Rapport mondial sur le commerce de detail

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Rapport mondial sur le commerce de detail
Rapport mondial
sur le commerce de detail
Stephanie Luce
Octobre 2013
Un rapport d’ UNI Global Union
Table des matières
Introduction……………………………………………………………………………………4
Importance du commerce de détail dans l’économie mondiale…………………………4
Impact de la crise économique mondiale………………………………………………….7
Principales tendances dans le secteur…………………………………………………….9
Le modèle d’emploi paupérisant…………………………………………………………..10
Enquête syndicale…………………………………………………………………………..17
Recommandations…………………………………………………………………………..19
Conclusion……………………………………………………………………………………26
2
Introduction
Ces dernières décennies, le secteur du commerce de détail a subi des mutations importantes. Par suite de la
déréglementation des investissements étrangers, de la politique de concurrence/monopole, en parallèle à des réformes
néolibérales plus larges affectant les marchés des consommateurs et le commerce, les grands détaillants ont réussi à consolider
leur pouvoir et à s’étendre de par le monde. Alors que les petits commerces restent dominants dans de nombreuses régions du
monde, les entreprises transnationales sont en train de conquérir des parts croissantes du marché. Parce qu’elles cherchent à
accroître leurs bénéfices, les grandes entreprises ont réduit le risque des investissements en recourant à la sous-traitance et aux
franchises. Ces tendances ont eu un impact sur les entreprises plus petites ainsi que sur les fournisseurs, les consommateurs et
les employés.
Ces changements affectant le secteur du commerce de détail sont intervenus parallèlement à des tendances plus
larges du marché du travail, où les employeurs tentent de basculer les risques de l’emploi sur les travailleurs en adoptant des
pratiques de travail « flexibles ». Cela inclut la réduction du nombre de postes à temps plein et l’accroissement du travail à temps
partiel, temporaire et sur appel. Davantage de travailleurs du commerce de détail sont devenus des « travailleurs précaires »
ayant une faible sécurité de l’emploi, des salaires médiocres et une durée de travail insuffisante. La crise économique mondiale
a donné aux employeurs une certaine latitude pour intensifier leurs initiatives en faveur de pratiques d’emploi flexibles et
paupérisantes. La hausse du travail précaire n’est pas née de la crise, mais a accéléré une tendance qui existait déjà.1
Les syndicats doivent trouver des moyens de réagir à ces tendances dans le commerce de détail et syndiquer les
travailleurs précaires. Alors que la densité syndicale a baissé dans de nombreux pays, il existe quelques petites lueurs d’espoir
parmi les syndicats qui s’adaptent à l’environnement actuel.
Importance du commerce de détail dans l’économie mondiale
Le commerce de détail est l’un des plus importants secteurs de nombreuses économies nationales. Les pays ne lui donnent pas
tous la même définition, mais selon l’OIT, « le commerce de détail est universellement compris comme l’étape finale du
processus de distribution où les détaillants s’organisent pour vendre la marchandise en petites quantités au public. » Cela
s’oppose au commerce de gros, où les entreprises vendent à d’autres entreprises.2
Le secteur du commerce de détail représente plus de US$15 trillions de recettes mondiales, et devrait conserver une
croissance forte.3 Ce secteur est très diversifié : les petits commerçants sont toujours présents dans les pays en développement,
mais la domination des grandes entreprises est de plus en plus fréquente. La société de consultance Deloitte estime qu’en 2011,
les 250 plus grands détaillants du monde ont enregistré des recettes de ventes au détail, pondérées en fonction des ventes et
ajustées sur le plan des devises, de US $4,3 trillions en 2011, soit 5,1% de plus qu’en 2010. Cela signifie que les 250 principales
entreprises étaient responsables d’environ 40% des recettes du commerce de détail en 2011. En 2011, un grand détaillant
moyen avait des recettes de $17 milliards.
Ce secteur est fortement mondialisé et comporte des grands détaillants actifs dans pratiquement tous les pays. Les
250 principaux détaillants sont basés dans toutes les régions (malgré une domination des entreprises européennes et
américaines). Alors que c’est dans les économies les moins développées que le secteur a enregistré sa croissance la plus forte,
l’essentiel des marchandises continue à se vendre en Europe et en Amérique du Nord. Selon l’OIT, 60% des marchandises sont
vendues dans ces deux régions, bien qu’elles ne représentent qu’un cinquième de la population mondiale.4
Bien que les petits magasins restent importants dans certaines régions, le secteur connaît une concentration de plus
en plus marquée, car les grandes entreprises en ont acheté des plus petites et les chaînes de distribution ont remplacé les petits
magasins indépendants.5 Le tableau 1 montre que les 10 plus grands détaillants à eux seuls représentent 29% du total des
recettes de la vente au détail. Walmart continue à dominer ce secteur, avec des recettes en 2011 presque quatre fois plus
élevées que le numéro deux, Carrefour. Des analystes de ce secteur affirment qu’il secteur continuera à se développer et à se
concentrer. Les fusions et acquisitions restent une tendance importante, en particulier en Amérique latine, et les plus grandes
entreprises offrent de plus en plus des formats multiples (hypermarchés, grands centres et magasins plus petits). Les nouvelles
sociétés arrivées parmi les 250 premières en 2011 étaient essentiellement des scissions de maisons mères, dont Dia (spin-off
de Carrefour) et E-MART (spin-off de Shinsegae en Corée du Sud).
3
Tableau 1: les 10 plus grands détaillants (2011)
Société
Pays
d’origine
Wal-Mart
Carrefour
Etats-Unis
France
RoyaumeUni
Allemagne
Etats-Unis
Etats-Unis
Allemagne
Allemagne
Etats-Unis
Etats-Unis
Tesco
Metro
Kroger
Costco
Schwarz
Aldi
Walgreen
The Home
Depot
Top 10*
Top 250*
Part des Top
10 aux Top
250
Source: Deloitte 2013.
Recettes de
détail
(US$mil)
Croissance
des
recettes de
détail
Marge
bénéficiaire
nette
Rendement
sur les
actifs
# de pays
d’opération
446.950
113.197
6,0%
-9,80%
3,7%
0,50%
8,5%
0,80%
28
33
% des recettes
de ventes
venant des
opérations à
l’étranger
28,4%
56,70%
101.574
92.905
90.374
88.915
87.841
73.375
72.184
5,80%
-0,80%
10,00%
14,10%
5,80%
3,70%
7,10%
4,40%
1,10%
0,70%
1,70%
n/d
n/d
3,80%
5,50%
2,20%
2,50%
5,80%
n/d
n/d
9,90%
13
33
1
9
26
17
2
34,50%
61,10%
0,00%
27,00%
55,80%
57,10%
1,50%
70.395
1.237.710
4.271.171
3,50%
4,40%
5,10%
5,50%
2,90%
3,80%
9,60%
6,20%
5,90%
5
16,7**
9,0**
11,40%
32,90%
23,80%
29,0%
La concentration accrue dans ce secteur a donné à petit nombre d’entreprises le contrôle sur une grande part de marché dans
de nombreux pays. Ainsi, les cinq principaux détaillants dominent 88% de la vente des produits alimentaires en Suède, 85% au
Danemark et 84% en Finlande; les quatre principales chaînes de supermarchés contrôlent les deux tiers des ventes d’épicerie
au Royaume-Uni; et les quatre plus grands magasins discount contrôlent un peu plus de 86% du marché en Corée.6
L’emploi dans le commerce de détail représente souvent de 10 à 15% du total de l’emploi dans l’économie, en
moyenne, bien que cela soit difficile à mesurer dans des pays où le secteur informel est important.7 Selon les données relatives
à l’année la plus récente disponible, environ 142 millions de personnes étaient employées dans le secteur de la vente au détail
dans 82 pays, dont la Chine et l’Inde.8
Le commerce de détail représente également une part importante du PIB de nombreux pays, de 8% aux Etats-Unis à
14% en Inde.9 La vente au détail et en gros est le troisième plus grand secteur économique en Allemagne, où elle représente
9,4% du total de la valeur ajoutée brute.10 Certains pays ont observé une croissance de l’importance de la vente au détail par
rapport à l’économie, mais cette tendance n’est pas valable partout. Ainsi en Australie, le volume total des recettes des ventes a
augmenté, mais le secteur ne représentait que 4,1% du PIB en 2009-2010 contre 5% en 1996-97.11
Une partie de la croissance et des mutations du secteur s’explique par le fait que les grands détaillants basés dans
des pays riches ont atteint une certaine saturation du marché national, et que la consolidation du secteur offre une plus grande
capacité d’expansion mondiale. Mais les changements politiques qui ont permis cette transformation sont tout aussi importants,
en particulier les politiques de libéralisation dans les marchés émergents, souvent appliquées de concert avec l’aide du FMI.
Diverses réglementations ont une incidence sur la vente au détail, depuis les lois sur la concurrence et le zonage jusqu’aux
restrictions aux investissements directs étrangers.12 Par exemple, l’Asie du Sud-est a été dominée pendant presque tout le XXe
siècle par des détaillants locaux, mais suite à la crise financière asiatique, l’Indonésie a accepté de libéraliser sa politique de
vente au détail et aux consommateurs en 1998 à titre de condition pour bénéficier de l’aide du FMI. A peu près à la même
époque, la Malaisie et la Thaïlande ont assoupli leurs réglementations en matière de fusions, d’acquisitions et de coentreprises.13 Depuis lors, certains de ces pays ont pris des mesures pour re-réglementer la vente au détail afin de défendre les
petites entreprises locales, alors que d’autres pays, tels que l’Inde, sont encore en train de déréglementer, ce qui facilite l’entrée
dans le pays des détaillants appartenant à l’étranger.
4
Impact de la crise économique mondiale
Le secteur a connu un grave déclin au milieu de la crise économique mondiale, mais a commencé à rebondir en 2010 – bien que
de manière inégale d’un pays à l’autre et même au sein d’un même pays. La reprise du commerce de détail est modeste aux
Etats-Unis mais limitée dans une certaine mesure par la confiance vacillante des investisseurs, le chômage persistant et le sousemploi ainsi que la faible croissance en Europe. L’UE connaît depuis plusieurs années une crise de l’euro et des mesures
d’austérité, accompagnées d’un chômage élevé et du sous-emploi dans certains pays. Cependant, la plupart des mesures pour
2011 révèle une croissance globale modeste pour le secteur à l’échelle mondiale, et une marge bénéficiaire nette composite de
3,8% pour les 250 plus grandes entreprises.14
Il n’en reste pas moins que les détaillants sont concentrés sur la croissance, et que les « marchés émergents » sont la
source de la progression la plus rapide des recettes. Les détaillants moyens parmi ceux du Top 250 ont des opérations dans
neuf pays et en 2011, près d’un quart de leurs recettes de leurs affaires à l’étranger. L’expansion mondiale est particulièrement
importante dans la vente au détail, car les grands marchés nationaux établis offrent moins de possibilités de croissance et les
consommateurs sont très sensibles aux prix. C’est pourquoi les détaillants sont désireux de capturer une population croissante
d’acheteurs de classe moyenne et jeunes en Amérique latine, en Asie, en Afrique/au Moyen-Orient et en Europe centrale. En
2011, la croissance des recettes du commerce de détail n’a été que de 3,4% dans l’UE et 6,3% aux Etats-Unis, mais de 29% en
Afrique/au Moyen-Orient et de 21,3% en Amérique latine. Deloitte affirme que ces régions connaissent une « flexibilité de
tarification légèrement plus grande » qui permet une rentabilité supérieure à la moyenne.
Comme ils estiment ne pas pouvoir augmenter les prix dans de nombreux marchés, les détaillants se sont mis en
quête d’autres moyens de réduire les coûts. Bien que ce secteur soit marqué par une forte concentration, les entreprises sont
extrêmement compétitives et prêtent une vive attention aux prix proposés dans les autres magasins, mais aussi en ligne et dans
les marchés émergents. Les détaillants cherchent à conserver leurs marges bénéficiaires par rapport à leurs concurrents par des
tactiques innovantes et une surveillance étroite des chaînes d’approvisionnement, des stocks et des employés. Alors que les
fabricants jouaient jadis le rôle principal dans de nombreuses chaînes d’approvisionnement, cette relation a changé au fur et à
mesure que les détaillants individuels gagnaient en parts de marché et en puissance. Cela a permis à un grand détaillant de
dicter les termes d’un contrat de fournisseur dans une chaîne d’approvisionnement « pilotée par les acheteurs ». Cette
transformation a également modifié les relations entre les différentes entreprises, et dans certains pays, a réduit le rôle des
grossistes. Ainsi, Walmart achète désormais bon nombre de ses produits directement auprès de petits producteurs, y compris
des agriculteurs. Cela peut apporter des avantages, tels que des bénéfices éventuellement plus élevés, mais en réalité, la
relation est source de nombreux problèmes pour les fournisseurs. Comme le relève une étude : « Les achats directs … exposent
les producteurs à petite échelle aux exigences des chaînes de supermarchés nationales et internationales, telles que la
contrainte de réfrigérer les envois afin de réduire autant que possible le gaspillage ou les pratiques de comptabilité commerciale
qui payent les fournisseurs de 7 à 45 jours après la livraison. »15 Les grands distributeurs pourraient acheter une plus grande
part des produits du fournisseur, et ainsi avoir le pouvoir d’abaisser unilatéralement les prix payés, ainsi que répercuter les frais
d’emballage et de transport sur les producteurs. Walmart, par exemple, tient les fournisseurs pour financièrement responsables
des coûts de tout stock invendu ou gâché.16
Principales tendances dans le secteur
Parallèlement à l’expansion mondiale et à la concentration des entreprises, il existe au moins trois autres grandes tendances
dans le secteur qui ont un impact sur le commerce de détail: la vente en ligne, la baisse de la densité syndicale et l’adoption du
modèle d’emploi américain « précarisant ».
Vente en ligne
Une des principales tendances du secteur est la croissance du commerce en ligne, réalisé par ordinateur ou smartphone. Cela
inclut certains détaillants qui ne sont présents qu’en ligne, tels qu’Amazon.com, mais aussi de plus en plus, les ventes en ligne
réalisées par les détaillants traditionnels. Le consultant sectoriel Deloitte affirme qu’un peu plus de 5% du total des ventes au
détail se fait aujourd’hui par mobile, mais que ce chiffre devrait atteindre 17-21% (soit $628 à $752 milliards) d’ici 2016. De
nombreux clients continuent à se rendre physiquement dans le magasin, mais pour ensuite acheter en ligne.17 C’est pourquoi
Deloitte conseille aux détaillants de former leurs employés à être des « ambassadeurs de la marque » capables d’aider les
clients à faire leurs courses dans le magasin tout en utilisant les technologies pour acheter en ligne. Cette tendance pourrait
indiquer que les détaillants vont commencer à basculer certains de leurs emplois du magasin vers les centres d’appels, ce qui
accroîtra davantage le pouvoir des détaillants de déplacer des emplois.18
5
Des premières recherches donnent à penser que l’impact de l’extension du commerce en ligne est marginal et inégal sur la
performance financière des détaillants.19 Les ventes en ligne dépendent de la force de la marque et de la solidité des relations
avec les fournisseurs pour une livraison rapide et précise, ce qui donne à penser que les détaillants cherchant à étendre leurs
opérations de commerce en ligne pourraient être vulnérables dans ces domaines.20
Faible densité syndicale
Une autre tendance du commerce mondial de détail a trait au déclin de la puissance des syndicats. Dans la plupart des pays,
mais pas partout, les syndicats subissent une baisse constante du nombre de membres depuis plusieurs décennies. Cela est
vrai pour l’adhésion aux syndicats en général ; bien que de nombreux pays ne recueillent pas les données sur les syndicats du
commerce de détail, les données disponibles laissent supposer, là aussi, une chute.
Quant aux syndicats du commerce de détail en particulier, aux Etats-Unis, le nombre de leurs membres est passé de
1,2 million en 1983 à 700.000 en 2012, alors même que l’emploi dans ce secteur progressait – aboutissant à une baisse de la
densité syndicale de 8,6 à 4,7% sur la même période.21
Le
pourcentage
des
travailleurs
du
commerce
de
gros
et
de
détail
couverts
par
des conventions collectives en Allemagne est passé de 70,9% en 1998 à 59,7% en 2004.22 En Corée, la densité syndicale de la
main d’œuvre totale est de 11%, mais n’est que de 3,6% dans le commerce de détail.23
D’un autre côté, il semble que la densité syndicale dans le commerce de détail ait légèrement progressé dans
quelques pays, bien que les données ne soient pas disponibles pour les mêmes années. Ainsi, au Royaume-Uni, bien que la
densité dans le commerce de détail soit plus faible dans ce secteur que dans de nombreux autres, on a observé une légère
augmentation de 11% en 1995 à 11,8% en 2010.24 Le Canada a lui aussi connu une certaine progression de la densité syndicale
globale, puisque le taux pour le commerce de détail est passé de 13,6% en 1997 à 14,2% en 2003.25 La Suède reste une
exception, car la densité syndicale y est élevée partout, y compris dans le commerce de détail – à environ 70% pour les
travailleurs non temporaires. Les syndicats suédois du commerce de détail couvrent également la plupart des cadres de ce
secteur.26
Le modèle d’emploi paupérisant
Une autre tendance principale du secteur est la domination croissante du modèle d’emploi « paupérisant ». Les employeurs
« paupérisants » ont tendance à payer des salaires peu élevés, à offrir des prestations faibles voire inexistantes et à considérer
les employés comme des coûts plutôt que comme des actifs. Les employeurs paupérisants ont tendance à déqualifier le travail
et à opérer avec un taux de rotation du personnel élevé.
Les employeurs paupérisants ne sont pas un phénomène nouveau. Le tout premier discounter, Woolworth’s, avait
déqualifié ses vendeurs et recruté de très jeunes femmes. Il exigeait de ses employés qu’ils travaillent pendent des horaires
prolongés et restent debout tout le temps pour des salaires relativement faibles.27 Mais le secteur comportait également de
nombreux employeurs « valorisants », souvent syndiqués, qui versaient des salaires plus élevés et offraient un emploi à long
terme.
Avec la consolidation du secteur et l’émergence de grands acteurs mondiaux, le modèle paupérisant joue désormais
un rôle bien plus important, au point d’évincer les entreprises valorisantes. Le chercheur Chris Tilly affirme qu’il existe deux
tendances majeures qui ont encouragé le développement du modèle paupérisant: la « supermarchisation » et le développement
des discounters.28 La « supermarchisation » - le remplacement de nombreux marchés traditionnels et petites boutiques par de
grands supermarchés – a tout d’abord commencé aux Etats-Unis, s’est propagée en Europe occidentale et au Japon dans le
cadre du boom qui a suivi la Deuxième guerre mondiale, et s’est produite plus récemment à peu près dans tout le reste du
monde. Cette tendance a ouvert la voie à la domination des grandes multinationales sur certaines parties du marché du
commerce de détail tout en affaiblissant le pouvoir des petits commerçants.
L’expansion des discounters est plus récente, bien que le modèle des discounters remonte au XIXe siècle aux EtatsUnis et à la fondation de Woolworth’s. Ce modèle s’appuie sur des gros volumes qui permettent au magasin de vendre à des
prix plus bas. Mais au fur et à mesure qu’un nombre croissant de pays a commencé à adopter la réforme néolibérale et la
déréglementation, et avec l’affaiblissement des lois du travail et de leur application, les conditions sont devenues plus favorables
pour des grands discounters tels que Walmart. Ces 30 dernières années, Walmart a acquis un pouvoir considérable aux EtatsUnis et sur le marché mondial du commerce de détail. Mais d’autres grands discounters, tels que Target, basée aux Etats-Unis,
ou les Allemands Lidl et Aldi, ont connu une croissance énorme. De plus, les discounters ont commencé à empiéter sur le
territoire des supermarchés sous la forme d’hypermarchés, ce qui a rendu floue la ligne de démarcation entre ces formes de
vente au détail.
6
Bon nombre des discounters et des hypermarchés sont des employeurs paupérisants. Walmart a tout d’abord
commencé sa croissance dans une région relativement peu syndiquée, puis a particulièrement réussi dans les endroits dotés
d’une législation du travail plus faible ou d’une application de celle-ci moins rigoureuse. Walmart est bien connu pour ses bas
salaires et ses médiocres conditions de travail, et a fait l’objet de nombreuses poursuites en justice, allant du vol des salaires à
la discrimination salariale. Néanmoins, Walmart est loin d’être le seul employeur paupérisant. Les discounters et les
hypermarchés ne sont pas nécessairement des employeurs paupérisants: il existe quelques exceptions. Cependant, la tendance
croissante est à un modèle paupérisant où la rotation des effectifs est élevée.
En général, la rotation est la plus élevée parmi les travailleurs horaires et les travailleurs les plus récemment recrutés.
Ainsi, une étude de la pharmacie britannique Livingston’s a constaté que les taux de rotation présentaient une forte corrélation
avec l’ancienneté, le taux de rotation le plus élevé se trouvant parmi les personnes travaillant 16 heures ou moins dans le
magasin.29 Susan Lambert, experte du commerce de détail, signale que la rotation pourrait « atteindre chez les travailleurs ayant
moins d’un an d’ancienneté 200% de plus que chez les personnes en place depuis plus longtemps. »30 Les taux de rotation
varient largement d’un magasin à l’autre, car des pratiques d’emploi différentes peuvent les influencer considérablement. Par
exemple, une enquête portant sur les commerces de détail en Australie a révélé des taux de rotation allant de 13% à 95%.31
L’expansion du modèle paupérisant à taux de rotation élevé a jeté les bases de la montée de l’emploi précaire, dont nous allons
maintenant parler plus en détails.
Précarité de l’emploi dans le commerce de détail
Les changements dans la vente au détail sont survenus parallèlement à un accroissement du travail précaire dans son
ensemble. Cela est partiellement dû aux pratiques des entreprises et à la restructuration, à la déréglementation des normes du
travail, aux attaques lancées contre les syndicats et à une large augmentation de la main d’œuvre mondiale. Le problème du
travail précaire est généralisé et touche la plupart des régions du monde. Bien qu’il existe des différences nationales et même
certaines exceptions au sein de certains pays, le schéma général est celui de la perte de qualification et du passage au travail
occasionnel.
Dans la vente au détail, la précarisation prend de nombreuses formes, dont le sous-emploi et le travail à temps partiel
involontaire, les salaires peu élevés et des pratiques de « flexibilité » telles que le travail « sur appel » ou la programmation
automatique. Comme l’indique un rapport: « la pression à l’hyperflexibilité a entraîné une stratégie du personnel basée sur une
absence totale de compétences, de qualifications, de formation et de carrière, ce qui explique pourquoi le travail dans le
commerce de détail est dominé par des postes à temps partiel mal rémunérés. »32 Le travail précaire a également progressé par
suite d’un recours accru à l’externalisation, à la sous-traitance et aux franchises. Cette pratique permet aux grandes
multinationales de basculer le travail sur des sous-traitants et des fournisseurs, rendant ainsi floues les lignes de responsabilité
juridique. Détaillons quelque peu ces tendances.
Sous-emploi
Une part importante du travail précaire est due au travail à temps partiel. En 2012, l’OIT a signalé que l’emploi à temps partiel
avait augmenté dans les deux tiers des pays riches.33 Bien que cette tendance générale soit valable pour les pays de l’OCDE,
elle semble particulièrement forte dans le commerce de détail.34 Cette évolution s’est produite en partie alors qu’un certain
nombre de pays assouplissait les heures d’ouverture des magasins au-delà d’une journée de huit heures.35 Cela permet aux
détaillants d’augmenter leurs heures d’ouverture, y compris les grandes surfaces qui sont ouvertes 24 heures par jour.36
Les détaillants ont également abandonné les emplois à temps plein au profit des emplois à temps partiel en tant que
moyen de réduire les coûts face à une concurrence accrue des discounters et de la vente en ligne. Malgré certains indices
montrant que cela peut leur nuire à long terme, les directeurs de magasins sont souvent évalués en fonction de leurs coûts de
main d’œuvre. S’ils peuvent comprimer ces coûts à court terme, cela semble bon pour le directeur et pour le magasin.37
Un troisième facteur pertinent est l’augmentation du nombre de personnes qui veulent travailler à temps partiel,
notamment les étudiants et les femmes ayant des enfants. Le secteur emploie désormais plus de jeunes étudiants qui veulent
travailler à temps partiel que naguère. Cela s’explique en partie par le fait que davantage de jeunes vont à l’université et ont
besoin de travailler à temps partiel, mais aussi par le fait que l’université devient plus chère et que davantage d’étudiants sont
obligés de travailler pour payer leurs frais. Les détaillants sont en mesure de tirer profit du besoin des étudiants d’occuper un
emploi à temps partiel et s’appuient de plus en plus sur ce pool de travailleurs.38
Bien que les données ne soient pas cohérentes d’un pays à l’autre, les enquêtes et les données des gouvernements
semblent montrer qu’il existe une vaste main d’œuvre à temps partiel dans le commerce de détail, et qui croît. Dans une enquête
relative aux travailleurs du détail à New York, près de 60% des travailleurs ont signalé avoir été recrutés à temps partiel, à titre
temporaire, pour les vacances, ou en « temps plein flexible. »39 Une étude dans 11 pays de l’UE a constaté qu’à peine plus d’un
tiers de tous les travailleurs des ventes et des magasins travaillait à temps partiel, ce qui est le chiffre le plus élevé, toutes
7
professions confondues.40 Environ 70% de tous les nouveaux emplois créés au Japon entre 1987 et 1997 étaient des emplois à
temps partiel, ce qui était particulièrement vrai pour le secteur de la vente en gros et au détail.41 Au Canada, le commerce de
détail représente la part la plus élevée du travail à temps partiel et occasionnel.42
Le travail précaire a rapidement progressé ces dernières années en Europe centrale et orientale. Ainsi, un rapport
montre que la part des travailleurs de détail recrutés comme employés temporaires est passée de 7% en 2000 à 34% en 2008
en Pologne, et de 12,5% à 20% en Slovénie sur la même période. La part des employés du commerce de détail travaillant à
temps partiel a également connu une hausse spectaculaire pendant cette période en Estonie et en Slovénie.43
De plus, on dispose de preuves montant que les détaillants diminuent la prévisibilité des heures de travail. Une étude
faite auprès de 17 grandes entreprises américaines a révélé qu’aucune d’elles ne garantissait un nombre minimum d’heures de
travail par semaine aux travailleurs à temps partiel.44 Ainsi, il peut arriver qu’un travailleur à temps partiel ne soit même pas un
travailleur régulier ou standardisé à temps partiel avec des heures prévisibles. En fait, un récent article du Guardian signale
qu’une entreprise britannique, Sports Direct, compte 20.000 employés à temps partiel, soit 90% de ses effectifs, au titre de
« contrats zéro heures. » Cela signifie que les travailleurs n’ont aucune garantie d’un nombre d’heures minimum d’une semaine
à l’autre. Même lorsque les travailleurs ont une tranche horaire programmée, celle-ci peut être supprimée avec un préavis de
moins d’un jour. 45 Une enquête auprès des grands employeurs britanniques constate que cette pratique s’est fortement
répandue, puisque 11% utilisaient des contrats zéro heures en 2005, et qu’ils étaient 23% en 2011. Certains rapports suggèrent
qu’au moins 200.000 travailleurs sont touchés, principalement dans le commerce de détail, les services de restauration et les
soins de santé.46
Une étude relève qu’en moyenne, les femmes des pays de l’UE ont plus de chances de préférer le travail à temps
partiel que leurs homologues des Etats-Unis, ce qui suggère que le travail à temps partiel involontaire n’est pas un aussi grand
problème dans l’UE. Cependant, ce constat est atténué en partie par la gamme des politiques sociales qui soutiennent les
femmes, et certains chercheurs notent des variations entre pays et entre divers groupes de femmes. Ainsi, une étude relève que
les femmes au Royaume-Uni bénéficient d’un faible soutien institutionnel pour la garde des enfants, ce qui rend plus difficile pour
elles le passage d’un travail à temps partiel à un travail à temps plein.47 Une autre étude constate qu’en Finlande, les femmes
d’un certain âge et celles qui sont moins qualifiées ont plus de probabilités d’occuper un travail à temps partiel involontaire que
les autres femmes.48
Les travailleurs à temps partiel sont également confrontés à des obstacles qui les empêchent de passer à des emplois
permanents ou de progresser dans une carrière. Une étude de la main d’œuvre australienne a observé que les conditions de
travail sont sans doute encore moins bonnes qu’on ne s’y attendrait dans le commerce de détail, du fait que de nombreux
travailleurs occupent des emplois à temps partiel « occasionnels », non standard et dépourvus de sécurité. On dispose de peu
d’observations suggérant que les travailleurs au détail occasionnels passent à du travail à temps partiel permanent, et en fait, de
peu de preuves que des emplois à temps partiel permanents bénéficient de meilleurs salaires et de meilleures conditions de
travail que les emplois à temps partiel occasionnels.49 Une étude portant sur 11 pays d’Europe a constaté que le travail à temps
partiel servait de tremplin à un travail à temps plein pour moins de 5% des individus.50
Faibles salaires
Alors que le travail à temps plein se transforme en travail à temps partiel, les salaires moyens diminuent. Aux EtatsUnis, les plus importantes professions du commerce de détail (caissier, vendeur et magasinier) sont parmi celles où le salaire
horaire moyen est le plus faible, toutes professions confondues.
Les chercheurs ont étudié cinq pays – les Etats-Unis, le Royaume-Uni, la France, l’Allemagne et les Pays-Bas – et ont
constaté que le travail dans le commerce de détail entraîne des salaires sensiblement plus faibles dans ces cinq pays. Le
travailleur moyen du commerce de détail dans chaque pays gagne entre 24% et 56% de moins que le travailleur moyen de
l’économie nationale.51 Cela donne à penser que même dans les pays où la régulation du marché de l’emploi est forte, le secteur
lui-même paye des salaires moins élevés que d’autres secteurs. Il est intéressant de relever que la pénalité salariale semble la
plus grande pour les travailleurs du commerce de détail aux Etats-Unis situés plus haut sur l’échelle que les travailleurs tout
juste entrés dans la branche, ce qui donne à penser que les cadres moyens dans le commerce de détail aux Etats-Unis peuvent
connaître la plus grande pénalité salariale par rapport à leurs pairs.
« Flexibilité »
Une autre grande tendance de la vente au détail se manifeste parallèlement à une politique plus large et à une
stratégie des entreprises: le passage à la « flexibilité » de la main d’œuvre. Depuis plusieurs décennies, les décideurs politiques
et les employeurs plaident en faveur de réformes permettant aux employeurs d’avoir plus de liberté pour recruter et licencier les
8
travailleurs à leur gré, et pour transférer les risques de l’emploi de l’entreprise à l’employé.52 Qualifiées de « flexibilité », ces
mesures ont été vantées comme un moyen pour les employeurs d’abaisser les coûts et de rester compétitifs dans un marché
mondial. Avec une main d’œuvre « flexible », les employeurs sont en mesure de comprimer les coûts du travail autant que
possible: en réduisant l’emploi dans les périodes creuses et en l’augmentant dans les périodes porteuses. Cela peut vouloir dire
changer de niveaux d’emploi du jour au lendemain ou d’une semaine à l’autre; modifier le nombre d’heures travaillées d’une
semaine à l’autre; changer de tranches horaires chaque semaine; et plus encore. Une bonne partie de cette évolution a été
rendue possible par la déréglementation du marché du travail, avec les réformes en Angleterre, en France, en Allemagne et en
Espagne dans les années 1980, pour autoriser les contrats de travail temporaires, ou des réformes du travail en Corée du Sud
et au Japon dans les années 1990 qui ont créé des travailleurs « non standard » ou « irréguliers. »53 Des pays d’Europe centrale
et orientale ont réformé leur code du travail dans les années 2000 de manière à faciliter pour les employeurs le recours à des
contrats temporaires ou à court terme, ce qui est notamment le cas des réformes en Pologne en 2002-2003, en Slovénie en
2006 et en Estonie en 2009.
Parallèlement aux changements de politique, les entreprises ont adopté de nouvelles pratiques pour renforcer leur
propre flexibilité. Deux de ces mesures sont la croissance du travail « sur appel » et de la programmation automatisée. Certains
chercheurs ont qualifié cette évolution de « dotation à flux tendus », tout comme on parle de « production à flux tendus »,
pratiques qui visent à abaisser les coûts en réduisant les stocks superflus.54
La technologie de programmation permet à une entreprise de suivre la demande des consommateurs. Par exemple, la
société Apex Optimization GmbH a conçu un outil de programmation pour les détaillants suisses qui « cherche à faire
correspondre la demande escomptée des consommateurs au nombre de vendeurs en optimisant les tranches de travail. »55
Cependant, il n’est pas facile d’automatiser complètement la programmation, car cela exige des prévisions précises du flux de
clients – or, des facteurs tels que le mauvais temps ou les conditions du trafic peuvent impacter le commerce de détail au
quotidien. Il n’en reste pas moins que les chercheurs s’efforcent de perfectionner cette technologie. Susan Lambert signale que
la plupart des cadres qu’elle a étudiés étaient tenus d’analyser tous les jours les chiffres de flux de clients afin de rééquilibrer les
horaires de travail en conséquence pour le lendemain. »56
Externalisation/sous-traitance & franchises
Un autre facteur qui provoque la précarité est le développement de l’externalisation et des franchises. Au fur et à
mesure de leur expansion et de leur consolidation dans les années 1980 et 1990, les détaillants ont cherché des stratégies pour
réduire les coûts et le risque d’investissement. Une méthode qu’ils ont appliquée pour réduire les coûts et basculer le risque
d’investissement et la responsabilité juridique consiste à externaliser vers d’autres entreprises, nationales ou situées dans
d’autres pays certaines parties du travail normalement effectuées en interne. Par exemple, dans le commerce de détail, les
entreprises ont commencé à externaliser la production de marchandises, la publicité, le stockage, les ressources humaines,
l’emballage et l’affichage, et bien d’autres choses encore. En théorie, cette pratique permettrait à l’entreprise de profiter de
producteurs de niche et d’économies d’échelle. Mais elle a également permis à l’entreprise de transformer ses frais fixes en frais
variables et de rechercher une production à plus faible coût – par exemple en basculant sur des travailleurs sous-traités non
syndiqués du travail réalisé jusque là par des employés internes syndiqués; ou en confiant du travail effectué par des salariés
nationaux aux salaires élevés à des travailleurs moins payés d’autres pays. Une étude constate que les économies de coûts à
court terme sont la raison la plus courante invoquée par les détaillants pour externaliser le travail.57
Une autre méthode est le franchisage, qui permet aux entreprises d’ouvrir davantage de magasins sans courir
beaucoup de risques.58 Bien que le concept de la franchise remonte aux années 1800, sa popularité est allée croissant ces
dernières décennies, surtout en tant que méthode pour se développer au plan international.
Ces pratiques – l’externalisation et les franchises – ont quelques effets similaires pour les travailleurs. Elles
aboutissent toutes les deux à des relations plus complexes entre travailleurs et employeurs, car elles ont été conçues en partie
pour déplacer la responsabilité juridique pour l’entreprise. Par exemple, un employé peut travailler pour une société franchisée
qui s’appuie sur un modèle de faibles salaires et de rotation élevée. Le propriétaire de la franchise peut se lancer dans des
pratiques d’emploi qui « coincent » le travailleur, telles que des horaires irréguliers, voire le non paiement des salaires.
L’employé peut tenter d’engager des recours juridiques contre l’entreprise, mais la responsabilité de la société est limitée. En
outre, en termes de recherche de salaires plus élevés ou d’arriérés de rémunérations, l’essentiel des bénéfices tombe
généralement dans l’escarcelle du siège central et non de la franchise – ce qui signifie que les entreprises sont dans une
certaine mesure capables de protéger leurs actifs contre les revendications des employés.59
9
Enquête syndicale
Pour examiner de plus près les tendances dans les pratiques du commerce de détail et du travail précaire, nous avons réalisé
une enquête auprès des affiliés d’UNI en mai et en juin 2013. Cette enquête était conçue pour rassembler davantage
d’informations sur les tendances du commerce de détail et de l’emploi pays par pays. Elle a été administrée électroniquement en
cinq langues et envoyée aux affiliés d’UNI. Nous avons reçu au total 32 réponses venant de 23 pays. Alors que tous les
syndicats représentent quelques travailleurs du commerce de détail, les secteurs que les syndicats couvrent sont assez variés.60
Les résultats détaillés de l’enquête sont disponibles dans un autre rapport, mais nous en résumons ici les principaux constats.
Près de 80% des syndicats ayant répondu déclarent
que les formes de travail précaire se sont accrues
dans leur pays ces cinq dernières années. Parmi ceux
qui signalent une hausse, la majorité indique que le
travail précaire a pu augmenter de 50%.
Ceux qui signalent les augmentations les plus fortes (plus de 50%) sont la République démocratique du Congo, la Slovaquie et
les Etats-Unis. 70% des syndicats ayant répondu signale que les tranches horaires de travail varient souvent d’une semaine à
l’autre, et plus de la moitié déclarent que les travailleurs du commerce de détail sont fréquemment recrutés par des agences.
Les syndicats ayant répondu venant de République démocratique du Congo, de Pologne, de Suède et des Etats-Unis signalent
que les tranches de travail sur appel sont un phénomène fréquent. Près de 70% disent que les détaillants utilisent la
programmation automatique dans leur pays. La majorité signale que le stress au travail, les faibles salaires, l’insuffisance des
heures et l’absence de prestations sont des problèmes graves pour les travailleurs précaires.
Les syndicats ayant répondu signalent que les travailleurs ayant
des qualifications limitées ont le plus de probabilités d’occuper
des postes précaires, suivis par les jeunes. Environ un tiers des
réponses révèlent que ce sont les femmes et les travailleurs
migrants qui occupent le plus souvent des emplois précaires.
Presque tous les syndicats étudiés ont des travailleurs précaires comme membres, bien que pour la plupart d’entre eux, les
travailleurs précaires représentent moins de 20% de leurs effectifs. Par exemple, Handel’s en Suède a abaissé ses cotisations
pour les travailleurs à bas salaires et à horaires indéfinis; SYNTRACOM au Niger a organisé des réunions de sensibilisation
dans de grands débouchés de vente au détail; et UA ZENSEN au Japon s’est fixé pour objectifs d’avoir « 50%, voire 75%, de
densité syndicale dans chaque société. »
Près de 30% de syndicats ayant répondu ont
récemment modifié leur politique syndicale afin de
faciliter l’adhésion des travailleurs précaires.
Les deux tiers des réponses révèlent que la législation nationale a récemment été modifiée pour les travailleurs précaires. Sur
celles-ci, 60% signalent que la loi a dégradé les conditions applicables aux travailleurs précaires, alors que 25% affirment que
les récents changements légaux ont amélioré les conditions. Les autres indiquent que la loi a amélioré certains points et en a
détérioré d’autres. La Finlande, le Japon, le Lesotho, la Malaisie et la Thaïlande ont adopté des lois qui améliorent la situation.
Ainsi, la Finlande a étendu la couverture des travailleurs précaires en matière de vacances et de soins de santé. La Malaisie a
fixé un salaire minimum pour tous les travailleurs, y compris les travailleurs précaires. Au Japon, la loi sur le contrat de travail et
la loi couvrant les travailleurs intérimaires ont été amendées d’une manière qui améliore les droits des travailleurs précaires. La
loi thaïlandaise sur la protection des travailleurs stipule que les travailleurs précaires ont droit à la même rémunération et aux
mêmes avantages que les travailleurs réguliers. Dans le même temps, des lois en Argentine, en Belgique, au Danemark, en
France, en Irlande, en Espagne, en Suède, au Royaume-Uni et aux Etats-Unis ont détérioré les conditions. Pour l’essentiel, ces
changements sont survenus dans des pays qui avaient initialement de plus fortes protections de la main d’œuvre et une
meilleure couverture sociale.
Les syndicats qui ont répondu voient de nombreux obstacles à la syndicalisation des travailleurs précaires, le principal problème
étant que ces travailleurs vivent dans la crainte d’être licenciés ou de subir d’autres formes de harcèlement. La faiblesse de la
législation gouvernementale ou de l’application des lois existantes constitue également un obstacle majeur. Les réponses
suggèrent des moyens pour UNI d’apporter éventuellement ce soutien, grâce à son réseau international. Les syndicats citent un
certain nombre d’idées spécifiques y compris la conclusion d’accords cadres avec les grands distributeurs tels que Walmart, et
des campagnes de solidarité accrues mettant en lumière les problèmes du travail précaire.
Recommandations
L’avancée du travail précaire dans le commerce de détail est inégale dans les divers pays où UNI compte des affiliés, mais les
tendances mondiales et les pratiques des entreprises donnent à penser que la situation va sans doute de dégrader. Les pays où
les travailleurs et les syndicats jouissent historiquement de protections fortes ont récemment connu des changements juridiques
qui permettent plus facilement aux employeurs de recruter des travailleurs précaires. Certains changements législatifs positifs
sont intervenus dans des pays d’Asie qui commencent à s’attaquer aux problèmes des contrats à court terme et de la disparité
salariale entre travailleurs réguliers et non réguliers. Le présent chapitre offre quelques recommandations qu’UNI et ses affiliés
pourraient appliquer pour s’attaquer aux problèmes liés au travail précaire.
Les solutions ne seront pas faciles, car les tendances aboutissant à la montée du travail précaire sont complexes.
Comme le note un rapport d’ACTRAV, pour aborder la question, il faudra « des interventions dans les politiques économiques et
sociales, y compris une sécurité sociale solide, un salaire de subsistance, la réduction de la volatilité des marchés financiers, le
renforcement de la base fiscale, des services publics et des investissements publics pour des sociétés inclusives, productives et
durables sur le plan de l’environnement, la préservation du parallélisme entre la progression des salaires et la croissance de la
productivité, et la prévention de la concurrence déloyale sur le marché du travail. »61 Cela signifie qu’une approche globale est
nécessaire. Voici une liste de quelques recommandations.
Accroissement de la densité syndicale
La meilleure stratégie pour inverser la tendance au travail précaire consiste à accroître la densité syndicale dans le secteur du
commerce de détail, y compris des employés de vente au détail à temps plein à diverses fonctions, ainsi que des employés à
temps partiel, saisonniers et temporaires. Malgré les nombreux obstacles, il est impératif que les syndicats trouvent des moyens
de syndiquer les travailleurs précaires. Au Japon, le syndicat du commerce de détail UI ZENSEN a lancé un effort pour
syndiquer les travailleurs à temps partiel dans les années 1990. Les travailleurs à temps partiel représentent désormais environ
la moitié de ses membres. 137 fonctionnaires et employés au niveau régional s’occupent de syndicalisation, et 7 recruteurs
nationaux travaillent au siège central.62 Le syndicat britannique du commerce de détail USDAW a fait adhérer 90.000 nouveaux
membres en 2008, en partie en nouant des partenariats formels avec des employeurs tels que Tesco et d’autres détaillants
alimentaires. Les syndicats du commerce de détail en Estonie, en Pologne et en Slovénie ont appliqué une série de tactiques,
allant des campagnes d’éducation publique aux initiatives législatives. En Estonie, les syndicats ont eu recours à des recruteurs
pour qu’ils fassent adhérer des membres individuels dans des micro-entreprises, ce qui était autorisé par des amendements
antérieurs à leurs statuts. En Pologne, le secteur commerce de NSZZ Solidarnosc a lancé une campagne contre un
hypermarché en 2010, ce qui lui a permis d’attirer 1.000 nouveaux membres. De plus, ce syndicat a obtenu une augmentation
de salaire et des contrats à durée indéterminée pour tous les employés en remplacement de contrats temporaires.63
Programmes innovants
Outre le renforcement des efforts de syndicalisation traditionnels en direction des travailleurs précaires, le syndicat peut explorer
des programmes innovants tels que le Retail Action Project (RAP) à New York. Le RAP est un projet rassemblant les travailleurs
engagé par le Retail, Wholesale and Department Store Union (RWDSU, TUAC). Il fournit des services aux membres, depuis la
formation aux qualifications et l’aide à la carrière jusqu’à la lutte contre le vol des salaires. Le RAP coopère également avec des
alliés de la collectivité et d’autres syndicats pour soutenir des campagnes législatives, telles que l’ordonnance sur le salaire de
subsistance à New York, ou l’ordonnance sur les congés maladie payés. Le RAP aide en outre les travailleurs qui se lancent
dans des activités de syndicalisation sur leur lieu de travail.
Réseaux de chaîne d’approvisionnement
D’autres syndicats poursuivent de nouveaux types de recrutement en établissant des réseaux nationaux et, dans certains cas,
internationaux, de travailleurs du commerce de détail et de travailleurs de la chaîne d’approvisionnement du commerce de détail.
Citons avant tout les réseaux autour de Walmart. En 2012, les syndicats représentant les travailleurs de Walmart en Argentine
ont constitué un réseau national pour échanger des informations et travailler ensemble à des campagnes communes, y compris
11
en s’attaquant à la part croissante des travailleurs temporaires sur le terrain. Les syndicats travaillent ensemble et avec des
partenaires de la communauté pour syndiquer chez Walmart ou contester les pratiques abusives de Walmart dans des dizaines
de pays. Ces quelques dernières années, ces réseaux se sont étendus pour inclure des alliances plus étroites entre employés
des magasins de détail, travailleurs des entrepôts et de la logistique et travailleurs de la production (par ex. les femmes qui
cousent des vêtements pour Walmart au Bangladesh).
Campagnes de sensibilisation du public
Parallèlement aux efforts de syndicalisation, les syndicats d’un certain nombre de pays ont renforcé leurs campagnes de
sensibilisation du public portant sur le problème du travail précaire. Cela inclut le recours aux réseaux sociaux, à des
manifestations, à des journées d’action, à des auditions publiques et autres.64 Par exemple, les innovations les plus importantes
utilisées par les pays d’Europe centrale et orientale contre le travail précaire ont été des campagnes dans les médias et des
campagnes politiques. Les syndicats luttent contre les « emplois pourris » en Pologne et les « mini-emplois » en Slovénie, en
soulignant que ce n’est pas pour cause de difficultés financières que les employeurs les développent.65
Stratégies valorisantes
Les employeurs n’adoptent pas tous une position hostile aux travailleurs et aux syndicats. Les affiliés d’UNI peuvent être en
mesure de proposer des stratégies valorisantes aux employeurs ou aux associations patronales, qui pourraient profiter aussi
bien à l’entreprise qu’aux travailleurs. Il existe un certain nombre d’études qui montrent que les employeurs qui augmentent les
salaires récupèrent une partie des coûts de ces salaires par le biais d’autres gains – en particulier une rotation moins élevée,
une productivité supérieure et une baisse de l’absentéisme, et donc une réduction des coûts liés au recrutement, à la formation
et à la surveillance. Par exemple, le discounter Costco consacre des dépenses plus élevées aux salaires et aux prestations que
son concurrent Sam’s Club (détenu par Walmart), mais a un taux de rotation nettement moindre. Costco dépense environ $244
millions par an pour la rotation. Si son taux de rotation était celui de Sam’s Club, ces coûts passeraient à $631 millions. Costco
économise donc environ $387 millions par an en coûts de rotation.66 Outre les salaires, les autres conditions de travail peuvent
affecter la rotation, la productivité et l’absentéisme. Citons notamment les points suivants:
Augmentation des effectifs.
Des études ont constaté que chaque dollar consacré à des salaires supplémentaires par de grands distributeurs américains
entraînait une hausse des ventes de $4 à $28. Lorsque les magasins ont un personnel insuffisant, les clients ont tendance à
moins y acheter. Les clients ont besoin de personnel pour les aider à trouver des produits, les aider à faire des achats et veiller à
ce que les files d’attente à la caisse ne soient pas trop longues.67 Dans une étude portant sur quatre détaillants à bas prix
(Costco, Trader Joe’s, QuikTrip et Mercadona), le professeur Zeynep Ton a découvert que bien que ces quatre sociétés aient
des coûts de main d’œuvre bien plus élevés que leurs concurrents, elles étaient plus rentables et avaient un chiffre d’affaires par
employé et par mètre carré plus élevé.68
Formation aux compétences et carrières.
La formation peut apporter aux employés un jeu de qualifications polyvalentes requis dans l’environnement de ventes moderne
qui combine la vente personnelle et les connaissances techniques en ligne. La formation professionnelle peut également être
associée à de meilleures possibilités de carrière, permettant ainsi aux travailleurs du commerce de détail qui viennent d’entrer
dans ce secteur d’y rester et éventuellement de rester dans la même entreprise. La formation polyvalente permet également aux
travailleurs de changer de tâches et de professions, ce qui les met en mesure de faire carrière dans le secteur et de rester plus
longtemps dans une entreprise donnée. De nombreux détaillants consacrent beaucoup de ressources à développer des
programmes de fidélisation de la clientèle, mais n’investissent pas assez dans la formation de leur personnel, bien que la
recherche montre que le succès du marketing « dépend dans une large mesure des vendeurs » – surtout dans les entreprises
qui emploient des tactiques « de vente axée sur les clients. »69 Bien que la formation soit une dépense pour les employeurs, elle
peut aboutir à une plus grande productivité et à une hausse du chiffre d’affaires. Dans une étude couvrant les entreprises
britanniques de divers secteurs, les chercheurs ont constaté qu’une augmentation de 5% de la proportion de travailleurs formés
dans un secteur entraînait une valeur ajoutée de 4% supérieure par travailleur et des salaires de 1,6% plus élevés.70 Les
détaillants français réclament que leurs travailleurs aient des qualifications plus poussées, en particulier des niveaux élevés de
connaissances techniques et de produits.71 La formation professionnelle est courante pour les travailleurs du commerce de détail
en Allemagne, où 81% des travailleurs suivent un programme de formation sur deux ou trois ans.72 Ces travailleurs gagnent des
qualifications dans une vaste gamme de travail de commerce de détail, de sorte qu’il leur est facile de passer d’une tâche à une
autre.
12
Employeurs valorisants
Les employeurs ci-dessous ont tendance à verser des salaires plus élevés et à fournir des prestations meilleures que
leurs concurrents. Aucune de ces entreprises n’est un employeur valorisant sur tous les plans. Seuls certains magasins
Costco sont syndicalisés, et quelques magasins Carrefour ont adopté des pratiques anti-syndicales. Certains détaillants
sont des employeurs « valorisants » dans un pays, mais « paupérisants » dans un autre. Il n’en reste pas moins que ces
exemples suggèrent qu’une alternative à la « paupérisation » est possible pour les détaillants multinationaux.
Costco, discounter basé aux Etats-Unis et désormais présent dans huit pays, se classe souvent comme l’un des
meilleurs employeurs selon la revue Fortune, ainsi que l’une des « entreprises les plus admirées au monde ». Alors que
le salaire national moyen pour les caissiers est de $9,12 de l’heure, Costco les paye $15,63 de l’heure (en moyenne). En
2005, les employés de Costco gagnaient un salaire annuel moyen de $35.360 – nettement plus que la moyenne annuelle
chez Sam’s Club - $21.028. Les employés bénéficient également d’une prime de $2.000 à $3.000 deux fois par an ainsi
que d’avantages sociaux généreux. Ils restent plus longtemps chez Costco, où le taux de rotation est en moyenne de
17% (bien moins que chez Walmart où il est de 44%).1 Les employés de Costco sont plus productifs que ceux des
entreprises concurrentes. Costco génère un bénéfice d’exploitation sensiblement plus élevé par employé et par heure, et
davantage de ventes par mètre carré; les frais de main d’œuvre et frais généraux exprimés en pourcentage des ventes
sont bien moins élevés.
Carrefour est une chaîne de distribution multinationale dont le siège est en France. La société a un syndicat fort et une
tradition de négociations portant sur les salaires et les conditions de travail. Dans certains pays, les travailleurs de
Carrefour sont rémunérés selon les conventions salariales de l’entreprise qui sont supérieures aux conventions salariales
sectorielles minimales.73 En 2001, la société a signé un accord cadre international avec UNI qui garantit qu’elle
respectera les principes de l’OIT et reconnaît le droit des employés d’adhérer à des syndicats de leur choix, partout où
l’entreprise est présente. Bien que cet accord ait été appliqué de façon inégale, des progrès ont été enregistrés dans
plusieurs pays dont la Roumanie, la Turquie et la Colombie. Sous les auspices de l’accord, Carrefour a reconnu le
syndicat des travailleurs colombiens de Carrefour chez Carrefour Colombie en 2011, et a signé la première convention
collective en 2012.
Solutions législatives
Alors que certains employeurs ont adopté volontairement des pratiques valorisantes, d’autres ont résisté et préféré
conserver un modèle de paupérisation à taux de rotation élevé. Dans ces cas, les affiliés d’UNI pourraient avoir à chercher
à modifier la loi afin de relever la barre dans le commerce de détail.
Salaires minimum.
Tous les pays n’ont pas de salaire minimum ou de loi sur la rémunération, et parmi ceux qui en ont, de nombreux
maintiennent les niveaux minimum bien en deçà de ce qui est nécessaire pour sortir de la pauvreté. Du fait que le
commerce de détail a tendance à verser des salaires peu élevés, un salaire minimum supérieur peut faire une grande
différence pour le revenu de l’employé. Par exemple, la France et le Danemark ont des salaires minimum plus élevés. Et de
ce fait, seulement environ 20% des travailleurs du commerce de détail font partie des bas salaires dans ces pays, contre
42% aux Etats-Unis, pays où le salaire minimum est faible.74 Kesatuan Pekerja Pekerja Ikano PTE LTD., affilié d’UNI en
Malaisie, indique que le pays a adopté une législation sur le salaire minimum pour la première fois en 2012. Le
gouvernement a déclaré que cela s’inscrivait dans un effort visant à transformer le pays en une nation à salaires élevés d’ici
2020. Le Conseil des syndicats de Malaisie réclamait 1200 ringgit par mois mais l’accord final a été conclu pour 900. Il n’en
reste pas moins que la loi devrait profiter à quelque 3,2 millions de travailleurs.75 Le Cambodge, Hong Kong, l’Indonésie, la
Thaïlande et le Vietnam ont également adopté ces dernières années des lois sur le salaire minimum.
Politiques de salaires de subsistance.
Dans les pays où les syndicats n’ont pas suffisamment de pouvoir politique pour relever les salaires au plan national, des
militants ont poursuivi des politiques de salaires de subsistance (« living wages ») au niveau des municipalités ou des
entreprises à titre de stratégie alternative pour augmenter les salaires. Cela peut prendre diverses formes, mais au
Royaume-Uni, des campagnes pour le salaire de subsistance ont fait pression sur les grands employeurs pour qu’ils
acceptent de payer des salaires plus élevés. Plus de 10.000 travailleurs ont bénéficié d’une hausse de salaire grâce à cette
initiative. La grande chaîne cosmétique Lush a récemment accepté de payer un salaire de subsistance, bien que la plupart
des grands distributeurs n’aient pas encore accepté de signer. Aux Etats-Unis, un certain nombre d’ordonnances sur le
salaire de subsistance couvre les travailleurs du commerce de détail. Un modèle consiste à appliquer ces politiques aux
biens détenus par le secteur public, tels que les aéroports, les ports et les stades sportifs. Ainsi, tous les employés de
l’aéroport international de Los Angeles sont couverts par une ordonnance sur le salaire de subsistance qui fixe leur salaire
minimum à $10,91 avec prestations santé, ou $12,16 de l’heure si l’employeur n’offre pas de prestations santé. Washington
D.C. a récemment adopté une ordonnance similaire – la « loi sur la responsabilité des grands distributeurs » - qui exige que
les détaillants ayant des recettes brutes de plus de $1 milliard payent $12,50 de l’heure.76
Tranches horaires de travail minimum et horaires minimum.
Le problème des horaires insuffisants est plus répandu que les heures supplémentaires. Ici, les affiliés d’UNI pourraient
s’efforcer de faire adopter une législation sur la durée minimum du travail. Par exemple, le Canada impose que les tranches
horaires soient d’au moins trois heures. En Colombie britannique, la loi provinciale est encore plus rigoureuse en imposant
un minimum de quatre heures de rémunération pour toute tranche programmée jusqu’à quatre heures, et huit heures de
rémunération pour toute tranche programmée jusqu’à huit heures.77 Sept Etats des Etats-Unis plus le District de Colombie
ont des lois similaires qui imposent une rémunération par tranches de trois ou quatre heures. L’Oregon avait une loi dans ce
sens mais l’a presque entièrement abrogée en 1990; il ne l’applique désormais qu’aux travailleurs de moins de 18 ans. Des
responsables politiques britanniques tentent de mettre hors la loi les contrats zéro heures. Trois députés travaillistes ont
récemment publié un rapport sur cette pratique et ont déposé un projet de loi.78 Une approche consisterait à accorder aux
entreprises des incitations fiscales ou des préférences pour les contrats gouvernementaux si elles acceptent de garantir des
heures cohérentes d’un mois sur l’autre.79
Extension des protections sociales.
Les travailleurs précaires voient leur situation rendue encore plus instable dans les pays où des prestations sont assorties
à l’emploi. L’extension des protections sociales réduit quelque peu cette crainte et cette vulnérabilité. Un petit nombre de
pays a modifié sa politique nationale pour améliorer l’accès des travailleurs précaires aux prestations sociales. Comme
indiqué, la Thaïlande s’efforce de régulariser les conditions applicables aux travailleurs migrants, qui sont désormais en
mesure de bénéficier de prestations de sécurité sociale et d’assurance maladie, et la loi sur la protection de la main
d’œuvre stipule que les travailleurs précaires ont droit à la même rémunération et aux mêmes avantages que les
travailleurs réguliers. Les syndicats indonésiens luttent depuis plus de dix ans pour étendre les protections sociales à tous
les travailleurs. Après d’énormes efforts, ils ont pu faire adopter en 2004 une loi sur le système national de sécurité sociale
qui établirait un niveau de vie minimum pour tous et étendrait les protections aux travailleurs précaires. Ce système n’a
pas encore été entièrement mis en œuvre, malgré des protestations massives. Cependant, la cour suprême a jugé le
gouvernement et huit ministres coupables de ne pas avoir mis en œuvre la loi et leur a ordonné d’adopter les règlements
permettant de créer ce nouveau système.80 Certains chercheurs estiment que le travail précaire n’est pas aussi répandu
en Europe parce que les protections sociales sont plus universelles, ce qui réduit en partie les incitations des détaillants à
réduire le travail à temps plein. Comme dit plus haut, certaines lois américaines excluent les travailleurs à temps partiel.
Ainsi, les employés doivent travailler au moins 1.250 heures en 12 mois pour avoir le droit de bénéficier de congés
médicaux familiaux, et la majorité des Etats ont des règles qui excluent bon nombre des travailleurs à temps partiel de
l’assurance chômage. 81 Si ces politiques étaient étendues à tous les employeurs, quels que soient les horaires, les
employeurs auraient moins d’incitation à recruter des travailleurs à temps partiel pour éviter ces coûts.82
Régulation des détaillants et de l’investissement.
Une autre approche afin de protéger les travailleurs du commerce de détail consiste à adopter, étendre et appliquer des
règles concernant les détaillants. Comme dit, de nombreux pays ont emprunté la direction opposée en déréglementant les
secteurs de la vente au détail et de la consommation de façon à donner un plus grand pouvoir aux multinationales et à
réduire le pouvoir des travailleurs et des syndicats. Néanmoins, il existe encore des occasions de profiter des
réglementations existantes ou peut-être d’en adopter de nouvelles au profit des travailleurs précaires. La Corée du Sud
conserve des restrictions imposées aux grands détaillants qui protègent les petits. Les grandes surfaces doivent obtenir
l’accord des marchands locaux pour ouvrir un magasin et sont passibles d’une amende s’ils ne le font pas. Malgré cela,
elles ne sont pas autorisées à vendre certains articles, tels que certains produits laitiers ou alimentaires vendus par les
marchands locaux. Le pays conserve des lois de zonage rigoureuses qui interdisent d’ouvrir des grands magasins à
proximité des marchés existants, et restreignent également les horaires d’ouverture. 83 Les réglementations antimonopolistiques ou le droit de la concurrence pourraient être renforcés afin de remédier au problème de la domination des
distributeurs sur les marchés et sur les fournisseurs. Aux Etats-Unis, les règles sur les monopoles ont été remaniées au
début des années 1980 d’une façon qui concentre l’essentiel des enquêtes sur l’impact sur le consommateur. La
14
commission britannique de la concurrence a pris des mesures pour brider le pouvoir des grands supermarchés
britanniques envers leurs fournisseurs alimentaires, en établissant un médiateur sectoriel chargé de surveiller les contrats.
Les syndicats sud-africains ont tenté d’utiliser leur commission de la concurrence pour empêcher Walmart d’entrer dans le
pays en fusionnant avec Massmart. Cette tentative a échoué, mais la commission a statué que 503 travailleurs qui avaient
perdu leur emploi lors de la fusion devaient être réintégrés.
Conclusion
L’enquête auprès des affiliés d’UNI confirme que le travail précaire est un problème dans le secteur du
commerce de détail. Alors que certaines pratiques, telles que les horaires sur appel, ne sont pas répandues dans tous les
pays, 80% des syndicats ayant répondu signalent que les formes de travail précaire se sont accrues ces cinq dernières
années. La majorité des réponses signalent que les employeurs du commerce de détail modifient souvent les tranches de
travail d’une semaine à l’autre, recrutent des travailleurs par le biais d’agences ou d’intermédiaires, et ont recours à des
travailleurs à temps partiel. Plus de 40% signalent que les employeurs recrutent souvent des travailleurs à temps partiel au
bénéfice de contrats temporaires, emploient des travailleurs sur des contrats individuels et ont recours à des contrats
déguisés de formation ou de stage pour ne pas offrir d’emplois à temps plein.
Les distributeurs transnationaux renforcent leur présence dans les pays du monde entier, et les détaillants réalisent
des fusions et des acquisitions d’une manière qui a fortement accru la part de marché d’un petit nombre de grandes
entreprises par rapport aux petits commerces. Il ne s’agit pas là d’un effet secondaire accidentel de la mondialisation. Au
contraire, c’est le résultat d’une vaste déréglementation des secteurs du commerce de détail, de la finance et de la
consommation, et de changements dans la politique d’occupation des sols et la législation sur les monopoles. Grâce à ces
évolutions, il est plus facile et plus attrayant pour les entreprises de poursuivre des pratiques d’emploi « paupérisantes »
qui traitent les travailleurs comme une source de passif ou des coûts à réduire, plutôt que comme un actif. Il existe des
exceptions à ce schéma, et un petit nombre de détaillants ont réussi à être rentables et à connaître le succès tout en
versant des salaires relativement élevés, en fournissant des prestations aux travailleurs et en coopérant avec les
syndicats.
Les syndicats vont devoir entreprendre un effort vaste, exhaustif et coordonné pour inverser ces tendances dans le
secteur du commerce de détail, qui ont mis les travailleurs dans des positions vulnérables. Cela exigera de changer les
législations nationales, d’utiliser des approches de recrutement novatrices, de mettre en place des réseaux mondiaux et
des campagnes coordonnées. Bien entendu, les syndicats sont quelque peu restreints dans leur capacité de réaction en
fonction de la nature de leurs relations avec le patronat et de la législation nationale. Mais étant donné que la plupart des
grands distributeurs opèrent par-delà les frontières, en tentant de généraliser les pratiques d’emploi paupérisantes et les
conditions qui rendent possible la « flexibilité », les syndicats doivent trouver des moyens de coordonner également leurs
stratégies à l’échelle internationale
15
Références
1 Les
détaillants ont étendu leur recours au travail précaire malgré le fait que « la crise n’a qu’un impact limité sur les bénéfices
des principales entreprises de détail, le plus souvent multinationales » dans les pays d’Europe centrale et orientale. Voir Adam
Mrozowicki, Adam, Triin Roosalu et Tatiana Bajuk Sencar. 2013. “Precarious Work in the Retail Sector in Estonia, Poland and
Slovenia: Trade Union Responses in a Time of Economic Crisis.” European Review of Labour and Research. Vol 19(2): 267-278.
Citation page 276.
2 L’ONU connaît neuf catégories de commerce de détail: magasins non spécialisés; denrées alimentaires, boissons et tabac;
carburants automobiles; équipements d’information et de communications; équipements ménagers; biens culturels et récréatifs;
autres marchandises; vente sur éventaires et marchés; et commerce de détail ne faisant pas appel à des magasins, des
éventaires ou des marchés. D’autres systèmes de classification, tels que le North American Industrial Classification System,
utilisent des catégories différentes.
3 “2012 Report on the $4 Trillion US Retail Sector.” 2012. Investment Weekly News. Vol 64. Business Insights: Essentials. Web.
26 août 2013.
4 OIT. 2011. “Global Dialogue Forum on the Needs of Older Workers in relation to Changing Processes and the Working
Environment in Retail Commerce.” Genève, 21–22 septembre 2011.
5 Joachim Zentes, Dirk. Morschett et Hanna Schramm-Klein. 2011. Strategic Retail Management: Text and International Cases.
Springer; S.R. Kalliappan, Rokiah Alavi, Kalthom Abdullah et Muhammad Arif, 2008. “Liberalization of Retail Sector and the
Economic Impact of the Entry of Foreign Hypermarkets on Local Retailers in Klang Valley, Malaysia.” International Journal of
Economics and Management. Vol 2 (2): 323-342.
6 Alan Felstead, Alan, Alison Fuller, Nick Jewson et Lorna Unwin. 2011. “Following the Retail Chain: Sandwiches, Supermarkets,
and the Potential for Workplace Learning.” In Irena Grugulis et Ödül Bozkurt, éds. Retail Work (Critical Perspectives on Work
and Employment). Palgrave Macmillan; Boon L. Lee. 2012a. “Output and Productivity Comparisons of the Singapore and Hong
Kong Wholesale and Retail Trade Sectors, 2001–2008.” The Australian National University and Wiley Publishing Asia Pty Ltd:
Crawford School of Public Policy.
7 L’emploi dans le commerce de détail est difficile à mesurer, étant donné les divergences de définitions concernant les données
et les incohérences entre les pays, et dans les pays en développement, l’essentiel de la main d’œuvre du détail a un statut
d’indépendant. De plus, de nombreux pays combinent les données concernant le commerce de gros et le commerce de détail.
8 La base de données LABORSTA de l’OIT (tableau 1E) indique que 80 pays employaient au total 177 millions de travailleurs
dans le commerce de gros et de détail en 2008 ou lors de l’année la plus récente disponible. Si l’on utilise les Etats-Unis et le
Royaume-Uni comme référence, l’emploi dans le détail comprend environ 73% de l’emploi de gros et de détail combiné. (voir
U.S. Department of Labor, Bureau of Labor Statistics, “Employment Situation Summary April 2013,” et Chambre des communes
britannique, “The Retail Industry,” 29 avril 2013). Les données pour la Chine viennent de Sheng Lu. 2010. “Understanding
China’s Retail Market.” China Business Review. 1er mai. http://www.chinabusinessreview.com/understanding-chinas-retailmarket/. Les données pour l’Inde viennent de Mohammad Amin. 2010. “Challenges of Retailing in India.” World Bank Group,
Enterprise Surveys. Enterprise Survey Note n°10.
http://www.enterprisesurveys.org/~/media/FPDKM/EnterpriseSurveys/Documents/Enterprise%20Notes/Retail-10.pdf
9 Les données américaines viennent de la National Retail Federation, les données de l’Inde viennent d’Amin 2010. Certaines
sources signalent que le chiffre de 14% pour l’Inde inclut le commerce de gros ainsi que le commerce de détail. Voir Mohan
Guruswamy, Mohan, Kamal Sharma, Jeevan Prakash Mohanty et Thomas J. Korah. 2005. “FDI in India’s Retail Sector: More
Bad than Good?” Economic and Political Weekly. Vol. 40, No. 7, pp. 619-623.
10 Metro Group 2012. “Metro Retail Compendium 2012/2013.”
http://www.metrogroup.de/internet/site/handelsportal/get/documents/metrogroup_international/corpsite/04_comm/publications/ret
ailcompendium-2013-en.pdf
11 Productivity Commission. 2011. “Economic Structure and Performance of the Australian Retail Industry.” Inquiry Report No.
56, 4 November 2011. Melbourne: Commonwealth of Australia.
12 Anuradha Kalhan et Martin Franz. 2009. “Regulation of Retail: Comparative Experience.” Economic & Political Weekly. Vol
xliv(32). 8 août.
13 Kalliappan et al 2008.
14 Deloitte. 2013. “Global Powers of Retailing 2013: Retail Beyond.” http://www.deloitte.com/assets/DcomAustralia/Local%20Assets/Documents/Industries/Consumer%20business/Deloitte_Global_Powers_of_Retail_2013.pdf
15 James J. Biles, Kevin Brehm, Amanda Enrico, Cheray Kiendl, Emily Morgan, Alexandra Booth, Simon, Kristian Hamer. 2007.
“Labour Turnover in the Retail Industry: Predicting the Role of Individual, Organisational and Environmental Factors.”
International Journal of Retail & Distribution Management. Vol 35(4): 289 – 307. Citation de la page 59.
16 Aaron Brenner, Barry Eidlin et Kerry Candaele. 2006. “Wal-mart Stores Inc.” Préparé pour la Conférence internationale sur les
sociétés mondiales, les syndicats mondiaux, la recherche mondiale, les campagnes mondiales.
17 Deloitte (2013) signale que 60% des utilisateurs de smartphones affirment utiliser leur téléphone pour faire des achats dans
les magasins.
18 Une récente étude a constaté que 73% des acheteurs américains continuent à préférer faire leurs courses dans des magasins
plutôt qu’en ligne, ce qui donne à penser que même si le commerce électronique se développe, les magasins physiques restent
toujours le lieu le plus important des achats. Voir Business Insights: Essentials. 2013. "Instant.ly U.S. Retail Survey: Two Thirds
of Consumers Prefer Brick and Mortar Stores Over Online Shopping." Entertainment Close-up 19 mai.
19 Luvai Motiwalla et M. Riaz Khan. 2003. “Financial Impact of E-Business Initiatives in the Retail Industry.” Journal of Electronic
Commerce in Organizations. Volume 1(1): 55-73.
20 Deborah A. Colton, Martin S. Roth et William O. Bearden 2010. “Drivers of International E-Tail Performance: The Complexities
of Orientations and Resources.” Journal of International Marketing. Volume 18(1): 1-22.
21 Barry T. Hirsch et David A. Macpherson. 2013. Compilation de données syndicales du CPS de 2012 postées le 26 janvier
2013. Unionstats.com.
22 John T. Addison, Alex Bryson, Paulino Teixeria and Andre Pahnke. 2010. “Slip Sliding Away: Further Union Decline in
Germany and Britain.” Document de discussion IZA n°4760. Bonn, Allemagne.
23 Joohee Lee. 2012. “A Renewal of Solidarity or Continued Decline? The Korean Retail Workers’ Struggles against
Neoliberalism.” In Suzuki, Akira, éditeur. Cross-National Comparisons of Social Movement Unionism: Diversities of Labour
Movement Revitalization in Japan, Korea and the United States. Vol. 18. Oxford, UK: Peter Lang.
24 Le taux de densité vaut pour « le commerce de gros, le commerce de détail et les réparations automobiles. » James Achur.
2010. “Trade Union Membership 2010.” Londres: UK Statistics Authority.
25 Andrew Jackson. 2008. “Rowing Against the Tide: The Struggle to Raise Union Density in a Hostile Environment.” Canadian
Labour Congress. Saint-Lazare, Québec. http://workerpower.ca/pdf/Rowing_Against_the_Tide_CLC.pdf
26 Irena Grugulis et Ödül Bozkurt. 2011. Retail Work (Critical Perspectives on Work and Employment). Palgrave Macmillan.
27 Howard Zinn, Robin D.G. Kelly et Dana Frank. 2002. Three Strikes: Miners, Musicians, Salesgirls, and the Fighting Spirit of
Labor's Last Century. Beacon Press.
28 Chris Tilly. 2007. “Global Restructuring in Retail: What Impact on Labor?” Department of Regional Economic and Social
Development, University of Massachusetts Lowell.
29 James Hendrie. 2004. "A Review of a Multiple Retailer's Labour Turnover." International Journal of Retail & Distribution
Management, Vol. 32(9): 434 – 441.
30 Susan J. Lambert. 2008. “Passing the Buck: Labor flexibility Practices that Transfer Risk onto Hourly Workers.” Human
Relations. Vol 61(9): 1203-1227. Page 1218.
31 Trak Recruiting 2011. “Fashion & Retail Employee Staff Turnover.” 22 septembre.
http://www.trakrecruiting.com/news.php?id=89&n=latestnews&c=5
32 Thomas Andersson, Ali Kazemi, Stefan Tengblad et Mikael Wickelgren. 2011. “Not the Inevitable Bleak House? The Positive
Experience of Workers and Mangers in Retail Employment in Sweden.” In Irena Grugulis et Ödül Bozkurt, éds. Retail Work
(Critical Perspectives on Work and Employment). Palgrave Macmillan. Page 255.
33 OIT. 2012. « Rapport 2012 sur le travail dans le monde: de meilleurs emplois pour une économie meilleure. » Genève: Bureau
international du travail.
34 Les pays n’ont pas tous la même définition du « temps partiel » : certains s’appuient sur les heures travaillées et d’autres sur
l’évaluation de l’employé. Pour ceux qui utilisent les heures, la définition la plus courante est soit de moins de 35 heures par
semaine, soit de moins de 30 heures. Selon diverses définitions, les professions du commerce ont une proportion relativement
élevée de travailleurs à temps partiel dans une bonne partie de l’OCDE. Voir Alois van Bastelaer, Georges Lemaître et Pascal
Marianna. 1997. “The Definition of Part-Time Work for the Purpose of International Comparisons.” Labour Market And Social
Policy Occasional Papers – N°22. Paris: OCDE.
35 Tobias Wenzel. 2010. “Deregulation of Shopping Hours: The Impact on Independent Retailers and Chain Stores,” document
de discussion DICE, n°03.
36 Kris Maher. 2008.“More People Pushed into Part-Time Work Force,” Wall Street Journal, 8 mars.
37 James Surowiecki. 2012. “The More the Merrier.” The New York. 26 mars.
http://www.newyorker.com/talk/financial/2012/03/26/120326ta_talk_surowiecki
38 Prue Huddleston. 2011. “’It’s All Right for Saturdays, but Not Forever.’ The Employment of Part-time Student Staff Within the
Retail Sector.” In Grugulis and Bozkurt 2011.
39 Stephanie Luce and Naoki Fujita. 2012. “Discounted Jobs: How Retailers Sell Workers Short.” New York: Retail Action
Project.
17
40 Hielke Buddlemeyer, Gilles Mourre et Melanie Ward-Warmedinger 2005. “Part-time Work in EU Countries: Labour Market
Mobility, Entry and Exit.” Germany: European Central Bank. http://www.ecb.europa.eu/pub/pdf/scpwps/ecbwp460.pdf
41 Noel Gaston et Tomoko Kishi. 2006. “Part-time workers doing full-time work in Japan.” Journal of the Japanese and
International Economies. Vol. 21(4): 435-54.
42 Isik U. Zeytinoglu, Waheeda Lillevik, M. Bianca Seaton et Josefina Moruz. 2004. “Part-Time and Casual Work in Retail Trade
Stress and other Factors Affecting the Workplace.” Relations industrielles / Industrial Relations. Vol 59(3): 516-544.
43 Mrozowicki et al 2013
44 Lambert 2008.
45 Simon Neville. 2013. “Sports Direct: 90% of Staff on Zero-hour Contracts.” The Guardian. 28 juillet.
46 Phillip Inman. 2013. “Zero-hours Contracts Need Code of Practice, Says Lib Dem MP.” The Guardian. 4 juillet.
47 Vanessa Gash. 2008. “Preference or Constraint? Part-time Workers' Transitions in Denmark, France and the United Kingdom.”
Work Employment Society. Volume 22(4): 655–674.
48 Merja Kauhanen. 2008. “Part-Time Work and Involuntary Part-Time Work in the Private Service Sector in Finland.” Economic
and Industrial Democracy. Vol 29(2): 217-248.
49 Gillian Whitehouse, George Lafferty et Paul Boreham. 1997. “From Casual to Permanent Part-Time? Non-Standard
Employment in Retail and Hospitality.” Labour & Industry: a Journal of the Social and Economic Relations of Work. Vol 8(2): 3348.
50 Buddlemeyer, Mourre et Ward-Warmedinger 2005.
51 Wiemer Salverda, Joachim Moeller et Michel Sollogoub. 2005. “Retail Employment and Wage Rigidities.” In Ive Marx and
Wiemer Salverda, éds. Low-wage Employment in Europe: Perspectives for Improvement. Leuven: ACCO.
52 Jacob S. Hacker 2006. The Great Risk Shift: The Assault on American Jobs, Families and Retirement, and How You Can
Fight Back. Oxford: Oxford University Press.
53 Adrianna D. Kugler. 2004. “The Effect of Job Security Regulations on Labor Market Flexibility Evidence from the Colombian
Labor Market Reform.” In James J. Heckman et Carmen Pagés, éditeurs. Law and Employment: Lessons from Latin American
and the Caribbean. Chicago, IL: University of Chicago Press.
54 Nancy K. Cauthen. 2011. “Scheduling Hourly Workers: How Last Minute, “Just-In-Time” Scheduling Practices Are Bad for
Workers, Families and Business.” New York: Demos.; Lambert 2008.
55 C.N.Jones et K. Nolde. 2013. “Demand Driven Employee Scheduling for the Swiss Market.”
http://infoscience.epfl.ch/record/187141/files/apexAnnals10.pdf
56 Lambert 2008.
57 David Jennings. 2001. “Thorntons: the Vertically Integrated Retailer, Questioning the Strategy.” International Journal of Retail
& Distribution Management. Vol 29(4): 176-187.
58 Dhruv Grewal, Gopalkrishnan R. Iver, Javalgi Raishekhar (Raj) G. et Lori Radulovich. 2011. “Franchise Partnership and
International Expansion: A Conceptual Framework and Research Propositions.” Entrepreneurship: Theory and Practice. Vol
35(3): 533.
59 Krueger a constaté que les salaires étaient plus élevés dans les magasins appartenant à des entreprises que dans les
franchises, et que leur « profil des revenus y était également plus fort », ce qui donne à penser que ceux qui travaillent pour des
franchises disposent d’une échelle de carrière moins intéressante. Voir Alan Krueger. 1991. “Ownership, Agency, and Wages:
An Examination of Franchising in the Fast Food Industry.” Quarterly Journal of Economics 106(1): 75-101.
60 Dont 14 en anglais, 10 en français, 4 en espagnol, 3 en suédois et 2 en allemand.
61 ACTRAV. 2012. « Du travail précaire au travail décent. » Document final du colloque des travailleurs sur les politiques et
réglementations destinées à lutter contre l’emploi précaire. Genève: Organisation internationale du travail.
62 Charles Weathers. 2007. “Organizing Marginalized and Non-Regular Workers – A US-Japan Comparison.” Center for
Research on Economic Inequality. Discussion Paper Series. Osaka City University.
63 Mrozowicki et al 2103.
64 ACTRAV. 2012.
65 Mrozowicki et al 2103.
66 Wayne F. Cascio. 2006. “Decency Means More than ‘Always Low Prices’: A Comparison of Costco to Wal-Mart’s Sam’s Club.”
Academy of Management Perspectives, août.
67 Marshall L. Fisher, Jayanth Krishnan et Serguei Netessine. 2006. “Retail Store Execution: An Empirical Study.” Operations
and Information Management Department. The Wharton School, University of Pennsylvania; James Surowiecki. 2012. “The
More the Merrier.” The New York. 26 mars. http://www.newyorker.com/talk/financial/2012/03/26/120326ta_talk_surowiecki
68 Zeynep Ton. 2011. “Why ‘Good Jobs’ are Good for Retailers.” Harvard Business Review. Vol 90 (1-2): 124-31.
69 Charles E. Pettijohn, Linda S Pettijohn et A.J. Taylor. 2002. “The Influence of Salesperson Skill, Motivation, and Training on
the Practice of Customer-Oriented Selling.” Psychology & Marketing, Vol. 19(9): 743–757.
18
70 Lorraine Dearden, Howard Reed et John Van Reenen. 2012. “Who Gains When Workers Train? Training and Corporate
Productivity in a Panel of British industries.” Londres. The Institute for Fiscal Studies. WP 00/04.
71 Anne-Marie McGauran. 2001. “Masculine, Feminine or Neutral? In-company Equal Opportunities Policies in Irish and French
MNC retailing.” International Journal of Human Resource Management. Vol 12(5): 754–771.
72 Françoise Carré, Chris Tilly et Lauren D. Applebaum 2010. “Competitive Strategies and Worker Outcomes in the US Retail
Industry.” UCLA Institute for Research on Labor and Employment. Research and Policy Brief.
73 EiroOnline. http://www.eurofound.europa.eu/eiro/2008/11/articles/be0811019i.htm
74 Carré , Tilly et Applebaum 2010. Notons que le Danemark ne connaît pas de salaire minimum fédéral. A la place, le salaire
minimum est établi par des négociations entre les syndicats et les associations patronales.
75 Liz Gooch. 2012. “Malaysia Enacts Minimum Wage.” New York Times. 1er mai.
76 Les ordonnances sur le salaire de subsistance (living wage) sont une stratégie parmi d’autres pour influencer la politique de
développement économique. Aux Etats-Unis, des coalitions entre syndicats et collectivités ont conclu des « accords sur les
avantages pour la collectivité » qui ne correspondent pas toujours à la politique municipale, mais sont des accords négociés
avec les promoteurs en vue de fixer des salaires plus élevés, d’établir la neutralité des syndicats, de respecter des normes
environnementales et souvent, de fournir d’autres prestations telles que logements à loyer modéré ou garderies pour enfants.
Ces accords sont conclus en s’appuyant sur le gouvernement municipal. Etant donné que les projets de développement
économique exigent généralement des autorisations de zonage, et incluent souvent toute une gamme de subventions
économiques (allant de prêts à bas taux jusqu’à des abattements fiscaux), ces coalitions font pression sur la municipalité pour
assortir les projets d’aménagements de contraintes. Dans d’autres cas, les conditions sont attachées aux programmes de
développement économique des villes ou des Etats, passant d’accords par sites à des accords sectoriels. Ainsi, Los Angeles, en
Californie, a adopté une politique de salaire de subsistance qui couvre tous les projets de l’Agence de réaménagement de la
communauté. Les promoteurs, plus les entreprises et les sous-traitants qui travaillent pour eux, sont tenus de payer le salaire de
subsistance de la ville. En outre, tous les hôtels et les tiers locataires – y compris le commerce – doivent payer le salaire de
subsistance sur les terrains détenus ou loués par l’Agence.
77 Haley-Lock a constaté que les cadres des restaurants américains renvoient les travailleurs tôt dans leurs foyers si la clientèle
est peu nombreuse, alors que les cadres des mêmes chaînes de restaurants en Colombie britannique ne le font pas. Elle en
conclut que l’évolution de la législation sur la tranche horaire minimum de travail est un facteur. Anna Haley-Lock.. 2011. “PlaceBound Jobs at the Intersection of Policy and Management: Employer Practices in Seattle, Chicago and Vancouver Restaurant
Chains.” American Behavioral Scientist. Vol 55(7): 823 - 842.
78 Neville 2013.
79 Cauthen 2011.
80 CSI 2012. “Annual Survey of Violations of Trade Union Rights.”
81 National Employment Law Project. 2008. “Rebuilding a Good Jobs Economy: A Blueprint for Recovery and Reform.”
http://nelp.3cdn.net/107e65168f65eacd6e_l1m6ibpdr.pdf
82 Susan J. Lambert, Anna Haley-Lock et Julia R. Henly. 2012. “Schedule Flexibility in Hourly Jobs: Unanticipated Consequences
and Promising Directions.” Community, Work & Family, 15(3): 293-315.
83 Marc Castro. 2012. “South Korea Squeezes Big Box Retailers.” International Venture Capital Post. 14 avril.
19
20