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RECHERCHES SUR LE MAUSOLEE DE GASR ED DOUIRAT RECONSTRUIT A LEPTIS MAGNA EN LIBYE NOUVELLE RESTITUTION ET ETUDE D’UN MONUMENT BAROQUE EXPRESSIONNISTE DE LA MODERNITE SEVERIENNE A DECOR MITHRIAQUE. Jacques Vérité. RESUME Le mausolée de Gasr ed douirat a été reconstruit par la Mission Archéologique Française en Libye dans le jardin du musée de Leptis Magna. Les travaux ont été achevés en 2008. L’étude relève un certain nombre d’incohérences constructives sur la restauration et propose une autre restitution dont il est démontré que, plus élégante et mieux organisée, elle était de style baroque. Après avoir constaté que ce style baroque est particulier et qu’il est associé à un ornement d’esthétique plébéienne, l’étude le met en relation avec les changements artistiques de l’époque du règne de Septime Sévère. Elle montre que la forme architecturale, qualifiée de baroque expressionniste, est un mélange d’innovation et de destruction volontaire de la rigueur classique et que l’esthétique plébéienne de l’ornement mêle les travaux de sculpteurs locaux et confirmés dans l’expression d’une culture romaine populaire « globalisée » sans racines tripolitaines. Ainsi Gasr ed douirat est un témoignage de l’architecture funéraire du IIIe siècle, unique aujourd’hui, véritable condensé d’influences multiples du monde romain méditerranéen, un témoignage ancien de ce que pouvait être le résultat du mondialisme de l’époque. Sans conclure une recherche trop contradictoire avec les écrits des érudits, un dernier chapitre apporte la preuve de la présence du mithracisme dans les décors du mausolée et ouvre la perspective d’une interprétation de l’architecture et de l’ornement du monument par cette religion. SUMMARY Gasr ed Douirat Mausoleum was rebuilt by the French Archaeological Mission in Libya in the garden of the Museum of Leptis Magna. The work was completed in 2008. The study identifies a number of constructive inconsistencies on the restoration and proposes another restitution where it is proved that more elegant and better organized, it was Baroque. After noting that this baroque style is unique and is associated with a plebeian aesthetic ornament, the study puts it in relation to the artistic changes of the reign of Septimius Severus. It shows that the architectural form, described as expressionist baroque, is a mixture of innovation and voluntary destruction of classical rigor and that plebeian aesthetic ornament combines the work of local sculptors and confirmed the expression of a popular Roman culture " globalized " without Tripolitanian roots. Thus Gasr ed Douirat is a testament to the funerary architecture of the third century, unique today, true compendium of multiple influences of Mediterranean Roman world, a former witness what could be the result of globalism of the time. Without concluding this research too much in contradiction with the writings of scholars, the last chapter provides evidence of the presence of Mithraism in the decorations of the mausoleum and offers the prospect of an interpretation of architecture and ornament of this monument religion. 1 INTRODUCTION. Le mausolée de Gasr ed douirat (le château des maisonnettes) 1 se trouvait à un kilomètre et demi au sud-ouest de la ville de Leptis Magna. L’archéologue P. Clauss l’a redécouvert en 1997 dans le cadre de sa thèse concernant les tombeaux en forme de tours en Afrique du Nord et au ProcheOrient aux périodes hellénistique et romaine (Clauss 1999a) et, voyant tout l’intérêt que présentait le monument, a proposé à A. Laronde d’engager la restauration dans le cadre de la Mission Archéologique Française en Libye. La Conservation des Antiquités de Leptis Magna a, pour des raisons techniques, proposé que cette anastylose soit réalisée dans la cour du musée. En août 1999, P. Clauss et l’architecte M. Paulin ont étudié les vestiges du monument et identifié puis numéroté 164 blocs provenant de son écroulement. Par la suite, l’architecte S. Merle d’Aubigné proposé une restitution de l’élévation et, à partir de 2001, dirigé les travaux de restauration qu’il a conduits jusqu’à la 2e assise du 2e étage. En 2007, alors que j’étais architecte bénévole à la Mission Archéologique Française en Libye, A. Laronde m’a demandé de donner un avancement plus rapide au chantier. La restauration de Gasr ed douirat a été terminée le 16 octobre 2008 après deux campagnes de travaux, en mai-juin et septembre-octobre de cette même année (figure 01). Lors du chantier j’ai strictement appliqué les propositions de reconstruction de S. Merle d’Aubigné mais, durant les travaux, les nombreuses difficultés rencontrées avec l’appareilleur, Régis Deltour, pour remonter la partie haute du mausolée, m’avaient donné le sentiment que la restauration de Gasr ed douirat était fausse. Aussi, lorsque au cours de notre dernier entretien A. Laronde, après m’avoir clairement signifié qu’il pensait, lui aussi, que la reconstruction ne correspondait pas au monument d’origine, m’avait désigné volontaire pour écrire une étude architecturale du monument afin de compléter l’analyse des décors qu’il souhaitait publier, j’ai décidé d’en reprendre intégralement Figure 01 : Le mausolée restauré, 17 octobre 2008. l’analyse. Bien que la brutale disparition du Professeur Laronde ait mis fin à ce projet d’édition 2 j’ai, au vu de la richesse de ses résultats, poursuivi ce travail au delà des limites qu’il m’avait proposées jusqu’à ce que les difficultés matérielles et surtout les limites de mes compétences m’empêchent de le poursuivre. Ces 1 P. Romanelli transcrit : Gasr ed-Dueirât où l’on entend bien la prononciation de l’arabe grâce à l’emploi du â français. Les français ont pris l’habitude d’écrire Gasr el-Douirat alors que dans cette langue gasr devrait être traduit par « qsar ». Dans l’arabe parlé de Libye « gsar » désigne grande variété de constructions : maisons fortifiées, ruines plus ou moins imposantes ou ouvrages militaires, alors que « qsar » désigne, en arabe classique, une citadelle. Je respecterai donc la transcription du parler local pour gasr puisqu’elle est courante chez les archéologues. Je tiendrai compte de l’assimilation de la consonne « l » de l’article défini «el » avec l’initiale « d » du nom douirat en écrivant « ed ». Enfin, douirat est un nom, diminutif au féminin pluriel de « dar » (maison), signifiant maisonnettes. Une traduction de « Gasr ed douirat » pourrait être « le château des maisonnettes ». Je remercie M. Darot, linguiste, pour ces informations ainsi que pour ses patientes corrections de cet article. 2 S. Merle d’Aubigné devrait publier ses travaux y compris la partie de la reconstruction que j’ai dirigée car je lui ai remis une copie de mon cahier de chantier. 2 « recherches » sont donc inachevées et doivent être considérées comme des notes mises à disposition des spécialistes. La première partie, construite sur la prise en compte d’éléments ignorés lors de la reconstruction ou la critique de décisions et choix faits par l’architecte restaurateur, aboutit à proposer une restitution du monument fondamentalement différente de l’anastylose réalisée, sa qualité la plus remarquable étant l’extrême rigueur de la géométrie construite sur le respect des règles constructives grecques et romaines. La seconde partie s’attache à démontrer que cette organisation spatiale cohérente et sophistiquée est caractéristique d’une architecture baroque. La relation toujours étroite entre l’architecture, certaines parties du décor et le contexte historique est analysée dans la troisième partie, pour démontrer que Gasr ed douirat est l’œuvre d’un architecte oriental et que son style baroque expressionniste ou les aspects esthétiques « plébéiens » de l’ornement sont liés à la modernité sévérienne. Enfin une quatrième partie fournit les preuves que Gasr ed douirat est un monument mithriaque. Une annexe précise le glossaire des termes architecturaux et les systèmes de repérages, verticaux et horizontaux, utilisés dans les descriptions. 1. PROPOSITION D’UNE AUTRE RESTITUTION. La proposition de restitution concerne essentiellement l’édicule et affecte quelques détails de la partie inférieure du monument. En ce qui concerne l’édicule, j’ai commencé à émettre des critiques sur la restauration lorsque j’ai constaté que les dimensions des niches ne permettaient pas d’y placer la statue qui avait été découverte sur le site. J’ai, ensuite, émis des réserves sur l’appareillage des assises 12 et 13. On verra ci-dessous que cela m’a conduit à reprendre une à une toutes les assises. 1.1. L’EDICULE ET SES STATUES. Lorsque j’ai abordé l’étude du mausolée j’ai eu l’intuition 3 d’associer la composition en six niches du deuxième étage à la présence de six personnes sur l’inscription placée au dessus de la porte de la chambre funéraire 4 et dont la traduction, par A. Laronde est la suivante : « A Caius Marius Iovinus et à Caius Marius et à Maria Victorina et à Marsus leur fils, Caius Marius Pudens Boccius Zurgem et Velia Longina Bibai, leurs parents, ont élevé (ce monument) pour leurs enfants et leur petit fils ». Ce texte nomme donc six personnes de la même famille avec une hiérarchie de parenté : le grand père, la grand-mère, le fils aîné, le fils cadet, sa femme et son fils. Or, la disposition des niches et leur dimension obéit aussi à une hiérarchie : deux niches majeures (au décor plus soigné que les autres), symétriques dans le monument par rapport à un axe sud-ouest / nord-est, sont en façade sud-est et en façade nord-ouest. Des quatre niches restantes, on en distingue une grande, deux moyennes et une petite. Il est alors assez évident de proposer la disposition suivante : - Caius Marius Pudens Boccius Zurgem, le grand père, au sud-est, en façade principale marquée par la porte de la chambre funéraire. - Velia Longina Bibai, la grand-mère, au nord-ouest, dans la niche hiérarchiquement opposée à celle du grand père - Caius Marius Iovinus, le fils aîné, dans la grande niche. - Caius Marius, le fils cadet et sa femme Maria Victorina, dans les niches moyennes. - Enfin le petit fils Marsus dans la petite niche. Mon intuition a été confirmée par la consultation de la bibliographie du monument. Dès 1895, il est signalé sur le site « les débris d’une statue en marbre » (Clermont-Ganneau 1903, p. 341). Plus récemment une publication (Faraj et ii, 1996) étudie cette même statue afin de classer une découverte à Leptis Magna. Elle indique qu’elle est du type de la grande Herculanèse, variante Cérès, et qu’elle est entreposée dans le jardin du vieux musée (voir figure 11). Sur la photo de profil illustrant l’article, on voit nettement que sa partie arrière et certaines de ses parties latérales ont été 3 Elle m’avait valu une réprobation générale lorsque je l’avais émise. 4 IRT, 729. 3 taillées pour être insérées dans une niche 5. A Gasr ed douirat, il n’y avait donc que deux statues féminines. Celle qui a été retrouvée a une largeur de 73 cm. Or la niche nord-ouest mesure 74 cm de large et la niche moyenne correspondante à l’autre statue féminine est plus large. J’en conclus que la niche nord-ouest, que j’ai attribuée précédemment à la grand-mère, est celle de la statue et que cette dernière est celle de Velia Longina Bibai. 1.2. RECTIFICATION DE L’ELEVATION DU MUR DE L’EDICULE : LES STATUES ET L’ASSISE 14. Essayons de repositionner la statue dans sa niche. Acéphale, le corps a 1,80 m de hauteur. Sa tête et son cou mesurent donc autour de 0,4 m de haut, ce qui donne un total de 2,20 m. Ce n’est pas compatible avec les niches restaurées sur le mur de l’édicule qui mesurent seulement 1,96 m de hauteur dans l’axe du cul-de-four. Cette dimension avait été définie par l’architecte restaurateur à partir de fragments de fûts qu’il avait restitués à une hauteur de 1.55 m et des traces de ravalement sur l’assise 13. Il avait estimé que ces dernières définissaient un plan circulaire ne reprenant pas la découpe des niches des assises supérieures. Il avait alors imaginé une « assise disparue » au plan circulaire de 216 cm de diamètre (correspondant aux traces de ravalement) et de 36 cm de hauteur car « c’est celle de la frise de l’étage et des architraves [de la frise architravée] du podium. Elle permet d’intégrer la colonne [le fût] de 155.0 » 6. Même si l’on creuse des niches dans l’assise 14 on obtient une hauteur de 232 cm, certes suffisante pour la statue féminine retrouvée, mais trop limitée si l’on considère que celles représentant les hommes sont plus grandes : l’assise « disparue » n’existe donc pas. L’assise 14 faisait-elle partie du mur à niches et sa hauteur pouvait-elle être supérieure aux 36 cm restaurés afin de laisser la place aux statues ? Pour répondre à cette question je me suis livré à une remise en cause de l’appareillage des assises du mur de l’édicule de la restauration. Il ne reste que 16 blocs du mur à niches (assises 14 à 17) sur un total de 36. Il y en a de trois sortes : des grands avec l’intégralité d’une niche et qui font la largeur d’un entrecolonnement, des petits avec une demi-niche qui ont la moitié de cette dimension et enfin, un petit bloc (17-51) sur lequel ont été taillées deux demi-niches. Ces 16 blocs sont à répartir dans les six niches aux dimensions variées. L’appareillage du podium étant isodome, il n’y a aucune raison pour que celui du mur de l’édicule ne le soit pas. Les quatre assises de même hauteur devaient donc Figure 02 : alterner une assise de grands blocs et une assise Mur de l’édicule : schéma d’appareillage. de petits blocs. Puisque la moitié des joints des assises de petits blocs était dissimulée derrière les colonnes, l’appareil était perçu comme isodome, avec des assises de grands blocs sans joints 5 Je remercie Azedin Cherif, (conservation du site de Leptis Magna) qui m’a transmis des photos et des mesures de cette statue et qui, plusieurs fois, a répondu à mes demandes d’informations concernant le mausolée. 6 Citations extraites de courriels de S. Merle d’Aubigné à Michel, 2007 et à Gérôme (Merle) et Jacques (Vérité), 2007 et de « Mission 2006. Bilan des travaux » (G. Merle ?). 4 apparents et des assises de petits blocs avec joint dans l’axe des niches et joint latéral quasiment superposé avec les joints des grands blocs (figure 02). La quasi superposition des joints derrière les colonnes est anormale. Mais, en observant le bloc n° 17-51 intégrant deux demi niches on comprend qu’elle a été choisie pour réduire les difficultés d’épannelage. En effet, pour façonner le parement de ce bloc le tailleur de pierre n’a aucun plan de référence. Il aurait du raccorder une courbe concave (le périmètre du mur) à deux courbes convexes différentes l’une de l’autre et n’y arrivant pas a taillé la face convexe avec des facettes lui donnant des références planes. Dans cet appareillage isodome, la première assise, la 14 dont le parement est en retrait par rapport à la 13 (socle des statues), ne pouvait être structurellement faite que de grands blocs afin de mieux reporter les charges sur la 13. En conséquence l’assise 16 était aussi constituée de grands blocs, alors que la 15 et la 17 étaient faites avec des petits éléments. Dans le tableau ci-dessous, je compare l’appareillage théorique que je viens de proposer avec celui de l’architecte restaurateur qui a mélangé, dans une même assise, petits et grands blocs et je note, en grisé, les blocs du monument restauré qui ne sont pas appareillés en mode isodome. ASSISE 14 NICHES Restauration Appareil isodome ASSISE 15 Restauration ASSISE 16 Appareil isodome 1-2 0 1G 1G 2-3 0 1G 2p 3-4 0 1G 1p 4-5 0 1G 1G 5-6 0 1G 6-1 0 1G 1G (Légende : G = grands blocs ; p = petits blocs) 2p 2p 2p 2p 2p 2p Restauration 1G 1G 1p Appareil isodome 1G 1G 1G 1G 1G 1G ASSISE 17 Restauration 1G 1G 2p 2p 1p Appareil isodome 2p 2p 2p 2p 2p 2p A partir de ce tableau, on peut faire les remarques suivantes : - Pour la niche 1-2 il y deux grands blocs. En appareillage isodome, l’un était en assise 14 et l’autre en 16. - La niche 2-3 restaurée superpose deux grands blocs en assises 16 et 17. En appareillage isodome, l’un était en assise 14 et l’autre en 16. - En assise 15 ont été restaurés 3 grands blocs. En appareil isodome ils appartiennent aux assises 14 ou 16. La superposition alternée des grands blocs et des petits blocs de l’appareillage isodome permet donc de prouver qu’au moins deux blocs appartiennent obligatoirement à l’assise 14 en niches 1-2 et 2-3 et qu’il est possible qu’un des deux blocs (niches 4-5 et 6-1) de l’assise 15 restaurée ait aussi fait partie de l’assise 14. L’assise 14, départ de l’élévation du massif de l’édicule était donc équipée de niches et mesurait 51 cm de haut comme les autres. Les niches faisaient toute la hauteur du mur et, dans l’axe du cul-defour, mesuraient 247 cm de hauteur, suffisants pour une statue d’homme un peu plus grande que que celle de la grand-mère estimée de 220 cm de haut. En conséquence la hauteur de la colonne est augmentée de 16 cm. 1.3. ETUDE DES ASSISES 12 ET 13 POUR RECHERCHER LE PLAN DE L’EDICULE. L’élévation du mur de l’édicule étant rectifiée, il convient maintenant de vérifier son plan et donc celui de tout cet étage. La démarche commence par l’étude des assises 12 et 13 qu’il convient d’abord de décrire puis d’expliquer leur restauration avant de critiquer cette dernière. 1.3.1. DESCRIPTION DES ASSISES 12 ET 13. L’assise 12 fait office de stylobate et présente un profil simplement mouluré avec une doucine encadrée de filets en base, un quart de rond ou une doucine renversée encadré de filet en couronnement. L’assise 13 constitue le socle des statues puisque, sur le lit d’attente, le retrait du parement du mur de l’édicule percé de niches dégage une plateforme sur laquelle elles sont posées. 5 Elle est composée d’un parement terminé par une moulure avec doucine dans lequel viennent s’insérer les bases attiques, engagées de moitié, des six colonnes. Les bases présentent une hauteur de 35 cm, inférieure à celle de l’assise qui est tout normalement de 51 cm. Les fûts posés sur les bases sont indépendants des socles des statues : sur 16 cm de haut, les faces de joint des blocs de socle ont été engravées de sorte à présenter un profil concave pour les épouser (voir figure 09). Ils sont dégagés dès le niveau du lit d’attente de l’assise 13. En plan, la combinaison des colonnes et des blocs de socle des statues est assez inattendue puisque la moulure de couronnement du parement passe devant les fûts, ces derniers semblant, à cet endroit, engagés aux 9/10e. Retournée latéralement à 90° devant les fûts, la doucine ressemble à la moulure inférieure d’une niche classique (voir figure 11). 1.3.2. RESTAURATION DES ASSISES 12 ET 13. Pour anastyloser le stylobate (assise 12), l’architecte restaurateur a pris la décision de lui donner un plan circulaire, engageant ainsi toute la reconstruction de l’édicule du mausolée. Le stylobate a été restauré selon le diamètre correspondant à la plus petite dimension du podium (3,10 x 3,24 m) soit 3,10 m au parement et 3,28 m au lit d’attente. Il a défini le plan de l’assise 13 à partir des dimensions des blocs de l’architrave en partant du principe que les entre-axes des voutains correspondent à l’axe des colonnes. Cette implantation est extrêmement complexe comme le montrent les instructions suivantes données au chantier. Un repère de référence a été fait en divisant le cercle par des diamètres écartés de 60° qui, en façade sud-est, sont placés à 30° de l’axe est ouest du podium pour encadrer symétriquement la niche majeure de cette façade. Ensuite « Le repère à 60° est à faire pivoter de 3 cm dans le sens des aiguilles d’une montre à R = 164 » car, « … cela permet de ré-axer tous les cintres [architraves] (sauf celui en façade sud-est) ». Enfin les bases des colonnes sont positionnées par deux cotes : « cote 1 : cote entre axe base et axe tracé de référence pour distance au centre à R = 164 ; cote 2 : distance centre bord de la base » 7. Par exemple l’axe de la colonne 6 est écarté de 17 cm à une distance de 164 cm du centre et l’axe de la plinthe de la base est à 163,5 cm du centre du cercle. 1.3.3. CRITIQUE DE LA RESTAURATION DES ASSISES 12 ET 13. A lire ce principe d’implantation, n’importe quel architecte en monuments historiques voit qu’il est beaucoup trop complexe pour correspondre à un édifice d’époque romaine. La restauration de ces assises est problématique car l’architecte restaurateur a pris plusieurs décisions arbitraires. La première est celle de donner à l’édicule un plan circulaire. Des documents montrent qu’il a hésité entre un cercle et une ellipse mais, au cours d’une discussion, il a justifié son choix par une recherche de perfection (le cercle) correspondant à son souhait de reconstruire un « mausolée idéal »8. La seconde, concernant l’implantation des colonnes, découle de sa restitution du plan de l’architrave forcément incertaine puisqu’il ne reste de cette assise que des fragments et seulement deux blocs complets. A partir d’un examen du plan d’écroulement, il a décidé de choisir la disposition suivante : les niches majeures en 1-2 et en 4-5 c’est-à-dire sur l’axe sud-est nord-ouest du monument), de placer côté sud-ouest une niche moyenne (en 2-3) et la petite niche (en 3-4) et de placer côté nord-est une niche moyenne (en 5-6) et la grande niche (en 6-1). Ce choix a donné un résultat éloigné d’une restitution « idéale » puisque seule la niche majeure 1-2 est à peu près axée sur la façade sud-est et aucune autre ne se trouve sur une division à 60° du cercle (voir figure 07). Enfin l’implantation est fausse car elle ne respecte pas les règles de superposition de l’ordre. Le parement du stylobate (assise 12) aurait dû se trouver à la verticale du parement de l’étage inférieur. Puisque le podium est rectangulaire, l’assise 12 aurait dû être elliptique, ses axes mesurant respectivement 310 et 324 cm. La plinthe des bases de l’assise 13 aurait dû se trouver à l’alignement du parement du stylobate et non en rive de sa corniche comme cela a été restauré afin que le report des charges des colonnes ne se fasse pas sur un porte à faux de corniche. 1.3.4. A LA RECHERCHE DU PLAN ELLIPSOIDAL DE L’EDICULE. 7 Documents cités en note 7 et dessin « Bases des colonnes » du 07 octobre 2007. L’architecte restaurateur s’inspire en cela des théories de Viollet le Duc et néglige un siècle et demi de théorie de la restauration des monuments historiques. 8 6 Ces critiques invitent à remettre en question le plan circulaire de l’édicule et à se questionner sur la validité des entrecolonnements restaurés. C’est exactement ce que j’avais noté lorsque j’ai commencé à intervenir au chantier : « On relève aussi des différences entre la distance de l’axe des colonnes au bord extérieur des bases qui varie entre 29,5 et 36,2 cm (écart 6,7 cm). C’est sur l’axe 3-6 que les écarts sont les plus importants : la base 3 est la plus grande et renvoie l’axe vertical de sa colonne à 128 cm du centre du cercle de tracé tandis que dans le cas de la base 6, une des plus petites, cette distance est de 133 cm. Cela implique que, à l’origine, soit les colonnes n’étaient pas à la même distance du centre de l’assise, soit le plan de l’assise n’était pas un cercle, soit enfin que les colonnes étaient implantées d’une autre façon ». Pour vérifier la justesse de ces observations il n’y a qu’une solution, c’est d’examiner ce qu’elles impliquent sur les assises supérieures et, surtout, de les confronter aux vestiges de l’entablement. Pour ce faire j’ai dessiné, deux coupes schématiques du 2e étage correspondant aux axes de l’ellipse définie (tracé B) qui reprennent, au moins en partie inférieure, les règles de superposition évoquées ci-dessus. A titre d’information j’ai aussi noté les dimensions (théoriques) des assises telles qu’elles ont été restaurées (tracé A) (figure 03). 1.4. VALIDATION DU PLAN ELLIPSOIDAL DE L’EDICULE PAR CELUI DE SA CORNICHE.Ainsi que je l’ai noté ci-dessus, l’architecte restaurateur a établi sa reconstruction à partir de l’architrave qui, trop fragmentée ne pouvait donner des résultats probants. Faute de temps de présence in situ, il a reporté l’étude de la corniche. Or celle-ci est déterminante et c’est par elle que j’ai commencé ma vérification. Sur la base des données du profil B de la figure 03 (306 au petit axe et 320 au grand), j’ai appareillé l’assise avec les maquettes des lits de pose des blocs de la corniche. Il se trouve que, pour faciliter la mise en œuvre au chantier, j’avais relevé les traces du ravalement sur tous les lits de pose des blocs et noté les incertitudes et accidents (la zone non ravalée porte des marques grossières de poinçons, suffisantes pour obtenir une surface plane). Il Figure 03 : Profils verticaux schématiques de la restauration et des m’est immédiatement apparu que deux études de restitution. blocs neufs sur trois n’avaient pas leur place car la longueur de la circonférence de l’ellipse définie par la coupe B de la figure 03 est inférieure à celle du cercle défini par l’architecte restaurateur. Par contre l’appareillage ne fonctionnait pas car, à la place de ces blocs restitués, il restait des espaces résiduels aux dimensions telles qu’ils n’auraient pu être occupés que par des blocs lamellaires dont il n’y a aucune occurrence sur le monument. Ces espaces résiduels signifiaient que les dimensions de l’ellipse définie par le profil B de la figure 03 étaient trop grandes. Or, au chantier, je m’étais longuement interrogé sur la superposition frise/architrave et j’avais fini par respecter les indications de l’architecte restaurateur, à savoir poser la frise au nu extérieur du cordon supérieur de l’architrave. En respectant les règles structurelles de 7 l’ordre (pas d’appui sur une corniche) dans la superposition frise/architrave, c'est-à-dire en alignant la frise (et donc le lit de pose de la corniche) avec le parement de l’architrave, j’avais la possibilité de réduire les dimensions de l’ellipse. J’ai donc repris la figure 03 pour définir les deux diamètres et dessiné le profil C (288 au petit axe et 302 au grand). La reprise de l’appareillage des maquettes des blocs sur l’ellipse ainsi définie a été extrêmement convaincante : il était quasiment jointif et surtout le plan ellipsoïdal était validé parce que le listel supérieur de la corniche était organisé en carré affichant clairement le choix de l’architecte antique d’un tracé fondamental (figure 04). Pour obtenir ce résultat, c’est à dire passer d’un lit de pose ellipsoïdal à un lit d’attente carré, il a différencié la largeur des surplombs de la corniche (28 et 36 cm). Sur les axes du podium, la différence est, au total, de 16 cm, très proche des 14 cm du 1er étage. Ailleurs, elle est constamment variable car liée à la position relative de l’ellipse et du carré. Le volume engendré est d’autant plus une véritable prouesse que je crois qu’il a été fait au sol, les blocs étant posés à l’envers (sur leur lit d’attente) tant le travail de dégrossissage des tailleurs de pierre et sculpteurs, in situ, par dessous, et sur un échafaudage, me semble difficile. Sur la figure 05, j’ai comparé les appareillages de la restauration (avec ses blocs neufs supplémentaires) et ceux de la restitution : la rigueur du plan carré du lit d’attente et de l’organisation de l’assise restituée est manifeste. Cette rigueur géométrique du lit de pose de la corniche valide donc le plan ellipsoïdal de l’édicule et l’on peut maintenant redimensionner la plupart des assises de cet étage. Auparavant il est intéressant de noter que cette assise a été modifiée au dernier moment de l’édification du mausolée. Ce remaniement, fréquent en exécution des architectures romaines, est lisible dans le fait que les blocs sont moins bien taillés que les autres et même bruts de carrières en certains Figure 04 : Restitution : plan du lit de pose de la endroits. C’est d’ailleurs pour cela que la corniche de l’édicule. préparation du lit de pose est aussi lisible. Autre remarque, deux blocs présentent la même anomalie de décor avec des plumes remontantes. Les plumes du 20.43 ne se raccordent pas avec celles de l’hiver (plumes descendantes) mais le bloc suivant est trop dégradé pour pouvoir vérifier le dessin de ses plumes. L’autre bloc, le 20.79, est placé à côté de l’automne qui ne porte pas d’amorce de départ de plumes. Sa partie inférieure est nue. Le bloc 20.02 qui la jouxte a son quart de rond décoré d’oves surdimensionné laissant supposer la quasi disparition des plumes à cet endroit. L’organisation du décor de la corniche qui réduit la hauteur des lits de plumes au fur et à mesure de leur proximité de l’axe de la façade exclut que ces blocs soient placés Figure 05 : Comparaison des plans de la corniche de la restauration (trait interrompu) et de la restitution ailleurs qu’à côté des statues. Ces malfaçons (trait plein). s’ajoutant à l’angle obtus (au lieu de 90°) du listel de l’hiver n’ont pas d’explication technique sinon celle d’un remaniement perturbateur du planning et de l’organisation du chantier évoqué ci-dessus entraînant des difficultés au ravalement de blocs mal façonnés au sol. 1.5. A PROPOS DE LA FRISE. La restitution du plan ellipsoïdal de la frise n’a pas présenté de difficultés puisqu’elle est directement définie par les traces de ravalement du lit de pose de la corniche. Par contre je ne sais 8 pas reconstituer son décor. Avant d’évoquer ce problème, je détaille la restauration qui en a été faite. 1.5.1. RESTAURATION DE LA FRISE. Les pierres de cette assise sont facilement identifiables car elles mesurent entre 32,5 cm et 36 cm de hauteur et ont été travaillées en métopes et triglyphes. Cinq blocs ont été retrouvés in situ dont quatre avec des signes du zodiaque sculptés dans les métopes : le 19-97 (cancer), le 19-94 (lion, 25 cm de haut seulement car il est fracturé en partie inférieure), le 10-154 (scorpion) le 19-56 (sans décor), et le 19-131(queue d’un poisson). Au musée de Leptis, est exposé un sixième bloc identifié comme sagittaire. Par ailleurs, l’architecte restaurateur a attribué à cette assise deux blocs incomplets avec métope et triglyphes partiels, décorés des personnifications du soleil et de la lune. Ses recommandations étaient les suivantes : - Le diamètre extérieur de la frise est celui du lit d’attente de l’architrave. - « J’ai divisé le cercle en 14 métopes encadrés de triglyphes pour les 12 signes du zodiaque et des représentations du soleil et de la lune…cela correspond très bien… [avec les] blocs 94 et 97 lion et cancer, idem pour les blocs de la lune et du soleil disparus mais dont les dimensions ont été estimées d’après d’anciennes photos conservées au musée de Tripoli ». - « …distribution proposée : le soleil plein SE encadré par gémeaux et taureau, lune au NO encadrée par scorpion et sagittaire »7. J’ai respecté ces indications au chantier en faisant faire une copie en béton coloré du bloc du musée et en laissant nus les métopes inconnues. 1.5.2. QUELLE ETAIT L’ORGANISATION DU DECOR ? Les dimensions de l’ellipse sont définies par le profil C de la figure 03 et l’étude de la corniche. Son périmètre théorique, 885 cm est inférieur à celui de la restauration. Si l’on suppose que tous les blocs sont identiques au seul bloc complet (longueur entre axes des triglyphes de 68,5 cm) on ne peut en disposer que 12,9 au lieu des 14 de la restauration. Cela signifie d’abord que la restauration est fausse, ensuite que les métopes ne sont pas identiques. C’est relativement facile à démontrer puisqu’il est de règle dans l’ordre dorique que l’organisation des triglyphes soit rythmée à partir de ceux qui sont directement placés sur l’axe des colonnes. En divisant axialement les entrecolonnements (dont on a vu qu’ils étaient inégaux) on obtient 12 métopes de largeurs plus ou moins variable qui sont indiqués sur la figure 06. Dans ces 12 métopes il faut disposer des signes zodiacaux auxquels s’ajoutent le Soleil et la Lune publiés dans Romanelli 1925, fig.95 et 96. Les photos donnent l’impression que les faces décorées sont planes mais leur l’appartenance à cette assise est incontestable : « Au travers des…fragments nous voyons, épars, ceux qui devaient appartenir à l’étage de l’édifice superposé au premier : parties de corniche et d’une frise dorique, avec des figures du soleil et de la lune dans les métopes, avec une surface convexe, c’est-à-dire qu’ils appartenaient à Figure 06 : Plan ellipsoïdal de l’architrave de un élément de forme cylindrique ; » (Romanelli l’édicule et lit de pose théorique de la frise. 1925, p. 166). Je n’ai pas trouvé de solution à ce problème. Je note toutefois que sur les photos accompagnant l’article de Romanelli (fig.95 et 96), le Soleil occupe le côté gauche d’un bloc et deux glyphes sont à droite ; la lune est côté droit d’un autre bloc et un glyphe est à gauche. Je pense donc que les deux blocs étaient associés pour reconstituer le triglyphe et qu’ils devaient se trouver en un lieu important de cette frise. Je les ai dessinés sur la restitution de la façade sud-est du monument (voir figure 10). Le Soleil, à la place du Cancer, est en correspondance avec l’orientation du monument au solstice d’été. La Lune fait-elle référence à l’égalité jour/nuit au solstice ? 9 1.6. RESTITUTION DU PLAN ELLIPSOIDAL DE L’ARCHITRAVE. Avant de restituer l’architrave, je vais en expliquer les contraintes en décrivant la restauration. 1.6.1. RESTAURATION DE L’ARCHITRAVE. Celle-ci a été faite avec les blocs suivants : - un bloc entier 18-106 placé en 1-2. - quatre blocs fracturés se raccordant deux à deux, 18-126 et 18-56 placés en 1-6 et 18-50 et 18-48 placés en 5-6. - cinq blocs incomplets, 18-76 et 18-78 se raccordant, 18-71 et 18-15 se raccordant aussi et 18-POL placés respectivement en 2-3, 3-4 et 4-5 après avoir été complétés en béton moulé. Selon l’architecte restaurateur, l’emplacement des blocs « a été défini en fonction du décor pour le 106 [1-2], en fonction du plan de dispersion pour les blocs 55-126 [6-1] et 48-50 [5-6]. Pour les deux autres blocs conservés, 76-78 (2-3) et 15-71 (3-4), j’ai tenu compte de leur décor : la niche principale SE est ainsi encadrée de 2 cintres [architraves] avec des soffites décorés d’acanthes, pour la niche NO ce sont des couronnes de laurier »7. Les cordes à l’extérieur du cordon des trois architraves entières mesurent 1,65 m en 1-2, 1,55 m en 5-6 et 1,76 m en 6-1. Les architraves incomplètes ont été restaurées ainsi : 4-5 identique à la 1-2, 23 égale à 5-6 (les niches sont similaires), l’espace restant dimensionnant 3-4. Lorsqu’il s’est agi, au chantier, de compléter en béton moulé les deux fragments 18-71 et 18-15, j’ai fait construire le coffrage suivant les dimensions théoriques définies ci-dessus. Elles se sont avérées fausses dès la pose du bloc 18-15 sur le coffrage et, pour obtenir une concordance des volumes j’ai du le faire réduire de 10 cm. Au ravalement le mauvais raccord a été maquillé. 1.6.2. RESTITUTION DU PLAN ELLIPSOIDAL DE L’ARCHITRAVE. Le plan du lit de pose de la corniche et sa position relative par rapport à l’architrave étant validés, j’ai procédé à une restitution graphique à partir des dimensions du plan ellipsoïdal définies par le profil C de la figure 03 en ayant pris la précaution, auparavant, de réduire de dix centimètres le dessin de l’architrave contenant le bloc 18-15 restauré. En repartant de la 1-2, centrée en sud-est, j’ai assemblé graphiquement les maquettes des blocs. J’ai noté que le montage respectait assez bien le plan de l’ellipse mais que le résultat n’était pas satisfaisant : la 4-5 qui aurait du être centrée en façade nord-ouest ne l’était pas et les raccords des faces latérales des blocs ne se faisaient pas bien en 3 et 6. En mettant en relation les architraves et les niches qu’elles surmontent, il m’est apparu évident que je pouvais trouver une disposition symétrique des architraves des niches majeures (1-2 et 4-5) en modifiant la disposition des quatre autres, en associant celles des niches moyennes côté sud-ouest et celles de la petite et de la grande côté nord-est. La nouvelle disposition est dessinée sur la figure 06. La 18-106 est centrée en 1-2, dans l’axe de la façade sud-est ; côté sud-ouest se succèdent deux voutains moyens en 2-3 (blocs 18-76 et 18-78 dont la position est inchangée) et en 3-4 (blocs 18-50 et 18-48) ; le côté nord-est combine le grand voutain en 1-6 (blocs18-126 et 18-56 dont la position est inchangée) et le petit voutain en 5-6 (bloc 18-15 raccourci). Comme on le voit le bloc 18-POL que j’ai restitué aux mêmes dimensions que le bloc 18-106 est alors parfaitement centré en façade nord-ouest. Avec cette disposition, les axes des colonnes 1, 2, 3, 4 et 5 se trouvent dans des positions géométriques simples c’est-à-dire proches de 30° ou 60 ° par rapport aux axes de l’ellipse. Seul, l’axe 6 est décalé par l’association de la grande et petite niche. 10 1.7. INCIDENCES SUR LA PARTIE INFERIEURE DE L’EDICULE. En appliquant la relation directe existant entre les voutains de l’architrave et les niches, la restitution du plan du mur de l’édicule est évidente. Elle apparait en traits épais sur la figure 07 sur laquelle sont comparés le plan de la restauration et celui de la restitution. 1.7.1. NOUVEAU POSITIONNEMENT DES STATUES. Conséquence importante de la modification du plan des assises et de la succession des niches, le plan de positionnement des statues s’organise logiquement ainsi (voir figure 08) : Les grands parents Caius Marius Pudens Boccius Zurgem et sa femme Velia Longina Bibai dans les niches majeures au sud-est (1-2) au nord-ouest (4-5). - La petite niche (5-6) est celle du petit fils Marsus. - Son père Caius Marius et mère Maria Victorina dans les niches moyennes, placés l’un à côté de l’autre, respectivement en 2-3 et 3-4. Figure 07 : Comparaison des plans du mur (assises - Enfin Caius Marius Iovinus, l’ainé est 14 à 16) de la restauration (trait fin) et de la dans la plus large des niches (6-1). restitution (trait épais). 1.7.2. RESTITUTION DES PLANS ELLIPSOIDAUX DES ASSISES 11 A 14. La restitution des plans ellipsoïdaux des assises 11 à 14 est dessinée sur la figure 09. Le plan d’implantation de l’assise 13 n’a plus la complexité de celui de la restauration. Cette simplicité est une confirmation supplémentaire de la validité de la matrice ellipsoïdale de la quasitotalité (il faut en exclure le lit d’attente de la corniche) du plan de l’ensemble de l’édicule. 1.8. RECTIFICATIONS DE LA RESTAURATION DU SOUBASSEMENT, DU DECOR DU PODIUM, DE LA COUVERTURE ET OBSERVATIONS SUR LE CHAPITEAU TERMINAL. Figure 08 : Plan du mur de l’édicule avec le Pour compléter cette proposition de restitution il positionnement des statues. convient d’examiner la restauration du soubassement, du décor de la frise architecturée du podium et de la couverture. Le mausolée n’avait qu’une assise de fondation. Ses blocs de calcaire jaunâtre de mauvaise qualité étaient directement posés sur le sol naturel, un lœss très compact. Cette assise était apparente au XXe siècle car elle a été déchaussée par le ravinement mais « …le niveau du sol antique…correspondait au lit d’attente de l’assise de fondation » (Clauss 1999b, p. 5). Avec ses trois gradins apparents, le soubassement est donc parfaitement classique, sur le modèle grec du Vème siècle. Lors de la reconstruction l’architecte Figure 09 : Restitution : plans des assises 11 à 14. restaurateur a laissé l’assise de fondation 11 apparente sur une trentaine de centimètres de hauteur car il souhaitait faire poser un dallage périphérique au monument. J’ai convaincu A. Laronde de ne pas faire construire ce dallage sans racines historiques. L’assise de fondation est donc restée visible et donne l’impression d’une quatrième marche ce qui est dommageable pour la lecture du monument. La frise architravée du podium était décorée de 16 chefs, certains à cheveux nus, d’autres coiffés d’un bonnet phrygien alternant avec 9 coquilles contenant une tête féminine. Les deux blocs d’angle retrouvés présentent les deux types sur leurs différentes façades. Ils définissent donc une volonté d’alternance dans la succession des représentations qui, sur le monument d’origine, aurait pu être faite individuellement ou par regroupement sur les façades opposées. La disposition aléatoire des coiffures des chefs sur la frise architravée restaurée est donc erronée. Suivant les indications de l’architecte restaurateur, j’ai fait restaurer l’embasement de la couverture au diamètre 296 cm. J’ignore comment il a défini cette dimension qui, on le voit nettement sur la figure 03, ne correspond à aucun alignement d’un parement inférieur. Il est possible qu’il l’ait obtenue à partir du lit de pose de l’assise 23. Ce dernier est à peu près circulaire mais il se raccorde par des amortissements imprécis à l’assise 22 qui de plus est incomplète. Pour la restitution, je propose le diamètre théorique de 288 cm qui est celui du parement de l’entablement sur le petit diamètre de l’ellipse. Cette restitution, très vraisemblable, ne peut être confirmée par l’archéologie puisqu’un certain nombre de blocs ont disparu. L’assise 22 présente une « anomalie » que je ne sais résoudre. En effet si un bloc a ses écailles dirigées vers le bas, trois autres, dont deux qui se raccordent, les ont en sens inverse. Quatre blocs de cette assise ayant disparu, il est difficile de comprendre la logique de ce décor. Je ne sais pas restituer le chapiteau sommital. En partie inférieure il a un rang de feuilles d’acanthes montant jusqu’aux deux tiers de sa hauteur. La partie supérieure est dégradée. Sur un côté, au dessus de la feuille centrale, se trouve, au dessus d’une feuille d’acanthe, un enroulement à l’envers de 2 crosses qui s’écartent pour rejoindre les restes d’un tailloir concave à trois moulures. Sur un autre, se superposant à une feuille d’acanthe, on voit un relief ( ?) duquel se détachent deux éléments trop larges pour être des crosses, qui se dirigent vers le tailloir. Entre le tailloir et ces éléments se trouvent deux enroulements à l’envers. P. Clauss Balty voit dans cette partie du chapiteau un rapace en train de planer. La face d’attente du chapiteau est engravée d’une mortaise circulaire (diamètre 16 cm, profondeur 20 cm) dans laquelle était fixé un élément décoratif. La réponse habituelle est d’y proposer une pomme de pin ou un œuf mais là aussi P. Clauss Balty suggère un rapace en vol. 1.9. LA PROPOSITION DE RESTITUTION : UNE APPLICATION DES REGLES L’ORDRE. La restitution proposée est fondamentalement différente de la restauration en ce sens qu’elle définit une organisation rationnelle de la géométrie des plans des assises. Elle a le mérite de rendre cohérent ce qui a pu sembler être des anomalies comme le plan rectangulaire du podium considéré comme « presque carré ». Car c’est cette soi-disant erreur qui génère le plan ellipsoïdal et donne une rigueur à l’ensemble de l’édicule à travers ses multiples combinaisons, cela même s’il est difficilement perceptible, puisque seulement 14 cm différencient les deux axes. En retrouvant sur les surplombs de la corniche la même différence que celle qui affecte les côtés du rectangle du podium, on comprend qu’il s’agit d’une volonté de l’architecte antique par laquelle il affirme sa connaissance des tracés fondamentaux puisqu’il vient centrer le cercle de l’embasement de la couverture sur le carré de la corniche. On constate aussi qu’il a un souci permanent de se référer aux règles d’alignement vertical de l’ordre puisque c’est en partant d’elles que j’ai remis en place toutes les assises de l’édicule avec des conséquences importantes pour tout ce qui leur est superposé et tout particulièrement pour l’entablement. Car c’est ce dernier qui a apporté la confirmation de cette hypothèse à travers la restitution archéologique de la disposition des blocs de la corniche, la définition d’un plan simplement organisé de l’architrave et, par conséquence celui des niches du mur de l’édicule et donc de l’emplacement des statues. Une élévation (figure 10) de la proposition de restitution permet de voir que le mausolée était plus élégant que celui qui a été restauré. Le monument retrouve une silhouette affinée et presque classique par la suppression de la fondation apparente, la réduction des dimensions de l’ellipse par 12 rapport au cercle de la restauration, la plus grande hauteur de l’assise de l’assise 14, l’élancement augmenté des fûts, les nouvelles dimensions de l’entablement et la rigueur des dimensions de la couverture. Il n’est plus possible de reprendre la restauration du mausolée pour lui redonner son architecture d’origine. Toutefois elle pourrait être largement améliorée par un creusement des niches de l’assise 14, le repositionnement de la statue de Velia Longina Bibai à son emplacement d’origine et une rehausse du niveau du sol enterrant l’assise de réglage. Figure 10 : Restitution du mausolée : élévation sud-est. Cette restitution multiplie les complexités : changements de plans, variété dans le choix des ordres, superposition d’éléments appartenant à des ordres différents, références grecques et romaines, etc. 13 Elle donne le sentiment d’une profonde inorganisation : s’il y a une logique, elle échappe aux canons classiques. Cependant, (et cela est une évidence pour les architectes), l’utilisation du plan ellipsoïdal, la complexité de l’organisation du socle des statues de l’édicule et la curieuse disposition de l’architrave du deuxième étage font classer l’architecte antique dans la catégorie « baroque ». C’est avec cette approche que je vais, maintenant, analyser l’architecture de Gasr ed douirat. 2. ETUDE ARCHITECTURALE D’UN MAUSOLEE BAROQUE. Pour R. Martin l’architecture baroque antique est d’origine grecque. Sa démonstration est construite à partir d’une approche structurelle : « Le mot “baroque” implique certes, depuis les analyses de H. Wöifflin, l'emploi privilégié de certaines formes (la courbe et surtout la contre-courbe, le jeu des saillies et des retraits) et le développement foisonnant des motifs décoratifs, mais surtout l'introduction, par opposition au style tectonique qui révèle les fonctions architecturales à travers la forme des éléments constructifs, d'un style non tectonique qui réduit ces formes architecturales au simple rôle de décor » (Martin 1987). Il en trouve les prémisses dans le style ionique dont le décor s'applique aux éléments constructifs. Il suit les développements d’aspects baroques de l'architecture à la fin du Ve siècle puis au IVe siècle av. J.C.. A l'époque hellénistique il insiste sur le décor plaqué de la création architecturale macédonienne et son développement à Alexandrie : « …nous disposons au moins d'un certain nombre de témoignages dispersés, disjecta membra architecturaux ou tombes des grandes nécropoles, comme celle de Mustafa Pacha, qui montrent l'importance des ordres d'applique, un goût marqué pour le mélange des styles, des rythmes mouvementés, l'accentuation des effets plastiques et picturaux propres au style baroque et que l'emploi des stucs peints vient faciliter » (Martin 1987). Enfin, R. Martin signale la diffusion du baroque dans toutes les régions qui ont subi l'influence de la capitale ptolémaïque, en Libye, à Cyrène et Ptolémaïs, en Sicile, en Algérie et, pour l’Orient, de Pétra jusqu’aux confins de l'Indus. G. Picard, s’inspirant sans doute de la relation entre la Contre-réforme et son architecture, estime que le baroque romain est généré par les croyances de cette société : « Parce qu’ils sont justes et pieux, le peuple romain et son prince reçoivent de la Providence la mission d’organiser l’univers et de lui procurer le bonheur…Cette idéologie…a trouvé pour s’exprimer des formes apparemment contradictoires, en fait complémentaires, et d’ailleurs réalisées à l’aide des mêmes moyens techniques : d’une part, les masses inébranlables et austères de l’architecture fonctionnelle, qui incarne la puissance de l’Empire, d’autre part, le style qu’on a parfaitement le droit d’appeler baroque, non seulement parce qu’il présente les mêmes tendances esthétiques que le baroque moderne, mais parce que ses vestiges ont servi de modèles aux créateurs de ce dernier » (Picard 1964, p.149). Comme on le voit, ni la conception structurelle de R. Martin, ni la vision idéologique de G. Picard ne nous permettent d’étudier Gasr ed douirat 9. Cependant en assimilant baroque romain et baroque moderne, G. Picard nous autorise à utiliser l’instrument d’analyse du baroque conçu par un architecte structuraliste J. Castex. Dans son ouvrage « Renaissance, baroque et classicisme. Histoire de l’architecture 1420-1720 » il a établi, dans un chapitre intitulé « Méthode pratique pour démonter les schémas spatiaux », quelques règles qui permettent de comprendre les procédés utilisés par les architectes baroques. Après avoir constaté qu’ils ont « une culture presque encyclopédique » (p. 293), il note qu’ils l’utilisent pour détourner l’architecture classique : « Il y a dans le baroque plusieurs méthodes de démontage des types, plus ou moins radicales, qui s’attaquent à telle propriété du type, ou à tel ensemble de propriétés, ou même à la structure profonde du type…La manière de faire [est] : repérer les articulations du langage classique, puis les « épuiser » (p. 300). Ces méthodes sont subtiles car dissimulées : « … Si l’on admet que [le 9 Ces citations sont réductrices et contestables. La rupture énoncée par R. Martin a une valeur épistémologique artificielle. G. Picard propose un modèle qui reste théorique. En l’absence d’une étude globale du baroque antique à laquelle renvoyer, je considère qu’elles ont, dans le cadre de cet article, une valeur méthodologique. 14 baroque] réalise un processus de transformation du langage, on comprend qu’il apparaisse comme un hybride où coexistent l’ancien et le nouveau, l’un « hantant » l’autre et produisant cet effet de trouble, cette apparence inorganisée qui prédispose peu à l’analyse. Et c’est là qu’il faut chercher : en clair, la majeure partie de la production baroque n’a de sens que parce qu’on peut continuer d’y voir « l’ancien langage » au travers, par un effet de transparence, ou, tout au moins, de translucidité » (p. 300) 10. Il y a donc ici une grille d’analyse de l’architecture baroque relativement simple : elle ressemble globalement à l’architecture classique (H. Damisch parle « de catégorie du masque » (Damisch 1960) mais tous ses modèles, types, grammaire (règles d’assemblage) et vocabulaires (éléments) sont détournés 11. Je vais maintenant l’appliquer à ma restitution en commençant par le schéma spatial puis en examinant, successivement, les divisions de l’édifice sans respecter leur disposition dans le bâtiment. 2.1. LE SCHEMA SPATIAL DU MAUSOLEE. L’analyse du corpus des monuments funéraires ramène le modèle de Gasr ed douirat à un schéma spatial relativement simple : « Tous les mausolées-tours se caractérisent par leur plan centré, le plus souvent carré ou très proche du carré…Ils se composent d’au moins deux niveaux, constitués par un podium surmonté d’un édicule…Le soubassement est vertical ou à degrés. La couverture peut adopter la forme d’une pyramide et tous ses dérivés : pyramide à pans concaves ou convexes, cône parfois concave, être en terrasse ou à double-pente » (Clauss 2001, p. 3-4). Ce modèle est indépendant d’une grande liberté de conception laissée aux maîtres d’ouvrages et architectes : « Il n’y a jamais de reprise d’un modèle et l’apparition des différents types est due à la volonté d’originalité des commanditaires, recourant aux multiples déclinaisons possibles en accord avec leurs moyens financiers, les modes, les traditions locales et les matériaux disponibles » (Clauss, 2001, p.19). A Gasr ed douirat l’organisation choisie est la suivante : - Un soubassement en trois gradins de tradition très ancienne : « La krépis au rythme classique à 3 degrés s’impose au Ve s. … Au IVe s. et à l’époque hellénistique, le dispositif est de règle dans toutes les régions du monde grec… » (Martin 1965, p. 346). - Un podium au plan rectangulaire avec seulement 14 cm de différence entre les côtés. La conception est conforme au modèle en ce sens qu’elle est « très proche du carré ». - Le 2e étage est un volume à plan ellipsoïdal mais tellement proche du cylindre que la confusion est possible. En partie supérieure, la corniche, que l’on attend ellipsoïdale, est un volume complexe à base elliptique et à partie supérieure carrée. - La couverture retrouve le modèle avec un cône concave posé sur un soubassement cylindrique. Le schéma spatial est très proche du modèle : le détournement baroque est subtil. Pour le podium tout est dans le « presque » du « presque carré » du modèle. Le rectangle est tellement proche du carré qu’il faut le mesurer pour le constater mais c’est cette différence qui génère le volume supérieur. Si l’ellipse est un cercle regardé avec une vision oblique, l’inverse est vrai et, ici, l’ellipse située dans un volume complexe, perçue en contre-plongée et sans références pour la dimensionner, 10 Type et modèle. J. Castex fait référence à l’analyse urbaine. Pour lui « type » recouvre un ensemble (exemple le type de la villa ou du palais) et le « modèle de base » est un des constituants du type, par exemple la cour. Je m’en tiendrais à la terminologie de F. Choay, dont j’ai été un étudiant, laquelle inverse la hiérarchie entre modèle et type. Pour elle, le modèle est un type idéal (exemple : le mausolée ou le temple rond). Le « type » est une division du modèle : « Le type est un modèle abstrait construit par l’analyse qui rend compte des caractéristiques essentielles d’une catégorie » (Allain R., Morphologie urbaine, A. Colin, 2004) (exemple : le mausolée-tour à trois étages). La « grammaire » recouvre la combinaison d’éléments utilisés pour établir un bâtiment (exemple : les ordres et leurs règles d’assemblage). Enfin le « vocabulaire » définit les éléments qui entrent en combinaison (exemple : base, fût et chapiteau combinés dans la colonne). 11 Le baroque hellénistique s’est effectivement constitué en critique de l’architecture fonctionnelle. Dans le baroque romain, cette valeur critique est beaucoup moins forte car les Romains en ont hérité alors qu’il était constitué et l’ont utilisé en association avec l’architecture fonctionnelle. 15 est imperceptible alors qu’elle est la courbe majeure des baroques. Enfin et surtout, la prouesse spatiale qu’est la corniche, terminée par un carré - la figure géométrique de base des tracés d’architectes - produit le trouble car il n’en existe pas de référence classique. 2.2. LA PARTIE INFERIEURE DE L’EDICULE. 2.2.1. LES PREMIERES ASSISES DE L’EDICULE ET SES MODELES. Au vu des ruines de Gasr ed douirat, P. Romanelli a proposé cette restitution de l’édicule : « …le deuxième étage de l’édifice s’élevait en forme de petit temple circulaire ouvert, couronné par un toit à calotte, et donc le monument était proche de la forme de la réputée tombe des Giulii à St Rémy ou de celle des Istacidi à Pompéi » (Romanelli 1925, p. 166). Le premier modèle est évident : c’est celui du temple à cella circulaire avec péristyle concentrique que G. Picard interprète ainsi : « A l’époque impériale…la tholos évoque la voûte du ciel…On a cessé à l’époque hellénistique de localiser sous terre le séjour des morts bienheureux, et l’on imagine maintenant, sous l’influence de l’eschatologie et des religions orientales qu’ils ont été transportés près des astres, dans les hautes sphères du firmament ; la tholos symbolise donc désormais cette phase finale de la destinée humaine, le paradis mérité par les gens vertueux » (Picard 1964, p. 180). Réexaminons la partie inférieure de l’édicule. Le stylobate (assise 12) a la hauteur d’une assise. C’est peu mais cela suffit à faire en sorte que l’œil du passant échappe à l’avancée de la corniche du podium et voit, sans obstacle, la scénographie de l’édicule. Le regard en contre-plongée donne l’impression que la colonnade lui est posée dessus. Le stylobate est celui d’un petit temple. Mais l’effet est trompeur car l’assise 13 est complexe. En partie inférieure, elle présente, alternés, un parement vertical terminé par une corniche de niche et des bases engagées. Au dessus de la base, le fût apparaît comme étant engagé (on a vu qu’il est encastré), comme étant celui d’un pilastre. Quelques centimètres au dessus, l’engagement du (faux) pilastre se poursuit, derrière la corniche des niches. Au dessus de la corniche, le mur percé de niches est en retrait et le fût se dégage. La corniche, interrompue sur une vingtaine de centimètres devant les fûts, peut être lue comme étant la moulure supérieure du toïchobate de ce mur. Elle affirme la primauté du socle des niches sur la colonnade. Sur une toute petite hauteur on a donc l’amorce d’un mur percé de niches encadrées de pilastres. C’est le deuxième modèle de l’édicule dont l’histoire et le sens sont éclairés par G. Picard : « Il s’agit d’une application particulière d’une combinaison découverte par les architectes étrusco-romains à la fin du IIe siècle av. J.-C. Des urnes étrusques de cette époque nous montrent pour la première fois des arcades entre lesquelles se détachent des pilastres…Dans le cas de Nîmes et de Baalbek, elle est employée à l’intérieur d’un édifice et dans une intention qui rejoint celle des peintres des IIIe et IVe styles pompéiens. Ceux-ci suggèrent en effet l’existence, au-delà de la paroi qu’ils ornent, d’un monde mystérieux, une sorte de pays des merveilles dont nous percevons les perspectives infinies à travers cette paroi, elle-même supposée transparente » (Picard 1964, p. 109). En poursuivant notre progression vers le haut de l’édicule, nous pouvons suivre la lecture des deux modèles. Sur la hauteur du mur, les niches encadrées prennent une grande puissance avec la présence des statues. Les fûts « encadrent » comme le signifie clairement le choix typiquement baroque d’enrouler leurs torsades symétriquement par rapport aux statues. Toutefois, ces mêmes fûts torsadés, dégagés du mur et y portant ombre appartiennent clairement, aussi, à la colonnade du temple. Le niveau des chapiteaux constitue une articulation entre les deux modèles car c’est là que leurs séquences verticales (niches et fûts) sont suspendues. La puissance des chapiteaux aux dimensions imposantes vient masquer et ombrer la partie supérieure des statues : elles sont de moins en moins dans le « passage » et de plus en plus sous la protection du temple. Ce dernier prend de la force pendant que les niches encadrées diminuent d’importance et vont bientôt disparaître. 2.2.2. LES STATUES ET LEURS NICHES. Les statues sont l’objet principal de la composition architecturale de l’édicule. Avec une attitude typiquement baroque, l’architecte antique a détourné les modèles classiques en modifiant le rythme des colonnes et des niches pour associer à chaque membre de la famille un espace et un décor 16 hiérarchisés. Il met en valeur les statues en leur donnant une taille plus grande que nature. Il flatte le grand père en le plaçant sur la façade principale animée, au niveau du podium, par le décor de la porte de la chambre funéraire et qu’il aura subtilement élargie en donnant à l’édicule un plan elliptique. C’est elle qu’il aura mise en valeur sur le dessin perspectif qu’il aura présenté au maître d’ouvrage pour obtenir son approbation du projet. La statue retrouvée reproduit un modèle grec qui n’a rien à voir avec la mort, conformément à la pratique romaine du symbolisme funéraire. Elle est pleine de vie avec les mouvements de son drapé (un pied en retrait relève les tissus) et le décentrement de la hanche droite qui efface la rive de la niche. Côté gauche, un rocher créé un premier plan qui enfonce le corps dans le mur et renvoie la niche au second plan. La position oblique du corps donne le sentiment que la statue va faire un pas en avant. La partie haute du corps se trouvait au niveau des chapiteaux et dans le volume conique des voûtains. En prolongeant les culs de four, ces voûtains donnent l’impression d’en faire partie : ils projettent la partie haute de la niche en avant. Leur décor d’intrados, d’autant plus impressionnant qu’il est amplifié par la perspective qu’en avaient les passants depuis le sol, est lu comme étant immédiatement situé derrière la tête des statues. Les jeux de lumière sont omniprésents dans cet espace : le voûtain est un espace conique qui part du clair vers le foncé car les culs de four sont toujours dans l’ombre. L’architecte a conçu cette volumétrie complexe, un grand cul de four au dessus d’une niche de profondeur réduite et située au second plan par rapport aux statues pour donner un écrin richement décoré aux têtes des statues dans un effet d’enveloppement amplifié par les ombres que génèrent les voûtains. Il a obtenu ce résultat en réduisant la hauteur de la colonne qui retrouve des dimensions doriques (rapport entre hauteur et diamètre de 5,5) et par un petit artifice car le fond des niches est incliné vers le haut. A certaines heures du jour, toute la partie supérieure de la statue est masquée et n’apparaissent que quelques parties du corps, comme si la statue s’enfonçait dans le mur (voir figure 11). Ces effets se retrouvaient sur les autres statues : on peut imaginer un grand père d’une grande dignité, un petit fils juché haut sur un socle baroque à thème naturel de rochers et de végétaux (la réduction de la largeur de la niche grandit d’autant la statue évidemment plus petite que les autres) et un fils aîné dont la grande niche laisse supposer un élégant mouvement de toge et un décor flamboyant. Le passant voyait en même temps plusieurs statues dont les attitudes variées baignaient dans des jeux d’ombres et lumières forcément différents. Ces caractéristiques Figure 11 : Restitution. La statue dans sa niche. A droite le sont catégorisées par la critique d’art : « …le chapiteau restauré. A gauche le chapiteau restitué par baroque, c’est « l’espace et le mouvement », imitation des chapiteaux du portique du forum de Leptis. « l’espace devenant lumière » » (Castex 1990, p. 245). 2.3. L’ENTABLEMENT. L’entablement est un espace de liberté relative pour les architectes romains « classiques » : « Chaque partie de l’entablement tend à se développer…pour elle-même, en fonction des exigences 17 du concepteur. Si celui-ci entend donner la primauté au message religieux, idéologique ou symbolique, il peut accroître la hauteur de la frise figurée ; s’il souhaite accorder davantage de puissance à la corniche pour obtenir des effets particuliers comme l’amplification des contrastes entre l’ombre et la lumière, il donne au surplomb du larmier et éventuellement à la cimaise une valeur plastique proportionnellement plus importante » (P. Gros II, p. 497). Un architecte baroque, détaché des règles classiques, utilisera forcément cette liberté dans sa conception de l’entablement et l’on va voir ci-dessous que c’est aussi dans le but de privilégier l’expression des messages et de jouer sur la lumière. 2.3.1. L’ARCHITRAVE ET LES MODELES. Le mur, support des « niches encadrées », se termine derrière les chapiteaux, au niveau de leur lit d’attente. Les niches s’achèvent dans les culs de four de l’assise 18. Leur nature de creux dans un mur change car elles sont, à la fois, spatialement prolongées en avant par le volume conique des voûtains et renvoyées en arrière par la présence du parement de l’architrave, par cette même profondeur des voutains. L’ordre des plans dans la profondeur de la façade a été dérangé et devient trouble. Au plan des colonnes qui s’est avancé par rapport à leur engagement en pied s’oppose le recul volumétrique du plan de fond occupé par le mur et les niches. Comme si les « niches encadrées » cherchaient à retrouver leur fonction d’origine, celle d’un décor intérieur. Qu’en est-il du rôle de l’architrave dans l’autre modèle, le temple ? L’architecte antique n’y respecte pas les règles de l’ordre, au plan technique d’abord car l’architrave est originellement un linteau alors qu’elle est ici aux limites de la résistance mécanique, au plan des modénatures traditionnelles ensuite car il n’y en a pas. Avec leur archivolte bien marquée (en parement : listel, filet, doucine inversée, et en retour, sous la voûte, deux listels séparés par une scotie), le parement des voûtains peut être lu comme une arcature. Technique baroque s’il en est car l’arc un des outils de base de l’architecture baroque romaine : « Il faut insister sur les apports plastiques que représentent ces éléments constructifs fondés sur l’arc : en effet, ils marquent le recours à des structures courbes, à des surfaces cintrées, à des volumes cylindriques ou hémisphériques, dont le caractère s’oppose radicalement aux principes orthogonaux des colonnes et architraves de l’architecture grecque classique. Dès lors, on pénètre dans un univers de lignes et de surfaces concaves ou convexes qui conduira à cette architecture curviligne, dont les œuvres de l’époque hadrianique marquent l’adoption généralisée. On aboutit ainsi, en toute logique, à l’espace « baroque », avec ses plans centrés, ses coupoles, ses absides, ses jeux de niches, de coques, ses surfaces sphériques, ses dômes, qui est le propre de l’art impérial à partir du IIe siècle » (Stierlin 1964, p. 57). La mouluration de l’architrave aurait-elle encore une existence dans le cordon décoratif supérieur courant sur l’ensemble du périmètre ? Celui-ci n’a pas la fonction d’éloigner les eaux de ruissellement de la façade qui est le propre des moulures supérieures des architraves corinthiennes. Il ne s’agit pas d’une moulure architecturale mais d’une couronne de feuilles de laurier, de grenades ou de pavots enlacés par des rubans dont les extrémités retombent sur les écoinçons. Les jeux d’espace, d’ombre et de lumière intègrent les statues dans le temple qui, au dessus de l’architrave, est le seul modèle en œuvre. La couronne est là pour terminer une séquence architecturale et signifier que ce qui est au dessus est différent et a un autre sens. Le traitement de cette architrave est une innovation extraordinaire. Certes, l’architecte antique n’invente pas, ex nihilo, l’arcature sur colonnes puisque celle du forum de Leptis Magna est contemporaine. Mais il transforme cet élément de l’entablement marqué dans l’histoire de l’architecture grecque et romaine par sa fonction structurelle de support en un dais arcaturé et couronné surmontant les statues. L’architrave est devenue un objet architectural poétique qui évoque les édicules de jardin des peintures pompéiennes. L’architecte antique utilise ici un procédé bien identifié : « Le dérapage de l’invention baroque tend à détruire l’articulation en la dispersant à l’infini » (Castex 1990, p. 300). 2.3.2. LA FRISE. La frise surprend car elle est dorique. Elle est analysable en termes de fonction et de forme. Fonctionnellement, au dessus de la couronne, on est dans un autre monde où l’expression 18 sémantique n’est plus majoritairement celle de l’architecture mais celle des décors et significations : l’architecture est au service de la représentation. Confronté à la nécessité de multiplier des images du Zodiaque l’architecte antique pense « surfaces et ruptures » et aboutit, naturellement, aux métopes et triglyphes. Formellement, on peut y voir une volonté de l’architecte antique de montrer ses connaissances encyclopédiques et d’utiliser un élément d’architecture d’origine grecque. Mais l’usage qui est fait ici du dorique, renvoi surtout à la diffusion des frises doriques du baroque hellénistique, attestée en permanence dans le baroque oriental et dont les monuments funéraires de Pétra sont un exemple bien connu. comme par exemple en ce qui concerne l’architecture funéraire, dans les références typologiques bien connues de Pétra. 2.3.3. LA CORNICHE. Nouvelle rupture, là où on attendrait une corniche dorique ellipsoïdale (avec des modillons, des gouttes, etc.), l’architecte antique déstructure le type et invente un volume complexe qui projette les figurations dans l’espace et, là aussi, privilégie les décors et les significations. En orientant la façade principale du monument sur l’équinoxe d’été, il renvoie les quatre personnages d’angle représentant les saisons sur les points cardinaux. Il créé un débord important pour que la représentation soit mise en valeur par un effet surplombant. L’architecte antique manipule l’espace en créant ce volume étrange, avec sa base ellipsoïdale et son faîte carré tout en respectant les tracés fondamentaux. Le décor est lui aussi surprenant (figure 12) : les quatre personnages, placés aux quatre angles du monument, ont des ailes qui viennent recouvrir les moulures d’une corniche assez similaire à celle du podium. Ceux qui, pour éviter d’utiliser le terme « baroque », le caractérisent comme Figure 12 : Façade sud-est de la corniche de l’édicule. mixtilinéaire ou curviligne en trouveront ici un parfait exemple dans les mouvements des lits de plumes (et encore, je réduis l’inventaire aux parties proches des quatre personnages) : - Angle est. A gauche : descendant. A droite : horizontal puis descendant. - Angle sud. A droite descendant en partie basse, horizontal au dessus, courbe descendant en partie haute. Sur le deuxième bloc situé à droite, second lit remontant en partie basse. Sur le troisième bloc : le 3e lit est remontant et le quatrième est descendant. A gauche, horizontal. 2e lit : une plume descendante. - Angle ouest. A droite : horizontal en partie basse, descendant en partie haute. A gauche, rien. Montant sur le bloc suivant. - Angle nord. A droite : montant en partie haute. A gauche : plongeant. 19 Le baroquisme de cette partie de la corniche est analysable en termes de mouvement et lumière. Au fil du jour, les ombres jouent avec l’ondoiement des lits de plumes caressées par le vent et les corps des personnages en leur donnant vie. Vus en contre plongée, on les voit voler et cet effet est subtilement renforcé par la profondeur donnée par le second plan des parties moulurées qui apparaissent sous les lits de plumes. La modénature de la corniche comprend un listel assez haut chargé d’assurer le raccord de volume entre l’ellipse et le carré, un quart de rond droit décoré d’oves, un réglet à double congés inégaux, un « s » orné d’oves ou de rais de cœur (?), une bande à denticules, une doucine droite avec des rais de cœur et un réglet. Cette corniche à doucine est ambigüe : elle ressemble aux cimaises d’architraves baroques que l’on voit à Petra mais amplifiée par le volume de la corniche. Elle n’est une corniche que parce qu’elle est dans sa situation dans l’entablement. Seulement perceptible dans les parties supérieures et centrales des façades elle est le seul élément avec modénature de tout l’entablement. A la manière de ces édifices qui animent les lointains des peintures baroques, elle vient rappeler que l’on est encore dans le domaine de l’architecture. On peut y lire « l’ancien langage » mais il est détourné au second degré puisque la seule référence « classique » est une modénature d’architrave baroque. Autre effet baroque, il est intéressant de relever le trompe l’œil situé dans la partie centrale de la façade sud-est (les autres façades sont trop dégradées pour que l’on puisse vérifier sa généralisation). En effet, en examinant attentivement la façon de corniche apparaissant sous les plumes, on remarque que si les trois moulures supérieures sont horizontales, la quatrième (le réglet à double congés) est étroite au centre et s’élargit latéralement avec une courbe plongeante que suit le quart de rond décoré d’oves placé au dessous. Situé à l’articulation du passage du volume ellipsoïdal au parallélépipède du listel supérieur, ce dessin donne l’impression, lorsqu’il est vu depuis le sol, que la partie inférieure de la mouluration suit la courbure du lit de pose de la corniche (voir la figure 12). 2.4. LA COUVERTURE. L’architecture de la couverture est, elle aussi, œuvre de culture : « Il importe…de rappeler que la superposition pyramide-chapiteau est celle même que Vitruve, transmetteur en ce domaine de la pure tradition hellénistique, préconise pour la couverture des temples ronds périptères… » (Gros II 2007, p. 404). Sa conformité au type et sa simplicité signalent qu’elle n’est plus le lieu de l’affrontement de modèles. Par contre la partie végétale du chapiteau sommital est classée comme baroque puisque typique des chapiteaux « asiatiques » de l’époque sévérienne : « ...la trame des deux couronnes d’acanthes n’ayant pas la possibilité de se poursuivre au dessus des hélices et des volutes, celles-ci se réduisant à de simples listels issus de calices si proches de la lèvre du calathos qu’ils n’ont plus de tronçon vertical et se déploient selon une courbe très aplanie » (Gros II 2007, p.491). On le verra ci-dessous qu’il est possible que l’autre partie de chapiteau et l’objet qui le surmontait soient des éléments baroques. 2.5. LE PODIUM. Le podium a été restauré avec le souci de lui donner une géométrie la plus parfaite possible qui semble, au premier abord, lui faire échapper au baroque (figure 13). J’étudierai successivement les parties courantes puis la baie de la chambre funéraire. 2.5.1. LES PARTIES COURANTES Dans le modèle du mausolée-tour, la fonction du podium est de surélever. Au sein des types, on constate qu’il ne répond à aucune règle précise, allant d’une quasi nudité à un décor extrêmement foisonnant car les concepteurs avaient une grande liberté pour le traiter. L’architecte antique de Gasr ed douirat établit un schéma spatial simple. Le podium devant supporter un édicule ellipsoïdal, son plan est rectangulaire. La porte de la chambre funéraire est en façade principale. Ce 1er étage est délimité en partie inférieure et supérieure par une base et une corniche, imposantes et soignées. 20 La base (assise 04) repose sur le soubassement. Sa mouluration est composée d’une plinthe, d’un demi-rond, d’une baguette, d’un talon renversé, d’un quart de rond et d’une baguette. Au dessus, une surface plane avec un congé inférieur et une douzaine de centimètres de haut se poursuit jusqu’au lit d’attente des blocs : ce n’est pas une plinthe car elle est dans le même plan que les parements qui la surmontent. Je la désignerai comme un muret. Le profil élégant de la base est très proche du type de l’ordre dorique romain tel que codifié par Vignole. Je n’en connais pas de typologie antique mais je note que c’est exactement le même profil que Sangallo a placé en partie inférieure des piliers de la cour du Palais Farnèse à Rome, piliers auxquels est associé un ordre dorique. Il est donc plausible que cette base (même profil et même emploi) soit dorique et cela ne serait pas étrange sur ce monument, rappelons-nous la frise du 2ème étage. La séquence du podium se termine par une corniche moulurée (assise 11) composée de bas en haut d’une fasce, d’un quart de rond à décor de cordage, d’un filet, d’une doucine inversée, d’un bandeau denticulé, d’un quart de rond décoré d’oves, d’un cavet et d’un listel. Elle est d’une belle modénature atténuée et comme celle de l’édicule rappelle les architraves que l’on voit à Pétra dans un volume dont le débord est cependant amplifié. L’ambigüité de cette corniche est à mon avis fonctionnelle : elle est juste une délimitation supérieure du podium et son faible débordement, réduit par rapport à celui d’une corniche corinthienne, vise à ne pas occulter le regard du spectateur vers l’édicule. Toute la partie restante du podium est dans le même plan, celui défini par le muret inférieur, à l’exception du léger débord des chapiteaux (tailloirs et crosses) et d’une petite partie de l’encadrement de la baie de la chambre funéraire. Examinons maintenant les relations entre ses divisions, essentiellement l’alternance de niches et de pilastres. Les pilastres ne sont pas partie d’un ordre car ils n’ont pas de base : leur ornement, des rinceaux émergeant d’une feuille d’acanthe, est posé directement sur le muret. Vus ainsi, les pilastres ne font que servir les niches. L’alternance des niches et pilastres est donc une nouvelle Figure 13 : Détail de la façade sud-est du podium. 21 expression du modèle des niches encadrées. Et puisque le podium est une surface quasiment plane avec base et corniche, ce modèle est mixé ici avec le modèle habituel du podium : celui réduit à la fonction de surélever. Verticalement et latéralement les niches sont moulurées avec une doucine et un réglet. En partie inférieure concave, juste au dessus du muret, elles ont une mouluration (qui apparait donc en creux) avec une plinthe, une baguette et un listel chanfreiné. Latéralement, la plinthe est dans le même plan que les rives des pilastres. Exprimé autrement, on retrouve en partie inférieure des niches du podium la même mouluration que l’on a vu au 2e étage, mais cette fois elle est à l’envers, dirigée vers l’intérieur. Les culs de four de la frise architravée sont reportés au dessus des chapiteaux, c'està-dire dans la même position qu’au 2e étage. Là aussi leur décor est inversé : ceux de l’édicule sont ornés de godrons (en relief) et ceux du podium le sont de feuilles d’eau (en creux). L’inversion des dispositions des niches suggère donc un «passage » inverse de celui de l’édicule c’est-à-dire de l’intérieur vers l’extérieur. Les chapiteaux méritent attention. Le rang d’acanthes est composé de deux feuilles angulaires montant jusqu’aux crosses qui recouvrent deux feuilles centrales plus petites dessinées de manière à ce que leur rive supérieure soit en continuité de courbure avec celle des feuilles d’angle, formant ainsi une espèce de calice. Dans l’espace central résiduel on voit quatre « tigettes » renflées au dessous d’un rétrécissement et évasées au dessus, faisant peut être référence à une tigette de caulicole qui n’aurait qu’un lien de serrage. De ces « tigettes » s’échappent deux feuilles qui s’enroulent en crosses angulaires, deux fines crosses médianes opposées et la tige d’un fleuron axial sculpté sur le tailloir cintré. Ce dernier a un listel supérieur séparé par un filet à congé d’un deuxième listel légèrement oblique. Même si le rang de feuilles n’a pas les mêmes proportions, ces chapiteaux évoquent immédiatement les chapiteaux baroques d’Alexandrie et en particulier le type 4 du classement de K. Ronczewski dont C. Hellmann signale la diffusion vers la Libye en précisant que le motif des chapiteaux ptolémaïques a « imprim[é] sa marque au décor architectural de la Cyrénaïque, où l’on s’est contenté d’imiter tardivement les formes alexandrines du corinthien » (Hellmann 2002, p. 174). Architecturalement, ils ne sauraient faire partie d’un ordre en se combinant avec des pilastres sans bases. Le détournement de l’ordre se poursuit sur le pseudo entablement. En effet, si l’on considère la frise architravée comme une architrave, les niches qui la rythment lui enlèvent son sens structurel, et, si on la considère comme une frise, on est obligé de remarquer qu’elle est plus en relation avec les niches qu’avec les pilastres. Enfin la corniche moulurée comme une architrave est celle du podium et non celle des pilastres dont elle n’a pas les proportions. On retrouve sur le podium toutes les méthodes du baroque. Le podium, dont le modèle est une surface plane encadrée par une base et une corniche, est tellement travaillé qu’il donne l’impression d’être un volume complexe. En tant que modèle le podium n’existe, en réalité, que sur la quinzaine de centimètres de hauteur du muret. Le modèle des niches encadrées le détourne de sa fonction et, au sein d’une surface richement décorée, le vide vertical qui est celui des niches crée un mouvement qui guide le regard vers l’édicule. Il n’y a pas d’ordre : la base et la corniche du podium ne sont pas, théoriquement, compatibles ; les pilastres sont incomplets et ce qui devrait être leur entablement est détourné. Enfin les éléments de l’ordre sont accumulés : base dorique, corniche pseudo-ionique hellénistique et chapiteau corinthien ptolémaïque faisant ainsi la preuve du savoir baroque oriental de l’architecte antique et de sa connaissance de références vieilles, parfois, de plusieurs siècles. Le décor du podium n’est qu’un collage d’éléments architecturaux disparates et pourtant, à première vue, l’effet de « translucidité » du baroque fait croire à l’existence d’un ordonnancement. 2.5.2. LA BAIE DE LA CHAMBRE FUNERAIRE. La baie de la chambre funéraire et son décor méritent un examen approfondi. L’ouverture a la largeur d’une niche. Elle ne rompt pas le rythme des pilastres grâce à un procédé : le chambranle mouluré vient se superposer, avec la même largeur, sur le plat de rive des pilastres. La relation dominante de la baie sur les pilastres est la même que celle des niches. Elle est accessible par une marche taillée dans la base du podium. A 25 cm au dessus du linteau de la baie, le chambranle se retourne horizontalement sur quelques centimètres. De chaque côté il est surmonté par ce qui ressemble à deux chapiteaux reliés par la continuité des abaques creusés en courbe en partie 22 centrale. Mais ces chapiteaux ont un décor de corniche avec des perles et pirouettes, des denticules, des rais de cœur et, sur le cavet, un ornement de corde qui dérive des cobras égyptiens. Il s’agit donc d’une corniche tronquée pour laquelle on donnera une explication en troisième partie de l’article. Le procédé est baroque et l’ambiguïté a certainement été voulue par l’architecte antique car on peut trouver à Qsar el Bint, à Pétra, une corniche intégrant des chapiteaux de pilastres. En creux, entre les « chapiteaux/corniche », montant jusqu’à l’abaque de liaison, il y a un décor de galets ( ?) placé en fond d’une tête généralement considérée comme étant celle d’ une Gorgone. Au dessus, un grand cartouche donne le texte de l’épitaphe. Ses anses pénètrent dans les niches. Enfin, superposée au cartouche, placée sur le fond de la niche qui apparaît ici, est figurée une corbeille pleine de volumina. La niche se poursuit jusqu’à la frise architravée avec son habituel décor et son personnage féminin. Alors que, à l’exception de la corniche/chapiteaux et de la tête de Gorgone dégraissée dans le même bloc, tout se passe sur quelques centimètres d’épaisseur de pierre, un travail de l’espace figure des superpositions multiples : chambranle/pilastre, galets/linteau du chambranle, Gorgone /corniche et écailles, cartouche/pilastres et niches, corbeille et niche. L’effet de trompe l’œil projette la baie de la chambre funéraire et ses éléments associés au premier plan du podium. J’ajouterai que cette expression typiquement baroque est renforcée par l’ambiguïté de certains de ses éléments (corniche/chapiteaux par exemple) et la composition de l’ensemble en bulbe, forme qui aura un grand usage chez les baroques des XVII et XVIIIe siècles (voir figure 13). 2.6. GASR ED DOUIRAT : UNE ARCHITECTURE BAROQUE. Les analyses faites dans ce chapitre montrent que Gasr ed douirat, tel que je le restitue, est une architecture baroque. Ses caractéristiques les plus remarquables sont : - le schéma spatial avec la combinaison du rectangle, de l’ellipse, du carré et du cercle, - la création d’un temple périptère à plan ellipsoïdal et à corniche carrée sans doute très rare dans le monde romain. - la présence du modèle des niches encadrées sur le podium où la fonction primordiale d’encadrement des pilastres est confirmée par l’absence de base et d’entablement obéissant à leur ordre et, en même temps, son démontage lorsque la niche échappe aux pilastres en creusant la frise architravée. - l’épuisement du langage classique pour les modèles des niches encadrées et de la tholos de l’édicule. On les voit apparaître conjointement (assise 13), disparaître pour le premier dans le grand geste architectural des voûtains surplombants, s’affirmer progressivement pour le second, marquer une interruption pour s’effacer devant le programme décoratif signifiant, se prolonger par une corniche spectaculaire et enfin se terminer dans une couverture stéréotypée. - le processus de transformation du langage architectural qui concerne l’architrave de l’édicule. A sa fonction structurelle première (poussée ici aux limites de la résistance mécanique), sont ajoutés le double rôle d’arcature d’une tholos et de projection spatiale des culs de four. Par ailleurs la couronne de feuillages de l’architrave en fait un dais pour les statues et casse en deux séquences distinctes l’ordonnance habituelle d’un entablement. - la subtilité et la puissance des effets de mouvements obtenus, sur tout l’édifice, par la multiplication des fausses perspectives, des changements de plan, des jeux d’ombres et les nombreux détournements des ordres ou de leurs éléments. Il ne fait plus de doute, maintenant, que Gasr ed douirat est une œuvre d’architecte fortement influencé par une esthétique baroque dont beaucoup d’archéologues considèrent comme étant d’origine « orientale ». Il est donc intéressant de caractériser l’architecture de Gasr ed douirat en élargissant l’étude aux parties de la décoration qui ont un rôle dans la définition des espaces et des détails. 3. QUEL BAROQUE ? 23 La recherche typologique est un excellent moyen de comparaison et donc de caractérisation. Elle est facilitée par l’inventaire des mausolées-tour libyens publié par P. Clauss dans lequel elle écrit à propos de Gasr ed douirat : « Quelques exceptions, situées sur la côte et dans le djebel (Leptis et EsSenema) marquent le début d’une période d’innovation, durant laquelle les mausolées vont présenter de nombreuses variantes et faire preuve d’originalité, jusque loin dans le pré-désert » (Clauss Balty 2012, p. 147). 3.1. TYPOLOGIE. 3.1.1. TYPOLOGIE ANTERIEURE. En restreignant le champ d’observation aux limites géographiques actuelles de la Libye et en ne prenant en compte que les constructions antérieures ou contemporaines on ne peut proposer que deux axes de recherche de sous-types : l’une sur le style architectural baroque, l’autre sur une similitude du décor. La Libye a été influencée par le baroque ptolémaïque et notamment « …à Cyrène, par exemple, dont les façades de tombes rupestres mettent en jeu tous les motifs de l'architecture d'apparat créée par les Macédoniens et adoptée par les Alexandrins, ou encore au “ Palais des Colonnes ” de Ptolémaïs… » (Martin 1987, p. 425). Il s’agit là d’un baroque défini dans le cadre de la séparation forme/fonction, d’un proto-baroque. Par contre, trois obélisques de Sabratha sont classés comme baroques. Ils étaient assez similaires au Mausolée B (début du IIe siècle av. J.C.) dont la restauration montre une grande habileté de composition ou de dessin et un riche décor égyptianisant. Cette typologie est brève et peu utile car tant les mausolées curvilignes de Sabratha, d’une que l’énorme construction de Ptolémaïs n’ont rien à voir avec Gasr ed douirat. Tout comme les types des tombes de la nécropole de Cyrène qui ont pu, cependant, être des vecteurs de diffusion de la culture alexandrine. La recherche typologique par similitude de décor ne donne, au premier abord, que peu de résultats. L’obélisque de Ghirza, de style sévérien et donc contemporain, reprend, et c’est le seul détail architectural similaire, des arcatures sur la frise du podium sans que l’on puisse y associer des niches encadrées. Par contre le mausolée-tour d’EsSenema, défini ci-dessus par P. Clauss comme innovant, est intéressant. Situé dans le djebel Nefousa, c’est une construction imposante, de 20 mètres de hauteur environ datée par O. Brogan « ...du début du IIIe siècle, époque à laquelle Septime Sévère régla les troubles frontaliers et fit installer des postes militaires le long de la route du djebel» (Clauss Balty 2012, p. 194). Il se trouve à 30 km du poste militaire d’Ain Wif, dans un lieu sans agglomération ou établissement agricole reconnu. Son schéma spatial se compose d’un petit soubassement droit, d’un podium bas et carré de 4,5 m de côté, d’un premier étage richement décoré aux murs aveugles et d’un second étage périptère avec, sur chaque façade, cinq colonnes corinthiennes très rapprochées, surmontées, peut être, d’une couverture conique à résille. Il ressemble au mausolée des Julii de St Remy de Figure 14 : Le mausolée de Es-senema. Photo Provence par sa division en trois étages dont il Gordontour (site internet). reprend les proportions relatives en hauteur. Son 24 modèle est romain « classique ». Mais certains éléments ne le sont plus : les dispositions du 2e étage, les traditions puniques de taille de pierre et de l’implantation de la chambre funéraire sous le soubassement, le décor du 1er étage. Des détails de l’architecture et du décor rappellent, par leur forme et leur exécution, ceux du podium de Gasr ed douirat (figure 14). On y retrouve une division des façades par quatre pilastres dont deux corniers, une frise architravée alternant des bustes et des arcs archivoltés enserrant une coquille et une fausse porte dont l’encadrement richement mouluré est surmontée d’un cartouche faisant disparaître les fûts des pilastres puis de deux chapiteaux. Suite à l’étude de Gasr ed douirat, on comprend que ce qui y rompt la norme classique est baroque. Le décor du premier étage évidemment puisque les similitudes sont très fortes. Mais aussi la colonnade pycnostyle du 2e étage car, établie aux limites du resserrement, elle inverse l’effet classique qui est de produire un élancement. Il ne fait pas de doute que les deux mausolées ont été conçus par le même architecte. Es-Senema étant plus proche du « classique » et son podium portant un décor plus simple, je propose de lui donner une antériorité en considérant qu’il est une esquisse, un brouillon de celui de Gasr ed douirat. 3.1.2. TYPOLOGIE POSTERIEURE. Il convient maintenant de vérifier les relations entre Gasr ed douirat ou Es-Senema et les mausolées tripolitains de la Djeffara, du djebel et de Ghirza évoquées par P. Clauss en introduction de cette partie. Je vais distinguer les influences portant sur l’architecture de celles concernant les décors. L’inventaire de ces mausolées-tour établi par P. Clauss Balty (P. Clauss Balty 2012) permet de constater que leurs architectures varient peu. L’obélisque, d’inspiration punique, est le modèle dominant car sept sont recensés au IIe s. (sur un total de huit vestiges) et au IIIe s. ils sont encore douze sur seize c’est-à-dire à peu près la même proportion. A Ghirza, plusieurs temples assez semblables dans leur architecture sont placés les uns à côté des autres. On peut trouver plusieurs explications à ce conservatisme. Sur la côte, le maintien de la culture punique peut être considéré comme un refus de l’acculturation romaine. A Ghirza on peut y voir un souci d’enracinement dans le passé pour justifier leur différenciation sociale et leur système d’oppression de la part de bénéficiaires d’un proto-féodalisme reconnaissable aux maisons fortifiées entourées d’habitats servants caractéristiques du pré-désert. Enfin la reproduction des modèles est la règle car ces architectures sont des œuvres d’entrepreneurs qui se contentent de copier, avec quelques variations décoratives, les mêmes modèles, en utilisant pour cela des ouvriers itinérants 12. Quelques mausolées (œuvres d’architectes ?) échappent à cette standardisation et peuvent avoir été inspirés par des détails de Gasr ed douirat et Es-Senema. Le mausolée obélisque n°1 du Wadi Mesueggi est assurément baroque avec un podium délimité par des pilastres d’angles surmontés par des chapiteaux tous différents, un édicule formé de trois rangées de trois colonnes libres ressemblant à celui de Es-Senema, un entablement exagérément haut et étroit et une couverture pyramidale. Je considère donc que sur les mausolées existants encore en Tripolitaine, l’architecture de Gasr ed douirat n’a pas été imitée. Un texte de P. Romanelli, quoique fortement daté, précise les similitudes des décors : « ...[l]es formes [artistiques locales] sont plus que jamais manifestes et prédominantes sur les formes traditionnelles, dans les édifices de caractère privé, surtout dans les édifices sépulcraux, le mausolée de Gasr ed Douirat étant le plus intéressant d’entre eux. Si l’on n’a pas encore ici les traits de l’art local aussi caractéristique des monuments de Girzah et du Djebel, nous avons toutefois ici la première manifestation particulièrement notable de la transformation et contamination qu’il a fait des motifs traditionnels. La feuille d’acanthe, le sarment de vie enroulé en spirale se diffusent et changent dans le développement de nouvelles formes ; dans les frises, des roses et des fleurs stylisées sont alternées avec des petites têtes dans des coquilles, avec des figures bizarres et monstrueuses, qui semblent préluder à celles, épouvantables et fantastiques, de la décoration romane ; les dessins ont la fruste ingénuité des œuvres des artistes primitifs et incultes » (Romanelli 1925, p. 80-81) 13. Un constat assez similaire est fait par P. Clauss Balty. Pour elle les mausolées du 12 Sur ces deux derniers sujets voir S. Fontana, Il predeserto tripolitano : mausolei e rapprezentazione del potere, Libya Antica NS III, 1997. 13 Ma traduction est volontairement littérale pour éviter des pertes de sens. 25 pré-désert tripolitain présentent, à partir du début du IIIe siècle, une évolution historique quantitative et qualitative de leurs décors qui aboutit, à Ghirza, à une prolifération d’images qu’elle qualifie d’hétéroclites. Ces textes définissent donc l’esthétique du décor de Gasr ed douirat comme témoignant du début de la dégradation des thèmes classiques avant qu’ils ne se désagrègent totalement dans un art identifié comme « local » ou, plus sociologiquement dit, dans un art populaire. Les typologies confirment donc que Gasr ed douirat n’a pas de racines architecturales locales, que son architecte, baroque et novateur, a travaillé dans le djebel Nefousa sous Septime Sévère, que son architecture a été peu imitée et que ses décors pourraient être l’expression esthétique d’avant-garde d’un « art local » des classes inférieures de la société tripolitaine. 3.2. MODERNITE SEVERIENNE ET ART PLEBEIEN. La datation des deux mausolées est importante car Septime Sévère, originaire de la région de Leptis Magna, est l’auteur de réformes politiques et artistiques visant à lui fournir un appui des classes inférieures. Parmi les changements qu’il a provoqués je vais m’intéresser à la modernité architecturale et à l’art « antiphysique ». Il existe une réelle modernité architecturale sous les Sévères avec, à Leptis, des innovations remarquables comme le dégagement des colonnes de l’arc de triomphe, l’arcature sur colonnes du forum, les absides ouvertes de la basilique, la structure même de cet édifice tellement élancé qu’il est difficile de comprendre comment il a pu tenir, le nymphée couvert en quart de sphère, bien sûr baroque, et la grande colonnade à la mode syrienne. Ces innovations et leur diffusion au cours du IIIe siècle constituent, pour P. Gros, un changement radical : « Leur importance croissante témoigne seulement, mais c’est pour l’histoire de l’Empire – et pas seulement celle des formes – un phénomène capital, de la prééminence des créateurs orientaux sur ceux du domaine proprement romain » (Gros II 2007, p. 491). G. Charles Picard associe les réformes politiques « égalitaires » de l’Empereur d’origine libyenne à l’apparition, sur certains monuments officiels, d’une forme d’art nouvelle qu’il nomme l’art « antiphysique » : « …comme l’a brillamment démontré R. Bianchi Bandinelli, l’art antiphysique de l’Antiquité tardive procède de l’art plébéien qui utilisait les figures empruntées à l’art grec, mais rompait les relations spatiales les unissant et en venait même à détruire la structure interne de ces figures ; ce processus de décomposition de la forme est déjà complètement réalisé dans des œuvres d’art plébéien provincial datant du début du IIe siècle… » 14. Il retrouve cet art antiphysique sur la porte des Argentiers mais, cette fois il lui attribue comme origine les « stèles votives de la bourgeoisie africaine, dont la famille impériale était issue »15. Curieusement, l’art sévérien est relié à l’acculturation des classes sociales intermédiaires libyennes. Sans aller plus loin dans cette étude, je note que l’art antiphysique nait de la déformation plébéienne de l’art « classique » et qu’il est exprimé sous des formes extrêmement variées car il est associé à des phénomènes de colonisation culturelle. Je retiens donc que la modernité sévérienne est le fait de créateurs « orientaux » et qu’elle s’appuie sur un art d’origine « plébéienne ». Or j’ai déjà évoqué ces deux thèmes. Dans la deuxième partie j’ai été confronté aux sources « orientales » du baroque de Gasr ed douirat. Dans la troisième partie, la typologie m’a amené à traiter d’art plébéien pudiquement appelé art « local ». Je peux donc, maintenant, caractériser l’architecture puis le décor du mausolée des Zurgem. 3.3. UNE ARCHITECTURE D’ORIGINE ORIENTALE DONT LE STYLE BAROQUE EXPRESSIONNISTE EST PROFONDEMENT LIE AU CONTEXTE SEVERIEN. En examinant les vestiges, les archéologues n’ont jamais remis en cause l’identité tripolitaine de Gasr ed douirat. Qu’en est-il exactement pour son architecture? On n’y retrouve pas d’influences locales à l’exception de l’usage du pied punique. L’architecte l’a, certes, utilisé pour son ordonnancement mais ce choix technique est certainement plus lié à une proposition de l'entrepreneur et à une habitude de carrière qu’à une réelle volonté du client ou de 14 G. Charles Picard, L’art romain, in ROME ET EMPIRE ROMAIN in E.U. 1989, 20, p. 263. 26 l’architecte. Dans le corpus des monuments funéraires, à l’exception d’Es-Senema qui est du même architecte, Gasr ed douirat, tel que je le restitue, est exogène par son architecture baroque. Or cette dernière est, par contre, proche des œuvres réalisées sous Septime Sévère à Leptis Magna et dont il est attesté que les maîtrises d’œuvre sont étrangères. La parfaite connaissance du style baroque et des éléments du vocabulaire hellénistique comme les chapiteaux du podium, les corniches et la frise dorique de l’édicule sont des critères suffisants pour déduire que l’architecte de Gasr ed douirat est originaire des provinces de la partie orientale de la Méditerranée. Il reste maintenant à approfondir la nature du baroque de l’édifice dont j’ai dit ci-dessus qu’il n’a pas la qualité esthétique du baroque classique romain mais que l’on peut plus prosaïquement qualifier de lourdaud. Les 14 cm de différence qui affectent les dimensions du podium ou les axes de l’ellipse du mur de l’édicule ne jouent aucun rôle dans cette impression. Elle nait d’abord des proportions des colonnes et plus spécialement de la hauteur « dorique » des fûts qui accentue leur épaisseur. Ce n’est pas le résultat de l’exécution malhabile d’un « atelier local » car l’architecte montre à Es-Senema qu’il sait projeter des fûts corinthiens élégants. Ici, cette colonnade est là pour encadrer au plus près, latéralement, les statues et, en partie supérieure, faire en sorte que leurs têtes soient placées sous la courbe surbaissée des arcades de l’architrave qui amplifient les effets d’ombre et de lumières. Un autre sentiment de lourdeur vient des proportions de l’entablement. L’architrave multiplie des arcatures à volume conique dont la directrice ellipsoïdale est plus pesante qu’un cercle avec pour but, sans doute, de réduire sa hauteur. Malgré cela les arcatures la rehaussent jusqu’à lui donner quasiment une hauteur double de la mince frise qui la surmonte. Et cette dernière est écrasée par la volumétrie spectaculaire de la corniche qui trouble car elle est hérétique. L’architecte a, ici, appliqué la méthode baroque consistant à «explorer les limites» de la liberté d’ordonnancement des entablements (voir ci-dessus en 2.3.) en n’ayant aucun respect pour un quelconque système de proportions, surtout pas celui du baroque classique, et ceci pour donner la primauté « au message religieux, idéologique ou symbolique » et amplifier « les contrastes entre l’ombre et la lumière ». Certes, cette méthode est celle du baroque. Ce qui change ici c’est que la lourdeur de l’édicule de Gasr ed douirat est le résultat délibéré de la destruction ou de la déformation de la beauté formelle du baroque classique. Je qualifie ce baroque d’expressionniste15. L’application de ce concept me semble complètement liée au contexte sévérien du chantier de Leptis. En effet, travaillant à Leptis dans la région natale de l’Empereur, l’architecte a très certainement débattu avec ses confrères « orientaux » du chantier de la ville des questions de destruction de la forme et de modernité qui hantent tous les nouveaux bâtiments. J’en veux pour preuve l’opposition entre les deux constructions baroques que sont le nymphée et l’arc tétrapyle. En effet si le premier, au moins dans les parties encore visibles, respecte parfaitement le modèle baroque officiel, le second présente au niveau de la frise d’étranges frontons où l’on peut lire une triple destruction « expressionniste » de la forme des entablements baroques hellénistiques. La première, en isolant le fronton toujours associé à deux parties circulaires. La seconde en lui donnant un angle aigu alors qu’il qui est toujours obtus. La troisième en le pivotant pour lui enlever sa position frontale habituelle. On pourrait même ajouter un quatrième détournement faisant cette fois référence à des arcs plus classiques : les frontons se trouvent à la place de statues ou d’avancées de l’entablement. Il convient, cependant, de relativiser l’impression de lourdeur que donne la restauration (fausse) du mausolée. D’abord parce que ma restitution est plus élégante. Ensuite car, pour ceux qui ont vu le monument antique achevé, peut-être mis en couleur, et qui savaient en décrypter les significations, l’architecture baroque disparaissait derrière sa fonction d’accompagnement et laissait la primauté aux statues et à l’histoire de mort et de renaissance qui, du podium au sommet du monument les entouraient. La séduction était dans la mise en valeur du message et non dans le support, l’architecture, dont la romanité dominante effaçait les détournements à la manière d’un riche écrin. En synthèse, je peux donc dire que Gasr ed douirat est une architecture d’origine orientale dont le style baroque expressionniste est profondément lié au contexte sévérien et en particulier à la destruction de la forme engagée par les réformes artistiques de cet Empereur. 15 Le terme a beaucoup été utilisé pour désigner un mouvement artistique du début du XXe siècle qui, en architecture se caractérisait par une distorsion des formes pour susciter de l'émotion. Le musicien Olivier Beaumont l’utilise pour distinguer les formes musicales tardives du baroque associées à la destruction de la forme. 27 3.4. L’ORNEMENT : UN ART PLEBEIEN DE LA GLOBALISATION CULTURELLE DE L’EMPIRE, UNE PROLIFERATION D’IMAGES ET UNE DECOMPOSITION SEVERIENNE DE LA FORME. En me limitant aux questions esthétiques je vais analyser trois des aspects de certaines parties de l’ornement : son expression d’une culture populaire, son foisonnement et son exécution. Les études typologiques ont montré que le décor était identifié comme exprimant une culture populaire. Elle témoigne d’abord du processus d’acculturation car elle est majoritairement de culture romaine et, comme cette dernière, puise ses éléments dans des horizons géographiques et historiques étendus. La statue de Cérès, par exemple, est au centre d’influences diverses. Elle est la copie d’un modèle grec suivant la pratique romaine. En Tripolitaine, Cérès est devenue une déesse punique depuis plusieurs siècles et reste une déesse locale (avec un temple à Leptis Magna) car elle est une des principales protectrices de l’Afrique. Un autre exemple concerne les influences hellénistiques. Leur reprise évoque le fond culturel populaire tripolitain influencé par la diffusion de l’art plébéien italique et que J.P. Morel considère comme « un art décoratif, ou privé, attaché aux modèles hellénistiques », celles qui découleraient de l’imitation des décors du baroque officiel romain et celles venant d’Alexandrie à travers la Cyrénaïque. Mais l’analyse architecturale a montré que la majorité d’entre elles correspondaient à un apport de l’architecte. L’expression de la culture populaire sur Gasr ed douirat est donc son œuvre ce que confirme la quasi absence de tripolanité : il n’y a pas de résidus puniques et la seule trace égyptianisante que l’on peut retrouver est incertaine, dans une modénature de la corniche de la baie de la chambre funéraire qui serait, suivant Romanelli, une évolution des frises de cobras (Romanelli 1925, p. 80). Je ne crois pas que l’architecte ait pu s’improviser créateur d’une parodie artificielle de l’esthétique plébéienne et j’en conclus que cette dernière est celle de sa culture d’origine. Si l’on en croit G. Charles Picard, on peut même préciser sa provenance : « On sait aujourd’hui que l’art non classique est limité en Orient à la zone désertique de la Syrie orientale »16. Si les archéologues n’ont jamais remis en question la nature tripolitaine de l’ornement de Gasr est douirat c’est que ce dernier se rattache à la « globalisation » culturelle romaine dont G. Charles Picard constate la diffusion dans toutes les classes populaires de l’Empire : « Ce courant, extrêmement étendu géographiquement et très varié ethniquement, trouve pourtant des modes d’expression étonnamment semblables entre eux »17. Cette unité culturelle fait que le décor de Gasr ed douirat, édifice urbain conçu par un architecte oriental, a pu être comparé à celui des monuments de Ghirza isolés dans le pré-désert et construits parfois plusieurs dizaines d’années après lui. Sur Gasr ed douirat, les décors sont proliférants : très fouillés sur le podium, nombreux sur l’édicule avec les statues, l’ornement des intrados, la totalité de l’entablement et même sur la couverture. Le foisonnement du décor pourrait se justifier par le souci de frapper le regard du passant afin de glorifier le souvenir des défunts et « contribuer ainsi, ne fût-ce qu’un court instant, à la survie individuelle de [ses] titulaires » (Clauss 2001, p. 1). Il ne serait qu’une réponse traditionnelle au programme établi par le commanditaire : « Plus qu’en aucun domaine la singularité, pour celui qui avait les moyens de se l’offrir, a constitué la valeur suprême. Hors de toute règle de convenance, et dans les limites relativement larges concédées en matière d’emprise au sol et d’élévation, la recherche de l’insolite, la surenchère dans la variation sur tel ou tel thème, la mise en œuvre plastique et iconographique de messages explicites, ou au contraire cryptés, selon les périodes, les catégories sociales et les niveaux culturels ont guidé les propriétaires » (Gros II, 2007, p. 380). Cette justification aurait été opérationnelle si l’on avait trouvé quelque raison faisant du commanditaire l’acteur majeur de la conception décorative du mausolée. Or, il n’en n’est rien puisqu’on a vu que l’architecte reprenait, en les perfectionnant, les décors de Es-Senema. La prolifération de l’ornement de Gasr ed douirat est donc une création spécifique de l’architecte. Sa richesse et sa complexité prennent leur source dans sa culture baroque : « L’omniprésence des images…sous-entend une politique des images. Le propre de l’image baroque, c’est qu’elle suspend 16 17 G. Charles Picard, L’art romain, in ROME ET EMPIRE ROMAIN in E.U. 1989, 20, p. 263. G. Charles Picard, L’art romain, in ROME ET EMPIRE ROMAIN in E.U. 1989, 20, p. 262. 28 les facultés intellectives ; l’image ne démontre pas, elle montre, elle incite à des actes, elle excite à certaines pratiques réelles et concrètes » (Castex 1990, p. 278). Elle obéit à des règles de composition précises. Sa disposition sur le monument est contrôlée dans un jeu de pleins et de vides (très net sur le podium ou la partie inférieure de l’édicule) et dans une hiérarchie de significations ou de compléments à ces significations. La prolifération est un choix esthétique de l’architecte. Si l’esthétique de l’ornement de Gasr ed douirat est qualifiée de populaire c’est aussi en raison de la nature de son exécution. Elle est surprenante par son manque d’unité. En effet, au cours du chantier, j’ai relevé quatre niveaux différents d’exécution classés en bon, moyen, mauvais et anormal. La qualité d’exécution est d’habitude sous la responsabilité de l’entrepreneur dans le cadre de la négociation des coûts des œuvres avec le commanditaire. Une partie des différences de traitement des décors provient certainement de la compétence inégale des sculpteurs des ateliers locaux (figure 15) à qui il a sous-traité l’exécution. Mais je suis persuadé que l’architecte en a conservé la maîtrise. Il était présent pour remanier la corniche de l’édicule et créer ce volume totalement baroque. Une exécution particulièrement hâtive peut expliquer la particulière maladresse des décors mais les représentations de l’automne et l’hiver s’inscrivent dans une gestuelle baroque. Le décor du podium, réalisé en fin de ravalement, témoigne aussi de sa constance dans la surveillance de Figure 15 : Exemple de « mauvaise » qualité des chantier : il est évident qu’il était là pour faire sculptures sur un cul de four. Photo P. Clauss Balty. exécuter les niches du podium à l’envers ce qui a dû lui demander beaucoup de patience tant cette façon devait être incompréhensible pour les ouvriers. Enfin il est certainement intervenu pour débaucher, sur le chantier du forum de Leptis Magna, le ou les bons sculpteurs « asiatiques » qui ont conçus et taillés les rinceaux aux peuplements variés sur les pilastres du podium (figure 16). Ainsi examinée, la modulation sous contrôle des qualités d’exécution par l’architecte fait intégralement partie de sa conception baroque du monument en venant appuyer la recherche de l’expression dont on a vu qu’elle guide l’architecture et le foisonnement contrôlé du décor en fonction de l’importance des messages et des jeux de lumière. Les rinceaux de bonne qualité ne font-ils pas référence à ceux de la basilique ? La taille rude et grossière de la corniche n’est-elle pas là pour amplifier les jeux ombre/lumière et ombre/ombre sans cesse renouvelés au fil du jour et rendre vivants les mouvements des lits de plumes ? Au-delà de cette explication baroque de la modulation des qualités d’exécution, il faut relever que même procédé a été employé sur l’arc de Septime Sévère du forum de Rome où ont été observées trois tendances stylistiques : une Figure 16 : Exemple de « bonne » qualité de classicisante pour enraciner le décor dans sculpture des rinceaux du podium attribuée à un l’histoire, une picturale faisant référence aux sculpteur « asiatique » en façade sud-est du podium. décors populaires des triomphes et, enfin, une Photo P. Clauss Balty. dernière correspondant à l’art antiphysique mis en 29 relation politique avec les classes inférieures 18. La modulation sous contrôle des qualités d’exécution témoigne donc, de la part de l’architecte de Gasr ed douirat, d’une réflexion intellectuelle sur la recherche de la modernité d’expression de sa culture populaire globalisée imitant ainsi, sur un édifice privé, celle appliquée sur les monuments officiels des Sévères. L’ornement du mausolée est un art « plébéien » sans racines locales qui témoigne de la globalisation de la culture romaine dans les classes inférieures de l’Empire. Œuvre de l’architecte le décor accompagne et complète son architecture baroque expressionniste par sa proliférations d’images et son esthétique de décomposition de la forme inspirée par la modernité sévérienne. 3.5. CONCLUSION : GASR ED DOUIRAT : UN HAPAX ARCHITECTURAL ET DECORATIF Ainsi analysée, la cohérence de Gasr ed douirat réside surtout dans l’unicité de sa conception par un architecte au savoir encyclopédique, profondément imprégné de la culture architecturale romaine, maîtrisant parfaitement le baroque du fait de ses origines orientales, reprenant des innovations du chantier de Leptis et témoignant, par son influence sur l’esthétique de l’ornement et son contrôle des œuvres des exécutants locaux ou étrangers de ses racines culturelles populaires. En tant que créateur extraordinaire il a conduit une réflexion sur les réformes artistiques de Septime Sévère, certainement, facilitée par les débats contradictoires qu’il a pu avoir avec ses confrères du chantier de Leptis Magna. A partir de la pratique de la destruction de la forme instaurée par cet Empereur, il a inventé le style baroque expressionniste et s’est inspiré de la modernité sévérienne pour que l’esthétique des décors soit la quintessence de l’expression de la culture romaine populaire acculturée. A partir de concepts à la fois contradictoires et complémentaires comme sa culture baroque et la réflexion sur les qualités d’exécution, il a créé ce qui apparaît comme un archétype de la culture populaire du IIIe siècle. Gasr ed douirat n’est pas l’avant garde d’un art local. C’est ce dernier qui va évoluer dans le sens de la globalisation dont le mausolée est un premier témoignage, au moins en Tripolitaine. Tout au long de cette étude architecturale, j’ai relevé l’omniprésence de l’architecte. Elle est en contradiction avec ce que dit P. Gros des monuments funéraires, à savoir le rôle prédominant du commanditaire dans la conception et celui de l’entrepreneur dans l’exécution. Je crois avoir démontré que ce dernier a, au moins partiellement, été dépossédé de son chantier et je ne suis pas certain que le commanditaire ait bien maîtrisé toutes les subtilités de l’architecture et de l’organisation décorative de son mausolée qui, cependant, a du le satisfaire par son brio et son originalité. Je me demande même s’il n’a pas été sous influence. En effet, si Gasr ed douirat est postérieur à Es-senema comme je l’ai supposé, c’est l’architecte qui y a introduit les niches encadrées du podium esquissées auparavant, c’est-à-dire une symbolisation de la descente des âmes dans le monde terrestre avant leur remontée au ciel dans l’édicule. Il faut alors attribuer à l’architecte une intervention importante dans les messages développés dans la symbolique funéraire. Quoi qu’il en soit, Gasr ed douirat est le résultat de la rencontre exceptionnelle d’un commanditaire et d’un architecte appartenant aux classes populaires. Elle a abouti à la création d’un mausolée qui est à l’architecture populaire ce que sont les splendides monuments sévériens du centre ville de Leptis à l’architecture officielle. Même si la ruine d’un grand nombre de monuments funéraires ne permet pas de les reconstituer et même si des centaines de mausolées ont disparu, laissant ainsi peser le doute sur l’existence éventuelle d’édifices similaires, je crois que Gasr ed douirat est un hapax. Il me semble difficile, en effet, de retrouver ailleurs la réunion des conditions qui ont conduit à son édification : l’appartenance de son concepteur d’origine orientale, l’architecte, aux classes populaires, la liberté quasiment totale dont il semble avoir bénéficié de la part de son riche commanditaire et l’élan culturel produit, dans sa ville d’origine, par l’application des réformes artistiques de Septime Sévère. Cet article justifie donc pleinement l’appréciation énoncée par P. Clauss : Gasr ed douirat est « un témoin de la grande architecture funéraire tripolitaine…Par ses caractéristiques il constitue un maillon important pour la compréhension de la diffusion de ce genre de monuments funéraires dans 18 Voir M. Bussagli (sous la direction), L’art de Rome, Edition Place des Victoires, 1999, p. 139. 30 les pays du bassin méditerranéen et peut être considéré comme l’un des exemples les plus imposants de tous ceux actuellement connus » (Clauss 1999b, p. 2) 19. 4. GASR ED DOUIRAT, UN MONUMENT MITHRIAQUE. Mon article aurait du s’interrompre à la fin de la précédente partie. Toutefois il est difficile d’étudier un tel monument pendant plusieurs années et de ne pas se poser la question du sens de son décor. Bien que mes connaissances des religions romaines soient extrêmement sommaires, je pense avoir trouvé des preuves que Gasr ed douirat est un monument mithriaque. Je les expose ici car elles ne sont pas des constructions hypothétiques plus ou moins établies mais des images c’està-dire, selon R Turcan, le seul moyen d’identifier la présence au mithracisme sur un monument puisqu’il est une religion du secret. Ces images se trouvent dans les parties supérieures des deux pilastres de la façade sud-est du podium. L’iconographie du pilastre droit (voir figure 16) est incomplète puisque le bloc est fracturé. Comme elle est difficile à comprendre je l’ai colorée et je présente le bloc horizontalement pour en faciliter la lecture (figure 17). L’élément principal est un grand serpent dont les courbes prolongent celles Figure 17 : Le bestiaire de la tauroctonie et le grand serpent : mise en couleur des détails du bloc figure 16. du rinceau du pilastre. Sa tête avec de grands yeux et une bouche ouverte qui lui donne un regard souriant vient se glisser sous la tête du taureau (en rouge) dont on distingue deux petites cornes et une grande oreille. Situés dans le registre au dessus du taureau, un corbeau (en bleu clair) vient becqueter le grand serpent et au dessous on voit un chien (en jaune) avec la bouche ouverte. Près de l’œil gauche du taureau et semblant se glisser sous sa corne il y a un petit serpent (en violet) malheureusement interrompu par la fracture du bloc. Enfin, cachant l’œil droit du taureau et posé sur son crâne on remarque les six segments de la queue d’un scorpion (en vert) dont le corps a 19 Je veux, ici, très chaleureusement remercier Mme Clauss Balty qui m’a aidé tout au long de cette étude par sa connaissance de Gasr ed douirat en particulier et des mausolées-tour en général, la riche documentation qu’elle m’a remise ou fait connaître et qui m’a guidé dans l’élaboration de ce texte par ses observations, conseils et lectures critiques de ses évolutions. 31 malheureusement disparu. En dehors du grand serpent, les animaux regroupés ici sont ceux du bestiaire de la tauroctonie mithriaque : « …sur un rebord du rocher, à gauche, est presque toujours perché un corbeau, messager du Soleil, qui est censé avoir prescrit l’immolation. Un chien s’approche ou s’élance pour sucer le sang de la victime et concurremment un serpent ondule en direction de la plaie, tandis qu’un scorpion pince les testicules du taureau » (Turcan 2004, p. 48). Le rinceau du pilastre gauche s’achève par deux motifs circulaires. Il faut bien observer ces motifs pour les différencier d’une fleur et distinguer deux têtes d’oiseaux (flamant ? vautour ? oiseau fantastique ?) (figure 18). Mais le plus important est la partie inférieure du motif supérieur. Il est constitué par une forme en croissant sur laquelle apparaissent des festons circulaires qui la distinguent d’une figuration de la lune. Il s’agit d’un élément mithriaque typique : « …une sorte de nacelle en croissant de lune (scapha lunaris)… (Turcan 2004, p. 58). Sur la base de mes connaissances du mithracisme, dont je rappelle ici qu’elles sont très sommaires et avec pour but d’aider le ou les spécialistes qui se pencheront sur ce sujet, je vais délivrer quelques unes des pistes de recherche que j’ai cru entrevoir comme pouvant donner un sens à l’iconographie de Gasr ed douirat. - Mithra et le parcours des âmes. Les niches inversées du podium pourraient être une figuration du passage des âmes vers la terre car un concept mithriaque assez ambigu véhicule des « …symbolismes concernant la descente des âmes dans le monde terrestre et leur remontée au ciel » (voir Turcan 1999, p. 475). Figure 18 : La nacelle mithriaque en croissant de - Mithra léontocéphale et le temps. Au dessus de lune. la baie de la chambre funéraire se trouve une tête de personnage souvent identifié comme étant une Gorgone (figure 19) sans doute à cause des « serpents » que l’on peut y voir en partie inférieure. Ce n’était pas l’opinion de Romanelli : « …sur une espèce de fond rocheux, une grande face enfermée dans une couronne, [est] garnie en partie supérieure par deux animaux ailés : il semble qu’il ne s’agisse pas d’une Gorgone. » (Romanelli 1925, p. 166). Pour ma part, j’estime que cette tête est similaire à celle du personnage en buste visible, côté gauche, sur un fragment de frise d’un « mausolée des environs de Homs »20 (figure 20) et que ce dernier est assimilable à certaines images ou statues de Mithra léontocéphale dont plusieurs exemples ont été publiés par M.J. Vermaseren. Il y aurait là une explication de l’architecture et des décors de la partie haute du monument (le zodiaque, le soleil, la lune de la frise et les saisons « victorieuses » de la corniche de l’édicule) puisque « Le dieu léontocéphale des mithriastes est un dieu du feu et du ciel, maître des planètes, du zodiaque et des saisons » (Turcan Figure 19 : Mithra léontocéphale ( ?). 2004, p. 99). 20 Bartoccini R., Le Antichita della Tripolitana, 1926, p. 42, fig. 57. 32 - Mithra-Apollon et le Soleil. La frise du podium comprenait 16 chefs à cheveux longs appartenant à deux catégories : 8 coiffés d’un bonnet phrygien et 8 à tête nue. Le chef au bonnet phrygien serait alors Mithra tel qu’il est figuré en Mithra tauroctone. Le chef à tête nue pourrait avoir plusieurs acceptions. Il pourrait être le Soleil si l’on fait Figure 20 : Fragment de frise des environs de Homs publié par référence aux stèles qui évoquent le Bartoccini. banquet du Soleil et de Mithra mais aussi Mithra sous la forme syncrétique Mithra-Apollon-Hermès. A partir de Mithra-Apollon et de la reprise des arguments de F. Venturini développés dans son article concernant la mosaïque de l’Aion de Sentinum (Venturini 2008), il serait possible de donner à cette présence sur Gasr ed douirat un sens d’hommage politique à Septime Sévère renforcé peut être par le fait que le mithracisme est une religion de l’ordre. - Mithra et les bouches ouvertes. Enfin le gros serpent qui «… comptait aussi comme une allégorie du souffle igné (pneuma) qui anime le monde suivant les stoïciens » (Turcan 2004, p. 65) pourrait aussi donner un sens au fait que les bouches des chefs de la frise du podium ont souvent la bouche ouverte et qu’il en est de même sur le bloc publié par Bartoccini (voir figure 20). Ainsi donc Gasr ed douirat serait non seulement un hapax architectural mais en plus une œuvre dérogatoire à l’encontre de règles énoncées dans les principales publications comme celle du secret qui confinerait le mithracisme dans les temples/grottes (R. Turcan) ou celle de l’exclusion des femmes (R. Turcan ; M.J. Vermaseren) alors qu’elles sont présentes sur le mausolée. Je n’ai donc aucune confiance dans mon analyse du décor et dans ses hypothèses qui résolvent tout. Et pourtant, le bestiaire de la tauroctonie est bien présent ! L’étude exhaustive des décors qu’avait envisagée A. Laronde reste à faire. Une explication religieuse de Gasr ed douirat par le mithracisme combinée avec les thèmes habituels de la mort et de la renaissance devrait dévoiler des informations précieuses sur le monument et son époque. Elle pourrait donner un sens aux problèmes de restitution que je n’ai pas su résoudre : l’articulation du Zodiaque, du Soleil et de Lune de la frise ajoutant la dimension temporelle du jour à celle des mois et des saisons ; les écailles à l’envers de la couverture qui, avec une mise en peinture adéquate, pourraient représenter les rayons solaires ; et enfin l’aigle planant sommital qui serait associé au transport des âmes. Cette étude exhaustive devrait aussi permettre de trancher le débat sur la modulation des qualités d’exécution en faisant la part entre ce qui est dû aux « mauvais » tailleurs de pierre et ce qui correspond aux volontés expressionnistes à la mode sous les Sévères. Jacques Vérité : [email protected] Cauterets, 18 01 2014. Cet article et ses illustrations non signées sont libres de droits de reproduction. 33 BIBLIOGRAPHIE Castex 1990 : Castex J. : Renaissance, baroque et classicisme. Histoire de l’architecture 1420-1720, Hazan, 1990. Clauss 1999a : Clauss P., Les tombeaux en forme de tours en Afrique du Nord et au Proche- Orient aux époques hellénistique et romaine, thèse de doctorat de l’Université de Paris I – Panthéon Sorbonne, sous la direction du Professeur J.M. Dentzer, soutenue le 6 mars 1999. Clauss 1999b : Clauss P., Le mausolée-tour du Gasr el-Douirat près de Leptis Magna : rapport préliminaire, non publié. Clauss 2001 : Clauss P., Les piles funéraires gallo-romaines du sud-ouest de la France dans l’histoire du mausolée-tour, 2001, inédit, à paraître. Clauss Balty 2012 : Clauss Balty P., Les tombeaux en forme de tours en Méditerranée romaine. Genèse et développements (Edition de Clauss 1999a). A paraître. Clermont-Ganneau 1903 : Clermont-Ganneau, Lepcis et Leptis Magna in CRAI 1903, p. 333-346. Damisch 1960 : année, n°3, mai juin Damisch H., L’œuvre des Churriguerra : la catégorie du masque, Annales, 15e 1960, p.466 et s. Faraj et alii 1996 : Faraj M. O., Abd el-Rahman A. S., Di Vita-Evrard G., Musso L., La tomba presso la scuola elementare AlHedi Al Fergiani a Khoms, Libya Antiqua ns II, 1996, p.144-146, pl.LXIII b et c. Ginouvès II 1992 : Ginouvès R., Dictionnaire méthodique de l’architecture grecque et romaine. II Eléments constructifs : supports, couvertures. Aménagements intérieurs., EFA et EFR, 1998 Gros I 2007 : Gros P., L’architecture romaine I, les monuments publics, Picard, Paris, 1996, 2e édition 2007. Gros II 2007 : Gros P., L’architecture romaine II , maisons, villas, palais et tombeaux, Picard, Paris, 1999, 2e édition 2007. Hellmann 2002 : Hellmann M.C., L’architecture grecque I. Les principes de construction, Picard, 2002. Inventaire 1977 : Inventaire général des monuments et des richesses artistiques de la France, Principes d’analyse scientifique, Architecture, méthode et vocabulaire, Paris, Imprimerie Nationale, 1977. Pour cet ouvrage les renvois indiquent soit la page (p.) soit la colonne typographique (ct.). Martin 1965 : Martin R., Manuel d’architecture grecque, Paris, ed. Picard, 1965. Morel 1998 : Morel J. P., L’art romain, in Châtelet A., Groslier B.P., Histoire de l’art, Larousse, 1998. Picard 1964. Picard G., Empire romain, Office du livre, 1964 Romanelli 1925. Romanelli P., Leptis Magna, Africana Italiana 1, Rome, p. 165-166, figure 23, figure 25b, figure 93-96. Turcan 1999. Turcan R., Mitraïsme, in Encyclopedia Universalis, éd. 1999. Turcan 2004. Turcan R., Mithra et le Mithriacisme, Paris, Les Belles Lettres, coll. « Histoire », 2004. Venturini 2008. Venturini F., Il mosaico di Aion di Sentinum, un nuovo tentativo di lettura, in Picus, XXVIII 2008, pp. 213231. Vermaseren 1956 1969. Vermaseren M.J., Corpus inscriptionum et monumentorum religionis mithriacae, La Haye, 1956,1969, 2t. 34 ANNEXE 1 : GLOSSAIRE DES TERMES ARCHITECTURAUX ET SYSTEMES DE REPERAGES UTILISES DANS LES DESCRIPTIONS. Les termes architecturaux sont notés sur l’élévation de Gasr ed douirat ci jointe (figure A1). Les systèmes de repérage utilisés sont les suivants : - En élévation les assises sont numérotées sur la figure A1. - En plan, mon système de repérage est double. J’utilise les points cardinaux et le lecteur situera la partie concernée à partir du nord indiqué sur les plans ou à partir du plan orienté dessiné figure A1. Pour l’édicule le repérage est établi à partir de la numérotation de 1 à 6 des axes des colonnes. Les espaces intermédiaires sont définis par la numérotation des deux axes (Par exemple, 4-5, identifie des éléments situés entre les colonnes 4 et 5). - Les blocs sont repérés par le numéro d’assise où ils ont été remontés et le numéro arbitraire qui leur a été attribué sur le site d’origine (Par exemple : 18-56, bloc n° 56 restauré dans la 18ème assise). Les pierres neuves sont repérées par le numéro d’assise et un numéro correspondant à l’ordre de pose dans l’assise (Par exemple : 15-01, premier bloc neuf posé sur l’assise 15). - Enfin, par souci de simplification, j’ai choisi d’établir la restitution avec des dimensions théoriques quitte, dans des cas particuliers, à préciser les variations archéologiques. Figure A1 : Glossaire des termes architecturaux et repérage des assises. 35 ANNEXE 2 CURRICULUM VITAE Jacques VERITE Date et lieu de naissance : le 27 décembre 1941 à Aureilhan (France, Hautes Pyrénées). Retraité depuis le 01 07 2003. Domicile en 2014 : 32300 Clermont Pouyguillès. E mail : [email protected] BIOGRAPHIE / BIOGRAPHICAL ELEMENTS Jacques Vérité : architecte (Ensais - Ecole Nationale Supérieure des Arts et Industries de Strasbourg, France), docteur en urbanisme (Paris VIII), spécialiste en conservation de biens culturels (Iccrom), spécialiste en conservation de monuments historiques (Fac. d’architecture de Rome). Il a été de nombreuses années consultant de la Division du Patrimoine Culturel de l’Unesco et a effectué des missions de consultant pour l’Iccrom et Icomos France. En tant que collaborateur d’architectes il a participé à la réalisation d’œuvres contemporaines importantes dont le CCA de Cergy Pontoise, le 57 Métal à Boulogne Billancourt et la gare d’Avignon TGV. En monuments historiques, il est l’auteur, en Tunisie, de la restauration de l’arc de triomphe est de Mustis et des anastyloses de colonnes aux thermes d’Antonin à Carthage ; en Libye, il a achevé la restauration du mausolée de Gasr ed douirat à Leptis Magna. CV complet en annexe Jacques Vérité is an architect (ENSAIS - Ecole Nationale Supérieure des Arts et Industries Strasbourg, France), Doctor of Urbanism (Paris VIII), specialist in conservation of cultural property (ICCROM), specialist in conservation of historic monuments (Univ. of architecture of Rome). Has been for many years consultant of the Division of Cultural Heritage of Unesco and performed consultancies for ICCROM and ICOMOS France. As an employee in a firm of architects he participated in the creation of important contemporary works among which are ‘CCA’ in Cergy Pontoise (France), the ‘57 Métal’ in Boulogne Billancourt (France) and the Avignon TGV station (France). As regard to historic monuments, he conducted in Tunisia the restoration of the east triumphal arch of Mustis and anastylosis columns to Antonine Baths at Carthage. In Libya, he has completed the restoration of the mausoleum Gasr ed Douirat at Leptis Magna. Full resumé annexed DIPLOMES. - ARCHITECTE: diplôme de l'Ecole Nationale d'Ingénieurs de Strasbourg (1966), (actuellement INSA). - URBANISTE. DOCTORAT DE 3ème CYCLE soutenu en 1984 (mention : très bien) à l'Institut d'Urbanisme de l'Académie de Paris (Paris VIII) ; sujet du mémoire : " Le matériau terre. Réalités et utopies ". DEA, 1978. MAITRISE, 1977 ; thème du mémoire : "Inventaire, protection et mise en valeur des architectures traditionnelles. Un exemple : le Sud marocain ". - SPECIALISTE EN CONSERVATION DE MONUMENTS ET SITES : Attestation (1973) du Cours de Spécialisation pour la Conservation et la Restauration des Monuments et Sites du Centre International pour la Conservation des Biens Culturels (lCCROM), Rome, Italie. 36 Diplôme (1975) de la ''Scuola di Perfezionamento per lo studio e il restauro dei monumenti" de la Faculté d'Architecture de Rome, Italie. Thème du mémoire de thèse : "La restauration de l'arc de triomphe de Musti " ; mémoire complémentaire "Etude informatique des arcs de triomphe romains". TITRES. - EXPERT CONSULTANT DE L'UNESCO pour la Division du patrimoine culturel. - EXPERT CONSULTANT DE L'ICCROM (Centre International pour la Conservation des Biens Culturels de Rome) - EXPERT CONSULTANT DE L'ICOMOS (Conseil International des Monuments et des Sites). EXPERIENCE PROFESSIONNELLE DANS LE DOMAINE DU PATRIMOINE. - 2007-2008. Architecte (bénévole) à la Mission Archéologique Française en Libye. Avril/mai 2007 : relevés de la basilique de Latrun. Août/septembre 2007: relevés de la basilique de Latrun et sur le site de Callicratea à Appolonia. Participation au chantier de Gasr ed douirat à Leptis Magna. Mai/ juin 2008 : Restauration du mausolée Gasr ed douirat à Leptis Magna. Septembre/novembre 2008. Achèvement de la restauration du mausolée Gasr ed douirat à Leptis Magna. - 1995 : Voyage en Ouzbékistan à l'invitation du consultant UNESCO "Route de la soie ". Visite de Samarkand et Boukhara. - 1994 : Consultant UNESCO à Pétra (Jordanie) dans le cadre du Petra National Park Management Plan : études de restauration du temple grec "Qsar El Bint" (27 mars au 6 avril). - 1988 : Mission UNESCO : analyse de "Le Campagne Internationale pour la Sauvegarde de Carthage 1972 - 1988". Durée : un mois et demi dont un séjour à Carthage du 20 mars au 9 avril. - 1987 : Mission ICOMOS / CONVENTION DU PATRIMOINE MONDIAL en Côte d'Ivoire. Formation à la rédaction des propositions d'inscription des biens culturels nationaux (18 août ou 4 septembre). - 1987 : Mission UNESCO à Carthage, Tunisie. Etudes archéologiques et début du chantier d'anastylose de la colonne du portique de la piscine Nord du frigidarium (15 novembre au 4 décembre). - 1987: Mission ICOMOS / CONVENTION DU PATRIMOINE MONDIAL à BAMAKO (Mali). Encadrement du "Séminaire pour l'établissement de la liste du Patrimoine Mondial des pays d'Afrique Francophone" (26 au 30 janvier). - 1986: Missions UNESCO à Carthage, Tunisie. Aménagements du site et création d'un lapidarium (20 novembre au 11 décembre). Achèvement de l’anastylose de la grande colonne du frigidarium (15 juin au 5 juillet) aux thermes d'Antonin. - 1985 Mission UNESCO à Carthage, Tunisie. Réalisation de l'anastylose de la grande colonne du frigidarium des thermes d'Antonin (1 au 29 juillet). - 1984 : Mission UNESCO à Carthage, Tunisie. Chantier du soubassement de l'anastylose de la grande colonne du frigidarium des thermes d'Antonin (8 au 27 octobre) - 1983 : Mission UNESCO à Popayán, Colombie. Etude de propositions d'actions de l'Unesco à la suite du tremblement de terre de mars 1984 (26 au 30 septembre). - - 1983 : Mission ICCROM à Lima, Pérou. Encadrement et formation des participants du "Symposium International et de l'atelier sur la conservation de la brique crue" (10 au 22 septembre). 1982: Mission UNESCO /ICCROM à Abidjan, Côte d'Ivoire. Encadrement et formation des participants du "Séminaire de perfectionnement sur les principes et les techniques de conservation applicables au patrimoine architectural africain", de la "Session d'information sur la mise en œuvre de la Convention du Patrimoine Mondial" et du "Colloque sur la sauvegarde du patrimoine architectural africain (2 au 18 décembre). - 1982 : Mission ICCROM à Goreme, Cappadoce, Turquie. Projet de conservation des structures. Mission réalisée en collaboration avec le Dr Bowen, hydrogéologue et le Dr Lizzi, ingénieur structures (20 octobre au 2 nov.) 37 - 1982 : Mission UNESCO à Grenade, Espagne. Propositions de réhabilitation du quartier de l'Albaïcin (10 mai au 7 juin). - 1981 : Missions UNESCO à Carthage, Tunisie. Réalisation de l'anastylose de la colonne de l'angle Nord de la palestre Sud (19 juin au 2 juillet) et dossier d'exécution de l’anastylose de la colonne du frigidarium des thermes d'Antonin (23 août au 9 septembre). - 1981 : Mission UNESCO à Kairouan, Tunisie. Analyse des dommages et propositions de conservation de la grande Mosquée de Kairouan (3 du 18 janvier). - 1979 1981: Missions UNESCO à Carthage, Tunisie dans le cadre du ''Projet de Parc National de Carthage et Sidi bou Saïd ". Propositions d'aménagement du site de Carthage ; études de conservation de monuments islamiques et romains; (6 missions : 13 nov. au 12 déc. 1979 ; 5 au 20 fév. 1980 ; 21 mars au 5 avril 1980 ; 14 juin au 1 juillet 1980 ; 10 au 31 août 1980 ; 14 déc. 1980 au 3 janv. 1981). - 1977 : Mission UNESCO à Cherchell, Algérie. Etudes d'aménagement des gradins du théâtre antique. - 1976 : Mission UNESCO à Cherchell, Algérie. Proposition de protection et mise en valeur de sites historiques, urbains et ruraux (Tébessa, Announa). - 1975 - 1976 : Missions UNESCO au Maroc. Inventaire et propositions de protection pour les habitats traditionnels du Sud marocain (3 mois). - 1972: Mission UNESCO dans le cadre du Projet TUNIS CARTHAGE d'étude et de mise en valeur du site de Carthage et de la médina de Tunis. Etudes de l’anastylose de la grande colonne des thermes d’Antonin. Réalisation (études et chantier) de la restauration de l’escalier d’accès à l’esplanade des thermes. - 1971 : Architecte au service des Monuments Historiques de Tunis, Tunisie. Direction de chantiers, études de restaurations de monuments ; aménagement du site, étude et construction de la maison d'accueil du site de Sbeïtla. - 1971 : Voyage en Amérique Latine et aux Etats Unis ; visite des principaux sites archéologiques et musées des pays visités : Bolivie, Equateur, Colombie, Panama, Mexique, Etats Unis. 1970 1971 : Architecte à l'Institut d'Anthropologie et d'Agriculture Précolombienne de l'Université Agraire de Lima (Pérou). Etudes archéologiques des milieux humains dans l'histoire et la préhistoire du littoral péruvien. 1968 1969 : Architecte sous contrat CNRS au Centre Franco -Egyptien des Temples de Karnak à Louqsor (Egypte). Travaux d'archéologie, de restauration de monuments et d'aménagement du site. Conception et surveillance du chantier de maisons construites en briques de terre. 1966 1968: Architecte coopérant militaire au Service des Monuments Historiques de Tunis, Tunisie. Etude et réalisation de la restauration de l'arc de triomphe de Gordien III au Krib (120 km à l'est de Tunisie). EXPERIENCE PROFESSIONNELLE CONTEMPORAINE. DANS LE DOMAINE DE L’ARCHITECTURE - 1997 2002 : architecte salarié à AREP (Aménagement Recherche Pôles d'Echanges) (filiale de la SNCF). 1997 1999 : Coordination des études de la Gare AVIGNON TGV (250 MF). 1999 2000 : Direction des Travaux de la Gare AVIGNON TGV. 2000 2002 : Direction Technique des travaux de la Gare AVIGNON TGV. - 19901996 : Chef d'Agence au sein de l'Atelier d'Architecture Georges Pencreac'h. Prise en charge des dossiers à partir du permis de construire ou du DCE. Etablissement des dossiers y compris les descriptifs TCE ou architecte. Suivi des chantiers des opérations suivantes : 55 bd de Belleville Paris 11e : logements PLA, commerces, gymnase et chapelle pour la RIVP ; 5 et 7 rue Bach Paris 13e : logements PLA, activités et parkings pour la RIVP ; Les Guillerands à 95 SANNOIS : logements PLA pour la SAVO (Société d'HLM du Val d'Oise) ; Serris (77) : 410 studios et parties communes pour Eurodisney ; Draveil (91) : extension de l'IFOCAP: résidence hôtelière (50 chambres) et Centre de Formation pour agriculteurs ; 68 à 74 rue Clisson, Paris 13e : logements PLA, commerces et parkings pour la RIVP ; Résidence Othello à Saint Ouen l'Aumône 38 (95) : logements PLA pour la SAVO ; rue Vandrezanne et rue du Moulinet à Paris 13e : 81 logements pour l'OPAC de Paris. - 1989 1990. : Architecte salarié de la SCPA A. GEORGEL - A. MROWIEC Responsable du projet de réhabilitation du Passage des Princes dans le 2ème arrondissement (25 000m2 de travaux neufs, réhabilitation et restauration des immeubles inscrits à l'inventaire supplémentaire des monuments et sites. Détaché ensuite comme responsable du déménagement du groupe de presse les Editions Mondiales entre le 2 bd. des Italiens et Issy les Moulineaux. (Septembre 1989 / Août 1990). - 1983 1989 : Architecte salarié au sein du Cabinet Christian MARTEL. Etudes et suivi de chantier de logements sociaux (Chatillon / Bagneux, Torcy / Marne la Vallée, Corbeil). Etude de la réhabilitation d'un immeuble du XIX e siècle à Paris pour l'UAP et le Bureau d'Etudes SERETE. Etude de la restauration de la maison Henao (Bretagne Nord). Conception et étude du Centre de Recherches en Electronique de l'AEROSPATIALE à St. Quentin en Yvelines. Conception, étude et direction de chantier de l'immeuble de bureaux "Les Terrasses" pour la société SAMDA à Noisy le Grand. Etude et surveillance du chantier de logements impasse Sesquez à Asnières. Etude de la démolition de logements HLM des années 1960 à Orléans : la Bourie Rouge et les Acacias. - 1973 1981 : Architecte salarié au sein de la société civile d'architectes VASCONI PENCREAC'H. Responsabilité des études et de la surveillance des travaux de construction de Centre Culturel et Administratif de Cergy Pontoise (33 000 m2). Responsabilité des études du permis de construire de l'usine 57 Métal pour Renault à Boulogne Billancourt. - 1981: Participation en association avec J.P. Hamonic et P. Diaz Pedregal (thermicien) aux concours d'architecture privilégiant l'emploi du matériau terre dans le cadre dune vision bioclimatique de ['architecture : Centre d'Expérimentation de Marseille Luminy et logements à l'Isle d'Abeau. 1978: Etude d'impact, permis de construire et projet de réhabilitation de la maison GOHIER, en zone protégée, au Roc, dans le Lot. 1972 : Architecte au sein du bureau de la SCET International à Tunis, Tunisie. Etudes d'habitats sociaux et d'urbanisme pour de nouveaux quartiers à créer : Rastabia (5000 logements), Sbiba (242 logements), Hararia (346 logements). CONFERENCES, intervention). ENSEIGNEMENT, SEMINAIRES, COLLOQUES (encadrement et/ou - 1989 Conférences au Centre d'Etudes pour la Conservation du patrimoine architectural et urbain de l'Université Catholique de Louvain :"Problèmes d'études et de réalisation de travaux sur le patrimoine'', Louvain, Belgique (26 avril). - 1988 Conférences au Centre d'Etudes pour la Conservation du patrimoine architectural et urbain de l'Université Catholique de Louvain, Belgique (25 avril). - 1986 Vice -Président du jury chargé d'examiner les projets de fin d'études des élèves Architectes de l'Ecole Nationale Supérieure des Ingénieurs de Strasbourg ( 16 et 17 octobre). - 1986 Conférence à l'Ecole d'Architecture de Grenoble : "Les architectures vernaculaires du Sud marocain. Histoire et typologie d'une organisation de l'espace". (27 janvier). - 1986 Conférences à l’Ecole Nationale d'Ingénieurs de Strasbourg (ENSAIS) sur le thème "Sociétés, Espace et architectures" (22 mai). - 1985 FRANCE CULTURE ; Intervention sur le thème "Quelles contraintes impose la reconstruction d'une ville après un tremblement de terre " dans l’émission : "Les enjeux internationaux" réalisée par T. Garcin (3 octobre). - 1985 Participation à la journée concernant "Le quartier de l’île à Martigues" organisée par le Musée d'Art et d'Archéologie. Intervention sur le thème : "Construire et habiter durant la préhistoire à Martigues : références diachroniques et synchroniques" (1 mars). - 1984 Conférence à l'Institut Français d'Architecture (Paris) : "Les architectures vernaculaires du Sud marocain" (11 décembre). 39 - 1983 Participation au séminaire organisé par le Plan Construction, le CSTB et l'ENPC : "L'habitat économique dans les pays en développement : matériaux, techniques de construction, composants". Intervention sur le sujet : "Architecture de terre crue et habitat économique dans les pays en développement" (25 - 27 janvier). - 1983 Encadrement du "Simposio internacional y curso taller sobre conservacion de adobe" organisé par le Projet Régional de Patrimoine Culturel et de Développement, le PNUD et l'UNESCO à Lima, Pérou (10 au 22 septembre). Conférences publiques dans le cadre du symposium : ''Restauracion y conservacion de arquitecturas vernaculas de adobe (13 septembre) ; "En torno del material tierra y de la vivienda economica en los paises en desarollo o la agonia de una tradicion antigua" (14 septembre). - 1981 Membre du jury des projets de fin d'études des élèves Architectes de l'Ecole Nationale Supérieure des Ingénieurs de Strasbourg (8 - 9 octobre) - 1980 Participation au 3ème Symposium International pour la préservation de la brique crue à Ankara (Turquie) sur invitation de l'ICCROM et de l’ICOMOS. Intervention sur le thème "La conservation des habitats vernaculaires en terre : expériences et avenir" (29 septembre - 4 octobre). - 1978 Participation au stage "Technologies et développement", organisé par le CFECTI, l'OREAM de Marseille et le GRET à Marseille Luminy. Intervention sur le thème : "L'habitat rural traditionnel au Maroc. Les ksours : problèmes de conservation des constructions en terre et analyse d'un modèle d'organisation territoriale" (17 au 22 juillet). PUBLICATIONS. - "Fouille dans la zone axiale du IIIème pylône du temple de Karnak"; S. Sauneron, J. Vérité ; in KEMI n° 19, Ed. P. Geuthner, Paris, 1969. - "Ksar et kasba entre la terre et le béton" ; in ARCHITECTURE n° 399, Société d'Editions Techniques, Paris. 1976. - "Autour de Hassan Fathy" in ARCHITECTURE n° 400, Société d'Editions Techniques, Paris, 1976. - "Inventaire, protection et mise en valeur des architectures traditionnelles du Sud marocain", rapport UNESCO, Paris, 1977. - "Algérie : L'aménagement des gradins du théâtre antique de Cherchell", rapport UNESCO, Paris, 1977. - "Algérie : Protection et mise en valeur de sites urbains et ruraux ", rapport UNESCO, Paris ,1978. - "La conservation des habitats vernaculaires en terre : expériences et avenir", Faculté d'Architecture, Ankara, Turquie, 1980. - "Appropriate technologies and restoration of historic monuments" in "Technical handbooks for museum and monuments", n°7, Unesco, Paris, 1981. - "Architecture de terre crue et habitat économique dans les pays en développement ou l'agonie d'une tradition ancienne", in "L'habitat économique dans les pays en développement : matériaux, techniques, composants "; Comptes rendus du Colloque International, Paris 25 - 27 janvier 1983, Presses de l'Ecole Nationale des Ponts et Chaussées, Paris, 1983. - "La restitution d'un monument romain : l'arc de Septime Sévère à Sbeïtla" in Archeologia n° 176, Dijon, mars 1983. - "Proteccion y conservacion de los conjuntos historicos de barro" in "El Adobe", Simposio Internacional y curso-taller sobre conservacion del adobe, ed. : Proyecto regional de patrimonio cultural y desarollo, PNUD / UNESCO, Lima, Pérou, 1983, p. 139 à 144. - " Protection and Conservation of Adobe Histories Complexes" in "ADOBE", International Symposium and Training Workshop, ed : Regional Project on Cultural Heritage and Development UNDP/UNESCO, Lima, Peru, 1983, p. 133 à 138. - "Le matériau terre : une escroquerie", (titre original : "Le discours sur le matériau terre : une escroquerie intellectuelle") in HABITER n°184, Pact, Paris, 4e semestre 1984. - "Tunisie. 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Maîtrise d'urbanisme, Université de Paris VIII, 1977. - "Construire en terre demain ?", DEA d'Urbanisme, Université de Paris VIII, 1978. - "Tunisie, rapport de mission", nov. déc. 1979. - "Bir Tayeb Bey. Conservation et mise en valeur", nov. 1979. - "Sébil Youssef Saheb Ettaba. Conservation et mise en valeur", nov. 1979. - "La Marsa. Palais El Abdeliya. Conservation des structures", nov. 1979. -"Citernes de La Malga. Etude archéologique", nov. 1979. - "Mosquée de Douar Chott. Conservation des structures'', nov. 1979. - "Carthage. Sites prioritaires. Etudes archéologiques à réaliser ou à compléter", déc. 1979. - "Projet du Parc National de Carthage et Sidi Bou Saïd. Conservation, mise en valeur de monuments romains et islamiques ", déc. 1979. - "La conservation des fouilles puniques de Carthage". Conservation du site de Carthage, Tunisie, 1980. - "Tunisie, rapport de mission», mission du 5 au 20 février 1980. - "Amphithéâtre de Carthage. Propositions d'aménagement et de mise en valeur (1ère phase)", 19 février 1980. - "Salle à colonnes et abords. Propositions d'aménagement et de mise en valeur'', fév. 1980. -"Propositions pour la clôture et les abords des sites archéologiques", fév. 1980. - "Aménagement et mise en valeur du site de La Malga", fév. 1980, - "Aménagement des Thermes d'Antonin. Travaux d'anastyloses des colonnes. Dossier complémentaire d'étude et d'estimations", fév. 1980. -"Citernes de La Marge, Propositions d'aménagements", avril 1980. - "Projet du Parc National de Carthage et Sidi Bou Saïd. Conservation, mise en valeur de monuments romains et islamiques", avril 1980. - "Tunisie, rapport de mission", mission du 14 juin au 1 juillet 1980. - "Tunisie, rapport de mission", mission du 10 au 31 août 1980. - "Thermes d'Antonin et parc archéologique. Dossier de synthèse des études et des estimations des travaux de consolidation, de restauration, d'aménagement et de mise en valeur", août 1980. - "Aménagement des Thermes d'Antonin. Anastylose de la colonne de l'angle Sud de la palestre nord. Etude et chantier", août 1980. - "Amphithéâtre de Carthage. Aménagement et mise en valeur. Propositions de création d'un espace scénographique", août 1980. -"Projet du Parc National de Carthage et Sidi Bou Saïd. Conservation, mise en valeur de monuments romains et islamiques", septembre 1980. - "Bir Tayeb Bey. Dossier d'APD", déc. 1980. - "Sébil Youssef Saheb Ettaba. Dossier d'APD", déc. 1980. - "Mosquée de Douar Chott. Conservation des structures et aménagement des abords", déc. 1980. - "Tunisie, rapport de mission", mission du 14 déc. 1980 au 3 janvier 1981. - "Projet du Parc National de Carthage et Sidi Bou Saïd. Conservation, mise en valeur de monuments romains et islamiques '', janvier 1981. - "Urbanismo y rehabilitacion en el Albaicin de Granada", Rapport UNESCO, Paris, mai 1982. - "The structural conservation of Gorerne, Turkey", Rapport ICCROM, Rome, nov. 1982, en collaboration avec les Dr. Bowen et Lizzi. - "Popayán, Colombia. Prioridades de acciones futuras de la Unesco'', Rapport UNESCO, Paris, sept. 1983. - "Anastyloses au frigidariurn des thermes d'Antonin à Carthage. Dossier d'exécution". Rapport Unesco, août/sept. 1981. REALISATION DE DIAPORAMA - "La liste du Patrimoine Mondial et l’Icomos" ; version française : 1986 ; version anglaise : 1987. 42 REALISATION DE VIDEO - "La liste du Patrimoine Mondial et l'Icomos" ; version française vidéo du diaporama de même nom ; moyens techniques Generis. FIGURATION AU CINEMA - Berger grec (quelques secondes à l'image) in HERACLITE L'OBSCUR, film écrit et réalisé par Patrick Deval ; 1967 (environ). 43