Dossier dentisterie du Lapin
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Dossier dentisterie du Lapin
Art icl e d e s y n t h è s e DOSSIER DENTISTERIE DU LAPIN Christophe BULLIOT* L’anatomie buccodentaire du lapin, que nous avons abordée dans sa complexité dans la première partie de ce dossier, permet de comprendre la gravité et l’étendue des lésions buccales et crâniennes lors d’atteinte dentaire. Cette seconde partie est dédiée aux deux problèmes dentaires majeurs du lapin de compagnie de par leur fréquence et leurs conséquences cliniques. Ce sont d’une part, les malocclusions dentaires (incisive et jugale) et d’autre part les abcès dentaires. Nous aborderons pour chacun d’entre eux leurs origines possibles puis les lésions induites et les conséquences cliniques. SECONDE PARTIE : ASPECT PATHOLOGIQUE Une compréhension de la pathologie dentaire du lapin et le choix et l’interprétation d’examens complémentaires adaptés passent obligatoirement par une bonne connaissance de l’anatomie du crâne. L’implantation des dents permet d’expliquer, par exemple, toutes les conséquences d’une malocclusion ou d’un abcès dentaire. Cet article a pour but de donner au praticien une vision de la «géographie dentaire» du lapin. I- LES MALOCCLUSIONS DENTAIRES 1- ORIGINES Insuffisance d’usure des dents liée à un défaut d’apport de foin et/ou d’herbe contenant de la lignine, seul véritable élément abrasif des dents lors de la mastication. La pousse dentaire se poursuit jusqu’à former des pointes dentaires. Prognathisme ou brachygnathisme : il est généralement congénital et se rencontre surtout chez les lapins de races extra-naines, naines et béliers. Les individus atteints doivent être écartés de la reproduction. La malocclusion touche en premier lieu les incisives et peut débuter vers l’âge de 4 mois. Traumatisme : fracture de dents ou de la mâchoire. Si une dent est cassée, la dent controlatérale s’use moins par absence de frottement. Les fractures de dents se rencontrent lors de chute ou lors de la coupe des incisives à la pince (fracture fréquemment longitudinale). Anorexie prolongée à l’origine d’un manque de mastication et d’usure dentaire. Carence en vitamine D et calcium à l’origine d’une maladie osseuse métabolique. 2- CONSEQUENCES MECANIQUES ET CLINIQUES Déviation de la mâchoire car les dents de plus en plus longues s’appuient les unes sur les autres jusqu’à décaler la fermeture de la mâchoire. • Incapacité à fermer la mâchoire. • Lésions de la muqueuse jugale lors de malocclusion des molaires et prémolaires supérieures. • Lésions linguales (photo 1) lors de malocclusion des molaires et prémolaires inférieures. A des stades avancés, une perforation linguale et des ponts dentaires peuvent être observés. * 8 Docteur vétérinaire, Clinique vétérinaire, 7 rue Philisbourg - 91800 BRUNOY 1 Remarque : lors de malocclusion importante des dents jugales, les incisives ne sont plus en contact lorsque la mâchoire est fermée. Déviation des incisives inférieures vers l’extérieur de la cavité buccale (photo 2) et des incisives supérieures vers l’intérieur. •Lésions secondaires de la muqueuse jugale et du palais lors de malocclusion des incisives supérieures. •Lésions secondaires des lèvres (photo 3) et des narines (photo 4) lors de malocclusion des incisives inférieures. 2 Anorexie et dysorexie due à l’incapacité de mastiquer et à la douleur (plaies buccales notamment). Possible perturbation du transit digestif. Ptyalisme et (pyo)dermite secondaire du menton (photo 5). 3 (photo11), et conjonctivite purulente lors d’abcès des incisives supérieures ou des prémolaires supérieures. Abcès rétrobulbaire par passage de pus dans la cavité orbitaire aboutissant à une exophtalmie voire une luxation du globe oculaire dans les cas graves (photo12). 4 5 9 Rhinite purulente (photo13) Sécrétions purulentes dans la cavité buccale et inflammation des muqueuses linguales, jugales et gingivales. II- LES ABCES DENTAIRES 1-ORIGINES ET MECANISMES PHYSIOPATHOGENIQUES Ils résultent d’un traumatisme dans la cavité buccale par la consommation d’un végétal trop abrasif et/ou coupant (paille, foin de mauvaise qualité) ou suite à une malocclusion dentaire. Les germes s’infiltrent dans les gencives jusqu’aux racines dentaires. Les structures avoisinantes commencent à être détruites progressivement. Une ostéite et une ostéolyse s’installent. La destruction osseuse peut être très importante (photos 6 à 8). Les germes se développent par la suite en périphérie de l’os pour finalement former un abcès sous cutané. La coque, très épaisse, est localisée en regard de la lésion dentaire. 10 6 11 Perturbation du transit digestif (liée à la dysorexie, à la douleur ou à l’ingestion de pus). 12 7 2-CONSEQUENCES CLINIQUES ET COMPLICATIONS 8 - Anorexie et dysorexie dues à l’incapacité de mastiquer et à la douleur (voire à la présence de pus dans la cavité buccale). - Malocclusion dentaire. Déformation de la face due à la présence d’un abcès sous cutané ou à la déformation osseuse secondaire à l’ostéolyse (photo 9). Une perforation cutanée est également possible (photo 10) Epiphora par compression des conduits lacrymaux et dermite secondaire périorbitaire 13 BIBLIOGRAPHIE 1- BARONE R. et al, Atlas d’anatomie du lapin, ostéologie. Ed. Masson et compagnie, 1973. 2- CAPELLO V., Rabbit and rodent dentistry handbook. Ed. ZEN, 2005. 3- CROSSLEY D., Dental disease in lagomorphs and rodents. In : Kirk’s Current Veterinary Therapy, XIII edition, 2000, p 1133-1137. 4- O’MALLEY B., Clinical anatomy and physiology of exotic species. Ed. E. Saunders, 2005. 5- SILVERMAN S. et TELL L., Radiology of rodents, rabbits and ferrets. Ed. Elsevier Mosby, 2005. Conception des schémas : Christophe Bulliot Manuscrit reçu le 22 septembre 2006 9