ETUDES GITOLOGIQUES DU PLATEAU DE SAINT-BRICE
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ETUDES GITOLOGIQUES DU PLATEAU DE SAINT-BRICE
Données récentes sur les modalités de peuplement en Europe au Paléolithique inférieur et moyen Rennes, Université de Rennes 1, 22-25 septembre 2003 Etudes gîtologiques du plateau de Saint-Brice-sous-Rânes (Orne) et du « Bassin » de la Seulles (Calvados): apport de la géologie à l’analyse de sites paléolithiques Eric Lasseur1 et Floriane Leclerc2 La découverte de plusieurs gisements paléolithiques contenant une industrie à bifaces dans le secteur de Saint-Brice-sous-Rânes (Orne) d’une part, et dans le Bassin de la Seulles (Calvados) d’autre part, a motivé l’analyse des occupations dans ces deux zones. Ces dernières présentent en effet d’importantes disponibilités en matières premières lithiques. L’objectif était de comprendre le rôle de ces matières premières dans l’implantation des hommes et de tenter d’appréhender les stratégies de leur mise en œuvre. Nous avons donc tenté de répondre à trois questions principales : Quelle(s) roche(s) les hommes ont-ils taillée(s) ? Dans quelles conditions et où se sont-ils approvisionnés ? Quelle a été la stratégie mise en place face à la matière première, en termes d’approvisionnement, d’installation des hommes et d’utilisation ? Par ailleurs, l’analyse typo-technologique du mobilier a soulevé une autre question : la morphologie des blocs a t-elle eu une influence sur les techniques de mise en œuvre ? Le silex constitue l’essentiel de la matière première utilisable. Il est issu en grande majorité de formations résiduelles à silex (RS). Nous avons cherché à comprendre le comportement des hommes face à la matière première, ce qui a induit la nécessité de définir les potentialités des zones étudiées en roches utilisables. Il a fallu pour cela identifier les différents types de silex présents d’une part, et définir des critères déterminants d’autre part : module, abondance, aptitude à la taille. Ces critères ont fait l’objet de cartographies. Le module : nous avons distingué d’une part les silex suffisamment gros pour être utilisés, et ceux trop petits d’autre part. L’abondance : nous l’avons estimée visuellement et par comptage ponctuel dans des chablis. Nous avons considéré les silex suffisamment gros pour faire l’objet d’une utilisation. L’aptitude à la taille : elle a été déterminée par des expérimentations. La couleur et la forme (nodules, plaquettes) des silex ont aussi été relevées. Nous avons tenté de définir des gîtes ponctuels à l’aide de l’étude de la couleur. A partir de l’étude de l’assemblage lithique, nous avons essayé de retrouver la morphologie initiale des blocs de silex, ceci permettant une corrélation directe entre forme(s) disponible(s) et mise en œuvre de la matière première. Nous avons aussi étudié la couleur de cet ensemble lithique et le type de matière première utilisé, afin de les confronter aux données 1 - Doctorant en géologie, Université de Rennes et PCR « Paléolithique de Normandie » - DRAC de BasseNormandie. 2 - Etudiante en maîtrise (option ethnologie préhistorique), Université de Paris I / Sorbonne et PCR « Paléolithique de Normandie » - DRAC de Basse-Normandie. 1 Données récentes sur les modalités de peuplement en Europe au Paléolithique inférieur et moyen Rennes, Université de Rennes 1, 22-25 septembre 2003 recueillies sur le terrain. De fréquents allers-retours ont également été faits entre l’étude typotechnologique et les différentes cartographies levées (module, abondance, aptitude à la taille). Cependant, il convient de souligner que les informations récoltées en prospection de surface sont des données actuelles, et donc il faut envisager que la disponibilité en silex observée ne correspond pas obligatoirement à la disponibilité réelle au moment de l’occupation paléolithique. En effet, sur les sites étudiés, l’occupation est séparée de l’actuel par une ou plusieurs périodes glaciaires durant lesquelles divers événements ont modifié le relief et probablement la disponibilité des silex (formations de versants, placages limoneux). Il est donc nécessaire d’identifier en premier lieu le (ou les) type(s) de formation(s) géologique(s) ayant probablement fait l’objet d’un approvisionnement (formations de versants, plages anciennes, dolines), puis de comprendre les événements à l’origine de la disponibilité observée. Pour exemple sur les sites étudiés de nombreux approvisionnements semblent s’être effectué dans le sommet de formation de versants remaniant des formations résiduelles à silex. Une des caractéristiques de ces formations de versant appelées biefs à silex est une concentration particulièrement importante en gros gélifracts à leur sommet, au niveau de la rupture de pente. Ensuite, il est nécessaire d’établir la chronologie des événements à l’origine des caractéristiques des éléments siliceux observées actuellement. Ces différentes étapes permettent d’appréhender les caractéristiques des roches utiles au moment de l’occupation du site (disponibilité, module, état de gélifraction), et donc de connaître la validité des cartographies réalisées sur l’actuel. Lorsque la similarité entre l’actuel et la période d’occupation est établie, il est alors possible de comparer ces cartographies avec les cartes de nappes de vestiges. Cette confrontation a permis de mettre en évidence des corrélations entre les différentes données, et ainsi d’entrevoir les stratégies mises en place face à la matière première. 2