LETTRE OUVERTE AUX ACTIONNAIRES DE GROUPE SUD

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LETTRE OUVERTE AUX ACTIONNAIRES DE GROUPE SUD
Bordeaux le 30 septembre 2011
Jean‐Luc VALEGEAS
actionnaire représentant la SIRP
membre du conseil de surveillance de GSO SA
Petit rappel : La SIRP est une société fondatrice du journal Sud Ouest.
M. Jean de Szolnock
Président du Conseil
de surveillance de GSO SA
LETTRE OUVERTE AUX ACTIONNAIRES
DE GROUPE SUD OUEST SA
Monsieur le Président,
Voilà 42 ans que je suis dans cette entreprise et je suis à la tête de la SIRP depuis la mort
prématurée de mon prédécesseur, Yvon Ratier, en 1994. Aujourd’hui il faut que certaines
choses soient dites car si tout va mal, ce n’est pas la faute des salariés et donc ce n’est pas à
eux à en payer le prix.
Déjà début 1994, année restée dans les annales, la SIRP avait eu un contentieux avec Jean‐
François Lemoîne qui avait menacé Yvon Ratier de lui faire vendre sa maison. Il m’avait
assuré que c’était un malentendu que ces propos avaient dépassé sa pensée et que nous
réglerions tout ça au retour de M. Ratier. Malheureusement celui‐ci n’est jamais revenu. Il
est décédé en octobre pendant ses vacances.
A l’époque j’avais rappelé à M. J.‐F. Lemoîne la légitimité du représentant de la SIRP, qui
avait été élu par le personnel, alors que lui même, était héritier de M. Jacques Lemoîne qui
avait bénéficié d’un vote du Comité d’entreprise (en 1946) pour obtenir le journal. Parfois lui
même arrivait à dire qu’il n’était pas le propriétaire du journal mais le dépositaire. La
légitimité n’est pas la même.
Revenons à ce qui se passe aujourd’hui, ou plus exactement ce qui se passe depuis quelques
années. Jean‐François Lemoîne disparu, ce sont ses sœur, épouse, oncle par alliance, nièces
et neveux qui ont pris le pouvoir au sein de la SOCIBOG (Société bordelaise de gestion,
société de la famille Lemoîne qui détient à peu près 80 % du capital).
Autant Jean‐François fut un vrai patron de presse, et même si nous avons eu quelques
échanges un peu vifs et quelques différents notoires, je dois reconnaître en lui un visionnaire
et un excellent chef d’entreprise dans sa gestion (excepté en 1994). Autant aujourd’hui vous,
sa famille, n’avez pas la même pertinence dans vos choix.
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Rappelons‐nous du départ de Pierre Jeantet pour le journal « Le Monde » et la nomination
d’Olivier Faguer à la tête de GSO SA. Costume trop grand pour lui ont dit certains. Peut‐être,
mais lorsque celui‐ci, poussé par certains des actionnaires familiaux qui, majoritaires, ont
voulu se faire plaisir en achetant le journal « Midi Libre », croyant benoîtement que
M. Baylet, encerclé, allait tomber dans leurs rets, je me suis élevé contre cet achat insensé,
non seulement au nom de la SIRP, mais tout simplement au nom du sens commun.
Vous n’en avez bien entendu pas tenu compte, l’actionnaire minoritaire que je suis, simple
représentant du personnel, ouvrier de surcroît, n’allait tout de même pas vous empêcher de
réaliser vos projets. Vous êtes majoritaires et vous avez voté pour l’achat, sans partenaire.
En cela vous avez gravement compromis l’équilibre économique du groupe.
Lorsque la conjoncture économique s’est retournée vous avez fait sauter le « fusible ». Exit
M. Faguer. Mais vous les actionnaires majoritaires qui avez voté pour cet achat, vous êtes
toujours là.
Vous faites revenir Pierre Jeantet et la machine continue. Lequel Pierre Jeantet d’ailleurs
trouve que Groupe Sud Ouest SA a acheté le groupe Midi Libre trop cher, alors que c’est lui
qui l’a vendu…
La conjoncture économique est de plus en plus morose. En conseil de surveillance, dès 2009,
je fais une déclaration au nom de la SIRP pour vous inciter à revendre immédiatement « Midi
Libre » ce qui nous aurait sauvé et permis de rembourser immédiatement la dette senior.
Mais là non plus, aucune écoute de l’actionnaire minoritaire que je représente, vous ne
voulez pas perdre d’argent sur une revente d’un titre que vous avez payé 90 millions
d’euros. Vous vous entêtez. On voit où ça a amené le groupe.
‐
Liquidation de la S3G (plus de 1 000 emplois au tapis).
‐
Les banques nous tiennent à la gorge et vous leur cédez 12 % du capital de GSO SA et
12 % du capital de SAPESO en ORA (obligations remboursables en actions)
‐
Vente à perte du centre d’impression Rotogaronne
‐
23 mesures à SAPESO pour « redresser les comptes »
Evidemment tout cela ne suffit pas pour se désendetter. Alors vous pillez la SAJIG comme
vous avez pillé la SOCHAGMI (qui pourtant devait être « la poire pour la soif pour SAPESO »
au cas où (dixit J.‐F. Lemoîne). Les dividendes de ces sociétés passent par SAPESO mais
remontent immédiatement au groupe. Comme l’a si bien dit un des membres de la famille
majoritaire : « Si nous prenons des dividendes malgré les comptes déficitaires c’est pour
lancer un signal fort de notre confiance dans le redressement du groupe. » Quel cynisme !
Aujourd’hui nous sommes devant des mesures draconiennes et des craintes de
licenciements, à cause de votre entêtement et de votre gestion pour le moins hasardeuse. Le
président du Directoire de la SAPESO a annoncé récemment 8 mesures d’austérité
supplémentaires. Il faut maintenant que SAPESO, paye l’addition.
2
Ce même président qui en Conseil de surveillance trouve que si les instances représentant le
personnel font appel d’une décision de justice c’est « perdre son temps, son énergie et de
l’argent ». Quant à lui il n’hésite pas, par contre, à faire un procès en diffamation à une
instance nationale représentant les salariés et à son secrétaire général. Et en quels termes.
Mais là bien évidemment ce n’est pas perdre du temps, de l’énergie et de l’argent (qui
appartient au groupe).
Souvenez‐vous tout de même que c’est grâce à l’argent tiré du travail du personnel de
SAPESO que le groupe s’est monté.
Souvenez‐vous que les seuls qui ont investi dans cette entreprise ce sont ceux qui y ont
travaillé.
Nous avions un immeuble dont nous étions propriétaires, nous voilà locataire avec un crédit
bail qui plombe le résultat de SAPESO de plus d’un million d’euros par an (ce n’était pas cela
qui était prévu au départ).
Voilà ce que je voulais vous rappeler, parce qu’il y a 42 ans, quand j’ai commencé à travailler
dans cette entreprise, peu d’entre vous savaient ce qu’était le journal, vous en étiez même,
pour certains, jusqu’à ignorer son existence. Pour la plupart d’entre vous, vous avez trouvé
le journal dans la corbeille de mariage. Certains vont très certainement me traiter de
dinosaure ou autre petite gentillesse semblable, style ringard.
Mais si être ringard c’est connaître son passé jusqu’à son présent et en tirer des leçons pour
l’avenir, alors je trouve que c’est un compliment et nombre d’entre nous devraient s’en
inspirer.
Revenons à l’essentiel. Pour moi et pour les personnes travaillant dans ce groupe, il est
INADMISSIBLE que vos erreurs de gestion retombent sur les salariés. Vous avez cassé ce que
des générations ont permis de construire grâce à leur travail. Ce n’est pas à eux de payer la
réparation ni une quelconque addition.
Prenez vos responsabilités car si nous sommes aujourd’hui en difficulté, oh bien sûr c’est la
faute d’internet, c’est la faute des jeunes qui ne lisent plus le journal, c’est la faute à la
dématérialisation, etc. Mais c’est surtout votre faute, vos énormes erreurs de gestion et de
vision sur l’avenir qui nous conduisent, à nous retrouver dépendant des banques, alors que
nous avions près de 200 millions d’euros devant nous.
Mesdames et messieurs les actionnaires, je vous le répète ce n’est pas aux salariés de payer.
La balle est dans votre camp.
J’espère que vous voudrez bien transmettre cette lettre aux autres actionnaires du groupe,
dans cette attente, veuillez recevoir, Monsieur le Président, mes meilleures salutations.
Pour le bureau de la SIRP,
le président du conseil de gérance,
Jean‐Luc VALEGEAS.
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