La lettre du Conservatoire Larzac Templier et Hospitalier n°7
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La lettre du Conservatoire Larzac Templier et Hospitalier n°7
CONSERVATOIRE LARZAC TEMPLIER et HOSPITALIER PROGRAMME DES RENCONTRES du CONSERVATOIRE LARZAC TEMPLIER ET HOSPITALIER 2001 ettre aux habitants des cantons de Nant et Cornus Diaporama et débats présentés et animés par Jacques Miquel mercredi 17 janvier 2001 à 20 H 30 à Sainte-Eulalie de Cernon (Salle d’honneur de la Commanderie) « Les états latins : Israël, Syrie, Jordanie, Liban » mercredi 21 février 2001 à 20 H 30 au Viala du Pas de Jaux (Salle du rez de chaussée de la Tour) « Rhodes : les chevaliers de Saint-Jean face aux Turcs » mercredi 21 mars 2001 à 20 H 30 à Saint-Jean d’Alcas (Foyer rural) « Malte : ultime bastion des chevaliers de Malte » Diaporama des « Amis de la Muze » mercredi 18 avril 2001 à 20 H 30 à La Couvertoirade (Salle des fêtes) « 2000 ans de mystères au pays des 1000 dolmens » Recevez nos MeilleursVoeux et nos Souhaits Sincères pour 2001 X s La Lettre n° 7 du Partenaires du Colloque CONSERVATOIRE LARZAC TEMPLIER et HOSPITALIER Décembre 2000 Place Bion Marlavagne 12100 MILLAU Tél. : 05 65 59 12 22 Fax : 05 65 60 63 24 Label An 2000 Aveyron Programme Leader II Rédaction : D. Lapeyre, J. Miquel Impression : Imprimerie des Chênes Verts Photothèque : CLTH Conseil de l’Europe Ce document a été édité avec le soutien du Conseil Général de l’Aveyron. Conseil Général Aveyron Région MidiPyrénées Cette lettre va pour une fois, déroger à sa formule traditionnelle puisqu’elle va être entièrement consacrée à ce qui a été pour nous l’événement majeur de l’an 2000 : le Colloque de Sainte-Eulalie de Cernon, consacré du 13 au 15 octobre au thème de la « Commanderie : institution des ordres militaires en Occident ». Ce colloque a été pour le Conservatoire et pour le Conseil Scientifique qui travaillent à asseoir historiquement le programme Larzac Templier et Hospitalier un moment privilégié au cours duquel les résultats des travaux menés à ce jour par les spécialistes ont été présentés publiquement. Cette manifestation a aussi permis de révéler la richesse historique de ce territoire hors du commun à bon nombre de personnalités venues spécialement là pour apporter leur pierre à l’édifice de la connaissance patiemment construit par le Conseil Scientifique depuis de nombreuses années. Grâce au concours de tous et à la magie des lieux, rehaussée par les restaurations récentes, ces journées de travail ont été un succès tant du point de vue scientifique que culturel car chacun a pu y trouver son compte à quelque niveau que se soit faite sa participation. C’est avec plaisir que je rappelle la présence de la délégation du Portugal et de la ville de Tomar, la venue de son Maire, Monsieur Paiva, qui sera chargé de l’organisation du prochain colloque, dans le cadre du somptueux « Couvent du Christ » en qualité de partenaire d’un programme Européen transnational qui nous ouvre de grandes perspectives de coopération. Il me faut aussi souligner que le Conseil de l’Europe a inscrit ce colloque dans sa campagne « un Patrimoine commun » car le thème des ordres militaires est un lien fédérateur pour tous les pays européens, comme ont su le démontrer les intervenants venus d’Angleterre d’Espagne, d’Allemagne et d’ailleurs… L’Aveyron, pour sa part, a donné son label « An 2000 » au Colloque car cette manifestation était un signe fort de la vitalité du Larzac Templier et Hospitalier et de la place qu’il occupe dans le monde scientifique et culturel à la veille de la réalisation du Centre d’Interprétation. Les participants ne s’y sont pas trompés puisqu’ils ont été nombreux à s’inscrire venant de France, de Suisse, de Belgique, d’Espagne… Ils ont tous été très heureux de pouvoir partager une passion commune avec des hommes de l’art, que se soit autour d’une table dressée dans ce qui fut jadis le dortoir des moines au cœur de la commanderie, ou dans la salle d’honneur à écouter et interroger les intervenants. Nous espérons que les lignes qui vont suivre sauront vous faire revivre ou vous procurer le même plaisir que celui que nous avons eu à recevoir sur le Larzac nos amis chercheurs qui nous ont donné en échange de nouvelles clés pour ouvrir notre patrimoine et mieux connaître notre histoire. Au début de ce nouveau millénaire, nous voulons réaffirmer notre confiance dans l’avenir du Larzac Templier et Hospitalier qui saura se montrer à la hauteur de son passé riche et puissant, parce qu’ensemble nous lui donnerons au cœur de l’Europe la place emblématique qui lui revient. @ Le Président Premier Colloque International du Conservatoire Larzac Templier et Hospitalier “La Commanderie institution des instruments agraires … Ce matériel nous renseigne indirectement sur la part que les Templiers accordaient aux activités agricoles et pastorales, et sur la répartition de celles-ci entre le Causse du Larzac et les vallées du Cernon et du Tarn (Millau). Ainsi, la production de fromages invite à porter ses regards jusqu’au lieu vraisemblable de leur affinage : Roquefort. Arlette Higounet-Nadal suggérait à propos du riche vocabulaire occitan ou latin :« Les philologues pourront y trouver matière … ». C’est justement l’objet de cette communication : identifier le plus précisément possible les mots et leur sens, reconnaître l’ensemble du mobilier de la commanderie, le visualiser et essayer de mieux comprendre l’organisation économique des ordres militaires dans l’Occident médiéval” Le Colloque a été ouvert par le Président du Conseil Général, Jean Puech, qui a pris la parole pour retracer le programme du Projet du Larzac Templier et Hospitalier et ouvrir les perspectives d’avenir après les mots de bienvenue prononcés par Monsieur Jean Geniez, Conseiller Général et Maire de Sainte Eulalie de Cernon accueillant tous ses hôtes. Le Professeur Pressouyre a ensuite donné la parole à ses collègues pour le début des travaux auxquels deux jours et demi étaient consacrés. I – Historique de l’institution et typologie des Commanderies Jonathan RILEY-SMITH Professeur, Université de Cambridge, Grande-Bretagne Les origines de la commanderie dans l’Ordre du Temple et de l’Hôpital. Les communautés locales, dans lesquelles la vie religieuse était suivie et la gestion assurée pour les ordres concernés, furent établies par les Hospitaliers à partir de 11081109 et par les Templiers à partir de 1132. Certaines d’entre elles, en plus, firent éclore rapidement des unités dépendantes excentrées qui répondaient souvent aux vœux des nobles locaux souhaitant bénéficier de l’intercession des prières grâce à de petites fondations. Ce qui était original, c’était la subordination des communautés locales aux autorités provinciales qui ellesmêmes obéissaient à des gouvernements centraux à Jérusalem. C’était cet intermédiaire des provinces qui rendait les ordres militaires uniques jusqu’à ce qu’ils soient imités par les Prémontrés et l’Ordre de Cluny plus tard dans le XIIe. La première étape de la création d’une structure provinciale avait été réalisée par les Hospitaliers à l’époque où les Templiers furent fondés et tout porte à croire que ces derniers imitèrent les premiers, tout en l’adaptant à leur propre situation. Les deux ordres commencèrent à créer un schéma plus cohérent de gouvernement provincial dans les années 1140 et les Templiers commencèrent à tester de plus petites provinces dans les années 1150. Les communautés locales étaient désormais identifiables comme des commanderies. Les ordres militaires avaient ainsi développé une nouvelle forme de gouvernement institutionnel religieux qui constituait sans doute une réponse adaptée aux exigences d’une situation particulière qui les obligeait à diriger et à exploiter des dons éparpillés dans toute l’Europe occidentale, à plus de 3000 km de distance de leur champ d’action. 2 Réponse d’un intervenant aux questions de l’assistance. Templiers sur le Larzac. Jacques MIQUEL Historien, Conservatoire Larzac, Millau, France Les fortifications du Larzac à l’époque de la guerre de Cent ans et des guerres de religion. Pendant la guerre de Cent Ans, le commandeur Bernard d’Arpajon, grand-prieur de Saint-Gilles, va procéder à la fortification systématique et méthodique de la commanderie avec ses membres les plus importants, de 1430 à 1445 environ : tour refuge au Viala, enceintes à Sainte-Eulalie, La Cavalerie et La Couvertoirade. Il nous reste la quasi intégralité de ces enceintes avec leurs murailles de 8 à 12 mètres de hauteur, leurs tours d’angles circulaires voûtées, leurs deux portes abritées pour la plupart sous des tours carrées saillantes. Les guerres de religion vont en trois vagues successives (de 1561 à 1629) ruiner la plupart des membres isolés de la commanderie (Lamayou, Le Luc, La Vialette) et fortement ébranler les autres. Des ouvrages défensifs en maçonnerie mais aussi souvent en bois, appelés ravelins, sont construits en avant des portes qui sont maintenant précédées de pont-levis. Des enceintes basses appelées « fausses brayes » et flanquées de petites tours rondes sont construites en avant des murailles du XVe , sur trois côtés à la commanderie de Sainte-Eulalie, sur la totalité du front Est des murailles de La Cavalerie et autour de la tour du Viala. Des troupes sont soldées par le commandeur pour protéger la commanderie. Une milice est constituée sur les autres sites par les habitants avec à leur tête un capitaine, souvent homme du lieu, pour les diriger et un armement est spécialement acheté. Les actes du Colloque seront publiés en 2001. Renseignements au : 05.65.59.12.22 15 Jean-Claude BONNIN Conseiller Scientifique, La Rochelle, France Les Templiers et la mer, l’exemple de La Rochelle. Aux XIIe-XIIIe, la présence franque ne peut se maintenir en Terre Sainte sans le soutien de l’Europe. Renforts, approvisionnements et argent doivent être acheminés rapidement. Contraints d’assumer au quotidien des missions qui exigent beaucoup d’organisation, les Templiers empruntent la voie maritime pour une liaison plus efficace entre les états d’Occident et les royaumes chrétiens du Proche-Orient. La possession de leurs propres navires leur assure indépendance et disponibilité. Leurs transports maritimes, notamment celui des pèlerins, gagnent en sécurité. Militaires, les Templiers investissent également dans des vaisseaux plus spécifiques, telles les galères. Leurs unités navales sont peu mentionnées dans les documents et la notion de « flotte » n’apparaît pas dans l’organisation officielle de l’Ordre. Pourtant, les vaisseaux du Temple sont présents sur toutes les routes maritimes d’Orient et d’Occident. Leur participation aux batailles navales des croisades ne fait aucun doute. Dès les années 1130-1140, les Templiers reçoivent des domaines sur la côte Ouest de la France et ils y implantent des maisons de leur Ordre. Parmi les villes côtières où ils sont présents, La Rochelle leur offre rapidement les meilleures conditions géographiques, politiques et fiscales pour répondre à leurs besoins en matière de transit maritime atlantique. D’abord modeste village de pêcheurs, La Rochelle est devenue ville portuaire que le duc d’Aquitaine tente de promouvoir à l’aide de privilèges et d’exemptions fiscales. En 1139, les Templiers possèdent déjà près du port un enclos, des moulins et des maisons. Aliénor d’Aquitaine, fille et héritière du duc, leur accorde des franchises pour ces biens et pour le trafic de leurs marchandises dans tous ses états, soit par terre, soit par eau. Au cours du XII e, la monoculture de la vigne se généralise dans les environs. Les Templiers rochelais deviennent ainsi propriétaires de plusieurs « treuils » (exploitations viticoles). C’est précisément le transport du vin qui nous renseigne sur leurs activités maritimes au cours du XIIIe . Héritiers des Templiers, les Hospitaliers convertiront la maison du Temple de La Rochelle en simple commanderie de ville, à l’instar de celle de Saint-Jean du Pérot qu’ils possèdent déjà dans la cité. Les vastes greniers et celliers de l’enclos des Templiers ayant servi au stockage des approvisionnements seront arrentés à des particuliers et les vins de la commanderie seront commercialisés sur place. V – Une Commanderie rurale : la commanderie de Sainte-Eulalie Jean DELMAS Directeur, Archives départementales, Rodez, France L’inventaire des biens de la commanderie de Sainte-Eulalie du Larzac en 1308. L’inventaire des biens de la commanderie du Temple de Sainte-Eulalie du Larzac et de ses dépendances du Frayssinel, de Gals, de La Cavalerie, de La Salvage et de Millau, a été rédigé le 27 janvier 1308 peu de temps après l’exécution, en octobre 1307, de la décision de Philippe le Bel d’arrêter les Templiers et de saisir tous leurs biens. Ce document a été publié par Arlette Higounet-Nadal (Annales du Midi, 1956, p. 255262). L’acte donne l’état des divers bâtiments et de leur mobilier, soit de deux églises, à Sainte-Eulalie et à La Cavalerie, d’une commanderie avec le matériel de couchage et l’armement, de six domaines agricoles, dont l’outillage est énuméré, tantôt dans cette langue d’Oc qui était particulièrement à l’honneur à Sainte-Eulalie, tantôt dans un latin, qui n’était souvent que la latinisation de la langue vulgaire : mobilier, ustensiles de cuisine, outils de petit artisanat, 14 Jean-Marie CARBASSE Professeur, Université Paris II, France Les commanderies : aspects juridiques et institutionnels. Les grandes compilations de droit canonique rédigées au XIIe et XIIIe (Décret de Gratien et Décrétales de Grégoire IX) ne comportent aucune disposition spécifique consacrée aux commanderies des Ordres militaires. Du point de vue canonique, les commanderies sont donc des « maisons religieuses » comme les autres. Si les commanderies en tant que telles ne présentent ainsi aucune spécificité juridique, il faut s’en tenir à une définition beaucoup plus concrète, de nature essentiellement patrimoniale : un ensemble de bâtiments, éventuellement fortifiés, avec les terres attenantes destinées à assurer la subsistance des frères. Pourtant, si la commanderie se présente d’abord comme un patrimoine, elle est aussi titulaire des droits de nature seigneuriale. Ces droits, assis sur le domaine foncier, ont été donnés aux Templiers ou aux chevaliers de Saint-Jean en même temps que les terres ; dans certains cas, ils ont été ajoutés ultérieurement : redevances en nature, droits d’usage, droits de justice plus ou moins étendus (basse ou haute justice). Les commanderies apparaissent ainsi comme des seigneuries parmi d’autres, insérées dans un réseau complexe de relations de pouvoir. Seigneuries ecclésiastiques d’un genre particulier, appartenant à des ensembles « internationaux » à vocation militaire, ou simples maisons religieuses semblables à celles des autres « ordres » religieux ? Le statut de la commanderie templière ou hospitalière, de nature hybride, ne fait au fond que refléter la nature institutionnelle très originale des grands ordres militaires dont elles constituent les « cellules » de base. Ouverture du Colloque, table de la Présidence Jean-Marc ROGER Directeur des Archives de la Vienne, France Les différents types de commanderies du prieuré de Champagne au XV e. Le prieuré de Champagne, pris comme exemple, montre qu’il y avait au sein de l’ordre de l’Hôpital de Saint-Jean de Jérusalem plusieurs types de commanderies. Ces critères de distinction étaient institutionnels et fonctionnels. Il y avait en chaque prieuré une chambre magistrale,le prieur jouissait de quatre chambres priorales. A partir de la fin du XVe, les commanderies étaient réparties entre celles réservées aux chevaliers et celles qui l’étaient aux chapelains et sergents. Elles étaient d’importance de revenus très inégaux. En principe chaque commanderie devait assurer des ressources permettant à un Hospitalier de vivre de façon décente. Mais ces besoins étaient évalués de façon très différente pour un chevalier d’une part, un chapelain ou sergent de l’autre. Surtout, un principe essentiel dans la Religion était celui de l’améliorissement : quand un commandeur, d’abord pourvu d’une commanderie de chevissement, avait améliori sa commanderie – accru son revenu net par ses initiatives et travaux, la mise en valeur du sol, la rénovation des terriers, les démarches pour recouvrer des droits usurpés par autrui ou tombés en désuétude – il pouvait prétendre à une commanderie d’améliorissement, c’est-à-dire d’un meilleur revenu. Au-delà de ces différences de type institutionnel, les 3 commanderies présentaient des différences de fonctions. La plupart étaient rurales : leur chef était sis à la campagne, leurs revenus de type rural, le mode de vie du commandeur aussi. Quelques-unes peuvent, par contraste, être qualifiées d’urbaines : elles avaient leurs sièges en ville et jouissaient de revenus urbains comme ruraux. Certaines encore, comme la commanderie de la Madeleine de Dijon, avaient un statut particulier : elles servaient, en quelque sorte, de « maison de retraite » aux frères chapelains âgés. maisons et l’identification des dignitaires. Il est probable que les dignitaires des couvents ne participaient pas directement à cette activité particulière des lieux d’authentification. Mais la nécessité d’avoir des personnes compétentes dans les dialectes et les législations traditionnelles locales impliquait la présence de personnel Hongrois. Il semble que le travail des scriptoria (copistes) du couvent correspondait entièrement à celui des autres lieux d’authentification à tel point qu’il n’assimilait pas les éléments étrangers mais adoptait les critères plus ou moins évolués du système institutionnel Hongrois. Luis GARCIA-GUIJARRO RAMOS Professeur, Université de Huesca, Espagne Typologie de la commanderie de l’Ordre de Montesa. On considère en général les commanderies comme l’unité de base des ordres qui ont des responsabilités économiques. Mais si on limite les fonctions des commanderies en Occident à la collecte des ressources nécessaires à leur fonctionnement et au-delà à celui de l’ordre tout entier, on simplifie à l’extrême leur fonction. Elles ont sûrement servi de lieux de formation pour les nouvelles recrues, de lieux de développement de la vie spirituelle des membres, de promotion des objectifs religieux de l’Eglise. Les confratres et les donats montrent bien l’importance que les différents groupes sociaux accordaient à ces noyaux. Il faut donc reconsidérer l’institution des commanderies et les placer au cœur de l’étude. C’est ce que nous avons fait pour notre étude. L’abolition de l’Ordre du Temple en 1312 a ouvert la voie à de nouveaux ordres dans plusieurs royaumes, au Portugal et à Valence. En 1317 le pape Jean XXII décréta la fondation de l’Ordre de Montesa sur ce territoire. Deux ans après l’Ordre était réellement constitué et prit possession des biens du Temple et de l’Hôpital pour les administrer. Ce processus peut être suivi presque jour après jour grâce à des sources extrêmement complètes qui sont conservées dans la section des Ordres Militaires aux Archives Historiques Nationales de Madrid et appartenant aux années 1310 et au tout début de la période de Montesa. Ces preuves très riches donnent une bonne idée de la prise en main des anciennes commanderies par un ordre nouveau et nous permettent de comprendre la signification de ces institutions dans la période de transition, ainsi que leur utilisation par les premiers dignitaires de Montesa. II – Le personnel des Commanderies Michel MIGUET Docteur en Archéologie, Paris I, France Le personnel des commanderies du Temple et de l’Hôpital en Normandie C’est à travers le cadre géographique d’une province, la Normandie, et le cadre temporel des XIVe et XVe qu’on étudiera le peuplement des établissements du Temple et de l’Hôpital. Les prévôts, les sergents et les domestiques à des titres divers, se trouvent en nombre distinct en ces lieux. Parmi les sources, rares et fragmentaires, deux seront privilégiées : d’une part, les diverses pièces qui, de près ou de loin, ont trait à la suppression de l’Ordre du Temple, inventaires, interrogatoires, rapports divers et d’autre part, les enquêtes dont l’Hôpital de Saint-Jean de Jérusalem a fait l’objet en 1373. Les premiers de ces documents montrent des établissements du Temple dirigés par un petit nombre de frères (trois par maison environ, essentiellement des sergents secondés par une domesticité pléthorique) ; les seconds, des Hospitaliers très âgés, moins nombreux encore, parmi lesquels beaucoup de prêtres et presque aucun chevalier. Ces effectifs « squelettiques » entraînent pour chaque frère des charges plus lourdes. Il n’est pas rare de trouver un même Hospitalier commandeur de plusieurs maisons, trois ou quatre parfois. Dans ces conditions, 4 Vue de l’assistance Karl BORCHARDT Professeur, Université de Würzburg, Allemagne Les commanderies urbaines en Allemagne. Définitions et statistiques : la commanderie était visiblement l’unité de base de la vie des Hospitaliers, de l’Ordre des Templiers et des Teutoniques en Allemagne, même si toutes les possessions et établissements de ces trois ordres religieuxmilitaires n’étaient pas des commanderies. La commanderie était cependant régie par ses règles, ses droits et ses obligations définis au sein de la règle de l’ordre. L’importance des villes pour les trois ordres est soulignée par le fort pourcentage de commanderies urbaines par rapport aux commanderies rurales et par la création précoce de bon nombre de ces commanderies urbaines. Relations des Commanderies aux Villes : une approche systématique : Pour comprendre les commanderies urbaines, il faut faire une étude systématique de leur implantation. Dans certains cas, les ordres religieux-militaires avaient seulement des maisons et des chapelles dans les villes. Dans d’autres cas, ils avaient des possessions urbaines, un hôpital, une église paroissiale et/ou un château. Il y a même quelques exemples où l’Ordre était le maître séculier de la ville. Contrairement aux statuts juridiques, les relations sociales et économiques entre les commanderies urbaines et les villes sont plus difficiles à évaluer. Il en est de même pour les revenus et les dépenses des commanderies urbaines, parce que seulement quelques livres de comptes nous sont parvenus. Tendances générales et cas particuliers : les villes parvinrent à accroître leur influence sur les commanderies urbaines. On pouvait léguer un bien en fixant certaines obligations, et la ville pouvait se réserver le droit d’attribuer ce bien à une autre maison religieuse, si la commanderie ne suivait pas les instructions des donateurs. De plus, le conseil des villes pouvait nommer un intendant de l’église (Kirchenpfleger) afin de surveiller la gestion de la commanderie ou au moins de certaines de ses composantes et d’influencer la nomination du commandeur et l’admission de frères dans les commanderies urbaines. Il se peut que les ordres religieux-militaires aient été fondés pour soutenir l’action des chevaliers se battant contre les infidèles, au cours des XIIe et XIIIe. Même si leurs objectifs ont changé au cours du XVI e leur implication urbaine n’est ni négligeable ni en quantité ni en qualité. 13 l’impact de la guerre de Cent ans sur les biens de l’Ordre, dans une région qui fut, au XIVe, régulièrement en zone des hostilités. Dans le plat pays en Aunis les revenus ne sont plus souvent que du tiers ou du quart, voire moins encore. Dès que l’on s’écarte des lieux proches de centres fortifiés, on trouve vignes abandonnées, terres revenues au désert ou envahies par les arbres. Au sud de la Charente, les moulins sont détruits, les vignes à l’abandon, les maisons en ruines, et les revenus ont généralement chuté de 85 à 90 %. La conclusion de l’enquête est claire : le pape ne peut compter sur les ressources de l’Ordre pour envisager de grands projets de lutte contre l’infidèle. Anthony LUTTRELL Historien, Bath, Grande-Bretagne Les finances du Commandeur de l’Hôpital après 1306. Cette communication prend en considération deux problèmes connexes qui seront étudiés grâce à des exemples forcément limités à quelques régions seulement. Premièrement, comment était-il possible pour les commanderies de reporter continuellement un déficit financier et ensuite, comment les commandeurs de l’Hôpital, qui avaient fait vœu de pauvreté, pouvaient-ils financer la construction d’églises, d’hospices, de peintures, de monuments funéraires, la célébration de messes et autres fondations ? Les biens familiaux, les droits d’exemption relevant du magistère ou du prieur, les legs faits à dispropriamento à l’heure du décès, les faux comptes et la corruption, ont sans aucun doute tous joué leur rôle. Il arrivait aussi que les affaires ou « status » de la commanderie elle-même soient distinctes de la richesse personnelle du commandeur qui était appelée jocalia ou joyaux qui lui revenait de droit. Ces biens pouvaient comprendre les terres Hospitalières qu’il avait récupérées de mains séculières et qu’il pouvait conserver à vie tout comme les autres biens, argent, armure, argenterie, récoltes, et en particulier des animaux qui lui appartenaient en propre et qui n’étaient pas inclus dans le status de sa baiulia ou commanderie. L’étendue de cette richesse personnelle était souvent dévoilée par le relevé des comptes identifiant les biens qui revenaient à la commanderie à la mort du commandeur. Zsolt HUNYADI Maître de Conférence, Szeged, Hongrie Le locus credibilis des commanderies Hospitalières de Hongrie. Les lieux d’authentification (loca credibilia), institutions particulières à la Hongrie, éditaient des chartes témoignant des transactions légales privées portant leur sceau authentique à la demande des parties concernées. Les plus importants chapitres collégiaux de la cathédrale commencèrent à émettre des chartes dès la fin du XIIe. Au cours des siècles suivants, à côté des chapitres, les couvents des Bénédictins, des Prémontrés, des Hospitaliers et de l’Ordre de Saint Stéphane firent aussi office de lieux d’authentification. Huit commanderies Hospitalières menaient cette activité au cours des XIIIe et XIV e, il s’agit de : Bö, Csurgo, Gyant, Pakrac, Sopron, Szekesfehervar, Torda, Ujudvar. Ces commanderies émettaient des lettres de registre concernant des transactions privées légales, rédigeaient des rapports sur les actions légales menées en dehors des tribunaux ou sur les différentes phases d’un procès se déroulant sous le mandat du roi ou des plus grands dignitaires du pays. En outre, ces institutions émettaient des transcriptions certifiées des chartes. Comme tout ce processus était financé par les parties en cause, cela représentait des revenus importants pour les principaux couvents, (Szekesfehervar, Ujudvar, Sopron). Le coût des différents types de chartes rédigées ainsi que les recherches menées par le personnel des commanderies étaient fixés dans les statuts (1298, 1351). Au-delà des résultats directs de la recherche, c’est une contribution à l’histoire des commanderies des Hospitaliers du Royaume de Hongrie. Les séries dignitatum des chartes sont les sources principales pour la reconstitution du personnel des 12 le patrimoine de l’Hôpital, encore largement géré en faire-valoir direct, est évidemment sous-administré. Au début du XVIe ce sont d’autres hommes issus de l’aristocratie qui perçoivent les revenus des terres, désormais baillées à ferme. Benoît BEAUCAGE Professeur, Université de Rimouski, Canada L’organisation du travail dans les commanderies du prieuré de Provence en 1338. Dans la première moitié du XIVe, l’ordre de Saint-Jean de Jérusalem tire l’essentiel de ses ressources de l’exploitation d’un dense réseau de commanderies européennes dont chacune doit verser annuellement au siège de l’Ordre, à Rhodes, une taxe proportionnelle à ses revenus que l’on appelle la responsion. Or, les commanderies n’ont pas toutes et de loin la même valeur. Aussi, leurs titulaires, les commandeurs sont-ils mutés périodiquement d’un établissement à l’autre, dans une sorte de cursus honorum où l’importance de la commanderie croît avec l’âge et le mérite reconnu de celui à qui on l’attribue. En 1338, l’activité économique de presque toutes les commanderies du prieuré de Provence repose principalement sur l’exploitation directe d’un domaine dans lequel la culture des blés et celle du vin dominent. Quant au travail agricole proprement dit, il est effectué d’abord par des équipes de travailleurs permanents qui résident dans les établissements de l’Ordre, où en plus d’être logés, nourris et vêtus, ils perçoivent un salaire variable selon le métier qu’ils exercent. Ils ont à leur disposition des attelages d’animaux de trait dont le nombre semble fixé pour chaque établissement et ne peut être diminué pour quelque raison que ce soit. Ce mode de production fondé sur le faire-valoir direct, selon mes recherches, est beaucoup trop coûteux par rapport à ce qu’il produit et entraîne le déficit de la plupart des établissements. Mais ce seront les crises de la seconde moitié du XIVe qui amorceront une transformation décisive. La destruction massive des établissements de l’Ordre et la disparition brutale de ses moyens de production conduisent rapidement à l’arrentement des terres et des droits et à une métamorphose de l’Ordre en Occident. Helen NICHOLSON Docteur, Université de Cardiff, Grande-Bretagne Les femmes dans les commanderies Templières et Hospitalières. Les règles des ordres militaires ne nous informent que très partiellement sur le rôle des femmes dans leurs communautés, cependant on sait , par expérience pour d’autres ordres, à quel point la règle et la pratique ont pu diverger en ce domaine. Le statut des femmes dans les ordres militaires est un sujet de Mme Nicholson recherches et de débats. au cours de son Intervention Les ordres militaires avaient des positions différentes vis à vis de l’admission des femmes. A un extrême se situait l’Ordre de Saint-Jacques qui accepta dès le début l’institutionnalisation de la présence féminine tandis qu’à l’autre extrême on trouvait la Règle de l’Ordre du Temple qui bannissait l’admission des femmes dans ses maisons quelles qu’en soient les circonstances. L’Ordre Teutonique n’acceptait pas non plus les femmes parce que, selon la Règle, les femmes auraient poussé les frères à se “laisser aller”, emolliri. Elles pouvaient, cependant, devenir des « demi-sœurs » qui prenaient soins des 5 malades. Il convenait de les loger dans des maisons séparées de celles des frères. On voit donc que les femmes pouvaient être associées aux commanderies masculines des ordres militaires en tant que consoror et comme donatae. A proprement parler, une consoror était attachée à une commanderie d’un ordre militaire mais vivait dans sa propre demeure, alors que une donata avait pour dessein de rejoindre l’Ordre dans le futur. En réalité, dans les documents on trouve les termes de consoror et de donata utilisés l’un pour l’autre et indifféremment, se rapportant aussi bien aux femmes vivant dans la commanderie qu’à celles vivant dans leurs propres maisons. Et pour certaines d’entre elles, on s’aperçoit qu’elles participaient activement à la vie de la commanderie : finançant la construction d’une chapelle ou certifiant des documents. Alain DEMURGER Maître de Conférence, Université Paris I, France Le personnel des commanderies d’après les interrogatoires du procès des Templiers. Les interrogatoires des Templiers ont d’abord été utilisés par les historiens –et c’est bien normal- comme un document judiciaire permettant d’analyser une procédure et de se poser la question de la véracité des accusations et des raisons d’un procès aussi retentissant. Mais chaque déposition donne aussi des indications biographiques succinctes mais précieuses sur les Templiers en tant qu’individus et sur le réseau des commanderies au moment du procès, soit en 1307. Chaque Templier répond en effet, avant d’être questionné sur le fond à un interrogatoire d’identité : âge, statut social, temps de présence dans l’ordre, commanderie où il réside, fonction exercée, commanderie où il a été reçu, nom de celui qui l’a reçu, nom de ceux qui furent les témoins de sa réception ou de ceux qu’il a vu recevoir dans l’Ordre. Des recoupements entre les différentes dépositions, la confrontation des dépositions successives d’un même Templier permettent de rectifier certaines erreurs de mémoire des accusés et de préciser certaines indications, celles de nature chronologique par exemple. C’est d’abord à l’analyse de ces indications que je m’attache, mais je ne me limite pas aux seuls Templiers interrogés. J’entends aussi tirer le maximum d’informations sur ceux qu’ils citent. Cent trente-sept Templiers ont été interrogés à Paris en octobre-novembre 1307 ; ils livrent les noms des Templiers qui les ont reçus, de ceux qui étaient présents à leur réception, de ceux qu’ils ont vu recevoir, soit en tout les noms de 267 autres Templiers. Ils donnent ainsi des indications nouvelles sur les commanderies, sur le personnel, son nombre, ses fonctions dans la commanderie. Même si nous n’obtenons souvent qu’un nom, qu’un lieu, le croisement de ces données permet d’augmenter considérablement le nombre des Templiers connus et de mieux préciser le réseau des commanderies. Je me limite aux interrogatoires des Templiers du royaume de France au cours de la première phase du procès en 1307, ainsi qu’à celui de la deuxième phase, devant la commission pontificale de Paris en 1309-1310. Cela doit nous permettre une meilleure connaissance du « peuple Templier » ainsi que de ce qui fut le cadre de son existence -la commanderie- au cours des trente ou quarante dernières années de l’Ordre du Temple. localisation géographique et de la position topographique des ces commanderies. Le point de départ était le don d’une église et de terres adjacentes, avec une préférence donnée à celles qui étaient situées à proximité de grandes voies terrestres ou navigables et dans un espace ayant un fort potentiel de développement économique. Les deux Ordres, sans aucun doute, sollicitaient des parrainages. Si les Templiers réussirent mieux au départ, c’est parce qu’ils étaient soutenus par la royauté, ce qui n’était pas le cas des Hospitaliers. Alors que les manoirs Templiers servant de commanderies tendaient à être centralisés et étaient surtout constitués de terres domaniales, les Hospitaliers devaient s’installer sur des domaines fragmentés faits surtout de petites propriétés ou de fermages très dispersés sur de nombreuses paroisses. Ce contraste est très évident dans l’Essex où le patrimoine des Templiers comprenait au moins treize moulins mais seulement trois églises, alors que les Hospitaliers possédaient sept églises et seulement deux ou trois moulins. En plus des registres publics, la plus importante source d’information pour l’étude de l’économie rurale des ordres militaires en Angleterre, il faut ajouter l’Enquête sur le Temple de 1185, le Cartulaire de Sandford, et le grand Cartulaire Hospitalier de 1442. Questions de l’assistance aux intervenants Robert FAVREAU Professeur émérite, Poitiers, France L’enquête pontificale de 1373 sur les Hospitaliers dans le diocèse de Saintes. En 1147, lors de la conquête de la ville de Santarém sur les musulmans, les Templiers reçurent en remerciement de leur participation du premier roi du Portugal, Alfonse Henrique, le domaine de Ceras (nom primitif du domaine de Tomar), avec le droit d’exemption éclésiastique sur toutes les églises, construites ou à ériger sur ce domaine ; ce privilège fut confirmé par le Saint Siège, auquel les Templiers offrirent toutes les églises du domaine de Ceras. Le pape les accepta et les plaça sous sa protection et dépendance. Ainsi fut créé le « Nullius Diocesis » De l’enquête lancée par le pape Grégoire XI sur les ressources de l’Ordre de l’Hôpital Saint-Jean de Jérusalem dans toute la chrétienté en 1373, on a, par chance, gardé le compterendu pour le diocèse de Saintes. L’enquête permet d’abord de dresser, à une date donnée, l’état des commanderies, de leur personnel, de leurs membres dans le diocèse. Il semble bien que l’on ait encore, en 1373, respecté l’appartenance d’origine au Temple ou à l’Ordre de l’Hôpital. On aurait ainsi 44 maisons, dont 30 d’origine Templière. A l’exception de La Rochelle, l’implantation est rurale. Dans l’ordre d’importance on a le Temple de La Rochelle, Bourgneuf, Beauvais-sur-Maha, Saint-Jean-du-Pérot à La Rochelle, les Epeaux, et, de taille bien moindre et plus difficile à connaître, Le Dognon, Bussac, Le Deffend, Civrac, Le Breuil-duPas, Châteaurenard, Eglises-d’Argenteuil et Courant. Les chevaliers sont peu nombreux, il y a surtout des prêtres et des sergents ; il faut y joindre les « données », associés à la vie de l’ordre mais n’en portant pas l’habit. La moyenne des âges indiqués est de 42 ans. En donnant régulièrement l’état ancien des ressources, l’enquête permet une vue globale des biens des Hospitaliers. Les revenus sont très différents selon les commanderies, les unes urbaines (La Rochelle), d’autres à la tête de seigneuries (Bourgneuf, Beauvais), les dernières simplement propriétaires fonciers. La vigne est partout présente, mais très prédominante en Aunis. Les céréales l’emportent en Saintonge méridionale. Marais salants d’Aunis ou de Gironde ont une place réduite, de même que l’élevage, mentionné presque uniquement pour les chapons et les poules. L’intérêt majeur de l’enquête est de pouvoir mesurer 6 11 Alvaro José BARBOSA Architecte-Conservateur, Tomar, Portugal L’architecture de la commanderie Templière de Tomar. Andalus califat du IX e et X e siècle avaient déjà un plan quadrangulaire qui ressemble de beaucoup à celui qui a été utilisé en Orient par les croisés. La disposition des châteauxcommanderies des Templiers de la Couronne d’Aragon bâtiments groupés autour d’une cour- a représenté une nouveauté dans le contexte de l’architecture militaire occidentale. Sven EKDAHL Conservateur des Archives, Berlin, Allemagne La stratégie de l’organisation des commanderies de l’Ordre Teutonique en Prusse et en Livonie. La division de la Prusse en commanderies se fit progressivement, au fur et à mesure des avancées de l’occupation après 1231, lorsque l’Ordre Teutonique traversa la rivière Vistule avec l’intention d’arracher le Kumberland des mains des païens prussiens. Les chevaliers partirent de Thorn, descendirent la Vistule, suivant le fleuve jusqu’à Könisberg. Des forteresses furent construites et des villes furent fondées. Cette colonisation s’étendit ainsi d’Ouest en Est, en suivant, naturellement, la direction prise pendant l’occupation du pays. La colonisation de la partie sauvage du Sud de la Prusse, en revanche, commença au Nord, par les trois commanderies orientales de Balga, Brandenbourg, et Königsberg. En 1309, l’Ordre acquit les villes de Danzig et de Pomorellia, qui fut partagée en cinq grandes commanderies. La même année, le Grand Maître quitta Venise, où il résidait en tant qu’invité depuis la chute d’Acre, pour s’installer dans la forteresse de Marien Burg, qui, dans sa conception initiale, avait été conçue comme une commanderie château. Un an après sa défaite écrasante en Livonie en 1236 contre les païens Lithuaniens, l’Ordre des Porte-Glaive fusionna avec l’Ordre Teutonique qui lui reprit toutes ses possessions. C’est pourquoi, l’Ordre Teutonique s’efforça, au cours des années suivantes, de créer un passage par voie de terre à Samogitia, entre la Prusse et la Livonie. En 1283, la guerre contre les Prussiens fut suivie par celle contre les Lithuaniens. Quand les Polonais se joignirent à ces derniers dans la « Grande Guerre » de 1409-1411, l’Ordre perdit la grande bataille de Tannenberg (Grunwald, Zalgiris) le 15 juillet 1410. A partir de ce faits cette communication va poser les problèmes importants concernant la stratégie d’implantation des commanderies en Prusse et en Livonie. IV – L’économie des Commanderies de Tomar, dont le représentant du Pontife était le Grand-Prieur des Templiers de Tomar. Par la suite, le Grand-Prieur recevra du Saint Siège les attributs et les honneurs propres à la dignité d’évêque. Près de la rivière de Tomar, à l’emplacement d’un couvent bénédictin aujourd’hui disparu, les Templiers vont ériger la cathédrale de leur diocèse, vouée à Notre Dame du Lait, patronne des Bénédictins. L’église sera dénommée Sainte Marie de Tomar et plus tard, Sainte Marie des Oliviers. Au temps des découvertes maritimes du XVe, avec les chevaliers du Christ, héritiers du Temple au Portugal, elle deviendra l’église mère de toutes les paroisses de l’Outre Mer. En 1160, les Templiers fondent le château de Tomar. C’est à l’abri de ses remparts que vécurent les premiers habitants de Tomar dans l’enclos le plus grand s’élargissant vers le sud. Dans l’enclos du nord logeaient les Templiers. Entre ces deux espaces s’étendait une vaste cour qui séparait les deux communautés. A chaque extrémité de cette cour furent construits le cœur de la forteresse ou le donjon, contigu aux logements des moines-guerriers et, à l’ouest, le lieu mystique, symbole du Saint-Sépulcre, l’église rotonde des Templiers, avec son portail ouvrant vers l’orient. III – Vie et Fonctions des Commanderie Noël COULET Professeur émérite, Aix-en-Provence, France La vie quotidienne dans le prieuré de Saint-Gilles d’après l’enquête de 1373. Le 10 février 1373, Grégoire XI désireux de réformer l’Ordre de l’Hôpital confie aux évêques le soin de réaliser une enquête sur les maisons de l’Ordre situées dans leur diocèse. Les procès-verbaux de cette enquête qui reproduisent dans la majeure partie des cas le détail des témoignages recueillis portent essentiellement sur le nombre et le nom des frères résidant dans ces établissements et sur la situation économique des différentes commanderies. Ils sont conservés pour treize des diocèses compris dans le ressort du prieuré de Saint-Gilles. Ces documents n’éclairent pas directement la vie quotidienne des maisons de l’Ordre. Mais certains des témoins apportent des informations sur la civilisation matérielle : nourriture, vêtement, équipement domestique, sur l’importance et les attributions du personnel salarié, sur la part que l’accueil des pauvres et des hôtes tient dans la vie de ces maisons, sur les conséquences de la guerre sur la vie des commanderies, sur les relations des frères entre eux ou sur leurs rapports avec le chef de la commanderie. Michaël GERVERS Professeur, Université de Toronto, Canada La commanderie, unité économique en Angleterre. La collecte et le transfert des fonds résultant de l’administration de propriétés toujours plus variées vers le siège de l’Ordre dans l’Est fut dès le départ la raison d’être des établissements Templiers et Hospitaliers en Europe. La première étape fut la création d’un prieuré que les Templiers semblent avoir constitué dès leur installation en Angleterre en 1128, grâce à l’acquisition du site connu sous le nom de « Vieux Temple » à Londres. Les Hospitaliers suivirent, mais pas avant 1144 lorsque Jordan Bricett leur donna une terre à Clerkenwell dans les faubourgs de la ville. A partir de là, les deux ordres réussirent à acquérir diverses propriétés à travers le pays pour en faire des centres administratifs locaux c’est-à-dire des commanderies. Les Templiers mènent la marche avec 26% de leurs commanderies aux environs de 1140 et 62% aux environs de 1160 alors que les Hospitaliers n’occupaient que 33% des leurs. Cependant la plus grande partie du réseau des deux Ordres était en place à la fin du siècle. Un soin particulier était porté au choix de la 10 Présentation de M. Barbosa 7 Dieter J. WEISS Docteur, Université de Francfort, Allemagne La vie spirituelle dans l’Ordre Teutonique : une comparaison entre les commanderies de Franconie et de Prusse. Récemment Monsieur Kaspar Elm a fait le point sur la recherche concernant la vie spirituelle des ordres militaires du moyen-age et a mis en évidence certains problèmes : le caractère spécifique des ordres militaires et le manque de sources sur ce sujet. Même s’il y a de nombreuses publications concernant l’Ordre Teutonique en Prusse parce qu’il était un Etat important du point de vue politique, il n’en est pas moins vrai que la vie spirituelle dans les commanderies de Franconie est elle beaucoup plus difficile à appréhender. Saint Bernard de Clairvaux a probablement eu un rôle décisif dans la justification des ordres religieux militaires et sur leur vie spirituelle. La vie spirituelle des chevaliers est en harmonie avec celle de leur époque. Ils étaient occupés à s’efforcer de sauver leurs âmes. Cet objectif se trouve particulièrement exprimé dans la liturgie, les services du souvenir et l’achat d’indulgences généreuses qui étaient toujours liés au sacrement de pénitence. Les règles monastiques, les calendriers, les consécrations d’églises, les autels, les donations religieuses sont des sources d’informations précieuses pour étudier cet aspect. En particulier en ce qui concerne la Prusse, il faut aussi consulter la littérature de l’Ordre. L’Ordre Teutonique a choisi comme patrons : la Vierge Marie mère de Dieu, Sainte Elisabeth et Saint Georges. Ces choix reflètent l’association de la vie spirituelle des chevaliers avec leur implication sociale telles qu’elles sont exposées dans les règles. Les liens avec l’église impériale (Reichskirche) et la noblesse étaient plus étroits en Franconie qu’en Prusse. Donc, notre recherche proposera une présentation des idées de la chevalerie. Il ne faut oublier de parler des différences qui existent entre les maisons religieuses. C’est seulement après la réforme catholique de l’Ordre Teutonique que des ressemblances se feront jour et surtout après la création d’un séminaire à Mergentheim. qui n’étaient plus en mesure de servir continuaient aussi à être logés dans l’enceinte des maisons Templières, même si les droits étaient réduits dans certains cas pour ceux qui n’étaient plus en mesure de rendre aucun service. Par contre, les pensions n’étaient pas réduites, même lorsque plus aucun service n’était rendu. Le nombre de ceux qui recevaient des pensions et des allocations alors qu’ils n’étaient plus en mesure de travailler n’est pas connu, mais en Angleterre les attributions de ce type étaient habituellement faites à ceux qui avaient servi l’Ordre pendant une longue période et les accords sur les allocations qui étaient en vigueur en 1307 étaient pour la plupart assez récents et suggéraient que ces attributions étaient habituellement faites aux personnes qui avançaient dans l’âge. Déjeuner dans le dortoir des moines. Joan FUGUET SANS Professeur, Barcelone, Espagne L’architecture militaire des commanderies des Templiers d’Aragon et de Catalogne. Les commanderies Templières d’Occident avaient pris des mesures spécifiques en faveur des frères et des autres personnes touchées par la vieillesse. La proportion des frères entrant dans cette catégorie n’est pas connue, mais d’après le procès des Templiers, il est clair qu’elle représentait en fait un nombre élevé – dans certaines régions, on peut estimer que près de 40% de la population était âgée de plus de 50 ans. Les Templiers qui souffraient de problèmes liés à leur grand âge étaient exemptés de certaines obligations, selon la règle et les usages ; ils avaient également droit à une alimentation particulière. En Angleterre, certains d’entre eux, mais pas tous, étaient logés dans les maisons de Denney et d’Eagle. On n’a cependant que peu de raisons de penser que d’autres pays faisaient de même en regroupant le personnel âgé dans des couvents spécialisés. Une partie des aumônes distribuées par l’Ordre revenait aux personnes âgées, mais on venait en aide aux personnes âgées de l’extérieur principalement en leur attribuant des pensions et des allocations. Si certaines de ces indemnités étaient achetées, la plupart d’entre elles revenaient à des hommes employés par l’ordre et étaient attribuées partiellement ou en totalité en paiement d’un service. Ce schéma de fonctionnement apparaît dans des documents qui subsistent en Angleterre et en Aragon depuis l’époque du procès des Templiers. La vie des personnes âgées était assurée d’une autre façon par l’attribution de postes à vie dans l’administration Templière, ce qui signifiait que ceux qui n’étaient plus en mesure de remplir leur fonction pouvaient la déléguer à d’autres tout en conservant une partie de leur salaire. Ceux qui grâce aux allocations étaient nourris et assistés, mais Dans la Couronne d’Aragon, comme dans le reste des pays européens, l’ordre du Temple a eu un objectif économique du fait des besoins d’approvisionnement des Etats Latins. Les commanderies aragonaises ont été des centres agricoles et d’élevage à la campagne et des noyaux de l’économie dans la ville. Cependant, bien des couvents de la Couronne d’Aragon ont eu un caractère militaire et leurs bâtiments expriment bien cette caractéristique. Cela a pour origine le fait que l’Ordre avait accepté de participer à la « Reconquista » (reconquête) des territoires occupés par les Arabes, puis à la défense des nouvelles frontières. Les caractéristiques architecturales que cette fonction vont impliquer seront le principal sujet de notre communication. Tous ces châteaux-couvents Templiers avaient été des forteresses islamiques ou chrétiennes. L’état dans lequel elles se trouvaient lors de leur prise reste une énigme. On peut envisager qu’elles étaient presque en ruines. Quoi qu’il en soit, les Templiers les ont remodelées afin de les adapter à leurs propres besoins pour les convertir en couvents-commanderies. Ils les ont munies de bâtiments conventuels tels que chapelle, cloître, réfectoire, salle des moines. Dans la construction ou le remaniement de ces forteresses, les Templiers ont profité des typologies architecturales qui existaient dans le pays, mais ils se sont aussi servis de nouvelles formes empruntées à l’Orient. Le modèle chrétien était composé d’un château dominé par une grande tour –ou donjon –avec d’autres bâtiments plus ou moins assemblés, le tout entouré par une enceinte (Montso, Barbérà, Granyena, Castellot …). Ce qui constitue une innovation est la disposition en plan quadrangulaire ou polygonal des bâtiments autour d’une cour –comme dans la plupart des grands châteaux de Syrie et Palestine- des couvents de Miravet, Peniscola, Xivert. Quelquefois, comme à Gardeny, apparaît une seconde enceinte concentrique. Même si l’on parle d’innovations dues aux influences orientales, il ne faut pas oublier que les bâtiments militaires d’Al- 8 9 Alan FOREY Docteur, Grande-Bretagne Mesures prises en faveur du personnel âgé des commanderies Templières.