Les mots LilleXXL : la culture Rom à Lille Sud
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Les mots LilleXXL : la culture Rom à Lille Sud
LES ROMS OU L'ÂME DE L'EUROPE « Je suis venu en France pour ma liberté, ma sécurité et celle de mes enfants... » (Un Rom migrant) Les mots Nos populations d'Europe Occidentale utilisent de nombreux mots pour caractériser les populations Roms rencontrées sur le bord des routes ROMS ou Rroms est un terme qui signifie en langue romani « homme ». Ce nom est généralement reconnu par eux-mêmes. TSIGANES : Ce mot n'est pas utilisé par les intéressés pour parler d'eux-mêmes. Il est le mot utilisé par les non-Roms pour qualifier l'ensemble des peuples Roms. GITANS : Ce nom caractérise les Roms du sud de le France, d'Espagne, du Portugal et d'Afrique du Nord. MANOUCHES : ou SINTIS est le mot employé pour qualifier des Roms séjournant en Allemagne, en Italie du Nord et en France BOHEMIENS est le nom donné par les Français aux premiers arrivants Roms du XV ème siècle parce qu'ils arrivaient avec des lettre d'introduction du roi de Bohème. ROMANICHEL dérivé de Rom : terme péjoratif, synonyme de vagabond GADJO, au pluriel GADGE est un terme de langue romani pour désigner une personnes n'appartenant pas à la communauté Rom. Les Roms que nous rencontrons à Lille sont originaires − de l'Ex-Yougoslavie dont ils ont été chassés par les guerres civiles ayant suivi l'éclatement de ce pays après la mort de Tito − de Roumanie dont ils ont été chassés par les agressions raciste après la mort du dictateur Ceaucescu ou par les inondations du Danube − de Bulgarie, suite à ces inondations Sur l'ensemble du territoire français, ces Roms réfugiés sont estimés à moins de 10 000. LilleXXL : la culture Rom à Lille Sud QUESTIONS ? Lille a une vocation culturelle européenne. La ville a été en2004 la capitale européenne de la Culture. Dans le prolongement, l'opération Lille300 a mis l'accent sur la culture indienne. En cette année 2009, l'opération « l'Europe XXL » a pour objectif de mettre en évidence les liens entre la capitale des Flandres et les pays de l'Europe de l'Est. Roumanie, Turquie, Allemagne seront particulièrement mis en valeurs : « Un pays, un quartier... » Lille Sud abordera le thème de la culture Rom... On peut s'interroger sur le choix de Lille Sud pour le traiter. En vérité d'autres quartiers étaient aussi habilités. Mais l'élément déterminant du choix réside dans le fait qu'avant la grande explosion urbaine des années 1960, ce quartier était un point important de stationnement des Roms. Aujourd’hui l'urbanisation du quartier a supprimé ces lieux de passage qu'étaient les « remparts ». Il n'empêche que la mémoire de ces grands rassemblements reste forte chez les habitants les plus anciens et qu'il n'est pas inutile de se pencher sur ce passé... et sur le présent de ces gens venus d'ailleurs, à la recherche de liberté et de sécurité... C'est la tâche que se fixe ici la Ligue des Droits de l'Homme... Un peu d'histoire... Les Roms sont originaires du Nord de l'Inde. Aux 9ème et 10ème siècles, ils ont quitté ce territoire, sans qu'on sache pour quelle raison précise. Ils ont traversé l'Iran, l'Afghanistan pour se répandre sur l'ensemble de l'Europe Centrale (Roumanie, Bulgarie, Allemagne...), puis vers l'Italie et l'Europe de l'Ouest (France, Espagne, Portugal, Angleterre, Pays Bas...) On note leur première présence dans la région du Nord en 1421 à Arras. Porteurs de recommandations du roi de Bohème, ils reçoivent d'abord un accueil favorable en raison de leur accoutrement, des robes colorées des femmes qui lisent la « bonne aventure », des animaux dressés qui les accompagnent (ours, chevaux, singes...). Mais très rapidement ils sont victimes de rejets. Un édit de Colbert organise leur exclusion. Le génocide nazi Quand Hitler arrive au pouvoir en Allemagne dans les années 30, les Roms sont, avec les Juifs, les premières victimes du nazisme. Pourchassés, déportés dans des centres d'extermination. Pourchassés, déportés dans des centres d'extermination, 200 000 à 400 000 Roms seront victimes de la folie nazie et périront dans les fours crématoires ou des mauvais traitements. Leur stérilisation est organisée et ils sont l'objet d'expériences du docteur nazi Mengele. Après la seconde guerre mondiale En Europe de l'Est : Assimilation par sédentarisation − En Europe de l'Est, les régimes communistes qui s'installent après la guerre cherchent à assimiler les Roms par le travail et par le logement sédentaire. Les spécificités sont interdites et réprimées. Cette politique décidée pour des raisons « idéologiques » reprend des tendances constatées de manière séculaire en Europe Centrale. − Après la chute du mur de Berlin et des régimes communistes, les Roms perdent à la fois leur travail et leu logement et sont victimes de pogroms racistes. Pour échapper à l'exclusion, à la misère, au racisme, beaucoup de Roms choisissent l'exil vers l'Europe de l'Ouest. En Europe de l'Ouest : voyageurs sous contrôle... En Europe occidentale, les Roms sont marginalisés par un contrôle répressif. Ils sont contraints à détenir un carnet de circulation visé dans les gendarmeries, à s'inscrire dans les mairies, à solliciter des autorisations de séjour. La plupart de ces Roms (ou Manouches) ont la nationalité française. Ces Roms appelés aussi « Gens du voyage » sont régis par les lois Besson qui obligent les communes de plus de 5 000 habitants à entretenir un terrain d'accueil. Les départements doivent, de leur côté, établir un schéma départemental. Les réfugiés des années 1990 Une nouvelle vague de Roms de Roumanie arrive en Europe de l'Ouest au début des années 1990 : des groupes sédentarisés sous le régime communiste et victimes des pogroms qui suivent la chute du régime Ceaucescu et qui décident de reprendre la route de l'exil. D'autres Roms originaires de Yougoslavie et victimes des « purifications ethniques » cherchent aussi asile en France lors de l'éclatement de ce pays. La vie des Roms La famille La famille a un rôle privilégié chez les Roms. La vie collective, les réunions, les fêtes, la prise en charge des faibles sont prioritaires et déterminent la vie quotidienne et l'organisation des activités. Les familles sont souvent nombreuses. La famille élargie s'appelle vica. Le conseil des Anciens règle les problèmes internes dans un tribunal appelé kris... − Croyances et Culture Il y a des Roms de toutes confessions : catholiques, protestants, musulmans... Outre la langue et le sens de la famille, ce qui les unit c'est l'amour de la liberté, ce qui explique la manière pénible dont ont été vécues l'assimilation, la sédentarisation, les répressions... Musiques, danses, spectacles s'inscrivent dans la tradition Rom qui a produit de grands artistes : Yochka Nemeth, Django Reinhart, Leny Escudero, les frères Bouglione, Manitas de Plata, Mateo Maximoff... − Travail Les travaux traditionnels des Roms : chaudronnerie, étamage, orfèvrerie, vannerie, récupération, commerce, dressage d'animaux... se pratiquent de plus en plus difficilement dans une société mécanisée, industrialisée et frappée par les « crises ». Parmi les jeunes, il y de graves problèmes d'emploi, accrus par les difficultés de scolarisation. Actuellement, c'est autour de la récupération, de la mécanique que se trouvent les emplois possibles. − Les réfugiés de l'Est d'aujourd'hui... Les réfugiés venant de Roumanie, de Bulgarie ou d'ex-Yougoslavie, longtemps sédentarisés en Europe de l'Est ont gardé la langue mais ont perdu beaucoup de ces traditions familiales. Ils n'ont reprise la route que sous la contrainte de la répression... Ce sont eux que l'on retrouve dans les bidonvilles en bordure des routes, comme à la Porte de Valenciennes... − La situation dans quelques pays d'Europe Ex-Yougoslavie Entre 1941 et 1945, la Croatie fasciste extermine 26 000 Roms sur les 28 000 du pays. En Serbie, l'occupant allemand extermine les Roms dans des « chambres à gaz mobiles » et dans le camp de concentration de Nis. Entre 1991 et 1997, les Roms coincés entre les belligérants sont victimes de « purifications ethniques ». Beaucoup s'enfuient pour échapper à la mort. La France crée pour eux un statut de « réfugié territorial ». − Roumanie Jusqu'en 1856, les Roms sont esclaves en Valachie et en Moldavie. Durant la 2ème guerre mondiale, 26 000 Roms sont déportés. La plupart mourront. Exécutions massives par les « Gardes de fer ». Entre 1990 et 1995, on relève plus de 100 pogroms. Des milliers de logements sont incendiés. D'où l'exil... − Allemagne En 1935, les lois raciales de Hitler préparent l'extermination organisée. Depuis 1990, les Roms réfugiés d'Europe de l'Est sont victimes d'exactions répétées : agressions, incendies de foyers... − Italie 120 à 150 000 Roms vivent actuellement en Italie. La plupart ont la nationalité roumaine. Les autres viennent de l'ex-Yougoslavie. Quelques-uns ont la nationalité italienne. Ils vivent en grande majorité dans une très grande pauvreté dans des camps qui sont des ghettos ethniques. Le gouvernement de droite dirigé par Berlusconi s'en prend particulièrement à eux : expulsions, destruction de baraques et de caravanes, fichage, prise d'empreintes, etc. − Les Roms : « les plus européens d'entre nous... » Les 4 à 12 millions de Roms vivant en Europe n'ont pas droit à une existence normale. Ils sont parqués dans des zones qui les mettent en marge de tout et le fossé qui les sépare de la modernité se creuse au lieu de se réduire. Selon l'UNICEF, 84% des Roms en Bulgarie, 88% en Roumanie et 91% en Hongrie vivent en-dessous du seuil de pauvreté. Les Roms qui sont « les plus européens d'entre nous » selon l'écrivain allemand Gunther Gras ont besoin d'être reconnus comme une des composantes à part entière de l'Europe. Des représentants au parlement En 1971, des représentants des Roms ont décidé de montrer qu'ils ne formaient qu'un seul peuple en adoptant un nom unique « Rom » auprès de l'ONU et de tous les gouvernements. L'Union rom internationale adopte un drapeau : une roue rouge sur fond bleu et vert symbolisant le ciel et l'herbe... Des représentants Roms au Parlement européen tentent de faire reconnaître leurs droits mais cela se fait avec beaucoup de difficultés. Un rapport publié en juillet 2008 critique « l'application lacunaire » des « politiques adéquates » et réprimande les États pour la lenteur des progrès réalisés. − Un sommet décevant Le 16 septembre 2008 s'est tenu au Parlement de Bruxelles le premier sommet européen consacré aux Roms et a réuni les représentants des institutions européennes, des États et de la société civile. Cette assemblée s'est penchée sur les discriminations de plus en plus aiguës dont font l'objet les Roms – notamment en Italie où des procédés utilisés par les autorités rappellent les heures les plus sombres de l'histoire européenne. Les résultats de ce sommet ont été décevants... L'action dans les grandes agglomérations d'Europe s'impose donc plus que jamais. − Les Roms au Sud de Lille Avant les grandes transformations survenues à Lille Sud dans les années 1960, le quartier était séparé de Wazemmes par les « remparts » ou « fortifications ». Elles s'étendaient sur les quelques centaines de mètres, entre la rue de Marquillies et les boulevards de Metz et de Strasbourg alors occupés par le « train de ceinture » reliant la Gare Saint Sauveur aux brasseries situées entre Esquermes et les Bois Blancs, via Moulins. Ce train de ceinture longeait les jardins ouvriers qui s'étendaient sur l'espace où se sont construits les HLM du Faubourd de Béthune. Les remparts occupaient la partie aujourd’hui prise par le périphérique, les espaces vertes et la route de l'actuel boulevard de Metz. Un tramway – le tramway D – traversait ces remparts jusqu'à la barrière de Lille-Sud, rue Marquillies, qui marquait la véritable entrée dans le quartier. Celui-ci était limité rue Balzac à la hauteur de la rue Baudin. Au-delà on ne trouvait que quatre ou cinq maisons, deux dépôts de ferraille et des jardins ouvriers qui s'étendaient jusqu'à la Briqueterie, les 400 Maisons et les rues Lazare Garreau et de la Prévoyance. Un espace herbeux investi par les « Romanichels » L'espace herbeux des fortifications était un espace investi par les Roms. Leurs « roulottes » tirées par des chevaux s'étendaient sur l'ensemble de l'espace entre le Faubourg de Béthune et Moulins Lille. Les femmes « gitanes » lisaient dans les lignes de la main et faisaient du porte à porte ; les hommes faisaient le rempaillage, la chaudronnerie, les enfants couraient librement sur l'espace vallonné et s'aventuraient parfois dans les rues de Lille Sud, Wazemes, Moulins ou Loos. Beaucoup de ces familles ont l'un des leurs enterré au cimetière du Sud. Ce qui explique que le secteur de Lille Sud soir resté un pôle rituel de passage de ces familles Roms. Le bouche à oreille qui fait partie de leur culture explique aussi l'attraction exercée par cette partie de Lille sur les réfugiés plus récents.