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Je positive ! [email protected] Nanterre, Juin 2010 1 La Logique mathématique Théorie des ensembles Théorie de la démonstration Récursivité T HEORIE DES MODELES 2 La Logique du premier ordre Un langage L est la donnée d'un ensemble de symboles de relation ri(x1, ... xni) , dont un symbole binaire spécifique x1 = x2 , et de symboles d'individu (ou constante) ck . Une L-structure est un ensemble de base M non vide, muni d'une interprétation de chaque ri par une partie de Mni , et d'une interprétation de chaque ck par un élément de M ; le symbole = est interprété par l'égalité. 3 Des écritures du type ri(α1, ... αni) , ou bien α1 = α2 , où les αj sont des variables ou des constantes, sont dites "formules atomiques". A partir des formules atomiques , on fabrique les formules générales grâce à l'emploi des connecteurs ∧ , ∨ , ¬ et des quanteurs ∃ , ∀ . Les formules sont de nature finie ; leurs quanteurs sont du premier ordre, c'est-à-dire qu'ils quantifient des éléments de M : on ne quantifie pas les parties de M , ni les relations entre ses éléments, et on ne parle de rien d'extérieur à M . 4 Les seules relations dont on parle sont celles qui sont définies par une formule à partir de celles qui sont nommées dans le langage. Une formule ϕ(x1, ... xn) est satisfaite, ou bien n'est pas satisfaite, par un n-uplet (a1, ... an) d'éléments de M . Un énoncé est une formule sans variables libres. Dans une structure M , il est satisfait, ou bien non satisfait. 5 Théorie T : ensemble d'énoncés. Modèle de T : une structure qui satisfait à tous les énoncés de T . Théorie consistante, ou non-contradictoire : possède un modèle. L'énoncé ε est conséquence de la théorie T : ε est satisfait dans chaque modèle de T . 6 Théorème de Compacité. Pour qu'une théorie de la Logique du premier ordre soit consistante, il suffit que chacun de ses fragments finis le soit. 7 Démonstrations du Théorème de Compacité • par le Théorème de Gödel : une théorie T est consistante pourvu qu'elle ne mène pas à une contradiction selon le "calcul restreint des Principia" ; or une preuve de contradiction ne fait intervenir qu'un fragment fini de T . • par les ultraproduits : après avoir choisi un modèle Mi pour chaque fragment fini Ti de T , on fait un ultraproduit des Mi qui est modèle de T . • par la méthode de Henkin : on ajoute au langage des constantes servant de témoins aux ∃ , et on se ramène à la compacité pour les énoncés libres, qui est chose facile. 8 La Logique positive On ne change pas les notions de langage ni de structure, mais on supprime la négation et le quanteur universel. Une formule positive s'obtient donc en n'utilisant que ∧ , ∨ , ∃ ; sous forme prénexe elle s'écrit (∃ y) ϕ(x,y) , où ϕ est libre positive. Le langage doit comprendre, en plus de = , un symbole de relation 0-aire spécifique ⊥ désignant l'antilogie, pour pouvoir définir positivement l'ensemble vide. 9 Homomorphismes et immersions Un homomorphisme est une application h de M dans N telle que, pour tout uple a de M , toute formule atomique satisfaite par a l'est aussi par h(a) ; s'il existe un homomorphisme de M dans N , on dit que N est une continuation de M . Si, pour tout a de M , h(a) et a satisfont aux mêmes formules atomiques, on dit que h est un plongement, et que N est une extension de M . 10 Si h est un homomorphisme de M dans N , toute formule (existentielle) positive satisfaite par a dans M est satisfaite par h(a) dans N . Si pour tout a de M , a dans M et h(a) dans N satisfont les mêmes formules positives, on dit que h est une immersion (ou un homomorphisme pur). Les homomorphismes ont des limites inductives. 11 Limites inductives h0 h1 hn-1 hn hn+1 M0 → M1 → ... → Mn → Mn+1 → ... M M = réunion disjointe des Mn , quotienté par le relation d'équivalence "être finalement égaux" ; une formule atomique est satisfaite dans M si elle est finalement satisfaite dans Mn . Plus généralement : Mi indexée par I totalement ordonné, avec hji de Mi dans Mj si i < j , tels que hkj o hji = hki si i<j<k. 12 Structures existentiellement closes Une classe de L-structures est dite inductive si elle est close par limite inductive d’homomorphismes. Un élément M de la classe de L-structures Γ est dit (positivement) existentiellement clos dans Γ si tout homomorphisme de M dans un quelconque élément de Γ est une immersion. AXIOME DE CHOIX. Dans une classe inductive, tout élément se continue en un existentiellement clos. Exemple. C non vide, muni d'une relation d'équivalence ≈ . Langage : un individu pour chaque c de C , une relation unaire X(x) . Conditions pour être dans la classe Γ : ¬ c = c' si c est distinct de c' , ¬ [X(c) ∧ X(c')] si c ≈ c' . 13 Enoncés Les formules servent à définir des relations, les énoncés expriment des propriétés des relations définissables. On ne considère que des énoncés dits h-inductifs (ou cohérents), exprimant qu'une relation positivement définie est incluse dans une autre ; il sont donc de la forme (∀ x) [ (∃ y) ϕ(x,y) → (∃ z) ψ(x,z) ] , où ϕ et ψ sont libres positives. Ils passent aux limites inductives. Cas particulier : les énoncés h-universels, exprimant qu'une relation positivement définie est vide, de la forme (∀ x) [ (∃ y) ϕ(x,y) → ⊥] , soit encore ¬ (∃ x,y) ϕ(x,y) , où ϕ est libre positive. 14 Exemples ; théories modèles-complètes La graphitude (néologisme royal) de la formule positive γ(x,y) s'exprime h-inductivement par (∀ x) [ x = x → (∃ y) γ(x,y) ] et (∀ x, y, z) [ γ(x,y) ∧ γ(x,z) → y = z ] , si bien qu'on peut mettre si on veut des fonctions dans le langage. De même, les énoncés h-inductifs (∀ x) [ ϕ(x) ∧ ψ(x) → ⊥ ] et (∀ x) [ x = x → ϕ(x) ∨ ψ(x) ] expriment la complémentarité des ensembles définis par les formules positives ϕ(x) et ψ(x) . Une théorie h-inductive T est dite modèle-complète si à toute formule positive ϕ(x) correspond une formule positive ϕ*(x) telle que T implique que ϕ(x) et ϕ*(x) soient complémentaires. 15 Compacité de la Logique positive THEOREME. Pour qu'une théorie h-inductive soit consistante, il suffit que chacun de ses sous-ensembles finis le soit. Conséquence de deux lemmes qui, eux, ne demandent pas l'Axiome de Choix : LEMME 1. Un ensemble d'énoncés h-universels ou atomiques est consistant pourvu que toutes ses parties finies le soient. LEMME 2. Si T est une théorie h-inductive, et Tu est l'ensemble des énoncés h-universels du même langage qui sont conséquences d'un de ses fragments finis, tout modèle existentiellement clos de Tu est modèle de T . 16 LEMME 1. Un ensemble d'énoncés h-universels ou atomiques Tu ∪ Ta est consistant pourvu que toutes ses parties finies le soient. Démo. On peut supposer que l'ensemble C des individus du langage n'est pas vide. On considère la structure de base C , qui ne satisfait que les énoncés atomiques de Ta ; si elle ne satisfait pas un énoncé ε de Tu , c'est qu'il y a un contreexemple dans ce modèle minimum de Ta , et que ε est contradictoire avec un fragment fini de Ta . Fin 17 LEMME 2. Si T est h-inductive, et Tu est l'ensemble des énoncés h-universels qui sont conséquences d'un de ses fragments finis, tout modèle existentiellement clos de Tu est modèle de T . Démo. Considérons un modèle M existentiellement clos de Tu , et un énoncé ε dans T : (∀ x) [ (∃ y) f(x,y) → (∃ z) g(x,z) ] . Nous pouvons écrire g(x,z) sous la forme g1(x,z) ∨ ... ∨ gn(x,z) , où chaque gi(x,z) est une conjonction finie de formules atomiques. Soit a un uple d'éléments de M qui ne satisfait pas (∃ z) g(x,z) ; cela est aussi vrai pour l'image de a dans toute continuation de M qui soit modèle de Tu , ce qui signifie que, pour chaque i , la théorie formée de Tu , de gi(a,z) et de l'ensemble D(M) des formules atomiques vraies dans M est inconsistante (le langage de cette théorie est celui de T , augmenté d'un symbole d'individu par élément de M , et du uple z d'individus). 18 D'après le Lemme 1, dans chaque cas un fragment fini de D(M) suffit à cette inconsistance, et on en déduit l'existence d'une formule libre positive h(a,b) satisfaite dans M et incompatible avec g(a,z) et un certain fragment fini T'u de Tu . En conséquence, T'u implique ¬ (∃ x,z,u) g(x,z) ∧ h(x,u) , si bien que cet énoncé h-universel est conséquence d'un fragment fini T' de T , dans lequel on peut inclure ε . Dans ces conditions, T' a pour conséquence ¬ (∃ x,y,u) f(x,y) ∧ h(x,u) , et comme ce dernier énoncé est h-universel, il fait partie de Tu , si bien que a ne peut satisfaire (∃ y) f(x,y) ; autrement dit, M ne contient pas de contre-exemple à ε . Fin 19 Compacité de la Logique avec négation THEOREME. Pour qu'un ensemble d'énoncés de la Logique du premier ordre (avec négation) soit consistant, il suffit que chacun de ses sous-ensembles finis le soit. Démo. Nous étendons le langage L en un langage LM qui contient un nouveau symbole de relation pour chaque formule non-atomique du langage avec négation ; en particulier, aux énoncés non atomiques de L sont associées des variables propositionnelles dans LM . Il est impératif de n'utiliser que les symboles ∃ , ∨ , ∧ et ¬ dans l'écriture des formules ; les autres symboles doivent être considérés comme des abréviations, et en particulier ∀ est mis pour ¬∃¬ ; il faut qu'une formule en ∀ soit décomposée en trois étapes, car sinon on introduirait un énoncé structurel non h-inductif. 20 Nous appelons énoncés structurels les énoncés suivants, qui sont tous des énoncés h-inductifs du langage LM : 1. si ϕ(x) , ψ(x) et χ(x) sont associés respectivement à f(x) , g(x) et f(x)∧g(x) , les énoncés qui déclarent que ϕ(x)∧ψ(x) et χ(x) sont équivalents 2. si ϕ(x) , ψ(x) et χ(x) sont associés respectivement à f(x) , g(x) et f(x)∨g(x) , les énoncés qui déclarent que ϕ(x)∨ψ(x) et χ(x) sont équivalents 3. si ϕ(x) et ψ(x) sont associés respectivement à f(x) et ¬f(x) , les énoncés ¬ (∃ x) ϕ(x)∧ψ(x) et (∀ x) ϕ(x)∨ψ(x) qui déclarent que ϕ(x) et ψ(x) sont complémentaires l'un de l'autre 4. si ϕ(x,y) et ψ(x) sont associés respectivement a f(x,y) et (∃ y) f(x,y) , les énoncés qui déclarent que (∃ y) ϕ(x,y) et ψ(x) sont équivalents. 21 La morleyisée d'une théorie négationiste T de langage L est la théorie h-inductive TM modèle-complète, de langage LM , composée des énoncés structurels et des constantes propositionnelles (relations 0-aires) associées aux énoncés de T . On observe que : - si chaque fragment fini de T est consistant, il en est de même pour TM ; - si TM est consistante, T aussi. En conséquence on obtient le théorème de compacité général par une simple manipulation linguistique à partir de celui de la Logique positive. Fin 22 Itaï BEN YAACOV & Bruno POIZAT Fondements de la Logique positive The Journal of Symbolic Logic, 2007, 1141-1162 23