Les interactions médicamenteuses en médecine bucco
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Les interactions médicamenteuses en médecine bucco
Interactions médicamenteuses Dossier l Urgences Interactions physico-chimiques : elles ont une influence sur la quantité de principe actif mise à disposition au niveau du site d’administration. Elles peuvent être de nature médicament/médicament, médicament/ aliment ou médicament/dispositif médical. Les mécanismes mis en jeu regroupent des réactions de précipitation, de chélation ou d’adsorption. Les interactions physico-chimiques se traduisent par une diminution ou une augmentation des quantités réellement disponibles en médicament après administration. Les interactions médicamenteuses en médecine bucco-dentaire Claire Egloff, Julien Scala-Bertola, Elise Pape, Frédéric Camelot, Céline Clément, Kazutoyo Yasukawa La prescription médicamenteuse fait partie intégrante de l’arsenal thérapeutique de l’odontologiste. Qu’elle soit ou non réalisée dans le cadre de l’urgence, elle devra toujours être précédée d’une anamnèse rigoureuse afin d’éviter la survenue d’interactions médicamenteuses cliniquement significatives. Face à la polymédication et à l’automédication des patients, l’attention portée à la prescription médicamenteuse se doit, aujourd’hui plus qu’hier, d’être renforcée. Enfin, une attention toute particulière devra également être portée aux interactions physico-chimiques pouvant exister entre les médicaments prescrits et les dispositifs médicaux que nous sommes amenés à utiliser. 2 U ne interaction médicamenteuse concerne la modification des effets thérapeutiques d’un médicament, soit par un autre médicament, soit par une autre substance (aliments, alcool, tabac…) administrée de façon concomitante. Sur plus de 143 000 hospitalisations annuelles dues à des effets indésirables de médicaments en France, 30 % sont liées à des interactions médicamenteuses, chiffres stables depuis 1998 (étude EMIR [1]). Parmi les facteurs de risque d’interaction médicamenteuse, la polymédication est à surveiller particulièrement. En effet, il a pu être montré que le risque d’interactions médicamenteuses augmente avec le nombre de spécialités prescrites (7 % des patients présentaient des interactions médicamenteuses pour une consommation quotidienne de 6 à 10 médicaments contre 40 % pour une consommation quotidienne de 16 à 20 produits différents [2]). Les interactions médicamenteuses, cliniquement significatives, se traduisent classiquement par une diminution de l’effet thérapeutique des médicaments ou une augmentation du risque d’apparition de leurs effets indésirables. Les interactions médicamenteuses peuvent être d’ordre physico-chimique, pharmacocinétique ou pharmacodynamique [3]. L’INFORMATION DENTAIRE n° 25 - 24 juin 2015 Interactions pharmacocinétiques : elles concernent l’ensemble des processus qui vont conditionner l’exposition systémique d’un patient à un médicament. D’un point de vue pharmacocinétique, les interactions médicamenteuses peuvent s’observer au niveau de l’absorption (compétition pour un transporteur), de la distribution (compétition pour les protéines de transport), du métabolisme (induction/inhibition enzymatique) et au niveau de l’élimination (compétition pour les systèmes d’élimination). Les interactions pharmacocinétiques se traduisent par des diminutions ou des augmentations des concentrations sanguines en médicament. Interactions pharmacodynamiques : elles résultent d’une modification de l’effet d’un médicament. Les interactions pharmacodynamiques peuvent se traduire par une diminution ou une potentialisation des effets d’un principe actif. Cette modulation d’effet peut résulter d’une modification d’affinité des médicaments pour leurs récepteurs ou cibles pharmacologiques, d’une synergie ou d’un antagonisme de leurs effets. Règles de prescription [4] Anamnèse Avant toute prescription, une anamnèse complète et rigoureuse est nécessaire. Un interrogatoire du patient doit être conduit sur ses traitements tant habituels qu’occasionnels, et une attention toute particulière devra être portée à l’automédication ainsi qu’aux traitements considérés comme non médicaux par le patient (pilule contraceptive, collyre…). L’idéal serait de conserver une copie des ordonnances du patient dans son dossier médical. Au moindre doute, une mise en relation avec le médecin traitant est fortement recommandée. Des informations complémentaires peuvent également être apportées par les pharmaciens d’officine via le dossier pharmaceutique. Les situations à risque majoré d’interaction médicamenteuse doivent être identifiées et analysées avec attention. Le risque de survenue d’interactions médicamenteuses cliniquement significatives est d’autant plus grand que le patient est âgé, polymédiqué et polypathologique. En cas d’insuffisance hépatique ou rénale, une mise en relation avec le médecin traitant ou un spécialiste peut être conseillée afin d’évaluer la nécessité d’un ajustement posologique. En parallèle de l’aspect pharmacothérapeutique de l’anamnèse, cette dernière pourra être complétée par la recherche d’une consommation de tabac ou d’alcool, voire des habitudes alimentaires du patient. Les informations obtenues lors de l’anamnèse doivent servir de socle à la prescription et permettre d’identifier et d’éviter les situations à risque d’interactions cliniquement significatives. Pour la classification des interactions médicamenteuses, l’Agence Nationale de Sécurité du Médicament (ANSM) définit quatre niveaux de contrainte dans les associations médicamenteuses : Contre-indication Caractère absolu Ne doit pas être transgressée Association déconseillée À éviter Examen approfondi du rapport bénéfice/risque Surveillance étroite du patient Précaution d'emploi Association possible Respect des recommandations pour éviter la survenue de l'interaction À prendre en compte Risque d'interaction existant Simple addition d'effets indésirables Aucune recommandation/jugement du prescripteur L’INFORMATION DENTAIRE n° 25 - 24 juin 2015 3 Interactions médicamenteuses Dossier l Urgences Recherche d’interactions cliniquement significatives Seules seront évoquées ici les contre-indications et associations déconseillées. Les recommandations concernant les précautions d’emploi des associations médicamenteuses les plus fréquentes seront citées. L’ensemble des précautions d’emploi est disponible dans le thesaurus des interactions médicamenteuses [4] publié et régulièrement mis à jour par l’ANSM (dernière version : nomvembre 2015), et dans la rubrique « Interactions » du résumé des caractéristiques du produit (RCP) de la spécialité prescrite. Antalgiques Anti-inflammatoires Qu’elle soit pré- ou post-interventionnelle, la prescription antalgique est un acte courant dans la pratique de l’odontologiste. Elle doit être raisonnée et se baser sur une évaluation du rapport bénéfice/risque de la ou des molécules utilisées. Elle devra également tenir compte de la prise simultanée d’autres traitements (tableau 1). La prescription de paracétamol chez un patient traité par antivitamines K nécessitera un contrôle plus fréquent de l’INR. En effet, si le paracétamol est pris à dose maximale (4 g/jour), et cela pendant plus de 4 jours, il existe un risque d’augmentation de l’effet de l’antivitamine K et donc un risque hémorragique. Le recours aux anti-inflammatoires peut être nécessaire devant certains tableaux cliniques ou suites opératoires (tableau 2). Le cas de la prescription de l’acide acétylsali- Tableau 1 - Interactions avec les antalgiques Molécule Niveau de contrainte Association Effet Risque : Hémorragique (activité anti-plaquettaire) Compétition d’élimination pouvant conduire à une augmentation des concentrations plasmatiques du médicament associé et à une apparition de ses effets indésirables. CONTRE-INDICATION Acide acétylsalicylique à visée antalgique (> 0,5 g/prise ou < 3 g/j) Tableau 2 - Interactions avec les anti-inflammatoires Molécule Niveau de contrainte CONTREINDICATION Acide acétylsalicylique à visée antiinflammatoire (> 1 g/prise ou > 3 g/j) Majoration de la toxicité du méthotrexate Anti-inflammatoires non stéroïdiens Majoration du risque ulcérogène et hémorragique digestif Anagrélide Clopidogrel Glucocorticoïdes ASSOCIATION DÉCONSEILLÉE Héparines de bas poids moléculaire (doses curatives) Majoration du risque hémorragique Ticlopidine Anti-inflammatoires non stéroïdiens Majoration du risque ulcérogène et hémorragique digestif Uricosuriques Diminution de l’effet uricosurique Anticoagulants oraux Augmentation du risque hémorragique Méthotrexate Majoration de la toxicité hématologique du méthotrexate CONTREINDICATION (phénylbutazone) Héparines de bas poids moléculaire (doses curatives) Autres AINS Majoration du risque hémorragique Acide acétylsalicylique Anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) Diminution de l’effet uricosurique Morphiniques agonistesantagonistes Morphiniques antagonistes partiels ASSOCIATION DÉCONSEILLÉE Risque de diminution de l’effet antalgique IMAO irréversibles IMAO-A réversibles dont linézolide et bleu de méthylène Risque d’apparition d’un syndrome sérotoninergique L’INFORMATION DENTAIRE n° 25 - 24 juin 2015 Dexaméthasone Majoration du risque ulcérogène et hémorragique digestif Anticoagulants oraux Anti-inflammatoires non stéroïdiens Voir le tableau sur les prescriptions anti-inflammatoires (tableau 2) (AINS) 4 Méthotrexate Dose > 20 mg/semaine Majoration de la toxicité du méthotrexate Uricosuriques CONTRE-INDICATION Majoration du risque hémorragique Méthotrexate Dose > 20 mg/semaine Ticlopidine Tramadol Anticoagulants oraux Héparines non fractionnées (doses curatives) Clopidogrel ASSOCIATION DÉCONSEILLÉE Effet Majoration du risque hémorragique Héparines non fractionnées (doses curatives) Analgésiques morphiniques de pallier II (Codéine ou Tramadol) Association Anticoagulants oraux Anagrélide ASSOCIATION DÉCONSEILLÉE cylique est repris ici, car les posologies à visée antalgique (> 0,5 g/prise ou < 3 g/j) et anti-inflammatoires (> 1 g/ prise ou > 3 g/j) diffèrent à l’instar de ses précautions de prescription. ASSOCIATION DÉCONSEILLÉE L’INFORMATION DENTAIRE n° 25 - 24 juin 2015 Héparines de bas poids moléculaire (doses curatives) Héparines non fractionnées (doses curatives) Augmentation du risque hémorragique Lithium Augmentation de la lithémie pouvant atteindre des valeurs toxiques Méthotrexate Majoration de la toxicité hématologique du méthotrexate Acide acétylsalicylique Majoration du risque hémorragique Vaccins vivants atténués Risque de maladie vaccinale généralisée, potentiellement mortelle 5 Interactions médicamenteuses Dossier l Urgences Une question fréquente est celle de la diminution de l’effet contraceptif des dispositifs intra-utérins (stérilet) liée à la prise d’anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS). Cependant, il n’existe aucune preuve scientifique de cet effet [5]. Aucun lien n’a pu, à ce jour, mettre en évidence une relation entre l’échec de contraception par dispositif intra-utérin et la prise de médicaments [6]. L’existence d’un tel dispositif ne contre-indique donc pas une prescription d’AINS. La prescription d’AINS chez un patient âgé et/ou déshydraté, traité par diurétiques, nécessite certaines précautions [7] comme le renforcement de l’hydratation du patient, principalement en début de traitement. Antibiotiques et antifongiques (tableau 3) En dehors de ces contre-indications et associations déconseillées, certaines précautions d’emploi méritent d’être mentionnées afin d’en informer le patient et de le sensibiliser quant aux modalités de prise en charge et de surveillance de son traitement. - Macrolides : si une prescription de macrolides est nécessaire chez un patient suivant un traitement par statines, il doit être informé du risque d’augmentation des effets secondaires pouvant nécessiter une baisse des doses de statines. L’association d’un macrolide avec la ciclosporine ou le tacrolimus implique une augmentation des concentrations plasmatiques de ces immunosuppresseurs, tandis qu’au contraire l’association clindamycine-tacrolimus induit une diminution de la concentration en tacrolimus. - Fluconazole : l’association fluconazole-théophylline implique un risque de surdosage en théophylline pouvant être évité par une adaptation de la posologie de la théophylline. Par ailleurs, un dosage sanguin de théophylline peut être demandé afin de confirmer l’adaptation posologique. En cas de prescription de fluconazole chez un patient diabétique traité par sulfamide hypoglycémiant, il devra être prévenu du risque accru d’hypoglycémie. Un contrôle rigoureux de la glycémie devra être mis en place. Molécule Niveau de contrainte CONTREINDICATION Itraconazole ASSOCIATION DÉCONSEILLÉE Association Effet Alcaloïdes de l’ergot de seigle vasoconstricteurs Risque d’ergotisme ou de poussées hypertensives Aliskirène Risque majoré d’apparition des effets indésirables (diarrhée, hypotension…) Atorvastatine Simvastatine Risque majoré de rhabdomyolyse Avanafil Vardénafil (> 75 ans) Risque d’hypotension Dabigatran Majoration du risque hémorragique Mizolastine Risque majoré de troubles du rythme ventriculaire Triazolam Risque majoré de sédation Buspirone Risque majoré de sédation Busulfan Immunosuppresseurs Risque d’augmentation d’exposition/ASC cible Ebastine Risque majoré de troubles du rythme ventriculaire (sujets prédisposés) Fésotérodine Toltérodine Risque de surdosage anticholinergique (sujets métaboliseurs lents) Lercanidipine Risque majoré d’effets indésirables (oedèmes) Luméfantrine Risque majoré de troubles du rythme ventriculaire Quinidine Risque majoré de troubles du rythme ventriculaire, acouphènes et/ou cinchonisme Rifampicine Diminution des concentrations plasmatiques et de l’efficacité des deux anti-infectieux Sildénafil Tadalafil Vardénafil (< 75 ans) Risque d’hypotension Névirapine Augmentation des concentrations de Névirapine Diminution des concentrations de Kétoconazole Ticagrelor Diminution du métabolite actif du Ticagrelor Antivitamines K Risque d’hémorragies imprévisibles, éventuellement graves Halofantrine Pimozide Risque majoré de troubles du rythme ventriculaire Sulfamides hypoglycémiants Augmentation du risque hypoglycémique Tableau 3 - Interactions avec les antibiotiques et antifongiques Molécule Niveau de contrainte Association Effet Risque : INHIBITION ENZYMATIQUE CYP3A pouvant conduire à une augmentation des concentrations plasmatiques du médicament associé et à une apparition de ses effets indésirables. ANTIFONGIQUES AZOLÉS (fluconazole, ketoconazole…) Fluconazole 6 CONTREINDICATION ASSOCIATION DÉCONSEILLÉE ASSOCIATION DÉCONSEILLÉE Pimozide Risque majoré de troubles du rythme ventriculaire Colchicine Risque majoré d’effets indésirables de la colchicine Halofantrine Risque majoré de troubles du rythme ventriculaire Midazolam Risque majoré de sédation Rifampicine Diminution des concentrations plasmatiques et de l’efficacité des deux anti-infectieux L’INFORMATION DENTAIRE n° 25 - 24 juin 2015 Kétoconazole (voir Itraconazole) Miconazole CONTREINDICATION CONTREINDICATION L’INFORMATION DENTAIRE n° 25 - 24 juin 2015 7 Interactions médicamenteuses Dossier l Urgences Molécule Niveau de contrainte CONTREINDICATION Posaconazole ASSOCIATION DÉCONSEILLÉE CONTREINDICATION Voriconazole ASSOCIATION DÉCONSEILLÉE CYCLINES CONTREINDICATION Association Effet Association Effet Alcaloïdes de l’ergot de seigle vasoconstricteurs Risque d’ergotisme ou de poussées hypertensives Alcaloïdes de l’ergot de seigle vasoconstricteurs Risque d’ergotisme ou de poussées hypertensives Atorvastatine Simvastatine Risque majoré de rhabdomyolyse Antisécrétoires (Anti-H2 et IPP) Diminution d’absorption du posaconazole Mizolastine Pimozide Risque majoré de troubles du rythme ventriculaire Immunosuppresseurs Risque d’augmentation d’exposition/ASC cible Simvastatine Risque majoré de rhabdomyolyse Rifabutine Risque d’apparition des effets indésirables (uvéites) Ticagrelor Diminution du métabolite actif du Ticagrelor Rifampicine Diminution des concentrations plasmatiques et de l’efficacité des deux anti-infectieux Disopyramide Triazolam Risque majoré de sédation Risque de majoration des effets indésirables du disopyramide ( hypoglycémies sévères, allongement du QT et troubles du rythme ventriculaire graves) Vinca-Alcaloïdes cytotoxiques Majoration de la neurotoxicité de l’antimitotique Ebastine Risque majoré de troubles du rythme ventriculaire (sujets prédisposés) Alcaloïdes de l’ergot de seigle vasoconstricteurs Risque d’ergotisme ou de poussées hypertensives Fésotérodine Toltérodine Risque de surdosage anticholinergique (sujets métaboliseurs lents) Carbamazépine Phénobarbital Primidone Millepertuis Rifampicine Risque d’échec du voriconazole (induction enzymatique) Halofantrine Luméfantrine Risque majoré de troubles du rythme ventriculaire Immunosuppresseurs Risque d’augmentation d’exposition/ASC cible Quinidine Risque majoré de troubles du rythme ventriculaire Alcaloïdes de l’ergot de seigle vasoconstricteurs Risque d’ergotisme ou de poussées hypertensives Simvastatine Risque majoré de rhabdomyolyse Anticonvulsivants (Phénytoïne, Fosphénytoïne) Risque d’échec du voriconazole et augmentation des concentrations plasmatiques en phénytoïne Mizolastine Pimozide Risque majoré de troubles du rythme ventriculaire Simvastatine Risque majoré de rhabdomyolyse Efavirenz Névirapine Inhibiteurs de protéases boostés par Ritonavir Risque d’échec du voriconazole (induction enzymatique) Buspirone Risque majoré de sédation Carbamazépine Risque de surdosage Evérolimus Sirolimus Risque d’augmentation d’exposition/ASC cible Disopyramide Rifabutine Risque d’apparition des effets indésirables (uvéites) Risque de majoration des effets indésirables du disopyramide ( hypoglycémies sévères, allongement du QT2 et troubles du rythme ventriculaire graves) Ebastine Risque majoré de troubles du rythme ventriculaire (sujets prédisposés) Fésotérodine Toltérodine Risque de surdosage anticholinergique (sujets métaboliseurs lents) Halofantrine Luméfantrine Risque majoré de troubles du rythme ventriculaire Immunosuppresseurs Risque d’augmentation d’exposition/ASC cible Théophylline Risque de surdosage Triazolam Risque majoré de sédation Rétinoïdes Vitamine A Molécule Niveau de contrainte CONTREINDICATION Clarithromycine ASSOCIATION DÉCONSEILLÉE CONTREINDICATION 1 Risque d’hypertension intracrânienne Érythromycine ASSOCIATION DÉCONSEILLÉE Risque : INHIBITION ENZYMATIQUE CYP450 pouvant conduire à une augmentation des concentrations plasmatiques du médicament associé et à une apparition de ses effets indésirables. MACROLIDES CONTREet APPARENTES INDICATION (Sauf Spiramycine) ASSOCIATION DÉCONSEILLÉE 8 Colchicine Risque majoré d’effets indésirables de la colchicine Ergotamine Risque d’ergotisme ou de poussées hypertensives Alcaloïdes de l’ergot de seigle dopaminergiques Risque de surdosage L’INFORMATION DENTAIRE n° 25 - 24 juin 2015 L’INFORMATION DENTAIRE n° 25 - 24 juin 2015 9 Interactions médicamenteuses Dossier l Urgences Molécule Niveau de contrainte CONTREINDICATION Association Ivabradine Risque de bradycardie excessive Pimozide Risque majoré de troubles du rythme ventriculaire Disopyramide Risque de majoration des effets indésirables du disopyramide (hypoglycémies sévères, allongement du QT et troubles du rythme ventriculaire graves) Ebastine Risque majoré de troubles du rythme ventriculaire (sujets prédisposés) Halofantrine Risque majoré de troubles du rythme ventriculaire Tacrolimus Risque d’augmentation d’exposition/ASC cible Colchicine Risque majoré d’effets indésirables de la colchicine Alcaloïdes de l’ergot de seigle vasoconstricteurs Risque d’ergotisme ou de poussées hypertensives Atorvastatine Simvastatine Risque majoré de rhabdomyolyse Mizolastine Risque majoré de troubles du rythme ventriculaire Carbamazépine Phénobarbital Primidone Millepertuis Rifampicine Risque d’échec de la télithromycine (induction enzymatique) Immunosuppresseurs Risque d’augmentation d’exposition/ASC cible Busulfan Risque d’augmentation d’exposition/ASC cible Disulfirame Risque d’épisodes de psychose aiguë ou d’état confusionnel, réversibles à l’arrêt de l’association Méthotrexate Augmentation de la toxicité hématologique du méthotrexate par inhibition de sécrétion tubulaire Josamycine ASSOCIATION DÉCONSEILLÉE Pristinamycine CONTREINDICATION CONTREINDICATION Télithromycine ASSOCIATION DÉCONSEILLÉE 1 2 MÉTRONIDAZOLE ASSOCIATION DÉCONSEILLÉE PÉNICILLINES ASSOCIATION DÉCONSEILLÉE Interactions alimentaires Effet ASC : Aire Sous Courbe (paramètre pharmacocinétique évaluant l’exposition d’un patient à un médicament). QT: représentation électrocardiographique de la dépolarisation ventriculaire et de la repolarisation qui suit. Autres types d’interactions Homéopathie Dans le cadre de nos pratiques actuelles, un praticien peut être amené à prescrire des traitements homéopathiques ou à y être confronté, car ils sont utilisés par ses patients. Ainsi, il est important de connaître les interactions pouvant avoir un impact sur ces traitements. En 10 effet, l’ensemble des traitements homéopathiques est particulièrement inhibé par la prise concomitante de menthol [8], mais aussi par celle de camomille, de verveine, de quinine, de camphre ou d’huile camphrée. Ainsi, tous les dentifrices contenant du menthol sont à proscrire et certaines marques proposent par ailleurs aujourd’hui des dentifrices sans menthol compatibles avec l’homéopathie. L’INFORMATION DENTAIRE n° 25 - 24 juin 2015 La prescription est un acte médical sous la responsabilité du praticien ayant rédigé l’ordonnance. Cela implique que les effets indésirables médicamenteux pouvant survenir au cours d’un traitement sont aussi sous la responsabilité du prescripteur. Il est donc important, lors de la rédaction d’une ordonnance, de limiter la prescription aux seules spécialités nécessaires. Par ailleurs, il est primordial de s’assurer de la bonne compréhension du patient quant à l’intérêt de son traitement, à ses modalités de prise, ainsi que des effets indésirables pouvant survenir. Enfin, un point important, mais souvent négligé, est d’informer le patient sur d’éventuelles interactions médicamenteuses pouvant exister entre son traitement et certains aliments. À titre d’exemple, une attention toute particulière devra être portée sur l’ensemble des jus de fruits [9] qui peuvent être à l’origine de fortes interactions pharmacocinétiques avec la plupart des médicaments. Ainsi, la prise de médicament avec un jus de fruit est à déconseiller. La coadministration d’antibiotiques avec des produits laitiers devra également être évitée. En effet, ces derniers sont riches en ions bivalents, comme le calcium ou le magnésium, et forment des complexes avec certains antibiotiques limitant ainsi leur absorption [9]. Lors de la prescription de métronidazole, le patient devra être informé sur le risque d’un possible effet antabuse en cas de consommation d’alcool. Celui-ci peut se caractériser par des bouffées vasomotrices au niveau du visage, des nausées, une tachycardie, une lipothymie ou encore une ataxie. Enfin, la prise simultanée d’hydroxyzine et d’alcool implique une majoration de l’effet sédatif pouvant entraîner un risque de somnolence particulièrement dangereux en cas de conduite de véhicules ou d’engins. Toutes ces précautions d’emploi devraient être signalées au patient par le praticien à la fois oralement et sur l’ordonnance délivrée. Interactions entre dispositifs médicaux Au-delà des médicaments que nous sommes amenés à prescrire, nous utilisons également un grand nombre de dispositifs médicaux qui peuvent eux aussi présenter des interactions avec les médicaments. Par exemple, l’irrigation canalaire lors du traitement endodontique implique un seringage à l’hypochlorite de sodium. Le recours à une association avec la chlorhexidine a été envisagé, car leurs actions sont synergiques L’INFORMATION DENTAIRE n° 25 - 24 juin 2015 et augmentent ainsi leurs effets propres. Cependant, il a été montré que l’association hypochlorite de sodium/ chlorhexidine est responsable de la formation de précipités colorés inactifs difficiles à éliminer et qui pourraient être carcinogènes. Après utilisation de chlorhexidine, il est donc indispensable de rincer le canal à l’eau stérile ou à l’alcool et de le sécher avec des pointes de papier [10]. Nous pouvons noter que l’irrigation à la chlorhexidine après un rinçage avec de l’acide éthylène diamine tétraacétique (EDTA) provoque également un précipité non souhaitable [11]. Enfin, il existe aussi un risque d’apparition d’érythème, de phlyctènes voire de nécroses cutanéomuqueuses en lien avec la formation de complexes caustiques en cas d’association entre la povidone iodée (Bétadine®) et les antiseptiques mercuriels (Solution aqueuse de Mercurescéine Gifrer 2%). Prévention et conduite à tenir face à une interaction médicamenteuse Pour prévenir les interactions médicamenteuses, le praticien peut faire appel à différents outils. Comme abordé précédemment, le premier outil à la disposition du praticien est une anamnèse soignée afin d’identifier les médicaments pouvant être potentiellement responsables d’interactions médicamenteuses en cas d’association. Le deuxième outil est le suivi thérapeutique pharmacologique (STP), particulièrement utile pour l’adaptation et le suivi des concentrations sanguines des médicaments à marge thérapeutique étroite. L’activité de STP est accessible dans les laboratoires de pharmacologie clinique de tous les centres hospitaliers et universitaires de France. Le troisième outil est la pharmacovigilance, activité disponible au sein des centres régionaux de pharmacovigilance (CRPV). Il est à rappeler que tout effet indésirable constaté par un professionnel de santé est à déclaration obligatoire au CRPV de la région où cet effet a été constaté. La participation des praticiens à la déclaration des effets indésirables est une garantie pour une évaluation au plus juste de la sécurité des médicaments sur le territoire national. En effet, toute nouvelle donnée sur l’effet indésirable d’un médicament (nature, fréquence, sévérité) contribuera à préciser les données de sécurité de ce médicament. Ces données réactualisées peuvent, après évaluation par l’ANSM, contribuer à compléter 11 Dossier l Urgences les informations contenues dans les résumés des caractéristiques du produit (RCP), à limiter le champ des indications de la spécialité concernée, voire à retirer cette spécialité du marché. Les fiches de déclaration d’effet indésirable, disponibles dans la partie dédiée du site de l’ANSM intitulée « Déclarer un effet indésirable », se déclinent en quatre parties relatives au patient, au déclarant (prescripteur), au médicament et à la description de l’effet indésirable. Enfin, à l’issue d’une consultation, tout prescripteur doit s’assurer de la bonne compréhension par son patient des enjeux et des risques de son traitement ainsi que des modalités de prise de ses médicaments. Dans les cas plus complexes, le praticien odontologiste pourra s’appuyer sur le réseau des autres professionnels de santé comprenant les médecins généralistes, les médecins spécialistes, les pharmaciens d’officine et les pharmacologues. Auteurs Claire Egloff Interne en médecine bucco-dentaire, Université de Lorraine, UFR Odontologie de Nancy CHU de Nancy, Service d’Odontologie Julien Scala-Bertola MCU-PH, Université de Lorraine, UMR CNRS 7365 IMoPA CHU de Nancy, Service de Pharmacologie Clinique et de Toxicologie Elise Pape AHU, Université de Lorraine, UMR CNRS 7365 IMoPA CHU de Nancy, Service de Pharmacologie Clinique et de Toxicologie Frédéric Camelot AHU, Université de Lorraine, UFR Odontologie de Nancy CHU de Nancy, Service d’Odontologie Céline Clément MCU-PH, Université de Lorraine, UFR Odontologie de Nancy CHU de Nancy, Service d’Odontologie Kazutoyo Yasukawa MCU-PH, Université de Lorraine, UFR Odontologie de Nancy CHU de Nancy, Service d’Odontologie Les auteurs ne déclarent aucun lien d’intérêt. Correspondance [email protected] 12 Conclusion Lors de toute prescription, le praticien devra respecter un certain nombre de règles et garder à l’esprit certains grands principes : - la prescription devrait être limitée au minimum de médicaments ; - l’association de deux médicaments à risque est possible si celle-ci présente une balance bénéfice/risque favorable et que les effets indésirables cliniquement significatifs peuvent être anticipés et facilement contrôlés ; - la prescription devrait être réalisée en dénomination commune internationale (DCI). Si la prescription est faite sous la forme d’un nom commercial, il faudra veiller à ce qu’il ne s’agisse pas en réalité d’une association de plusieurs médicaments pouvant conduire à des prescriptions en doublon d’un même principe actif ; - la réévaluation du rapport bénéfice-risque des différents médicaments du traitement devrait être réalisée régulièrement. bibliographie 1. 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