Le Crapaud rouge
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Le Crapaud rouge
Le Crapaud rouge De nombreux crapauds rouges ornent les portails et les maisons de Tréveneuc, c’est aussi le nom du restaurant qui surplombe la plage de Port Goret au-dessus des falaises. Ce surnom donné aux natifs de notre commune depuis de longues années est une singularité que nous avons souhaité aujourd’hui affirmer et qui désormais désignera votre nouveau bulletin municipal trimestriel. Une manière conviviale de faire perdurer l’histoire et de se rassembler, comme avant, autour d’un jeu qui était très populaire à une certaine époque. Un jeu d’adresse Pratiqué dans les cafés et les lieux publics pendant des siècles à travers l’Europe, le lancer de palets ou de pièces de monnaies existait sous différentes formes. Pratiqué en Grèce sous le nom de “casse pot”, il se jouait avec des amphores. Les Vikings le ramenèrent sur nos côtes de leurs expéditions en Méditerranée. Et comme le cidre était stocké dans des fûts, il prit au fil du temps le nom de “jeu du tonneau”. Le principe consistait à lancer des pièces dans une tirelire, le gagnant remportait les pièces qui n’y tombaient pas et qui restaient sur la barrique. A la fin du XIXe siècle, le tonneau sera remplacé par des planches en bois, et la tirelire par une grenouille à la gueule ouverte. Dans d’autres régions ou pays, ce sont des animaux différents ou quelquefois des visages humains. Eveiller la curiosité A Tréveneuc, c’est un crapaud rouge. L’anecdote veut qu’ici les villageois se distinguaient par leur habileté notamment contre les joueurs de Kertugal, et qu’ils exposaient leur fierté en arborant devant chez eux un batracien d’ornement, aujourd’hui encore tout autour de vous. Cette tradition du jeu s’est perdue peu à peu, mais le nom est resté et les touristes sont nombreux chaque année à s’interroger sur cette singularité décorative et sur l’origine de la dénomination du restaurant. Demain, peutêtre, ils vous questionneront aussi sur le choix du titre de votre magazine, et nous espérons que nos lecteurs seront à même de conter cette jolie histoire, qui complète avec originalité les atouts de notre commune. Protéger la nature Le crapaud rouge existe, c’est une espèce en voie de disparition que l’on trouve exclusivement à Madagascar et qui est aussi appelé grenouille-tomate. Un marin aurait-il ramené cet amphibien de l’Océan Indien ? Nul ne le sait… Mais crapaud vert, crapaud commun ou crapaud calamite, c’est aujourd’hui une espèce protégée dans de nombreux pays et cette petite bête que l’on associait souvent autrefois à la sorcellerie est très utile à la nature et complètement inoffensive. Dans les contes pour enfants, c’est une charmante créature qui se transforme en prince charmant avec le seul baiser d’une princesse... En décoration, le crapaud c’est aussi un petit fauteuil confortable et très tendance que l’on trouve dans certains salons et sur lequel, peut-être, vous pourrez vous installer pour lire votre nouveau magazine. Portrait Yvon Dupré, un breton passionné ! Vous l’avez sûrement rencontré. A Tréveneuc tout le monde le connait. Mais avez-vous vraiment pris le temps de faire sa connaissance ? Car derrière ses bacchantes et ses cheveux longs, se cache un Breton atypique, qui a semé et défendu, tout au long de son parcours, sa culture d’origine. a ‘‘Ty men Glaz’’ S “Vous trouverez facilement” m’a-t-il dit, “je revendique mon identité en plein milieu du bourg !” Et en effet, j’ai trouvé rapidement ! Une maisonnette en pierre, typique de nos villages, avec un petit jardin fleuri, le Gwenn ha Du battant au vent. Yvon Dupré a 85 ans, et dès qu’il ouvre sa porte, on sent qu’il a des choses à raconter, sa mémoire est vive et son regard sur la vie d’aujourd’hui est bien affûté. Il a traversé les époques avec son caractère de breton, mais surtout, il a toujours mis du cœur à préserver les liens humains. Breton et travailleur Couvreur, il est parti après la guerre, chercher du travail à Paris, la reconstruction y offrait de nombreux postes dans le bâtiment. Il pensait revenir très vite sur sa terre d’origine mais il a dû attendre sa retraite pour rejoindre les Côtes d’Armor. Spécialisé dans les monuments historiques et les chantiers de grande hauteur, il a passé 40 ans sur les toits de la capitale et a pu observer le monde du haut de Notre Dame, des Invalides ou de Versailles. Installé à l’époque, comme beaucoup d’autres, près de Montparnasse, rapidement il s’est rendu compte que l’intégration n’était pas si facile et que les provinciaux devaient apprendre à se battre pour défendre leurs droits. Breton et solidaire Avec un groupe d’amis, il s’est d’abord engagé à protéger les jeunes filles qui débarquaient toutes naïves de leur Bretagne pour les accompagner sagement dans leur foyer, sans qu’elles rencontrent de garçons mal intentionnés. Puis, ils ont créé le groupe Kendalc’h à Paris pour affirmer leur identité bretonne et promouvoir la culture celtique, mais surtout pour se rassembler et partager ensemble les traditions qui leur manquaient. Valoriser la solidarité et générer des liens, si précieux à une époque où les moyens de communication étaient encore rares. Ils ont ainsi organisé les premiers Fest-Noz et relancé cette coutume. Breton et engagé Entre un cours de lutte et une leçon d’histoire, Yvon travaillait aussi pour le “Breuriezh Skoazell Vreizh”, il y était correspondant pour les détenus politiques bretons à Paris. Sans défendre la violence, ni leurs actions autonomistes, il leur permettait de rester en contact avec l’extérieur et surtout tentait avec le groupe de soutenir au mieux les familles et les enfants restés au pays. Dans ce cadre, il faisait la tournée des bistrots pour solliciter des fonds et passait ses soirées à courir au travers de la capitale. Ses semaines étaient bien remplies et le weekend il trouvait encore l’énergie d’aller danser. Il y a 5 ans à peine il dansait encore, et s’il garde ses moustaches, c’est pour le folklore. Breton de retour Son métier lui a permis de prendre sa retraite à 58 ans, et dès qu’il a pu, il est revenu s’installer en Bretagne. Originaire de Guingamp, il s’est d’abord posé à Tréguier, puis après avoir sollicité le comte de Tréveneuc, a aménagé dans la maison qu’il occupe encore aujourd’hui au cœur du bourg. “C’était un café avant, une pièce avec une grande réserve et un pressoir à l’angle dehors pour faire le cidre. Et juste à côté, c’était une boulangerie, avec son four à pain ancien. J’ai tout rénové et séparé en deux maisons. Ma fille vit dans la boulangerie et moi je suis au bistrot !” Dit-il avec son grand sourire. Breton et passionné Plus disponible et bien disposé à continuer de promouvoir la culture bretonne, Yvon Dupré s’est très vite impliqué dans 18 Dorénavant, vous savez qui se cache derrière ces grandes moustaches ! Notre Panoramix est toujours prêt à distiller un peu de sa potion magique pour nous redonner l’envie de vivre ensemble et ne pas oublier l’histoire de notre terre bretonne. Mais n’allez pas lui chatouiller les pieds pour qu’il vous divulgue la formule, car il a encore un caractère bien trempé ! ‘‘ Tout le monde est pressé maintenant, il faut recréer des liens et prendre le temps de parler... la vie communale. “Sans jamais faire de politique” précise-t-il. “Quand quelque chose ne me plait pas, je fais des lettres ouvertes que je distribue moi-même dans les boîtes”. “Avec des bénévoles nous avons d’abord commencé à nettoyer les calvaires, les fontaines et les lavoirs. Puis nous avons voulu créer un centre culturel et y avons instauré les cours de breton, de danse et de broderie. Tout cela a duré un bon moment… Puis j’ai été contacté par l’Association des vieux métiers de Plouha pour prêter mes outils de couvreurs conservés et collectionnés au fil du temps dans les brocantes. Depuis nous sommes une bonne équipe à restaurer et faire vivre tous ces matériels anciens.” Breton et curieux Yvon Dupré n’a jamais fait partie du conseil municipal, mais passe tous les jours à la Mairie. Il aime se tenir au courant de ce qui s’y passe, donner son avis, discuter aussi avec l’équipe et participer de près ou de loin à ce qui se met en place. Il est attentif aux aménagements floraux et souhaite- rait que la future galerie commerciale soit aménagée de façon à provoquer les rencontres : “Tout le monde est pressé maintenant, il faut recréer des liens et prendre le temps de parler, c’est important pour nos petites communes. Je travaille en ce moment à un projet de poulailler pour les enfants de l’école et je vais essayer d’arranger les alentours du pressoir. Mais pour ça, je vais devoir attendre la fin des travaux au bourg.” ‘‘ Breton et médaillé A 85 ans, il ne danse plus car ses jambes lui font défaut, mais il voudrait apprendre le macramé pour relancer cette tradition dans les fêtes bretonnes. Il continue d’assister chaque année au Festival de la Saint Loup où il accompagne sa fille Gwenola qui joue de la Bombarde et son petit-fils Mael de la caisse claire, au sein du Bagad de Plouha. L’amour qu’il a pour la Bretagne ne l’a jamais lâché et son besoin de donner aux autres est toujours aussi vivant. Son engagement dans le milieu associatif a été de nombreuses fois distingué : Médaillé par le Préventorium de la SNCF, récom- 19 pensé par la Ville de Paris pour ses actions de bénévolat et décoré par Jeunesse et Sports pour avoir participé à la création des groupes enfants de danse folklorique. Et il ajoute : “Puis le prix Hervé Le Men par l’entente culturelle bretonne.” Annaïk Michel Fete de la Saint-Jean Le 19 juin dans le Parc du Château de Pommorio avait lieu cette grande soirée annuelle. Un moment de convivialité et d’échange pour fêter dans la tradition le solstice d’été, sous le regard bienveillant du crapaud rouge installé au sommet du tantad. E n breton, le feu de joie Autrefois, c’était une coutume dans chaque village. Les paysans coupaient en avance les ajoncs et les ronces séchés pour constituer une immense pyramide avec les fagots et, le jour du solstice, chacun apportait quelque chose, une branche, une bûche ou une souche. Au coucher du soleil, au milieu des danses et des prières, l’immense motte était mise à feu. Les jeunes garçons sautaient ensuite par-dessus les braises pour séduire les filles et, les rencontrer dans la chaleur de la nuit. C’était aussi le feu de l’amour… Après la soirée, les cendres du tantad étaient répandues dans les champs pour assurer une belle récolte et dans l’eau des puits pour garantir une eau pure. Musique et danses A Tréveneuc, cette tradition a été réinstaurée depuis plus de dix ans maintenant et toute la commune était en fête. Le soleil était au rendez-vous et le parc du château brillait de mille feux. L’éco-fanfare Tag Boom a d’abord installé ses bidons tambours pour donner le tempo et permettre à chacun d’improviser mailloches en main. Dans une douce odeur de galette saucisse, c’est le Cercle Danserien Sant Ke qui a ouvert les festivités au rythme cadencé de musiques bretonnes, leurs costumes illuminés par la lumière descendante. Puis, le Bagad Sonerion Sant Ké a pris le relais, cornemuses, bombardes et batteries devaient résonner au-delà la baie pour annoncer l’arrivée de l’été sur tout le territoire. Balade et légendes Au crépuscule, le conteur Yann Quéré a guidé de sa voix un groupe attentif à l’orée du bois. Après avoir mis son public en appétit avec la soupe au caillou du loup, c’est aux lueurs des lanternes qu’il a transporté son auditoire à travers le parc. Le crapaud rouge magicien, à l’ombre des arbres, Gaït et le roi, sous les fenêtres du château. Les petits et les grands, conquis par la magie de cet univers, étaient heureux d’entendre ensuite l’histoire de Pommorio racontée par Denis. La nuit tombant, les premières étincelles du Marionnet’ic S ous un ciel mi figue mi raisin, une Cendrillon rock and roll nous est apparue! Devant un public heureux, un spectacle burlesque, drôle et participatif a enchanté les petits et les grands. Peut être des vocations sont elles nées? Cette artiste reviendra dans le cadre des festivals “place des mômes” à Saint Quay et Binic. Cela vaut le déplacement ! 6 tantad ont invité le groupe à prendre le chemin du retour et à venir se réchauffer autour du feu. Le crapaud rouge, dressé au sommet du bûcher, a résisté aux flammes tout au long de la flambée. Avait-il une jeune princesse à séduire ? Ou, est-ce la féérie de Tréveneuc ? Trugarez Une belle fête de la Saint-Jean, qui on l’espère, comme le veut la tradition, aura aussi été la fête des rencontres et de l’amour. La restauration était assurée par l’APEL de l’école Saint-Jean et la buvette par les joyeux lurons du comité des fêtes, nous les remercions tous pour leur convivialité et vous donnons rendezvous pour le prochain solstice d’été. Ken emberr !