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DANS L’AFFAIRE de la Loi sur les assurances, L. R. O. 1990, ET DANS L’AFFAIRE du Règlement de l’Ontario 283/95, en vertu de la Loi sur les assurances ET DANS L’AFFAIRE de la Loi sur l’arbitrage de l’Ontario de 1991, chapitre 17 ET DANS L’AFFAIRE d’un arbitrage ENTRE : ECHELON, COMPAGNIE D’ASSURANCES GÉNÉRALES Requérante — et — LA COMPAGNIE D’ASSURANCE GÉNÉRALE CO-OPERATORS Intimée MOTIFS DE LA DÉCISION COMPARUTIONS M. Chris Blom MILLER THOMSON s.e.n.c.r.l. 5800, rue King Ouest Toronto (Ontario) M5H 381 M. Mark Donaldson DUTTON BROCK LLP 1700, avenue Université, Bureau 438 Toronto (Ontario) M5G 2L9 Pour la Requérante Echelon, Compagnie d’assurances générale Pour l’Intimée La Compagnie d’assurance générale Co-operators VUE D’ENSEMBLE 1. Dans la province de l’Ontario, les personnes blessées dans des accidents d’automobile ont eu accès depuis plusieurs décennies à diverses formes d’indemnités d’accident légales « sans faute ». Ces indemnités sont actuellement régies par les dispositions de la partie VI — Assurance automobile de la Loi sur les assurances, L. R. O. 1990, chapitre 1.8, dans sa version modifiée, et des règlements afférents. 2. Le 22 juin 1990, les améliorations apportées à ces indemnités ont fait l’objet de mesures législatives qui sont entrées en vigueur. Ainsi, les indemnités d’accident auparavant modestes1 ont été grandement augmentées, alors que certaines restrictions ont été imposées sur le droit de poursuivre en dommages-intérêts. L’intention du législateur était, entre autres, de s’assurer que les victimes d’accidents d’automobile bénéficient d’un accès relativement simple et rapide à ce que nous appelons maintenant les indemnités d’accident légales. 3. Malheureusement, la partie de cet objectif qui touchait la « simplicité » est quelquefois illusoire, du point de vue des assureurs automobiles. En effet, parmi les préoccupations touchant occasionnellement les assureurs se trouve l’ordre de priorité selon laquelle l’un et l’autre doivent verser les indemnités dans certaines circonstances. 4. Le cas qui m’est présenté consiste justement en un « conflit d’ordre de priorité » entre deux assureurs, à savoir lequel d’entre eux doit réagir en premier à une demande de règlement soumise par M. Kenneth Fleming, relativement à certaines indemnités 1 Le terme « modeste » est quelquefois bien relatif. Voici un exemple pour illustrer ce propos : la perte de revenus hebdomadaires maximale offerte immédiatement avant la nouvelle législation était de 140 $. La mise en œuvre du Règlement de l’Ontario 672 a fait en sorte que, dès son entrée en vigueur, un montant plus substantiel de 600 $ était offert, ainsi que des options pouvant atteindre jusqu’à 1 050 $ par semaine, si ces dernières avaient été choisies au moment de l ’acquisition de la police d’assurance. 2 ECHELON c. CO-OPERATORS MOTIFS DE LA DÉCISION d’accident légales à la suite de blessures qui lui ont été infligées lors d’un accident d’automobile. 5. M. Fleming est possiblement couvert en vertu de plus d’une police d’assurance automobile de propriétaire, selon qu’une ou deux polices d’assurance de propriétaire2 étaient en vigueur au moment de l’accident. 6. J’instruis cette action au titre de seul et unique arbitre, en vertu d’une nomination consensuelle à la demande des avocats représentant des parties dans le cadre d’une convention d’arbitrage intervenue en août 2015. 7. L’audience s’est tenue à Toronto le 9 octobre 2015 et a été limitée à une argumentation orale basée sur le factum, le recueil de jurisprudence, la transcription des témoignages et d’autres preuves documentaires qui m’ont été soumises et dont la liste apparaît à l’Annexe A du présent document. Le dépôt de ces documents a respecté certaines étapes de procédure, y compris l’interrogatoire des témoins sous serment, la production documentaire et d’autres enquêtes, conformément à l’ensemble des ententes intervenues avec les avocats au cours de téléconférences préparatoires à l’audience. Je suis reconnaissant aux deux avocats impliqués dans cette affaire pour le professionnalisme dont ils ont fait preuve tout au long du processus et pour l’efficacité avec laquelle ce litige a été finalement débattu, car il aurait autrement pu s’étendre sur une période plus longue. 2 J’utiliserai à partir d’ici le terme « police de propriétaire ». 3 ECHELON c. CO-OPERATORS MOTIFS DE LA DÉCISION RÉSUMÉ DES FAITS 8. La Requérante, Échelon, Compagnie d’assurances générale (« Echelon »), a assuré une automobile dont le propriétaire est Mme Trista Mitts. L’Intimée, La Compagnie d’assurance générale Co-operators (« Co-operators »), a assuré une fourgonnette dont le propriétaire initial était M. Fleming. 9. Aucun litige n’existe quant à l’effet de la police de propriétaire émise par Echelon au moment de l’accident, laquelle couvrait l’automobile de Mme Mitts conduite par M. Fleming. Toutefois, les parties ne s’entendent pas sur l’état de la police de propriétaire émise au nom de M. Fleming par Co-operators. 10. Pour bien saisir le contexte de ce différend, il faut examiner l’historique des relations de M. Fleming avec Co-operators et son courtier local à la suite d’un accident d’automobile précédent, ainsi que la conduite de Co-operators à la suite du premier et du deuxième accident d’automobile de M. Fleming. Le véhicule Ford Windstar 2000 de M. Fleming et son premier accident 11. La preuve documentaire historique cumulative incontestée qui m’a été présentée démontre que M. Fleming était assuré en vertu d’une police de propriétaire émise par Co-operators et portant le numéro de police 505661595 (la « police d’assurance de Co-operators »).3 La police d’assurance de Co-operators a été en vigueur à compter du 19 novembre 2009 et a été émise au titre d’une police de propriétaire aux fins de la couverture de M. Fleming et de son véhicule Ford Windstar 2000. Le dossier indique également qu’il y a vraisemblablement eu un léger « écart » de couverture pour cause de nonpaiement de prime en vertu d’une police précédente souscrite auprès de Co-operators et portant un numéro de police différent. Compte tenu de l’historique des faits qui ont suivi, ce fait n’est pas pertinent aux fins actuelles. 3 4 ECHELON c. CO-OPERATORS MOTIFS DE LA DÉCISION 12. Le 19 août 2011, M. Fleming a été impliqué dans un premier accident d’automobile alors qu’il conduisait sa fourgonnette Ford Windstar 2000. Selon l’évaluation de Co-operators, son véhicule était une « perte totale ». 13. Les dossiers indiquent qu’à la suite de son premier accident d’automobile, M. Fleming a utilisé sa couverture en vertu de la police d’assurance émise par Co-operators pour louer un véhicule de remplacement. Le 7 septembre 20114, il semble incontesté que M. Fleming a reçu un versement en contrepartie de la perte totale de sa fourgonnette Ford Windstar 2000, soit la même journée où il a retourné le véhicule de location. 14. Les réponses sous serment de M. Fleming aux questions à la page 34 de la transcription de son témoignage indiquent qu’il n’avait pas besoin d’une automobile, puisque son père le conduisait à son travail et l’en ramenait tous les jours : Q: R: O. K... Alors, je comprends… que vous travaillez dans le domaine de la construction. Et que votre père travaille dans le même domaine. Oui, je lui ai décroché un emploi peu après que j’ai commencé à travailler pour eux, alors… Q: R: Je vois. Ainsi, vous auriez toujours travaillé sur les mêmes chantiers. Oui. Q: Ainsi, votre père vous aurait habituellement emmené au travail et ramené à la maison? Il devait passer devant chez moi chaque jour pour aller au travail, alors… R: Le 7 septembre 2011 est une date importante par rapport à ce que Co-operators a fait environ 18 mois plus tard, et environ trois mois après le deuxième accident de M. Fleming. 4 5 ECHELON c. CO-OPERATORS MOTIFS DE LA DÉCISION 15. Il a demandé à M. Blatherwick, le courtier local de Co-operators, de préserver sa couverture pendant qu’il chercherait un véhicule de remplacement. Ses réponses aux questions aux pages 31 à 34 de la transcription de son témoignage indiquent que M. Fleming était indécis, mais qu’en définitive, il n’a jamais acheté d’autre automobile : Q: R: Q: R: Q: R: Q: Et avez-vous négocié avec Co-operators ou avec Brent Blatherwick au sujet des dommages aux biens? Je suis presque certain que c’était le courtier, Brent Blatherwick. OK. Et le courtier, que vous a-t-il dit à propos de vos couvertures après que votre Windstar ait été... ait été détruite lors du premier accident? Je ne me souviens pas précisément. Mais je sais que j’ai signé un formulaire là-bas, mais je ne me souviens d’aucun détail à ce sujet-là, alors… OK. Avez-vous signé ce formulaire lorsque vous avez reçu le chèque pour le Windstar? Je crois bien. Je n’en suis pas certain à 100 pour cent, mais… R: OK. Avez-vous discuté de la possibilité de mettre en suspens votre police d’assurance au cas où vous achèteriez un véhicule de remplacement? Oui, on en a discuté. Q: R: Et à qui avez-vous… avec qui en avez-vous discuté? Je ne suis pas certain du nom de la personne avec qui je discutais. Q: R: OK. Cette discussion a-t-elle eu lieu face à face ou au téléphone? Non, c’était face à face. Q: R: Et cela s’est-il passé au bureau du courtier? Oui. Q: R: OK. Alors, il est possible que la personne ait été quelqu’un d’autre que Brent? Oui. Q: R: OK. Ouais, je ne l’ai pas vu très souvent, alors… Q: OK. Et cette discussion à propos de laisser la police en suspens au cas où vous achèteriez un véhicule de remplacement… Oui? R: Q: R: Vous souvenez-vous de quelque chose d’autre après cela? Je sais qu’une échéance a été mentionnée, mais je ne m’en souviens pas, et ils ont dit que ma police devrait être annulée après cette échéance. 6 ECHELON c. CO-OPERATORS MOTIFS DE LA DÉCISION Q: R: OK. Donc, ils ont fait mention d’une échéance et ils vous ont dit que si vous vouliez trouver une nouvelle fourgonnette ou une nouvelle automobile… Oui. Q: R: … vous deviez le faire avant une date précise? Oui. Mais je ne peux pas m’en souvenir. Q: OK. Avez-vous par la suite été en communication avec le bureau du courtier et lui avez-vous mentionné : vous savez, je n’achèterai pas de nouvelle fourgonnette ou d’autre automobile? Je ne crois pas. Même au moment de l’accident, je cherchais encore un autre véhicule, mais… R: Q: R: Q: R: 16. OK. Donc, il semble que vous ayez laissé en suspens la décision de le remplacer ou non; et vous ne leur avez pas dit que vous n’aviez pas l’intention d’acheter un autre véhicule? Je n’étais toujours pas décidé. C’est comme si je voulais encore avoir un véhicule, mais que j’aie fini pas ne pas en acheter. OK. Et pourquoi n’en avez-vous pas acheté un? Mon père me conduisait déjà au travail et il m’en ramenait, alors je n’avais pas vraiment besoin d’un véhicule à ce moment-là. Ironiquement, une autre donnée semble indiquer qu’il ait finalement trouvé un véhicule peu avant son deuxième accident. Mais en ce qui concerne son deuxième accident d’automobile, il pourrait, indépendamment de cet incident, avoir découvert qu’il payait encore une prime pour la police d’assurance de Co-operators. Administration de la police d’assurance de Co-operators à la suite du premier accident d’automobile 17. Dans le cadre d’un interrogatoire sous serment, la transcription du témoignage de Mme Lintott, souscripteur pour Co-operators, confirme que, dans le cadre normal de ses activités, Co-operators avait une pratique bien établie à l’effet de laisser en suspens la couverture d’une police de propriétaire pour une courte période à la suite d’une perte totale, afin de permettre au titulaire de la police de faire l’acquisition d’un véhicule de remplacement. 7 ECHELON c. CO-OPERATORS MOTIFS DE LA DÉCISION 18. Pour des raisons qui demeurent inexpliquées, il apparaît que Co-operators n’a pas suivi sa pratique habituelle établie depuis longtemps. Le souscripteur a également admis que la police émise par Co-operators pourrait être utilisée dans divers scénarios impliquant un véhicule autre que la fourgonnette Ford Windstar 20005. 19. Le souscripteur a également concédé que l’effet des paiements de prime en continu dans leur système faisait en sorte de garder la police de Co-operators en vigueur par l’intermédiaire de renouvellements automatiques traités à la date anniversaire de souscription initiale du 19 novembre 2009. Il apparaît qu’après le premier accident d’automobile de M. Fleming, un renouvellement a été traité le 19 novembre 2011 et ensuite répété une fois de plus le 19 novembre 2012. Comme la prime a été réglée par versements mensuels à partir du compte bancaire de M. Fleming par débits ou retraits automatiques, et qu’aucune étape n’est prévue dans le système pour en traiter la résiliation, la police de Co-operators est restée en vigueur bien après le deuxième accident d’automobile de M. Fleming.6 20. Co-operators reconnaît clairement avoir continué à recevoir des paiements de prime sous forme de retraits automatiques à partir du compte bancaire de M. Fleming. 5 L’avocat a repassé avec le souscripteur quelques scénarios tenant compte de l’acquisition récente d’une automobile, ou du fait que M. Fleming ait conduit l’automobile de ses amis. Consulter les pages 21 à 24 liées aux questions 104 à 100 et 115 à 120 de la transcription. 6 Ces scénarios ont été examinés par l’avocat, de concert avec le souscripteur, et ils sont reflétés aux questions 84 à 92 et 99 à 104 des pages 18 à 21 de la transcription. 8 ECHELON c. CO-OPERATORS MOTIFS DE LA DÉCISION 21. Je dois ajouter que, selon la transcription, il semble que M. Fleming était parfaitement inconscient de ce fait et qu’il n’avait réalisé que Co-operators recevait encore des retraits mensuels à partir de son compte bancaire que bien après son deuxième accident d’automobile, comme le démontre l’extrait suivant de la transcription aux pages 34 et 35 : Q: R: Q: R: Q: Alors, au moment de votre accident en 2013, à votre connaissance, vous n’aviez pas de police d’assurance de Co-operators? Ouais, je ne pensais pas qu’elle était encore en vigueur. Je ne savais pas qu’ils prenaient encore de l’argent dans mon compte, alors… OK. Vous mentionnez des retraits de sommes de votre compte bancaire. Je présume que vous aviez consenti à des paiements par prélèvement automatique? Oui. R: Et à un moment donné, Co-operators vous a-t-elle remboursé l’argent prélevé de votre compte bancaire? Oui. Q: R: Savez-vous à peu près à quel moment c’était? C’était après l’accident. Q: R: Après l’accident de 2013? Oui. Le deuxième accident de M. Fleming et la question de « priorité » 22. Le 16 janvier 2013, M. Fleming a eu un deuxième accident au volant de l’automobile de Mme Mitts qui, comme nous l’avons appris, était couverte par une police de propriétaire souscrite auprès d’Echelon. Il a alors subi de graves blessures7 et il a présenté une demande d’indemnités d’accident légales à Echelon. S’il n’y avait pas d’autres faits pertinents, il n’y aurait aucun différend quant à la priorité. En marge d’autres preuves, le mémoire d’Echelon comprend, sous l’onglet 2, un certificat d’invalidité rempli par le Dr R. Pokrupa, un neurochirurgien de l’Hôpital général de Kingston. Dans la Partie 5, le médecin décrit que M. Fleming a subi, entre autres problèmes, des fractures du visage et de la base du crâne. Une description de l’accident apparemment fournie par Mme Mitts est en annexe et démontre que les blessures comprenaient un os iliaque gauche ébréché, un poumon gauche écrasé, une cavité de sinusale cassée, une mâchoire supérieure cassée, ainsi que des symptômes connexes. 7 9 ECHELON c. CO-OPERATORS MOTIFS DE LA DÉCISION 23. Nous devons toutefois, à ce point-ci, garder à l’esprit que Co-operators avait indiqué dans son système que la police d’assurance souscrite était entièrement payée et qu’elle était bien en vigueur le 16 janvier 2013, soit le jour du deuxième accident de M. Fleming. Selon les renseignements au dossier qui m’a été présenté, il apparaît clairement qu’une enquête auprès de Co-operators menée au moment du deuxième accident aurait démontré, au vu des dossiers de cette dernière, qu’une police de propriétaire était effectivement en vigueur et que M. Fleming y était l’assuré désigné. 24. Echelon conteste l’ordre de priorité, soutenant que M. Fleming était un assuré désigné en vertu d’une police de propriétaire valide émise par Co-operators et en vigueur le jour du deuxième accident. 25. Comme nous l’avons mentionné, le mot « simplicité » est quelquefois une illusion pour les assureurs en ce qui a trait à l’administration des indemnités d’accident légales. 26. L’examen du dossier nous permettra de constater que Co-operators a pris, après le deuxième accident de M. Fleming, certaines mesures pour corriger l’erreur administrative apparente qui s’était glissée à la suite du traitement du remboursement pour perte totale du véhicule lors du premier accident. Administration de la police d’assurance de Co-operators à la suite du deuxième accident 27. En temps utile, l’enquête d’Echelon a permis de connaître les détails de la police d’assurance de Co-operators qui était encore en vigueur et qui couvrait M. Fleming. Echelon a demandé à la firme d’experts en sinistres qu’elle avait désignée de fournir à la Requérante un avis de contestation entre assureurs, lequel a été envoyé le 13 février 21013,8 demandant à 8 Ceci apparaît dans le mémoire du document d’Echelon à l’onglet 5. 10 ECHELON c. CO-OPERATORS MOTIFS DE LA DÉCISION Co-operators d’ouvrir rapidement une enquête. 28. Co-operators a appris qu’en raison d’une enquête menée par Mme Mitts le 21 janvier 2013, soit cinq jours après le deuxième accident, le courtier local de Co-operators avait découvert que M. Fleming n’était pas propriétaire de la fourgonnette Ford Windstar 2000 couverte par la police d’assurance de Co-operators, puisqu’elle avait été déclarée perte totale à la suite de son premier accident en août 2011. Pour des raisons inexpliquées, les retraits automatiques mensuels ont fait en sorte de maintenir active la police dans le système, même après que M. Fleming ait retourné le véhicule de location le 7 septembre 2011. 29. Co-operators a pris l’initiative de fournir une version imprimée de certaines notes dans le système reflétant le dialogue entre Mme Mitts et le courtier local de Co-operators, mais ces dernières n’ont pas été déposées à temps pour cette audience. 30. Toutefois, nous possédons le texte dont le témoin à la souscription a fait la lecture apparemment mot pour mot pendant son interrogatoire sous serment, à partir de son ordinateur portable dans lequel elle avait téléchargé ces notes de système dans le but de le présenter lors de son interrogatoire. 31. Comme Co-operators s’est basé sur ces preuves pour agir, je les indique ci-dessous sous forme d’extraits des pages 26 et 27 de la transcription de l’assureur : Q: R: Q: À votre connaissance en date d’aujourd’hui, cela représente-t-il le premier avis que Co-operators a reçu au sujet de l’accident impliquant M. Fleming? C’est-à-dire… il y avait des notes là-dessus. Laissez-moi vérifier. Le 13 février 2013. Nous avons des notes sur une police que nos avons justement… le conseiller a été informé qu’il y avait eu un accident le 21 janvier 2013. Est-ce que c’était tout ce que contenaient les notes, ou sont-elles plus exhaustives et touchent-elles autre chose? 11 ECHELON c. CO-OPERATORS MOTIFS DE LA DÉCISION 32. R: Elles sont plus longues et touchent d’autres sujets. Q: R: Qu’est-ce qu’elles touchent? Elles indiquent qu’ils — Trista — ont assuré un véhicule et qu’en discutant avec elle, ils ont découvert que la police de Ken était encore en vigueur et qu’elle couvrait un véhicule dont il n’était plus le propriétaire. Et aussi, qu’il n’aurait pas dû y avoir de police en vigueur. Q: R: Y avait-il d’autres renseignements sur ce qui est arrivé à ce véhicule? Qu’il avait été impliqué dans un accident en 2011. Q: R: Avons-nous la date précise de l’accident en question? Oui, la date de la perte. Q: R: Le 8 septembre? Septembre… désolée, le 19 août 2011. Q: R: Les notes comprennent-elles autre chose, en fait? Elles indiquent seulement que la police n’a jamais été… Voulez-vous que je vous en fasse la lecture complète? Q: R: Oui, si vous voulez bien. Oui. OK. « Ken se prépare à acheter une Fiesta 2013, il a eu un accident avec la police de sa petite amie [sic] avant de prendre livraison de la Fiesta, la petite amie est assurée auprès de notre bureau, police d’assurance d’Echelon, Ken est à l’unité de soins intensifs en raison de blessures, Trista veut faire le changement de véhicule pour pouvoir se rendre au travail. Trista m’a informé qu’il n’y avait aucun véhicule couvert sur sa police et que sa police ne devrait pas être active. Elle dit qu’il a demandé que la police demeure en vigueur pendant un mois ou deux après la présentation de la demande de règlement du 11 août 2011. Le chèque a été émis. Le client n’a jamais rappelé »… Après avoir découvert qu’aucun véhicule n’était associé à la police de Co-operators après le 7 septembre 2011, Co-operators a procédé à ce qui semble être une demande de résiliation entrée en vigueur le 8 septembre 2011. Co-operators a également remboursé tous les retraits encaissés à partir du compte bancaire de M. Fleming pour payer la prime à compter de cette date, y compris les intérêts. 33. Aucun élément de preuve n’a été présenté pour démontrer que cette résiliation avait été communiquée à M. Fleming. 12 ECHELON c. CO-OPERATORS MOTIFS DE LA DÉCISION 34. M. Fleming a confirmé que Co-operators encaissait encore, à son insu, des sommes à partir de son compte bancaire. Comme nous l’avons mentionné ci-dessus, il n’y a aucune explication justifiant le fait que Co-operators n’ait pas suivi son protocole habituel pour procéder à la résiliation de la couverture de M. Fleming une fois le véhicule de location retourné le 7 septembre 2011. 35. Ce qui semble clair, c’est qu’après avoir été informée de la situation à la suite du deuxième accident de M. Fleming, Co-operators a procédé au remboursement de la prime avec intérêts.9 36. Si cela s’était passé à n’importe quel moment avant le deuxième accident de M. Fleming, il est possible qu’il n’en ait découlé aucun différend.10 37. Dans le but de noter la chronologie des faits, toutefois, il ne semble pas y avoir de différend quant au fait que Co-operators a simplement remboursé les montants retirés du compte bancaire de M. Fleming. Co-operators n’a pas envoyé de lettre explicative à M. Fleming à ce sujet, et si elle l’a fait, ni la société d’assurance, ni M. Fleming n’a été en mesure d’en soumettre une copie à temps pour cette audience. Co-operators n’est donc pas en mesure de prouver qu’elle a émis un avis écrit de résiliation de police. 38. Quoi qu’il en soit, il n’y a aucun différend quant au fait que Co-operators a pris ces mesures uniquement à la suite du deuxième accident d’automobile de M. Fleming, celui pour lequel il réclame des indemnités d’accident légales et celui visé par la contestation de l’ordre Aux pages 27 et 28 de la transcription du témoignage de l’assureur, les notes du courtier local dans le système telles qu’elles apparaissent au dossier révèlent qu’il a communiqué avec un souscripteur de Co-operators qui lui aurait apparemment conseillé « qu’ils [sic] voudront annuler la police à la date de la demande de règlement »; le courtier ne devait faire aucune modification jusqu’à nouvel ordre, car « ils [sic] voudront peut-être faire en premier lieu une enquête sur la situation ». 10 Je dis bien « peut-être » délibérément. Les observations d’Echelon résumées ci-dessous établissement clairement que sa contestation vise en réalité l’intégralité des étapes entreprises par Co-operators pour résilier la police. Si ces étapes sont correctes, la police d’assurance de Co-operators demeure active à ce jour. 9 13 ECHELON c. CO-OPERATORS MOTIFS DE LA DÉCISION de priorité d’Echelon. 39. L’avocat d’Echelon a soumis les documents de Co-operators présentés lors de l’interrogatoire de l’assureur sous serment et enregistrés comme pièces, lesquels font état de la réception des paiements de prime avant et après la date du deuxième accident d’automobile de M. Fleming. L’avocat de Co-operators n’exprime aucun désaccord avec cette qualification. 40. L’avocat de Co-operators concède également qu’il n’y a aucune preuve documentaire démontrant que Co-operators ait à un moment donné exécuté une résiliation légale de la police qu’elle avait émise. M. Fleming ne se souvient d’aucun détail pertinent à la suite de son premier accident d’automobile et, bien qu’il se souvienne vaguement avoir reçu des documents, il n’est actuellement pas en mesure de localiser tout document pouvant servir de preuve de résiliation de sa police.11 41. Comme le démontrent les extraits de transcription ci-dessus, M. Fleming n’a donné au courtier local aucune directive verbale à l’intention de Co-operators après avoir retourné le véhicule de location et avant l’événement de son deuxième accident. 11 La transcription du témoignage de M. Fleming suggère, aux questions 199 à 202 de la page 28, qu’il se souvient avoir reçu des documents relatifs à la résiliation à la suite de son premier accident. Toutefois, lorsque je lui ai demandé de fournir une preuve à c e t e f f e t a u c o u r s d e l ’ a u d i e n c e , l’avocat de Co-operators a indiqué qu’il n’avait aucune autre preuve documentaire à l’appui de ce souvenir apparemment inexact. Au contraire, les dossiers de Co-operators indiquent un retrait mensuel continu correspondant aux paiements de la prime d’assurance de M. Fleming, et de manière non interrompue à partir de l’entrée en vigueur de la police en novembre 2009 et jusqu’en avril 2013. 14 ECHELON c. CO-OPERATORS MOTIFS DE LA DÉCISION QUESTIONS 42. En vertu de la convention d’arbitrage, ma tâche est de déterminer toutes les questions en litige entre les parties « relatives à un différend concernant l’ordre de priorité » et, sur une base préliminaire, de répondre aux questions suivantes énoncées à l’article 2 de la convention d’arbitrage : 43. a) La police de propriétaire portant le numéro 505661595 émise par l’Intimée à Fleming (la « police ») était-elle en vigueur au moment de l’accident survenu le 16 janvier 2013? b) La police de propriétaire comportait-elle une garantie relative aux indemnités d’accident au moment de l’accident du 16 janvier 2013? c) L’Intimée était-elle la société d’assurance prioritaire aux fins de la demande de règlement relative à des indemnités d’accident légales présentée au nom de Fleming en vertu de la section 268 de la Loi sur les assurances à la suite de l’accident survenu le 16 janvier 2013? En termes clairs et en temps normal, les parties me demandent de déterminer si la police de Co-operators est prioritaire à la police de propriétaire d’Echelon, en ce qui a trait à la demande de règlement relative à des indemnités d’accident légales présentée par M. Fleming. 44. Toutefois, avant de statuer sur la question de la priorité, et compte tenu de l’historique présenté précédemment et de la position affirmée par Co-operators sur la base de celle-ci, dont je fais la description ci-dessous, je dois tout d’abord établir si la police d’assurance de Co-operators était en vigueur à ces fins. 45. Dans sa plaidoirie, l’avocat a convenu que si je déclarais la police d’assurance de Co- operators en vigueur à la date du deuxième accident d’automobile de M. Fleming, Cooperators serait désignée comme assureur prioritaire pour le versement d’indemnités en vertu du paragraphe 268 (5) de la Loi sur les assurances. 15 ECHELON c. CO-OPERATORS MOTIFS DE LA DÉCISION POSITION DES PARTIES 46. La police d’assurance de Co-operators était-elle en vigueur relativement au deuxième accident d’automobile de M. Fleming? LA POSITION D’ECHELON : « OUI » 47. Echelon soutient que la police d’assurance de Co-operators comprenant une garantie relative aux indemnités d’accident légales était en vigueur au moment du deuxième accident d’automobile de M. Fleming. Echelon fait valoir que Co-operators n’était pas autorisée à résilier la police à la date rétroactive du 8 septembre 2011. Selon elle, une telle résiliation est contraire à la politique officielle. Dans sa plaidoirie, l’avocat a également soutenu qu’il se trouve une raison contractuelle solide pour refuser de traiter la résiliation de manière rétroactive. 48. Echelon soutient que, selon les preuves documentaires et la transcription des témoignages non réfutés, ma quête des faits doit me mener à la conclusion juridique incontestable que la police d’assurance de Co-operators était en vigueur. 49. Les preuves à l’appui de la position d’Echelon comprennent à tout le moins les éléments suivants: a. Les versions papier des écrans du système de Co-operators démontrent, comme le témoignage de M. Fleming le confirme, le traitement d’une série de retraits mensuels relatifs à la police de Co-operators, et ce, jusqu’au moment du remboursement de la prime au mois d’avril 2013.12 Conformément aux raisons énoncées à l’Annexe A, les documents de souscription de Co-operators ont été joints comme pièce A de l’interrogatoire sous serment de l’assureur le 28 juillet 2015 dans le cadre de ces poursuites, et ils ont été déposés par Echelon en tant que partie intégrante de son mémoire. La page 1 de ce document illustre les différentes entrées correspondant au témoignage de l’assureur. 12 16 ECHELON c. CO-OPERATORS MOTIFS DE LA DÉCISION 50. b. M. Fleming n’a jamais communiqué avec le courtier local avant son deuxième accident pour lui demander de transmettre à Co-operators la demande de résiliation de la police d’assurance émise par Co-operators. c. Co-operators ne présente aucune preuve des mesures initiées pour résilier légalement la police avant le deuxième accident d’automobile. d. La police d’assurance de Co-operators a par conséquent été laissée en mode « actif » à la suite du premier accident d’automobile de M. Fleming au titre d’une police de propriétaire, bien qu’il ne soit plus propriétaire d’une automobile.13 Echelon fait valoir, sur la base de ces faits, qu’aucun doute ne subsiste et que, par conséquent, je devrais déterminer que Co-operators, tout comme Echelon, avaient souscrit une police de propriétaire « en vigueur » couvrant M. Fleming à la date de son deuxième accident d’automobile. 51. Cet élément est important, car, si je statue en ce sens, comme l’avocat en convient et que je le résume séparément ci-dessous, l’effet juridique sous le régime législatif actuel est d’exiger que Co-operators doit réagir à la demande de règlement de M. Fleming en priorité par rapport à Echelon. 52. Echelon soutient qu’une résiliation légale doit être interprétée de manière rigoureuse, le fardeau de la preuve reposant sur l’assureur qui cherche à s’en prévaloir — en l’occurrence, Co-operators. Comme en fait foi l’analyse que je présente ci-dessous, la jurisprudence sur cette approche stricte semble insaisissable. L’avocat d’Echelon en fait état de manière concise au paragraphe 23 de la page 5 de son exposé des questions de fait et de droit : Bien qu’une recherche de propriété n’était pas disponible au moment de l’audience, l’avocat d’Echelon prévoyait en amorcer une dans le but de confirmer à qui appartenait la fourgonnette Ford Windstar 2000 au moment du deuxième accident d’automobile. Selon moi, peu se jouera sur cette question pour les raisons présentées ci -dessous. 13 17 ECHELON c. CO-OPERATORS MOTIFS DE LA DÉCISION [TRADUCTION] La résiliation de la police en vigueur le 8 septembre 2011 a été communiquée par l’entremise de Trista Mitts. Elle n’était pas la titulaire de l’assurance. Aucune lettre d’explication n’a été envoyée à Fleming à ce sujet. [Référence omise] 53. Co-operators admet de façon claire qu’elle n’a pas pris les mesures nécessaires pour procéder à une résiliation légale, même à la suite du deuxième accident d’automobile survenu en avril 2013. 54. Echelon fait aussi valoir que cette situation ne représentait aucune modification aux risques, question que l’assureur a soulevée pendant son interrogatoire sous serment pour expliquer en partie le fondement de sa décision de procéder à une résiliation rétroactive de la police d’assurance de Co-operators et au remboursement de la prime de M. Fleming.14 55. En résumé, Echelon soutient que la prétendue résiliation de la police d’assurance de Co-operators n’a pas été demandée par Fleming et que, par conséquent, elle ne se qualifie pas au titre d’une résiliation de police demandée par son titulaire. Elle n’a pas non plus été effectuée au titre d’une résiliation légale avant le deuxième accident de M. Fleming. Par conséquent, la police d’assurance de Co-operators doit être déclarée en vigueur au moment du deuxième accident d’automobile de M. Fleming. 56. Echelon fonde son opinion sur quelques décisions d’arbitrage, sur une décision du tribunal de première instance et, peut-être de manière plus convaincante, sur une décision du tribunal de deuxième instance. Ces références sont présentées à titre d’exemples d’exigences Comme les questions de l’avocat adressées à ce témoin le montrent, et compte tenu de l’absence de véhicule associé à la police en question, les risques pour l’assureur étaient sans doute moins grands que si un véhicule y avait été mentionné. Consulter les questions 201 à 207 des pages 38 et 39 de la transcription du témoignage de l’assureur; relativement à l’hypothèse de la présence d’un véhicule de remplacement, ce qui pourrait violer les règles de souscription au titre d’exception, consulter les questions 214 à 217 des pages 40 et 41. 14 18 ECHELON c. CO-OPERATORS MOTIFS DE LA DÉCISION strictes en cas de résiliation légale, et également pour faire la démonstration qu’une fausse représentation ou une non-divulgation ne représente pas, sur le plan juridique, une base solide pour refuser une couverture ou pour tenter de résilier la police d’un propriétaire depuis son entrée en vigueur, sous prétexte qu’elle n’existait pas. Dans sa plaidoirie, l’avocat a particulièrement insisté sur la décision d’un panel de cinq membres de la Cour d’appel dans l’arrêt Campanero v. Kim15 voulant que lorsqu’un assureur émet « un instrument » prétendant être une police de propriétaire, il ne puisse pas contester que la police est nulle depuis le début à cause d’une fausse représentation relative à la propriété de l’automobile assurée. 57. Bien que l’affaire Campanero concernait l’aspect de la part de responsabilité associée à la garantie en vertu d’une police de propriétaire, Echelon souligne que si la police n’est pas résiliée depuis le début de la souscription à ces fins, elle ne peut être déclarée nulle depuis le début pour toute autre fin, y compris la garantie d’indemnités d’accident légales. 58. Echelon soutient que l’affaire Campanero appuie sa position par analogie, peu importe l’interprétation que l’on fait de la garantie, que ce soit en fonction d’une approche basée sur la politique officielle ou d’une approche strictement contractuelle. Dans tous les cas, lorsqu’il s’agit d’interpréter l’absence de résiliation dûment et correctement effectuée dans le contexte de dispositions légales pertinentes énoncées dans la Loi sur les assurances, le législateur a manifestement retiré la capacité d’un assureur automobile de se dégager d’une couverture de responsabilité. De telles polices doivent continuer de rendre disponibles des indemnités d’accident légales assujetties à des restrictions qu’il n’est pas pertinent de préciser ici. 15 {1998) 41 O.R. {3d) 545, [1998] O.J. No. 3518 (C.A.) 19 ECHELON c. CO-OPERATORS MOTIFS DE LA DÉCISION 59. Echelon soutient que le principal objectif du régime d’indemnités d’accident légales consiste à verser des prestations rapidement et à veiller à ce qu’elles soient, de fait, bien versées. Dans ce contexte, la politique officielle indique qu’il n’est pas suffisant pour un assureur d’affirmer que le titulaire de police ou le demandeur peut s’adresser ailleurs. 60. Echelon admet clairement que l’ensemble des décisions d’arbitrage et l’arrêt Campanero concernent les efforts des titulaires de police pour tromper un assureur. Toutefois, Echelon soutient que la même politique officielle doit s’appliquer de la même manière à la présente affaire, alors qu’il semble qu’une erreur ait été commise ou, à tout le moins, qu’aucune démarche n’ait pas été entreprise, ni par M. Fleming ou par Co-operators pour procéder correctement à la résiliation de la police.16 61. En tout état de cause, Echelon soutient que Co-operators n’avait aucun droit de résilier rétroactivement la police émise au moyen d’un simple remboursement de la prime de M. Fleming avec intérêts.17 62. En résumé, Echelon estime que Co-operators a agi comme la Cour d’appel le confirme : la loi ne permet pas de procéder à une résiliation dans le cas d’une garantie de responsabilité; et la jurisprudence en matière d’arbitrage conclut qu’il n’est pas permis de le faire dans le cas d’une garantie d’indemnités d’accident légales couverte par une police de propriétaire. Puisque la garantie d’indemnités d’accident légales fait partie intégrante de la police Au cours de ma plaidoirie, j’ai demandé, sur une base hypothétique, ce qui serait arrivé si Mme Mitts n’avait pas été assurée et si M. Fleming s’était adressé au « Fonds », assureur de dernier recours. L’avocat a jugé qu’à la suite d’une même enquête que celle menée par Echelon, le Fonds serait tenu de verser des prestations, mais qu’il intenterait une poursuite relative à l’ordre de priorité contre Co-operators. 16 Au cours de ma plaidoirie, j’ai soulevé une inquiétude quant à la possibilité que M. Fleming soit maintenant dans l’obligation de repayer la prime qui lui avait été remboursée si je jugeais que la police d’assurance de Co-operators était en vigueur à toutes fins. Les deux avocats s’entendaient sur le fait que Co-operators n’avait aucun recours pour récupérer ce paiement ou pour le déduire de toute autre couverture à laquelle M. Fleming pourrait souscrire à l’avenir. 17 20 ECHELON c. CO-OPERATORS MOTIFS DE LA DÉCISION d’assurance standard du propriétaire en Ontario, on doit en déduire que Co-operators ne peut se dégager de traiter une demande de règlement relative à cette garantie. Permettre le contraire signifie d’autoriser le contournement de l’esprit de la loi et de la politique officielle, ainsi que les dispositions d’ordre juridique et contractuel relatives à la police de propriétaire qui a été émise. La position de Co-operators : « l’absence d’intérêt assurable signifie l’absence de police en vigueur » 63. Tant dans sa documentation écrite que dans sa plaidoirie orale, l’avocat de Co- operators a présenté un point de vue légèrement différent, et ce, dans un but différent. Malgré des souvenirs vagues, M. Fleming affirme dans son témoignage qu’à un certain moment après l’expiration du délai qui lui avait été consenti, il s’attendait — il se souvient qu’on l’en avait informé — à ce que la police d’assurance de Co‑ operators soit résiliée. 64. Il soutient que la non-résiliation de la police de Co-operators résultait d’une « rupture de communication ». 65. Co-operators admet que M. Fleming n’a pris aucune mesure pour résilier sa police ou pour informer verbalement Co-operators qu’il ne remplacerait pas sa fourgonnette Ford Windstar 2000.18 66. Si l’on fait abstraction du fait que Co-operators ait eu un problème de compréhension découlant du manquement du courtier local à effectuer un suivi avec M Fleming, l’avocat fait valoir que Co-operators a continué d’encaisser des retraits mensuels pour payer la prime à partir du compte bancaire de M. Fleming jusqu’au moment du renouvellement de sa police 18 Dans la documentation écrite, Co-operators avance que M. Fleming avait enfreint certaines dispositions de sa police en omettant d’en informer l’assureur. J’examine plus loin cette position. 21 ECHELON c. CO-OPERATORS MOTIFS DE LA DÉCISION en 2011, puis jusqu’au moment d’un autre renouvellement en 2012, et ensuite jusqu’à ce que l’état de la police soit porté à l’attention des assureurs à la suite du deuxième accident d’automobile de M. Fleming. 67. L’avocat reconnaît également que les assureurs n’ont pris conscience de la situation que par pur hasard à la suite du deuxième accident d’automobile. Mme Mitts, dont l’automobile était conduite par M. Fleming au moment du deuxième accident de ce dernier, s’est trouvée à souscrire sa police de propriétaire auprès d’Echelon par l’entremise de la même société de courtage qui avait agi comme courtier local pour Co-operators. 68. À la suite du deuxième accident d’automobile de M. Fleming, il semble qu’elle se soit présentée pour se renseigner sur la possibilité de transférer la couverture d’Echelon de son automobile maintenant endommagée à une automobile dont M. Fleming avait fait l’acquisition et dont il s’attendait à prendre livraison chez le concessionnaire le jour suivant son deuxième accident. Les blessures que M. Fleming aurait apparemment subies lors du deuxième accident d’automobile ont mené à son hospitalisation à Kingston. Par conséquent, lorsque Mme Mitts s’est présentée au bureau du courtier, M. Fleming ne l’accompagnait pas pour faire valoir ses propres intérêts lorsqu’il est devenu évident que la police d’assurance de Cooperators était encore en vigueur.19 69. En l’absence de M. Fleming, il semble que Mme Mitts ait informé le courtier local que M. Fleming ne possédait pas de véhicule et qu’il n’avait pas eu l’intention de continuer à maintenir en vigueur la police de Co-operators après son premier accident en 2011. À tout le 19 Il semble que M. Fleming et Mme Mitts ne partageaient qu’une automobile. Il était donc assez impératif pour Mme Mitts d’avoir accès à une automobile assurée, puisque la sienne était maintenant endommagée. Je présume que cette circonstance et sa demande de réclamation pour dommages matériels expliquent sa visite au bureau du courtier à la suite de l’accident. 22 ECHELON c. CO-OPERATORS MOTIFS DE LA DÉCISION moins, c’est ce que l’on présume à partir des notes enregistrées dans le système de Cooperators, dont l’assureur a fait officiellement la lecture dans le cadre de son témoignage sous serment mentionné ci-dessus. 70. Co-operators met en relief le paragraphe 8 (10) de la police de propriétaire : « Qui peut donner l’avis et les preuves du sinistre? (10) L’avis du sinistre peut être donné et les preuves apportées par le représentant de l’assuré désigné dans le présent contrat en cas d’absence ou d’empêchement de l’assuré de donner l’avis ou d’apporter la preuve, si cette absence ou cet empêchement est suffisamment justifié ou, dans un cas semblable ou en cas de refus de l’assuré, par une personne qui a droit à une partie quelconque des sommes assurées. » 71. Co-operators fait valoir que le libellé de cette police d’assurance a permis à Mme Mitts d’agir à titre de mandataire de M. Fleming lorsqu’elle s’est présentée au bureau du courtier local à la suite du deuxième accident d’automobile. 72. Comme je l’ai mentionné précédemment, Co-operators reconnaît que, selon les éléments de preuve déposés par l’assureur, elle aurait offert une couverture prolongée même en l’absence d’un véhicule de remplacement au dossier, et ce, pour une période minimale de 21 jours après le retour du véhicule de location de M. Fleming.20 Conformément à la description fournie par l’assureur, le protocole mis en place chez Co-operators prévoit un appel téléphonique de suivi auprès du titulaire de police lorsque ce dernier n’a pas fait l’acquisition d’une automobile de remplacement à l’expiration de ce délai de 21 jours. Au cours de cette conversation téléphonique, Co-operators reçoit la demande verbale du titulaire de police pour procéder à la résiliation de la police et faire le suivi approprié.21 20 Comme je l’ai mentionné précédemment, l’avocat d’Echelon a posé des questions à ce sujet. Consulter les questions 136 à 140 de la page 28 de la transcription du témoignage de l’assureur. 21 Consulter les questions 143 à 147 à la page 29 de la transcription du témoignage de l’assureur. 23 ECHELON c. CO-OPERATORS MOTIFS DE LA DÉCISION 73. De nouveau, Co-operators reconnaît qu’aucune conversation téléphonique n’a eu lieu avec M. Fleming à ce sujet après son premier accident d’automobile en 2011.22 74. Dans sa plaidoirie, l’avocat de Co-operators a réitéré son argumentaire à l’appui d’une résiliation valide de la police de Co-operators, qui se résume à une combinaison des éléments suivants : 75. a. Mme Mitts agissant à titre de mandataire de M. Fleming pour donner des directives rétroactives au courtier local au sujet de l’intention de M. Fleming quant à son assurance après l’événement du premier accident; b. L’encaissement d’un chèque par M. Fleming en règlement de la perte totale de son véhicule, lui retirant ainsi son intérêt assurable dans la fourgonnette Ford Windstar 2000 à la suite de son premier accident d’automobile. En toute justice, toutefois, Co-operators a également mentionné dans sa documentation écrite que certaines dispositions inhérentes à la police de propriétaire exigeaient que M. Fleming informe Co-operators de [TRADUCTION]« toute modification de son statut de conducteur, de propriétaire ou de locataire d’un véhicule, ou de tout changement relatif à la propriété du véhicule », ainsi que de [TRADUCTION] « tout changement relatif à l’intérêt assurable » de son automobile.23 76. Co-operators fait également valoir qu’une fois clarifié le fait que M. Fleming avait été incorrectement considéré comme un assuré représentant des risques, la police de propriétaire prévoyait que l’assureur devait [TRADUCTION] « apporter les correctifs nécessaires et rembourser tout excédent de prime avec intérêts ».24 77. Enfin, Co-operators soutient que la police de propriétaire permet à M. Fleming de demander une résiliation « en tout temps », ce qui entraîne également une demande de Consulter les questions 149 à 159 aux pages 29 à 31 de la transcription du témoignage de l’assureur. Mémoire de Co-operators, aux paragraphes 34 et 36 de la page 7, citant la police de propriétaire aux paragraphes 1.4.1, 1.4.2, 8 (1) et 8 (2). 24 Ibid. à la page 8, paragraphe 37, citant la police de propriétaire aux paragraphes 8 (2), (1) et (2). 22 23 24 ECHELON c. CO-OPERATORS MOTIFS DE LA DÉCISION remboursement de l’excédent de prime « le plus rapidement possible ».25 78. En bref, Co-operators fait valoir une résiliation rétroactive demandée par un titulaire de police, appuyée par un manque d’intérêt assurable dans le seul véhicule couvert en vertu de la police d’assurance de Co-operators, en invoquant les obligations juridiques de M. Fleming concernant toute modification de son risque, ainsi que celles de Co-operators concernant le remboursement obligatoire de la prime en vertu des dispositions de la police de propriétaire. 79. Quant à la question de l’intérêt assurable, Co-operators s’appuie sur une décision d’arbitrage rendue le 6 décembre 2000, maintenue dans un visa manuscrit non publié en appel devant la Cour supérieure, et portant sur l’arrêt Pembridge Insurance Company v Liberty Mutual Insurance Company.26 80. Co-operators admet que l’affaire Pembridge n’est pas tout à fait identique à celle sur laquelle je dois statuer. Toutefois, la police d’assurance de Co-operators doit être considérée comme étant non existante au moment du deuxième accident de M. Fleming, de la même manière que l’a déclaré l’arbitre savant qui a rendu sa décision dans l’affaire en question.27 81. L’absence d’intérêt assurable est ressortie des circonstances factuelles au dossier Pembridge devant l’arbitre Robinson, alors qu’une fois que le titulaire de police a cédé son automobile endommagée pour 500 $, son intérêt assurable dans l’automobile a cessé d’exister. Au risque de trop simplifier, l’arbitre savant en a conclu qu’une fois les clés et les /d., paragraphe 39 citant la police de propriétaire aux paragraphes 8 (11), (2) et (4). La décision d’arbitrage comprenant 23 pages a été rendue à Toronto par l’arbitre R. Robinson et le visa d’appel a été autorisé par M. le juge B. Wright. 27 L’arbitre Robinson fait mention de cette conclusion à au moins deux endroits dans cette décision. Tout d’abord à la page 19, il affirme : « … J’en conclus, en fonction des faits liés à la situation actuelle, qu’il n’existait aucune police d’assurance relativement à M. Green et Pafco Compagnie d’Assurance au 24 décembre 1998. » Ensuite, à la page 21, après avoir cité un extrait d’une décision en appel du délégué du directeur, il affirme : « Je suis d’accord avec ses commentaires; toutefois, il faut qu’il existe une police de responsabilité automobile en vigueur et je suis d’avis, à partir des faits liés à cette affaire en particulier qu’aucune police de ce type n’existe. » 25 26 25 ECHELON c. CO-OPERATORS MOTIFS DE LA DÉCISION documents relatifs à la propriété remis aux propriétaires du parc à ferrailles, l’assuré désigné n’avait plus aucun intérêt assurable dans l’automobile et que, par conséquent, il ne pouvait y avoir aucune police en vigueur pour couvrir un intérêt assurable inexistant. De la même manière, Co-operators estime que l’intérêt assurable de M. Fleming a pris fin lorsqu’il a retourné le véhicule de location et qu’il est venu prendre son chèque le 7 septembre 2011. 82. Co-operators soutient que M. Fleming a failli à ses obligations en vertu de sa police d’assurance en omettant d’informer l’assureur qu’il ne remplacerait pas son automobile, ce qui a eu pour effet que Co-operators n’a pas résilié la police comme elle aurait dû le faire conformément à son protocole. 83. Des preuves à l’appui se trouvent dans les notes de système de Co-operators qui indiquent que, bien que M. Fleming n’en ait aucun souvenir, il a apparemment demandé, le 7 septembre 2011, à ce que la police demeure en vigueur parce qu’il avait l’intention de trouver « bientôt » un véhicule de remplacement – représentation faite lorsqu’il est allé chercher son chèque équivalant à la valeur de sa fourgonnette Ford Windstar 2000 qui avait été déclarée perte totale. 84. J’en déduis de ces preuves que Co-operators est convaincue que je dois déclarer que le classement des risques était « inexistant », puisque Co-operators n’aurait pas émis une police à quelqu’un qui n’était pas propriétaire d’un véhicule. M. Fleming ne possédait aucune automobile après être venu chercher son chèque en contrepartie de la perte totale de son véhicule et par conséquent, aucune police ne devrait avoir été en vigueur. 26 ECHELON c. CO-OPERATORS MOTIFS DE LA DÉCISION La réponse d’Echelon : « Oui, faute d’un réel mandat et d’une résiliation en bonne et due forme » 85. Echelon soutient que si Co-operators appuie son argumentaire sur une violation de police basée sur une fausse représentation, elle en a le fardeau de la preuve; or, elle n’en a fourni aucune. Abstraction faite du fait que M. Fleming ait été pertinemment conscient ou non de son devoir de faire rapport de sa décision de ne pas acheter un véhicule de remplacement, Echelon fait valoir que la fausse représentation devait être considérée comme étant un fait important. Selon les faits présentés par le souscripteur de Co-operators, la situation ne présentait aucune modification importante sur le plan des risques. 86. En réponse au fait que Co-operators s’appuie sur le sous-alinéa 8 (10) de la police de propriétaire, Echelon souligne que cette formulation ne soutient pas l’argumentaire de Cooperators, puisque : (a) elle concerne uniquement les avis de réclamation ou la preuve du dommage; (b) dans les faits, Mme Mitts n’est pas une mandataire dûment désignée, n’étant pas la personne à qui le produit de l’assurance est payable en vertu de la police de Cooperators dont il est question dans cette affaire. 87. Au sujet de la décision d’arbitrage relative à Pembridge maintenue par la Cour supérieure de l’Ontario, Echelon soumet deux points de preuve. 88. En premier lieu, Echelon note que les faits sont distincts, puisqu’il n’y avait aucune preuve pertinente de résiliation de la police.28 Par contre, Co-operators ne me présente aucune preuve documentaire à cet effet. Consulter l’arrêt Pembridge, au haut de la page 11, à l’endroit où l’arbitre Robinson cite une lettre de résiliation qui lui a été présentée comme preuve 28 27 ECHELON c. CO-OPERATORS MOTIFS DE LA DÉCISION 89. En deuxième lieu, Echelon souligne que la preuve présentée par l’assureur dans le cadre de cette affaire soutenait le fait qu’il ne couvrirait pas, et qu’il aurait même résilié la couverture, s’il avait su qu’aucun véhicule n’était associé au titulaire de la police. Or, cela ne reflète pas tout à fait la preuve qui m’a été présentée, puisque le souscripteur a reconnu que Co-operators aurait prolongé la couverture alors qu’aucun véhicule n’était attribué au titulaire, et ce, pendant une période de 21 jours suivant le versement du paiement prévu en cas de perte totale. 90. Mais plus fondamentalement, l’avocat d’Echelon fait d’une part une distinction quant à l’approche adoptée par l’arbitre savant – et par extension, le juge savant de la Cour supérieure –, et d’autre part, par la cour d’appel dans sa décision dans le cadre de l’affaire Campanero. 91. Dans l’arrêt Pembridge, l’arbitre savant, ainsi que le juge savant de la cour d’appel, ont été persuadés par les arguments reposant sur l’intérêt assurable, à la lumière des faits qui leur ont été présentés. Il ne semble pas que l’arbitre Robinson ait renvoyé à la décision sur l’affaire Campanero pour prendre en considération les questions relatives à une politique officielle ou à la formation des contrats. 92. Par contre, le panel composé de cinq membres dans l’affaire Campanero a examiné les preuves législatives de la politique officielle et les a interprétées conformément au libellé standard des polices d’assurance de propriétaire pour l’Ontario, car elles sont renforcées par la législation régissant ce libellé. 93. Echelon soutient qu’une interprétation du paragraphe 268 (2) 1.i donne du poids à cet argument, ainsi que les questions hypothétiques demandées à l’assureur sous serment visant à démontrer qu’« une automobile » signifie « toute automobile » au sens de directives 28 ECHELON c. CO-OPERATORS MOTIFS DE LA DÉCISION raisonnables en matière de souscription. Sur cette base, Echelon soutient que l’affaire Pembridge a tout simplement fait l’objet d’une mauvaise décision. ANALYSE 94. Nos cours d’appel ont ordonné de manière systématique aux tribunaux inférieurs (et par inférence nécessaire, aux arbitres privés qui appliquent la loi) qu’une analyse de couverture en vertu d’un contrat d’assurance doit, comme dans tout autre type de contrat, débuter par le libellé pertinent.29 95. Toutefois, cela présuppose qu’un contrat pertinent est bel et bien en vigueur. 96. La question de la « formation du contrat » revêt, selon Co-operators, une importance capitale, puisque s’il n’y a aucun contrat en vigueur entre Co-operators et M. Fleming au moment de son deuxième accident d’automobile, il n’y a aucune question d’ordre de priorité à débattre. 97. Mon analyse débute donc par un examen du régime législatif concernant les différends en matière d’ordre de priorité, puisque c’est le cadre dans lequel les parties opèrent et au sein duquel cet arbitrage se déroule. J’examinerai ensuite la question de la formation du contrat pour enfin conclure avec ma décision. 98. Dans l’ensemble de ces motifs, j’ai mentionné les concessions faites par les avocats et je répète, à l’intention du lecteur occasionnel, qu’elles ont été des plus utiles pour recentrer l’argumentaire, pour cerner les problèmes et enfin, pour soutenir mes délibérations à la suite de l’audience. Consulter, à titre d’exemple, le paragraphe 22 de l’affaire Hanis v Teevan, 2008 ONCA 678 : [TRADUCTION] « La relation entre un assuré et un assureur est de nature contractuelle et elle doit être régie par les conditions de la police d’assurance pertinente. Les obligations de l’assureur se trouvent avant tout dans la police. » [Traduction] 29 29 ECHELON c. CO-OPERATORS MOTIFS DE LA DÉCISION 99. Par contre, je me hâte de préciser au lecteur que ces concessions étaient pertinentes et qu’elles ne doivent pas présumer d’une faiblesse dans l’affirmation d’une position ou de l’abandon inapproprié des intérêts du client. Elles reflétaient plutôt une approche professionnelle à laquelle on s’attend de la part d’avocats chevronnés. Le régime législatif en matière de résolution de différends liés à l’ordre de priorité 100. Comme je l’ai mentionné au début de la présentation des motifs, le législateur a mis en œuvre un processus réglementaire de résolution de différends relatifs aux questions d’ordre de priorité survenant entre assureurs. 101. En vertu de la législation, si la police de Co-operators est en vigueur, la résolution de la question de l’ordre de priorité entre assureurs devient relativement facile à régler en appliquant un processus en deux étapes. 102. En premier lieu, si les deux polices sont en vigueur, les deux assureurs sont concernés en vertu de l’article 268 (2) 1 i. de la Loi qui stipule ce qui suit : (2) Obligation de paiement – Les règles suivantes s’appliquent en vue de déterminer qui est tenu de verser les indemnités d’accident légales : 1. À l’égard des personnes transportées : i. La personne transportée a un recours contre l’assureur de l’automobile à l’égard de laquelle elle est une assurée…30 103. Pendant l’argumentaire, j’ai demandé à clarifier la signification de « transportées ». Echelon a fait valoir que, tout comme dans le libellé de la phrase « l’automobile à l’égard de laquelle elle est un assuré », on peut en déduire, à partir des faits présentés dans le cadre de cet arbitrage, que l’on fait référence à « toute automobile », et non seulement celle désignée 30 Le reste de cette disposition et de ce paragraphe concerne l’ordre de priorité applicable dans d’autres scénarios qui ne sont pas pertinents au présent arbitrage. 30 ECHELON c. CO-OPERATORS MOTIFS DE LA DÉCISION dans la police de Co-operators.31 100. Co-operators estime que cela importe peu si, comme elle le fait valoir, M. Fleming n’avait plus aucun intérêt assurable à protéger après la perte totale de sa fourgonnette Ford Windstar 2000 lors de son premier accident d’automobile, puisqu’en conséquence d’une résiliation rétroactive, la police de Co-operators n’était plus en vigueur au moment du deuxième accident d’automobile. 101. J’ai demandé aux avocats de clarifier leurs positions par rapport à cet article de la Loi, puisqu’il n’était pas apparent d’entrée de jeu si les concessions étaient faites pour recentrer les questions en litige. Les avocats ont répondu de manière utile. (4) Choix de l’assureur – si, aux termes de la sous-disposition i ou iii de la disposition 1 ou aux termes de la sous-disposition i ou iii de la disposition 2 du paragraphe (2), une personne [ici, M Fleming] a un recours contre plus d’un assureur pour le paiement d’indemnités d’accident légales, elle peut choisir, à son entière discrétion, l’assureur [ici, soit Echelon assurant M Fleming au titre de personne transportée ou de conducteur de l’automobile de Mme Mitts, ou Co-operators si M. Fleming a déjà souscrit une assurance avec elle] à qui elle réclamera ces indemnités. L.R.O. 1990, chap. I.8, par. 268 (4); 1993, chap. 10, art. 1. (5) Idem — Malgré le paragraphe (4), si une personne [ici encore, M. Fleming] est un assuré nommément désigné dans un contrat constaté par une police de responsabilité automobile [ici, si je le déclare, la police d’assurance de Co-operators]… elle ne réclame des indemnités d’accident légales qu’à l’assureur aux termes de cette police. 1993, chap. 10, par. 26 (2); 1999, chap. 6, par. 31 (9); 2005, chap. 5, par. 35 (13). Dans le cas présent, l’avocat fait référence à la concession sous serment de l’assureur voulant que la police de Cooperators couvre non seulement un véhicule désigné, mais fournisse également une couverture élargie pour d’autres véhicules dont l’assuré n’est pas propriétaire. 31 31 ECHELON c. CO-OPERATORS MOTIFS DE LA DÉCISION 102. À la lumière de ces libellés, si je déclare la police de Co-operators Policy en vigueur : a. À la première étape, M. Fleming, étant la personne transportée dans l’automobile de Mme Mitts, pourrait exercer un « recours contre » à la fois Echelon, au titre de conducteur assuré avec autorisation, et Co-operators, au titre d’assureur d’une « automobile à l’égard de laquelle » M. Fleming était « un assuré » en vertu du paragraphe 268 (2) 1.i, b. À la seconde étape, cette priorité serait résolue en vertu des sous-alinéas 268 (4) et (5), car M. Fleming est un « assuré… désigné » en vertu de la police de Cooperators; cette police a ainsi préséance sur la police de propriétaire d’Echelon. La police de Co-operators a-t-elle fait l’objet d’une résiliation rétroactive au 8 septembre 2011? 109. Examinons maintenant la question de la formation du contrat soulevée par Co- operators dans la présente affaire. 110. Les avocats des deux parties conviennent qu’il n’y a que deux méthodes pour procéder adéquatement à la résiliation d’une police de propriétaire en Ontario : (1) en tout temps, à la demande verbale ou écrite de résiliation du titulaire de la police, ou (2), par la résiliation officielle de la police par l’assureur, conformément aux exigences réglementaires établies pour ce faire, y compris une lettre de l’assureur avisant le titulaire de police de la résiliation et lui retournant tout excédent de prime. 111. À ce point-ci, Co-operators admet que les preuves appuient la première option. Elle affirme que la police de Co-operators a été résiliée rétroactivement à la demande de M. Fleming par l’entremise de sa mandataire, Mme Mitts. L’avocat a exprimé son accord à ma suggestion, en cours d’argumentaire, d’étudier également cette question du point de vue d’une erreur mutuelle : M. Fleming étant convaincu à tort que la police de Co-operators avait été résiliée à un certain moment à la suite de son premier accident d’automobile, et Co-operators ayant omis à tort de faire un suivi par l’entremise de son courtier local, à l’expiration d’un délai 32 ECHELON c. CO-OPERATORS MOTIFS DE LA DÉCISION établi dans sa pratique ou son protocole applicable à de telles situations. 112. En l’absence de législation et d’une politique officielle prépondérante pour renforcer le régime actuel relatif à l’assurance automobile en Ontario, la position adoptée par Co-operators était attirante et présentait un certain mérite. 113. Qu’il s’agisse de mauvaise communication — en fait, de « non-communication » — entre M. Fleming et Co-operators, ou d’une erreur mutuelle, nous ne servirions aucune bonne cause en contraignant les deux parties, qui n’avaient aucune intention de prolonger la couverture au-delà d’une courte période de temps raisonnable à la suite du premier accident, de s’engager dans une négociation qu’ils n’ont ni souhaitée, et dont ils n’ont pas eu connaissance. 114. Il est certain que M. Fleming a reçu la valeur de ses primes, versées lors du retour du véhicule de location en septembre 2011, à la suite de son premier accident d’automobile. 115. Co-operators n’avait aucune raison de poursuivre le processus de retrait automatique de primes mensuelles après cette date. À cet effet, Co-operators affirme qu’elle aurait dû interrompre ces retraits et faire un suivi auprès de M. Fleming, comme le prévoyait sa pratique ou son protocole bien établi. Or, pour des raisons qui demeurent inexpliquées, cela ne s’est pas passé de cette manière. 116. La position d’Echelon présentée dans son argumentaire et dans sa documentation écrite fait ressortir que, de permettre à Co-operators de résilier rétroactivement la police d’assurance de Co-operators contrecarrait la politique officielle d’une manière qui n’est pas autorisée, même dans les cas de tromperie délibérée. 33 ECHELON c. CO-OPERATORS MOTIFS DE LA DÉCISION 117. Mais alors, demande Co-operators par inférence, à quelle politique officielle se réfère- t-on pour forcer M. Fleming à être lié par la police d’assurance de Co-operators dont ni l’une ni l’autre des parties ne voulait ou à laquelle ni l’une ni l’autre ne s’attendait dans l’affaire qui nous occupe? 118. Dans d’autres secteurs de l’assurance non régis par la loi et moins réglementés, cette position aurait été crédible. Avoir recours à la rectification, en résiliant la police dès le départ, exercer une justice équitable en invoquant une erreur mutuelle et d’autres outils juridiques aurait pu aider les parties à se dégager d’un contrat indésirable dans de telles circonstances. Un tiers à ce contrat aurait eu peu d’arguments pour contester la question. 119. Toutefois, au titre d’arbitre, je dois prendre en considération cette question, qui s’avère la pierre angulaire de la décision relative à l’ordre de priorité, dans le contexte du régime législatif lié à l’assurance automobile qui est, et le mot est faible, grandement réglementé. 120. Je suis d’accord avec Echelon que la police d’assurance de Co-operators était à tout le moins un « instrument » présumé être une police de propriétaire. Et ce, bien que Cooperators ait fait valoir dans son mémoire que M. Fleming avait violé diverses dispositions du contrat qui prévoyaient qu’il devait faire rapport d’une modification réelle aux risques qu’il représentait, ce qui aurait alors permis à l’assureur de traiter la police comme étant nulle dès le début (dans le cas présent, si je comprends bien l’argumentaire, à compter du 8 septembre 2011), ce qui n’a pas été repris de manière exhaustive dans la plaidoirie orale. 34 ECHELON c. CO-OPERATORS MOTIFS DE LA DÉCISION 121. L’argument de la violation d’une disposition contractuelle par fausse représentation semble également contre-intuitif si, comme les preuves semblent le démontrer, la modification des risques n’était pas réellement un élément important. Co-operators a encaissé des paiements de prime pour un risque virtuellement « inexistant », puisque le libellé du contrat prévoyait le remboursement d’une prime pour laquelle M. Fleming était classé de manière erronée. Or, le correctif par rectification dès le début est prévu dans les cas où l’assureur a été lésé en conséquence d’un accroissement des risques ou autrement d’une modification aux risques non liés aux intérêts de l’assureur. La common law permet ce correctif lorsque les preuves démontrent qu’un assureur raisonnable aurait soit augmenté la prime ou refusé de souscrire le risque. 122. Dans le meilleur des cas, Co-operators peut affirmer qu’elle aurait refusé le risque, puisqu’elle n’avait pas l’intention de souscrire des polices d’assurance de personnes non propriétaires. Le problème qui se pose ici est que cette approche est en contradiction avec sa propre pratique ou protocole établi. Il revenait ainsi à Co-operators de faire le suivi nécessaire pour confirmer une résiliation de police, ce qu’elle n’a tout simplement pas fait. La responsabilité de cet état de fait peut difficilement être jetée sur M. Fleming en invoquant sa violation des dispositions du contrat. En effet, les preuves qu’il a déposées laissent présumer qu’on lui a tout simplement dit que la police serait résiliée à l’expiration d’un certain délai. 123. Plus fondamentalement toutefois, les faits liés à cette affaire pointent vers une « coupure » entre les systèmes de communication interne et ceux de la firme de courtage que Co-operators avait établis dans le cadre de son propre protocole. Ainsi, elle possédait déjà les renseignements nécessaires dans ses propres dossiers pour agir ou faire un suivi, puisqu’elle avait remis à M Fleming un chèque à la suite de la perte totale de son véhicule et que M. Fleming avait retourné le véhicule de location. 35 ECHELON c. CO-OPERATORS MOTIFS DE LA DÉCISION 124. Dans ce contexte, Co-operators ne peut affirmer que M. Fleming violait les dispositions du contrat, car il avait déjà appris du courtier local qu’il bénéficiait d’une prolongation temporaire de couverture. À moins d’avis contraire, ses propres dossiers auraient dû indiquer que M Fleming ne possédait pas de véhicule de remplacement. 125. Je ne peux pas non plus passer sous silence les affirmations du panel composé de cinq membres de la Cour d’appel dans l’arrêt Campanaro, qui apparaissent au paragraphe 19 comme suit : [TRADUCTION] Dans un cas comme dans l’autre, l’assuré désigné a fait une fausse représentation voulant qu’il soit le propriétaire du véhicule assuré. Ces fausses représentations étaient comprises dans la demande écrite dûment signée….la question à débattre dans ces différends portés en appel sont si, compte tenu des recours intentés contre State Farm... par les tiers demandeurs ayant subi des blessures, les dispositions de l’article258 (5) empêchent State Farm de se défendre en invoquant la fausse représentation de l’assuré désigné concernant la propriété. 126. Le panel en a conclu que State Farm n’était pas autorisée à déclarer nulle la couverture depuis le début sur la base d’une fausse représentation. Le panel a rapporté les affirmations d’Osbourne, J.A., au paragraphe 50 comme suit : [TRADUCTION] Pour des raisons que j’expliquerai brièvement, je ne crois pas qu’un assureur émettant un instrument présumé être une police de responsabilité automobile peut valablement appuyer sa défense dans le cadre d’une poursuite en vertu de l’article 258 (1) sur la base d’une fausse représentation de la part de l’assuré désigné, y compris une fausse représentation sur la propriété du véhicule assuré… Par conséquent, dans ce cas, State Farm ne peut se défendre contre les actions intentées contre elle sur la base de la fausse représentation de l’assuré désigné quant à la propriété. 127. Si cet argument est valide dans le cas d’une fausse représentation, il l’est sûrement pour une fausse représentation faite de manière inconsciente. Or, la résiliation d’une police de propriétaire est également régie par la loi. Echelon précise qu’une telle démarche est 36 ECHELON c. CO-OPERATORS MOTIFS DE LA DÉCISION assujettie à certaines étapes. Co-operators admet de façon claire que ces étapes n’ont pas été entreprises. 128. Il est important de s’arrêter ici un moment, car je ne suis pas persuadé qu’une telle résiliation, même si elle avait été faite correctement en avril 2013, aurait suffi aux fins admises par Co-operators, c’est-à-dire procéder à une résiliation rétroactive. 129. Echelon a inclus dans sa documentation l’arrêt Kahlon v Safeco Insurance Co. of America32. Dans cet arrêt, le juge qui présidait avait présenté les diverses exigences qui, entre autres éléments, prévoyaient d’envoyer un certain avis préalable au titulaire de police, soit cinq (5) jours pour une livraison en personne et quinze (15) jours pour une livraison par courrier recommandé. Dans le cas d’une contestation, cette procédure exige le respect strict des dispositions légales, ainsi que le dépôt de preuves. 130. La documentation d’Echelon comprenait également la décision de l’arbitre Palmer dans l’arrêt Sarnicki v Liberty Mutual Fire Insurance Co.33 qui référait à l’affaire Kahlon. L’arrêt Sarnicki concernait une résiliation présumée qui aurait rendu le demandeur inadmissible aux indemnités d’accident légales. De nouveau, l’arbitre savant a conclu qu’un respect strict des dispositions légales était requis pour procéder à une telle résiliation. La décision de l’arbitre Manji allait dans le même sens deux ans plus tard dans une autre affaire de refus de prestations également incluse dans la documentation d’Echelon. Dans ce cas, le refus était basé sur une prétendue résiliation légale et sur des faits plus sympathiques à l’égard de l’assureur que ceux qui nous sont présentés dans le cadre de la présente affaire.34 [1985] O.J. No. 1771 (Dist. Ct) 33 [1995] O.I.C.D. No. 195. 34 Herrara v Wawanesa Mutual Insurance Co., [1997] O.I.C.D. No. 112 (L’envoi du chèque de remboursement de prime de l’assureur au courtier ne respecte pas strictement l’exigence d’envoyer le remboursement de la prime directement au titulaire 32 37 ECHELON c. CO-OPERATORS MOTIFS DE LA DÉCISION 131. Même en supposant, aux fins de l’argumentation, que Co-operators ait suivi les étapes établies requises en avril 2013, je ne vois aucun motif dans la loi, dans le libellé de la police ou dans toute autre jurisprudence ou arrêt d’arbitrage pour déclarer cette résiliation rétroactive. L’absence d’autorité sur ce point n’est pas étonnante, puisque cela viendrait à l’encontre de l’exigence d’envoyer un avis préalable à M. Fleming. En l’absence d’exception particulière quant à la résiliation dans le régime législatif, je suis d’avis que Co-operators n’avait aucune base juridique pour procéder à la résiliation d’une police de propriétaire en Ontario. 132. Mais bien sûr, Co-operators ne reconnaît pas avoir résilié rétroactivement la police. Elle fait plutôt valoir que, grâce à la représentation de Mme Mitts, jumelée à l’absence d’intérêt assurable dans la fourgonnette Ford Windstar 2000, M. Fleming l’aurait demandée. 133. Plusieurs problèmes se posent ici, mais ils se résument à une question de preuve. Je conviens de l’argument présenté par Echelon dans sa réplique : le libellé de la police sur lequel le courtier a basé son argumentaire ne soutient pas la position de Co-operators. En effet, Mme Mitts ne faisait pas partie de la catégorie de personnes autorisées à agir et, de toute manière, l’article apparaît limité par son libellé à des questions liées à des demandes de règlement découlant de pertes plutôt qu’à une souscription préalable à des pertes. 134. Abstraction faire du problème de libellé, aucune preuve ne m’a été présentée pour confirmer sur la base de la common law que Mme Mitts avait, de fait ou même de toute évidence, été autorisée à demander au nom de M. Fleming la résiliation rétroactive de la police d’assurance de Co-operators. J’en déduis, à la lumière des dossiers qui m’ont été présentés, que lorsqu’elle s’est rendue au bureau du courtier local, son but était tout simplement de transférer sa couverture existante souscrite auprès d’Echelon à un autre véhicule. Dans le de police pour que la résiliation prenne effet.) 38 ECHELON c. CO-OPERATORS MOTIFS DE LA DÉCISION meilleur des cas, elle aurait pu agir comme mandataire de M. Fleming dans la mesure où elle aurait pu demander de transférer sa couverture sur la « Fiesta » dont il devait apparemment prendre livraison chez le concessionnaire le lendemain. On pourrait facilement imaginer un tel scénario de corruption si on pouvait présumer de l’autorité pour procéder à une résiliation rétroactive sans obtenir au préalable une confirmation du principal intéressé. 135. Enfin, M. Fleming n’a pas précisé au cours de son témoignage qu’il souhaitait la résiliation rétroactive de la police ou même qu’il voulait que l’assureur procède à cette résiliation peu après son premier accident. Dans le meilleur des cas, il semble qu’il ait tout oublié à ce sujet, présumant que Co-operators se chargerait de faire le nécessaire. 136. En contrepartie, bien que je sympathise avec la situation difficile de Co-operators, je ne suis pas convaincu que l’intérêt public, ou que l’industrie de l’assurance émettant des polices d’assurance de propriétaire pour protéger ce public, est bien servie par la création d’une catégorie de titulaires de polices d’assurance imaginaires qui existent par erreur au moment d’un accident, mais qui sont présumées exister rétroactivement. 137. Du point de vue du libellé du contrat, il n’y a aucun fondement prévu par la loi ou dans la formulation de la police de propriétaire citée qui justifierait une prétendue résiliation rétroactive. Non plus qu’une assise raisonnée pour conclure que M. Fleming était en violation de ses obligations de faire rapport ou pour conclure que Mme Mitts était autorisée à agir pour lui à titre de mandataire, de manière à se conformer rétroactivement en cas de violation. Bien que Co-operators ait droit à des félicitations pour avoir agi aussi promptement dans ce cas pour rembourser la prime, je note également que la police de propriétaire prévoit l’application de cette étape dans tous les cas. 39 ECHELON c. CO-OPERATORS MOTIFS DE LA DÉCISION Le régime législatif en matière de priorité a comme but apparent de prévoir un processus relativement simple pour déterminer l’assureur qui a priorité en cas d’indemnités d’accident légales en vertu d’une police de propriétaire. Or, ce régime est compromis si, comme dans le cas présent, l’assureur ciblé peut se dégager de toute responsabilité, tout comme, à titre d’analogie, la législation prévoyant l’assurance automobile obligatoire sur une base de responsabilité absolue serait compromise si de tels arguments de défense étaient permis pour mettre en échec d’innocentes victimes face à un souscripteur de police de propriétaire (Campanaro). 138. Du point de vue de la politique officielle, si j’acceptais l’argumentaire de Co-operators concernant une demande de résiliation rétroactive par l’entremise d’un mandataire dans le cas présent, d’autres arguments créés de toute pièce pourraient être présentés dans le cadre d’autres affaires, lesquels pourraient s’avérer moins bénins que dans l’affaire qui nous occupe. Compte tenu de la tendance claire de la jurisprudence en matière d’arbitrage de cas relatifs à des faits plus sympathiques envers l’assureur, je ne vois pas comment je pourrais être à même de tracer une autre issue au dossier qui m’est présenté. La mauvaise communication ou la non-communication dont la preuve est évidente dans le cas présent est semblable à celle que l’on constate dans d’autres circonstances impliquant une résiliation imparfaite dans les cas mentionnés ci-dessus, puisqu’elle se traduit par un problème systémique pour l’assureur. 139. Bien que l’on puisse discuter du fait qu’aucune politique officielle ne soit favorisée par les faits pertinents à la présente affaire, puisque M. Fleming a reçu ses indemnités, peu importe quel assureur avait priorité, et qu’il ne devra pas repayer la prime qui lui a été remboursée, l’intégrité du système est remise en question, de manière générale. Cela implique que si, comme dans le cas présent, le protocole ou la pratique établie d’un assureur a échoué, il revient à cet assureur, au titre d’intervenant dans le marché de l’assurance automobile, de 40 ECHELON c. CO-OPERATORS MOTIFS DE LA DÉCISION régler le problème pour l’avenir. 140. Autrement, le système perd de sa simplicité, ce qui va à l’encontre des objectifs législatifs du régime. CONCLUSIONS 141. Je déclare que la police de propriétaire de Co-operators était en vigueur au moment du deuxième accident de M. Fleming et, par conséquent, que Co-operators doit répondre de manière prioritaire à Echelon en ce qui concerne sa demande d’indemnités d’accident légales. 142. Conformément à l’article 8 de la convention d’arbitrage, les frais reliés à une indemnisation partielle sont payables par Co-operators au titre de partie perdante. 143. Dans le cas où les avocats ne réussiraient pas à s’entendre sur les frais, et en vertu de ce même article 8, je me devrai de les examiner et, dans cette éventualité, je serais reconnaissant de recevoir les propositions de frais, tout en gardant à l’esprit les restrictions suivantes sur le plan de la longueur et de l’échéancier : a. Plaidoyer écrit de la part d’Echelon, de moins de deux pages, accompagné d’une note de frais à l’appui, au plus tard le 13 novembre 2015 b. La réponse écrite de Co-operators de moins de deux pages, accompagnée de toute note de frais ou de description à l’appui, au plus tard le 20 novembre 2015. 144. Toutefois, si les avocats jugent que leur horaire ne leur permet pas de respecter les délais précisés ci-dessus et qu’ils s’entendent sur ce sujet, je suis disposé à les modifier à leur demande commune. 41 ECHELON c. CO-OPERATORS MOTIFS DE LA DÉCISION FAIT à Toronto le vendredi 30 octobre 2015. L’original signé par Marcus B. Snowden 42 ECHELON c. CO-OPERATORS MOTIFS DE LA DÉCISION Annexe A Documents déposés au nom d’Echelon, la Requérante : 1. Mémoire d’arbitrage; 2. Mémoire de documentation; 3. Transcription du témoignage de Heather Lintott, courtier souscripteur à La Compagnie d’assurance générale Co-operators; 4. Pièce A à l’interrogatoire de Mme Lintott — documents de souscription reçus de Cooperators. Documents déposés au nom de Co-operators, l’Intimée : 1. 2. Mémoire de l’intimée; Mémoire de documentation de l’Intimée. 43 ECHELON c. CO-OPERATORS MOTIFS DE LA DÉCISION