16 juin 1993

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16 juin 1993
RELATIVITES
L6 — Examen
t0 = 16 juin , 8 h 30,
∆t = 4 h.
MAGISTERE INTERUNIVERSITAIRE DE PHYSIQUE — PARIS 7
Ayant quelque peu manqué de temps pour préparer ce sujet et le concentrer,
j’espère que vous en excuserez la logorrhée et les éventuelles erreurs, sinon les
fautes d’orthographe, voire le ton didactique et même comminatoire. Les différents
exercices proposés sont parfois indépendants. Leur progression suit à peu près celle
du cours qui vous a été don. . . vendu, et correspond, tout au moins à mon sens, à
une difficulté croissante.
A.L.
L6, Relativités
1
I. SANS TRANSFORMATION DE LORENTZ
Dans une région dépourvue de champ gravitationnel, Ada et Van sont tous deux
inertiels. Dans leurs vies respectives existe un événement commun E0 qu’ils
conviennent d’adopter pour origine de leurs repères. Ada décide de choisir son
axe x̂ selon la vitesse ~v de Van. Ada et Van utilisent chacun une unité de temps
(ou de longueur) en stricte conformité avec la réglementation en vigueur. Van émet
(événements E0 , E1 , E2 . . .), à intervalles réguliers ∆τe à sa montre, des bouffées
de particules de masse nulle, dans toutes les directions. Ada reçoit quelques unes
de ces particules en des événements R0 , R1 , R2 . . .
1. Représentez cette belle histoire (événements E0 , E1 , E2 . . ., R0 , R1 , R2 . . ., lignes
d’univers de Van, Ada et des particules) sur un graphe d’espace-temps (x, t) dans
le repère utilisé par Ada.
2. En déduire, sans transformation de Lorentz, par la seule considération de
l’invariant associé à deux événements, la durée ∆te entre deux émissions successives observée par Ada, et la durée ∆tr entre deux réceptions successives vues
par la même Ada.
3. Commentez l’expression obtenue (limite v ¿ 1, réminiscences, utilité).
II. UN AUTRE SCENARIO
¡
¢1/2
Dans le repère d’Ada, Lolita a un mouvement x(t) = (1/a) 1 + (at)2
,
y(t) = z(t) = 0, où a est une constante (ai-je bien dit qu’elle était positive ?).
1. Représentez les lignes d’univers de Lolita et Ada sur un graphe d’espacetemps (x, t).
2. i ) Calculez l’intervalle de temps propre dτ entre deux événements rapprochés
de la vie de Lolita autour de l’instant t, en fonction de l’intervalle de temps dt
attribué par Ada à ces mêmes événements. Lolita a réglé sa montre en sorte
que τ (t = 0) = 0. Calculez τ (t).
ii ) En déduire l’équation de la ligne d’univers de Lolita paramétrée par son temps
propre τ , puis les composantes de sa quadrivitesse et de sa quadri accélération.
iii ) Calculez le carré de la quadri accélération de Lolita. Comment peut-on qualifier
le mouvement de la dite Lolita ?
3. Les tuyères surchauffées de la fusée de Lolita émettent en permanence, et entre
autres, une raie lumineuse monochromatique de fréquence f0 , dans toutes les
directions.
i ) Représentez sur le graphe d’espace-temps quelques lignes d’univers typiques de
ce rayonnement émis. Ada reçoit-elle cette lumière à tout instant ? Qualitativement, avant tout calcul, comment va varier au cours du temps la fréquence f (t)
de la raie reçue par Ada ?
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MIP, Paris 7
ii ) Calculez l’instant d’émission te de la lumière qui est reçue par Ada à l’instant t,
puis la vitesse v(te ) de Lolita à cet instant.
iii ) Dans quelle mesure la formule établie en I.2 (pour un émetteur qui avait
une vitesse constante) est-elle applicable ici pour calculer la fréquence f(t) du
rayonnement reçu par Ada ? Calculez f (t) et commentez l’expression obtenue.
III. TRANSFORMATION DE LORENTZ
Ada (usant des coordonnées t, x, y et z) et Van (abusant des coordonnées t0 , x0 ,
y 0 et z 0 ) sont convenus de plus d’adopter des repères en configuration standard.
1. Rappelez les valeurs des coordonnées que Van attribue à un événement en fonctions
des valeurs affectées par Ada au même événement.
2. C’est maintenant Ada qui émet une particule de masse nulle, impulsion ~p formant
un angle θ avec la vitesse de Van. Ada a pris soin de choisir son axe ŷ dans le plan
contenant x̂ et ~p.
i ) Calculez les composantes p0t , p0x , p0y et p0z de l’impulsion de cette particule
captée par un détecteur que Van a convenablement disposé quelque part dans son
repère, en fonctions des composantes pt , px , py et pz pour Ada.
ii ) En déduire l’énergie p0t et l’angle θ 0 (par rapport à x̂0 ) de la particule détectée
par Van, en fonctions de pt , v et θ.
IV. DEVIATION DE LA LUMIERE PAR LE SOLEIL
Dans le champ de gravitation du Soleil, paramètre de Schwarzschild rg , en
coordonnées de Schwarzschild. . .
df
1. Rappeler l’équation différentielle régissant la fonction u(ϕ) = 1/r(ϕ) associée aux
coordonnées r et ϕ d’une particule évoluant dans le plan choisi pour θ = π/2.
2. On envisage dorénavant le cas d’une particule de masse nulle. Etablir, dans ce cas,
df
l’équation différentielle régissant l’évolution de la fonction v(ϕ) = GM u(ϕ), où G
est la constante de la gravitation et M la masse du Soleil.
3. i ) Quel est, à votre avis, le domaine de valeurs typique de v ?
ii ) Une première estimation de v(ϕ) consiste à négliger l’effet de la gravitation !
Quelle est la forme de la trajectoire dans ce cas ? Quelle est l’expression correspondante de r(ϕ) si l’on choisit l’origine de ϕ en sorte que r(ϕ → 0) → ∞ et si la
particule passe à la distance b du Soleil ? Quelle est l’estimation v (0) (ϕ) de v(ϕ)
correspondante ?
iii ) On pose maintenant v(ϕ) = v (0) (ϕ) + δ(ϕ). Etablir l’équation différentielle
régissant δ(ϕ) et compte tenu du fait que δ(ϕ) ne doit être qu’une petite correction
en déduire une équation différentielle linéarisée dont la solution δ (1) (ϕ) doit
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constituer une bonne approximation de δ(ϕ). Déterminez une solution particulière
de cette équation, et en déduire l’expression approchée v (1 )(ϕ) correspondante.
iv ) Calculez, à cet ordre d’approximation les valeurs de ϕ pour lesquelles la
coordonnée r devient infinie, et en déduire la déviation ∆ϕ de la direction finale
de la particule par rapport à sa direction initiale.
v ) Quelle est, toujours dans cette approximation, la valeur minimale de r au cours
de la trajectoire ?
vi ) Quelle est la valeur numérique de la déviation maximale observable ?
V. LENTILLE GRAVITATIONNELLE
Etant donnée la faiblesse des effets gravitationnels à l’extérieur d’un objet stellaire
à peu près sphérique, de masse M , et pas plus concentré que le Soleil, on est tout
à fait en droit d’assimiler à ses asymptotes (étudiées dans l’exercice précédent) un
rayon lumineux qui se propage aux environs de l’objet.
1. Représentez, sur l’espace euclidien de votre de feuille de papier, un rayon lumineux
émis par une source S (disons la ponctuelle), dévié par l’objet stellaire L, et reçu
par l’observatrice O, dans le cas où S, L et O ont la chance de se trouver alignés.
2. Quelle image de S observe-t-on en O ?
3. Calculez l’angle αE (dit rayon d’Einstein) sous lequel cette image est vue de O,
en fonction de G, M et des distances rO et rS de l’observatrice et de la source à
l’objet.
4. Dans l’univers, tout bouge. Quel est à votre avis le comportement de l’intensité
lumineuse observé lorsque la configuration passe par l’alignement ?
VI. TROU NOIR
Soit l’espace-temps de Schwarzschild extérieur à un astre sphérique, paramètre de
Schwarzschild rg , en coordonnées de Schwarzschild.
1. Dans la base des coordonnées, rappelez les expressions des intégrales premières
(constantes E et J) obtenues pour les composantes pt , pϕ et (pr )2 de l’impulsion
d’un photon qui évolue dans le plan θ = π/2.
2. i ) Montrez qu’il existe une reparamétrisation affine µ telle que dt/dµ, dϕ/dµ et
df
(dr/dµ)2 s’expriment en fonctions de r, rg et b = J/E seuls.
ii ) Si le photon vient de loin (r À rg ), quels sont les comportements asymptotiques
de dr/dϕ et de ϕ(r) ? Quelle est alors la signification du paramètre b ?
3. Pour étudier l’évolution de la coordonnée r du photon, on définit le potentiel
effectif V (r) tel que (dr/dµ)2 = b−2 − V (r).
i ) Dessinez l’allure du graphe de V (r) en en précisant bien les points remarquables.
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ii ) Discutez, à l’aide de ce graphe, le mouvement d’un photon incident selon la
valeur de son paramètre d’impact, dans le cas où l’astre est concentré (il occupe
un rayon inférieur à rg ).
4. Dans le cas où la valeur de son paramètre d’impact permet au photon incident
d’approcher la valeur r = rg , il nous reste à déterminer le comportement de sa
coordonnée r au voisinage de cette valeur qui est manifestement une singularité
de la métrique.
i ) Pour un photon qui s’approche de rg en tombant vers l’astre, quels sont les
comportements de dr/dt et dϕ/dt ? Quelle forme prend la chute ?
ii ) En déduire l’allure de la ligne d’univers du photon sur un graphe (r, t).
iii ) A t-on quelque chance de voir ce photon s’échapper ensuite de l’astre ?
5. Montrez qu’il existe une valeur critique bc telle que le photon soit capturé si b < bc .
En déduire la section efficace de capture des photons par l’astre, σcap = πb2c .
6. On s’intéresse maintenant au sort des photons émis en un événement S, tel que
rS > 3rg /2 et θS = π/2, selon la direction d’émission.
i ) On est insensibilisé localement à la gravitation en S si l’on y est en chute
libre. Autrement dit, la physique en S a son cadre ordinaire minkowskien si l’on
utilise des coordonnées localement plates xᾱ , auxquelles correspond une base de
coordonnées eᾱ qui constitue une tétrade orthonormée. Rappelez les valeurs des
produits scalaires des vecteurs de base des coordonnées de Schwarzschild en S :
et , er , eθ et eϕ . En déduire un choix de tétrade orthonormée associée à S, soit et̄ ,
er̄ , eθ̄ et eϕ̄ , en fonction de et , er , eθ et eϕ .
ii ) En déduire les expressions de chacune des composantes pᾱ de l’impulsion initiale
du photon, en fonction de ses composantes pα .
iii ) Soit ψ̄ l’angle d’émission du photon par rapport à êr̄ . Exprimer sin ψ̄ en
fonction de pϕ̄ /pt̄ , puis de pϕ /pt , et enfin de rS , b et rg . En déduire la condition que
doit satisfaire l’angle d’émission ψ̄ pour que le photon émis en S puisse échapper
à l’attraction de l’astre.
iv ) Et dans le cas d’une source située entre rg et 3rg /2 ?
VII. POUR REVER
On imagine un espace métrique
ds2 = (du + Jdθ)2 − (1 − M )2 r 2 dθ 2 − dr 2 − dz 2 ,
où J et M sont deux paramètres et θ une coordonnée cyclique, c’est-à-dire que les
valeurs de coordonnées u, r, θ, z, et u, r, θ + 2π, z, correspondent au même point
de l’espace.
1. Montrez qu’il existe, pour décrire cet espace, des coordonnées t, r, ϕ, z, localement
minkowskiennes. Ces coordonnées sont-elles partout minkowskiennes, presque
partout minkowskiennes ?
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2. En déduire que cette métrique est une solution des équations d’Einstein à
l’extérieur d’une source caractérisée par les paramètres J et M, et précisez la
région occupée par cette source.
3. i ) Soit le circuit fermé à u, r et z constants, de θ = 0 à θ = 2π. Cet itinéraire est-il
praticable, et à quelle condition, par une fusée ? (Autrement dit, sa ligne d’univers
est-elle bien du genre temps ?)
ii ) Quelle est la variation des coordonnées ϕ et t au cours de ce périple ? Quelle
est par ailleurs la signification intrinsèque de ce voyage, indépendamment de tout
système de coordonnées ?
Référence : S. Deser & R. Jackiw, Time Travel ?, Comments Nucl. Part. Phys.
20 () 337.
C’est tout pour cette fois,
bonnes vacances.

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