1 Comprendre la phobie sociale Vous (ou l`un de vos proches

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1 Comprendre la phobie sociale Vous (ou l`un de vos proches
Comprendre la phobie sociale
Vous (ou l’un de vos proches) souffrez de phobie sociale.
La phobie sociale est une maladie psychologique de mieux en mieux
connue des médecins et des chercheurs, et pour laquelle il existe aujourd’hui des
traitements efficaces.
Pour mieux faire face à la phobie sociale et à ses répercussions sur votre
vie, il est important que vous preniez connaissance des informations contenues
dans ces pages.
Lisez et relisez attentivement ce document. Reparlez-en ensuite avec votre
médecin, ou votre thérapeute, et n’hésitez pas à lui poser toutes les questions
qui vous seront venues à l’esprit durant cette lecture.
1. Qu’est-ce que l’anxiété sociale ?
Vous avez peut-être déjà essayé de parler de vos difficultés à des proches. Et
peut-être ceux-ci vous ont répondu qu’eux aussi ressentaient parfois de la
timidité ou du trac dans certaines situations sociales. Pourtant, vous aviez le
sentiment que vos difficultés étaient plus fortes, et de nature différente.
En fait, la plupart des personnes ont déjà ressenti de l’anxiété sociale : c’est
tout simplement la crainte d’être jugé par les autres. Cette crainte se retrouve
par exemple dans le trac (peur de parler face à un public ou à une personne
impressionnante) ou dans la timidité (réserve excessive lors des premiers
contacts avec des inconnus).
L’anxiété sociale n’empêche pas de vivre normalement, et n’est pas
considérée comme une maladie. Par contre, sa forme la plus grave et la plus
intense, la phobie sociale, représente une vraie maladie psychologique.
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Ce qui est normal et ce qui ne l’est pas
Anxiété sociale normale
Votre anxiété sociale ne vous oblige pas à
fuir les situations sociales.
Au bout d’un certain nombre de rencontres
avec les personnes ou les situations, votre
anxiété est moins forte.
Vous ressentez surtout de la gêne et de
l’embarras.
Vous avez des amis et des relations, même
s’il vous faut du temps pour vous lier.
Anxiété sociale pathologique
= phobie sociale
Vous êtes obligé(e) d’éviter un grand
nombre de situations sociales.
Il arrive que vous ne soyez jamais
rassuré(e), même auprès de personnes ou
de situations que vous rencontrez très
souvent.
Vous éprouvez souvent une véritable
panique et une grande honte.
Vous avez peu d’amis et de relations.
2. Qu’est-ce que la phobie sociale ?
La phobie sociale se compose de trois sortes de manifestations.
Des émotions pénibles, avec d’une part des crises d’angoisse avant et
pendant les situations sociales, et d’autre part un sentiment de honte après
celle-ci. L’angoisse est souvent difficile à contrôler, et donne à la personne
l’envie de ne pas affronter les situations. La honte est liée à l’impression que l’on
a été ridicule ou inintéressant, et elle pousse la personne à se replier sur ellemême, au lieu de chercher du réconfort ou de l’information auprès des proches.
Des modes de pensée négatifs. La personne phobique sociale a une peur
permanente d’être jugée par les autres, avec l’impression que les gens vont
l’observer et remarquer ses faiblesses, peut-être même l’agresser verbalement.
La phobie sociale entraîne aussi une mauvaise estime de soi : on se sent
inférieur aux autres, et l’on juge toujours négativement ce que l’on fait.
Des comportements d’évitement. La phobie sociale pousse la personne à
éviter les situations sociales où elle se sent trop vulnérable : elle refuse
certaines invitations, ne se rend pas aux réunions, etc. Si elle ne peut éviter, elle
adopte des comportements de protection, destinés à ne pas attirer l’attention
sur elle : ne pas parler ou le faire très brièvement, ne pas regarder dans les
yeux, ne pas donner son avis, etc.
Ces évitements, ces pensées, ces émotions se renforcent les uns les autres,
et représentent un véritable piège pour la personne phobique sociale : plus elle
évite, plus elle a honte d’elle et continue d’avoir peur, ce qui augmente encore
ses idées négatives sur elle-même, ce qui la pousse à éviter encore plus, etc.
C’est pourquoi, en général, la phobie sociale ne disparaît pas d’elle-même, et
peut au contraire durer toute une vie.
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3. La phobie sociale touche-t-elle beaucoup de personnes ?
Des travaux récents ont montré que 2 à 4% de la population au minimum souffre
de phobie sociale. Ce qui représente plus d’un à deux millions de personnes dans
notre pays. La phobie sociale est un des troubles psychologiques les plus
fréquents. Mais c’est aussi un des plus discrets : comme les individus qui en
souffrent essaient de le cacher, ils ont souvent l’impression d’être les seuls dans
leur cas.
4. Les conséquences quotidiennes de la phobie sociale
Les études des spécialistes montrent que la phobie sociale entraîne un lourd
handicap : davantage de solitude, des difficultés professionnelles, et aussi
d’autres maladies, comme la dépression ou la tendance excessive à boire de
l’alcool. La souffrance quotidienne de ces personnes est importante, d’autant
plus que souvent elles ne sont pas perçues comme timides par leur entourage,
mais plutôt comme distantes, froides, peu sympathiques. Cette impression
erronée vient de leur tendance à se protéger et à mettre de la distance entre
elles et les autres.
5. Les différentes formes de phobie sociale
Il existe différentes formes de phobies sociales. Parfois, la personne a surtout
peur de l’apparition d’un signe physique d’anxiété : peur de se mettre à
rougir, à transpirer, à trembler… D’autres fois, c’est une situation précise que
l’on va redouter : écrire devant les autres, ou prendre la parole s’il y a plus de 3
ou 4 personnes. Il existe également des formes « généralisées » de phobie
sociale : on a alors peur de toute forme de contact avec autrui, même le
simple fait d’être regardé entraîne alors de l’angoisse.
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Les situations quotidiennes difficiles dans la phobie sociale
Famille de situations
Exemples concrets
Situations où il faut réussir
une performance
Faire un exposé ou lire un
texte face à un groupe,
passer un examen oral, un
entretien d’embauche…
Situations
où
bavarder
ou
quelques mots
il
faut
échanger
Parler de la pluie et du beau
temps avec des voisins, des
commerçants, des collègues
de travail…
Situations où il faut se
révéler ou rentrer dans des
discussions approfondies
Nouer une relation durable
avec quelqu’un, parler de
soi,
répondre
à
des
questions personnelles…
Donner son avis, dire que
l’on n’est pas d’accord,
répondre à des critiques ou
des remarques…
Situations
s’affirmer
où
il
faut
Situations où l’on va être
observé
Manger, boire, écrire si on
nous regarde : rentrer dans
un endroit où il y a déjà du
monde
(transports
en
commun, salle d’attente)…
Gêne dans la vie
quotidienne
On ne peut prendre la
parole dans les réunions
professionnelles
ou
de
parents d’élèves, lire le
texte lors des cérémonies
familiales ou religieuses…
On évite de croiser ses
voisins, ou d’aller chez les
petits commerçants, on ne
participe pas à la pausecafé au travail…
On évite les invitations, on
fuit les relations amicales
ou sentimentales…
On ne fait jamais entendre
son point de vue dans les
discussions, on ne sait pas
réclamer ou faire face aux
vendeurs…
Ne plus aller au restaurant,
aux
« pots »,
ne
plus
pouvoir rédiger un chèque
ou un formulaire. Devoir
arriver en premier dans les
salles de réunion…
6. D’où vient la phobie sociale ?
Aujourd’hui, on manque encore de certitudes pour affirmer ce qui cause la
phobie sociale. Dans certains cas, on pense qu’il existe dès la naissance des
tendances anxieuses face à tout ce qui est nouveau ou inconnu. Mais on
sait aussi que le fait d’avoir été élevé dans une famille où on parlait peu aux
autres personnes, où on recevait peu d’invités, peut aggraver des tendances à la
timidité. De même certains événements traumatisants (avoir été l’objet de
moqueries ou de mises à l’écart) survenus à l’adolescence peuvent jouer un rôle
dans la survenue d’une phobie sociale.
7. Peut-on s’en sortir ?
Il existe aujourd’hui des solutions efficaces pour faire face à la phobie
sociale. Certains médicaments peuvent vous être prescrits par votre médecin, et
vous aider à reprendre le contrôle de vos peurs, parfois avec l’aide d’une
psychothérapie.
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Les médicaments les plus efficaces dans la phobie sociale ne sont pas les
tranquillisants mais certains antidépresseurs dits « sérotoninergiques » (parce
qu’ils agissent sur la sérotonine, un neurotransmetteur impliqué dans les états
anxieux et dépressifs). Ces médicaments sont efficaces même si vous n’êtes pas
déprimé : ils ont une action directe sur la phobie. A condition de le prendre
régulièrement et pendant une durée suffisante, ce traitement peut diminuer
l’intensité de votre phobie sociale, et vous permettre peu à peu de reconstruire
une vie normale.
Il existe aussi des psychothérapies efficaces sur la phobie sociale : les
thérapies comportementales et cognitives. Ces psychothérapies apprennent à
mieux se confronter aux situations qui font peur, et à domestiquer l’angoisse
associée. Elles apprennent aussi à critiquer les pensées négatives sur soi et la
peur excessive du jugement d’autrui. Dans tous les cas, la psychothérapie est un
travail conduit en commun : le thérapeute soutient son patient, le conseille, le
guide, l’encourage, lui donne des informations ; en retour, le patient s’engage à
suivre de son mieux les consignes du thérapeute, et à pratiquer les exercices que
ce dernier lui demande d’effectuer entre les séances.
Pour conclure
La phobie sociale est une maladie anxieuse fréquente. Elle entraîne
souvent une grande souffrance et un handicap social important. Des traitements
efficaces existent aujourd’hui, sous forme de médicaments et de psychothérapies
adaptés. Mais les efforts de la personne phobique sociale restent indispensables.
Si vous suivez les conseils de votre médecin, ou de votre thérapeute, vous
arriverez certainement à surmonter la plupart de vos difficultés.
Extrait : La peur des autres ; Trac, timidité et phobie sociale, Christophe André
et Patrick Légeron, Odile Jacob, 2003.
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