Lire l`intégralité de l`intervention de Monique Canto

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Et l’homme dans tout ça ?
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La place de l’homme dans l’entreprise et les territoires
l’action à l’intention d’agir, c’est-à-dire
qu’une personne est considérée
Monique CANTO-SPERBER
comme responsable de ce qu’elle
Directrice de l’Ecole normale a v a i t l ’i n t e n t i o n d ’ a cc o mp l i r .
Lorsqu’une action s’est produite,
supérieure
qu’un état de choses s’est créé, sans
qu’il soit possible d’identifier, derrière
cette action ou cet état de choses,
L’homme est-il responsable de une intention, les systèmes pénaux
ce qu’il entreprend ?
ont toujours une grande difficulté à
établir un lien de causalité. Il faut
qu’existe une causalité entre
l’intention et l’action, et entre l’action
et les faits qu’elle a produits. C’est la
conception étroite et rassurante de la
responsabilité : j’agis, je suis
responsable de ce que j’ai fait si j’ai
voulu le faire, et si j’ai agi dans la
conscience que j’allais produire ces
conséquences.
La responsabilité disproportionnée
Photo Laurent Mayeux
Plusieurs figures permettent de
définir le rapport de l’homme à son
action et donc l’ampleur de sa
responsabilité.
La responsabilité intentionnelle
Je prendrai d’abord une figure très
familière, celle de la responsabilité
i ntenti onnelle, que prennent
principalement en compte la plupart
des systèmes pénaux. Que cela
signifie-t-il ? Cette conception de la
responsabilité intentionnelle rattache
Je voudrais évoquer à présent une
autre figure de la responsabilité, qui
hante la réflexion sur l’action humaine
depuis l’Antiquité : c’est celle de
l’homme qui agit mais qui, à cause
d’un enchaînement diabolique de
circonstances ou parce que son
action rencontre des volontés
opposées, se retrouve contre toute
attente, et souvent de manière atroce,
responsable de ce qu’il a fait, mais
qu’il n’a pas voulu faire.
C’est Œdipe tuant sur le chemin un
homme qui gênait sa route, mais dont
Intervention de Monique Canto-Sperber - 1 -
Et l’homme dans tout ça ?
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La place de l’homme dans l’entreprise et les territoires
il découvrira bien après qu’il était
son père. Et ce sont tous ceux qui
aujourd’hui, à cause d’une
négligence qui, dans la plupart des
cas, serait restée sans
conséquences, se retrouvent au
cœur d’un drame, tout simplement
parce que leur acte a provoqué, en
raison de circonstances tout à fait
exceptionnelles, des conséquences
effroyables.
Dans ce cas, la responsabilité est
i mmense, mais c’est une
responsabilité paradoxale parce que
celui qui a accompli l’action, même
s’il a incontestablement agi, ne
comprend pas pourquoi les choses
se sont passées ainsi. La plupart
des tragédies ont essayé de rendre
intelligibles ce malheur intrinsèque
de l’action et cette disproportion de
la resp on sabilité e n f aisant
l’hypothèse d’une volonté adverse,
d’une malédiction qui s’acharnait sur
les êtres humains.
J’ai voulu évoquer les liens entre la
responsabilité et l’action sous la
figure apaisée de la responsabilité
intentionnelle et sous la figure
tragique de la responsabilité
disproportionnée pour attirer votre
attention sur le fait que dans tout ce
que j’ai dit, il est question d’agir et
non d’entreprendre.
Les traits marquant de l’action
d’entreprendre
Lorsqu’il
est
question
d ’ e n t r e p r e n d r e , d ’e n t r e p r i se ,
d’entrepreneur, les choses sont
différentes, la responsabilité est
légèrement infléchie et dans un sens
particulièrement intéressant.
Vous savez sans doute que le terme
« entreprendre » est fort ancien,
mais que son usage dans l’acception
que nous lui donnons aujourd’hui
date du XVIIIe siècle et consacre
d’une certaine façon la mise en
valeur de la figure individuelle de
l ’en tr e pr en e ur . Il n ’e st rie n
d’étonnant à cela : il fallait la
Révolution française, il fallait la levée
progressive des contraintes qui
étaient placées sur l’activité
économique, essentiellement du fait
d e s co rp ora tio ns, po ur voir
apparaître un type d’action nouveau,
celle d’entreprendre, dont la portée
ne touchait pas seulement au monde
économique, mais pouvait avoir trait
à de nombreux autres secteurs de
l’activité humaine.
Quels sont les traits marquants qui
distinguent d’e mblée l’a ction
d’entreprendre de l’action telle que je
l’ai évoquée tout à l’heure?
D’abord, l’idée d’entreprendre
contient la conviction que quelque
chose de réellement nouveau est
Intervention de Monique Canto-Sperber - 2 -
Titre du document
Et l’homme dans tout
ça ?
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La place de l’homme dans l’entreprise et les territoires
créé, quelque chose de positif, doté
de valeurs, qui ouvre de nouvelles
dimensions dans la réalité. Hannah
Arendt disait, dans un texte qui date
d’une cinquantaine d’années, La
Condition de l’homme moderne, que
l’action, l’entreprise, apparaît de
nouveau à chaque fois comme un
miracle. C’est la raison pour laquelle
n o u s s o mme s vé r i t a b l e me n t
fascinés par les récits des destins
des grands entrepreneurs, ceux de
la fin du XVIII e siècle,
d’Oberkampf et de ses toiles
de Jouy-en-Josas jusqu’à Ford
et Steve Jobs; c’est-à-dire
tous ceux qui, par leur
énergie, ont eu la capacité de
créer de nouvelles pratiques,
de nouveaux objets qui ont
transformé les manières de
vivre. Dans un texte peu connu qui
s’appelle L’Energie spirituelle, écrit
au tout début du XXe siècle, le
philosophe Henri Bergson analysait
de manière extrêmement perspicace
ce que peut avoir de singulier cet
acte d’entreprendre par rapport à
l’action: « La mère qui regarde son
enfant est joyeuse, parce qu’elle est
c o n s c ie n t e d e l ’ a vo ir c r é é
physiquement et moralement. Le
commerçant qui développe ses
affaires, le chef d’usine qui voit
prospérer son industrie est-il joyeux
en raison de l’argent qu’il gagne et
de la notoriété qu’il acquiert ?
Richesse et considération entrent
évidemment pour beaucoup dans la
satisfaction qu’il ressent, mais elles
lui apportent des plaisirs plutôt que
de la joie. Et ce qu’il goûte de la joie
vraie est le sentiment d’avoir monté
une entreprise qui marche, d’avoir
appelé quelque chose à la vie. »
A cette caractéristique qui distingue
le fait d’entreprendre de l’action,
nous pourrions ajouter que la figure
d e l ’ e n t r e p r e n e u r e t l ’ a ct e
d’entreprendre
induisent une passion,
une
attitude
:
entreprendre, c’est au
fond ne pas accepter le
monde tel qu’il est,
considérer que dans ce
monde, quelque chose
de nouveau peut être créé.
Un troisième trait serait le fait que
lorsqu’on entreprend, la
connaissance du but n’est pas
nécessairement acquise. Au fond,
l’entreprise, c’est comme la
recherche : on se met à chercher
parce qu’on ne peut pas faire
autrement, parce qu’on sait qu’il
existe quelque chose à trouver, mais
sans savoir précisément ce qu‘on va
trouver. Le mouvement importe plus
que la fin.
Autre trait enfin, extrêmement
important, c’est qu’il n’est pas
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d’entreprise ou d’acte d’entreprendre
sans la capacité d’avoir des attentes
qui ne soient pas systématiquement
trompées : on ne peut entreprendre
que dans un monde stabilisé, où les
règles du jeu sont connues, où une
certaine prévisibilité est acquise. Il
faut donc libérer une capacité
d’action, il faut une véritable liberté,
mais il faut également un ordre de
droit. C’est la raison pour laquelle
l’économie de marché n’a pu se
développer qu’au moment où un
appareil normatif a garanti les
projets des êtres humains et leur a
permis de nourrir, d’entretenir, de
mettre en œuvre des attentes
légitimes.
Présumer un avenir meilleur
Vous voyez comment, derrière l’acte
d’entreprendre, apparaît toute une
problématique extrêmement riche, la
conviction que l’ordre du monde
n’est pas immuable, mais également
une ouverture vers l’avenir : la
présomption que l’avenir sera
meilleur.
Là encore, les philosophes se sont
intéressés depuis fort longtemps au
lien entre les activités financières, le
fait de prêter, d’emprunter, et la
conviction que l’avenir sera
euphorique, sera meilleur : on ne
prête pas à son voisin si on n’a pas
la conviction qu’il va s’enrichir. D’une
certaine façon, le fait d’entreprendre
projette donc dans un avenir
supposé plus prospère et il n’est pas
étonnant de voir que l’acte
d’entreprendre a été particulièrement
exalté dans toutes les périodes de
mutations technologiques fortes,
puisque chacune de ces mutations a
entretenu la conviction que les
capacités humaines étaient accrues,
que beaucoup plus de choses
allaient devenir possibles.
En comparant la figure de l’acteur et
celle de l’entrepreneur, il n’est pas
difficile de céder à une héroïsation
de l’acte de
l’entrepreneur
et
cette
héroïsation est
un des traits
marquants de
la vie culturelle
et économique
française.
Après tout, l’entrepreneur est le
conquérant, celui qui ouvre les
frontières, qui ouvre l’avenir. C’est
aussi celui qui met en œuvre, dans
notre époque sécularisée, une
certaine démiurgie, c’est-à-dire la
capacité de créer. Nous pouvons
dire que le culte de l’entrepreneur,
créateur de valeurs économiques
mais aussi de nouveaux projets a
façonné un homme nouveau.
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La place de l’homme dans l’entreprise et les territoires
Prendre des risques, mais quels
risques ?
Ce qui rend héroïque la figure de
l’entrepreneur, c’est la prise de
risques. Il n’existe pas d’ouverture
de l’avenir, de créations, de
nouvelles réalités sans une mise de
fond et sans la possibilité toujours
non négligeable que l’entreprise
échoue. C’est cette contingence
fondamentale qui donne tout son
prix à l’acte d’entreprendre. Mais
comment ces risques sont-ils
évalués et quels risques : de court
terme, de long terme, des risques
individuels, collectifs ? On peut
prendre des risques individuels, bien
sûr, cela a même quelque chose de
glorieux, à condition d’assumer les
conséquences d’un éventuel échec
et à condition qu’une collectivité ne
soit pas affectée par les
conséquences désastreuses des
risques pris.
Etre responsable, mais de quoi ?
L’homme est-il donc responsable de
c e q u ’il en tr ep re nd ? Oui ,
évidemment. Comment ne le serait-il
pas, puisqu’il est ce dont l’action
d’entreprendre est partie. Oui,
évidemment, parce qu’il contribue à
changer le monde et qu’il a, lui, pris
la place de Dieu. Jusqu’au XVIIe
siècle, les philosophes écrivaient
des théodi cées, essayai ent
d’expliquer comment Dieu, dans Son
infinie bonté, ét ait pour tant
responsable du monde que nous
connaissons et où nous voyons une
intrication constante de maux et de
bienfai ts. Di eu n’est plus
responsable du monde : d’une
certaine manière, l’homme l’a
déchargé de cette responsabilité,
hissé par sa capacité de démiurgie,
mis dans cette posture de devoir
rendre compte du monde qu’il a
créé. Et cette responsabilité,
malheureusement, il lui est parfois
impossible de l’expliciter, parce que
le monde qu’il a créé est trop
complexe et dépasse les capacités
d’e xplication don t l’ho mme
aujourd’hui dispose. D’où ce
senti ment contrasté d’une
responsabilité accrue et d’une
dépossession accrue, parce que
dans un monde infiniment complexe,
il est très difficile de savoir
exactement ce dont on est
responsable.
L’homme, apprenti sorcier
En conclusion, je dirai quelques
mots sur ces deux questions :
responsabilités ramifiées et manque
de visibilité sur les fins.
R e s p o n s a b i l i t é s r a mi f i é e s ,
pourquoi ? Parce que ce qui a
caractérisé l’émergence du
libéralisme économique, c’est la
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La place de l’homme dans l’entreprise et les territoires
création spontanée, la multiplication
d’initiatives économiques
d éc en tralisée s, sa ns a ucun e
planification, sans aucune
intelligence d’ensemble, qui ont
provoqué cette extraordinaire vitalité
très largement responsable du
développement économique de
l’Europe moderne. Mais en même
te mps, elles créaient aussi,
inévitablement, une très grande
complexité qui a parfois rendu
tragique la notion de responsabilité :
l’homme devient un apprenti-sorcier,
il est de plus en plus capable d’initier
toutes sortes d’actions, mais il est de
moins en moins capable d’en
contrôler les conséquences. Marx,
qui a été l’extraordinaire observateur
de ce monde nouveau en train de se
créer, ce monde des entrepreneurs,
disait dans ce texte fameux sur le 18
brumaire de Napoléon Bonaparte :
« Les hommes font l’histoire, mais ils
ne savent pas l’histoire qu’ils font ».
Ce défaut d’intelligence est inévitable
car nul n’est en position de
comprendre l’ensemble de la société.
He u r e u se me n t , ca r ce l u i q ui
prétendrait la comprendre voudrait
également la planifier et cela
donnerait les désastres que nous
avons connus en plusieurs occasions
au XXe siècle ; mais il reste que cette
impossibilité de surplomb, de
compréhension d’ensemble, crée
aussi une condition particulièrement
difficile pour la responsabilité
humaine. Par ailleurs, les pouvoirs
techniques considérables que nous
avons aujourd’hui propulsent l’homme
constamment en dehors de lui-même
et rendent difficile pour lui de retrouver
le lien de causalité exact qui relie les
actions humaines aux conséquences
qu’elles produisent.
Là où il n’est plus possible de voir
une intention humaine, où allonsnous trouver la responsabilité ?
Enfin, dernier aspect, en même
temps que le fait d’entreprendre crée
un monde, il faut bien être conscient
du fait que ce monde n’est pas
simplement un monde matériel, un
monde de richesses, un monde de
valeurs : c’est également un monde
de rapports sociaux.
Là encore, il faut peut-être revenir à
Marx et à son analyse des classes
sociales : chaque classe sociale est
définie par la position que ceux qui y
appartiennent occupent dans le
processus de production. Cette
définition est évidemment dépassée
aujourd’hui étant donné la nouvelle
réalité du travail. Mais Marx avait tout
de même raison sur le fait qu’il
identifiait la production du monde qui
environne l’entrepreneur comme étant
également un monde de relations
sociales qui, peu à peu, va acquérir
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une objectivation dont plus personne non voulu, ce qui est aperçu et ce
qui n’est pas aperçu. Il est hors de
ne sera responsable.
question de renoncer pour autant à
Donc, bien sûr, l’homme qui
la responsabilité intentionnelle,
entreprend est responsable de ce
c’est-à-dire à la capacité de définir
qu’il fait, responsable de ce qu’il a
un être humain libre qui agit en se
produit, mais il nous faut avoir
représentant un but d’action et des
conscience que la portée de l’action
intentions. Mais il nous faut aussi
est limitée, même si l’ampleur de la
considérablement enrichir notre
responsabilité est encore plus
notion de responsabilité pour mettre
considérable. C’est dans ce
en place l’appareil normatif qui nous
décalage entre une capacité
permettra d’agir.
d’action qui s’est rétrécie en dépit
L’administration américaine qui était
de tous les artifices technologiques
au pouvoir à partir des années 2000 a
qui pourraient donner l’illusion de
voulu favoriser par tous les moyens
l’amplifier et une responsabilité qui
possibles l’accès à la propriété, même
s’est considérablement agrandie à
pour les plus pauvres. Des personnes
l’échelle du monde entier, et peutqui n’avaient que très peu de
être même de l’espace, qu’il faut
ressources, ou des ressources
voir un des traits caractéristiques de
extrêmement instables, ont été
la condition contemporaine.
incitées à devenir propriétaires. Des
Que signifie la responsabilité
emprunts leur ont été proposés pour
l o rs q u’ e l l e e s t a s so rt i e à
pouvoir acheter des maisons,
l’impunité ?
emprunts qu’elles n’étaient en aucune
façon en mesure de rembourser: Des
Evidemment, cette responsabilité va
personnes non solvables sont
cl ai r ement au- del à de l a
devenues propriétaires de leur
responsabilité
maison. Il leur a été demandé, au bout
intentionnelle.
de quelques années, de refinancer
Souvent,
les
leur emprunt pour pouvoir rembourser
actions produisent
le premier emprunt acquis, dans l’idée
d’autres effets que
que de toute manière, la valeur du
ceux dont on avait
bien ne pourrait que s’accroître, et que
l’intention.
Nous
tout cela produirait un cercle
voilà donc dans
euphorique qui permettrait de faire en
une intrication très douloureuse
sorte que le premier achat, l’acte
entre ce qui est voulu et ce qui est
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responsable derrière lequel se trouve l’épisode final et sa leçon la plus
une décision et une volonté humaines, difficile à accepter : ceux qui avaient
pris les plus grands risques et qui,
soit sanctionné d’effets positifs.
dans la théorie et dans la conception
Ces crédits non solvables, qui étaient
euphorique de la responsabilité de
à l’origine des relations de personne
l’entrepreneur, auraient dû être
à personne, sont devenues des
sanctionnés lorsque ces risques se
produits anonymes, qui se sont mis à
sont révélés conduisant à l’échec, ont
circuler sur des marchés, qui ont été
été sauvés parce que, tout
fractionnés, divisés en produits
simplement, ils étaient trop gros pour
dérivés, agrégés dans des
qu’on puisse prendre le risque que
ensembles de produits à risques et
leur faillite entraîne la détérioration de
de produits sans risques, jusqu’à la
toute l’activité économique. Mais quel
catastrophe que nous avons connue
mauvais signal, par rapport à cette
voici deux ans. Qui est responsable ?
responsabilité de l’entrepreneur, que
Ceux qui ont acheté
là où les règles n’ont pas été
une maison alors
respectées, là où la capacité de se
qu’ils n’avaient pas
projeter dans le long terme n’a pas
les moyens de la
été reprise, apparaisse une totale
payer ? Ceux qui les
i mp unit é.
Que
signifie
la
ont
incités
à
responsabilité lorsqu’elle est assortie
l ’a ch e t e r
?
Le
à une telle image de l’impunité, qui
gouvernement
était pourtant absolument inévitable?
américain, qui par tous les moyens
Nous voilà donc avec une responsabilité
possibles a encouragé l’accès à la
aussi tragique que celle qui s’attachait
propriété ? Les courtiers qui sont
aux héros que j’ai évoqués d’emblée.
venus proposer des refinancements ?
Cette tragédie n’est évidemment plus
Les traders ensuite, qui ont conçu
celle des temps anciens ; c’est une
ces produits avec l’idée qu’une
tragédie qui a tous les caractères de
hiérarchisation, une décorrélation
notre temps : elle est collective, elle est
pourrait permettre d’éviter les risques
sans poésie, elle nous oblige à aller de
et que pour finir, nul n’aurait à se
l’avant, tout en sachant qu’à chaque
poser la question de la responsabilité
instant, nous sommes au bord du
puisque les conséquences seraient
précipice.
heureuses pour tout le monde ?
Cet extraordinaire édifice a été très
rapidement réduit à néant. Jusqu’à
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