La semence qui pousse toute seule (Mc 4, 26-29)

Transcription

La semence qui pousse toute seule (Mc 4, 26-29)
Bruno Lepetit, le 3 novembre 2015
La semence qui pousse toute seule (Mc 4, 26-29)
26
imp
pres
subj aor
Kai. e;legen( Ou[twj evsti.n h` basilei,a tou/ qeou/ w`j
a;nqrwpoj
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Et il disait : ainsi est le Royaume de Dieu comme un humain aurait jeté
to.n spo,ron evpi. th/j gh//j
la semence sur la terre
27
subj pres
subj pres
kai. kaqeu,dh| kai. evgei,rhtai
et qu’il dorme et qu’il soit éveillé
subj pres
nu,kta kai. h`me,ran( kai. o` spo,roj
blasta/| kai.
nuit et jour et la semence germe et
subj pres
ind parf
mhku,nhtai
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grandit comment il ne sait pas lui
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auvtoma,th
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karpoforei/( prw/ton co,rton ei=ta sta,cun ei=ta plh,rhÎjÐ si/ton evn
Spontanément la terre porte du fruit d’abord herbe ensuite épi ensuite plein de blé dans
28
tw/| sta,cui?
l’ épi
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ind pres
ind parf
o[tan de. paradoi/ o` karpo,j( euvqu.j avposte,llei to. dre,panon(
o[ti
pare,sthken
Quand
permet le fruit aussitôt il envoie la faucille parce que se présente
29
o` qerismo,j
la moisson
30
Kai. e;legen…….…
Et il disait…
Traduction : Nouveau Testament interlinéaire de M. Carrez
Références
Paraboles de Jésus, vie de Jésus. L’encadrement évangélique et scripturaire des paraboles
(Mc 4,1-34), Paul Beauchamp
dans : Association catholique française pour l’étude de la Bible, XIIe congrès, Lyon, 1987 : Les
paraboles évangéliques. Perspectives nouvelles, publié sous la direction de Jean Delorme,
Lectio divina n° 135, Cerf, Paris, 1985
La parabole de la semence qui pousse toute seule, Jacques Dupont
Recherches de science religieuse, 55 (3), p. 367 (1967)
Les paraboles du sénevé et du levain, Jacques Dupont
Nouvelle Revue Théologique, 89 (9), p. 897-913 (1967)
The grain is ripe: Parabolic Meaning in Mark 4:26-29, Claude N. Pavur
Biblical Theological Bulletin, 21 (3), p. 21-23 (1987)
Reader response and the narrative context of the parables about growing seed in Mark 4:134
John Paul Heil, Catholic biblical quarterly, 54, p. 271-286 (1992)
Faire confiance à la grâce de Dieu : la parabole du blé qui pousse tout seul (Mc 4, 25-29)
Michel Gourgues, Nouvelle revue théologique, 117, p. 364-375 (1995)
Méthode
1. Chaque article donne une interprétation personnelle, parfois contradictoire. cf Gourgues
vs Dupont
2. parfois, recherche de la distinction entre ce que Jésus aurait dit, ce que l’évangéliste aurait
voulu dire. cf Dupont
3. plus modestement : rechercher ce que le texte veut dire. le texte = la parabole dans son
contexte narratif. Article de Heil le plus utile…
Contexte narratif
1. Survol des chapitres
Mc 1 : Jésus est annoncé par jean le Baptiste, baptisé, tenté au désert. Appel de Simon,
André, Jacques, Jean , « pêcheurs d’hommes ». Il manifeste son autorité à la synagogue de
Capharnaüm, fait des guérisons
Déjà la foule : 1, 33 : « la ville entière était rassemblée à la porte » (de Capharnaüm)
Mc 2 : Jésus guérit, appelle Lévi (« suis moi »). Il répond à des objections sur l’observance du
sabbat.
Encore plus de foule :
2,2 : « à la maison, tant de monde s’y rassembla qu’il n’y avait plus de place, pas même
devant la porte » (encore à Capharnaüm)
2, 13 : « Jésus s’en alla de nouveau au bord de la mer. Toute la foule venait à lui »
Mc 3 : Jésus guérit, institue les Douze pour les envoyer (avposte,ll) prêcher, explique qui est
sa vraie parenté.
Toujours plus de foule :
3,7 : « Jésus se retira avec ses disciples au bord de la mer. Une grande multitude venue de la
Galilée le suivit. Et de la Judée, de Jérusalem, de l’Idumée, d’au-delà du Jourdain, du pays de
Tyr et de Sidon, une grande multitude vint à lui »
3,20 : « Jésus vint à la maison et de nouveau la foule se rassemble, à tel point qu’il ne
pouvaient même pas prendre leur repas ».
Mc 4 : les paraboles
Une foule nombreuse « sur la terre » :
4,1 : « Jésus se mit à enseigner au bord de la mer. Une foule se rassemble près de lui, si
nombreuse qu’il monte s’assoir dans une barque, sur la mer. Toute la foule était à terre
(), face à la mer. »
Mc 5 : Jésus guérit
Mc 6 : Jésus envoie (avposte,ll) les 12. Au retour des apôtres, Jésus nourrit 5000 personnes
dans le désert.
2. Les paraboles
Marc n’a que 5 paraboles en plus des sentences paraboliques.
Le semeur
La semence qui pousse toute seule
L’ivraie
Le grain de sénevé
Le levain
Les vignerons assassins
Le figuier qui bourgeonne
Mt 13, 3-8
Mt 13, 24-30
Mt 13, 31-32
Mt 13, 33
Mt 21, 33-46
Mt 24, 32-36
Mc 4, 1-9
Mc 4, 25-29
Lc 8, 5-8
Mc 4, 30-32
Lc 13, 18-19
Lc 13, 20
Lc 20, 9-19
Lc 21, 29-33
Mc 12, 1-9
Mc 13, 28-29
La semence qui pousse… est unique à Marc. Mc 4 a une série de 3 : semeur/semence/grain.
Mt n’a pas la semence, mais à la place l’ivraie, d’où une série de 3 : semeur/ivraie/grain.
Complétée par une 4e : le levain. Lc une série de 3, avec seulement 2 agricoles :
semeur/grain/levain.
3. Le chapitre 4
4,1-9 :
une foule se rassemble près de lui sur la terre si nombreuse qu’il monte dans une barque
la parabole du Semeur
« qui a des oreilles pour entendre, qu’il entende »
4,10-20 :
Jésus à l’écart avec ceux qui l’entourent avec les 12 se mettent à l’interroger. Jésus leur
dit (4, 10-12) : « à vous le mystère du Royaume est donné, pour ceux du dehors, tout devient
énigme… pour que tout en regardant ils ne voient pas…de peur qu’ils ne se convertissent et
qu’il leur soit pardonné ». Menaçant pour ceux du dehors !
Mais juste après, de façon un peu contradictoire avec ce qui précède, les disciples aussi sont
mentionnés comme ne comprenant pas (4,13) : Vous ne comprenez pas cette parabole (du
Semeur) ! Alors comment comprendrez-vous toutes les paraboles (de la Semence, de la
Graine) ?
 1e mention de l’inintelligence des disciples.
4, 11-20 : explication de la parabole du semeur.
4,21-25 :
2 sentences paraboliques, toujours sur le thème secret/inintelligence/révélation :
- secret/révélation : ce qui est secret (lampe sous boisseau) doit être révélé (lampe sur
support). Il reste des révélations à faire. Paraboles ci-dessous ?
- inintelligence : faites attention à ce que vous entendez, la mesure dont vous vous servez
(attention) servira de mesure pour ce qui vous sera donné (comme révélations).
 encouragement à écouter les révélations qui vont suivre dans les 2 paraboles !
Les 2 paraboles :
4, 26-29 : la Semence qui pousse d’elle-même
4,30-32 : la plus petite de toutes les graines qui devient la plus grande plante
4,33-34 : conclusion de la section sur les paraboles : il leur annonçait le Royaume par des
paraboles dans la mesure où ils étaient capables de l’entendre… mais en particulier il
expliquait tout à ses disciples.
4, 35-5,35 : 4 miracles (tempête apaisée, guérison d’un démoniaque en Décapole), guérison
d’une femme souffrant d’hémorragie, la fille de Jaïros ramenée à la vie). Quelle cohérence
entre les paraboles et ses miracles ? La force du Règne se manifeste aussi bien par des
paroles que par des actes (TOB, note d), p. 143).
Conclusion sur ce chapitre 4 : retenir le thème central : l’annonce du Royaume en paraboles
se fait dans un contexte d’incompréhension, aussi bien des gens du dehors que des disciples.
Lecture du texte
Et il disait
C1. délimiteur de la parabole, avant et après, qui reste pourtant en lien étroit avec tout le
texte
C2. A qui parle-t-il ? Juste avant, il parlait à ses disciples seulement (sentences sur la lampe,
la mesure).
Mais la conclusion de la section des paraboles dit aux v. 33-34 : Par de nombreuses
paraboles de ce genre (la Semence et le Grain), il leur annonçait la Parole, dans la mesure où
ils étaient capables de l'entendre. Il ne leur parlait pas sans parabole, mais, en particulier, il
expliquait tout à ses disciples.
 semble indiquer que les 2 paraboles, la Semence et la Graine, sont dites en public,
interprétées en privé. Dommage que l’on n’ait pas l’interprétation « autorisée » comme
pour le Semeur. Qui a des oreilles entende !
comme
C1 : La parabole établit une comparison entre le Royaume et quoi ? Un homme ?? Une
semence, l’autre élément important de la parabole ??
La parabole Mc 4,26-29 forme comme une paire avec le « grain de sénevé » (Mc 4, 30-32).
Dans la 1e, le Royaume est comparé à un « homme », dans l’autre, à une « graine ». Or, dans
la paire perle/trésor vue avec Isabelle (Mt 13, 44-46), le Royaume est d’abord un « trésor »,
puis un « marchand ». En fait, la comparaison doit être comprise au sens large. Le Royaume
est comparé à toute l’histoire qui suit.
NB : les paraboles vont souvent par paires. « Les paraboles de l'homme qui a perdu une
brebis et de la femme qui a perdu une drachme (Lc 15, 4-10) ressemblent aux deux paraboles
qui nous occupent en ce qu'elles mettent successivement en scène un homme et une femme.
En Lc 14, 28-32, l'exemple d'un campagnard qui construit une tour et celui d'un roi qui
s'apprête à entrer en guerre illustrent une même idée ; de même en Mt 13, 44-46, l'exemple
du pauvre journalier qui découvre un trésor et celui du riche marchand qui trouve une perle
de grand prix. En Lc 12, 24-28 (cfr Mt 6, 26-30), les corbeaux et les lis donnent aux disciples
de Jésus la même leçon de confiance ; en Mc 7, 24-27 (Lc 6, 47-49), deux hommes bâtissent
leur maison, mais l'un sur le roc, l'autre sur le sable. On ne coud pas une pièce neuve à un
vieux vêtement, et on ne met pas du vin nouveau dans de vieilles outres. (Mc 2, 21-22 par.)
Voir encore Mt 7, 9 par. ; 7, 16 par. ; 11, 1-7 par. Bien qu'actuellement séparées, les
paraboles de l'ivraie et du filet (Mt 13, 24-30. 47-48) pourraient avoir formé primitivement un
couple ; de même les paraboles de l'ami importun et de la veuve importune (Lc 11, 5-8 ; 18, 18) ».
un humain aurait jeté la semence sur la terre
C1 Contraste 1 avec le Semeur : l’homme vs le semeur.
En Mc 4,3dans la parabole du semeur on a :

Voici
sort un semeur pour semer.
De même, Mt et Lc ont le couple semeur/semer.
Ici on a antropos, beaucoup plus général, et le verbe n’est pas technique : jetter,
lancer), ce qui est différent de « tomber » (au bord du chemin, dans les pierres, dans les
épines) que l’on trouve dans le « semeur ». Le grain de sénevé (Mc 4, 32) est « semé », dans
l’ivraie (Mt 13, 24-30) un « homme » « sème ».
Ici, il y a bien un acte volontaire, peu professionnel, accompli par un non-spécialiste, homme
même peut-être femme !
Dans le Semeur, les 3 évangélistes expliquent que la semence est la Parole, mais aucune
n’identifie explicitement le « semeur », qui pourrait être Dieu, Jésus ou un apôtre… Ici, on
est encore plus vague. Rien ne permet pour le moment d’identifier précisément cet homme.
C2 Contraste 2 avec le Semeur : la réussite est « automatique » pour l’amateur, hasardeux
pour le professionnel (chemin, pierres, épines, bonne terre).
Le sens est différent mais si ce sont 2 histoires agricoles de semences.
C3 : subjonctif aoriste actif de « jeter ».
Encore un contraste, maintenant des temps : aoriste de « jeter », qui s’oppose à la série des
présents qui suit (sauf oi=den parfait, mais qui a valeur de présent). On ne retrouve l’aoriste
qu’avec paradoi (permet le fruit…)
Maurice Carrez n° 202 : « Le présent indique une action qui dure…L’aoriste indique un point
dans le temps…Par excellence, il indique l’action, sans comporter d’idée de présent, de
passé ou d’avenir.
C4 : La « semence » (et la terre () : qui sont-ils ?
Dans le Semeur la semence est la « Parole » (nous dit Jésus) et on peut deviner que la
« bonne terre » est celui qui accueille la Parole. Mais il n’en est pas nécessairement de
même ici. D’autres hypothèses :
- La terre est aussi celle sur laquelle se tient la foule qui l’écoute (4,1 :  La foule
serait alors cette semence ?
- la semence apparait une 2e fois au v 27 (« la semence germe et grandit ») puis disparait. Ce
n’est pas elle qui donne du fruit, mais la terre :
cf v. 28 la transformation : état initial : la terre  état final : fruit
qui passe par les étapes suivantes : terre  herbe  épi plein de blé dans l’épis
La semence disparait en 4,27 comme si elle mourrait, lien avec : Jn 12, 24 : En vérité, en
vérité, je vous le dis, si le grain de blé qui tombe en terre ne meurt pas, il reste seul; si au
contraire il meurt, il porte du fruit en abondance.
Dimension christique de la semence ??
27
kai. kaqeu,dh| kai. evgei,rhtai
nu,kta kai. h`me,ran( kai. o` spo,roj
et qu’il dorme et qu’il soit éveillé nuit et jour et la semence
blasta/| kai.
germe et
mhku,nhtai
grandit
Après l’action instantanée à l’aoriste, on entre dans une durée avec des verbes au présent et
des substantifs (nuit/jour) à l’accusatif. Cette durée se manifeste de 2 façons :
C1 : la durée est cyclique : alternance dort/éveillé, nuit/jour, qui évoque la cyclicité du
temps, temps cosmique (nuit/jour), temps biologique (dormir/éveillé). La cyclcité est
manifestée aussi par la répétition du « kai » (5 fois sur 12 mots). Il n’y a pas d’insistance sur
la passivité de l’homme, mais sur le fait qu’il mène une vie normale, comme tous, sans souci
particulier pour ce qu’il a semé. La cyclicité est celle de la vie, tout simplement.
cf Qo 3, 1-11 : Il y a un temps pour tout, un temps pour toute chose sous les cieux : un temps
pour naître, et un temps pour mourir ; un temps pour planter, et un temps pour arracher ce
qui a été planté ; un temps pour tuer, et un temps pour guérir ; un temps pour abattre, et un
temps pour bâtir ; un temps pour pleurer, et un temps pour rire ; un temps pour se lamenter,
et un temps pour danser ; un temps pour lancer des pierres, et un temps pour ramasser des
pierres ; un temps pour embrasser, et un temps pour s'éloigner des embrassements ; un
temps pour chercher, et un temps pour perdre ; un temps pour garder, et un temps pour jeter
; un temps pour déchirer, et un temps pour coudre ; un temps pour se taire, et un temps pour
parler ; un temps pour aimer, et un temps pour haïr ; un temps pour la guerre, et un temps
pour la paix. Quel avantage celui qui travaille retire-t-il de sa peine ? J'ai vu à quelle
occupation Dieu soumet les fils de l'homme. Il fait toute chose bonne en son temps…
 il faut respecter le temps des choses : laisser grandir, faire les choses comme la moisson
au bon moment.
Comme dans la Gn : Ainsi, il y eut un soir, et il y eut un matin : ce fut le nième jour.
Ce temps cyclique est le cadre d’une création qui se construit jour après jour. Et c’est le cas
ici aussi…
C2 : la durée est linéaire. ... car la semence pousse : elle est d’abord jeune pousse
bourgeonnante (blasta/| kai) puis elle grandit (mhku,nhtai). Le temps cadencé par l’alternance
jour/nuit a un sens, la graine se développe par étapes.
comment il ne sait pas lui
C1. l’incompréhension peut simplement souligner la différence entre le temps cyclique du
cosmos et des hommes, et le temps linéaire de la semence qui pousse.
C2. mais cette mention de l’incompréhension est étonnante. Elle n’est pas nécessaire à
l’histoire. Elle est peut-être comme un indice pour que le lecteur qui a des oreilles
comprenne. Elle fait écho à un thème qui traverse tout l’Evangile, celui de l’inintelligence
des disciples cher à Marc (TOB note s) p. 142).
Ce thème apparait en Mc 4,10-13, juste après la parabole du Semeur. cf Mc 4, 13, 1 e
apparition du thème de l’inintelligence des disciples : Vous ne comprenez (même verbe :
) pas cette parabole! Alors comment comprendrez-vous (autre verbe :  toutes
les paraboles ?
Mc 4, 10-13 : concerne ceux du dehors : Quand Jésus fut à l'écart, ceux qui l'entouraient avec
les Douze se mirent à l'interroger sur les paraboles. Et il leur disait: " A vous, le mystère du
Règne de Dieu est donné, mais pour ceux du dehors tout devient énigme pour que, tout en
regardant, ils ne voient pas et que, tout en entendant, ils ne comprennent pas de
peur qu'ils ne se convertissent et qu'il leur soit pardonné.
Mc 6,52 : juste après l’envoi en mission des apôtres, les 5000 hommes nourris dans le
désert, la marche sur les eaux : En effet, ils n'avaient rien compris
comprendreà l'affaire des pains, leur coeur était endurci.
Mc 7,14-19 : guérison à Genésareth, discussion avec pharisiens sur les traditions : Puis,
appelant de nouveau la foule, il leur disait: " Écoutez-moi tous et comprenez. Il n'y a rien
d'extérieur à l'homme qui puisse le rendre impur en pénétrant en lui, mais ce qui sort de
l'homme, voilà ce qui rend l'homme impur. " (Si quelqu'un a des oreilles pour entendre, qu'il
entende !) Lorsqu'il fut entré dans la maison, loin de la foule, ses disciples l'interrogeaient
sur cette parole énigmatique.Il leur dit: " Vous aussi, êtes vous donc sans intelligence ? Ne
savez-vous pas (de : savoir, comprendre) que rien de ce qui pénètre de
l'extérieur dans l'homme ne peut le rendre impur, puisque cela ne pénètre pas dans son coeur,
mais dans son ventre, puis s'en va dans la fosse ? "
Mc 8, 17-21 : Jésus s'en aperçoit et leur dit: " Pourquoi discutez-vous parce que vous n'avez
pas de pains ? Vous ne saisissez () pas encore et vous ne comprenez pas ?
Avez-vous le coeur endurci ? Vous avez des yeux: ne voyez-vous pas ? Vous avez des oreilles:
n'entendez-vous pas ? Ne vous rappelez-vous pas, quand j'ai rompu les cinq pains pour les
cinq mille hommes, combien de paniers pleins de morceaux vous avez emportés ? " Ils disent:
" Douze. " "Et quand j'ai rompu les sept pains pour les quatre mille hommes, combien de
corbeilles pleines de morceaux avez-vous emportées ? " Ils disent: « Sept. » Et il leur disait: "
Ne comprenez-vous pas encore ? " 
Mc 8, 33 : Mais lui, se retournant et voyant ses disciples, réprimanda Pierre; il lui dit: " Retiretoi! Derrière moi, Satan, car tes vues ne sont pas celles de Dieu, mais celles des hommes.
Mc 9,10 : Transfiguration : Ils observèrent cet ordre, tout en se demandant entre eux ce qu'il
entendait par " ressusciter d'entre les morts ".
Mc 9, 31-32 : Car il enseignait ses disciples et leur disait: " Le Fils de l'homme va être livré aux
mains des hommes; ils le tueront et, lorsqu'il aura été tué, trois jours après il ressuscitera. "
Mais ils ne comprenaient pas () cette parole et craignaient de l'interroger.
Mc 10,37-38 : Ils lui dirent: " Accorde-nous de siéger dans ta gloire l'un à ta droite et l'autre
à ta gauche. " 38 Jésus leur dit: " Vous ne savez pas ce que vous demandez ».
Conclusion : l’homme, un disciple ?
auvtoma,th
h` gh/
karpoforei/( prw/ton co,rton ei=ta sta,cun ei=ta plh,rhÎjÐ si/ton evn
Spontanément la terre porte du fruit d’abord herbe ensuite épi ensuite plein de blé dans
tw/| sta,cui?
l’ épi
Spontanément ( 
C1 : Cette spontanéité est soulignée par les semailles faites d’un geste «rapide» et aussi par
la moisson : c’est le fruit qui la permet ( o[tan de. paradoi/ o` karpo,j, Quand permet le fruit),
on ne sait pas très bien qui envoie la faucille (la TOB traduit par « on » : Et dès que le blé est
mûr, on y met la faucille, car c'est le temps de la moisson. Manque en effet quelque chose
comme auvto,j., « lui », que l’on avait au v 27 pour identifier sans ambiguïté qui « ne sait
pas »), comme si la moisson faisait aussi partie de ce processus « spontané ».
C2 : Cette spontanéité, cette autonomie ne signifient pas nécessairement absence de Dieu
d’un monde désacralisé, comme une pensée moderne pourrait trop rapidement l’imaginer.
Cette autonomie peut être voulue par Dieu lui-même. Elle ne signifie pas l’absence de Dieu
du processus de croissance, elle signifie juste la façon dont Dieu intervient dans le processus
de croissance :
Gn 1, 11 : Dieu dit: " Que la terre se couvre de verdure, d'herbe qui rend féconde sa semence
selon son espèce, d'arbres fruitiers qui, selon leur espèce, portent sur terre des fruits ayant en
eux-mêmes leur semence! Il en fut ainsi. La terre produisit de la verdure, de l'herbe qui rend
féconde sa semence selon son espèce, des arbres qui portent des fruits ayant en eux-mêmes
leur semence selon leur espèce. Dieu vit que cela était bon.
(on retrouve ici des tournures proches de la Semence).
Ps 67,7 : La terre a donné sa récolte: Dieu, notre Dieu, nous bénit. Que Dieu nous bénisse, et
que la terre tout entière le craigne!
la terre porte du fruit d’abord herbe ensuite épi ensuite plein de blé dans l’épi
C1 : croissance : on donne d’abord l’origine (terre et non pas semence, voir ci-dessus) et le
but du processus de croissance, terre  fruit, puis les étapes : terre  herbe  épi plein
de blé dans l’épis. L’origine est la terre, non la semence. Marquer les étapes permet
d’insister sur la progressivité du processus de croissance, opposée à la cyclicité cosmique et
humaine. La progressivité est marquée par la répétition des mots comme « épi » qui
apparait 2 fois ; ainsi que « semence », « terre » et « fruit » (karpo,j) qui apparait ici pour la
1e fois, avant une 2e lui aussi.
C2 : Une même croissance se lit dans le contexte narratif avec l’abondance de la foule, qui
elle aussi est sur la terre (Mc 4,1 : ), comme les blés. Cf « survol des chapitres »
ci-dessus :
Mc 1, 33 : « la ville entière était rassemblée à la porte » (de Capharnaüm)
Mc 2,2 : « à la maison, tant de monde s’y rassembla qu’il n’y avait plus de place, pas même
devant la porte » (encore à Capharnaüm)
Mc 2, 13 : « Jésus s’en alla de nouveau au bord de la mer. Toute la foule venait à lui »
Mc 3,7 : « Jésus se retira avec ses disciples au bord de la mer. Une grande multitude venue de
la Galilée le suivit. Et de la Judée, de Jérusalem, de l’Idumée, d’au-delà du Jourdain, du pays
de Tyr et de Sidon, une grande multitude vint à lui »
Mc 3,20 : « Jésus vint à la maison et de nouveau la foule se rassemble, à tel point qu’il ne
pouvaient même pas prendre leur repas ».
Mc 4,1 : « Jésus se mit à enseigner au bord de la mer. Une foule se rassemble près de lui, si
nombreuse qu’il monte s’assoir dans une barque, sur la mer. Toute la foule était à terre
(), face à la mer. »
Cela continue après la parabole :
Mc 5, 21 : « Quand Jésus eut regagné en barque l'autre rive, une grande foule s'assembla
près de lui. Il était au bord de la mer ».
Mc 6, 34 : « En débarquant, Jésus vit une grande foule. Il fut pris de pitié pour eux parce qu'ils
étaient comme des brebis qui n'ont pas de berger, et il se mit à leur enseigner beaucoup de
choses. »
Mc 6,44 : Ceux qui avaient mangé les pains étaient cinq mille hommes.
5000, comme une surabondance : (7*7+1)*100=70*70+10*10 (7 : plénitude de l’œuvre
achevée, comme celle de la Création).
NB : plus tard, en Mc 8, 1-10 : Jésus ne nourrit plus que 4000 hommes. On attend comme
une plénitude avec 5000 ?
subj aor
ind pres
ind parf
o[tan de. paradoi/ o` karpo,j( euvqu.j avposte,llei to. dre,panon(
o[ti
pare,sthken
Quand
permet le fruit aussitôt il envoie la faucille parce que se présente
29
o` qerismo,j
la moisson
30
Kai. e;legen…….…
C1 : rappel : le processus « spontané » semble continuer au moment de la moisson : c’est le
fruit qui le « permet », pas la volonté d’un homme, la faucille se présente presque toute
seule, et tout ceci simplement parce que c’est le moment.
C2 : il y a donc continuité avec le processus de croissance, mais contraste aussi : comme on
l’a déjà vu, on passe du présent de la durée de la croissance à l’aoriste de la ponctualité de la
moisson. Mais comment expliquer la présence du présent avposte,llei
et du parfait
pare,sthken ??
C3 : Que signifie cette moisson ?
Dans le Semeur, on en reste au « fruit », pas de moisson. Qu’apporte la mention de la
moisson ici ?
1. Jugement dernier/retour du Christ (cf Dupont) ? Le moment où l’on sépare le bon grain du
mauvais ?
- Mt 3, 12 : Jean-Baptiste dit de Jésus à son baptême : Il a sa pelle à vanner à la main, il va
nettoyer son aire et recueillir son blé dans le grenier; mais la bale, il la brûlera au feu qui ne
s'éteint pas.
- Mt 13, 30 : parabole de l’ivraie et du bon grain, qui est un peu le pendant chez Mt de la
Semence de Mc : parabole unique spécifique à chacun, où la croissance se fait toute seule
dans les deux cas. Mais la moisson chez Mt est le moment de la séparation ivraie/bon grain :
Laissez l'un et l'autre croître ensemble jusqu'à la moisson, et au temps de la moisson je dirai
aux moissonneurs: Ramassez d'abord l'ivraie et liez-la en bottes pour la brûler; quant au blé,
recueillez-le dans mon grenier.
- Mc 13,28-29 : dans la parabole du figuier qui bourgeonne, dès que ses rameaux deviennent
tendres et que poussent ses feuilles, vous reconnaissez que l'été est proche. De même, vous
aussi, quand vous verrez cela arriver, sachez que le Fils de l'homme est proche, qu'il est à vos
portes.Un événement d la nature est comparé à un événement eschatologique : la venue du
Fils de l’Homme.
- Jl 4,12-13 : la moisson est associée au Jugement : Que les nations se mettent en branle;
qu'elles montent vers la vallée nommée " Le Seigneur juge ": C'est là que je vais siéger pour
juger toutes les nations d'alentour. Brandissez la faucille, la moisson est mûre. D’ailleurs, Mc
4, 29 semble êtreune reprise directe de Jl 4, 13 : 
- Ap 14,14-22, aussi, associe moisson et jugement : Et je vis: C'était une nuée blanche, et sur
la nuée siégeait comme un fils d'homme. Il avait sur la tête une couronne d'or et dans la main
une faucille tranchante. Puis un autre ange sortit du temple et cria d'une voix forte à celui qui
siégeait sur la nuée: Lance (m) ta faucille et moissonne. L'heure est venue de
moissonner, car la moisson de la terre est mûre. Alors celui qui siégeait sur la nuée jeta
(b,ll) sa faucille sur la terre, et la terre fut moissonnée. Puis un autre ange sortit du temple
céleste. Il tenait, lui aussi, une faucille tranchante. Puis un autre ange sortit de l'autel. Il avait
pouvoir sur le feu et cria d'une voix forte à celui qui tenait la faucille tranchante: Lance
(m) ta faucille tranchante et vendange les grappes de la vigne de la terre, car ses raisins
sont mûrs. Et l'ange jeta sa faucille sur la terre, il vendangea la vigne de la terre et jeta la
vendange dans la grande cuve de la colère de Dieu. On foula la cuve hors de la cité, et de la
cuve sortit du sang qui monta jusqu'au mors des chevaux sur une étendue de mille six cents
stades.
On notera que le vocabulaire est différent : on a met non avposte,ll
2. La moisson marque la fin du processus de fructification. C’est aussi un moment joyeux,
celui de la récolte.
- Ps 126,5-6 : Qui a semé dans les larmes moissonne dans la joie! Il s'en va, il s'en va en
pleurant, chargé du sac de semence. Il revient, il revient avec joie, chargé de ses gerbes.
- Is 9, 2 : Tu as fait abonder leur allégresse, tu as fait grandir leur joie. Ils se réjouissent
devant toi comme on se réjouit à la moisson, comme on jubile au partage du butin.
- Jn 4, 35-38 : Après une annonce semble-t-il réussie aux samaritains : " Ne dites-vous pas
vous-mêmes: "Encore quatre mois et viendra la moisson " ? Mais moi je vous dis: levez les
yeux et regardez; déjà les champs sont blancs pour la moisson! " Déjà le moissonneur reçoit
son salaire et amasse du fruit pour la vie éternelle, si bien que celui qui sème et celui qui
moissonne se réjouissent ensemble. " Car en ceci le proverbe est vrai, qui dit: "L'un sème,
l'autre moissonne. "
3. Quel moment joyeux ? La moisson est reliée à la notion de disciples envoyés, chez Mt et
Lc :
- Mt 9, 35-38 : Jésus parcourait toutes les villes et les villages, il y enseignait dans leurs
synagogues, proclamant la Bonne Nouvelle du Royaume et guérissant toute maladie et toute
infirmité. Voyant les foules, il fut pris de pitié pour elles, parce qu'elles étaient harassées et
prostrées comme des brebis qui n'ont pas de berger. Alors il dit à ses disciples: " La moisson
est abondante, mais les ouvriers peu nombreux; 38 priez donc le maître de la moisson
d'envoyer des ouvriers dans sa moisson.
Lc 10, 1-2 : Après cela, le Seigneur désigna soixante-douze autres disciples et les envoya deux
par deux devant lui dans toute ville et localité où il devait aller lui-même. Il leur dit: " La
moisson est abondante, mais les ouvriers peu nombreux. Priez donc le maître de la moisson
d'envoyer des ouvriers à sa moisson.
4. L’utilisation de  dans Mc 4, 26-29, qui évoque Jl 4 mais semble un peu curieux
car Ap 4 utilise m suggère que, peut-être, l’envoie de la faucille évoque aussi pour Mc
celle des apôtres. Le contexte narratif décrit comment se passe cet envoi :
- Mc 1, 17 : appel de Simon, André, Jacques, Jean : Jésus leur dit : Suivez-moi, et je vous ferai
pêcheurs d'hommes. TOB note c) p. 133 : «en prêchant l’Evangile, les disciples rassembleront
des hommes en vue du jugement et de l’entrée dans le Royaume de Dieu ».
- Mc 3, 14 : Institution des 12 : «il en établit douze pour être avec lui et pour les envoyer
( prêcher avec pouvoir de chasser les démons »…
De fait, jusqu’en Mc 6, on voit les disciples entourer Jésus : dans sa synagogue de
Capharnaüm (Mc 1,21 : « ils pénétrèrent )» ; chez la belle-mère de Pierre «(Mc 1, 29 : «ils
allèrent ») ; chez Lévi (Mc 2, 15 : « Jésus et ses disciples ») ; les épis arrachés (Mc 2, 23 : « ses
disciples à arracher des épis ») ; au bord de la mer (Mc 3, 7 : « Jésus se retira avec ses
disciples ») ; pour expliquer les paraboles (Mc 4,10 : « ceux qui l’entourait avec les douze se
mirent à l’interroger sur les paraboles ») ; il expliquait toutes les paraboles à ses disciples
(Mc 4, 34) ; dans la barque de la tempête apaisée (Mc 4,35 : « Passons sur l’autre rive ») ; au
milieu de la foule avec la femme hémorragique (Mc 5, 31 : «ses disciples lui disaient ») ; à
Nazareth (Mc 6,1 : « ses disciples le suivent »)
Ce n’est qu’en Mc 6, 7-13 que les Douze sont envoyés : Mc 6, 7-13 : « Il fait venir les Douze.
Et il commença à les envoyer (deux par deux, leur donnant autorité sur les
esprits impurs. Il leur ordonna de ne rien prendre pour la route, sauf un bâton: pas de pain,
pas de sac, pas de monnaie dans la ceinture, mais pour chaussures des sandales, " et ne
mettez pas deux tuniques ". Il leur disait: " Si, quelque part, vous entrez dans une maison,
demeurez-y jusqu'à ce que vous quittiez l'endroit. Si une localité ne vous accueille pas et si
l'on ne vous écoute pas, en partant de là, secouez la poussière de vos pieds: ils auront là un
témoignage. Ils partirent et ils proclamèrent qu'il fallait se convertir. Ils chassaient beaucoup
de démons, ils faisaient des onctions d'huile à beaucoup de malades et ils les guérissaient.»
C’est donc logique qu’ils ne reçoivent le nom d’apôtre qu’à partir de ce moment (et même
en fait seulement à ce moment. D’ailleurs, à la suite de cet épisode, on voit les disciples
rester avec Jésus, sauf au moment de la Passion), ils sont nommés comme tel à leur retour
de mission : Mc 6,30 : Les apôtres ( se réunissent auprès de Jésus et ils lui
rapportèrent tout ce qu'ils avaient fait et tout ce qu'ils avaient enseigné. Il leur dit: " Vous
autres, venez à l'écart dans un lieu désert et reposez-vous un peu. " Car il y avait beaucoup de
monde qui venait et repartait, et eux n'avaient pas même le temps de manger ».
Conclusion : envoyer la faucille, c’est en envoyer les apôtres en mission.
C4 : Quel est le temps de la moisson ?
1. En utilisant le mot on peut donc supposer que c’est le moment où les
apôtres sont envoyés moissonner et rassemblent ce qu’ils ont fauché. Le moment de la
moisson est alors Mc 6, 30 : «Les apôtres, s'étant rassemblés auprès de Jésus, lui racontèrent
tout ce qu'ils avaient fait et tout ce qu'ils avaient enseigné». Ce temps serait inauguré par le
repas des 5000 au désert, banquet eschatologique avec du pain, fruit de la moisson,
surabondant : (7*7+1)*100=70*70+10*10 (7 : plénitude de l’ouvre achevée, comme celle de
la Création). Ce banquet inaugure le Royaume, il a lieu dans le désert, à la porte de la Terre
Promise.
Beauchamp semble confirmer cette interprétation. p. 159 : « si les paraboles exposent le
mystère du Royaume, il serait légitime de parler du miracle du Royaume à propos des pains.
Je pense même que le signe des pains est, par excellence, celui qui pose les titres de Jésus à la
royauté. Premièrement, il est le seul miracle qui ait pour bénéficiaire la collectivité entière.
Deuxièmement, le narrateur met Jésus en position de candidature au rôle de berger (Mc 6,
34) titre divin certes, mais probablement ici titre royal. »
Le miracle des pains correspond donc au temps de la moisson, il est le signe de l’instauration
du Royaume de Dieu. De ce point de vue, la moisson a donc pour nous déjà eu lieu, depuis
longtemps !
2. mais une autre interprétation est possible. On peut rapprocher la parabole de la
« Semence qui pousse toute seule » de celle du « figuier qui bourgeonne », dernière des
paraboles du Royaume chez Marc (Mc 13, 28-32) et déjà évoquée ci-dessus : « " Comprenez
cette comparaison empruntée au figuier: dès que ses rameaux deviennent tendres et que
poussent ses feuilles, vous reconnaissez que l'été est proche. De même, vous aussi, quand
vous verrez cela arriver, sachez que le Fils de l'homme est proche, qu'il est à vos portes. En
vérité, je vous le déclare, cette génération ne passera pas que tout cela n'arrive. Le ciel et la
terre passeront, mes paroles ne passeront pas. Mais ce jour ou cette heure, nul ne les
connaît, ni les anges du ciel, ni le Fils, personne sinon le Père.» Ce passage tiré du chap. 13
qui constitue comme un petit traité apocalyptique sur les derniers temps place la
fructification dans un avenir incertain que nul ne connait sauf Dieu, mais qui est proche. Le
Royaume n’est pas encore là.
Conclusions :
Le Royaume croît de lui-même (de façon spontanée) jusqu’au temps de la maturité malgré
l’incompréhension des disciples.
On peut établir des parallèles :
homme, faucille // apôtres
semence qui pousse // disciples de plus en plus nombreux
moisson // le temps joyeux de la maturité
Pointe : l’intervention peu réaliste parce que plus que minimaliste (un agriculteur a en fait
beaucoup de travail) de l’homme pointe vers l’idée que Royaume ne dépend pas des
hommes, qui ne savent même pas comment cela se passe. Dans Mc, c’est au final un
centurion, païen, qui comprend. Et en aillant rien vu, si ce n’est un homme mort !
Si j’avais à faire une homélie :
1. l’incompréhension : je ne comprends pas ce qui se passe ! L’incompréhension déjà
présente alors que la prédication de Jésus est plutôt un succès sera encore plus profonde
lorsque le Christ sera en Croix. Mais Croix féconde : Jn 12, 24 : En vérité, en vérité, je vous le
dis, si le grain de blé tombé en terre ne meurt pas, il demeure seul ; Mais s'il meurt, il porte
beaucoup de fruit. Combien de croix autour de nous aujourd’hui ? Quelle incompréhension,
qui empêche de voir le Royaume. Et pourtant, Il est là.
2. de lui-même : Ce Royaume grandit, non pas par mon œuvre, je ne construis pas le
Royaume, mais «de lui-même ». Œuvre de Dieu en qui je mets ma confiance.
3. la croissance n’est pas infinie, elle n’est que jusqu’au temps de la moisson, de la maturité,
« quand le grain le permet ». Une leçon pour notre monde qui organise le culte de la
croissance en religion d’état. Ainsi Fabrice Hadjadj, dans « Limite », nouvelle revue
d’écologie intégrale, p. 6-7 : “Le terme de la croissance porte un nom. C’est la maturité. Avec
la maturité, selon Aristote, le surplus de la nutrition passe de la croissance à l’engendrement.
Est mûr le fruit gorgé de graines. A atteint la maturité non pas l’autonome, le manager, le
confiant en soi qui n’en finit pas de s’épanouir, mais celui qui est apte à transmettre la vie
reçue… Il ne s’agit pas de croître sans limite. Il s’agit de donner du fruit… La croissance
illimitée est perte de transcendance. Paradoxalement, c’est la limite qui ouvre l’infini
(l’absence de limite n’apportant que de l’indéfini)...La voute de la cathédrale procure un
sentiment d’élévation plus grand que le ciel à perte de vue. »
ANNEXE : STRUCTURE DE LA PARABOLE