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Ceux Qui Unıversalisent
L’Islam Dans L’histoire Et
Dans Notre Epoque: Mevlana,
Yunus Emre Et M. Ikbal
Prof. Dr. Halil CİN
Ancien Recteur de l’Université Selçuk. Professeur à la
faculté de droit de l’Université Ufuk à Ankara.
Mesdames, Messieurs,
L’islam est une religion universelle. Le prophète Mohammed
a été envoyé au monde comme messager et miséricorde. Sans faire
de distinction de religion, de langue, de race, et de couleur, l’Islam
embrasse tous les hommes avec l’amour, la tolérance, la justice et
la fraternité.
L’un des senses du mot d’islam est la paix, l’amour et la
fraternité. En tant que la religion, l’islam est le dernier des religions de Dieu. Comme le prophète Mahomed est le dernier des
prophètes d’Allah et il représente tous ceux précédents. Car l’islam
embrasse et complète toutes les religions ayant les livres sacrés.
A partir de 3ième siècle de l’hégire, après la propagation d’une
conviction selon laquelle il était impossible de faire de nouvelles
interprétations de la religion, l’Islam a commencé à perdre son
dynamisme et à accepter la philosophie scolastique. La religion
s’est éloignée ainsi de la science et de la raison. Par contre en Andalousie, du 9ième au 13iemesiècle, avec une synthèse de la religion et
de la raison, l’Islam était le précurseur des mouvements de la renaissance vécue plus tard au XVième et XVIième siècles en Europe.
L’Universalisme de l’Islam basé sur la science, la raison, la
tolérance et l’amour a commencé à se perdre avec le temps; au
XIIIième siècle en Anatolie, les hommes sont tombés dans un vide
spirituel et dans un chaos. Sans qu’il y ait une raison bien précise,
Dieu crée des causes pour envoyer Mewlana de Belh en Anatolie
où est né aussi Yunus Emre. Ces hommes de cœur qui sont ivres
d’amour spirituel ont cherché à répandre l’Islam qui est source de
vrai amour, de tolérance, de fraternité et de justice.
Au XXième siècle dans le sous-continent indien, M. İkbal
suivant les traces de Mawlânâ et de Yunus Emre a continué à
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répandre à l’humanité entière la lumière d’amour, de tolérance, de
justice et de fraternité de l’Islam qui est une synthèse de l’esprit,
de la science et de la religion.
En parlant de Mawlânâ Djalâ-od-dîn Rûmi et de Muhammad
Iqbâl, il est presque impossible de ne pas parler de Konya.
Situé juste au cœur de l’Anatolie, Konya est une ville turque servant de berceau durant des siècles à des civilisations très
différentes. Au temps de l’Empire seldjoukide, Konya a été honoré
par les idées universelles de Mawlânâ comme l’amour humain, la
tolérance, la fraternité, la morale spirituelle, la justice et l’égalité
qui embrassent toutes les époques et tous les gens. Avec son
appel universel : « Viens, viens qui que tu sois, viens aussi... »,
Djalâl-od-dîn Rûmi a fait de Konya un foyer d’amour universel et
a donné son sens à la ville.
La takya (monastère) de Mawlânâ à Konya est aussi la takya
spirituelle de Muhammad Iqbâl. Ayant trouvé le dynamisme de
I’lslâm dans les œuvres de Mawlânâ, Iqbâl l’a beaucoup admiré et
l’a pris pour guide spirituel. Dans son œuvre intitulée Bal-i Cibril,
Muhammad Iqbâl considère Mawlânâ comme un maître spirituel
de l’Anatolie et se considère lui-même comme un disciple indien.
Iqbâl demande à son maître: «Moi, j’ai étudié à la fois les sciences de l’Occident et de l’Orient. Mais le mal et l’ennui n’ont pas
encore quitté mon âme.» Mawlânâ lui dit : «La main de celui qui
n’a pas de talent spirituel ne guérit pas l’homme, viens vers nous
pour que nous puissions te guérir». Iqbâl qui suggère toujours
l’amour et l’union dans ses poèmes s’adresse ainsi aux musulmans
indiens dans l’un de ses poèmes: «Les pays malades ont trouvé la
guérison avec l’amour et ils ont éveillé ainsi leur destin endormi».
M. Iqbâl nous rappelle Mawlânâ, Mawlânâ nous rappelle Iqbâl.
Dans la guerre d’indépendance turque de 1919 à 1923, Iqbâl a
bien vu l’indépendance de tous les pays opprimés et il l’a traitée
dans ses poèmes.
Bien que le XXième siècle soit devenu un siècle où la civilisation contemporaine a atteint à son sommet, il restera dans
l’histoire comme un siècle où on a rencontré davantage de violations dans les droits de l’homme. A ce propos, le XIIIième
siècle où Mawlânâ a vécu en Anatolie porte à peu près les mêmes
caractéristiques que le siècle de Muhammad Iqbâl. Au XIIIième
siècle, Mawlânâ Djalal-ud-Dîn Rûmi, invitant les hommes et les
groupes humains à la paix et au bonheur tout en leur montrant
les chemins qui y mènent est devenu un leader spirituel et un
maître d’amour et de tolérance universel. Iqbâl veut rappeler de
nouveau à l’humanité les idées de son maître qui embrassent tous
les hommes sans faire de distinction de religion, de langue et de
race en face des événements entraînant l’humanité à la catastrophe tels que la pauvreté, les crises économiques dues aux guerres
d’indépendances et aux deux grandes guerres mondiales.
L’année 1991 a été déclarée par L’UNESCO: «année d’amour
de Yunus Emre». L’un des plus grands maîtres et poètes mystiques turcs Yunus Emre inspiré de Mawlânâ, est un homme de cœur,
de tolérance et d’amour universel. Muhammad Iqbâl qui s’est
beaucoup inspiré de Mawlânâ Djalâl-od-dîn Rûmi, est considéré
comme son successeur au XXième siècle.
Le fondement de la pensée de Rûmi qui constitue la principale source d’inspiration de M. Iqbâl, c’est le Coran. D’après le
Coran, l’être le plus honoré et le plus proche de Dieu sur la Terre, c’est l’homme. Dans le Coran, les attributs des plus fréquents
pour Dieu sont des adjectifs tels que «miséricordieux», «saint» etc. Miséricorde signifie celui qui s’approche de toutes les
créatures avec amour, tolérance et pitié quelques soient leur religion, leur langue, leur race. Dans un verset de la sourat 38, Dieu
dit: «Mes serviteurs! Vous qui avez commis d’excès à votre propre détriment, ne désespérez pas de la miséricorde de Dieu. Dieu
pardonne tous les péchés; oui il est celui qui pardonne; il est le
Misécordieux». 39/53. Ce verset exprime bien que les grâces de
Dieu telles que le pardon, la miséricorde sont pour tous les hommes et que ses grâces sont valables pour tout le monde sans faire
de distinction de religion; car l’Islâm reconnaît tous les prophètes
comme messagers du même Dieu.
Il existe deux nécessités pour tous les hommes: naître et mourir. Les points de départ et d’arrivée sont les mêmes pour tous
les êtres humains. C’est Dieu qui a créé tous les hommes et toutes les créatures. Celui qui aime Dieu doit aimer aussi l’homme
car l’homme est la plus honorée et la plus estimée des créatures.
D’après Mawlânâ et Yunus Emre, l’homme est le fondement de
l’amour divin. C’est pourquoi, il faut aimer l’homme pour l’amour
de son créateur.
Sur plusieurs sujets, Mawlânâ, Yunus Emre et Iqbâl ont les
mêmes idées universelles. D’après eux, les hommes diffèrent les
uns des autres dans ce monde. Mais dans l’Au-delà, ils s’unissent
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tous dans l’océan de l’Unité de Dieu. En bref, sans faire de distinction de langue, de religion, de race, de couleur, Dieu est le Dieu de
tout le monde. Etant donné que c’est Dieu qui a créé tous les hommes et qu’ils sont les êtres les plus estimés, ils sont tous égaux.
Roumî narrait un récit dans Le Mathnawî. Ce récit se déroulait
entre un berger et Moise; à la fin de ce récit, Dieu avertît Moise de
son comportement à l’egard de ce Berger. En disant: «O! Moise estu venu pour unir? Ou bien es-tu venu pour diviser?» (Mathnawî
Livre deuxièime, p. 401)
Mawlânâ souligne bien que la division de l’homme vient
de son «moi» : «la division est dans l’esprit animal; l’esprit humain est une seule essence puisque Dieu a répandu sa lumière
sur eux, sa lumière ne devient jamais séparée» (Mathnawî, Livre
deuxième; p.316).
«Dans le choses spirituelles, il n’y a ni division ni nombre,
dans ce qui est spirituel, il n’y a ni séparation, ni individus.
Nous étions une seule substance, comme le soleil; nous
étions lisses et purs, comme l’eau.
Quand cette lumière sublime prit forme, elle devint multiple
comme les ombres des créneaux.
Détruis les créneaux avec le mandjaniq (catapulte), afin que
la différence s’évanouisse entre ces ombres» (Mathnawî Livre premier, pp.93-94)
Avec ces vers Mawlânâ affirme que les hommes sont tous
créés égaux par Dieu. Pour expliquer cette vérité, il raconte une
histoire : « Un certain homme donna un dirham à quatre personnes: l’un d’eux (un persan) dit : «je vais acheter avec cela de
l’angûr ».
Le second était un Arabe; il dit : «Non, je veux de l’inab, non
de l’angûr, ô vaurien!»
Le troisième était un Turc, et il dit: «Cet argent est à moi: je
ne veux pas de l’inab, je veux l’üzüm.»
Le quatrième, un Grec, dit: «Taisez-vous: je veux de l’istâfîl.»
Ces gens se mirent à se battre en discutant entre eux, parce
qu’ils ne connaissaient pas la signification cachée des noms...»
Quand un certain homme qui connaissait les langues de
ces quatre personnes montra du raisin, on comprit que tous les
quatre voulaient du raisin. Quatre ennemis sont devenus un par
l’unanimité. Comme dans cet exemple, Dieu est le même Dieu
pour le monde. Mais la langue, la religion et les traditions susci-
tent plusieurs Dieux chez les hommes.
Muhammad Iqbâl suivant le chemin de son maître spirituel
essaie de répandre la même philosopohie et il dit ainsi:
«Ce qui sème (met) la division dans l’homme,
Ce qui le divise en parties, c’est bien son moi (égo) et ses
plaisirs charnels
Donne des leçons de fraternité, parle avec ta langue qui chante l’amour (Külliyat, Bang-i Dara, p. 273).
Iqbâl qui s’adresse à tous les hommes, non pas seulement
aux musulmans, désire que toute l’humanité se dirige vers le vrai
bonheur étant sauvée de l’esclavage de son moi et de sa passion
chamelle.
C’est pourquoi tous les hommes doivent s’unir dans l’idée
qu’ils ont été créés par le même Dieu, étant les êtres les plus élevés
parmi les autres, sans qu’il y ait une distinction quelconque entre
eux. Tout le monde doit savoir aimer, respecter et tolérer l’autre.
En tous cas, cette unité et cette solidarité se réaliseront dans l’Aude là. En d’autres termes, tous les hommes (qui sont) de langues, de races, de religions et de couleurs différentes s’uniront dans
l’Unité de Dieu.
«Ne reste jamais attaché à ce monde parfumé et doré de (mille) couleurs,
Il existe autant de jardins et de foyers autres que ceux-ci.
Tu es un faucon, ton devoir est de voler, il y a autant de cieux
devant toi » (Bal-i Cibril p.61)
Après avoir écouté Iqbâl avec les vers ci-dessus voyons maintenant ce que dit Mawlânâ à ce propos dans les vers suivants:
«Si vous passez au-delà de la forme, ô mes amis, c’est le Paradis et des roseraies à l’intérieur de roseraies» (Mathnawi, Livre
troisième, p. 563)
«Tant que tu adores les formes, tu les vois multiples mais
quand tu t’es évanoui, ces formes deviennent une» (Mathnawi,
Livre premier, p.697).
De même, Mawlânâ parle ici de l’Unité des hommes, autrement dit, de l’universalité des hommes. Les deux maîtres mystiques voient le bonheur et la vraie paix quand les hommes se
retrouvent dans l’amour de Dieu. D’ailleurs Iqbâl dit : «Tant que
l’homme n’a pas de respect et d’amour pour un autre homme
et tant que son éducation ne vise pas ce but, il continuera à se
battre avec son homologue comme un être sauvage» (Külliyat-i
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Iqbâl, Urdu, Sheyk Ghulam Ali and Sons, 1986). Iqbâl exprime
l’importance de l’amour humain avec les vers suivants:
«La place de l’homme est plus élevée que les cieux.
Le fond de la culture est le respect pour l’homme» (Cavitnâme,
p.75)
La culture qui ne contient pas de respect pour l’homme sert
à la ruine de l’homme. L’essentiel de la Mathnawî de Mawlânâ
est basé sur l’amour humain, le respect, la justice et la fraternité,
autrement dit, c’est la morale spirituelle.
Selon Iqbâl, si l’amour de l’homme est remplacé par l’amour
matériel, l’amour, l’union, la solidarité et la paix mondiale entre
les hommes sont violés. Contre ce type d’égoïsme, Iqbâl a voulu
avertir l’Europe et le monde entier (Luce Claude Maître, The Introduction of the Thought of Iqbâl, Iqbâl Academy, Lahore).
Sans faire de ségrégation, Iqbâl dit à l’humanité entière:
«Dire une méchanceté est une faute grave.
Il faut regarder du même œil toutes les créatures de la Vérité»
(Cavitnâme, p. 205).
Comme son maître Mawlânâ, dans l’une de ses lettres, Iqbâl
a écrit qu’il a envie de sauver l’humanité des distinctions de race,
de religion, de classe et de couleur privant le monde de l’amour
humain. (Dr. Nazir Qaiser, Rumî’s Impact on Iqbâl’s Religious
Thought, Iqbâl Academy Pakistan, Lahore, p. 259).
En disant “mon takya (monastère) est l’univers», Mawlânâ
précise bien que l’homme est un être universel et, son amour, sa
tolérance et sa justice sont des valeurs universelles. Rumî aime et
tolère tout homme comme la créature du même Dieu sans faire
de distinction entre les bons et les mauvais hommes comme on
les classe souvent dans les sociétés. La différence de leur religion
n’empêche pas son amour. Car du point de vue de leur but, il
considère toutes les religions comme une seule. «La différence
réside dans la forme de la doctrine et non dans la véritable nature
de la Voie» (Mesnevi, C.l, s. 94, Istanbul, 1946; Mathnawî, Livre
premier; p. 242).
Avec ces paroles, nous comprenons bien que Mawlânâ donnait à l’humanité, il y a 8 siècles, les principes fondamentaux qui
pouvaient réaliser la liberté, les droits de l’homme et la paix mondiale pour lesquels les pays contemporains et les associations internationales ont fait beaucoup d’efforts depuis le début du 20ième
siècle.
Ayant un amour humain et une tolérance profonde, Rumî
cherche toujours des bienveillances chez l’homme et il dit : « Nul
mal ne demeure quand il se tourne vers le bien... » (Mesnevi, c.6,
s. 12; Mathnawî, Livre sixième; p. 1383).
Un autre auteur mystique universel qui aime les hommes en
les invitant à vivre en paix sans faire de distinction entre eux, c’est
Yunus Emre.
Comme Mawlânâ, Yunus Emre, dans ses poèmes, considère
l’homme comme un être universel, l’amour et la tolérance humaine comme des valeurs universelles. Yunus Emre dit :
«Quiconque ne regarderait du même œil toutes les créatures
Fût-il saint dans la charia, serait rebelle en vérité.»
«Je ne suis pas venu susciter des conflicts,
Ce qui m’intéresse c’est l’amour.»
«Notre nom est «nul» devant la Vérité.
Notre ennemi est la haine
Nous n’avons de haine pour personne
Toute l’humanité est pareille pour nous»
«Tolère celui qui est créé
Pour l’amour de son Créateur.»
Yunus Emre s’inspire de Mawlânâ et devient par la suite le
maître d’Iqbâl, disciple de Mawlânâ. Car les principes fondamentaux du soufisme de ces trois poètes mystiques reposent sur les
mêmes valeurs universelles. Le soufisme de Mawlânâ, de Yunus et
celui d’Iqbâl au XXième siècle ne sont pas au sens philosophique
un système de connaissance, une méthodologie ou un idéalisme
utopique. Leur soufisme ne consiste qu’en un soufisme qui amène
l’homme à mûrir à la suite du Créateur dans la sagesse, l’amour
et l’extase. Le reflet de ce soufisme dans la vie sociale et individuelle est une conception qui nous dirige vers les événements
métaphysiques et les découvertes scientifiques, une tolérance profonde et un message didactique, universel et spirituel, qui guérit
les méchancetés. C’est pourquoi Mawlânâ Djalâl-od-dîn Rûmi est
le maître contemporain de M. Iqbâl. Rûmi raconte sa croyance, sa
pensée et son amour à son entourage dans un langage populaire
avec des récits conformes à la psychologie et à la pensée populaire, en donnant des exemples et des proverbes. C’est pourquoi, il donne beaucoup d’importance à l’expérience. Ainsi est-il en
même temps un maître du récit.
Selon M. Iqbâl l’homme moderne s’est éloigné des valeurs
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spirituelles, en devenant esclave de la science et de la technologie
qu’il a créées lui-même. Pour lui, il existe trois types d’hommes:
L’homme social: homme qui assume ses responsabilités dans
la société
L’homme universel: homme qui ne fait pas de distinction de
langue et de religion.
L’homme spirituel: homme qui accepte les valeurs spirituelles et qui devient homme parfait, « insan-i kâmil » après avoir
atteint à la perfection.
Djalâl-od-dîn Rûmi est aussi amoureux de la nouveauté. Il
reste loin des pensées et des personnes sectaires. Mawlânâ n’est
pas fataliste. Il donne un rôle important à la volonté de l’homme
dans sa vie courante. Pour lui, travailler est le devoir le plus sacré.
«Si tu t’appuies sur Dieu, appuie-toi sur lui seulement pour le
travail.» «Travaille d’abord, fais ta prière après» ; avec ces paroles
nous voyons l’importance que Mawlânâ donne au travail. Pour
lui, toutes les religions et les confessions diverses sont un moyen
pour arriver à la maturité humaine. La pensée de Djalâl-od-dîn
Rûmi, de Yunus Emre et de d’Iqbâl est un appel universel qui unit
tous les hommes dans l’amour humain en dépassant les frontières
politiques et toutes les croyances et les ordres religieux. C’est pour
cette raison que Djalâl-od- dîn Rûmi et Yunus Emre appartiennent à toute l’humanité.
Iqbâl invite de nouveau les gens à la paix et à l’amour humain
en voyant avec tristesse dans les sentiments ardents de la guerre
d’indépendance pakistanaise que, l’amitié que Rûmi voulait fonder dans le monde n’a pas été réalisée.
Ni en Asie, ni en Europe, il n’est plus resté de joie de vivre.
L’une a perdu sa personnalité, l’autre sa conscience.
Comme son guide spirituel Mawlânâ, Iqbâl invite l’homme
à parvenir à l’éternité, à Dieu, en détruisant les murs du monde
matériel.
La vraie paix ne peut être rétablie qu’en considérant tous les
hommes égaux et en les aimant avec tolérance et avec justice. Le
système de pensée et de croyance qui unit les hommes à Dieu et
qui existe chez Mawlânâ, Yunus et Iqbâl, exige l’union au lieu de
la division, la paix au lieu de la guerre, l’amour et l’amitié au lieu
de la haine et de l’hostilité.
La paix doit se réaliser d’abord entre les individus; autrement
il n’est pas possible de rétablir la paix entre les peuples, c.à.dire la
paix universelle.
Cette grande pensée qui a été symbolisée il y a 800 ans chez
Mawlânâ et qui a continué chez Yunus Emre et chez Iqbâl se reflète
dans ces paroles d’Atatürk, l’une des plus grandes personnalités
de l’histoire et fondateur de la République Turque: « Paix dans
le pays, paix dans le monde». Le but de ce principe est de faire
vivre humainement et dans la paix tous les hommes sans faire de
distinction de langue, de religion et de race. Si l’on veut une vraie
paix et une vraie tranquillité mondiales, les peuples de races et de
religions différentes doivent vivre côte à côte en se considérant les
uns les autres comme frères, en respectant réciproquement leur
indépendance et l’unité indivisible de leur pays.
L’occupation de l’Iraque par les États-Unis et les guerres civiles qui y continuent après cette occupation entre les hommes
d’un même pays et d’une même culture, vivant côte à côte depuis
des siècles et ayant des intérêts communs nous montrent bien que
notre monde a bien besoin de l’amour humain, de la tolérance, de
la justice, de l’égalité, de la paix et de la tranquillité parvenues de
Mawlânâ jusqu’à Iqbâl et devenues chez Mustafa Kemal Atatürk
un principe politique, juridique et humain.
Si les amis de Mawlânâ, de Yunus et d’Iqbâl se multiplient
considérablement de jour en jour dans le monde entier, c’est que
l’homme qui se trouve face à des problèmes impitoyables a besoin du soufisme. Le bonheur de l’humanité, la paix et la sérénité
ne peuvent être assurés que par les valeurs universelles comme
l’amour humain, la tolérance, les droits et les libertés de l’homme,
acceptés par le monde entier. Les fondements de la pai internationales essayent d’établir et de défendre ont été jetées, il y a 800 ans
par Mawlânâ et Yunus. Iqbâl a repris au XXième siècle les pensées
de Djalâl-od-dîn Rûmi et de Yunus. A l’occasion, il serait utile de
noter que l’Unité Européen ne doit pas être considérée comme
une communauté des Européens qui sont chrétiens; pour le renforcement de la paix et de la fraternité européenne, elle doit ouvrir
vivement ses portes à la Turquie qui est un pays musulman et laïc.
Comme nous venons de l’exposer plus haut, la Turquie,
héritière d’une culture très riche, d’une civilisation très ancienne,
apportera certainement beaucoup à la constitution et à la protection de la paix et du bonheur de l’humanité.
Je voudrais terminer ma communication par ces vers de Yunus:
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Prenons une voie plus simple
«Venez, échanger des idées,
Aimons, soyons aimés»
Oui, «aimons, soyons aimés», pour la paix, pour la fraternité.
Merci pour votre patience!