PDF – SOFA – Positionnement SOFA processus électoral – Sept 15

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PDF – SOFA – Positionnement SOFA processus électoral – Sept 15
Positionnement de la SOFA sur le déroulement du processus électoral
La Solidarite Fanm Ayisyèn (SOFA) exprime sa préoccupation à propos du
déroulement du processus électoral. La SOFA constate avec amertume que le
Conseil Électoral Provisoire (CEP) a sapé tous les efforts consentis par les
organisations de femmes pour s'assurer d'une représentation d'au moins 30%
de femmes au Parlement.
Alors que, suite aux mobilisations des organisations de femmes, plusieurs de
ces dernières avaient manifesté leur volonté d’être candidate, seulement 23
femmes ont finalement réussi à s’inscrire sur 232 postulants au Sénat et 129
femmes sur 1621 candidats à la députation.
Ces chiffres décevants trouvent évidemment leur explication dans le statut
socio-culturel des femmes, le mode de fonctionnement patriarcal des partis
politiques et les problèmes liés à l'éducation. Mais à coté de ces facteurs
d'ordre structurel, peut-on fermer les yeux sur le cadre légal fixant les
modalités d'organisation des élections et sur l'institution électorale chargée
de l'appliquer?
Le système électoral censitaire préconisé par le décret électoral, faisant
obligation d'une forte somme d'argent pour se faire inscrire comme candidat,
et la liste des pièces exigées aux candidates, vu le temps imparti pour les
réunir et les couts qui y sont associés, ne participent-ils par d'une stratégie
d'exclusion d'une catégorie de citoyens et de citoyennes au processus
électoral?
Cette hypothèse est d'autant plus pertinente que l'autonomie financière des
femmes a été en maintes occasions identifiée comme l'un des obstacles
majeurs à leur participation comme candidate aux élections. En cette
circonstance, l'institution électorale, si elle voulait appliquer le quota d'au
moins 30% de femmes dans les élections, se devait de prendre des
dispositions qui tiennent compte ce facteur. Les mesures incitatives comme
l’accès à plus de subvention aux partis ou regroupements politiques ayant
présenté des femmes comme candidate ne portent pas fruit en général,
surtout avec un CEP qui met très tard à la disposition des partis l'enveloppe
qui leur est destinée.
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De plus, aucune véritable campagne d'éducation civique du CEP n'a été mise
en place par le CEP pour encourager les femmes à se porter candidates aux
législatives.
Tout laisse croire que le processus électoral était conçu de manière à exclure
une catégorie de la population, notamment les femmes, non seulement en
tant que candidates mais aussi en tant qu'électrices.
Les actes de violence inouïe perpétrés par les partis de pouvoir et leurs
militants durant la période de campagne électorale et restés impunis,
n'auraient-ils pas comme finalité de concourir à la stratégie d'exclusion de
certaines catégories de la course électorale? De fait, les institutions
d'observation électorale ont mentionné un taux de participation ne
dépassant pas les 10 %. Les statistiques publiées par le CEP montrent que,
plus les partis ont recouru à la violence le jour du scrutin, plus ils sont en
avance sur leurs adversaires. Les femmes candidates, notamment celles
militant dans les partis démocratiques, qui malgré tous les obstacles ont
mené une campagne avec très peu de moyens, sont aux abonnées absentes.
Selon les données disponibles, en ce qui concerne le sénat, une seule femme
irait au second tour dans le département des Nippes, tandis qu'à la
députation, il en aurait 5 pour les circonscriptions respectives de Cabaret,
Plaine du Nord, Vallière, Camp Perin/Maniche et Miragoane.
Considérant cette violence systématique et toutes les irrégularités qui ont
entaché le scrutin, la SOFA s'inscrit en faux contre les soi-disant résultats
publiés par le CEP et qui aboutiraient à la diminution relative de la présence
des femmes à la 50ème législature comparativement à la précédente.
La SOFA craint également que la société haïtienne ne soit dotée d'un
Parlement constitué principalement d'hommes, dont une partie à moralité
douteuse, selon les données fournies par des organisations de défense des
droits humains. Plusieurs sont réputés être des assassins, des voleurs, des
kidnappeurs, des violeurs, des trafiquants de drogue et d’armes à feu, des
faussaires, des escrocs et autres bandits de grand chemin.
Cette préoccupation devient de plus en plus angoissante quand on sait que
des défis majeurs attendent les parlementaires de la 50ème législature
notamment l'amendement de la Constitution de 1987, pour éventuellement y
inscrire un mode de scrutin pouvant favoriser l'application du quota d'au
moins 30% de femmes, la décentralisation, pour déterminer les compétences
de tous les acteurs et actrices impliquées dans sa mise en œuvre et aménager
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leur participation, incluant celle des femmes. Ces amendements devraient
concerner également la dotation du pays de lois relatives respectivement à :
l’égalité entre les sexes, les violences faites aux femmes et
l’application du Pace International relatif aux Droits Economique Social
et Culturel (PIDESC)
l’exploitation et la gestion des ressources naturelles nationales,
l’aménagement du territoire et le développement local
le fonds national de l’éducation, etc.
A l'aube du trentenaire de la relance du mouvement féministe haïtien, où il
est question de renouveler le personnel politique haïtien à tous les niveaux,
les enjeux sont de taille pour le mouvement. La SOFA déplore que l'institution
électorale ayant cette lourde responsabilité du renouvellement du personnel
politique pour faire fonctionner nos institutions dans le respect des lois ne
semble pas être à la hauteur. Le laxisme, l'hésitation, le manque de
responsabilité, l'improvisation, l'inconstance,
la contradiction voire
l'incompétence qui caractérisent le mode de gestion par le CEP des affaires de
l'Etat nous révolte.
La SOFA s'interroge en effet sur la capacité et la volonté du CEP à organiser
de véritables élections démocratiques et inclusives qui permettraient aux
femmes de jouir pleinement de leurs droits civils et politiques et de disposer
d'institutions publiques véritablement à leur service et non à leurs dépends,
des institutions capable d’assurer l'égalité entre les femmes et les hommes et
de garantir à toutes et à tous des services publics de qualité.
Quand nous assistons à cette surdité, à ce mépris, cette arrogance dont font
montre des conseillers et conseillères électoraux par rapport aux
revendications des citoyens et citoyennes par rapport à l'évaluation des
opérations du 9 aout et aux sanctions à prendre contre les Partis et le
personnel électoral impliqués dans les violences le jour du scrutin, nous nous
rendons compte que les valeurs qui guident nos actions : l’égalité, la liberté,
la solidarité, la paix et la justice, se fragilisent de plus en plus.
Le mouvement féministe est historiquement un mouvement pacifique. La
violence lui est incompatible. Quand une institution électorale s'obstine à
poursuivre les opérations électorales sans que la vérité ne soit établie sur les
actes de violence du premier tour, qui ont empêché aux femmes d'exercer
pleinement et en toute sécurité leurs droits politiques, quel signal veut-il nous
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transmettre? Recourir à la violence si nous voulons participer aux instances
décisionnelles?
La SOFA s'insurge contre le CEP, qui par ses agissements, tente de dévier et
de détourner les militantes féministes et les femmes des valeurs qui leur sont
si chères! C'est la raison pour laquelle, la SOFA lance un vibrant appel à
toutes les citoyennes et tous les citoyens pour qu'ils fassent pression en vue
de réorienter le processus électoral en marche et de casser l'élan du CEP. La
démocratie que nous construisons est plus que jamais en danger.
La persistance du CEP dans son rude mépris des revendications populaires
exigeant l'établissement de la vérité sur le scrutin du 9 aout 2015, devra
conduire inexorablement les conseillers et les conseillères à rendre compte
de leurs actes devant qui de droit.
Après une vingtaine d'année d'expérience d’Haïti dans l'organisation des
élections, la SOFA est persuadée qu'il y a moyen de couper court aux
pratiques d’élections caractérisées par la violence et les irrégularités. Des
sanctions fermes doivent être prises contre tous ceux et toutes celles qui ont
perturbé le scrutin. Il faut mettre fin à l'impunité électorale dans le pays pour
qu'enfin les femmes et leurs intérêts stratégiques trouvent leur place dans les
institutions publiques.
La SOFA invite tous les secteurs politiques à agir avec intelligence et
perspicacité pour ne pas contribuer à leur propre échec, voire leur
anéantissement.
Le scrutin du 9 aout consacre l'échec de la communauté Internationale qui
s'évertue, depuis 10 ans, à manipuler à visière levée les résultats des
élections dans le pays. Il est temps que les patriotes et progressistes d’Haïti
œuvrent à la réappropriation du processus électoral.
Il est temps pour nous de dire Halte la!!!
La lutte des femmes est la lutte de toutes les masses populaires!!!
Port-au-Prince, 14 septembre 2015
Marie Frantz JOACHIM
Coordonnatrice Générale
SOFA
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