apprendre à entreprendre

Transcription

apprendre à entreprendre
mais encore...
La presse en a parlé. Nous y revenons.
À partir d’une information ou d’un évènement
récent, entrées libres interroge une personnalité,
du monde scolaire ou non. L’occasion, pour
elle,de nous proposer un éclairage différent,
un commentaire personnel, voire d’interroger
la question ainsi posée.
APPRENDRE
À ENTREPRENDRE ?
03/05/2013
D chez les jeunes peut-il être une
évelopper
l’esprit
d’entreprise
réponse à la crise, comme l’envisage le Président français, François
HOLLANDE ? Les avis divergent.
Pour Renaud MAES, doctorant en
Sciences sociales et du travail à
l’ULB, croire que cela va répondre à
la crise est un leurre. Quant à Thierry
VILLERS, directeur de l’asbl « Les
jeunes entreprises », il considère que
stimuler l’esprit d’entreprendre peut
ouvrir des portes.
Et vous, qu’en dites-vous?
■ Pierre
PIRARD, ancien chef
d’entreprise, donne cours depuis
quatre ans dans l’enseignement
professionnel :
« Je rappellerais tout d’abord les
résultats d’une étude GEM (Global
entrepreneurship monitor)1 de 2009,
qui montre que la Belgique est très
mal classée au niveau du nombre de
jeunes entrepreneurs. Pourquoi ? On
se rend compte qu’on enseigne mal
ou peu l’esprit d’entreprendre. Mais
restons prudent…
Pour ma part, je suis opposé au fait
d’enseigner l’esprit d’entreprendre
uniquement dans un sens entrepreneurial, c’est-à-dire de création d’entreprise. Cela peut, bien sûr, se faire,
mais dans des sections spécialisées,
pour des jeunes qui ont ce projet-là.
12
entrées libres < N°80 < juin 2013
Comment peut-on donc définir l’esprit d’entreprendre ? Celui-ci se caractérise par une certaine curiosité,
une prise d’initiative, de l’autonomie
et de la persévérance. On utilise ces
quatre éléments quand on crée une
entreprise, mais on en a aussi besoin
dans n’importe quel autre emploi. Je
suis donc favorable à l’enseignement
de l’esprit d’entreprendre, via ces
quatre éléments. Ceux-ci vont servir
non seulement aux jeunes qui souhaitent créer leur entreprise, mais
aussi à tous les autres, quel que soit
leur parcours professionnel.
Tous les jeunes n’ont pas, au départ,
un profil de créateur d’entreprise.
On peut sensibiliser les élèves à ces
différents aspects dans le cadre de
toutes les matières, et on peut même
aller plus loin. On pourrait trouver des
éléments d’évaluation sur ces compétences dans le bulletin. On doit
motiver l’ensemble des professeurs
à développer ces quatre qualités.
Quant au rapprochement entre
écoles et entreprises, il est primordial ! Il y a un fossé énorme entre
le monde de l’entreprise et celui de
l’école. Ces deux univers ne se côtoient pas ou peu et ont beaucoup de
préjugés l’un envers l’autre. Il faut,
bien sûr, que les élèves puissent être
en contact avec les entreprises, mais
encore une fois, dans des cadres
bien particuliers, et pas uniquement
dans un but économique.
Tous les jeunes, que ce soit dans le général, en technique ou professionnel,
vont un jour travailler. Plus vite on
leur donne une idée de leur potentiel,
de leurs envies, plus vite ils choisiront
la bonne section. On pourrait ainsi
éviter que certains choisissent une
orientation sans savoir quoi faire, et
que cela leur prenne parfois 2-3 ans
avant qu’ils ne se rendent compte
qu’ils ont fait le mauvais choix.
Si les élèves étaient en contact avec
des professionnels ou des entreprises dès la 3e ou 4e année, et de
façon régulière, ils pourraient se faire
une idée du métier qu’ils veulent faire
plus tard. Cela doit se faire dans un
esprit d’orientation, et pas uniquement économique.
Mais est-ce que l’école doit pour autant préparer les jeunes au marché
de l’emploi ? Ce débat me semble
être d’arrière-garde ! On se demande
souvent si l’école doit éduquer, enseigner ou former… Cette question est
complètement dépassée. Tout enseignant fait évidemment les trois ! En
fonction des sections, on fera un peu
plus de l’un ou de l’autre, mais on fait
en réalité toujours de tout. À partir du
2e degré du secondaire, il est impossible pour un professeur, aujourd’hui,
en temps de crise, de ne pas évoquer
la vie professionnelle future, et donc
de former. Je crois qu’il faut donner
un sens à l’éducation, et celui-ci est
peut-être aussi professionnel. » ■
BRIGITTE GERARD
1. www.gemconsortium.org

Documents pareils