SUR L`HISTOIRE DES MATHÉMATIQUES EN TURQUIE Le
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SUR L`HISTOIRE DES MATHÉMATIQUES EN TURQUIE Le
HUSNY HAMID (Stamboul - Turchia) SUR L'HISTOIRE DES MATHÉMATIQUES EN TURQUIE Le développement des Sciences mathématiques dans les différents pays musulmans se ressemble plus ou moins. Pendant plusieurs siècles nous sommes témoins de grands progrès scientifiques, pour nous trouver devant une décadence à la suite. L'expUcation de cette décadence se rattache à de grands événements historiques. Pour les sciences mathématiques deux raisons, à mon avis, doivent être mises en avant: 1°) Après avoir occupé une place importante, la philosophie a donné naissance à des désaccords rehgieux et sociaux. Les théologiens dogmatistes, dédaignant la philosophie, ont réussi à la suppression dans les universités musulmanes d'une grande partie de l'enseignement philosophique et par suite des sciences y relatives comme la mathématique et la physique. 2°) Chez les mathématiciens musulmans (à tort appelés arabes) ni l'algèbre (fondée par eux), ni la géométrie n'ont pris une orientation nette et définitive. Ces mathématiciens sont restés d'une part fidèles à la conception spéculative des Grecs; d'autre part à la conception pratique et utilitaire des Indiens. Les mathématiciens turcs du 15 è m e et du 16 è m e siècles tels que KADï-ZADé (1352-1437), ALI-KOUCHDJI (1400-1474), MAHMOUD-MIRèME T C H é L é B I (mort en 1525), TAKIéDDIN RASID (1521-1585) n'abandonnaient pas la conception esthético-logique d'Euchde pour donner la préférence à la méthode algébrico-technique d'Alkhwarizmi, comme beaucoup de mathématiciens du 15 è m e et 16 è m e siècles. Vers 1600, dans les Facultés turques, les programmes ont subi une restriction et à partir de cette époque jusqu'à la fin du 18 è m e siècle la mathématique musulmane est restée stationnaire et eUe fut complètement abandonnée ensuite. La mathématique occidentale a pénétrée en Turquie vers la fin du 18 è m e siècle par la traduction des tables astronomiques de JACQUES CASSINI (1677-1757). CALFA-ZADé fut chargé en 1778 de la traduction de ces tables. Dans un des passages de son livre, Calfa-Zadé dit : « Jusqu'à présent on utiüsait chez nous 508 COMUNICAZIONI les tables d'OuLOUG B E Y (1393-1449) pour rédiger les calendriers. Dernièrement un savant de l'Occident, Cassini, a pubhé de nouveUes tables ; ceUes-ci rectifient et complètent les tables d'Ouloug b e y ; à mon avis, dorénavant, on devrait utiUser les tables de Cassini. On nous a chargé de la traduction et nous tâchons de l'exécuter de notre mieux. Nous avons ajouté au commencement de la traduction les tables de logarithmes ». Avant Calfa-Zadé, les logarithmes n'étaient pas connus en Turquie. On n'employait pas, comme aujourd'hui, les logarithmes pour résoudre les problèmes trigonométriques. La traduction des tables de Cassini était terminée en 1780. A partir de cette date l'attention de nos savants se dirigea vers l'occident. Ainsi, G é L é N B E V I ISMAIL E F F E N D I a écrit un ouvrage sur les logarithmes et H U S S E I N HUSNI EFFENDI a traduit les tables astronomiques de Lalande. Chez nous, la fondation de l'Académie du Génie (1795) a contribué au développement des sciences mathématiques. H O D J A I S H A K E F F E N D I fut entre 1816 et 1836 professeur de cette académie. Il a pubUé un traité de mathématiques générales en puisant aux sources orientales et européennes. Son traité comprenait l'Algèbre W'1 Mucabala, les éléments de Géométrie, la trigonométrie plane, la construction géométrique, l'apphcation de l'algèbre à la géométrie, les sections coniques, le Calcul différentiel et intégral, les éléments de mécanique, la physique, la trigonométrie sphérique, l'astronomie et la chimie. Cet ouvrage fut pendant plus de 4 0 ans la base de l'enseignement mathématique en Turquie. Nous pouvons considérer que Hodja Ishak Effendi fut le chef de l'école moderne et les deux mathématiciens comme Tevfik Pacha et SaUh Zéki sont ses disciples. T E V F I K PACHA (1832-1898) officier d'État-major est un grand mathématicien turc du 1 9 ê m e siècle. Son activité, son érudition, ses travaux personnels et sa situation sociale ont contribué beaucoup au développement des sciences mathématiques en Turquie. Tevfik Pacha fut directeur d'études à l'Académie du Génie. Il a consacré aux mathématiques tous les moments dont il pouvait disposer dans sa vie officieUe et privée. Il suivait de près les travaux des mathématiciens occidentaux. Il a approfondi les théories basées sur les quantités complexes et inventées par ARGAND, GRASSMAN, HAMILTON, B E L L A V I T I S et d'autres. Dans son « Linear algebra » écrit en anglais, Tevfik Pacha expose un calcul qui ressemble aux Quaternions. Il a suivi l'idée d'Argand et a pu générahser la méthode de celui-ci aux figures de l'espace. S A L I H - Z é K I (1863-1921) a fait ses études à Paris. Il a enseigné à la Faculté des Sciences de Stamboul alternativement l'algèbre supérieure, la géométrie analytique, le calcul différentiel et intégral, l'astronomie, la physique mathématique et le calcul des probabihtés. HUSNY H A M I D : Sur l'histoire des mathématiques en Turquie 509 Ses principaux ouvrages sont: 1°) Encyclopédie mathématique (Camoussou-Riaziate) ; 2°) Asari-Bakié (L'auteur dédie ce Uvre à ABOU'R RIHAN BIRONI et étudie dans les 4 volumes qui le composent, le développement de la mathématique musulmane en cherchant ce que les musulmans ont puisé dans les sources grecques et indiennes et ce qu'us ont ajouté eux-mêmes) ; 3°) Traité de physique ; 4°) Calcul des probabilités ; 5°) Logique mathématique. Grâce à SaUh Zéki l'école encyclopédique du Hodja Ishak Effendi et de Tevfik Pacha a atteint son apogée. Après la rédaction de « Camoussou-Riaziate » la mathématique moderne fut complètement introduite en Turquie. Pour conclure, je puis dire que chez nous l'histoire des mathématiques est entrée dans une phase nouveUe. Nous passons par une période de transition; nous avons renoncé aux notations arabes pour les remplacer par les notations internationales. Ce changement, connexe avec la réorganisation récente de l'enseignement, nous permettra d'être en contact plus étroit avec la mathématique actueUe, et de prendre part à l'activité générale.