSS, Ukraine, Moldavie, Kazakhstan, Géorgie,
re finale en 10 Tours) et Constantin Dumitrescu (12 victoires,
Azerbaïdjan, 4 hors Europe : Syrie, Maroc, Chypre, Turquie,
3 Tours remportés en 8 participations).
et 7 d'Europe occidentale : France, Allemagne, Pays Bas,
La prime de la popularité… et de la longévité revient à
Norvège, Suède, Grèce, Italie. Des Suisse et des Belges ont
Traian Chicomban de Brasov qui a participé de la première
participé à titre individuel.
édition (1934) à la 9ème, en 1954 !
35
Reportage
Les NOUVELLES de ROUMANIE
Tour de Roumanie
l
IASI
TARGU
MURES
l
l
TÂRGOVISTE
l
PITESTI
CRAIOVA
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GALATI
l
BRAILA
l
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TULCEA
l
n
BUCAREST
CONSTANTA
l
Deux Tours
pour le prix d'un
36
Ioan Andoniu a dû renoncer
à ses illusions pour un genou trop fragile
l
BRASOV
l
TIMISOARA
l
M. CIUC BACAU
l
SIBIU
l
Les casquettes d'Alexandru Ciocan
l
ARAD
l
Aujourd'hui arbitre sur le Tour, le jeune espoir
se préparait pour "La Grande Boucle"
Tour de Roumanie
SUCEAVA
SATU
MARE
ORADEA
l
Le sprinteur roumain est le seul
à pouvoir vivre de son sport
Reportage
Les NOUVELLES de ROUMANIE
Mardi 5 juin.- Une journée sur le
tour suit toujours le même scénario.
Au départ, commissaires et
arbitres vérifient que leurs sifflets marchent bien, donnant un
véritable concert. Chaque
matin, ils doivent se poser avec
angoisse la même question
existentialiste: sifflet or not sifflet… car que seraient-ils dans
ce monde sans leur indispensable instrument?
Au bout de deux heures de
course, la caravane commence
à s'agiter. Où trouver un endroit
discret pour s'arrêter et soulager les vessies ? Ces haltes
donnent lieu à des scènes cocasses
avec des accompagnateurs surgissant
des voitures dans des claquements
de portières et s'alignant au bord de
la route, alors que les chauffeurs font
ronfler leur moteur, histoire de faire
accélérer leur débit aux retardataires.
J'ai une pensée compatissante pour
les consœurs journalistes qui doivent
serrer… les dents jusqu'à l'arrivée.
L'étape à peine terminée, la caravane
essaie aussitôt de dénicher l'endroit
où se trouve la secrétaire du comité
d'organisation. C'est elle qui détient
les petits tickets attribuant à chacun
son hôtel, sa chambre et les bons de
repas. Dès qu'elle est repérée, tout le
monde se passe le mot et elle devient
pendant quelques minutes la personne la plus courtisée de l'épreuve.
J'apprend que je suis le seul journaliste étranger à avoir suivi l'épreuve
depuis au moins trente ans… sinon
de puis la fin de la Seconde Guerre !
Comme j'étais invité par la Fédération,
cette année j'ai fait deux tours de
Roumanie… pour le prix d'un !
Vainqueur du Tour de Dobrodjea fin mai, histoire de se mettre en jambes
pour le Tour de Roumanie, Alexandru Ciocan, classe 4ème meilleur coureur roumain en 2011, est considéré comme le sprinter national et porte surtout sur ses
épaules l'espoir d'un renouveau du cyclisme dans son pays.
A
lexandru Ciocan n'a pas eu besoin d'élixir pour grandir dans le sport…
même si cet ancien étudiant en pharmacie, après avoir terminé l'université de sports, convient, dans un grand éclat de rire que cette discipline est
souvent considérée comme la meilleure adresse de "restaurant" des coureurs. Son
père, Constantin, a été un des plus grands champions roumains, participant aux JO de
Tokyo en 1964, et finissant 4ème du contre la montre par équipes des championnats du
monde, avant de devenir le meilleur entraîneur du pays.
Quant à sa mère, Gabriela, elle a terminé 2ème du championnat d'Europe de basket avec l'équipe roumaine.
Alexandru visait une victoire d'étape dans le tour 2012
et lorgnait vers le maillot rouge récompensant le meilleur
sprinter. Il a dû remballer ses espoirs devant une concurrence étrangère à la fois plus jeune et supérieure. A 34 ans, le
Roumain ne s'en offusque pas. Il sait que sa carrière est derrière lui et s'apprête à remiser son vélo dans son garage…
mais non le cyclisme qui est sa vie.
Car Alexandru Ciocan symbolise la modernité d'un
sport qui demande à évoluer en Roumanie. "Il nous faut dix
ans encore, un changement de génération pour parvenir au
niveau continental" analyse-t-il, relevant les quelques progrès effectués depuis le début des années 2000. "Nous avons
davantage de meilleurs coureurs et un peu plus d'argent, mais ce n'est pas encore suffisant" constate le champion qui convient qu'aucun coureur roumain ne peut encore
vivre de son sport. Justement, Ciocan est l'exception, mais parce qu'il a su organiser sa
carrière. Après avoir entraîné en second la section cycliste du Dinamo de Bucarest,
parallèlement aux courses disputées, il est devenu la cheville ouvrière d'un nouveau
club, le CS Otopeni, dans la banlieue de Bucarest, récupérant au passage les meilleurs
éléments de son ancienne formation. Avec une ambition non cachée: en faire un club
fiable entraînant le cyclisme roumain vers la professionnalisation.
Commentateur pour Eurosports
De le même façon le coureur a assuré non pas ses arrières… mais plutôt ses
devants, en devenant depuis 2011 consultant d'Euronews Roumanie pour les grandes
compétitions mondiales. Ainsi les téléspectateurs roumains peuvent-ils désormais
entendre des commentaires avisés sur la Vuelta, le Giro, le Tour de France, les Jeux
Olympiques, le coureur aménageant le calendrier de ses interventions en fonction de
son engagement dans les courses. Une casquette de journaliste qui plait énormément
au Roumain qui souhaite en faire le prolongement dans son engagement dans le cyclisme. Surtout, elle lui a permis de réaliser le rêve de tout coureur: assister en direct à la
Grande Boucle. "C'est géant, plus fort encore que les JO" s'enthousiasme-t-il, s'inquiétant cependant pour la version 2012: "De grands noms comme Contador et Armstrong
ont été mis hors course pour cause de dopage, mais finalement, ce sont eux qui faisaient venir le public… Maintenant, il n'y a plus de grandes pointures".
L'avenir du cyclisme roumain, Alexandru Ciocan le voit donc dans la relève des
générations, mais plus encore dans le développement de la pratique du vélo dans la
population, comme le montre notamment le succès des épreuves de VTT ouvertes à
tous. En quelque sorte, le renouveau qui s'imposera par la base.
Ioan Andoniu aurait bien aimé continué sa carrière de coureur. Mais il s'est
rangé sagement derrière l'avis de la faculté. Son genou ne tenant plus le choc, il
devait renoncer à ses ambitions. Dur quand on a 25 ans et un père, Valeriu, qui vous
a fait enfourché un vélo dès l'âge de 10 ans.
A
près 30
ans de
désert,
Ioan Andoniu a été le premier cycliste roumain à revenir courir sur les routes de France. Le "gamin" de 22 ans, avait été
repéré sur Internet par un manager nantais, Serge Pineau, à la
recherche de talents balkaniques. L'offre était trop tentante.
Tous les frais, équipement et hébergement payés, le jeune
Roumain pouvait venir tenter sa chance dans le pays de "La
Grande Boucle". Pendant trois ans, Ioan a ainsi fait l'allerretour avec son pays, y revenant après des périodes d'entraînement de 3 mois. Dans l'attente de son visa de séjour, le garçon logeait dans une caravane confortablement équipée, aux
Aubiers, près de Châteaubriant, en Loire-Atlantique. Pour un
espoir, après avoir achevé l'université des Sports, complétée
plus tard par un diplôme d'une école d'entraîneur, sa carte de
visite était déjà prometteuse avant de débarquer en France,
avec une sélection en équipe nationale pour disputer des épreuves en Allemagne, Grèce, Russie, Bulgarie.
L'épisode français a confirmé les espoirs que Serge Pineau
avait mis en lui. Ioan a remporté sept épreuves majeures de la
région nantaise, connue pour être une pépinière de talents français, dont le Grand prix de Mayenne et de Craon.
Aujourd'hui, à 28 ans, après avoir renoncé à sa carrière, le
jeune Roumain travaille aux côtés de son père à la Fédération
de Cyclisme et officie comme arbitre lors du Tour de
Roumanie. Il profite aussi de son expérience française pour
entraîner cinq coureurs roumains classés à l'UCI et, à son tour,
repérer des jeunes talents, déjà une dizaine, qu'il confie à Serge
Pineau. Avec l'espoir que l'un, un jour, participera à sa place à
"La Grande Boucle"… un rêve personnel brisé pour une histoire de genou trop fragile.
Prévoyants, les Moldaves ont toujours eu une longueur d'avance
P
our la deuxième année consécutive, les Moldaves alignaient
une équipe nationale au départ
du Tour de Roumanie, épreuve qu'ils ont
déjà remportée à deux reprises ces vingt
dernières années.
Qu'on ne s'y trompe pas… la petite
Moldavie, ex-république soviétique, tient
la dragée haute à ses voisins quand il est
question de cyclisme. Certes, elle n'a pas
retrouvé le niveau d'avant la chute du
communisme, mais elle fait tout y parvenir. D'ailleurs, sa fédération s'inspire de
l'époque soviétique pour essayer de
reprendre son rang. Elle anime des écoles
de sports, financées par l'Etat, et un centre d'entrainement.
Dépourvue de moyens, ses dirigeants
ont décidé de faire l'impasse sur les coureurs adultes, aux prétentions financières
hors de portée, pour tout miser sur les
espoirs. C'est ainsi que la seule grande
course organisée, "La coupe du
Président", sur trois jours à la mi-juin,
est réservée aux juniors. Ces jeunes, force
vive des 60 licenciés que compte le pays
et que la Moldavie emmène tout au long
de l'année faire leurs dents dans des
épreuves en Azerbaïdjan, Pologne,
Ukraine, Turquie, et envoyait encore
récemment se former au centre de préparation mondiale de l'Union Cycliste
Internationale, à Aigle, en Suisse.
La fédération moldave confie ainsi sa
pépinière de talents aux équipes professionnelles étrangères, espèrant qu'elles
repèreront les plus doués.
Andrei Pliuschin, 25 ans, est ainsi
passé pro, voici deux ans, devenant réserviste dans l'ex-équipe de Lance
Armstrong et a été le premier moldave a
disputé un Tour de France, en 2010. Cet
été il représentera son pays aux JO de
Londres lors de l'épreuve sur route, occupant la place réservée par l'UCI à la
Moldavie.
Andrei Tchmil
champion aux cinq nationalités
Mais le plus connu des coureurs moldaves est sans conteste Andreï Tchmil, né
en 1963 à Khabarovsk (Russie, alors en
URSS). Professionnel de 1989 à 2002, il
a été d'abord soviétique, puis a eu ou pris
ensuite les nationalités russe, moldave et
ukrainienne, avant d'être naturalisé belge,
courant pour ces cinq nations !
Grand coureur de classiques, Tchmil
- Cimili en moldave - a remporté ParisRoubaix en 1994, Paris-Tours en 1997,
Milan-San Remo en 1999 et le Tour des
Flandres en 2000, devenant ainsi premier
au classement général de la Coupe du
monde de cyclisme 1999, deuxième en
1995 et 2000, troisième en 1994.
Après avoir raccroché le vélo, à partir de 2004, Tchmil s'est s'attelé à la création de centres de cyclisme en Europe de
l'Est, à la demande de l'Union cycliste
internationale. Il a repris la nationalité
moldave et a continué à se consacrer au
cyclisme, occupant diverses fonctions au
sein du sport moldave depuis 2005 et
devenant président puis manager de l'équipe russe Katusha, le plus gros budget
de la compétition mondiale financé par
Gazprom, de 2008 à 2011.
Aujourd'hui, le Moldave vise la présidence de l'UCI qui doit être renouvelée
cette année.
37
Reportage
Les NOUVELLES de ROUMANIE
Tour de Roumanie
SUCEAVA
l
ORADEA
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BAIA
MARE
TARGU
MURES
ARAD
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IASI
MARGHITA
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BRASOV
GALATI
R. VÂLCEA
l
CRAIOVA
l
PITESTI
l
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TULCEA
l
n
BUCAREST
CONSTANTA
l
Abandon
la veille de l'arrivée
38
Reportage
Mitsa Biciclista faisait
tourner la tête des rois
l
BACAU
M. CIUC
TIMISOARA
Les NOUVELLES de ROUMANIE
Vendredi 8 juin.- Au sein de la
caravane les véhicules sont informés
minute par minute par Radio Tour.
Quand un coureur s'échappe: "S-a
evadat" annonce la speakerine… ce
qui me fait davantage penser à ceux
qui tentaient de fausser compagnie à
Ceausescu qu'au peloton.
Mon colonel chauffeur et son chef
s'amusent toujours comme des
enfants à actionner sirènes et phares. Gestes impératifs à l'appui, ils
intiment l'ordre de stopper net et serrer à droite. Un haut-parleur cloue sur
place les récalcitrants qui se font tout
petit. Les paysans sont invités à descendre de leur charrette et à tenir la
bride de leur cheval.
Les bergers et leurs troupeaux
doivent débarrasser les lieux sur le
champ. Dommage: un cliché du peloton empêtré parmi les moutons aurait
sans-doute fait le tour du monde et
beaucoup pour la publicité du Tour de
Roumanie.
Et il en a bigrement besoin. En
dehors des ovins… il n'y a pas un
chat sur les routes.
Samedi 9 juin.- La dernière étape
se déroule au nord-ouest du pays, à
Marghita, non loin de la Hongrie. A
près de 500 km de Râmnicu Valcea,
où nous faisions étape hier soir, ce
qui implique un transfert par voiture
de quasiment 400 km. Au total, j'aurais dû effectuer 1200 km supplémentaires, en 24 heures, pour revenir
prendre mon avion à Bucarest, lundi.
Je n'ai pas voulu risquer de le rater.
Piteusement, je quitte le Tour sur la
pointe des pieds, abandonnant mes
compagnons de route à la veille de
l'arrivée.
Henri Gillet
Mercredi 6 juin.- Pour la première fois, à chaque étape, un spectacle est organisé
dans la ville d'arrivée, mettant en scène une légende du cyclisme, "Mitsa Biciclista”.
Née en 1885 à Ditesti, dans la vallée de Prahova, Maria Mihaescu, Mitsa - le diminutif de son prénom - se rendit célèbre alors qu'elle avait tout juste 13 ans, en devenant la
première Roumaine osant se promener à vélo dans les rues dans la capitale. Les bourgeois, les intellectuels, les aristocrates sortaient du célèbre restaurant Capsa, le
"Maxim's" roumain, pour l'applaudir quand elle descendait dans son pantalon bouffant,
recouverte d'une voilette en dentelle, la calea
Victoriei. Déjà provocante et femme libérée, sa
beauté naissante impressionnait les hommes. Mitsa
saura en jouer… Dans ses filets tomberont le Roi
Ferdinand, le peintre Grigorescu, le poète et
Premier ministre Octavian Goga, et même le roi
Manuel du Portugal qui lui offrit le mariage et une
maison. Les nombreux cadeaux qu'elle reçut de ses
amants la firent surnommée "Mita (bakchich) biciclista".
Mais la galante, qui se promena aussi à vélo
dans les rues de Paris, n'eut qu'un véritable amour,
le docteur Nicolae Minovici, même si elle choisit
de se marier pour la première fois, alors qu'elle
avait déjà 55 ans, avec le général Alexandru
Dumitrescu. Peu de Roumains connaissent la véritable histoire de cette femme émancipée, disparue
en 1968 dans son pays, mais "Mitsa Biciclista" est devenue une image et une expression poétique volontiers utilisées quand les parents encouragent leurs fillettes à donner
leurs premiers coups de pédales. Sans-doute ne connaissent-il pas la suite…
Nae flashe plus vite que son ombre
Jeudi 7 juin.- Le Tour a ses "gueules"… et on ne peut pas manquer celle de Nae,
Nichusor Stan (photo ci-contre), 56 ans, photographe officiel de la Fédération de
Cyclisme, présent depuis quinze ans sur la ligne d'arrivée de chaque étape. A lui de
fixer l'image du vainqueur du sprint, entre autres. Ces clichés ont longtemps fait office
de juge de paix, avant qu'une caméra ne soit installée sur la ligne d'arrivée… et bien des
coureurs ont été déclassés après leur examen par le jury.
Formé à la vieille école, Nae est un autodidacte. "Quand j'ai fait mon premier tirage dans le petit labo que je m'étais installé, j'étais ébloui. Je ne savais pas si la photographie avait découvert Nae… ou si Nae avait découvert la photographie" confie-t-il,
la modestie n'étant pas le fort de ce personnage haut en couleurs qui ne doute pas un
instant être le meilleur photographe sur la place et est très fier d'être reconnu.
Ce "mitica" (parigot de Bucarest), à l'accent prononcé, parle aussi vite qu'il flashe
la course. Son bagout, sa spontanéité, sa dégaine, mais aussi son grand cœur en font une
vedette incontestée de l'épreuve. Sans oublier son talent qui a décidé ses patrons à l'envoyer couvrir des évènements sportifs de premier ordre, comme le Mondial de football
1998 en France. La passion du métier coule jusque dans les veines de Nae. Pendant la
"Révolution", il avait emmené sa fillette de quatre ans devant l'Athénée de Bucarest, au
beau milieu des tirs et l'avait faite poser sur un char, entourée de soldats. La photo avait
fait la une des magazines roumains.
Toutefois Nae a aussi appris à savoir jusqu'où ne pas aller. Lors de la visite de Bush
Junior à Bucarest, venu consacrer l'entrée de la Roumanie dans l'OTAN, il avait réussi
à se faufiler à moins de cinq mètres du président américain… s'arrêtant quand plein de
petits points rouge se sont concentrés sur son visage. Il était dans les viseurs laser des
gardes du corps de l'illustre visiteur…
39
Reportage
Les NOUVELLES de ROUMANIE
Le roi des bloggeurs
invité au royaume de "la Petite Reine"
Tour de Roumanie
SUCEAVA
l
l
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BAIA
MARE
ORADEA
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IASI
BACAU
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SÂNNICOLAU M.
l
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TIMISOARA
BRASOV
GALATI
SLATINA
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CRAIOVA
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PITESTI
l
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n
BUCAREST
BUZAU
l
l
TULCEA
CONSTANTA
l
Quand le Tour de
France passait à Sibiu
40
Cinéma
Le drame du monastère de Tanacu ausculté par la Palme d'or 2007
À Cannes, le retour de Christian Mungiu
l
TARGU
MURES
ARAD
Connaissance et découverte
Les NOUVELLES de ROUMANIE
La connaissance du français, qu'il
a passé comme épreuve principale
au bac, a aussi encouragé la
passion de Lucian Ionitsa et lui
a permis de la partager avec
un ami Belge, Michel, qui voit
passer régulièrement la
Grande Boucle devant sa
porte. Il a fait connaissance
avec ce Wallon dans le village
de Vaselica, près de Buzau, où
il avait atterri en 1990, dans un
convoi d'OVR, y revenant sans
arrêt depuis. Au cours de ses
visites, Michel lui apporte des
ouvrages sur le cyclisme
amplifiant encore la connaissance déjà encyclopédique de
son jeune ami. Il traduit également
en français quelques pages du Blog
"justromania.org" que Lucian a
créé pour présenter son pays et le
faire aimer. Le jeune Roumain est
persuadé qu'il est le plus beau du
monde, mais c'est justement pour
s'en assurer qu'il suit toutes les compétitions cyclistes possibles… du
moins sur son écran.
En 2005, lors d'une étape à Sibiu
du Tour de Roumanie, envoyé par
son journal, Lucian a eu l'émotion de
sa vie: de grandes banderoles indiquaient, en français, "Arrivée du Tour
de France". Il s'agissait en fait du
tournage d'un film documentaire par
la RAI sur la victoire de Gino Bartali
dans le Tour 1948, dix ans après son
dernier triomphe. Sibiu avait été
choisie par le réalisateur pour sa ressemblance avec les villes françaises
d'après-Guerre. Pendant quelques
instants, Lucian s'est trouvé projeté
au cœur de la Grande Boucle.
Simplement partie remise ?
Lucian a obtenu la permission de sa femme pour suivre le Tour de Roumanie.
Comment Vasilica aurait-elle pu l'empêcher de se joindre à la "Mica Bucla",
connaissant sa passion pour le cyclisme, alors qu'il venait de gagner le prix du
concours du meilleur blog organisé la Fédération… soit vivre intégralement la
compétition au sein de la caravane, tous frais payés ?
E
n lançant leur concours "Pourquoi je devrais être le blogueur du Tour" en collaboration avec un portail de blogueurs, la Fédération Roumaine de Cyclisme
avait aussi en tête de faire contribuer le gagnant à l'amélioration de son site
internet. Elle ne pensait pas toutefois avoir la main aussi heureuse en dénichant Lucian
Ionitsa, un Bucarestois de 31 ans, manager de projets informatiques dans une société
multinationale. Son site est le seul à donner en direct des nouvelles du Tour et enregistre jusqu'à 300 connections par jour,
presqu'un exploit dans un pays où le
vélo fait figure de parent pauvre. Le "roi
des blogueurs" s'est ainsi trouvé invité
au royaume de "la Petite Reine".
Le jeune marié est avant tout un
passionné de cyclisme. En tant que journaliste sportif, il avait déjà participé à
deux tours, en 2003 et 2005. Il sortait de
ses études, à 21 ans, et avait déjà remporté un autre concours organisé par la
Gazeta Sporturilor (La Gazette des
Sports), devenu depuis le principal journal sportif du pays. En prime: un contrat
de quatre ans au sein de sa rédaction,
embrassant une profession à laquelle il
n'avait jamais songé. Mais le journalisme ne nourrit pas son homme, et son mariage en
vue, le jeune homme a opté pour un métier plus lucratif.
Scotché devant la télé à regarder les étapes du Tour
S'il a toujours aimé et pratiqué le sport, Lucian avait opté initialement pour l'athlétisme. Sa mère ne voulait pas le voir chuter sur les routes pleines de trous ou se faire renverser par les voitures. Mais ici, comme dans bien d'autres domaines, il fallait compter
avec l'effet "Révolution". La télévision s'étant libérée, un climat d'anarchie a régné sur le
paysage audio-visuel roumain dans les années 90. Les bouquets de chaines piratées à l'étranger ont fleuri… pour des téléspectateurs qui se gardaient bien aussi de payer des
redevances.
C'est ainsi qu'un beau jour de juin 1992, rentrant de l'école, Lucian est tombé sur la
retransmission d'une étape du Tour d'Italie, retransmise par une chaîne de Berlusconi.
L'écolier est resté scotché devant son poste jusqu'à la fin de l'épreuve. Il avait 13 ans, ne
connaissait rien de l'étranger, comme beaucoup de Roumains à l'époque, et devra attendre 1998 pour effectuer son premier périple hors des frontières, en Grèce.
Pour lui, le cyclisme devenait soudain un pays imaginaire fabuleux. Des paysages,
des hommes, des émotions qui le faisaient déjà voyager. Une autre révolution bouleversera l'univers du garçon: Internet et sa mine fabuleuse d'informations. Grâce à la toile,
Lucian se nourrira de toute l'histoire du cyclisme, devenant incollable, faisant remonter
ses connaissances à l'origine de ce sport. Bien sûr son regard se portera sur l'épreuve
reine. Ce Tour de France qu'il rêve de voir un jour de ses propres yeux et plus seulement
à la télévision. Il en suit toutes les éditions et pleure encore son champion préféré,
l'Italien Marco Pantani, double vainqueur en 1998 du Giro et du Tour de France… décédé à 34 ans, en 2004, sans-doute d'une overdose de cocaïne.
Palme d'Or à Cannes en 2007 avec "4 mois, 3 semaines, 2 jours", Cristian
Mungiu, le chef de file du nouveau cinéma roumain a fait son retour en compétition avec un film riche et puissant, "Au-delà des collines" qui a obtenu le prix
du meilleur scénario, alors que ses deux principales actrices, Cosmina Stratan et
Cristina Flutur se partagent le prix de la meilleure interprète féminine. Ce n'est
pas seulement la Roumanie qui est ainsi à nouveau honorée, mais aussi la province de Moldavie et Iasi, dont sont originaires tous les lauréats.
L
auréat de la Palme d'Or en 2007 avec "4 mois, 3
semaines, 2 jours", Cristian Mungiu s'est à nouveau attaqué à un sujet difficile en évoquant un
drame qui, en 2005, secoua la Roumanie entière, présenté en
avant-première, lors du dernier festival, sous le titre "Au-delà
des collines".
Connu dans le pays comme "l'affaire de Tanacu", ce
drame s'était noué autour de la mort d'une jeune femme venue
rendre visite à une de ses amies, novice, dans le petit monastère du même nom, situé dans une région reculée de Moldavie.
Sujette à des crises de violence, hospitalisée puis rendue au
monastère, elle avait été soumise à une sorte de séance d'exorcisme, attachée sur un brancard, avant de décéder.
La journaliste et écrivain roumaine Tatiana Niculescu
Bran, en a tiré deux ouvrages sur lesquels Cristian Mungiu
s'est beaucoup appuyé, tout en recourant librement à la fiction.
Plusieurs choses frappent dans ce film de 2 h 30. D'abord, une
remarquable maîtrise formelle, qui lui confère une beauté
sombre et apurée, le préserve des dérives "folkloriques" qu'un
tel sujet aurait pu engendrer et confirme l'exceptionnel talent
de Cristian Mungiu.
Ensuite, une absence de parti pris qui, même si un certain
visage de l'orthodoxie roumaine ne sort pas valorisé de ce
récit, préserve de toute tentative de jugement, généralisation
Musique
L
e compositeur
et pianiste de
nationalité
hongroise Béla Bartók est
né le 25 mars 1881 à
Nagyszentmiklós, dans le
Banat, à l'époque où cette
province faisait partie
intégrante de la Hongrie. Aujourd'hui
désignée sous son appellation roumaine,
Sânnicolau Mare, cette petite ville propre
et tranquille est située à une dizaine de
kilomètres de la frontière hongroise, à
65 km au nord ouest de Timisoara.
Contemporain de Georges Enesco,
Béla Bartok fut sans aucun doute l'un des
plus célèbres musiciens de son temps.
Initié au piano par sa mère, il étudia à
Presbourg - aujourd'hui Bratislava - et à
ou condamnation facile. "J'essaie dans ce film de ne critiquer
personne, a-t-il confié en conférence de presse. Il s'agit de personnages donnés dans une situation donnée et il n'a jamais été
question de viser la religion orthodoxe dans son ensemble".
L'insondable solitude des enfants
grandis dans les orphelinats roumains
Enfin, cette œuvre remarquablement interprétée ouvre sur
des questions très profondes, touchant notamment au bien, au
mal qu'on cherche à combattre, à l'amour et à ses différentes
formes, au libre arbitre et aux conséquences des choix, à l'erreur, la culpabilité, la superstition… Elle parle aussi, en creux
mais de manière très prégnante, d'une insondable solitude
existentielle, celle que bien des enfants grandis dans les orphelinats roumains ont connue. Et brosse, chemin faisant, un portrait de la société roumaine contemporaine.
Cristian Mungiu, dont le film est coproduit par les frères
Dardenne, a expliqué qu'il s'attendait à ce que "Au-delà des
collines" ne soit pas reçu partout et par tous de la même
manière. "Il me paraît important, a-t-il répété avec insistance,
que les croyants en Roumanie aillent le voir et en jugent après
l'avoir vu."
Arnaud Schwartz (La Croix)
Le Banat, berceau de Béla Bartok
l'Académie royale de
musique de Budapest où
il obtint par la suite un
poste de professeur de
piano de 1908 à 1934.
C'est à partir de 1905
que Béla Bartók commence à approfondir, sous
l'influence d'idéaux nationalistes, son
intérêt pour la musique populaire hongroise. La même année, il découvre Paris,
à l'occasion du concours Rubinstein. Le
cosmopolitisme de la ville l'ouvre au
monde et le marque durablement.
Béla Bartok fut l'un des premiers
compositeurs dits classiques à avoir réalisé un collectage très approfondi de
musiques populaires, d'abord de Hongrie,
puis d'autres pays d'Europe de l'Est. Il a
recensé des milliers de thèmes, témoignages précieux des cultures de ces nations.
Le compositeur les a exploités dans ses
œuvres, de manières variées: simple harmonisation, création à partir des mélodies
et rythmes, jusqu'à l'intégration totale
dans sa musique originale d'un "esprit
populaire". La Roumanie est entrée pour
une part importante dans ses recherches
et Bartók compte parmi ses œuvres des
compositions tirées du folklore roumain,
parmi lesquelles les danses roumaines.
Béla Bartok dirigea plus de
40 concerts en Roumanie, dont à
Bucarest, entre 1922 et 1936. S'opposant
au nazisme, il s'exila aux Etats-Unis en
1940 et mourut le 26 septembre 1945 à
New York, emporté par une leucémie.
Yves Lelong
41
Connaissance et découverte
Les NOUVELLES de ROUMANIE
Littérature
L'auteur de Dracula n'avait
jamais mis les pieds en Roumanie
SUCEAVA
l
l
BAIA
MARE
ORADEA
l
l
IASI CHISINAU
l
l
GHERLA
l
l
l
ARAD
CLUJ
l
l
TIMISOARA
SIBIU
TARGU
MURES
l
l
GALATI
BRAILA
l
l
l
TULCEA
l
l
BACAU
BRASOV
PITESTI
CRAIOVA
n
BUCAREST
CONSTANTA
l
Sighisoara primée
L'assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe a décidé d'accorder le
Prix de l'Europe à la ville de Sighisoara.
Une première pour une municipalité
roumaine. Selon le ministre des Affaires
étrangères Cristian Diaconescu, cette
distinction est une "reconnaissance des
efforts déployés par Sighisoara pour
promouvoir l'unité européenne". La ville
de Mioveni, dans le département
d'Arges, faisait également partie des
lauréats. La cérémonie de remise du
prix devait avoir lieu lors du festival
médiéval de Sighisoara entre le 20 et le
29 juin.
42
Bram Stoker est mort voici un siècle
La révolution tunisienne
en BD par un Roumain
Issu de la publicité, Alex Talemba est
un jeune dessinateur de 32 ans de
Bucarest qui vient de sortir sa première
BD en français, Sidi Bouzid Kids, chez
Casterman, dans la collection KSTR. Il
devient ainsi le premier Roumain à être
publié par la plus prestigieuse maison
d'édition de la bande dessinée. Le scénario a été écrit par le français Eric
Borg, qui avait repéré la qualité des
dessins du Bucarestois sur Internet.
L'album raconte l'histoire de la récente
révolution tunisienne. Il est accessible
gratuitement sur Internet pour les
Tunisiens par un site qui leur est réservé et sera bientôt traduit en arabe.
Alex Talamba avait déjà publié un
premier album, Elabuga, mais uniquement en roumain (en passe d'être traduit en français), racontant l'histoire des
prisonniers allemands dans un camp
soviétique lors de la Seconde Guerre
mondiale. Il est à noter qu'une demidouzaine de dessinateurs roumains de
BD publient actuellement en France et
Belgique, alors qu'on en comptait un
seul voici quatre ans.
Le 20 avril 1912 mourrait Bram Stoker, écrivain
anglais d'origine irlandaise, dans sa maison londonienne. Celui qui donna vie au plus célèbre des vampires était aussi un fou de littérature, un passionné
de culture slave et l'un des premiers auteurs considéré comme gothique.
orsque Dracula, l'homme de la nuit paraît
en 1897, Bram Stoker y travaille depuis déjà
10 ans. Il n'a jamais mis les pieds en
Roumanie ni dans les Carpates, où se situe l'intrigue,
mais s'est énormément documenté grâce à la bibliothèque de la Royal Geographical
Society qui comportait énormément de livres et de documents concernant ce qu'il
appelle "l'extrême Europe" et ses croyances. C'est ainsi qu'il découvrit le personnage historique qui allait être le ciment de son œuvre: Vlad Tepes Draculea, troisième
du nom, voïvode (ou commandant) de Valachie, petit royaume coincé entre l'empire
Ottoman et la Transylvanie à l'époque de son règne, au 15e siècle. Plus connu sous
le nom de l'Empaleur, à cause de ce qu'il faisait subir à ses ennemis, il est toujours
en Roumanie un symbole de résistance acharnée contre l'invasion turque. Le tyran
symboliquement assoiffé de sang l'est devenu pour de bon sous la plume de Stoker.
Bram Stoker s'inscrit avec ce roman dans la mouvance des auteurs néogothiques,
comme d'autres auteurs qui lui sont contemporains: Stevenson avec Docteur Jekyll
et Mister Hyde, Sheridan Le Fanu avec Carmilla, Mary Shelley et Frankenstein.
L'époque est à la débandade des valeurs victoriennes, qui culmine avec les crimes de
Jack l'Eventreur. Le contexte est donc propice et Dracula est un immense succès
populaire. Si ce roman épistolaire est son œuvre la plus connue, il en a pourtant écrit
beaucoup d'autres, ainsi que des nouvelles, comme L'homme de Shorox, Les contes
de minuit, Le géant invisible ou des versions alternatives de Dracula, comme
L'invité de Dracula, une réécriture du premier chapitre publiée par sa femme à titre
posthume, en 1914. Ce ne sera que la première d'une longue série d'adaptations du
mythe, surtout au cinéma, où les films estampillés Dracula ne se comptent plus.
En 2009, l'œuvre originale a même eu droit à une renaissance grâce à Dacre
Stoker, l'arrière petit-neveu du créateur, qui a coécrit une suite au livre original,
Dracula l'Immortel. A sa mort, Bram Stoker a demandé à être incinéré, sans doute
pour s'éviter la non-mort qu'il a infligé à son personnage. Après tout... on n'est jamais
trop prudent (Lire aussi en page 57).
Marianne Delaforge
L
L'Homme sauvage
A
Mohacs, en Hongrie, pendant les Jours Gras, les habitants s'affublent de
masques effrayants et cornus, de diable ou d'animal, certains peints avec
du sang de boeuf. A Palanca, en Roumanie, au cours des fêtes du Nouvel
An, les hommes remontent les rues portant des faciès d'ours, de cerf et de cheval et
les peaux de ces animaux. Dans toute l'Europe se déroulent des fêtes dédiées aux animaux et à la sauvagerie: des hommes y prennent l'apparence d'un bouc, d'un cheval
ou d'un cerf, nos plus vieux totems. Ils s'affublent de tenues faites de corne, de peau,
d'ossements ou de branchage. Ils veulent s'"ensauvager". Exorciser leurs forces intérieures. Un livre troublant, voire dérangeant, du photographe Charles Fréger montre
ces hommes décidés à renaître dans une peau de bête. Chacune des images sidère.
Wilder Mann ou la figure du sauvage, photographies de Charles Fréger.
Thames&Hudson, 272 pages, 32 €.
Connaissance et découverte
Les NOUVELLES de ROUMANIE
Mémoire
Pour boire un verre en ville sous Ceausescu… il fallait vraiment le vouloir
Bars et restaurants sous haute surveillance
Avant l'heure, ce n'est pas l'heure; après l'heure, ce n'est plus l'heure. Sous Ceausescu, on ne plaisantait pas avec les
horaires d'ouverture des bars et autres débits de boisson. Ils étaient très réglementés et surveillés. Ouverts de dix heures
du matin jusqu'à 22 heures - minuit pour certains -, il ne fallait pas oublier de consulter sa montre pour éviter de tomber
sous les foudres des contrôleurs. A cette époque, le choix des boissons était limité. Il n'empêche qu'aujourd'hui leur goût
n'a d'égal que la nostalgie qu'elles peuvent susciter.
L
es amateurs de distractions arrosées
huit heures du matin, le chef de salle passait en
n'avaient accès, dans les villes, qu'à
revue les ongles, les cheveux, le costume, les
un nombre réduit d'établissements,
ustensiles. "Et il fallait avoir en tête l'inventailesquels étaient soumis à un horaire contraint.
re du bar et de la cuisine, raconte un ancien
La plupart fermaient à 22 heures. "On n'avait
serveur. Un trou inexpliqué dans les réserves
plus le droit de servir une demi-heure avant la
et la direction pouvait enlever toutes les tentufermeture. Et, à l'heure dite, le bar devait être
res, y compris celles des fenêtres, pour découvide. La police faisait le tour des bars et resrager les détournements de marchandises ou
taurants et soumettait les responsables contreles manœuvres malhonnêtes. Nous n'avions
venants à un interrogatoire en règle", raconte
droit qu'à des voilages si bien que les badauds
Nicolae, barman vétéran de l'ère communiste.
qui passaient sur le trottoir ne se gênaient pas
Bien entendu, aucun de ces établissements
pour reluquer les consommateurs à l'intérieur.
n'était privé. Les contrôles de police étaient
C'était assez pénible pour les clients".
stricts, et pas seulement le soir. "Nous n'avions
explique Relu, ancien chef de salle dans un
pas le droit de servir de l'alcool avant dix heuLa sobriété d'une étiquette de restaurant de quartier.
"vieille prune" sous Ceausescu
res du matin. Les contrôleurs venaient le soir,
"Certains soirs, les restaurants étaient
à la fermeture, relevaient le stock des bouteilles et pouvaient
plein à craquer. Il fallait faire cinq fois le tour de la ville pour
revenir le lendemain, avant l'ouverture, pour vérifier si nous
pouvoir boire une bière ", se souvient Victor, étudiant à Cluj
avions commencé à servir", s'amuse Nicolae. Il admet néanNapoca dans les années 80. "Dans les établissements les plus
moins que ceux qui voulaient commencer leur journée incosélects, comme celui de l'ancien hôtel Continental, on ne nous
gnito, avant dix heures, en avalant un cognac* Zarea ou
recevait pas si on ne connaissait pas un barman ou un serDobreta, avaient recours à diverses combines.
veur".
"Et de toute façon, les bars fermaient de bonne heure,
Serveurs passés en revue chaque matin
explique son acolyte Dan. Nous nous retrouvions ensuite au
cimetière central où au jardin botanique pour continuer la soiRares étaient les établissements qui proposaient des
rée. On avalait des "Vraja Marii", une boisson écœurante au
alcools d'origine étrangère comme le whisky. Outre le cognac,
goût d'orange, jusque tard dans la nuit". Souvent, la soirée se
les Roumains devaient se contenter des traditionnelles eaux de
poursuivait chez un ami… et là, on oubliait l'heure.
vie - tsuica, palinca ou slibovitsa -, et de bière locale à la presYves Lelong
sion ou en bouteille, souvent servies avec des cacahuètes non
*Cognac: "coniac" en roumain. La production roumaine
décortiquées.
de "coniac" utilise le procédé français de distillation, une
On ne rigolait pas non plus avec la tenue des serveurs. A
mention précisée sur l'étiquette.
Dialogues croisés par Mircea Udrescu et Michel Masé
M
ircea Udrescu, archéozoologue et paléontologue à Bucarest, puis en Belgique, et Michel
Masé (pseudonyme de Michel Maes, administrateur de Bruocsella - România ASBL) ont
publié aux éditions universitaires de Bucarest un petit fascicule reprenant une multitude
de récits, de textes divers rédigés par les deux amis; l'un raconte ses expériences d'émigré, ses découvertes d'un monde nouveau et aussi ses relations avec ceux qui restés au pays; l'autre narre ses aventures en Roumanie lors de la conduite de convois humanitaires et en Belgique avec des expatriés roumains. Chacun s'exprime dans sa langue d'origine, suivie immédiatement par sa traduction. Ce livre
n'est pas écrit comme un roman, quoique certains des textes soient romancés. Il s'agit d'un ensemble de
récits n'ayant pas de rapports les uns avec les autres, certains amusants, d'autres critiques.
Ce livre n'est distribué que par courrier et dans certaines librairies de Bucarest. Si un exemplaire
vous intéresse, vous pouvez vous adresser à Michel Maes par mail [email protected]. Le livre
coûte 8 € et les frais d'envoi pour la France se montent à 7 €. Un virement de 15 € au compte IBAN: BE20 1148 7586 4056, BIC:
BKCPBEB1BKB de Michel Maes - Anderlecht et le livre vous sera envoyé dans les jours qui suivent.
43
Connaissance et découverte
Les NOUVELLES de ROUMANIE
Explorateurs
SAPÂNTA
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BAIA
MARE
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CHISINAU
IASI
ORADEA
BACAU
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TIMISOARA
GALATI
PITESTI
CRAIOVA
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BUZAU
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n
BUCAREST
l
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SLOBOZIA
CONSTANTA
l
Voyageurs
et explorateurs
roumains méconnus
44
françaises, le Polytechnicien est devenu un grand explorateur
a mis en valeur la Terre de Feu et Ushaïa
l
BRASOV
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Connaissance et découverte
l
TARGU
MURES
ARAD
Iuliu Popper
SUCEAVA
l
Elevé par des "nounous"
Les NOUVELLES de ROUMANIE
Comme d'autres nations, les Roumains furent curieux du monde, qu'ils
explorèrent de l'équateur presque
jusqu'aux pôles. Des odyssées
méconnues même en Roumanie où
certains mythes tels "Maitreyi"
occultent d'autres aventures.
Les aspects méconnus de la
Roumanie pourraient être classés en
deux grands ensembles: les réalités
ignorées des Roumains eux-mêmes,
et les réalités inconnues aux étrangers. Il existe un merveilleux florilège
de clichés occultant ces réalités; il
vaut le coup d'être étudié, ne fut-ce
que pour ce qu'il dévoile des enjeux
sociaux, politiques, économiques et
psychologiques qui gouvernent le
destin des nations.
Le thème des voyageurs et explorateurs roumains appartient à ces
deux ensembles simultanément, car
à part Emil Racovitsa, inventeur de la
spéléologie (en Roumanie, l'opinion
ne connaît en général que le nom),
les autres restent dans l'ombre, aussi
bien dans leur pays natal qu'à l'étranger.
Il faut savoir qu'avant 1939
comme aujourd'hui, la Roumanie
était partie prenante du processus de
développement mondial et européen,
sans hiatus, sans isolement à l'intérieur des frontières, sans destruction
ni déstructuration sociale, culturelle
et économique. Elle connaissait alors
une structure politique et une évolution sociale semblables à celles des
autres pays européens. Et elle était
plus prospère, mieux alphabétisée et
moins inégalitaire que l'Italie du Sud
ou l'ouest de l'Espagne.
(suite page 46)
Certains commentateurs "germanopratins"* du film "Tierra del Fuego" de
Miguel Littin (1999), dont le scénario est (très vaguement) inspiré par Iuliu Popper
(1857-1893), auraient du mieux se renseigner sur les origines de cet explorateur,
avant de le traîner dans la boue: leurs appréciations auraient peut-être été plus
objectives s'ils avaient fait ce travail. Mais, le prenant pour un Roumain ordinaire
(c'est-à-dire, à leurs yeux, forcément "bête et méchant"), ils se crurent obligés de le
noircir… Or Iuliu Popper est tout sauf un "Roumain ordinaire"…
F
ils de Neftalie Popper , antiquaire fort connu dans le Bucarest de l'époque de
Caragiale et d'Eminescu, Iuliu Popper a eu des nounous françaises, et dans sa
famille on parlait le ladino, langue proche de l'espagnol. Cela va évidemment
bien servir à notre futur explorateur, que son père envoie à Paris suivre les cours de l'École Polytechnique. Il en sort ingénieur en 1879 à 22 ans. D'où, embauche à la
Compagnie du Canal de Suez, où il s'ennuie rapidement, et qu'il quitte pour prospecter les opportunités
du marché du travail en Inde, en Chine, au Japon, en
Sibérie, avec de fréquents retours sur Bucarest entre
ses voyages.
Popper n'est pas seulement un jeune ingénieur
en quête d'un destin: c'est aussi un géographe, un
ethnologue et un naturaliste qui envoie à ses correspondants, dont George Lahovary, président de la
Société de Géographie, des comptes-rendus
détaillés de tout ce qu'il observe durant des voyages.
Finalement, en 1883, il travaille à la NouvelleOrléans sur les aménagements portuaires, travail
qu'il poursuit ensuite à La Havane. Ce contrat fini, il
publie plusieurs reportages géographiques au
"Diario de las Forasteros", à Mexico. Il voyage aussi au Brésil.
Le Roumain découvre des mines d'or
bat monnaie et imprime des timbres
Lors d'un séjour à Buenos-Aires, il est coopté membre de la Sociedad Geografica
Argentina, qui lui demande de prospecter la géologie du sud du pays : Patagonie et Terre
de Feu semblent prometteuses, mais restent encore très mal cartographiées. A la tête
d'une expédition navale et terrestre de 18 hommes, il s'acquitte si bien de cette tâche
(tout en envoyant les doubles de ses comptes rendus à Bucarest) qu'en 1886 il reçoit
mandat du gouvernement argentin pour mettre en valeur la Terre de Feu.
C'est l'époque (fort mal) décrite par les "westerns": installation de ranchs, mise en
culture, développement des élevages, ouvertures de mines, conflits avec les autochtones
amérindiens, érection d'écoles et d'églises, immigration européenne, tout y est.
Popper découvrit de l'or, exploita 5 mines, battit monnaie pour payer les mineurs,
imprima des timbres "Tierra de Fuego" (rarissimes), transforma la petite mission
d'Ushuaia en ville et couvrit le pays de villages. Il étudia et décrivit la géologie, la flore,
la faune et les peuples autochtones, envoyant des comptes-rendus au gouvernement
argentin et aux Sociétés de Géographie de Buenos-Aires et Bucarest. Il donna parfois
des noms roumains aux lieux (Colonia Carmen Sylva, Cabo Sinaia…).
Assassiné dans sa chambre d'hôtel
El senor Julio Popper n'était ni meilleur ni pire que les autres blancs. Il lui est
arrivé de faire tirer sur des guerriers Onas, chasseurs de guanacos craints de leurs voisins Cauashcars e t Yaghans, et peuple de guerriers indomptables qui refusaient tout
compromis, attaquant systématiquement les blancs (logique:
les Onas avaient été jusque-là le peuple dominant, or les blancs
tentaient de les supplanter).
Mais il a aussi fait ouvrir des écoles pour les Cauashcars
et les Yaghans, qui commencèrent alors à se métisser. A la fin
du XIX ème siècle, rares étaient les Européens ou les
Américains qui se disaient que les cultures indigènes étaient
une richesse à respecter; pour tous les blancs, le meilleur bienfait à apporter aux autochtones était de les "civiliser" en les
christianisant et en les européanisant…
En 1890 sa mission est achevée: il rentre à Buenos-Aires,
fait des conférences à la Sociedad Geografica Argentina et
publie des livres sur la Terre de Feu. Simultanément, il cherche à nouveau de l'or, cette fois au nord de l'Argentine, où il
entre en concurrence avec d'autres prospecteurs (déjà dans le
sud, il avait eu maille à partir avec des orpaillages sauvages et
des braconniers qui tentaient de contourner son mandat).
En 1893, à 36 ans, il préparait une expédition antarctique
à bord de l' "Explorador " lorsqu'il fut assassiné dans sa chambre d'hôtel; on ne sut jamais par qui et pourquoi, mais les
suspects étaient nombreux.
Ion Cepleanu (Roumanie Magazine)
*Qu'est-ce qu'un "critique germanopratin" d'après Ion Cepleanu? C'est une personne qui a les moyens d'habiter à SaintGermain des Prés, qui n'aime les films à histoires d'amour que si celles-ci finissent mal, qui n'apprécie l'humour que s'il est "grinçant ", qui trouve Disney "sirupeux" bien que ses dessins animés soient pleins de sorcières et de fureur, qui parmi les Marguerites
préfère Duras la cynique à Yourcenar l'humaniste, parmi les éducateurs Piaget à Freinet, et parmi les psychanalystes Lacan à
Dolto. Le "critique germanopratin" ne pardonne pas aux Américains d'avoir libéré la France, "préfère se tromper avec Sartre que
d'avoir raison avec Aron", et en veut davantage à ses parents et à son éditeur de n'avoir pas été marxistes, qu'à Staline et Mao d'avoir tué des millions d'innocents. D'ailleurs pour le "critique germanopratin", personne n'est innocent, à part lui-même et, peutêtre, les victimes de Hitler. Mais son aire d'habitat est réduite: la plupart des représentants sont concentrés dans le périmètre des
4 ème, 5 ème et 6 ème arrondissements de Paris.
Chasseurs, photographes, ethnologues et naturalistes
les Ghica-Comanesti ont inventé le safari
Un père et un fils sur les traces de Rimbaud
M
oldaves et boyards, les
Ghica-Comanesti
père
(1840-1889, mort à 49 ans)
et fils (1875-1921, mort à 46 ans) étaient
avant tout chasseurs, écumant les forêts
moldaves et le delta du
Danube. Là aussi il faut rappeler que de leur temps, l'homme
ne connaissait encore que deux
types de relations avec l'animal
: domestication et exploitation,
ou bien destruction et chasse.
C'est à Londres que l'idée
de se lancer dans un safari africain est venue aux GhicaComanesti, et c'est là qu'ils préparent leur expédition et achètent le meilleur matériel.
Mais les Ghica-Comanesti
ne sont pas de simples chasseurs : membres de la Société
de Géographie de Bucarest, ils
sont photographes, ethnologues et naturalistes notant et décrivant tout ce qu'ils
voient. Partis par mer de Trieste, en 1895,
ils visent le pays où Rimbaud avait fait
du trafic d'armes, d'esclaves, de perles et
d'épices quelques années auparavant: la
Somalie, alors convoitée par la France, la
Grande-Bretagne et l'Italie, mais dont
l'intérieur reste insoumis. Ils débarquent
à Berbera et parcourent l'arrière-pays,
encore humide (il y avait des sources, de
la savane arborée, et les animaux qui
actuellement ne survivent plus que dans
les grands parcs du Kenya et de
Tanzanie). Nous avons grâce à eux une
description détaillée de l'état du pays il y
a 110 ans, et nous pouvons ainsi évaluer
les progrès de la désertification. Une partie des collections et des animaux naturalisés du Musée Antipa de Bucarest leur
est dûe. En 1899, Nicolae se rend également au Maroc, qui est alors encore un
sultanat indépendant.
Partout,
les
GhicaComanesti décrivent la géologie, la flore, la faune et les
populations, précisent la cartographie, puis publient à leur
retour deux livres: Un voyage
en Afrique et Cinq mois au
pays des Somalis, traduits
aussi en français. Une quinzaine d'espèces nouvelles reçoivent des noms roumains.
En 1910 et 11, Nicolae
Ghica-Comanesti parcourt en
tous sens l'Amérique du Nord,
allant jusqu'à Kodiak en
Alaska. De ces voyages aussi,
il ramène une riche moisson de notes et
d'observations. Il mourra dix ans plus
tard, à moins de 50 ans, comme son père,
les deux étant sans-doute victimes des
fièvres tropicales.
Ion Cepleanu (Roumanie Magazine)
45
Connaissance et découverte
Les NOUVELLES de ROUMANIE
Basil Asan rêvait de doter
la Roumanie de possessions lointaines
Explorateurs
SUCEAVA
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ORADEA
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BUCAREST
l
(suite de la page 44)
Renouveau après 1989
46
Carnet de route
l
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PITESTI
Connaissance et découverte
l
CAMPULUNG M.
ARAD
l
BAIA
MARE
Les NOUVELLES de ROUMANIE
De 1921 à 1938, la Roumanie fut
une démocratie parlementaire. Tout
cela aussi fait partie des réalités peu
connues de l'histoire roumaine. Et
comme d'autres pays Européens, la
Roumanie avait une Société de
Géographie fondée en juin 1875, qui
encourageait, finançait et publiait les
explorateurs de l'époque. Elle cessa
ses activités en 1942.
Ion Cepleanu, dans les portraits
qui suivront, s'est limité à la période
1850-1939 car les périples du diplomate moldave Nicolae Milescu au
service du Tsar russe Alexeï, qui
l'ont mené de Paris à Pékin en passant par Stockholm, sont assez
connus grâce à ses nombreux
ouvrages (dont un traité de théologie
janséniste imprimé à Paris en 1669).
Chacun sait que le demi-siècle
1939-1989 était peu propice aux
voyages d'exploration des
Roumains. Durant cette période, le
seul explorateur d'origine roumaine
qui a pu se mouvoir librement fut
Ioan Dragescu, du Muséum national
d'Histoire naturelle de Paris, qui parcourut l'Afrique de long en large,
appareils photo et caméra au poing.
Ses innombrables images remplissent les livres animaliers français
des années 50, 60 et 70. De
Roumanie, seuls Mihai Basescu,
océanographe, et Nicolae Botnariuc,
zoologiste, furent autorisés à participer exceptionnellement à des expéditions vers l'Afrique. Après 1989,
les frontières roumaines s'ouvrirent à
nouveau et il suffit de lire les média
roumains actuels, et notamment l'édition roumaine du National
Geographic, pour avoir une bonne
idée des nombreux explorateurs roumains d'aujourd'hui.
V
oici un demi-siècle, survivait rue de l'Olympe, aux pieds de la Métropolie
de Bucarest, une dame fort âgée qui fumait sans cesse à travers un portecigarettes et enseignait le français, l'allemand et la culture universelle, d'une
voix éraillée, aux enfants du quartier. En échange, certains parents lui procuraient du
café, des aliments, du savon, du tabac, et elle vivait ainsi, car elle n'avait pas de retraite.
Le bizarre, c'était qu'il fallait l'appeler "mademoiselle" Asan. C'était une sorte de maternelle au noir. Parmi ses livres préférés, il y avait Fram, l'ours polaire de Cezar Petrescu
et Le tour du monde en 80 jours de Jules Verne , "car" disait-elle, "mon père a été sur
la banquise et a fait le tour du monde, lui aussi". Elle racontait aussi de nombreuses histoires d'îles, les unes glacées, d'autres exotiques. Certains pensaient qu'elle affabulait.
Elle est morte dans l'isolement et la misère. Mais tout était vrai. Si mademoiselle Asan
vivait de presque rien, c'est parce qu'elle était la petite-fille de George Asan, l'industriel
qui avait importé la première machine à vapeur en Valachie, en 1853, et la fille de Basil
Asan (1860 -1918), ingénieur et patron de meuneries et d'huileries, mais aussi explorateur, membre de la Société de Géographie et ami de la famille royale. Un véritable
"ennemi du peuple", comme on le voit.
En 1896 et 97, depuis la Norvège, Basil Asan parcourt l'Islande, l'île aux Ours, le
Spitzberg, la Laponie et la banquise arctique; il observe, décrit et photographie les ours
polaires, les phoques, les baleines (et les chasseurs de baleines), l'éclipse solaire du 9
août 1896, puis la nuit et les aurores polaires. Il participe aux préparatifs de la traversée
de l'Arctique en ballon par Auguste Andrée (qui y laissera la vie) et rencontre Fritjof
Nansen sur son navire le "Fram" ("en avant" en norrois).
Basil Asan cartographie les zones méconnues du Spitzberg et baptise une nouvelle
île "Principele Carol" (Racovitsa a aussi découvert et baptisé une île en Antarctique:
c'est l'île Cobalcescu , du nom de cet éminent géologue). A son retour en 1897, il publie
des fascicules abondamment illustrés et donne une série de conférences : en fait c'est
Basil Asan qui inspira à Cezar Petrescu son roman Fram, l'ours polaire, basé sur l'idée
que la place d'un animal sauvage est dans la nature, et que celle-ci mérite notre respect…
En 1898 Basil Asan fait le tour du monde par la Mer Rouge, l'Océan Indien, Ceylan,
la Malaisie, l'Indochine, la Chine orientale, le Japon, les îles du Pacifique et l'isthme de
Panama où il observe les travaux du canal: il en donne des descriptions précises et des
analyses pertinentes, affirmant que le Pacifique est "le futur centre du monde", que les
Etats-Unis deviendront la première puissance industrielle, et qu'ils se confronteront tôt
ou tard avec le Japon ou la Chine. En 1899 il suggère au roi d'envoyer le croiseur
"Elisabeta" prendre possession des quelques îles encore non revendiquées des océans
Indien, Austral et Pacifique, afin de monnayer les droits de pêche dans ces eaux si productives, et d'y exploiter le guano. Mais le roi lui rétorque que le coût du charbon, pour
prendre possession de ces îles et les garder ensuite, grèverait trop lourdement le budget
de la marine roumaine, et que par ailleurs son parent George V "roi des mers", pourrait
en prendre ombrage. Finalement, non seulement la Roumanie n'aura pas d'outre-mer,
mais elle devra céder même sa seule île pélagique (l'île des Serpents en Mer Noire) à
l'URSS en 1948.
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Connaissance et découverte
Les NOUVELLES de ROUMANIE
Carnet de route
Kolkhoze organisé pour les vacances
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FAGARAS
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Mardi 8 mai. - L'avion d'Air-France est bien rempli. Je suis assis à côté de Josette,
une arrière-grand-mère de 80 ans qui part à la découverte de la Roumanie avec Robert,
son mari. Josette ne doute de rien. Hier après-midi, elle était encore hospitalisée à
Chartres pour des problèmes respiratoires. N'ayant jamais consulté un médecin de sa
BUCAREST
vie, elle avait laissé traîner une mauvaise bronchite, nécessitant un internement d'urgence. Devant son insistance, et après un traitement de cheval, les médecins se sont résignés à la laisser sortir. Robert en a été quitte pour retourner à l'agence faire réactiver les
De Budapest à Kaboul
billets annulés quelques heures auparavant.
Mercredi 9 mai.- Bucarest vit à
Josette se sentait investie d'une responsabilité morale. Le désarroi avait déjà gagné
l'heure espagnole. Ce soir le National
la petite troupe de cinq voisins qu'elle avait décidée de l'accompagner dans cette avenArena accueille la finale de la coupe
ture roumaine. Ces agriculteurs ou éleveurs de la Beauce consacrent leur retraite à
UEFA de Foot opposant l'Atletico de
voyager, au rythme de 3 ou 4 périples par an. Tous connaissent déjà le Vietnam,
Madrid à Bilbao. Les supporters ont
l'Egypte, la Turquie, la Thaïlande, l'Afrique du Nord, le Sénégal, le Kenya, le Mexique,
envahi la capitale roumaine qui s'est
le Japon, la Chine, etc. Ils ont fait des croisières, sur le Rhin, le Danube, le Nil, dans les
mises au diapason. Il paraît que cerCaraïbes et effectué au moins 2 ou 3 fois le tour de toute l'Europe, du Cap Nord à
tains se sont trompés et ont pris un
Gibraltar, Madère, sans oublier le Parthénon ou les Pays baltes ! Mais Josette n'a découbillet pour Budapest. Les Bucarestois
vert le Mont Saint Michel, pourtant à seulement deux heures de route, que l'an passé et
regardent avec amusement ces
n'est jamais montée en haut de la Tour Eiffel.
milliers de fans qui coexistent dans la
Voici une trentaine d'années, ces couples amis s'étaient mis en "kolkhoze" pour
bonne humeur et remplissent d'une
organiser leurs vacances. Quand l'un partait, c'est l'autre qui rentrait les foins ou trayait
joie communicative les rues du vieux
les vaches… idem pour le partage des week-ends ou quand il fallait aller au mariage
centre. Les Roumains se montrent
des cousins. "C'est pas avec notre maigre retraite qu'on peut se permettre çà" explique
très fiers d'accueillir pour la première
Josette, "il a fallu travailler dur pour mettre quelques sous de côté". Je pense à la tête
fois un évènement sportif
que feraient les paysans
de cette importance. Ils
roumains en comparant
apprécient aussi qu'il n'y ait
leur vie de misère.
aucun débordement. Les
L'octogénaire me
Espagnols, eux, sont ravis
montre le programme
de payer trois fois moins
qui l'attend.
cher des canettes de bière
Impressionnant…
d'une contenance double!
Tout le tour de RouPour la Fédération
manie en une semaine,
Roumaine de Football, il
avec des étapes en car
s'agit d'un examen de pasde 200 à 300 km, et 4-5
sage décisif, après le désvisites sur le trajet !
astreux Rou-manie-France
Robert, qui marche
d'août dernier, servant d'ipéniblement en s'apnauguration au National
puyant sur ses béquilles
Arena, dont la pelouse s'éne se rend pas compte
tait transformée en champ
de ce qui l'attend. De
de pommes de terre au
Une ambiance bon enfant dans les rues de la capitale lors de la finale de la coupe toutes façons, il garde
de l'UEFA, opposant deux clubs espagnols, l'Atletico de Madrid et Bilbao. le moral… En rentrant,
bout de dix minutes.
L'examen paraît réussi… hormis la
il doit passer sur le billard pour se faire opérer de la hanche.
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BAIA MARE
Par monts et par vaux
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TULCEA
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CONSTANTA
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fausse note du commentateur officiel
de l'UEFA, clamant dans le micro un
quart d'heure avant le coup d'envoi,
histoire de chauffer l'ambiance:
"Bonjour public de Budapest !". Il est
vrai qu'il était à bonne école. A deux
reprises, alors qu'il était en voyage
officiel en Moldavie, visitant Cahul,
ville du sud, Traian Basescu s'était
exclamé "Je suis heureux d'être à
Kaboul" !
Chauffeur de taxi tsigane qui récite Lamartine
Jeudi 10 mai. - En passant devant la Bibliothèque Mihai Sadoveanu, dans le centre, une affiche attire mon regard : "A 15 heures, cénacle sur la poésie franco-roumaine et sa traduction". Comme c'est l'heure dite, je me glisse dans la petite salle de conférence. Une trentaine de personnes patientent sagement. Le plus jeune a dans les 70 ans
et la majorité dépassent les 80 ans. C'est à la fois bouleversant d'attachement à la culture française et saisissant devant les limites de son audience. Pas un seul jeune (c'està-dire moins de 60 ans). "D'habitude, il y en a" me confie l'organisateur, "mais çà doit
être à cause du match"… qui a eu lieu la veille.
Les NOUVELLES de ROUMANIE
Connaissance et découverte
en Roumanie et Moldavie
Vendredi 11 mai.- Je prends un taxi à la volée. Pas la
peine de se priver à Bucarest où on traverse la ville pour 4
euros (et non deux comme le prétendent, avec un certain sens
de l'exagération, les Bucarestois). Mon chauffeur, un Tsigane
costaud à la mine patibulaire, au crâne rasé, en maillot de
corps usé et savates, n'a rien de rassurant. Apprenant que je
suis Français, il devient tout à coup intarissable: Hugo,
Voltaire, Alexandre Dumas, Rostand, Rimbaud, Verlaine y
passent. Il regrette de ne pas parler notre langue mais récite
quand même quelques vers de Lamartine, appris sans-doute
autrefois par cœur. Stupéfait, je n'en garde pas moins un œil
sur la circulation car son enthousiasme l'amène à se retourner
fréquemment, oubliant qu'on est en plein centre de la capitale.
Au moment de se quitter, il ajoute avec une pointe de fierté :
"Mes deux enfants étudient actuellement en France… et eux,
ils parlent bien !".
"Désolé, on a reçu
les bouteilles… mais pas les verres"
Samedi 12 mai.- C'est l'endroit branché du moment.
“Lacrimi si Sfinti” (Des larmes et des Saints), le restaurant du
poète Mircea Dinescu a ouvert ses portes en janvier dernier, à
50 mètres d'Hanul lui Manuc, dans le Vieux Bucarest. Le maître des lieux assure que tous les plats sont confectionnés à partir des produits bio de la ferme qu'il a ouverte près du Danube.
Dinescu s'est rendu célèbre, lors de la "Révolution", apparaissant exalté parmi les siens sur le petit écran.
Beaucoup en gardent l'image d'un pseudo-révolutionnaire
grotesque mais qui a su faire son chemin depuis, accumulant
une fortune confortable. Son affairisme l'a amené dernièrement à être condamné à trois ans d'interdiction d'activités
publiques pour avoir mélangé ses responsabilités au sein de la
commission chargée d'y voir plus clair dans les archives de la
Securitate et ses propres affaires.
Sa table offre une carte qui ne dépare pas la réputation d'original du personnage: maquereau frivole, canard muet, filet de
veau cosmopolite, oie à la juive, champignons calmants,
tarte… scène de ménage. C'est assez cher, pas très copieux,
mais c'est bon et le vin, servi au verre à un prix très abordable
(7 lei), se boit avec plaisir, notamment le Tamaiosa, au parfum
délicat, pour une fois.
Dimanche 13 mai.- Sur les tables de certains restaurants
de Bucarest, mais aussi dans quelques grandes villes de province (Craiova, Focsani, Brasov, Iasi, Cluj) fleurissent de
pétillants dépliants, joliment faits, qui mettent… le rosé à la
bouche. Intitulés "Primavara în rosé" ("Le Printemps des
rosés"), ils invitent à la dégustation des meilleurs crûs rosés du
pays. Au choix, à la bouteille (entre 12 et 16 €) ou au verre (de
2 à 3 €).
Une bonne initiative lancée par le site en ligne Vinul.ro,
relayé par le journal économique Ziarul Financiar qui permet
de découvrir dix (bons) vins différents, le rosé roumain étant
méconnu: Sole roze et Castel Huniade roze (cramele -cavesRecas), Rosé de Purcari (crama Ceptura), Beciul Domnesc
(Vincon Vrancea), Budureasca rosé, Caloian rosé (crama
Le restaurant bio du poète Mircea Dinescu, Lacrimi si Sfinti
(Des larmes et des Saints) est devenu un lieu à la mode.
Son propriétaire "veut réinventer et moderniser la cuisine roumaine".
Oprisor), Pinot noir rosé et Byzantine Euxine rosé (cramele
Halewood), Urlati roze (Domeniile Dealu Mare, Urlati), et le
mousseux Bendis Brut (Petro Vaselo).
Présentant les qualités du rosé, le dépliant rappelle aux
non-initiés qu'il ne s'agit pas d'un mélange de vin rouge et vin
blanc, pratique interdite dans le monde entier, sauf aux USA et
en Australie, mais d'un processus de fabrication spécifique et,
suprême fruit de la tentation, indique que son goût "est aussi
affriolant qu'une belle blonde qui se refuse à vous, tout en vous
faisant du pied" !
Les deux restaurants (roumain et libanais) d'Hanul lui
Manuc, lieu de Bucarest le plus visité par les touristes avec le
palais de Ceausescu, ont décidé de se joindre à la fête. Mais
quand on demande au serveur de déguster un verre, il répond
invariablement que ce n'est pas possible, alors que le dépliant,
où cette possibilité est dûment mentionnée, est bien en vue sur
les nombreuses tables de cet ancien caravansérail. En insistant,
après l'avoir envoyé quérir une explication auprès de sa direction, il revient pour confier: "on a bien reçu les bouteilles…
mais pas les verres".
La Lutwaffe n'aurait pas fait mieux
Lundi 14 mai.- J'entame ma traditionnelle tournée de
mai-juin à travers la Roumanie. Direction Târgu Mures et le
Maramures. En route, je m'arrête saluer deux jeunes français
qui se sont installés près de Sighisoara pour se lancer dans l'agrotourisme. J'ai la mauvaise idée de couper par la Nationale
104 faisant la liaison entre Fagaras et Hoghiz, alors que je quitte un beau ruban de bitume qu'on ne voit pratiquement que
dans les films de Walt Disney. C'est l'enfer! Trois-quatre trous
au mètre carré sur une vingtaine de kilomètres.
Du rarement vu en Roumanie… pourtant emprunté par
nombre de camions qui se rendent à la cimenterie Lafarge, sur
le parcours. Même avec ses pires bombardements, la Lutwaffe
n'aurait pas réussi à faire mieux. Incompréhensible!...
Comment le numéro un mondial du ciment n'a-t-il pu réussir à
décider les autorités à refaire la chaussée, avec toutes les taxes
versées? Une pension coquette, la seule située sur le trajet,
s'insurge à l'aide d'un immense panneau contre ce désastre qui
décourage à l'avance la venue des touristes, alors que l'endroit
est charmant.
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Les NOUVELLES de ROUMANIE
Connaissance et découverte
Erasmus première agence matrimoniale européenne
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Le grand incendie de
Londres, les Anglais...
et le Maramures
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Mardi 15 mai.- Me voilà donc chez le Normand Christophe, 30 ans, manipulateur
en radiothérapie et le Bordelais Charly, 26 ans, ex étudiant en agronomie… qui a rencontré sa femme Anca, voici 6 ans, grâce à la première agence matrimoniale européenne… Erasmus. Son programme d'échanges universitaires l'avait conduit à Sibiu où,
apparemment, il n'avait pas succombé qu'aux seuls charmes de la vieille ville. Anca l'a
décidé à s'investir dans le développement de sa petite commune natale, Saschiz,
2000 habitants. Le jeune couple s'est mis à l'œuvre, se lançant dans l'agrotourisme,
défrichant le terrain entourant sa ferme, se lançant dans la confection artisanale de confiture bio construisant un laboratoire aux normes. Christophe, épris de la Roumanie après
l'avoir découverte grâce à une initiative européenne appelant les jeunes à aller à la rencontre des pays de l'UE en réalisant des interviews et un film vidéo, s'est joint à ses nouveaux amis, apportant son savoir-faire du bocage normand. L'équipe s'est lancée dans la
fabrication de confiture de lait, totalement inconnue ici, et qui a obtenu un vrai succès,
notamment à Bucarest. Les touristes de passage n'hésitent pas à faire un crochet pour
venir s'approvisionner, et maintenant ils peuvent être logés dans leurs chambres d'hôte
ou bien passer commande sur internet (casadepedeal.com).
Jeudi 17 mai.- Si on parle beaucoup de la passion que nourrit le
Prince Charles pour les villages
saxons de Transylvanie, où il se
rend fréquemment, y ayant acquis
Bruxelles a bon dos
des propriétés qu'il s'efforce de restaurer, son intérêt pour le
Les jeunes gens essaient également d'animer la vie du vieux et beau village de
Maramures est moins connu mais
Saschiz, ayant organisé un festival du court métrage, éditant tous les 2-3 mois un jourtout aussi réel. L'héritier de la counal communal, diffusé gratuitement auprès des habitants par la mairie. Ils ont aussi
ronne d'Angleterre a acheté en 2005
expérimenté la lourdeur administrative du pays. Pour chaque activité, il leur fallait prétrois maisons anciennes qu'il a fait
senter un diplôme: de confection alimentaire pour les végétaux, pour les produits d'oriregrouper dans le village de Breb, sa
gine animale (beurre de lait), pour l'accueil (chambres d'hôte), pour la gestion d'entrefondation "Mihai Eminescu Trust"
prise, pour guider et accompagner les touristes. Pendant des mois, l'équipe a dû faire le
étant chargée de les retaper. Les
pied de grue dans les couloirs des administrations, deux-trois fois par semaine… réustravaux sont gelés pour l'instant,
sissant à l'usure à obtenir les autorisations nécessaires. De quoi s'arracher les cheveux
priorité étant donnée au projet
pour Gaby qui, en France, avait créé son auto-entreprise multi-services en deux-trois
saxon, mais le Prince est
jours et un entretien d'un quart
déjà venu deux fois sur
d'heure où on l'avait encouragé à
place. Il a d'ailleurs à noualler de l'avant.
veau séjourné en Roumanie
Encore, les jeunes gens ont-ils
en mai et a été reçu par le
eu la chance de tomber dans un
Président Basescu.
judet où leur persévérance a été
Cet engouement des
prise en compte, ailleurs, ils
Anglais pour le Maramures
auraient pu se heurter à un mur. Ils
est assez rare et ils y vienont expérimenté là un des effets
nent d'ailleurs assez peu,
pervers de l'entrée de la Roumanie
comme si l'architecture en
dans l'UE en 2007 et de la mauvaibois les effrayait, se dirigeant
se interprétation de la réglementaplus volontiers vers les maition européenne. L'administration
sons costauds et en grosses
roumaine impose une application
pierres de Transylvanie.
Le Normand Christophe et le bordelais Charly ont succombé au maximaliste des normes éditées, et
charme tranquille du village saxon de Saschiz, près d'Hunedoara. sans délais, alors qu'en fait une cerUne réminiscence de l'incendie qui avait ravagé
taine souplesse est autorisée. Evidemment, elle en fait porter le chapeau à Bruxelles…
Londres en 1666? En tout cas, cela
Auparavant, au début des années 2000, lorsque le gouvernement roumain a décidé d'enne dérange pas le paparazi à la
courager le développement de l'agro-tourisme, les démarches étaient très simples et on
retraite anglais Duncan Ridgley,
a vu les pensions pousser comme des champignons dans la campagne roumaine.
tombé amoureux de la région. Il y a
acheté plusieurs maisons, qu'il
Regarder à deux fois avant de choisir son candidat
transforme en chambre d'hôtes, se
transformant en ambassadeur du
Mercredi 16 mai.- Des affiches fleurissent sur les murs des mairies du Maramures:
Maramures, invitant à ses propres
"Prenez soin de votre vue… allez la vérifier gratuitement auprès de l'opticien qui sera
frais des journalistes britanniques à
de passage le…. ". Les maires sont ainsi de véritables nounous pour leurs administrés…
venir le découvrir.
un mois avant les élections municipales.
Les NOUVELLES de ROUMANIE
Connaissance et découverte
La campagne est financée au niveau du judet par leur
organisation, une convention lucrative ayant été signée avec le
syndicat des opticiens. Il ne reste plus à l'opposition qu'à inviter les électeurs à venir subir des test auditifs. Les slogans des
uns et des autres sont tout trouvés: "Regardez-y à deux fois
avant de choisir votre candidat", "Il n'y a pas pire sourd que
celui qui ne veut pas entendre vos revendications!".
tables au petit-déjeuner, constituant un véritable réservoir de
calories pour la journée, il paraît qu'elle permet à l'organisme
d'assimiler cette graisse de porc ressemblant à notre saindoux.
Mais, de plus en plus de Roumains possédant désormais une
voiture, le verre de palinca matinal a disparu pour éviter d'être pris dans un contrôle d'alcoolémie. Du coup, les taux de
cholestérol ont bondi.
"Sighet est une véritable bombe!"
5000 litres dans la “palincothèque”
Sighetu-Marmatiei
est encore marquée par
la tragédie qui a
endeuillé la ville en janvier dernier. Une explosion de gaz qui a détruit
une maison juste en face
du Mémorial des victimes du communisme.
Un mort et une vingtaine de blessés. Et, depuis, la peur habite les rues car le réseau
de gaz est troué de partout. "Sighet est une véritable bombe!"
n'hésite pas à affirmer une rescapée.
La catastrophe s'est déroulée un samedi soir, début février.
Quatre jeunes filles s'étaient réfugiées dans les toilettes au
sous-sol d'un disco pour fumer, déclenchant la première explosion qui fera sept blessées. L'entreprise de gaz est venue au
petit matin pour vérifier l'installation. Elle a omis de couper
celui-ci, alors que les badauds s'accumulaient aux alentours,
brûlant cigarettes sur cigarettes.
Dépêchés sur les lieux, les pompiers avançaient dans les
décombre et essayaient de détecter la fuite… en reniflant l'air.
Une seconde explosion retentissait alors, plus destructrice encore, faisant un mort et 16 blessés parmi
lesquels des notables de la ville, le plus gros notaire,
les chefs adjoints de la police et des pompiers, plusieurs de leurs hommes.
La principale victime était le chef même de l'entreprise de gaz, dont certaines sources disent qu'il a
déclenché lui-même l'explosion en utilisant un détecteur hors d'usage, payant ainsi de sa vie son intervention courageuse à la tête des secours. Une injustice
du sort, car il était arrivé depuis peu et s'efforçait de
remettre de l'ordre dans la gestion de la compagnie,
minée par la corruption et l'incompétence, se rendant
très vite compte que la corruption et l'incompétence
étaient ses principales caractéristiques.
On lui avait remis un état des lieux affirmant que "tout va
très bien, Madame la Marquise". Ses employés n'étaient pas
des professionnels du gaz mais des plombiers chargés de réparer les tuyauteries d'eau.
Récemment, la femme d'un ingénieur forestier
qui venait de décéder, a découvert dans sa cave un
véritable trésor: une "palincothèque". Tout au long
de sa vie, sans le dire à quiconque, son mari avait
conservé les plus précieuses palinca que lui remettaient ses obligés: paysans, bûcherons, trafiquants,
etc. Des palinca de fruits sauvages - cerises, poires,
pommes, pêches - qu'il classait et étiquetait soigneusement. Au total, 5000 litres pour une valeur estimée
de 40 000 €. Les acquéreurs se bousculent, mais sa
veuve ne tranche pas, laissant grimper les offres.
Tsuica et cholestérol
Vendredi 18 mai.- La palinca, tsuica doublement distillée, est la marque de fabrique du Maramures. C'est un médicament plaide-t-on sur place en remplissant votre verre. De
fait, accompagnant la slanina qui trône sur de nombreuses
Même les cigognes ne font plus
la pluie et le beau temps
Samedi 19 mai.- "Il n'y a plus de repères !" se lamentent
des paysans. "Avant, on savait quel temps, on allait avoir en
observant les cigognes. Si elles arrivaient tard, cela voulait
dire que le printemps sera pourri, si elles partaient tôt… que
l'hiver sera rude. L'été dernier, elles ont regagné l'Ethiopie dès
la mi-aôut, alors que les petits cigogneaux arrivaient tout
juste à voler… et l'hiver n'est venu qu'en janvier. Là, elles sont
venues faire
leur nid dès
fin mars et le
printemps
n'est
pas
fameux".
P o u r
couronner le
tout, les coqs
qui
chantaient à heures fixe, toutes les 3-4
La palinca, doublement distillée, qui coule tranquillement heures, sauf
de l'alambic, meilleur remède contre le cholestérol ? quand
ils
annonçaient la pluie, en prennent à leur aise et poussent leur
"cocorico" n'importe quand !
En route maintenant pour la Bucovine. La jolie route du
nord, sauvage, est praticable sans problème jusqu'au pied
oriental du col de Prislop. Les ennuis commencent lorsqu'on
entre dans le judet de Suceava, avec un passage difficile sur
une dizaine de kilomètres et une vingtaine plus convenables
jusqu'à l'embranchement de Iacoveni.
Heureusement, sur cette route, ce n'est pas la Lutwaffe qui
a bombardé… mais l'armée roumaine, ce qui a permis d'épargner certains secteurs.
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Connaissance et découverte
Les NOUVELLES de ROUMANIE
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Des amis de trente ans
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Dimanche 20 mai.- Chirurgien en
Allemagne, Roméo avait quitté la
Roumanie en 1988 et n'avait pas revu
depuis Léonard, directeur de l'école de
Manastirea Humorului, son camarade
d'enfance. C'est
chose faite depuis
aujourd'hui, au cours
d'une visite surprise.
Emus et joyeux, les
deux compères se
sont racontés leurs
souvenirs communs,
dont l'un particulièrement cuisant pour
Léonard. Celui-ci
espérait échapper au
service militaire sous
Ceausescu et comptait sur sa forte tension, aux environs
de 17, pour être
réformé. Le règlement prévoyait
qu'au-dessus de 16,
les recrues étaient
affectées aux bureaux et totalement
exemptés au-dessus de 18. Léonard
s'était retourné vers Roméo, dont le
père était déjà chirurgien, lui demandant conseil pour doper un chouia son
propre taux et ainsi couper à la corvée
promise. Revenu avec la réponse,
Romeo lui avait promis un "score" à
20-22, échappant à toute contestation,
s'il absorbait un demi-litre de vermouth, la veille.
Rassuré, après avoir suivi à la lettre
la prescription, Léonard s'était rendu
en toute confiance à la visite médicale
d'incorporation. Verdict: le tensiomètre
indiquait 12-7… et le jeune homme en
a été quitte pour aller crapahuter pendant six mois dans les Carpates, sac
sur le dos, en plein hiver. C'est ce
qu'on appelle des amis de trente ans !
Les NOUVELLES de ROUMANIE
Connaissance et découverte
Un air "léninifiant"
Le 3h10 pour Ulma n'existe plus
Lundi 21 mai.- Me Voilà donc chez Leonard, dans cette bucolique Bucovine qui
me fait toujours rêver, au point d'y avoir envisagé acquérir une maisonnette. Je me
voyais bien là écrire sur ma terrasse, sous les grands conifères bercés par le vent, le
regard vagabondant des ruisseaux descendant de la forêt aux collines verdoyantes s'étalant à l'horizon. L'hiver, près de la cheminée, entendant la neige crisser sous les pas
des voisins venus me rendre visite… Leonard m'en a dissuadé: "Tu t'ennuierais vite,
tu te sentirais isolé. La Bucovine ne serait plus un bonheur mais une corvée car tu te
croirait obligé d'y revenir". Et dans sa sagesse de me proposer plutôt de me dénicher
un petit chalet à louer pour le temps que je veux.
A son tour, Leonard me parle de ses rêves d'enfants, lorsqu'il habitait Suceava et
pas encore Manastirea Humorului. Près de chez lui, une immense cheminée de
200 mètres de haut dominait la ville, crachant les fumées d'une usine de cellulose servant à fabriquer des fibres artificielles, dont de la soie. L'enfant s'imaginait voir la Tour
Eiffel, qu'il ne découvrira que 35 années plus tard. La réalité était plus triste. Les gaz
s'en échappant étaient toxiques, attaquant le cerveau. Les autorités avaient interdit aux
habitants de faire des
analyses pour savoir
s'ils étaient touchés.
Mais le communisme avait aussi ses
joyeusetés. Elena, la
femme de Leonard, se
souvient ainsi que son
grand-père, un bel
homme, qui avait
encore de beaux restes
et conservé quelques
biens, était obligé de
danser avec la femme
du maire… pour payer
moins de taxes locales.
Jeudi 24 mai.- Tête en l'air, en venant dans le coin, j'avais
loupé un panneau à une intersection, continuant ma route, au
lieu de tourner. Je n'avais pas regretté le détour, découvrant un
paysage magnifique, me mettant l'eau à la bouche. J'ai donc
décidé de partir explorer ce chemin inconnu, au départ de mon
hôtel, le Sofia, à Sucevita, merveilleux havre de paix en pleine
forêt, entouré de ruisseaux. Le grand luxe avec piscine couverte, eau à 32 degrés, spa, etc… pour 37 € par nuit (50 € pour
deux). Calme assuré pendant la semaine, le week-end étant
réservé un an à l'avance pour des mariages.
Je prends donc la route de Marginea (célèbres poteries
Château Vartely a la prétention
noires), puis j'oblique en direction d'Ulma, longeant pendant
de concurrencer les vins français
une trentaine de kilomètres la frontière ukrainienne, après un
détour par le monastère de Putna. Voici 20 ans, j'avais écrit que
Samedi 26 mai.- En route pour la Moldavie. Je crains le
le cul de sac d'Ulma avait des allures de bout du monde. On
passage de la frontière, avec ces têtes de gardien de prison des
s'arrêtait net à la frontière soviétique, surveillé aux jumelles
policiers et douaniers qui donnent envie de rebrousser chemin.
depuis un immense mirador. Seul le train conduisait à cet
Mais, bonne surprise, il n'en est rien. L'affaire est réglée en un
endroit perdu, mais depuis la ligne a été supprimée… et le
quart d'heure. En outre, j'ai pu changer immédiatement mes lei
3h10 pour Yuma n'existe plus. C'est un chemin de terre, assez
roumains contre des lei moldaves. Pas la peine de se complicarrossable, qui le remplace. A la frontière, une douane flamquer l'existence, les taux sont pratiquement les mêmes dans
bant neuve, en passe d'être achevée, devrait permettre le pastoute la petite République. Vingt kilomètres plus loin, je m'arsage en Ukraine, peut-être
rête dans le premier magasin
même dès cet été.
Orange rencontré et, pour
Sur le retour, les plus
6 euros, en à peine dix minuaudacieux peuvent obliquer
tes, me voilà doté d'un nouà droite à Brodina et découveau numéro sur mon portavrir ainsi sa vallée. Un parble qui me permet de télécours fabuleux au cœur
phoner une heure dans tout
d'une nature sauvage, qui
le pays et une autre dans le
mène à Moldovita, son
monde entier !
monastère, sa mocanitsa,
ancien petit train des bûcheDimanche 27 mai.rons qui promène les tourisEtape au Château Vartely,
tes sur une quinzaine de
qui s'enorgueillit de son
kilomètres le samedi et le
appellation à la française. Ce
dimanche, la voie ferrée
domaine viticole est le plus
Château Vartely, du nom d'une propriété viticole, est l'un des endroits les
ayant été restaurée par des
plus huppés de Moldavie, où l'on vient se marier ou faire baptiser les moderne de la Moldavie et
enfants, au cours de fêtes animées par des groupes folkloriques. produit 3 millions de bouAutrichiens. On peut ensuite
regagner l'hôtel Sofia par une route non moins splendide, au
teilles par an, dont 90 % à l'exportation, d'un vin de grande
terme d'un périple de 100-150 km qui prend la journée entière.
qualité élaboré pour plaire au goût occidental. Il ne cache pas
son ambition de concurrencer les crûs français. On y favorise
Vendredi 25 mai.- Je me plonge dans les dépliants mis à
la culture des cépages secs, merlot, chardonnay, cabernet-saudisposition des visiteurs à l'entrée du monastère de Putna, prinvignon, feteasca, blanc et rouges, à l'opposé des consistances
cipal centre de l'orthodoxie roumaine, que j'ai collectés la
sucrées et lourdes des vins russes, dont la Moldavie était le
veille. C'est édifiant. On y apprend que prendre la pilule peut
premier fournisseur.
conduire les femmes au cancer du sein, de l'utérus, du foie, à
Le domaine, à la table réputée, héberge aussi les touristes
l'augmentation du taux de cholestérol, à l'hypertension, à l'indans de coquettes villas qui permettent un séjour reposant en
farctus, à la thrombose, au diabète, à l'assèchement de la rétipleine nature, avec un merveilleux paysage que l'on peut
ne, aux grossesses extra-utérines, à l'infertilité. Sans préciser
apprécier des terrasses fleuries tout en dégustant un verre de
toutefois si on a le choix ou s'il faut tout prendre. L'usage de la
vin de glace, confectionné à partir des premiers grains de raipilule est présenté comme étant en fait une forme déguisée d'asin gelés. On peut aussi visiter la cave (compter au minimum
vortement. Un argument massue est avancé en direction des
une quinzaine d'euros par personne, mais on emmène avec soi
"pécheresses" qui resteraient malgré tout sceptiques: "Vous risles bouteilles ouvertes; intéressant, mais on peut s'en passer).
quez de perdre votre libido !".
C'est un peu cher (60 € la nuit par personne, 90 € pour deux),
Cette littérature abondante décrit aussi l'avortement
comme dans tous les pays de l'ex URSS, mais on ne regrette
comme une horreur, avec des photos choc, promet mille fléaux
pas le séjour.
Mardi 22 mai.Elena me confie comQuel bonheur de se perdre dans les vallées de Bucovine ! bien elle est étonnée
par la décontraction
des Français qui prennent pension chez eux. "Ils plaisantent toujours. On dirait des
enfants heureux, sans problèmes, auxquels il ne peut rien arriver". Et c'est vrai. Estce le climat lénifiant, de la Bucovine… ou plutôt une vie sans trop d'histoires, là-bas,
à l'autre bout du continent? Ici, c'est l'air "léninifiant" que l'on supporte encore, avec
ses injustices, ses colères rentrées, son stress permanent de la vie quotidienne.
Un chien qui a une mémoire d'éléphant
Mercredi 23 mai.- Il faut se méfier des chiens de bergers, le fameux cioban moldovenesc. On aurait envie de glisser les mains dans son pelage abondant, de le caresser… Mais gare ! Ces chiens ont été dressés pour être méchants et les moutons doivent les haïr, à moins qu'ils ne soient paralysés de terreur. Leonard garde le sien enfermé pendant la journée dans un chenil de sa construction. L'hiver, quand il fait - 20 et
que le village est recouvert d'un épais manteau neigeux, il le lâche dans la nature. Là,
il retrouve ses "compères". Ensemble, ils font la fête, se roulent dans la neige, aboient,
se battent et vont se coucher dans le foin, sous un hangar isolé.
Le cioban de Leonard a, en outre… une mémoire d'éléphant. S'il est attaché, c'est
qu'il se jette sur le voisin qui lui a lancé un seau d'eau froide quand il était petit, ou sur
le beau-frère qui lui a donné, voici bien longtemps, un coup de pied au c…. Même le
vétérinaire qui lui avait fait des piqûres de fortifiant autrefois doit subir sa vindicte.
à celles qui y recourraient, présente les ravages de la pornographie comme plus graves que ceux du cancer, le divorce comme
la plus triste expérience de la vie. Revenant à un registre moins
culpabilisant, deux ou trois dépliants insistent sur les effets
néfastes de l'usage trop intensif de la télévision et d'internet et,
d'autre part, sur la présence nécessaire des parents auprès de
leurs enfants. Enfin, les jeunes filles enceintes sont vivement
invitées à venir prendre conseil auprès de l'Eglise et de ses
associations proches pour discuter d'une solution si elles ne
peuvent garder leur futur enfant… comme les abandonner
dans une institution, bien que cela ne soit que suggéré.
53
Les NOUVELLES de ROUMANIE
"Noi suntem Romani"
Mardi 29 mai.- Les noces se succèdent au château Vartely. Deux au
cours de la même soirée. Tout le
monde est sur son trente et un.
Impressionnants talons-aiguilles pour
les filles dont les tenues élégantes
soulignent encore davantage la
beauté proverbiale. Les jeunes
mariées sont éblouissantes dans
leurs robes de tulle et leurs longs voiles. Leurs promis font un peu
patauds, surtout quand ils ont le
crâne rasé.
54
Moment bouleversant quand l'orchestre attaque "Noi, suntem
Romani" (Nous sommes Roumains),
repris avec une ferveur rentrée par
toute la noce, comme une prière se
lisant sur les lèvres. On en est tout
remué. La Moldavie va-t-elle un jour
retrouver sa grande sœur roumaine ?
La réponse appartient à son ancien
maître. On ne peut qu'espérer la voir
rejoindre l'Union Européenne et, par
ce biais, se rapprocher encore plus
de sa famille de cœur.
Connaissance et découverte
Les NOUVELLES de ROUMANIE
A Orhei, le chemin de croix de la Moldavie
Un passeport bleu
Lundi 28 mai.- Comme Orhei, les villes traversées se ressemblent toutes.
Alignées, sur de larges boulevards proprets et ombragés, typiques de l'ancienne puissance tutélaire, on y trouve des pharmacies à profusion, des salons de coiffure pour
dames bien remplis, des banques, avec l'inévitable Western Union, afin de recevoir les
virements des parents partis à l'étranger, des casinos-salles de jeux. On ne risque pas
de tomber en panne d'essence dans le pays… avec une station tous les 5 kilomètres. On
se demande pourquoi… les voitures ne se bousculent pas. Les vieilles Lada et Moskovitch ont pratiquement disparu. Place aux berlines occidentales que conduisent fièrement ceux qui sont allés "faire fortune" à l'étranger ou reviennent pour les vacances.
Choc en me promenant dans l'artère principale d'Orhei. En cinquante mètre, trois
monuments aux morts se succèdent, illustrant le chemin de croix vécu par la Moldavie
au cours du XXème siècle. "Gloire à nos Héros" évoque le sacrifice des plus de
500 soldats de la région tombés face à l'armée allemande de juin 1941 à 1945.
Pratiquement tous les noms sont à consonance russe. Juste à côté, une stèle est dressée
en souvenir des 32 enfants du pays envoyés par Moscou à Tchernobyl pour lutter contre l'incendie qui a ravagé la centrale nucléaire en avril 2006 (notre photo). La
Moldavie était alors une république de l'URSS. Tous les noms de famille sont roumains. Les premiers sont décédés des radiations dès 1991, la majorité vers 2002, le
dernier l'an passé… mais la liste est-elle close ?
Enfin, une imposante composition somme le passant de ne jamais oublier. "Adevar
istorie nemurire"! Les crimes de Staline et du communisme sont là. 1288 déportés
entre 1940 et 1941, à la suite du pacte germano-soviétique qui a permis à Moscou de
faire main basse sur la Moldavie, appartenant à la Roumanie à l'époque, profitant de la
défaite française. Ils ne sont jamais revenus, pour la plupart morts dans des camps ou
fusillés, les enfants étant transformés en petits pionniers du
communisme. 3261 en 1949, lors d'un nouvel épisode de la
terreur stalinienne dont 846 hommes, 1377 femmes et
1405 enfants.
O, neamale tu/ Adunat gramajora/ Ai putea se incapi/
intra singura icoana (Oh toi mon Peuple/ Rassemblé tout
entier/ Tu pourrais t'incarner/ dans une même icône): la
citation du grand poète national Grigore Vieru, mort voici
un peu moins de trois ans, y fige dans la pierre le destin tragique du pays.
Jeudi 31 mai.- Bobeica me donne l'occasion de faire
connaissance avec Maria, l'ancienne directrice du lycée, à la
retraite depuis un an, mais qui donne un coup de pouce à ses
anciens collègues de français pour suppléer, dix heures par
semaine, au manque de professeurs. Le français doit énormément à cette jeune sexagénaire, pleine d'entrain, énergique et
rieuse. Les échanges franco-moldaves ont été la grande aventure de sa vie, reconnue par la France, l'ambassadrice à
Chisinau lui ayant remis les palmes académiques.
Mercredi 30 mai.- Rencontré près de Suceava, un couple d'enseignants retraités d'Echiré, dans la région de
Parthenay, dans les Deux Sèvres, m'a conseillé d'aller rendre visite à ses amis de Bobeica, à une cinquantaine de kilomètres de Chisinau. Son premier voyage en Roumanie
remonte à l'époque de Gheorghiu Dej, voici près de 50 ans.
La longue éclipse ceausesciste l'a tenu longtemps éloigné de
la région, ses incursions y reprenant après la "Révolution".
La retraite a alors conduit Jean et Mado Cantet à partager leur expérience avec
leurs collègues moldaves, rejoignant ainsi l'action menée sur place par Solidarité
Laïque. Pendant plusieurs années, le couple est venu passer deux mois dans cette commune rurale de la petite République. Le résultat est saisissant.
Les 700 élèves du lycée continuent de choisir le français comme première langue,
enseigné par quatre professeurs, dont les deux directrices qui se sont succédé. Toutes
ont effectué le voyage à Parthenay, ce qui est loin d'être partagé en Moldavie, où moins
d'un dixième des 2300 enseignants de français ont eu l'occasion de découvrir la France.
Bobieca est même devenu la plate-forme de l'Alliance française pour le secteur et son
lycée reçoit des revues pédagogiques, envoyées également depuis Echiré. Tous les ans,
deux élèves ou professeurs effectuent une visite et un séjour de deux semaines, dans
chaque sens et une délégation de pompiers de Parthenay était attendue en juin.
Exemplaire, mais malheureusement encore trop rare en Moldavie.
Les 700 élèves du lycée de Bobeica choisissent toujours le français
comme première langue étrangère, grâce à l'investissement de leurs
professeurs (dont Maria, au 1er rang à droite) et l'aide fournie
depuis la région de Parthenay, dans les Deux Sèvres.
Dans l'histoire, Maria a "perdu" une de ses filles, mariée à
un Français et désormais établie à La Rochelle, le couple ayant
un enfant. Etudiante brillante, parlant 5 ou 6 langues, elle a
passé ses examens à La Sorbonne. Revenue au pays, son université a voulu la contraindre à recommencer son apprentissage du français… par l'alphabet.
Révoltée par cette bêtise, la jeune femme est retournée en France pour être confrontée à une aberration du
même genre: la "défunte" circulaire Guéant qui interdisait aux étudiants étrangers de travailler à la fin de leurs
études, faisant fuir toute une élite vers d'autres cieux et
nous a valu une réputation détestable dans les pays où la
France faisait figure de référence.
Grâce à la solidarité de Français à l'esprit plus
ouvert, la Moldave a pu survivre grâce à des petits boulots… jusqu'au jour où un bateau russe, confronté à un
problème d'assurance, s'est retrouvé immobilisé dans le
port rochelais de La Pallice, faute d'interprète dans la
région. La jeune femme a débloqué la situation à la
satisfaction générale… la compagnie d'assurance, ravie,
l'a embauchée sur le champ, et elle y exerce déjà des
fonctions importantes.
Réunies autour de moi, les professeurs de français
de Bobeica me racontent leurs aventures en France. Celles qui
ont la double citoyenneté moldavo-roumaine, ne rencontrent
pas de difficultés aux frontières. Elles possèdent un passeport
de couleur Bordeaux, comme les autres citoyens de l'UE et
elles passent dans la masse des autres voyageurs. Mais les
"pures" moldaves disposent elles d'un passeport bleu qui les
font immédiatement repérer, les policiers leur faisant signe de
Connaissance et découverte
se mettre à l'écart pour une vérification plus poussée de leurs
documents. Ironie de l'histoire, voici 20 ans, sous les
Soviétiques, les Moldaves devaient déjà montrer "patte
bleue", pour pouvoir circuler dans l'ex-URSS, alors que les
citoyens russes se déplaçaient librement, avec leur passeport
rouge.
Chisinau à pas trop cher
Vendredi 1er juin.- Il n'y a vraiment aucune raison objective à bouder la Moldavie. Les routes ne sont pas "moins bonnes" qu'en Roumanie et on se sent en sécurité dans le pays. Le
seul hic réside dans l'hébergement. Contrairement à sa grande
sœur, l'agro-tourisme y est encore peu développé, bien qu'un
effort, encouragé par des initiatives francophones, se dessine
dans cette direction.
Les hôtels sont très chers à Chisinau (pas moins de
70-80 € pour une personne), mais il existe une façon d'y
échapper: louer un studio ou un appartement pour un-deux ou
plusieurs jours par le biais des agences qui fleurissent dans la
capitale (rental.md, ou [email protected]). Ils sont toujours très
confortables, bien équipés. On peut presque avoir pignon sur
rue sur le Boulevard Stefan Cel Mare, les Champs Elysées
locaux, pour 35 € par nuit pour deux personnes.
La réservation peut se faire de France, avec un handicap:
on vous demande de verser une caution à l'avance, mais le système bancaire local n'étant pas moderne, on ne peut pas utiliser le système pré-pay. L'agence exige alors un versement par
la Western Union (très cher)… à moins qu'un Chisinaute de
votre connaissance ne vienne régler à son siège pour vous !
Le mieux est d'expliquer que vous n'en avez pas la possibilité et, au bout de deux ou trois échanges par e-mail, l'affaire s'arrange: vous paierez sur place.
Je quitte à regret cette belle capitale de l'Est, mais mon
voyage dans la petite République s'achève. Direction, le Tour
cycliste de Roumanie ! A chaque retour de Moldavie, je me
pose invariablement la même question… qui turlupine tous
ses visiteurs. Mais où se cache donc la misère dans ce pays
désigné en 2005 par un rapport de la Banque Mondiale comme
étant le plus pauvre du continent européen ?
Henri Gillet
55
Connaissance et découverte
Les NOUVELLES de ROUMANIE
Tourisme
Le luxe à pas cher dans le seul
hôtel-musée de Roumanie
SUCEAVA
l
l
l
BAIA
MARE
l
IASI
ORADEA
TARGU
MURES
l
BACAU
l
ARAD
l
BRASOV
l
l
TIMISOARA
GALATI
BRAILA
R. VÂLCEA
l
l
l
BUCAREST
CRAIOVA
l
n
MAMAIA
CONSTANTA
l
l
Découvrir Bucarest
en bus à impériale
56
Grand Hôtel Sofianu à Râmnicu Vâlcea
Depuis quelques mois, il est possible de découvrir Bucarest en bus
à impériale, comme dans les autres
capitales européennes. Cette promenade d'une heure mérite vraiment d'être tentée. Pour 25 lei (un
peu plus de 5 euros), on passe
devant les principales curiosités de
la capitale, 14 arrêts sont proposés,
où on peut descendre, visiter et
remonter dans les bus suivants qui
se succèdent tous les quarts d'heure, de 10 h à 22 h, le billet, que l'on
prend à bord, étant valable 24 heures après l'avoir validé. Des écouteurs commentant le circuit sont à
disposition, gratuitement, malheureusement uniquement en roumain
et anglais pour l'instant. Bucarest vu
de haut apparaît bien différent de
ce que l'on en entrevoit de la fenêtre d'un taxi. Et respirer les senteurs
des tilleuls qui embaument les grandes avenues des beaux quartiers
est autrement plus sympathique
que celle des effluves des pots d'échappement.
P
as très éloignés de Bucarest, mais souvent ignorés des visiteurs, les belles vallées de la Prahova, de l'Olt ou de l'Arges méritent vraiment d'être découvertes.
Paysages frais, vallonnés, gorges spectaculaires, routes splendides de montagne, monastères, coquettes stations thermales, salines souterraines, caves et propriétés
viticoles, artisanat, fabriques de verres en cristal, se succèdent. De quoi occuper une
bonne semaine!Au milieu de toutes ces richesses touristiques, un joyau… le grand hôtel
Sofianu de Râmnicu Valcea, à deux heures et demie de la capitale, le seul quatre étoiles
du judet de Vâlcea mais aussi l'unique
hôtel-musée de Roumanie, d'où l'on
peut rayonner dans toute la région!
Dans le dédale de couloirs, dans
les salles de restaurant ou de conférence, plus de mille tableaux sont
exposés. Des sculptures inspirées de
l'œuvre de Brancusi jalonnent les pas
des clients et ornent l'agréable terrasse de l'établissement bordée par le
parc central de la ville. Car l'hôtel est
situé dans un écrin vert, lui garantissant le calme au cœur même de la cité.
Son propriétaire, Nicu Sofianu, est un ancien journaliste, qui a accumulé une des plus
grosses fortunes du sud de la Roumanie. Devenu millionnaire, il se consacre aussi à la
diffusion de l'art avec sa femme, une poétesse à laquelle on doit cette atmosphère de raffinement qui imprègne l'hôtel. Car c'est le grand luxe: 64 belles chambres spacieuses,
confortables, tranquilles, avec tout l'équipement que l'on peut attendre à ce niveau.
Piscine, sauna, salle de fitness, soins de thalassothérapie (100 €/jour hébergement compris), etc. Des formules permettent de découvrir la région (de 45 à 75 €/jour, tout compris). Il est difficile de trouver un meilleur rapport qualité-prix: le prix de la chambre varie
de 45 € par personne à 50 € pour un couple, tarifs qui tombent même à 40-45 € pendant
le week-end (nuits des vendredi-samedi-dimanche). Et, il ne faut pas oublier le plaisir de
la table, avec une carte très inventive : gazpacho aux crevettes poêlées, boulettes de gorgonzola truffées au noix grillées ou tout simplement une véritable gratinée à l'oignon…
Grand Hôtel Sofianu, strada Stirbei Voda, entrée Parc Zavoï, Râmnicu Vâlcea, Jud
Vâlcea, tel: (0040)(0)350.431.697, (0)747.768.377; fax: (0) 350.431.69; [email protected], site: www.hotelsofianu.ro.
Bonnes adresses en Bucovine
C
asa Felicia, à Sucevita, sur la
route en direction de Radauti,
500 mètres après le monastère. Coquette pension, très confortable,
dans un parc paysager adorable. Felicia et
Trandafir Cazac, un ancien mécanicien
d'hélicoptère, y ont restauré avec amour
et talent deux maisons anciennes en bois,
dont l'une, située à une vingtaine de kilomètres a été entièrement démontée et
réassemblée suivant la tradition de l'art…
sans un seul clou! Trandafir, peut
accueillir une quinzaine de personnes
dans ses 8 chambres spacieuses. Le couple conseille les touristes, aux trois
quarts des Francophones, leur indique
des itinéraires, avec une disponibilité et
un sourire qui ne le quittent jamais.
Casa Felicia, tel: 0744 836 392 ou
0740 931 973, courriel: cazac.dana@
yahoo.com. 25 € par personne avec le
petit-déjeuner et le repas du soir.
Chez Leonard, à Manastirea
Humorului, à 200 mètres du monastère.
L'étape est bien connue et les habitués ne
manquent pas de s'arrêter chez Elena et
Leonard qui sont devenus les amis de
nombre de leurs hôtes. Ah les soirées animées sous leur tonnelle à refaire le
monde… et la Roumanie en français,
dans leur fermette au pied des merveilleuses collines de Bucovine ! On n'a
pas envie de s'en aller, et quand Léonard
se met à raconter son pays, la vie du village, on est transporté dans un autre univers.
Chez Leonard, tel: 0230 572 818,
0744 95 90 47, courriel: [email protected], site: http:/butucea.pers.ro.
20 € par personne, avec le petit-déjeuner
et le repas du soir. Possibilité de venir
avec son camping-car ou sa tente (et
même sa tante !), avec accès aux commodités.
Connaissance et découverte
Les NOUVELLES de ROUMANIE
Patrimoine
Bram Stoker mérite bien la reconnaissance de la Roumanie
Ils veulent du Dracula ? Donnons-leur du Dracula !
M
ême si la Roumanie a bien d'autres choses à
offrir aux touristes, elle est d'abord vue comme
le pays de Dracula, en particulier depuis que
l'histoire de Vlad Tepes l'Empaleur et que le vampire inventé
par Bram Stoker se sont superposés. Alors, autant en profiter,
estime un mensuel roumain.
Le vampire Dracula et le prince Vlad Tepes nous ont laissé un héritage que nous ne savons toujours pas faire fructifier:
Dracula! Le meilleur label dans le domaine du tourisme dont
peut bénéficier la Roumanie en ce moment. A quoi les étrangers associent-ils la Roumanie? D'abord à Dracula, et seulement ensuite à Nicolae Ceausescu, Nadia Comaneci,
Gheorghe Hagi ou Ilie Nastase.
Les étrangers veulent du Dracula, désirent en savoir plus
sur Dracula, voir les endroits où Dracula a vécu, manger de
l'ail en visitant le château de Bran, acheter des souvenirs de
Dracula, faire la fête dans des bars ambiance Dracula. Nous
nous fâchons que notre héros national, Vlad Tepes, soit devenu le symbole du vampirisme. Foutaises ! Si les étrangers veulent du Dracula, nous devons leur vendre du Dracula. Ils veulent des mythes avec Dracula, offrons-leur des mythes ! Dans
un monde souffrant d'un imaginaire morbide étouffant, où les
vampires, la sorcellerie et la fiction captent l'attention et font
d'énormes entrées d'argent, notre orgueil national compte peu.
Inconnu des Roumains jusque dans les années 70
Le tourisme à thème "Dracula" a commencé en Roumanie
de manière non officielle au cours des années 1950-1960. Bien
sûr, le roman de Bram Stoker n'avait pas encore été traduit en
roumain, donc les guides de l'office national de tourisme des
Carpates, réorganisé de fond en comble au début des années
1970, ne sont entrés en contact avec l'histoire imaginée par l'écrivain irlandais qu'à travers ce que pouvaient en dire les touristes occidentaux (principalement Américains et
Britanniques) qui posaient des questions sur le "château du col
de Bârgau" (Pasul Bârgaului) décrit dans le livre.
Même si Dracula était encore inconnu pour la plupart des
Roumains, les autorités de l'époque n'ont pas hésité à utiliser
le mythe pour faire de la publicité. En 1983, un hôtel en forme
de château, avec des tours, une cour intérieure accessible par
une seule entrée, a été construit entre Bistritsa, ville de
Transylvanie, et Vatra Dornei, ville de Bucovine. Les deux
localités étant reliées par le col de Bârgau, l'hôtel a prétendument été construit à l'endroit approximatif du château décrit
dans le roman. Jusqu'en 1990, il a été appelé Tihutsa (autre
nom du col de Bârgau), même si un autre hôtel inventé par
Stoker, La Couronne d'or, avait été construit dans la ville de
Bistritsa, justement pour servir de point de référence pour les
touristes étrangers.
En 2006, l'hôtel rebaptisé Dracula a inauguré un buste de
l'écrivain irlandais Bram Stoker.
Sous l'impact de la théorie de l'identification entre Vlad
Tepes l'Empaleur et le comte Dracula, élaborée à partir de
1972 par Raymond T. McNally et Radu Florescu, l'historiographie roumaine a réagi. L'anniversaire de la mort de Vlad
l'Empaleur, en 1976, a suscité de nombreuses publications. Les
recherches des historiens roumains ont servi ensuite comme
base pour les guides touristiques afin de dissocier les deux personnages.?
Puis la situation a pris de l'ampleur après 1990. La société roumaine a été outrée par la superposition du personnage du
vampire et de celui du voïvode (prince) considéré comme l'un
des grands héros roumains depuis le XVe siècle. Les réactions
furent d'abord négatives. La Roumanie, pays associant de
magnifiques paysages maritimes et montagneux avec une
infrastructure relativement développée (du moins pour les
étrangers) et de nombreux sites antiques, médiévaux ou
modernes, se retrouvait dans la situation d'être visitée pour des
raisons purement triviales.
Les meilleurs circuits mêlent l'histoire
avec le mythe littéraire et cinématographique
Même si chez nous le mythe de Dracula est plus connu à
travers le cinéma que par le biais de la littérature, l'opportunité pour le tourisme culturel est immense. Avec ou sans parc
d'attractions à thème, les lieux liés à Vlad l'Empaleur et au
comte Dracula sont nombreux et intéressants. Dans un monde
dominé par la publicité, Dracula aurait énormément aidé une
économie prédisposée aux crises.
Il existe déjà des circuits proposés par diverses agences,
les meilleures mêlant l'histoire avec le mythe littéraire et cinématographique. Ainsi, en suivant les traces du personnage littéraire préféré, les touristes peuvent visiter:
- Curtea de Arges, première capitale de la Valachie, qui
abrite aussi un monastère célèbre
- le château fort de Poenari, résidence secondaire de Vlad
Tepes rénovée d'après la légende par le travail forcé des
boyards (nobles) qui avaient assassiné son grand frère et son
père
- Suceava, capitale de la Moldavie du XIVe au XVIe siècle
- le monastère de Snagov, dans les environs de Bucarest,
où l'on suppose que le corps de Vlad est enterré
- Târgoviste, capitale de la Valachie du XIVe au XVIIIe
siècle, où les époux Ceausescu ont été fusillés pendant la révolution roumaine de 1989,
- Sighisoara, ville historique, lieu de naissance de Tepes,
- Brasov, grande et belle ville de Transylvanie, proche du
château Bran, dit "château de Dracula", tous ces lieux étant
liés au voïvode médiéval et au vampire moderne.
Ainsi, au lieu de nous irriter devant la question : "Où est
le château du vampire Tepes ?" nous devrions saisir l'occasion
d'expliquer une confusion et de montrer une Roumanie encore
tellement belle. Bien qu'il n'ait pas pensé spécifiquement aux
Roumains, Bram Stoker mérite leur reconnaissance.
Bogdan Popa et Marius Diaconescu (Historia)
57
Connaissance et découverte
Les NOUVELLES de ROUMANIE
Patrimoine
Success story pour
SUCEAVA
l
l
BAIA
MARE
l
TARGU
MURES
ARAD
l
IASI
ORADEA
l
l
l
CHISINAU
BACAU
l
l
VISCRI
l
l
TIMISOARA
BRASOV
TÂRGOVISTE
PITESTI
CRAIOVA
l
l
GALATI
BRAILA
l
l
l
TULCEA
l
n
BUCAREST
CONSTANTA
l
Des boucles
d'oreille hors de prix
58
La renaissance
Les boucles d'oreille offertes par
Carol II à sa maîtresse Elena Lupescu
ont été vendues aux enchères à
Londres pour un montant de près de
2 millions d'euros, alors que le prix de
départ avait été fixé à 150 000 euros
et que ses vendeurs n'en attendaient
pas plus de 650 000 euros. Ces
bijoux, des perles rares serties dans
des pendentifs en diamant, dormaient
depuis 35 ans dans le tiroir de la commode d'une femme qui ne les portaient pas car ils n'étaient pas à son
goût et ont été découverts par hasard
par ses héritiers. Carol II, descendant
de la reine Victoria a été roi de
Roumanie jusqu'en1940, abdiquant au
profit de son fils Michel. Il est alors
parti en exil avec sa maîtresse qu'il a
épousée, et est décédé à Lisbonne en
1953. Elena Lupescu lui a survécu
jusqu'en 1977. Ayant une réputation
de playboy, sa liaison avait fait d'autant plus scandale en Roumanie que
sa maîtresse était d'origine juive.
C'est l'histoire d'un restaurant de Bucarest qui, de 1899 à nos jours, a traversé le 20ème siècle contre vents et marées. Après avoir résisté à la période communiste, le Caru' cu bere réalise aujourd'hui un chiffre d'affaires annuel de cinq
millions d'euros et accueille à sa table des célébrités internationales. Pourtant, il
est bien difficile d'y retrouver le charme désuet qui se dégageait autrefois de ce
prestigieux établissement.
L
'histoire du "Caru' cu Bere" (la charette de Bière) ne se résume pas aux
vingt dernières années qui ont suivi la chute du régime communiste. Elle a
commencé il y a 113 ans. L'établissement doit son nom à la charrette tirée
par des bœufs qui, jadis, venait lui livrer la bière.
Depuis la révolution, la Roumanie a connu l'invasion des fast-foods. Leur chiffre
d'affaire cumulé avoisine les deux milliards d'euros. La brasserie "Caru' cu bere" fait,
à elle seule, cinq millions d'euros à égalité avec les champions de la restauration rapide de la capitale comme le self du magasin Ikea ou le Mac Do de la Piata Unirii.
Dès que l'on passe le tourniquet de bois massif, on est plongé dans un cadre aux
relents d'entre-deux guerres. Les vieilles tables aux bords usés par les coudes, les lustres, les escaliers en colimaçon sculptés, les hautes voûtes peintes de tons verts et
ocres, incrustées d'or et de rouge et les vitraux vous ramènent dans une autre époque.
Mais les tenues vestimentaires des clients, les verres ou la marque des bouteilles portées sur les plateaux sont là pour rappeler la réalité du 21ème siècle…
Les étudiants recevaient gratuitement un repas par jour
Daniel Mischie, l'un des associés de Trotter Prim, la compagnie gérante de l'établissement, ne se lasse pas de raconter l'histoire du "Caru' cu bere". "La brasserie a
été construite en 1899 au moyen d'un emprunt hypothécaire souscrit par Nicolae
Mircea, un natif d'Ardeal, débarqué à Bucarest pour faire des affaires dans la bière.
En peu de temps, il en fit un lieu de rencontre où venaient des retraités de la magistrature et de l'armée, des hommes de lettres et aussi des étudiants. Ceux-ci recevaient
un repas gratuit par jour". Nicolae Mircea, petit-fils du fondateur, deuxième du nom,
est aujourd'hui propriétaire des murs avec l'un de ses cousins. Il se souvient : "J'ai
gardé beaucoup de lettres envoyées à mon grand-père par les parents de ces étudiants
qui le remerciaient pour son aide. Ma famille a habité ici dès l'origine. On travaillait
au Caru' cu bere jusqu'à la retraite".
Au début, la brasserie était beaucoup plus petite.
Le bar et la mezzanine furent ajoutés en 1926. Au-dessus, la partie habitable compte une vingtaine de chambres, inoccupées pour l'instant, dans laquelle on pourrait
installer un hôtel. En 1949, les communistes réquisitionnèrent le restaurant et obligèrent, malgré tout, la
famille Mircea à continuer à rembourser le crédit hypothécaire souscrit 50 ans plus tôt pour la construction.
Le Caru' cu bere devint un centre de formation de
l'industrie hôtelière. Les stagiaires logeaient sur place
et travaillaient au restaurant. L'établissement fut rénové
en 1984 ce qui n'empêcha pas son activité de décliner.
Son image se ternit et suscita des commentaires ironiques. "Si l'on vient en Roumanie, il faut absolument
aller au Caru' cu Bere sans s'y arrêter et sans y manger". "L'atmosphère, à cette époque, était triste à pleurer", affirme Nicolae Mircea. Le restaurant était vide.
Les serveurs attendaient les clients toute la journée en
regardant la télévision installée devant le tourniquet".
Connaissance et découverte
Les NOUVELLES de ROUMANIE
de l’un des plus vieux restaurants de Roumanie
"Caru cu bere" … qui a perdu bien de son charme
Le vieux Ion, seul serveur
rescapé de l'époque communiste
aussi déguster les "sarmale", les "mititei", les saucisses de
Plescoi ou le jarret au chou, spécialité de la maison.
Les démarches pour reprendre possession du restaurant
"Atmosphère… Atmosphère…
commencèrent dès la chute de Ceausescu en 1990. Deux ans
J'ai encore une gueule d'atmosphère ?"
après, la propriété en revint à Nicolae Mircea mais ne fut
effective qu'en 2006. "A ce moment, j'ai reçu des offres de pluMais cette réussite a aussi ses côtés les plus détestables :
sieurs millions de dollars pour racheter l'établissement, mais
si le cadre a été préservé, la rentabilité règne en maitre sur les
le Caru' cu bere n'élieux. On s'y bouscutait pas à vendre".
le à l'entrée. Il faut
L'actionnaire
franchir un tournimajoritaire Dragos
quet, fendre la queue
Petrescu reprit la
dans une foire d'emdirection de la brassepoigne pour gagner
rie en février 2006.
sa table, obligatoireDes travaux de rénoment réservée et que
vation furent entrel'on ne peut pas choipris dans la foulée. Ils
sir. Si vous êtes seul,
ont duré huit mois.
on vous impose un
Rien n'a été modifié.
temps limité pour
Les murs, moisis et
déguster votre demi
recouverts de chaux,
ou pour manger. Tout
ont été lessivés et
est fait pour que le
repeints d'après des
client sente qu'il ne
photos retrouvées au
doit pas s'attarder
Ministère
de
la
outre-mesure.
Culture.
On peut à peine
120 personnes
Le pauvre Ion (à gauche), quarante ans de service, a bien du mal à s'y retrouver parler, ni s'entende
dans cette foire à touristes qu'est devenu le prestigieux établissement. dans un brouhaha
ont travaillé sur le
chantier avec, pour certains spécialistes, l'agrément des
perpétuel, couvert par une musique assourdissante, rock ou
Affaires culturelles. Les cuisines ont été mises aux normes et
autre, entrecoupée par l'intrusion soudaine et à intervalles
équipées de matériel moderne. Coût de l'investissement : 1,3
réguliers de danses folkloriques pour Japonais ou Américains.
millions d'euros. Sauf pour les meubles qui datent presque tous
L'endroit est devenu une foire à touristes abrutissante, un pasde 1924.
sage obligé programmé par les agences de voyage. Et la cuisiIl n'est rien resté de l'ère communiste, excepté Ion qui trane y est toujours aussi médiocre!
vaille ici depuis plus de 40 ans et qui a du mal à s'adapter à la
Elle est loin l'époque de l'entre deux Guerres où l'élite
prise de commande électronique. "Mais le Père Ion bénéficie
bucarestoise, écrivains, artistes, parlementaires, intellectuels
d'un régime particulier, c'est une obligation morale pour
s'y retrouvait se confiant en chuchotant les dernières rumeurs
nous", assure le gérant.
parcourant la capitale. "Caru cu bere" avait de la gueule alors.
A l'origine, le Caru' cu Bere se fournissait en bière à
"Atmosphère… Atmosphère? Est-ce qu'aujourd'hui j'ai une
Bragadiru, une commune toute proche de Bucarest.
gueule d'atmosphère?" rumine le pauvre Ion, qui a bien du mal
Aujourd'hui, la bière maison est brassée par Tuborg Romania,
à se frayer un chemin dans la bousculade, sans renverser son
qui consacre 24 heures de son activité mensuelle exclusiveplateau chargé de chopes de bière maison…
ment à sa production. C'est la bière la plus consommée parmi
Pourtant le visiteur ne doit pas désespérer. Avec un peu d'iles treize autres sortes que propose le restaurant.
magination, il peut encore se replonger dans cette ambiance
Les vieilles brasseries et distilleries de Prague, Berlin,
délicieuse du début du XXème siècle, laissant son regard
Dublin, ou Edinburg, devenues de véritables légendes locales,
vagabonder de l'immense bar en bois massif jusqu'aux loges à
ont été intégrées aux circuits touristiques. Les propriétaires du
peine dissimulées, rêvasser aux belles amazones, étoles en
Caru' cu bere, quant à eux, assurent seuls la promotion de leur
fourrure, attablées avec des sénateurs bedonnants mâchonnant
établissement. Avec un succès certain. Il y a une centaine d'anleur imposant cigare… Il ne leur en coûtera qu'un euro pour
nées, les clients s'asseyaient aux côtés des poètes George
peu qu'ils prennent la peine de venir y boire leur café, dans la
Cosbuc, Octavian Goga ou de l'écrivain Barbu Delavrancea.
matinée, à l'heure où les touristes sont à peine levés.
Ces dernières années, ils ont été remplacés par les Rolling
Yves Lelong et Henri Gillet
Stones, Demi Moore ou le Prince héritier du Japon venus euxCaru Cu Bere, 5 Strada Stavropoleos, Bucarest
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Connaissance et découverte
Les NOUVELLES de ROUMANIE
Pratique
Le langage des voitures
60
Pour mieux connaître la géographie
des judets (départements) de Roumanie
voici, dans l'ordre, leurs noms, celui de
leur préfecture (entre parenthèse), suivis
des initiales qui leur sont attribuées et
figurent sur les plaques minéralogiques
des voitures:
Alba (Alba Iulia): AB
Arad (Arad): AR
Arges (Pitesti): AG
Bacau (Bacau): BC
Bihor (Oradea): BH
Bistrita-Nasaud (Bistrita): BN
Botosani (Botosani): BT
Brasov (Brasov): BV
Braïla (Braïla): BR
Buzau (Buzau) : BZ
Caras-Severin (Resita) : CS
Calarasi (Calarasi): CL
Cluj (Cluj-Napoca): CJ
Constantsa (Constantsa): CT
Covasna (Sfântu-Gheorghe): CV
Dambovita (Târgoviste): DB
Dolj (Craïova): DJ
Galati (Galati): GL
Giurgiu (Giurgiu): GR
Gorj (Târgu Jiu): GJ
Harghita (Mercuriu Ciuc): HR
Hunedoara (Deva): HD
Ialomita (Slobozia): Il
Iasi (Iasi) : IS
Ilfov (Bucarest) : B
Maramures (Baïa Mare): MM
Mehedinti (Drobeta-Turnu-Severin): MH
Mures (Târgu-Mures) : MS
Neamt (Piatra Neamt) : NT
Olt (Slatina): OT
Prahova (Ploïesti): PH
Satu Mare (Satu Mare) : SM
Salaj (Zalau) : SJ
Sibiu (Sibiu) : SB
Suceava : (Suceava) SV
Teleorman (Alexandria) : TR
Timis (Timisoara): TM
Tulcea (Tulcea): TL
Vaslui (Vaslui): VS
Vâlcea (Râmnicu-Vâlcea): VL
Vrancea (Focsani): VN
Les plaques minéralogiques comprennent, dans l'ordre, les initiales du département + deux chiffres + trois lettres.
Exemple: PH 97 AMC (PH : département
de Prahova).
Humeur
Vacances roumaines…
Mihaela Trifa est d'origine roumaine et vit en France. Elle ne manque pas
de rentrer dans son pays natal à l'occasion des vacances, ce qui l'a amenée à
dresser un portrait humoristique mais aussi acide du comportement de ses
compatriotes à cette époque de l'année.
D
e retour dans mon pays natal, la Roumanie, j'ai pu encore constater l'évolution des mœurs vacancières et de loisir de mes compatriotes roumains. Je ne cherche à faire aucune généralisation en ce qui concerne
leurs comportements! Je ne vais vous décrire que les tendances - quel mot estival !
- observées souvent, voire très souvent lorsque j'y passe à mon tour, les vacances.
Transformé en parking-foutoir
Alors que, par goût aigu de l'aventure, par quête désespérée des sentiers solitaires, lovées dans l'herbe mousseuse des forêts lointaines couvrant ces belles
Carpates, et parfois par fierté stupide d'avoir exploré des endroits dangereux et difficiles d'accès, certains jeunes, sacs à dos et sacs de couchage, se mettent à grimper
et à conquérir des sommets isolés, beaucoup de leurs compatriotes se contentent,
eux, des… bords de route ! C'est toujours impressionnant de les voir s'y entasser dès
qu'un brin d'herbe se fait jour et que la montagne se profile au loin. Ils viennent en
voiture, le coffre rempli de provisions de bouche et d'alcool. Sur des rythmes de
musique souvent folklorique, ils ramassent des brins de bois. Certains, plus hardis,
armés de haches, vont jusqu'à entreprendre un peu de coupe de ce bois généreux et
prolixe des forêts du pays, et c'est parti.
Le feu peut être lancé, les "mici" (sorte de kefta roumain) prêts à se faire rôtir
le lard, la bière peut couler à flots et les gamins crier de bonheur à poil. Les baffles
crachent la musique de fête, la fumée des barbecues voile cette atmosphère de
vacances, d'autres voitures arrivent et bientôt la longue ligne herbeuse qui borde la
route n'est plus qu'un parking-foutoir, avec automobiles garées dans tous les sens,
servant de magnétophones sur roues et de repères pour les gamins dans leurs jeux
de cache-cache.
Connaissance et découverte
Les NOUVELLES de ROUMANIE
sur le bord des routes
parcelle de leurs terres (récupérées des griffes du kolkhoze à la roumaine) à quiconque de nos frères européens occidentaux voudrait construire soit une
fabrique de textile, soit une fabrique de conditionnement de champignons -ah, que les forêts des Carpates
en sont remplies et que les Italiens en raffolent! -, soit
d'immenses bâtiments abritant des concessionnaires
autos. Alors, pouvant acquérir des voitures et désireux de prendre la route en toute liberté et à toute
allure, certains d'entre eux ont commencé à adorer les
bords de route. Enfin, ce n'est pas tellement qu'ils
adorent les bords de route; les gens qui y campent ne
sont pas les plus riches du pays… loin de là, voire
souvent le contraire !
Le bord de route est pratique, on n'y paie pas de
place de camping, pas de chambre à l'auberge ou à l'hôtel, on
peut amener sa bouffe, on ne s'enfonce pas trop dans les routes de montagne, la plupart dans un état tragicomique -on ne
parle même plus de nids de poule mais plutôt de culs de vacherisquant d'y laisser la voiture.
Montrer à ses compatriotes
combien on gagne "là-bas"
Et pour aller plus loin, il y a, je pense, une question de
visibilité, de sortie de l'anonymat et de l'isolation dans laquelle le régime totalitaire a voulu enfoncer l'individu. Au bord des
routes, on nous voit et on voit à notre tour.
Pour ce qui est des plus riches, ils vont eux, se faire voir
et regarder en Grèce, en France (sur la côte d'Azur s'il vous
plaît), en Croatie, ou choisissent des destinations exotiques qui
font rêver le citoyen lambda (des îles tropicales mais haute-
ment touristiques, des safaris en Afrique, des virées d'excès à
Dubaï). Certains restent en Roumanie, mais se prennent des
chambres d'hôtel qui arborent fièrement des prix occidentaux.
Concernant nos braves immigrés qui ramassent des fraises
en Espagne ou lavent les vieux en Italie, de retour au pays, certains sont animés par ce désir si hautement humain de montrer
aux autres combien ils gagnent là-bas, combien leur voiture est
puissante, et comment ils sont gentils d'amener leurs mamans
dont le dos est courbé par le travail de la terre, faire des cures
de traitement de boue dans les spas de la mer Noire ou des
Carpates.
Ils n'oublient pas de profiter de leurs vacances pour aguicher une ou deux filles dont ils rêvent depuis tout-petits, et de
leur payer une virée en discothèque et une chambre d'hôtel. Et
les Roms roumains expulsés de France? Que feront-ils de leurs
"vacances" roumaines ?
Mihaela Trifa (http://www.rue89.com)
Pourquoi cette nécessité de la foule permanente ?
Je ne dis pas, la plupart des gens se regroupent par affinités, et ce sont souvent
des familles amies qui investissent ainsi le bord des départementales. Mais c'est
cette promiscuité qui est intrigante: les voitures se touchent, les feux emmêlent leurs
fumées, les gosses se trompent de maman, les pères se frôlent les bides etc. Pourquoi
recréer ce schéma que beaucoup vivent en appartement dans leurs HLM et tours grises voulus par Ceausescu et sa foutue planification de l'habitat ? Pourquoi ne pas s'isoler un peu, être au calme? Pourquoi cette nécessité de la foule permanente?
Mon père m'a dit -comme tous les pères? - qu'avant, ce n'était pas pareil ! Avant,
c'était pendant l'époque du communisme totalitaire de Ceausescu. Les gens avaient
peu de Dacia pour investir les bords de route, et surtout, leurs vacances étaient planifiées, pour la plupart, par ce magnifique régime qui organisait parfaitement les
vies des prolétaires. Ceux-ci recevaient des bons de vacances pour aller dans telle
ou telle station balnéaire désignée à l'avance, dans les Carpates ou à la mer Noire,
dont les plages se chargeaient alors d'humains désireux d'accéder au statut d'écrevisse (par le vide de la pensée et par la couleur de l'épiderme).
Et la plupart du temps, on transportait ces prolétaires par trains.
Au moins, on n'y paie pas de place de camping
Après la chute de Ceausescu et l'arrivée fracassante du capitalisme, les voitures
se sont multipliées, et le commun des mortels a pu, petit à petit, y accéder, grâce aux
bienfaits du crédit bancaire, de la débrouille au détriment de l'autre, de la vente d'une
Roumanie d'hommes et de lumières
Parution
O
livier Bourguet, guide de voyages et écrivain, offre le fruit de son troisième
reportage après l'Ethiopie, en 2006, et Chypre en 2008, sous la forme d'un
magnifique album, à la présentation très soignée, qui vient de paraître
"Roumanie d'hommes et de lumières". Il y condense en 224 pages et 160 photos, les
images qu'il a glanées au fil des 7 mois qu'il y a passés et la synthèse de ses lectures, abondantes et érudites.
Aux confins de l'Europe, la Roumanie a fait office de rempart aux hégémonies venues
de l'Est, qu'elles soient byzantines ou russes. Le sort des Roumains, sous le ressac de l'histoire, n'a pas toujours été enviable. Ils ont souvent vécu l'enfer dans des contrées paradisiaques, au cœur d'espaces naturels insoupçonnables de grandeur et de beauté, au sein desquels s'épanouissent encore le loup et l'ours.
Terre d'érudition, tant passée que présente, la Roumanie tire sa richesse d'un brassage
culturel extraordinaire, puisque pas moins de 23 ethnies minoritaires s'y côtoient. Peuple
attachant, hospitalier, généreux, les Roumains ont la verve latine, le sourire aux lèvres et toujours une rasade d'alcool de prune pour
l'accueil et sceller une amitié nouvelle. Découvrir la Roumanie bucolique en leur compagnie, c'est accepter de prendre le temps.
De contempler, de rencontrer, d'être freiné par l'animation agro-pastorale qui prend possession des chemins et sentiers, de respirer
les odeurs d'une campagne qui avance au rythme de ses animaux et des saisons. C'est aussi parvenir à adopter un rythme nouveau,
en phase avec des paysages et des traditions pas encore tout à fait rattrapés par le galop du progrès!
Roumanie d'hommes et de lumières, par Olivier Bourguet, Editions Vilo. A commander directement auprès de l'auteur:
Olivier Bourguet, Chaussée de Frasnes, 159, 7540 Rumillies, Belgique en adressant un chèque de 50 € (Frais de port compris)
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Connaissance et découverte
Les NOUVELLES de ROUMANIE
Blagues
Humour
Courtoisie
Une femme prend rendez-vous chez
un chirurgien plasticien :
-Docteur, vous voyez mon nez?
Pouvez-vous m'en refaire un qui soit fin
et joli ?
-Pas de problème, chère madame…
Avec celui que vous avez, je peux même
vous en faire trois !
Pilules dures à avaler
62
- Ah bon ! Et qu'est-ce que je fais de
sa moto?
Vérités
Un pope explique le catéchisme et
l'origine de l'Humanité aux enfants :
-Dieu a crée Adam et Eve est née
d'une côte d'Adam.
Bula lève la main :
-Mon Père, Papa dit qu'on descend
du singe ?
-Ecoute Bula, tes histoires de famille
ne m'intéressent pas, je parle en général !
Un Roumain qui veut émigrer en
Amérique arrive à l'aéroport de NewYork où un douanier suspicieux commence à fouiller sa valise :
-Ces pilules roses, c'est pourquoi ?
-Contre la bronchite
-Les blanches ?
-Contre les rhumatismes
-Les bleues ?
-contre l'impotence
-Et cette photographie de Basescu ?
-Contre le mal du pays !
C'est Bula qui dit à sa maîtresse en
lui rendant son carnet de notes:
- Je ne voudrais pas vous inquiéter,
mais ce week-end, papa m'a dit que si je
n'ai pas des meilleures notes sur mon bulletin le mois prochain, "y’a quelqu'un qui
va se prendre un bon coup de pied
quelque part...".
Question de choix
Christophe Colomb
Un automobiliste stoppe net quand il
voit une fille prête à enjamber le parapet
d'un pont et à se jeter dans le Mures.
-Mais qu'est-ce que tu fais?
-Je veux me suicider!
Il l'attrape par le bras et l'embrasse
fougueusement. Toute émoustillée, elle
lui demande de recommencer.
-Tu vois que la vie est belle… mais
pourquoi veux-tu te suicider?
-Parce que mes parents n'aiment pas
que je m'habille en fille...
La maitresse demande à Bula:
- Bula, voudrais-tu aller au tableau,
nous montrer sur la carte géographique,
où se situe l'Amérique.
Bula va, et pointe du doigt
l'Amérique.
- Maintenant que vous savez tous où
se trouve l'Amérique, Bula peux-tu me
dire qui l'a découverte?
Toute la classe en cœur:
- C'est Bula!
Avertissement
breuses communications du plus haut
intérêt scientifique, mais la plus remarquée fut celle de la délégation roumaine.
La nouvelle méthode d'extraction mise au
point par les Roumains présentait en effet
deux caractéristiques majeures: la performance technique et l'originalité.
Il s'agissait d'introduire l'appareil par
le fondement du patient, de le faire cheminer à travers les intestins, l'œsophage
et le larynx; après quoi, arrivé dans la
cavité buccale, le dentiste pouvait sans
peine procéder à l'arrachage de la dent
malade. La démonstration de la méthode
est accueillie par un déluge d'applaudissements, et tous les délégués se lèvent.
Curieux cependant, le secrétaire de
séance demande:
-Pourquoi prenez-vous le problème à
l'envers et ne passez-vous pas directement par la bouche plutôt que de vous
compliquer la vie ?
-Ce serait effectivement une méthode, reconnaît le délégué roumain… mais
par les temps qui courent, personne n'ose
plus ouvrir la bouche chez nous.
Dernier vœu
Voilà qui promet
Préjugé
Maria à son médecin :
- Docteur, cela fait cinq minutes que
vous m'avez demandé de tirer la langue et
vous ne la regardez même pas !
-C'était juste pour être tranquille pendant que je rédige ton ordonnance !
Recette
- Allô Police! Je viens d'écraser un
poulet. Que dois-je faire?
- Et bien, plumez-le et faites-le cuire
à thermostat 6.
Un représentant sonne à la porte de la
maison de Bula, à peine dix ans, qui lui
ouvre, un cigare à la bouche, une canette
de bière dans la main, alors que sa petite
copine rajuste sa jupe.
- Bonjour mon petit. Est-ce que ta
maman est là?
Bula :
- Devine...
Arracheurs de dents
En 1979, au Congrès international
des chirurgiens dentistes, il y eut de nom-
Raluca, vieille paysanne "sans-parti
et réactionnaire", sentant sa fin venir,
réunit sa famille et demande à son fils
aîné d'aller chercher le responsable local
du Parti. Surpris, celui-ci s'exécute et
revient avec le chef de cellule.
Raluca le fait approcher de son lit et,
devant toute sa famille, lui demande de
l'inscrire au Parti. Le camarade, n'osant
aller contre les volontés d'une mourante,
l'inscrit au Parti, perçoit sa cotisation et
lui remet sa carte. Dés qu'il a franchi le
seuil de la maison, le fils aîné s'agenouille au bord du lit de sa mère et, des
sanglots dans la voix, il lui demande :
-Oh, petite mère, pourquoi as-tu fait
une chose pareille ?
-Voix tu, Dumitri, puisque quelqu'un
doit mourir, il vaut mieux que ce soit un
des leurs.
Pensée
-Qu’est-ce que serait le monde sans
les hommes ?
-Un monde plein de femmes libres,
heureuses... et bien grasses !
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Numéro 72, juillet-août 2012
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Ont participé à ce numéro :
Laurent Couderc, Yves Lelong,
Marion Guyonvarch, Julia Beurcq,
Jonas Mercier, Mirel Bran, M. Trifa,
Victoria Popa, Piotr Smolar,
Caroline Douki, Arnaud Schwartz,
Marianne Delaforge, Ion Cepleanu,
Bogdan Popa, Marius Diaconescu
Autres sources: agences de presse
et presse roumaines, françaises,
lepetitjournal.com, télévisions
roumaines, Roumanie.com, Le
Courrier des Balkans, sites internet.
Impression: Helio Graphic
2 rue Gutenberg
ZAC du Moulin des Landes
44 981 Sainte-Luce sur Loire Cedex
Numéro de Commission paritaire:
1112 G 80172; ISSN 1624-4699
Dépôt légal: à parution
Prochain numéro: sept. 2012
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Les NOUVELLES de ROUMANIE
La vraie vie
au cœur du Maramures
D
ifficile d'imaginer qu'on puisse aimer tant son pays ! Adela et Teo ne
quitteraient pour rien au monde leur Maramures natal. Pourtant la vie y
est dure, aussi bien sur le plan matériel que moral. D'autres se seraient
laissés séduire par la perspective d'une existence meilleure, loin de chez eux. Mais
comment Teo aurait-il pu abandonner ses monts et vallées qu'il parcourt à pied depuis ses 15 ans ? Guide, photographe, journaliste, à quarante ans il est devenu la mémoire vivante de la région. Adela, elle, arpente les couloirs de l'impressionnant Mémorial des
victimes du communisme, expliquant aux milliers de visiteurs francophones, l'atrocité d'une époque heureusement révolue.
Adela et Teo ont choisi de rester au pays pour le faire valoir. Le couple rêvait d'acquérir une vieille maison en bois et d'y
accueillir les touristes afin de leur faire découvrir les richesses de leur province. C'est chose désormais faite. Une seconde maison
est même venue s'ajouter à ce patrimoine. Située à une trentaine de kilomètres, elle a échappé au funeste sort réservé par les "abattoirs de vieilles maison", des scieries en quête de bois de chêne, les transformant en planches, lambris, parquets, meubles anciens,
expédiés en Angleterre ou en Irlande. Teo l'a entièrement démontée, pour la réinstaller sur la parcelle à flanc de colline, en pleine
campagne, où le couple vit désormais. Forêt, ruisseaux, silence troublé par les seuls oiseaux, chevreuils et cerfs montrant le bout
de leurs cornes, quelques fermettes au loin… Les hôtes séjournent au cœur d'un Maramures immuable, à six kilomètres seulement
de Sighet. Le bonheur de dormir les fenêtres ouvertes, de sentir la nature si proche, d'entendre le vieil escalier qui grince, de s'assoir autour de la table en bois massif… tout en bénéficiant des commodités d'aujourd'hui !
Sacs à dos et porte-bagage pour transporter matériaux et sacs de ciment
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Pour en arriver là, Teo n'a pas ménagé sa peine. Tout
était à faire ou à refaire… mais en conformité avec la
règle absolue qu'il s'était imposée: respecter le savoirfaire des ancêtres. Seul pour agencer les pierres de taille,
soulever les lourdes poutres, il a avancé le chantier au fil
des mois, des ans, allant au bout de lui-même, comme
lorsqu'il a dû déplacer un bloc de 150 kg. Deux jours
pour s'en remettre ! Et puis des aller-retours incessants
en vélo jusqu'à la ville, parfois plusieurs fois par jour,
pour acheter des matériaux, ramenés dans un sac à dos,
les sacs de ciment fixés sur le porte-bagage.
Tout aurait été beaucoup plus simple si, la
Roumanie n'avait pas décliné la proposition de
Bruxelles d'étendre les aides au développement de l'agro-tourisme aux zones rurales en périphérie des villes.
Pour quelques centaines de mètres, les espoirs d'Adela et Teo de financer leurs travaux se sont envolés. Ce coup du sort ne les a
cependant pas fait renoncer. Mais il leur a fallu attendre les maigres rentrées d'argent pour poursuivre le chantier, le retardant d'autant. Compter aussi avec les aléas: les hivers rigoureux qui rendent les matériaux inutilisables, les changements incessants de réglementation obligeant à tout recommencer. Fils électriques impérativement aériens un jour… aujourd'hui à enterrer.
Toutes les richesses du Maramures à moins d'une demi-heure
Si dans l'adversité le couple a tenu bon, il le doit aussi beaucoup à ses amis français, de la région toulousaine et de CahorsAgen, qui n'ont pas ménagé leur soutien et sont heureux aujourd'hui de constater qu'il voit le bout du tunnel. Certes, il reste beaucoup à faire dans la seconde maison, mais d'ores et déjà des touristes séjournent dans la première, d'une capacité de 6-7 personnes. Oubliant la voiture, leurs journées passent vite, entre ballade dans la forêt pour cueillir fraises des bois, champignons, la
découverte des églises en bois et du musée du village, à proximité, les parties de pêche, les escapades dans les villages voisins, la
visite de l'alambic à palinca.
Ravis de courir dans les collines, de se mêler aux troupeaux de moutons ou d'apprendre à fabriquer des objets en bois, les
enfants oublient totalement leurs jeux vidéo, ordinateurs et postes de télé. Et puis, les joyaux du Maramures, le cimetière joyeux
de Sapinta, les villages de la vallée de Breb, Botiza, Calinesti, leurs fêtes religieuses, le monastère de Bârsana sont à portée de
volant… à moins d'une demi-heure. Teo y guide ses hôtes… en français.
La maison Amizadil, Sighetu-Mamatiei (Maramures), Adela et Teo Ivanciuc, (00 40) 0744 289 461 ou 0745 944 555,
[email protected]. Nuit et petit-déjeuner: 20 € pour une personne, 30 € pour une chambre de 2 personnes.