3 questions à... - Club XXIe Siècle

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3 questions à... - Club XXIe Siècle
ème
Newsletter n°2 du Club XXIe Siècle - Février 2007
La diversité est une chance pour la France
Zoom sur...
Photo : Didier Pruvot © Flammarion
Edito
Hakim El Karoui
Président du Club XXIe Siècle
La campagne électorale a commencé.
Les attaques pleuvent de part et d’autre,
les candidats essayent tant bien que mal
de parler de leur projet et les Français
assistent impuissants au non débat qui
commence. Bien sûr, dans ce contexte, la
diversité est absente, comme d’ailleurs le
malaise des banlieues, la lutte contre les
discriminations et le thème si important
en ces temps d’inquiétude collective de
«l’identité nationale».
Pourtant, plus que jamais, la question
«Qu’est-ce qu’un Français au XXIe siècle ?»
est posée. C’est pourquoi le Club XXIe
Siècle va organiser avec des intellectuels
et des chercheurs une réflexion sur ce
thème. Le premier rendez-vous est fixé
le 8 mars, en partenariat avec l’Institut
d’Études Politiques de Paris pour une
journée de réflexion. Ne laissons pas
l’extrême-droite être la seule à répondre
à cette question !
La diversité en politique
«Qu’est-ce qu’être Français ?» Voici
l’un des Grands Débats ouverts par
Sciences-po Paris dans le cadre de
l’élection présidentielle pour 2007.
Cette manifestation, organisée avec
le Club XXIe Siècle, se déroulera
le 8 mars et réunira chercheurs,
politiques et experts pour réagir
à la question de la diversité en
politique.
Pour donner une plus large audience
à un sujet que nous voulons
placer au cœur de la campagne
qui s’ouvre, le Club XXI e Siècle et
Sciences-po se sont associés avec
le site Lemonde.fr, France Culture
et la chaîne de télévision Public
Sénat.
Structuré autour de deux tables
rondes rassemblant des représentants des partis politiques et des
candidats aux élections législatives
issus de l’immigration, ce colloque
sera l’occasion d’une présentation de la Charte de la diversité
politique par le Président du Club,
Hakim El Karoui.
Autour de la première table ronde,
consacrée aux propositions des
partis en matière d’ «intégration»,
les représentants des candidats à
l’élection présidentielle viendront
confronter leurs points de vue.
Alain-Gérard Slama, historien,
Caroline Fourest, journaliste, et
enfin Vincent Tiberj, chercheur au
CEVIPOF, participeront également
à ce débat animé par Ali Baddou.
Au cours de la seconde table ronde,
ce sont des candidats aux élections
législatives ou des personnalités
engagées localement qui débattront
ensemble sur le thème : «Candidats
issus de l’immigration, comment
sortir de l’assignation identitaire ?».
Louis Schweitzer, Président de
la Haute Autorité de Lutte contre
les Discriminations (HALDE), est
pressenti pour faire un bilan des
travaux de la HALDE.
3 questions à...
Jean-Marc Ayrault, Député-maire de Nantes,
Comment faire pour donner un sens à la
notion d’égalité ?
Le message des jeunes Français d’origine étrangère
est aujourd’hui qu’ils ne veulent pas des politiques
une compassion paternaliste, qu’ils ne veulent plus
être regardés comme des personnes différentes. Ils
expriment ainsi le désir que la République soit une
république réelle, c’est-à-dire qui garantit la pleine
application du principe d’égalité. La République ne doit
pas être seulement proclamée. Elle doit aussi être vécue
réellement. Il faut réaffirmer que chaque personne à
sa place au sein de la République et qu’elle n’a pas à
renier ses origines qui sont une richesse.
Quel chemin emprunter pour améliorer
la situation des personnes issues de la
diversité aujourd’hui ?
Si l’on pense à la discrimination positive, cette notion
a, pour moi, une connotation négative. Elle porte en
elle le risque d’instaurer un système de quotas et des
statistiques ethniques, ce qui n’est pas acceptable. Il
est nécessaire d’avoir un diagnostic juste : il y a des
inégalités sociales concentrées sur des territoires
délaissés par l’État. En cela, je partage les conclusions
du rapport Thélot sur l’avenir de l’école : il ne faut pas,
au nom de l’égalitarisme républicain, attribuer les
mêmes moyens partout mais au contraire, concentrer
les moyens dans les territoires les plus défavorisés.
L’Éducation nationale se doit d’innover, d’expérimenter
en mettant à contribution des personnes formées mais
aussi le monde associatif et les entreprises. Il faut
mettre fin au «saupoudrage» en matière de politique
publique.
L’instauration d’une véritable sensibilisation
à la diversité en milieu scolaire est
essentielle. Cette sensibilisation pourrait
se faire par l’enseignement des langues
d’origine pour les jeunes élèves issus des
«minorités visibles». Qu’en pensez-vous ?
L’école est le lieu d’apprentissage des savoirs mais
aussi le lieu d’apprentissage du respect, des valeurs
républicaines et du refus de
toutes les formes de racisme.
Il faut donc aider l’école à
assurer plus fortement encore
cette mission, notamment
en l’ouvrant à son environnement : la famille, mais aussi les activités extrascolaires.
Il convient également de réfléchir à la manière la plus
appropriée pour parler de l’histoire des autres religions
afin de constituer une mémoire partagée. S’agissant de
l’apprentissage des langues d’origine aux jeunes issus
des «minorités visibles», je pense qu’il est nécessaire de
présenter cet apprentissage non pas comme une faveur
que l’on accorderait à ces jeunes mais plutôt comme un
atout pour la France.
Photo D.R.
Invité du dîner du 31 janvier 2007
Newsletter n°2 du Club XXIe Siècle - Février 2007
ème
La diversité est une chance pour la France
Billet d’humeur par Laurent Tran Van Lieu, Investisseur
Le 19 février
Dans le cadre de l’Atelier «Chine», le
Club organise un dîner-débat le lundi
19 Février à 20 h avec Loïc Le Floch
Prigent, ancien Président d’Elf. Thème
du débat : la «Stratégie Chinoise dans
les matières premières en Afrique».
Le 5 mars
Dîner-débat avec Marcel Gauchet,
philosophe, Directeur de la revue Le
Débat, autour du thème «Qu’est-ce
qu’un Français du XXIe siècle ?»
Le 8 mars
Le Club organise à Sciences-po un
colloque sur le thème : «Qu’est-ce
qu’être Français aujourd’hui ?».
Chercheurs, politiques et experts
débattront de question de la diversité
en politique (voir notre article).
Le 21 mars
Dîner-débat avec Lionel Zinsou,
associé-gérant de Rothschild et Cie
et investisseur au Bénin.
Pour en finir avec les quotas !
Quand on dit «discrimination positive» tout le monde entend : quota ethnique. Bizarre, car
les (rares) champions du concept refusent tous la mise en place de tels quotas : Nicolas
Sarkozy, Yazid Sabeg et Eric Keslassy prennent soin de revendiquer une discrimination
positive qui soit socio-économique et non pas ethnique ni religieuse.
Certes. Mais s’il faut en passer par des quotas, même socio-économiques, alors la discrimination positive est bel et bien... discriminatoire. C’est-à-dire qu’elle institue une inégalité de
droit sous prétexte de rétablir une égalité réelle entre différentes catégories de la population.
Il est facile et légal, par exemple, de compter le nombre des salariés d’une entreprise qui résident dans telle ou telle
commune défavorisée, ou qui y ont suivi leur scolarité. Mais vouloir les recruter ou les promouvoir de préférence à
d’autres candidats pourtant plus compétents est une rupture du principe d’égalité.
Oui mais, à compétence égale, qu’en est-il ? Voici comment Anne-Marie Le Pourhiet, professeur de Droit et grande
pourfendeuse de discrimination positive, formule la question : «Si un employeur préfère un candidat français blanc
moins diplômé et expérimenté qu’un candidat français noir, il est certainement raciste et commet sans doute une
grosse erreur managériale préjudiciable à son entreprise, mais à CV équivalent en quoi est-ce ‘mal’ de préférer le
Blanc et, au contraire, ‘bien’ de préférer le Noir ?»
Ce n’est ni mal ni bien de préférer le candidat noir, ou disons plutôt le candidat présumé défavorisé, mais c’est
peut-être efficace et juste.
Juste, parce qu’un candidat issu d’une catégorie défavorisée, s’il offre les mêmes compétences qu’un autre
candidat, pourrait bénéficier d’une présomption de mérite supplémentaire. Une personne dont le parcours est passé
par un établissement scolaire placé en zone d’éducation prioritaire, ou qui réside dans une zone urbaine sensible,
n’a-t-elle pas probablement plus de mérite qu’un autre candidat ? Plus de mérite, c’est-à-dire selon Le Petit Robert,
plus de «ce qui rend une personne digne d’estime, de récompense, quand on considère la valeur de sa conduite et
les difficultés surmontées.» C’est juste aussi, parce que ce n’est pas injuste : ce n’est pas au profit d’un candidat
moins compétent que le candidat malheureux a perdu.
Efficace, parce que cette présomption de mérite supplémentaire à compétence égale, en laissant entrer davantage
de représentants des catégories défavorisées, suscite un espoir contagieux sans effet pervers ni stigmatisation.
Efficace parce que, en brisant le plafond de verre qui limite la promotion de certains, il confirme cet espoir à tous les
étages de l’ambition. Mais efficace seulement, à vrai dire, s’il y a des candidats ! C’est-à-dire bien sûr si toutes les
autres mesures sont mises en œuvre en amont : efforts ciblés pour former et parrainer, pour attirer des candidatures
diverses, pour définir des critères de recrutement ou de promotion qui s’appuient exclusivement sur les exigences
du poste, en faisant table rase des préjugés et des stéréotypes insidieux, etc.
Pour en finir avec les quotas : la présomption de mérite supplémentaire à compétence égale ! Sans loi : organisons
la promotion de cette attitude que peuvent adopter tous ceux qui souhaitent lutter contre l’inégalité réelle, urgente et
grave qui menace notre pacte social, tout en respectant les grands principes républicains.
La vie du Club
Du côté des ateliers...
Lors d’une réunion en décembre dernier,
l’équipe responsable de l’Atelier 2007 a décidé
de formuler des propositions fortes qui seront
le point de départ de réflexions au sein du
Club mais également l’occasion de rencontrer
les équipes de campagnes afin de leur soumettre cette «plate-forme de propositions».
Ces propositions s’articulent autour de trois
axes majeurs :
1. Rendre les filières d’excellence accessibles
à tous afin d’assurer une égalité réelle entre
tous les citoyens.
2. La création d’un observatoire de la diversité sous l’égide de l’INED (Institut National
des Études Démographiques), anonyme et
volontaire, afin d’assurer la promotion de la
diversité.
Cet observatoire aurait pour fonction de
Photo D.R.
Nos prochains
évènements
disposer d’une photographie précise de la
diversité dans tous les aspects de la société
et consisterait à réaliser des enquêtes statistiques et sociologiques ainsi qu’un rapport
annuel remis aux assemblées, au Président
de la HALDE ainsi qu’au Président de la
République.
3. L’insertion d’une véritable politique de
«sensibilisation à la diversité» dans l’enseignement scolaire.
Cette sensibilisation s’effectuerait par la mise
en place de formateurs relais pour la prévention
des crimes et délits racistes ou xénophobes sur
le modèle des formateurs relais antidrogues.
Second volet de cette sensibilisation : mener
un véritable projet éducatif afin de valoriser
les langues d’origine des différentes minorités
et instituer l’apprentissage systématique du
français pour les primo arrivants.
Carnet
Le Club est heureux d’accueillir parmi ses membres 4 nouveaux adhérents :
• Sophie BENAU, architecte
• Philippe RIBEYRE, Président de Larom
• Benjamin SALAMA, rédacteur en chef, France 3
Ainsi qu’Henri-Marc ROSSIGNOL.
Nous leur souhaitons la bienvenue !
www.21eme-siecle.org
Directeur de la rédaction : Hakim El Karoui - Rédacteur en chef : Morald Chibout - Conception-réalisation : Vae Solis