Sur la bonne longueur d`onde

Transcription

Sur la bonne longueur d`onde
technique
Peter Rüfli
vérifient les examens pratiques. Ces examens
comportent une partie pratique de 20 minutes sur un simulateur et trois parties théoriques de 30 minutes chacune. Une 1re partie
(choix multiple) teste les connaissances
du GMDSS (Global Maritime Distress and
Safety System, voir encadré), une 2e partie
(aussi un choix multiple) vérifie les connaissances des règlements et des dispositions et
une 3e partie permet de contrôler les traductions des messages GMDSS de l’allemand à
l’anglais et de l’anglais à l’allemand. Chaque
année, près de 600 candidats (environ 15%
de femmes) passent leur examen auprès de
l’Ofcom. Le taux d’échec le plus élevé de la
partie pratique s’élève à 20% environ.
M. Kumli est expert responsable des examens
radio auprès de l’Ofcom depuis dix bonnes
années. Le département «Surveillance et
concessions de radiocommunications» de
l’Office fédéral de la communication (Bienne)
accorde les concessions radio aux navires de
commerce et aux bateaux sportifs battant
pavillon suisse dans les eaux internationales.
Jusqu’à présent, des concessions ont été
distribuées à 37 navires de commerce et
885 bateaux.
Pour recevoir la concession radio, il faut présenter un certificat de capacité confirmant le
fait que la personne sait comment utiliser
l’installation.
Sur la bonne longueur d’onde
Peter Kumli est le chef-expert des examens radio auprès de l’Officie fédéral de la communication
(Ofcom). Il prendra sa retraite cet automne. Malgré cela, cet ancien opérateur radio ne passera pas
son temps libre sur des bateaux de haute mer. Mais il sera toujours accompagné par des ondes.
Texte et photos : barbara
siegrist
Il est toujours assis à gauche, avec un visage
impassible, à l’écoute du moindre bruit. La
personne assise à sa droite (souvent un
homme, plus rarement une femme) est nerveuse, transpire et tremble légèrement de la
main droite. Elle se trouve dans une situation
de stress et doit envoyer un «Mayday». Tous
deux ne sont pas assis dans un cockpit en
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haute mer, mais dans la salle d’examen de
l’Ofcom, à Bienne. Ce candidat passe l’examen de radio en mer pour les bateaux sportifs, le LRC (Long Range Certificate). Les
capitaines et autres matelots peuvent passer
les examens SRC (Short Range Certificate)
ou LRC (Long Range Certificate) auprès de
l’Ofcom. Le SRC (certificat à validité limitée
pour la navigation des bateaux privés) permet
aux personnes qui l’ont obtenu d’utiliser des
installations VHF et Inmarsat-C. Le LRC (certificat global pour la navigation des bateaux
privés) permet d’utiliser des installations
VHF, MHF et à ondes courtes ainsi que des
appareils Inmarsat-C.
Chef-expert aujourd’hui…
L’homme au visage impassible assis à côté du
candidat qui passe son examen se nomme
Peter Kumli. Il est l’un des deux experts qui
marina.ch mars 11
Peter Kumli a sorti son ancien
uniforme de radionavigant
pour la SuisseNautic.
… et radiotélégraphiste hier
Examen pratique de radiocommunication maritime
Mais Peter Kumli n’a pas toujours été assis
dans un bureau. Tout a commencé dans les
années 1960, lorsqu’il a entendu pour la première fois le rythme aujourd’hui si connu du
code morse. Il décide alors de suivre un apprentissage de radiotélégraphiste auprès de
Radio Suisse. En 1972, il est engagé comme
radionavigant à bord du «Hampton Bridge».
Pour son baptême (qui était aussi le baptême
maritime de Kumli), ce cargo naviguant pour
une société maritime suisse devait traverser
la mer Baltique, contourner la Grande-Bretagne et traverser l’Atlantique. Kumli n’avait
pas suivi de formation nautique. Le premier
jour, il a dû avaler son petit-déjeuner à trois
reprises avant de pouvoir le garder dans son
estomac. Le personnel nautique du cargo
s’en était bien moqué: «Alors à la radio, on
a déjà vomi aujourd’hui?», se rappelle-t-il.
Aujourd’hui, la radio fait partie de toute
L’examen pratique sur simulateur pour le SRC ou le LRC dure 20 minutes. Voici
mars 11 marina.ch
un exemple de l’un des trois exercices à réaliser:
«Vous vous trouvez à trois milles marins des côtes du sud de l’Angleterre avec un
safran brisé. Vous dérivez lentement vers la côte et avez rapidement besoin d’un
remorquage. Il est 10h à bord. Envoyez par radio le message approprié.»
Solution:
Vous envoyez un message d’urgence à «all ships» via ASN sur le canal 70. Envoyez
ensuite le message suivant sur le canal 16:
PAN PAN – PAN PAN – PAN PAN
all stations – all stations – all stations
this is
Yacht Marilyn – Yacht Marilyn – Yacht Marilyn
HBY (Hotel, Bravo, Yankee) 1234 [Signal d’appel]
269 678900 [MMSI (Maritime Mobile Service Identity)]
at 09.00 UTC
We are three nautical miles offshore from the Southcoast of England. Our rudder
is broken, we are drifting slowly towards the coast. We ask for immediate tug
assistance. Over.
Veillez à toujours parler lentement et clairement tout en écrivant.
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technique
A l’entrée du port de Cala
Gavetta sur La Maddalena,
il est possible de contacter
les autorités du port via le
canal VHF 74.
Sécurité en mer
Depuis le naufrage du Titanic en
1912, la sécurité a été continuellement améliorée en mer. Deux ans
après cette catastrophe, une première version de la Convention pour
la sauvegarde de la vie humaine en
mer (SOLAS, Safety of Life at Sea) a
été établie. La Suisse est également
un pays signataire de la version actuelle de la convention. Entre autres
dispositions, ce document définit
les équipements obligatoires des
radios de bord. Les bateaux sportifs
ne doivent pas obligatoirement être
équipés d’une radio. Il faut cependant savoir que la radio est un aspect
essentiel de la sécurité.
formation ­nautique et les bateaux n’embarquent plus des personnes ayant uniquement
suivi une formation de radionavigant. Les informations sont transmises numériquement
par satellite. A l’époque, les informations
­radio étaient principalement transmises par
code morse et une petite partie seulement
par radiotéléphonie (parole). Peter Kumli se
rappelle de son examen final auprès de Radio
Suisse lors duquel il était exigé de réaliser cinq
minutes de morse à 100 signes par minute et
avec nota bene sans la moindre erreur. Plus
tard, en pleine mer, il fallait que les informations soient transmises et comprises même
en cas de houle importante ou de pertur­
bations radio.
Peter Kumli se rappelle de deux cas d’urgence
autrement plus graves que le souvenir de son
mal de mer. Il avait vécu en direct ces deux
événements qui s’étaient déroulés lors d’une
traversée entre le Japon et l’Australie. Il entendit un jour le «Mayday» d’un ferry au large
des Philippines. Il transmit alors le message
d’urgence par ondes courtes à la station radio
côtière de Singapour. La même nuit, un cargo
grec qui luttait contre un typhon au sud de
la mer de Chine envoya également un «Mayday». Kumli entendit sur les ondes courtes
qu’il captait que le cargo demandait une aide
50
par hélicoptère. Cette aide avait alors été
­refusée au cargo car un vol en hélicoptère
aurait été trop dangereux à cause du typhon.
La radio s’est ensuite tue, laissant place à un
silence très lourd.
Le 1er février 1999 a été introduit
le GMDSS (Global Maritime Distress
and Safety System), un système international de sécurité et d’urgence
établi par l’Organisation maritime
internationale (OMI) pour la naviga-
Un amateur radio du matin
tion en mer. Le système des appels
Peter Kumli transmet ses connaissances de la
radio en mer aux membres du CCS depuis
1990. Il a appris à naviguer sur le lac de
Thoune. Aujourd’hui, son successeur désigné
auprès de l’Ofcom, Andreas Hager, se prépare
à passer son permis B. C’est ainsi que s’ouvre
une nouveau chapitre dans la vie de Peter
Kumli. Il veut maintenant laisser la voile pour
naviguer sur un bateau à moteur et abandonner la mer pour les canaux et les fleuves. Il
souhaite réaliser un de ses rêves cette année:
traverser le Canal de Kiel de Hambourg à Kiel.
Et, cela va de soi, il continuera à donner des
cours de radio.
Barbara Siegrist, l’auteure de ce texte, est membre de l’équipe des experts des examens de radio maritime auprès de l’Ofcom depuis 2011.
Pour de plus amples informations sur la radio
en mer, sur les conditions d’examen et les
cours ainsi que des formulaires d’inscription,
rendez-vous sur www.ofcom.admin.ch sous le
lien «Examens de radiocommunication».
sélectifs numériques (ASN) permet
de déclencher une alarme simplement en appuyant sur un bouton,
d’envoyer un message d’urgence
ou de sécurité, ou encore d’entrer
en contact avec une station radio
côtière pour un conseil médical ou
pour des liaisons commerciales. Le
canal VHF 70 est réservé pour ce
système. Les bateaux équipés du
système ASN reçoivent un MMSI
(Maritime Mobile Service Identity),
un numéro à neuf chiffres débutant
toujours par 269 pour la Suisse.
Et pour rappel, le message d’urgence «Mayday» vient du français «m’aidez». Quant au message­
d’urgence «pan pan», il vient du mot
«panne» et est prononcé à la française. Il en va de même du message
de sécurité «Sécurité».
marina.ch mars 11