A Denges, la gare de Lausanne- triage se réveille au crépuscule

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A Denges, la gare de Lausanne- triage se réveille au crépuscule
24 heures | Lundi 1er septembre 2014
19
Vaud
Reportage
A Denges, la gare de Lausannetriage se réveille au crépuscule
A la tombée de la
nuit, les travailleurs
du rail s’activent
à séparer
et à raccrocher
les wagons
de marchandises
P
La gare de triage à Denges.
Jean-Michel Vallat, Daniel Ispir et Dominique Michaud.
Eviter la routine
«J’aime travailler à l’extérieur»,
confie Sébastien Joray, qui fêtait
mercredi ses 25 ans de carrière aux
CFF, dont onze à la gare de Lausanne-triage. Ce soir, il occupe le poste
de dérégleur. Des heures durant, il
parcourra jusqu’à 15 kilomètres à
pied pour débrancher les conduites d’air reliant les wagons. La semaine prochaine, il changera de
casquette. Car tous les employés en
manœuvre connaissent, sur le bout
des doigts, les différents métiers,
qu’ils exercent en alternance. Histoire d’éviter la routine.
C’est d’ailleurs ce qui a titillé Daniel Ispir au moment d’orienter sa
carrière. «Mon père a travaillé aux
CFF pendant dix-sept ans, ce qui
m’a donné l’idée de faire un stage,
confie le jeune homme, en poste
depuis cinq ans. Je ne voulais pas
exercer un métier où l’on fait tous
les jours la même chose. Ici, on est
apte à travailler dans tous les secteurs.» Sa radio, accrochée en bandoulière, émet un grésillement. A
l’autre bout, un collègue lui donne
le feu vert. Cette semaine, Daniel
Ispir est perchiste. Son rôle? Décrocher les wagons à l'aide d’une longe
tige en métal, sur la bosse de débranchement. Un geste qui exige
rapidité, dextérité et concentration. «Il m’a fallu un peu de temps
pour m’habituer à travailler de
nuit, se souvient le perchiste. Il faut
prendre un rythme.»
Une fois les wagons déréglés et
détachés, les voilà parés pour rejoindre le faisceau de départ, une
gigantesque toile d’araignée consti-
Jean-François Freymond, chef des sabotiers.
Ernesto Barbosa, sabotier.
tuée de trente-huit voies de formation, à l’ouest du site. Poussés par
la loc de manœuvre, les wagons
prennent de la vitesse en franchissant la bosse, atteignant entre
15 km/h et 20 km/h selon le tonnage, avant de passer entre les imposantes mâchoires des freins de
voies. Ralentis, les wagons ne sont
pas pour autant arrêtés. C’est là
qu’interviennent les sabotiers.
Sans cesse à l’affût, ils posent de
éjecté. «Ce genre d’incident est extrêmement rare, c’est la deuxième
fois que cela se produit en deux
ans», observe Alexandre Siffert, en
se rendant sur les lieux pour examiner le sabot, le rail, puis les wagons.
Par chance, rien n’a été endommagé.
En chiffres
275 000
wagons passent chaque année
par la bosse de débranchement.
lourds sabots jaunes (8 kg) sur les
rails, quelques secondes seulement
avant l’arrivée des wagons. «La
roue ne touche plus le rail, donc
ceux-ci freinent, résume Alexandre
Siffert, conseiller sécurité à la gare
de Lausanne-triage. Il s’agit de l’un
des métiers les plus anciens du rail,
car il n’a pas changé depuis l’apparition des trains de marchandises.»
En poste depuis vingt-quatre
ans, Ernesto Barbosa connaît son
job par cœur. Scrutant l’horizon, il
pose son sabot et se retire sur le
côté. Pas le temps de gamberger,
un autre mastodonte sur roues arrive. Et, soudain, le choc. Un wagon en percute un autre dans un
brouhaha infernal. Le sabot posé
par l’un de ses collègues a été
«J’aime l’esprit d’équipe»
Alignés sur les rails en fonction de
leur destination, les wagons attendent de former de nouveaux convois. C’est là qu’intervient la dernière étape. Le crocheur se glisse
entre deux wagons et les relie à
nouveau. Le tout sous le regard affûté de Jean-François Freymond,
chef opératif manœuvre. Employé
des CFF depuis vingt-cinq ans, il
travaille à la gare de Lausannetriage depuis trois ans. «Ce que
j’aime, c’est l’esprit d’équipe. Les
employés de manœuvre sont solidaires, ils se donnent des coups de
main.»
Cette immense fourmilière continue son manège jusqu’aux aurores. Aux alentours de 4 h 15, tout
s’arrête. Les convois sont tous en
route pour leur destination, les employés de manœuvre regagnent
leurs pénates. Jusqu’au crépuscule, où tout recommencera.
Découvrez toutes
les photos sur
Denges.24heures.ch
93
collaborateurs
travaillent sur le site
de la gare de Lausanne-triage.
Echauffement pour éviter les blessures
400
U Sur le coup des 20 h, quelques
minutes avant de se déployer aux
quatre coins de la gare de
Lausanne-triage, les employés se
réunissent devant le bâtiment
central. Sous la baguette
d’Alexandre Siffert, conseiller
sécurité et coach Warm Up, ils
procèdent à quelques exercices
d’échauffement durant cinq
sabots sont
utilisés chaque
année pour freiner les wagons.
Ils pèsent 8 kg.
62
kilomètres de voies se
déploient sur le site,
qui en compte onze à l’arrivée et
trente-huit au départ.
minutes. «La pratique régulière de
ces exercices permet de prévenir
les accidents et de rester en
forme», indique le responsable,
qui a mis ce programme sur pied
en collaboration avec la SUVA et
l’expérience de Losinger-Marazzi.
Les statistiques montrent en effet
que 60% des accidents survenus à
la gare de Lausanne-triage sont
dus à des chutes. Sur le terrain
escarpé du site, les ouvriers
risquent notamment de se blesser
aux chevilles ou aux genoux. «Les
échauffements permettent aussi
de faciliter la rééducation, ajoute
le responsable. Par exemple, une
cheville foulée nécessitera sept à
huit séances de physio au lieu
d’une quinzaine.»
Les informations de 24 heures arrivent dans les trains et les bus
Dès ce matin, les écrans
installés dans les trains
RER et les cars postaux
vaudois vous permettent
de lire les sujets
qui font l’actualité
sur 24heures.ch
De Nyon à Aigle, en passant par
Lausanne et jusqu’à Yverdon-lesBains, les trains CFF régionaux
RER diffusent depuis ce lundi matin des articles provenant du site
internet 24heures.ch sur des
écrans d’informations. Une offre
également présente dans les véhiVC1
Contrôle qualité
Si j’étais
un rossignol
Gilbert Salem
Natacha Rossel Texte
Christian Brun Photos
La nuit commence à tomber sur la
gare de Lausanne-triage, à Denges.
Une lente procession de lourds wagons de marchandises défile sous
les yeux des travailleurs, qui ont
enfilé leurs pantalons, leurs gilets
et leurs casques orange vif. Jusqu’au petit matin, dérégleurs, perchistes, sabotiers et crocheurs – des
métiers vieux comme le rail – orchestreront le bal des convois destinés à repartir aux quatre coins de la
Suisse et à l’étranger. Inlassablement, ils décrochent, freinent puis
reforment les trains. Un travail
physique, dangereux parfois.
Guérir
par des
ventouses
cules CarPostal des lignes de tout
le territoire vaudois, ainsi que
dans les Transports publics de la
région nyonnaise.
Nommés passengertv, ces
écrans qui affichent des données
concernant le trajet ou les connexions avec trains et bus vous
proposent désormais aussi un
aperçu de l’actualité sportive, politique, économique, météorologique ou culturelle vaudoise.
Régulièrement mises à jour,
ces dépêches vous permettent
d’être informés en continu de ce
qui fait l’actualité sur le site web
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Retrouvez l’actu de 24 heures dans les trains RER vaudois. DR
de Stan Wawrinka aux dernières
images du meeting aérien Air14.
Des articles que vous retrouverez ensuite de manière plus développée sur notre site internet et
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L’offre de passengertv est actuellement disponible dans les
transports publics de 23 cantons,
avec une diffusion auprès de
950 000 passagers par jour, dont
200 400 pour la Suisse romande.
S.B
lus la médecine
officielle multiplie
ses miracles par une
dynamique scientifique incontestée
(notamment en cette autre
cathédrale protectrice de
Lausanne qu’on appelle le
CHUV), plus on a de succès en la
contestant. En encourageant par
exemple de grands malades,
voire des gens simplement
grippés, à lui préférer des
traitements dits «traditionnels».
Si ceux de l’acupuncture
chinoise ont des résultats
remarquables, approuvés
depuis vingt ans par nos offices
de la santé, d’autres semblent
moins sérieux. Je pense à des
thérapeutiques européennes,
qui avaient fait des ravages au
Moyen âge, et furent pratiquées
encore à la fin du XIXe siècle
pour y inspirer des caricatures
Ce traitement, que
d’aucuns remettent
aujourd’hui
à la mode, serait
souverain contre
les maux de dos,
les migraines,
les tendinites
drolatiques sur ceux qu’on
appelait alors les «médicastres».
Soit des charlatans se réclamant
d’Hippocrate, mais dont les
seringues géantes ressemblaient
à des propulseurs de neige
carbonique et le stéthoscope à
un tuyau de soufflerie de forge.
De cet attirail devenu obsolète,
leurs émules actuels retiennent
encore de petits récipients en
forme de cloche appelés
ventouses.
Issue d’un mot latin signifiant
«courge vide et pleine de vent»,
la ventouse médicale dont je
parle – rien à voir avec l’ustensile à manche de bois qui
débouche les WC – est effectivement une demi-sphère en verre
que l’on appliquait, depuis des
siècles, sur la peau humaine
pour en retirer le «mauvais
sang». Plus précisément pour
y induire une révulsion par effet
de succion, et en dilater les
pores et les vaisseaux superficiels. Ce traitement, que
d’aucuns remettent aujourd’hui
à la mode, cette fois avec des
ventouses faites de silicone,
serait souverain contre les maux
de dos, les migraines, les
tendinites.
Des grands-mères broyardes
frémissent encore au souvenir
de leur vieux pépé Nathan,
de Morrevon-sur-Mérine,
quand, dans les années 1930,
on lui fit subir ce supplice «qui
ne lui ferait que du bien et ne
durerait pas plus de vingt minutes». Le majestueux patriarche
se vit couvrir la bedaine
dénudée d’une forêt d’ampoules
irisées, jointes les unes aux
autres et tintant ensemble à
cause de sa respiration inquiète.
«Il y eut une odeur d’enfer, car
pour faire le vide dans les
ventouses, on y brûlait de la
filasse imbibée d’alcool.» Diable!

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