Téléchargez l`analyse - Orchestre Philharmonique de Strasbourg
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Concert de la Saint-Sylvestre Jeudi 31 décembre 2015 20h Strasbourg, PMC Salle Érasme Concert du Nouvel An Vendredi 1er janvier 2016 17h Strasbourg, PMC Salle Érasme Geoffrey Styles direction Marc Souchet baryton William Walton (1902-1983) Crown Imperial Charles Villiers Stanford (1852-1924) Songs of the Sea op.91 Drake's drum Outward bound Devon, o Devon Homeward bound The "Old Superb" Eric Coates (1886-1957) London suite Covent Garden Knightsbridge Haydn Wood (1907-1954) Paris Suite, Montmartre ► Arnold Arnold (1921-2006) A Grand, Grand Overture 8' 18' 8’ 4' 9' Joseph Haydn (1732-1809) (orchestration Swann) Symphonie nº 94 en sol majeur La Surprise 6' Ralph Vaughan Williams (1872-1958) Greensleeves 4' Traditionnel (orchestration Grainger) Country Gardens Shepherd's Hey 3' 3' Henry Wood (1869-1944) Extrait du medley on British Sea Songs (1910 version) 10’ John Barry (1833-2011) (orchestration Stanley Black) Medley of themes from James Bond films 9’ Best of British Venez vous régaler du meilleur de l’esprit et de l’humour anglais… en musique Entre des balades pas forcément irlandaises, des chansons de mer et de marins, une fameuse symphonie de Haydn recelant bien plus de « surprises » que le bon Franz Josef en imaginait, des airs célèbres, une improbable ouverture pour divers (très divers) instruments et un 007 au service de Sa Très Gracieuse Majesté, Que n’a-t-on dit sur les relations entre la France et l’Angleterre ? Les tensions ou les incompréhensions sont anciennes. Exemple : l’Angleterre attendra 1806 pour annoncer qu’elle renonçait à ses prétentions sur le trône de France, notre pays où la monarchie était abolie… depuis près de 15 ans. Cela dit, la culture britannique reste fascinante, pour deux raisons principales : ses traditions spécifiques (à commencer par l’admiration pour sa propre monarchie) et son humour. Sur sa cuisine, mieux vaut garder le silence ! Si on tente de caractériser cet humour, il faut recourir à un mot anglais intraduisible : « whimsy ». Ce qui signifie, à la fois, surréel, léger, ludique et parfois pointu. Les meilleurs exemples en littérature seraient peut être Alice au Pays des merveilles ou les pièces de théâtre d’Oscar Wilde. En musique, ces deux pistes - la tradition et l’humour - se combinent et atteignent leur apogée dans l’institution qui s’appelle The Last Night of the Proms. Institués en 1895 par Sir Henry Wood, les concerts d’été au Royal Albert Hall « The Proms » proposent toujours des programmes qui associent de la musique spectaculaire et populaire avec des éléments légers et ludiques : bref, une formule parfaite pour la Saint Sylvestre, d’autant plus que l’été est encore loin pour penser aller passer quelques soirées à Londres. Cette soirée chez nous commence avec un clin d’œil à l’attachement des Britanniques pour les cérémonies et pour leur glorieuse monarchie. « Crown Imperial » (Couronne impériale) de William Walton est une marche composée en 1936 pour le couronnement d’Edward VIII qui finalement n’eut jamais lieu, le roi ayant abdiqué (fait unique dans l’histoire du Royaume Uni) avant son couronnement. Peu importe : la date du couronnement fut maintenue tout comme a création de l’œuvre – mais en l’honneur de George VI, le frère d’Edward VIII. Couronne impériale et pas simplement royale, car on ne saurait oublier que le monarque est aussi Empereur des Indes". La puissance de la Grande-Bretagne reposait sur ses flottes, tant militaire que commerciale. Aujourd’hui encore la langue anglaise regorge d’expressions et mots dont les origines sont nautiques, même si la majorité des anglophones n’en est pas consciente. Depuis le XVIème siècle et la victoire imprévue de Sir Francis Drake sur la grande armada d’Espagne, la mer et la domination maritime anglaise sont devenues des éléments essentiels de sa culture Il n’est donc pas surprenant que, pendant l’ère victorienne, l’apogée de la gloire britannique, le compositeur Sir Charles Stanford ait choisi de célébrer son pays avec son cycle « Songs of the Sea » (Chansons de la mer), qui évoque les exploits des grands amiraux et marins et les liens étroits entre l’île et la mer, son « autre jardin ». Eric Coates (1886-1957), deux générations plus tard, fut un des compositeurs de la grande époque de la radio de l’entre-deux-guerres. Il était le fournisseur par excellence du genre dénommé « British Light Music », dont l’exemple le plus connu est sa London Suite, avec notamment ses deux mouvements Covent Garden and Knightsbridge, qui évoquent les boulevards animés du centre ville de Londres. La marche Knightsbridge est particulièrement célèbre en Angleterre pour avoir été le thème d’une des émissions les plus populaires de la BBC. La fascination des Anglais pour Paris est éternelle. Pour eux, Paris représente sophistication, décadence, romance et liberté sexuelle. Il n’est donc pas surprenant que Haydn Wood, contemporain d’Eric Coates, ait voulu dépeindre en musique les délices de la capitale française pour titiller son public, plutôt conservateur. Après l’entracte, nous abordons un autre caractère des Anglais : l’excentricité, avec les fameux concerts de Gérard Hoffnung donnés dans les années 60s, plaisanteries musicales aussi sophistiquées que bouffonnes. Hoffnung passa commande, entre autres, au grand compositeur Malcolm Arnold d’une ouverture délibérément pompeuse pour le premier de ses concerts. Arnold honora cette commande avec sa « Grand, grand overture », pour un orchestre qui comprend – outre l’effectif classique d’une grande œuvre symphonique – pas moins de quatre fusils, trois aspirateurs, et pour faire bonne mesure, une cireuse. Si l’effet de l’œuvre d’Arnold repose sur son exubérance, l’arrangement commandé par Hoffnung de la Symphonie n° 94 de Haydn – dite La Surprise - est plutôt, quant à lui, une amplification des intentions originales du compositeur. L’arrangeur, Donald Swann, était un personnage extraordinaire – linguiste, traducteur, auteur, compositeur, chanteur, poète, pianiste, cabarettiste. Son hommage à Haydn est à la fois ironique et affectueux. Percy Grainger, l’orchestrateur des mélodies folklorique anglaises qu’on entendra, était en réalité australien. Mais il arrive souvent que les étrangers deviennent plus anglais que les Anglais – pensons à Oscar Wilde, George Bernard Shaw, Arthur Conan Doyle ou même Tony Blair. Grainger, passionné par la musique populaire traditionnelle, a réalisé des versions aujourd’hui acceptées comme définitives de ces chansons de bergers et paysans. Henry Wood, fondateur des Proms, est également l’auteur d’un arrangement d’un groupe de chansons de marins, la musique des matelots et pêcheurs étant un élément essentiel du folklore anglais. Comme les Anglais savent si bien le faire, ils ont repris ce medley, composé à l’occasion de la commémoration de la bataille de Trafalgar en 1905, pour en faire un des moments incontournables de la dernière nuit des Proms. Chaque exécution de cette œuvre se fait désormais traditionnellement avec la participation du public. Tous les détails vous seront expliqués par le chef d’orchestre de notre soirée, l’inimitable Geoffrey Styles. Comme on a pu constater lors de la cérémonie d’ouverture des JO de Londres, James Bond - l’agent spécial au service de sa majesté, personnage inventé par l’écrivain Ian Fleming en 1952 – joue, dans l’esprit de beaucoup, un grand rôle dans la représentation de la Grande-Bretagne. A l’époque où l’empire britannique était en déclin et la guerre froide entre les États-Unis et l’Union Soviétique reléguait pour la première fois la Grande-Bretagne à l’arrière-plan, la figure de James Bond était (et reste) le symbole fantasmé de la place des Britanniques sur la scène politique et militaire. Les films (dont le premier est sorti en 1962), continuent à connaitre un succès mondial, grâce non seulement à son cocktail d’action et d’humour mais aussi à la musique de John Barry, devenue célébrissime. Comment mieux terminer une soirée de musique britannique qu’avec un medley des thèmes de James Bond ?