Isabel tome 1 - Bouquin

Transcription

Isabel tome 1 - Bouquin
Les Demoiselles d’Inverdale tome 1
Isabel & Victoria
Chapitre un
Inverdale, juin 1923
Les lèvres pressées, Isabel poussait de petits gémissements en tentant de les garder les
plus inaudibles qu’elle le pouvait. Cette tâche s’avérant des plus difficiles, elle ouvrit la
bouche bien grande et permit à de doux râles de traverser sa gorge. Étirant les bras, elle
chercha un oreiller afin de s’en cacher le visage, mais il était hors de portée à la tête du
lit. Elle empoigna plutôt les draps et les tira à elle juste pour faire quelque chose de ses
mains qu’elle ne savait plus comment occuper. Son ventre se mit à s’agiter de légers
soubresauts, puis se furent ses cuisses, bien ouvertes, qui commencèrent à tressauter sans
qu’elle ne puisse les maîtriser. Ses râles devinrent des cris d’oiseaux qu’elle voulut
étouffer en glissant la jointure de son index entre ses dents. Son corps entier trembla une
autre fois, foudroyé par le plaisir puis, ses muscles se relâchèrent d’un seul coup. Elle
demeura immobile quelques secondes puis, mourant d’embarras devant cette réaction
incontrôlable qu’avait eu son corps, elle ferma les jambes et dissimula ses yeux derrières
ses mains.
Amusé, Lord Brooks se redressa pour l’observer avec fierté. Il repoussa sa chevelure
noire vers l’arrière puis, épongea son front avec le mouchoir qu’il gardait dans la poche
de son pantalon.
-Comme il est exquis de vous voir jouir, petite demoiselle!
Encore sous le choc, Isabel ne rétorqua rien à l’homme qui ne semblait point incommodé
d’être resté agenouillé devant le lit toutes ces minutes durant. En souriant, il se rendit à la
console sous la fenêtre et se versa une bonne rasade d’eau.
-Vous en voulez?
Isabel releva alors la tête et hocha, la laissant chuter sur le lit la seconde suivante. Lord
Brooks abreuva la jeune fille, consulta sa montre gousset et chercha sa veste des yeux. Il
n’eut que cette pièce de vêtement à enfiler pour être paré à descendre, mais entièrement
nue, Isabel serait manifestement en retard pour le souper.
-Il faut vous lever maintenant, on nous attend en bas.
Rieur, il lissa sa veste d’une main leste et alla s’asseoir auprès de la jeune fille.
-Ce n’était pas la première fois qu’on vous embrassait là, non?
Timide, Isabel n’osa pas répondre à cette question, se contentant de rouler hors du lit
pour mettre de l’ordre dans sa chevelure. D’une main encore tremblante, elle prit une
brosse sur sa vanité et se regarda dans la glace. Ses joues étaient rouges et son front
complètement trempé de sueur. Devant le mutisme de la jeune fille, Lord Brooks frappa
sur ses cuisses et annonça :
-Bon, je vous laisse vous préparer. Ne faites pas trop s’impatiente votre mère, elle
pourrait devenir méfiante.
La jeune fille ne chercha pas à le retenir lorsqu’il se dirigea vers la porte et l’ouvrit en
tournant la tête à gauche et à droite pour s’assurer que personne de la maison ne le voit
quitter sa chambre.
La jeune fille attendit d’être seule et s’affala sur le lit en soupirant pour songer à ce qui
venait de se produire. Non, personne n’avait osé la toucher de cette façon auparavant.
Lord Brook, s’ennuyant probablement à faire la conversation au salon en attendant le
repas, avait décidé de monter à l’étage et avait été attiré par la musique du violon qui
émanait de la pièce. Isabel ne l’avait pas entendu cogner. Elle avait seulement vu
l’homme s’insinuer près d’elle pour l’écouter attentivement.
-Vous êtes merveilleuse… Avait-il soufflé quand la dernière note avait jailli de
l’instrument et doucement, il avait pris la main d’Isabel pour l’attirer à lui. Il l’avait
observée avec le genre de profondeur qu’elle ne lui connaissait pas et qui l’avait un peu
effrayée. Isabel n’ignorait pas que sa sœur Victoria s’était éprise de Lord Brooks et
qu’elle rêvait stupidement de l’épouser même s’il avait à peu près deux fois leur âge. En
permettant à l’homme de l’embrasser sur les lèvres, elle eut le sentiment de trahir
Victoria qui n’attendait probablement que ce genre de marque d’affection de Brooks.
Envahie de culpabilité, d’embarras, mais aussi de beaucoup de curiosité, Isabel avait
laissé l’homme couvrir sa gorge de baisers en se sentant devenir écarlate. Brooks l’avait
ensuite basculée sur le lit et lui avait retiré la simple robe de chambre qu’elle portait avant
de commencer à s’habiller pour le repas. Après avoir accroché sa veste au dossier d’un
fauteuil, il s’était agenouillé près du lit et avait tiré la jeune fille à lui. Stupéfaite, elle
n’avait su s’il fallait le repousser ou s’abandonner aux caresses qu’il lui promettait. Isabel
avait ressenti une poussée de chaleur lorsqu’il avait écarté doucement ses cuisses. Lord
Brooks avait embrassé sa petite fente avec délicatesse puis, il avait glissé sa langue le
long de celle-ci. Jusqu’alors, Isabel ignorait qu’on puisse retirer du plaisir d’un geste
pareil, elle ignorait même que cela se faisait. Il avait cependant été si doux qu’elle l’avait
laissé poursuivre jusqu’à ce que son corps devienne un véritable volcan en éruption.
Étendue de nouveau sur le lit, elle osa porter les doigts entre ses jambes. Elle se découvrit
si humide qu’elle en fut bouleversée. On l’avait pourtant bien prévenue dans ses jeunes
années qu’en aucun cas elle ne devait se toucher à cet endroit, mais elle était encore trop
brûlante. Isabel se revit, les cuisses bien ouvertes devant la bouche de Lord Brooks et
lâcha un autre gémissement. Elle n’avait pas osé lui avouer qu’elle n’avait jamais
expérimenté la jouissance avant ce soir. Se rappelant soudain de l’heure, elle se remit sur
pieds et essuya son corps avec le drap. Il ne lui restait qu’une quinzaine de minutes avant
de devoir rejoindre le reste de la famille, ainsi que leur invité, à la salle à manger.
Fatiguée d’attendre, Victoria regarda l’heure et, dépitée, elle termina de s’habiller.
Brooks n’était pas venu cogner à sa porte tel qu’il le faisait habituellement lorsqu’il était
invité à Inverdale les dimanches et elle ne comprenait pas ce qui l’avait retenu. Il
semblait pourtant beaucoup apprécier leur petit secret. Brooks trouvait toujours une façon
de couper court à la conversation qu’il devait entretenir avec Lord Whitford au salon et
s’insinuait discrètement dans sa chambre où elle le recevait, nue la plupart du temps, pour
un intermède dont ils retiraient tous les deux beaucoup de plaisir. Brooks l’avait déflorée
presque par accident, parce qu’une fois il n’avait su se retenir de la prendre et depuis, ils
faisaient régulièrement l’amour ensemble, puisque le mal était déjà fait. Mais ce soir,
Victoria avait eu beau patienter, il ne s’était pas présenté. Peut-être n’avait-il pu profiter
d’un temps mort dans la discussion avec son père pour se retirer poliment, mais quoi qu’il
en soit, Victoria demeurait à fleur de peau. Elle passait la semaine entière à espérer sa
venue, résolue maintenant à attendre la fin du repas pour tenter d’obtenir un moment avec
lui.
Terminant sa coiffure, Victoria se tendit en entendant tourner le bouton de la porte.
Jouant la nonchalance, elle ne se retourna pas quand on entra dans la pièce en silence. Le
parfum très caractéristique de Jake Brooks parvint rapidement à son nez puis, elle le vit
apparaître dans le reflet de la grande glace devant lequel elle se tenait.
-Vous avez trop tardé, Milord. Nous devons maintenant descendre sans quoi, ma mère
deviendra suspicieuse.
-Il ne s’agit que d’un retard de dix minutes, Vicky. Nous pouvons toujours le rattraper.
-Je suis déjà vêtue, il faut laisser tomber pour cette fois.
En faisant volte-face, Victoria remarqua l’air troublé qu’affichait Brooks et la teinte
rouge de son visage. Cette attitude lui sembla singulière.
-Mais, qu’avez-vous donc? Vous en faites une tête!
-Rien, ne vous en faites pas. Une affaire fâcheuse qui me laisse songeur, cela n’a
absolument rien à voir avec votre charmante personne.
Il cacha évidemment à Victoria qu’il arrivait à peine de la chambre de sa jeune sœur et
que son corps était toujours fort bouleversé par ce qui s’y était produit. Brooks avait
retrouvé la raison juste à temps et avait fui la chambre avant de commettre un impair,
mais son sexe se durcissait toujours d’envie pour Isabel. Il lui semblait impensable de
descendre à la salle à manger affublé d’une érection aussi fulgurante. Brooks empoigna la
main de Victoria et la pressa contre son pantalon.
-Voyez comme j’ai envie de vous… Ne me faites pas souffrir, Vicky, je vous en conjure.
Ayant passé les dernières heures à songer à la visite de Brooks, à prendre conscience des
choses délicieuses qu’il lui ferait une fois qu’ils seraient seuls, Victoria se mit à faiblir.
-Je vous ai dit non. Habituellement, vous ne me faites pas patienter jusqu’à ce que je sois
habillée et coiffée.
Le sourire coquin de la jeune fille révéla à Brooks qu’il était sur le point de la gagner. Si
elle désirait lui donner une leçon de ponctualité, elle était parvenue à son objectif, mais il
ne se démonta pas pour autant. Il devait se soulager de cette lancinante érection et n’avait
pas l’intention de quitter la pièce avant d’avoir obtenu ce qu’il était venu y chercher.
-Je m’en fiche que vous soyez vêtue. Il y a certainement moyen de ne pas défaire votre
travail.
Il prit la main de Victoria et l’invita à s’agenouiller au sol, directement devant la glace.
-Qu’allez-vous donc faire? Vous me semblez trop déterminé!
En souriant, il appuya les paumes de Victoria sur le tapis et caressa son arrière-train. Ce
faisant, il souleva sa robe et glissa son sous-vêtement de dentelles vers le bas, sans le
retirer complètement. Ainsi emprisonnée, Victoria ne disposait plus d’une grande liberté
de mouvement. Sa culotte baissée jusqu’à ses genoux et l’ourlet de sa robe remonté
jusqu’au milieu de son dos, il n’y avait que son sexe de dénudé et celui-ci s’offrait à la
volonté de l’homme derrière elle. Brooks eut tôt fait d’extirper sa verge de son pantalon.
Il en glissa le bout gorgé de désir sur la fente rose de la demoiselle qui s’ouvrit à son
passage.
-Oh, mais vous en avez envie aussi, Miss Vicky…
-Forcément, je vous espère depuis près d’une heure.
Quand elle savait que Brooks devait passer la voir, Victoria se préparait en caressant
doucement sa peau, étendue sur le couvre-lit. Elle aimait imaginer ce que l’homme lui
ferait, songer à leurs rencontres passées et exciter son corps avant l’arrivée de Brooks. Ce
soir n’avait pas fait exception. Quand il pressa son sexe contre la vulve de Victoria, il
glissa en elle avec aisance et il se trouva rapidement au fond de son corps. Victoria
poussa un cri, surprise par la profondeur que Brooks avait atteint en un seul mouvement
de hanches. Les yeux clos, elle le laissa ensuite la ramener contre lui au rythme qui lui
plaisait, détendant son corps quand la verge ferme la pénétrait. Les cuisses serrées à cause
de la culotte qui ne lui permettait pas d’écarter davantage les jambes, Victoria eut le
sentiment de le sentir dans les moindres recoins de sa chair.
Brooks tenta de repousser la vision d’Isabel qui était imprégnée dans son esprit. Il peinait
cependant à ne pas se voir en train de la prendre après être parvenu à lui procurer un
orgasme en chatouillant son sexe avec sa langue. Juste en esquissant ce geste, il avait
compris qu’Isabel n’avait jamais été pénétrée et il s’était gardé de se dévêtir, mais en se
regardant dans la glace prendre Victoria, Brooks ne put s’empêcher de songer à l’autre
fille Whitford qu’il avait touchée.
-Plus fort, Brooks… Je vais jouir, je le sens. Prenez-moi aussi fort que vous le pouvez, je
vous en supplie!
Brooks empoigna les hanches de Victoria, sentant effectivement contre son sexe les
tressautements de plaisir du corps de la jeune fille. Elle cabrait le dos et le retenait
profondément en elle tout en caressant son clitoris d’une main. Brooks se réjouissait de la
voir prendre autant de plaisir. C’était lui qui lui avait enseigné à toucher la partie la plus
sensible d’elle-même tandis qu’elle était pénétrée afin d’en jouir le plus possible. Il
s’abandonna alors et la prit avec force jusqu’à ce qu’il sente naître en lui sa propre
libération. Brooks dut garder sa bouche bien close afin de ne pas crier le nom d’Isabel
quand la jouissance s’empara aussi de lui. Il permit à la jeune fille de jouir jusqu’au bout
puis, il se retira d’elle pour éjaculer hors de son corps. Il était déjà coupable d’avoir pris
la virginité de cette demoiselle, il n’allait pas en plus prendre le risque qu’elle tombe
enceinte. Si Victoria ne songeait pas à ce genre de chose, Brooks considérait qu’il
s’agissait de son devoir. Il sentit ses jambes faiblir puis, ce fut comme si sa poitrine
entière prenait feu. Brooks ne put empêcher un long gémissement de traverser sa gorge.
Par réflexe, il se tendit ensuite et pria pour ne pas avoir été entendu. Le sourire de
Victoria le rassura.
-C’est trop délicieux, Milord. Je vous en prie, ne me faites plus jamais croire que vous ne
monterez pas à ma chambre. Je suis complètement bouleversée, encore une fois.
Il fallut un long moment à Victoria pour qu’elle se reprenne et remette sa culotte en
place. Jamais auparavant Brooks ne l’avait prise par l’arrière ainsi, mais elle avait déjà
envie de répéter l’expérience.
-Je viendrai vous voir dans quelques jours, je le promets, lui jura-t-il en agrafant ses
pantalons.
-Ne tardez pas. Nous trouverons toujours une façon de nous retrouver seuls ensemble.
Brooks assentit, cachant cependant son trouble à Victoria. En la prenant, il avait vu Isabel
devant lui et il implorait maintenant le ciel pour que cela n’ait été qu’une petite folie
passagère qui n’aurait aucune suite.
Quand Brooks fut introduit à la salle à manger, presque tous les membres de la famille y
étaient déjà. Il ne manquait qu’Isabel et Victoria. Il suivit le valet et se rendit jusqu’à sa
place habituelle, n’oubliant pas de s’incliner cérémonieusement devant Lady Winifred
Whitford, la mère des jeunes filles pour qui il nourrissait beaucoup d’affection. Il souleva
la main de celle-ci et y posa un baiser.
-C’est toujours un plaisir d’être reçu chez toi, Winnie.
Il avait chuchoté cette phrase pendant que le reste de la famille discourait bruyamment, se
plaisant à profiter de la complicité qui les unissait pour la troubler un brin. Winifred avait
été son premier amour vingt ans auparavant. Elle l’avait jadis éconduit, mais ils étaient
restés proches parce qu’elle était incapable de se résoudre à le chasser hors de sa vie.
Poussée par les encouragements de son père jadis, Winifred avait accepté d’épouser Lord
Whitford, parce que celui-ci était riche et représentait le parti idéal pour une jeune
immigrante Allemande. Toutefois, l’amitié de Jake Brooks lui était chère et elle lui avait
juré de ne jamais l’évincer complètement de sa vie, s’il se sentait en mesure de taire ses
sentiments. « Vous êtes trop jeune. » Lui avait-elle lancé comme argument à l’époque.
« Une dame de mon rang ne peut épouser un homme de sept ans son cadet. » Cependant,
il bénéficiait toujours de son affection profonde.
La quarantaine avait octroyé à Winifred le genre de beauté iconoclaste qui suscitait
l’admiration des hommes et l’envie des femmes. Grande et mince comme un fil malgré
ses grossesses, elle avait une chevelure très foncée qu’elle gardait coupée au niveau des
épaules avec une frange épaisse qui accentuait son regard bleu ciel. Elle aimait parer sa
coiffure de chaîne de pierres précieuses, style qu’empruntait aussi Victoria, l’aînée de la
famille. Winifred se vêtait de longues robes noires ou violet dont les voiles se mouvaient
dans l’air autour de son corps à chacun de ses mouvements. La beauté de ses filles lui
était immédiatement amputable, il était aisé de le constater lorsqu’on la voyait auprès de
son époux qui jamais ne parvenait à l’égaler en magnétisme. Elle parvenait à éclipser
n’importe quelle jolie jeune dame au cours des soirées qu’elle offrait à Inverdale.
Winifred esquissa un clin d’œil à Lord Brooks puis, un sourire discret vint clore leur
moment d’intimité. Il prit sa place en lâchant à regret la main blanche et parfumée qu’elle
lui avait permis d’embrasser.
Brooks salua ensuite un à un les autres membres de la famille qui étaient déjà rassemblés
autour de la table. À la droite de Winifred se trouvait Ursula qui, âgée de quinze ans, était
tout à fait étrangère à la tension qui surgissait entre sa mère et Lord Brooks quand celui-ci
s’attablait avec eux. Le seul garçon de la famille, Tom, le jumeau d’Ursula, s’affairait
déjà à beurrer un morceau de pain, épuisé d’attendre qu’on leur serve enfin le repas. Puis,
il y avait Ann et Margaret, les petites dernières, des fillettes blondes comme les prés qui
tenaient assurément de leurs grands-parents Allemands du côté maternel. Lord James
Whitford était installé tout au bout de la table, près de l’espace vide que laissait le retard
d’Isabel et de Victoria.
Le vin avait déjà été distribué et la conversation était animée quand celles-ci apparurent
enfin dans la salle à manger. Lord Brooks dissimula son émoi en voyant Isabel se frayer
un chemin pour rejoindre sa place entre Tom et Ursula. Elle s’excusa en baissant les yeux
et déplia sa serviette de table pour la poser sur ses cuisses. Isabel avait rassemblée sa
chevelure rousse et abondante en un chignon lâche et, comme sa mère et sa sœur, l’avait
enjolivée d’une rivière de diamants qui lui donnait l’allure d’une petite princesse. Les
femmes d’Inverdale avaient démarré une mode qu’on imitait jusqu’à Londres, mais
qu’aucune dame de la bonne société ne portait aussi bien qu’elles. Les débuts de Victoria
et d’Isabel dans le monde généraient d’ailleurs bien des discussions à Inverdale.
-La semaine prochaine, annonça Winnie en soulevant son verre, je conduirai mes filles à
Londres pour leur tout premier bal. À leur âge, il ne faut plus attendre. Victoria aura vingt
ans cet automne et il lui faut trouver un mari avant la fin de la saison des bals.
Elle avala une gorgée de vin et soupira avec nostalgie en observant son aînée. Brooks
l’imita, se rappelant clairement cette époque. Winifred se plut à raconter :
-Je me revois à cet âge, si jolie dans ma robe toute blanche et pourtant si ambitieuse. Si
les jeunes hommes qui assistent à ces bals n’en ont qu’après les plus beaux visages, les
demoiselles pour leur part doivent regarder plus loin. Elles doivent faire un choix en
fonction du genre de vie qu’elles aspirent à vivre.
Se disant, Winifred attira l’attention de Victoria et d’Isabel. Il était aisé à des demoiselles
de leur âge de faiblir devant le charme masculin, mais la mère était souvent la meilleure
conseillère si elles désiraient un mariage réussi. L’attirance physique ne voulait pas dire
grand-chose si l’on souhaitait une existence dénuée de tracas, Winifred en était la preuve
vivante. Il fallait choisir un jeune homme aux références impeccables de qui il était
possible de retracer les ancêtres sur deux cents ans. Les unions dans la noblesse étaient
étudiées avec soin et approuvées uniquement si les deux familles y trouvaient leur
compte. Winifred avait confiance qu’Isabel et Victoria trouveraient facilement un
prétendant digne de leur rang. Elle avait repoussé de deux ans la sortie dans le monde de
son aînée parce qu’elle désirait que ses deux filles vivent cette expérience ensemble. Ce
genre de décision n’était pas habituel, mais compréhensible, en considérant combien était
exténuante la saison des bals pour une mère. Winifred ne désirait pas la revivre à tous les
ans. Si Isabel et Victoria trouvaient un époux au cours de l’été, elle aurait donc deux ans
de répit avant que vienne le tour d’Ursula. Et ensuite, il y aurait Margaret et Ann.
-Le premier bal est primordial pour établir les premiers contacts avec des familles
intéressantes. Il sera suivi par des déjeuners et des thés ou les filles devront cibler les
unions qui leur seront les plus profitables. Nous devrons nous montrer sous notre meilleur
jour, et ce, peu importe l’occasion. Si tout se déroule parfaitement, nous aurons deux
fiançailles à célébrer cet automne et avec un peu de chance, des mariages.
Tandis que Winifred discourait, Lord Brooks mangeait en ne cessant de lever les yeux sur
Isabel qui ne réagissait point aux propos de sa mère. La perspective qu’on souhaite la
marier en même temps que sa sœur Victoria aurait pourtant dû générer beaucoup
d’enthousiasme en elle, mais elle se contentait de garder une expression immuable tout en
dégustant son plat. Ann et Margaret brûlaient d’anticipation, rêvant déjà de ce jour où
elles seraient emmenées à leur premier bal en jolies tenues pour dénicher un époux parmi
les jeunes noble de Londres. Celles-ci avaient encore plusieurs années à patienter avant
que leur tour ne vienne.
Tout le repas durant, la conversation tourna autour des robes que les demoiselles
devraient porter et de l’attitude qu’elles devraient adopter puisque la saison des bals
devait débuter très bientôt. Lord Brooks n’aima pas particulièrement entendre Winifred
exprimer ses espoirs quant au prétendant qu’elle comptait trouver à Isabel et tout le repas
durant, il tenta de capturer le regard de la jeune fille, sans y parvenir.
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